L Traitement périopératoire du cancer du rectum : place des traitements

228 | La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue ̐ Vol. XIV - n° 6 - novembre-décembre 2011
DOSSIER THÉMATIQUE
Cancer du rectum
T. Boussaha
Traitement périopératoire
du cancer du rectum :
place des traitements
néoadjuvant et adjuvant
Perioperative rectal cancer treatment: place of neoadju-
vant and adjuvant treatments
Tarek Boussaha*, Jean-Baptiste Bachet**, Julien Taïeb*
* Service d’oncologie digestive,
hôpital européen Georges-Pompi-
dou, APHP.
** Service d’hépato-gastro-entéro-
logie, groupement hospitalier de la
Pitié-Salpêtrière, APHP.
Le rectum est un organe très différent du côlon
de par sa situation anatomique confinée dans
le pelvis, à proximité de l’appareil génito-
urinaire, des plexus nerveux, des vaisseaux sanguins
et lymphatiques locorégionaux et du sphincter anal.
Tout processus tumoral se développant à cet endroit
peut donc être à l’origine de manifestations cliniques
invalidantes et difficiles à prendre en charge.
Dans les années 1980, la chirurgie seule des tumeurs
transmurales (stade II) ou avec atteinte ganglion-
naire (stade III) était associée à un taux de rechute
locale supérieur à 50 % (1) et à une survie médiane
de 12 à 18 mois (2). De par sa fréquence et les diffi-
cultés de sa prise en charge, la diminution du taux
de récidive locale a pendant de nombreuses années
été l’un des premiers objectifs des essais adjuvants
ou néoadjuvants menés dans le cancer du rectum.
Parallèlement au développement des traitements
périopératoires, la chirurgie carcinologique des
cancers du rectum a fait de nombreux progrès.
Lexérèse complète du mésorectum est devenue
un standard reconnu, et la marge d’envahissement
circonférentielle un facteur pronostique du risque
de récidive. Pour améliorer la qualité de l’expertise
du chirurgien, elle-même facteur pronostique, des
programmes de formation ont été mis en place dans
de nombreux pays.
Aujourd’hui, l‘association d’un traitement périopéra-
toire et d’une chirurgie carcinologique avec exérèse
du mésorectum a permis de diminuer le risque de
récidive locale à moins de 10 % dans les dernières
études publiées. Cependant, malgré ces progrès, le
risque de récidive métastatique reste encore élevé,
de l’ordre de 20 à 60 % selon le stade initial (3). Le
bénéfice d’une chimiothérapie adjuvante dans le
cancer du rectum n’a pas été clairement démontré,
contrairement au cancer du côlon, mais on trouve
des arguments en sa faveur dans la littérature. Son
indication repose sur des recommandations d’experts
et doit être discutée au cas par cas en réunion de
concertation pluridisciplinaire.
Dans cette mise au point, nous rapporterons les
standards actuels des traitements néoadjuvant
et adjuvant dans le cancer du rectum, les options
éventuelles et les stratégies actuellement en cours
d’évaluation.
Les standards en néoadjuvant
Traitement de référence : radiothérapie
longue associée à la chimiothérapie
(tableau I)
Dans l’objectif d’améliorer la radiosensibilité des
cancers du rectum, la chimiothérapie a été asso-
ciée au schéma long de radiothérapie. Les premières
données provenant de petites séries américaines
avaient montré l’efficacité d’une telle approche
sur la fonction sphinctérienne (4, 5). La Fédération
francophone de cancérologie digestive a évalué
cette association dans un essai de phase III (FFCD
9203) qui avait randomisé 733 patients atteints
d’une tumeur résécable classée T3-T4 entre 1 bras
La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue ̐ Vol. XIV - n° 6 - novembre-décembre 2011 | 229
Points forts
»
L’association d’un traitement néoadjuvant et de l’excision totale du mésorectum a permis de diminuer le
taux de rechute locale de plus de 50 % historiquement à moins de 10 % dans les dernières études publiées.
»La radiochimiothérapie néoadjuvante à 50,4 Gy avec capécitabine à 1 650 mg/m2/j 5 jours par semaine
est la nouvelle référence dans les cancers de stade II ou III. Ce schéma permet de diminuer le risque de
rechute locale mais n’augmente pas la survie globale.
