ÉDITORIAL
“
Sauver la “sécu” en généralisant
la prise en charge à 100 %!
Save social security by extending the 100%
repayment!
André Grimaldi
Service de diabétologie, hôpital
de la Pitié-Salpêtrière, Paris.
© La Lettre du Neurologue 2015;
3(XIX):47-8.
Voilà une proposition à première vue paradoxale alors que
lesrecettes de la Sécurité sociale liées à l’emploi (pour unpeu
plus de 50 %) reculent parallèlement à la montée du chômage,
etque les dépenses de l’Assurance maladie continuent d’augmenter
enraison du vieillissement de la population et du progrès médical. Notre
système desanté − hérité du compromis historique de 1945 − est un
système mixte comportant un coût de gestion exorbitant et un défaut
congénital de régulation. En effet, contrairement à ce qu’on entend
souvent dire, cesystème, de soins plus que de santé, n’est pas l’application
du programme du Conseil national de la Résistance maislerésultat
d’un double compromis entre l’État et les syndicats delamédecine
libérale, et entre laSécurité sociale et les mutuelles. On a concédé à
la Mutualité, pourlarallier à la cause de la Sécurité sociale, le ticket
modérateur de 20 % quipar définition n’a jamais rien“modéré” puisqu’il
est remboursé. Ainsi,pour chaque patient, pourchaque acte ou pres-
cription médicale, ilya 2cofinanceurs etdonc 2dossiers et 2procé-
dures de remboursement, avec 400 assurances privées, mutualistes
ou non. Si l’on ajoute le coût des18agences sanitaires employant
24 000personnes(2,5milliards paran), on comprend pourquoi nous
dépensons pour la gestion dusystème de santé, selon les chiffres sous-
évalués de l’OCDE, 7 %dubudget de la santé soit plus de 16milliards
par an. Ledoubledelamoyenne des pays de l’OCDE ! La polémique
actuelle sur la question dutiers payant a ainsi2dimensions. D’abord,
une dimension idéologique, puisque selon lecredo libéral, le fait que le
client n’ait plus à avancer l’argent (qui lui est remboursé secondairement),
induit inévitablement desabus. Ensuite, une dimension simplement
pragmatique, lemédecin nevoulant pas avoir à gérer lors de ses
consultations lesliens des malades avec leurs assureurs. Quoi qu’il en
soit, ce système mixte non régulé adonné satisfaction à tout le monde
pendant les Trente Glorieuses, maisàl’heure delaréduction des dépenses
publiques, chaque groupe professionnel pense que les autres devraient
faire un effort. Le plus simple pour ungouvernement est de privatiser les
dépenses. En effet, à y regarder de plus près, les États-Unis, l’Angleterre et
la France ont la même dépense publique de santé, soit environ 9 % du PIB,
auxquels il faut ajouter ladépense privée, soit 9 % du PIB pour les États-
Unis, moins de 1 % pourl’Angleterre, et 3 % pour la France. La dépense
totale est donc de 18 % pour les États-Unis, de moins de 10 % pour
4 | La Lettre du Cardiologue • No 485 - mai 2015
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