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Le Courrier de colo-proctologie (II) - n° 2 - juin 2001
Dossier thématique
FORMER
sation. Elle varie entre une séance hebdoma-
daire et une séance toutes les 3 semaines.
•Laser CO2et laser Nd-YAG
Le principal intérêt du laser réside dans la maî-
trise du degré et de la profondeur de la des-
truction cellulaire. Tout comme la cryothéra-
pie, il s’agit d’un traitement qui nécessite une
bonne expérience du thérapeute. Le laser per-
met de traiter les lésions externes et endoca-
nalaires internes sous contrôle visuel, à la
loupe ou sous colpopéniscopie. La principale
indication du laser Nd-YAG est le traitement
des lésions urétrales. Il nécessite au moins une
anesthésie locale par injection de Xylocaïne®,
voire une anesthésie générale en cas de lésions
profuses ou multifocales.
•Excision chirurgicale mécanique
Le traitement ablatif chirurgical, s’il est rare-
ment employé en première intention, peut être
éventuellement justifié devant des lésions
uniques ou multiples associées à d’autres loca-
lisations lors d’un traitement global de lésions
ano-génitales. Il peut également se justifier en
cas de lésions profuses endoprépuciales chez
un sujet non circoncis. Dans ce cas, la cir-
concision permet l’ablation de toutes les
lésions ou de la majorité d’entre elles. Les
complications sont celles de toute anesthésie
ou de tout acte chirurgical (hémorragies, infec-
tions, troubles de cicatrisation).
•Électrocautérisation
Elle est employée essentiellement pour les
lésions profuses dans les structures ne disposant
pas de laser. Les résultats dépendent là encore
de l’expérience de l’opérateur. Cette technique
nécessite une anesthésie locale pour les lésions
externes, voire une anesthésie générale pour les
lésions internes, étendues ou multifocales.
TRAITEMENTS
IMMUNOMODULATEURS
En l’absence de traitement antiviral spécifique
efficace contre les HPV et compte tenu des
évolutions régressives spontanées possibles
des lésions, une approche immunomodulatrice
a été envisagée depuis de nombreuses années.
Celle-ci vise à stimuler l’immunité locale de
façon non spécifique. Les résultats obtenus
avec l’interféron sont très décevants dans ce
domaine. La mise au point plus récente d’un
immunomodulateur topique génère de espoirs
beaucoup plus solides dans le traitement des
lésions génitales dues aux HPV.
•Les interférons
Nous ne ferons que citer ce type d’immuno-
thérapie actuellement non justifié dans l’arse-
nal thérapeutique pour des lésions péniennes
en raison de son coût et de ses effets systé-
miques. Par ailleurs, dans le cadre plus géné-
ral des infections anogénitales à HPV, les taux
de réponse thérapeutique ne sont pas supé-
rieurs à ceux des traitement locaux.
•L’imiquimod
L’efficacité insuffisante des méthodes cyto-
toxiques et destructrices et surtout le fort taux
de récidive observé avec ces méthodes ont fait
envisager des stratégies thérapeutiques immu-
nomodulatrices topiques. L’imiquimod est un
composé chimique capable d’induire in vitro
localement la production d’interférons alpha,
de TNF et d’autres cytokines par les mono-
cytes macrophages (IL-1, IL-6, IL-8, IL-10,
IL-1 récepteur antagoniste, GCSF et GMCSF).
Sur des cultures kératinocytaires, l’imiquimod
induit la production d’IFNγ, d’IL-6 et d’IL-8.
De cette production résulte un effet immuno-
stimulant, antiviral et antitumoral. Ses effets
ne sont donc pas limités à ceux décrits avec
l’IFNα. Les modalités d’application sont très
codifiées : une application 3 fois par semaine
d’une petite quantité d’imiquimod sous forme
de crème à 5 % (Aldara®) le soir au coucher,
suivie d’un rinçage soigneux le matin pendant
une durée maximale de 16 semaines. Ce trai-
tement a démontré son efficacité dans des
études méthodologiquement rigoureuses. La
principale d’entre elles (4) démontre l’effica-
cité de ce traitement avec un taux d’éradica-
tion des condylomes de 67 % chez les femmes
traitées pour condylomes vulvaires. Le taux
d’éradication est plus faible chez l’homme
traité pour condylome pénien (40 %). Cepen-
dant, dans les premières études, la majorité des
sujets étaient circoncis. Compte tenu de la fré-
quence des localisations balanoprépuciales, on
attend un meilleur taux de réponse chez
l’homme non circoncis.
Le traitement est responsable d’un érythème
local chez 67 % des patients, sévère dans
moins de 6 % des cas. Il s’agit d’un traitement
réservé aux lésions externes, inefficace en cas
d’immunodépression sévère. Il reste à évaluer
par exemple chez les sujets infectés par le
VIH, en cas de contrôle du virus VIH. Le taux
de récidive observée avec ce traitement semble
inférieur à celui observé avec les autres trai-
tements (13 %) à 3 mois.
TRAITEMENTS ANTIVIRAUX
À l’heure actuelle, on ne dispose pas de traite-
ment antiviral efficace sur les papilloma-virus.
ATTITUDE PRATIQUE
Les indications thérapeutiques sont fonction
du type de lésions, de leur localisation, de l’ex-
périence du clinicien, de l’accessibilité des ins-
truments thérapeutiques, des souhaits et de la
disponibilité du patient, ainsi que de son niveau
de compréhension des modalités thérapeu-
tiques. La surveillance clinique reste néces-
saire et l’association de techniques ablatives
destructrices à effet immédiat à un traitement
auto-appliqué est tout à fait envisageable.
Il est important de rassurer les patients présen-
tant des lésions péniennes et de bien préciser que
le délai d’incubation de telles lésions est émi-
nemment variable (de quelques semaines à
quelques mois), ce qui évitera dans bon nombre
de cas des conséquences psychologiques très
délétères sur le couple. Le degré de contagiosité
des lésions est très variable : élevé dans le cas
des condylomes acuminés, beaucoup plus faible
dans le cadre de lésions planes. Certaines loca-
lisations sont transmissibles malgré le préserva-
tif (lésions pubiennes, périnéales, scrotales…).
La durée de la protection par préservatifs, après
éradication des lésions au sein d’un couple, n’est
pas codifiée. La normalité de deux examens cli-
niques pratiqués à 2 ou 3 mois d’intervalle par
un clinicien expérimenté paraît raisonnable.
Mots clés. Dysplasie – Cancer –
Condylomes.
RÉFÉRENCES
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