»Le traitement néoadjuvant est indiqué pour les tumeurs du bas et du moyen rectum de stade T > 2 ou
avec envahissement ganglionnaire.
»
Le bénéfice d’une chimiothérapie adjuvante dans le cancer du rectum n’a pas été formellement démontré,
mais il existe des arguments dans la littérature en sa faveur. Elle doit être discutée au cas par cas en réunion
de concertation pluridisciplinaire.
Mots-clés
Cancer du rectum
Radiochimiothérapie
Chimiothérapie
adjuvante
Highlights
»
The combination of neoadju-
vant treatment and total meso-
rectal excision has reduced
the rate of local recurrence
over 50% historically to less
than 10% in recent published
studies.
»
Neoadjuvant radioche-
motherapy to 50.4 Gy with
capecitabine 1650 mg/m2/
day 5 days a week is the new
reference in stage II or III. It
reduces the risk of local recur-
rence but does not increase
overall survival.
»
The benefit of adjuvant
chemotherapy in rectal cancer
has not been formally demon-
strated but there are arguments
for it in the literature. It must be
discussed in multidisciplinary
meeting.
Keywords
Rectal neoplasms
Chemoradiotherapy
Postoperative chemotherapy
radiothérapie à 45 Gy préopératoire seule et 1 bras
radiothérapie associée au 5-fluoro-uracite (5-FU)
à 350 mg/m
2
/j plus leucovorine 20 mg/m
2
/j à la
1
re
et à la 5
e
semaine. La chirurgie était réalisée 3
à 10 semaines après. Le traitement combiné avait
diminué le taux de récidive locale de moitié (8,1
versus 16,5 % ; p < 0,05) et augmenté signifi-
cativement le taux de réponse pathologique
complète (11,4 versus 3,6 % ; p < 0,05) au prix d’une
toxicité augmentée, principalement digestive et
hématologique (grades 3 et 4 : 14,6 versus 2,7 % ;
p < 0,05). Paradoxalement, le taux de préservation
sphinctérienne n’était pas amélioré dans cette étude,
ni la survie globale à 5 ans (6).
Dans un but similaire, l’essai européen 22 921 de
l’European Organisation for Research and Treatment
of Cancer (EORTC) avait randomisé 1 011 patients
dans 4 bras : radiothérapie préopératoire à 45 Gy en
25 fractions avec ou sans 4 cycles de chimiothérapie
postopératoire (bras 1 et 3) versus radiochimio-
thérapie (45 Gy, 5-FU 350 mg/m
2
/j + leucovorine
20 mg/m2/j aux semaines 1 et 5) préopératoire
avec ou sans chimiothérapie postopératoire (bras 2
et 4). Le deuxième but était d’évaluer le bénéfice
que pouvait apporter la chimiothérapie adjuvante
par apport à la surveillance. Les premiers résultats
de tolérance dans le bras radiothérapie et radio-
chimiothérapie ont montré une majoration de la
diarrhée par le traitement combiné (34,3 versus
17,3 % ; p < 0,005) alors que les autres effets
indésirables sont restés globalement inchangés.
Lobservance et la faisabilité de la chirurgie étaient
similaires dans les 2 groupes. En termes d’efficacité,
le traitement combiné a clairement entraîné une
réduction de la taille tumorale et une réduction du
degré d’invasion pariétale et ganglionnaire significa-
tivement plus marquées (p < 0,0001 et p < 0,001,
respectivement). Les données de survie nont pas
montré de différence en termes de survie globale
chez les patients ayant reçu la chimiothérapie avant
(p = 0,84) ou après l’opération (p = 0,12). L’incidence
cumulative à 5 ans de la récidive locale était de 8,7,
9,6 et 7,6 % dans les groupes chimiothérapie préo-
pératoire, chimiothérapie postopératoire et chimio-
thérapie pré- et postopératoire, respectivement. Le
taux de récidive locale était le plus important dans
le groupe n’ayant pas reçu de chimiothérapie (17 % ;
p = 0,002). Ainsi, la chimiothérapie par 5-FU confère
un bénéfice sur la récidive locale, qu’elle soit admi-
nistrée avant et/ou après l’opération (7). Enfin, la
Tableau I. Données des principales études évaluant la radiochimiothérapie préopératoire.
