Le Courrier de la Transplantation - Volume IX - n
o 4 - octobre-novembre-décembre 2009
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Mise
au point
de la tension artérielle dans le groupe qui recevait du tacro-
limus. M. Lucey et al. (16) ont également montré, dans une
étude multicentrique ayant inclus 1 065 transplantés hépatiques
entre 1997 et 1998, que la pression artérielle systolique était
plus basse dans le groupe traité par tacrolimus, avec, pour
corollaire, un recours moins important aux antihypertenseurs.
M. Stegal et al. (10) ont comparé l’incidence de l’HTA de
patients sans stéroïdes et recevant une association soit de ciclos-
porine + mycophénolate mofétil (MMF), soit de tacrolimus +
MMF. Ils ont constaté une incidence plus élevée d’HTA dans
le groupe prenant l’association ciclosporine + MMF (30,3 %)
que dans celui recevant celle de tacrolimus + MMF (12 %).
Après TH, la pression artérielle doit être surveillée et l’HTA
doit être traitée avec les mêmes cibles thérapeutiques que
celles attribuées à la population générale (120/80 mmHg).
Pour les patients restant hypertendus malgré un change-
ment de mode de vie (perte de poids, activité physique), il
conviendra d’ajouter un antihypertenseur ou de modier le
protocole IS. Le sevrage puis l’arrêt des corticoïdes sont à
envisager en premier lieu, suivis d’une minimisation de la
dose de l’anticalcineurine, MMF en monothérapie ou conver-
sion vers les inhibiteurs de mTOR (mammalian Target Or
Rapamycin). Pour les patients hypertendus sans protéinurie, le
premier choix sera un anticalcique. En cas de protéinurie, on
utilisera un inhibiteur de l’enzyme de conversion (IEC) ou un
antagoniste des récepteurs de l’angiotensine II. L’utilisation
d’un IEC associé à des diurétiques doit être prudente en cas
d’insufsance rénale. Certains cas nécessitent une thérapie
combinée : on pourra ajouter d’autres molécules, comme les
α-bloquants si besoin. D’autres alternatives sont possibles, tels
les β-bloquants, seuls ou en association avec un thiazidique,
ou un α et/ou β-bloquant comme le carvédilol.
DIABÈTE POST-TH
L’incidence rapportée dans la littérature varie entre 7,2 % et
28 % (10-14, 17-21). M. Kahlili et al. (22), dans une étude
comportant 555 transplantés hépatiques sans diabète préexis-
tant et recrutés dans 3 centres américains, retrouvent 209 cas
de diabète avéré (nécessité d’antidiabétiques oraux et/ou
d’insulinothérapie) : 28,3 % présentaient un diabète transitoire,
9,4 % présentaient un diabète persistant. Dans cette étude,
les facteurs prédictifs de survenue d’un diabète persistant
étaient l’infection par le virus de l’hépatite C (VHC), l’âge
plus élevé et un traitement par tacrolimus.
Entre 5 et 50 % des patients candidats à une greffe sont diabé-
tiques en prégreffe. L’étude multicentrique et prospective
LIS2T, qui a inclus 495 patients de 17 pays dans 50 centres,
a retrouvé une incidence du diabète prégreffe de 22 % (23).
Le risque de développer un diabète se majore progressivement
tout au long de la greffe, en particulier lors des premiers
mois, mais il faut signaler que l’hyperglycémie peut être
transitoire lors de cette période.
FACTEURS DE RISQUE DU DIABÈTE POSTGREFFE
Les facteurs de risque sont génétiques mais aussi environne-
mentaux, liés à l’âge, à l’origine ethnique, à l’obésité, aux
infections VHC et CMV, aux traitements IS et à l’utilisation
de bolus de stéroïdes.
Les inhibiteurs de la calcineurine (ICN) et les stéroïdes exer-
cent leur effet hyperglycémiant par 2 mécanismes : l’insulino-
résistance et la toxicité directe sur les cellules β.
Le diabète est plus fréquent chez le patient transplanté hépa-
tique pour VHC (VHC+ : diabète dans 33 à 64 % des cas,
VHC– : diabète dans 5 à 28 % des cas) [19, 21, 23].
Plusieurs études révèlent que l’incidence du diabète est
supérieure chez les patients sous tacrolimus. G. Lévy et al.
(24), dans une étude randomisée comparant ciclosporine
(250 patients) versus tacrolimus (245 patients) et tenant
compte du statut VHC, trouvaient une différence signicative
à 9 mois post-TH entre les groupes VHC+ et VHC– : 14 % des
patients sous tacrolimus avaient développé un diabète de novo
(New Onset Diabetes Mellitus [NODM]) versus 6 % de ceux
sous ciclosporine (p < 0,05). O. Heisel et al. (25), dans une
revue systématique de la littérature portant sur 16 études pros-
pectives randomisées et comparant l’incidence du NODM chez
des patients adultes ayant reçu une greffe d’organe, consta-
taient une incidence du diabète supérieure dans le groupe
traité par tacrolimus (15,9 %) versus ciclosporine (4,9 %).
La présence d’un diabète pré-TH (10 à 30 % des patients
cirrhotiques) est associée à une surmortalité globale, secondaire
à une majoration des complications cardio-vasculaires infec-
tieuses, neurologiques, néphrologiques et ophtalmologiques.
Dans une étude cas-contrôle, P. John et al. (26) ont montré que
la mortalité à 1 et 2 ans post-TH était comparable entre sujets
diabétiques et non diabétiques. En revanche, la mortalité à
5 ans était signicativement plus élevée chez les diabétiques
(66,6 % versus 22,6 %).
Les critères de diagnostic pour le diabète post-TH sont ceux
préconisés par G. Villanueva et al. (27) :
● patients symptomatiques : glycémie > 11,1 mmol/l ;
● patients asymptomatiques :
• glycémie > 11,1 mmol/l lors de 2 prélèvements
• ou une glycémie à jeun > 7 mmol/l
• ou un test d’hyperglycémie provoquée > 11,1 mmol/l.
Sur 347 patients TH traités par tacrolimus + stéroïdes versus
351 patients traités par tacrolimus + daclizumab, O. Boillot et
al. (28) ont montré une diminution de l’incidence du diabète,
qui passait de 15,3 % à 5,7 %. G.P. Pageaux et al. (29) ont
montré une diminution drastique du recours au traitement
antidiabétique oral dans un groupe de 84 patients traités par
ciclosporine + basiliximab + stéroïdes arrêtés précocement
(J14), versus un groupe de 90 patients ayant bénécié du même
traitement mais sans l’arrêt précoce des stéroïdes. Le taux de
recours aux antidiabétiques oraux est passé de 11 % à 2 %.