Gérard J.P. JCO 2006
(6)
Bosset J.F. EJC 2004, JCO 2005, NEJM 2006
(7)
Sauer R. NEJM 2004
(8)
Nombre
de patients
733 1011 823
Objectif
principal
Survie globale Survie globale Survie globale
Bras de
traitement
RT na RCT na RT na RCT na RT na +
CT a
RCT na +
CT a
RCT na RCT a
Toxicité
aiguë
> grade 2 (%)
2,7 14,6
(p < 0,05)
17,3 34,3
(p < 0,005)*
27 40
(p < 0,001)
Réponse
histologique
complète (%)
3,6 11,4
(p < 0,05)
5,3 13,7
(p < 0,0001)
––80
(p< 0,001)
Récidive
locale
à 5 ans (%)
16,5 8,1
(p < 0,05)
17,1 8,7 9,6 7,6
(p = 0,002)
6 13
(p = 0,006)
Survie
globale
à 5 ans (%)
67,9 67,4
(p = 0,684)
RT versus RCT : 64,8 versus 65,8 (p = 0,84)
CTa versus pas de CTa : 65,8 versus 63,2 (p = 0,12)
76 74
(p = 0,80)
*Les autres effets indésirables sont inchangés.
RT : radiothérapie ; RCT : radiochimiothérapie ; na : néoadjuvante ; a : adjuvante.
230 | La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue ̐ Vol. XIV - n° 6 - novembre-décembre 2011
DOSSIER THÉMATIQUE
Cancer du rectum Traitement périopératoire ducancer du rectum :
place des traitements néoadjuvant et adjuvant
radiochimiothérapie préopératoire a également été
comparée à la radiochimiothérapie postopératoire
dans l’essai CAO/ARO/AIO-94 du German Rectal
Cancer Group (8). Même si l’objectif principal de
l’étude n’était pas atteint (survie globale à 5 ans :
76 % dans le groupe préopératoire versus 74% dans
le groupe postopératoire ; p = 0,80), on notait 2 fois
moins de récidive locale à 5 ans dans le groupe
radiochimiothérapie préopératoire (13 versus 6 % ;
p = 0,006), principalement grâce à une meilleure
tolérance du protocole néoadjuvant.
Ces 3 études pivots ont démontré les résultats
bénéfiques sur la récidive locale de la radiochimio-
thérapie préopératoire dans le traitement du cancer
du rectum localement avancé (tableau I, p. 229).
L’association radiochimiothérapie concomitante
(ARCC) associant 50,4 Gy et 5-FU est actuellement
le standard thérapeutique. Récemment, 2 études
ont permis de valider la capécitabine comme une
alternative orale satisfaisante au 5-FU intraveineux,
simplifiant le traitement pour les patients (9, 10).
Option : radiothérapie exclusive
préopératoire
Des essais de phase III plus anciens avaient montré
l’intérêt de la radiothérapie néoadjuvante exclu-
sive en termes d’efficacité et de tolérance chez les
patients atteints d’un cancer du rectum localement
avancé.
Dans une étude suédoise qui fait référence,
1 168 patients avaient été randomisés entre un bras
court de 25 Gy fractionnés en 5 Gy par jour pendant
5 jours (appelé schéma 5 × 5) suivi une semaine
après de la résection chirurgicale (n = 583), et un
bras chirurgie seule (n = 585). Lexcision totale du
mésorectum nétait pas systématique, et les résultats
avaient été communiqués après un suivi médian
de plus de 5 ans. Le schéma 5 × 5 a non seulement
réduit le risque de récidive locale de plus de 50 %
(11 versus 27 % ; p < 0,001), mais également amélioré
la survie globale de 21 % à 5 ans par rapport à la
chirurgie seule (58 versus 48 % ; p = 0,004), avec
un HR de 0,79 (IC
95
: 0,66-0,92). En revanche, les
taux de récidive métastatique (23 versus 25 %)
n’étaient pas différents dans les 2 bras (11). Une
fois l’exérèse totale du mésorectum généralisée,
la question qui se posait était de savoir si la radio-
thérapie apportait toujours un bénéfice à la chirurgie
du cancer du rectum. Le Dutch Colorectal Cancer
Group a reproduit dans son essai le schéma suédois
en s’assurant que l’exérèse totale du mésorectum
soit systématiquement réalisée. Mille huit cent
soixante et un patients atteints d’un cancer du
rectum, majoritairement de stade II ou III, ont été
inclus, et les premiers résultats ont été publiés après
une médiane de suivi de 2 ans. Comme dans l’étude
suédoise, la radiothérapie apportait un bénéfice
significatif à la chirurgie sur le risque de récidive
locale (2,4 versus 8,2 % ; p < 0,001), mais pas sur la
survie globale (82 versus 81,8 % ; p = 0,84) ni sur la
récidive métastatique (14,8 versus 16,8 % ; p = 0,87).
Après analyse par sous-groupes, la radiothérapie
5 × 5 n’apportait pas de bénéfice en cas de tumeur
du haut rectum (à plus de 10 cm de la marge anale)
[p = 0,17] ni en cas de cancer de stade I (p = 0,15)
ou IV (p = 0,25) [12]. Une mise à jour des données
après plus de 12 ans de suivi a confirmé le bénéfice
de la radiothérapie sur le risque de récidive locale
(5 versus 11 % ; p < 0,0001) [13]. La radiothérapie
exclusive préopératoire a également été comparée
à la radiochimiothérapie postopératoire sélective
dans un essai anglais de phase III. Après un suivi
médian de 4 ans, le taux de récidive locale était
significativement moins élevé chez les patients du
bras radiothérapie exclusive (27 versus 72 %), alors
que la survie globale n’était pas différente dans les
2 bras (HR : 0,91 ; IC95 : 0,73-1,13 ; p = 0,40) [2].
En résumé, si la radiochimiothérapie concomitante
est le standard actuel dans de nombreux pays
comme la France, il est clair que la radiothérapie
exclusive garde une place dans le traitement préo-
pératoire des cancers du rectum localement avancés
du moyen et du bas rectum. Même si aucune étude
à ce jour n’a directement comparé ces 2 schémas,
la radiothérapie exclusive est une alternative en cas
de contre-indication ou de mauvaise tolérance de la
chimiothérapie (notamment chez les sujets âgés).
La radiothérapie courte sera préférée si la tumeur
est d’emblée résécable (distance tumeur-fascia
mésorectal > 2 mm sur l’IRM initiale) ; dans le cas
contraire, une radiothérapie longue sans chimio-
thérapie pourra être proposée.
Les traitements néoadjuvants
actuellement évalués
Intensification de la radiochimiothérapie
par l’oxaliplatine (tableau II)
Suite aux essais de phase II qui ont montré la faisabi-
lité de l’association 5-FU et oxaliplatine avec la radio-
thérapie (14,15), plusieurs groupes se sont intéressés
La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue ̐ Vol. XIV - n° 6 - novembre-décembre 2011 | 231
DOSSIER THÉMATIQUE
au renforcement du schéma de radiochimiothérapie
préopératoire des cancers du rectum. Dans l’essai de
phase III ACCORD 12/0405-Prodige 2 (16), Gérard
et al. ont comparé un bras radiothérapie à 45 Gy/25
fractions + capécitabine 800 mg/m2 5 jours sur 7
(Cap 45) et un bras intensifié à 50 Gy/25 fractions +
capécitabine à la même dose, 5 jours par semaine +
oxaliplatine 50 mg/m
2
par semaine (Capox 50) chez
des patients ayant un cancer du rectum de stade
T3-4M0. Cinq cent quatre-vingt-dix-huit patients
ont été inclus (299 patients dans chaque bras). L’ob-
jectif principal était le taux de réponse histologique
complète (ypCR = pathological complete response).
Après un suivi médian de 12 mois (1-40 mois), le
schéma Capox 50 n’avait pas amélioré de façon
significative le taux de réponse histologique
complète (19,2 versus 13,9 % ; p = 0,09). La diffé-
rence était significative si l’on prenait en compte les
pièces de résection où persistaient quelques cellules
résiduelles (score 3) [39,4 versus 8,9 % ; p = 0,008].
Les marges de résection circonférentielle étaient plus
fréquemment négatives dans le bras Capox (90 versus
80 % dans le groupe contrôle). Les données de réci-
dive locale et de survie ne sont pas encore disponibles.
Comme on pouvait s’y attendre, le schéma intensifié
a entraîné plus de toxicité de grades 3 et 4 (25,4
versus 10,9 % ; p < 0,001), principalement à type de
diarrhée (12,6 versus 3,2 %). Ces résultats assez déce-
vants sont également retrouvés dans l’essai italien
de phase III STAR (Studio Terapia Adjuvante Rette),
où l’ajout de l’oxaliplatine n’améliorait pas signifi-
cativement la réponse tumorale histologique (16 %
de réponse histologique complète dans les 2 bras)
alors que la toxicité était majorée (17).
L’intérêt de rajouter l’oxaliplatine a également été
évalué par les groupes américain du NSABP et alle-
mand du LBA. Les premiers résultats ont été commu-
niqués au congrès de l’American Society of Clinical
Oncology (ASCO) cette année. Lessai du NSABP (9)
à 4 bras avec un plan factoriel a comparé la capéci-
tabine au 5-FU et, surtout, évalué l’intérêt de l’ajout
de l’oxaliplatine à l’association radiothérapie-fluoro-
pyrimidine. L’objectif principal, dont les données ne
sont pas encore disponibles, était la récidive locale.
Les premiers résultats concernant la réponse histo-
logique complète et la préservation sphinctérienne
sont décevants, alors que la toxicité digestive est
majorée comme dans les premiers essais.
Lessai allemand (18) a présenté de son côté des
données plus optimistes. L’ajout de l’oxaliplatine
(hebdomadaire : 50 mg/m
2
à J1, J8, J22 et J29) au
schéma habituel de radiothérapie à 50,4 Gy et
5-FU (250 mg/m
2
/j de J1 à J14 puis de J22 à J35)
n’a pas accru la toxicité et a permis d’augmenter
significativement le taux de réponse histologique
complète (16,5 versus 12,8 % ; p = 0,035). Les
données de survie sans maladie (objectif principal)
ne sont pas encore disponibles.
En attendant les résultats définitifs, l’oxaliplatine
ne paraît pas augmenter de façon suffisante l’effi-
cacité thérapeutique de la radiochimiothérapie
associée au 5-FU en termes de réduction du stade
et de réponse histologique complète. De plus,
toutes les études sont concordantes pour noter
une augmentation significative des toxicités en
cas d’ajout de l’oxaliplatine. Le standard actuel
en situation néoadjuvante reste donc l’association
radiothérapie-fluoropyrimidine.
Tableau II. Principales études évaluant l’oxaliplatine en association avec la radiochimiothérapie à base de fluoropyrimidine.
ACCORD12
(Gérard J.P. JCO 2010)
[16]
STAR-01
(Ascheele C. JCO 2011)
[17]
NSABP R04
(Roh M.S. Abstr. 3503.
ASCO 2011)
[9]
CAO/ARO/AIO-04
(Rödel C. LBA 3505.
ASCO 2011)
[18]
Nombres de patients 598 747 598 1266
Objectif principal Réponse histologique
complète
Survie globale Rechute locale* Survie sans maladie
Traitement
préopératoire
RCT capécitabine +
oxaliplatine
RCT 5-FU +
oxaliplatine
RCT 5-FU ou capécita-
bine + oxaliplatine
RCT 5-FU +
oxaliplatine
Chimiothérapie
adjuvante Au choix du centre 5-FU-leucovorine ? FOLFOX6 modifié
Principaux résultats –Réponse histologique
complète non améliorée
(19,2 versus 13,9 %,
p=0,09)
–Oxaliplatine
plus toxique
–Réponse histologique
complète non améliorée
(16 versus 16 %,
p=0,904)
–Oxaliplatine
plus toxique
–Réponse histologique
non améliorée
–Oxaliplatine
plus toxique (diarrhée)
–Réponse histologique
complète améliorée
(16,5 versus 12,8 %,
p=0,035)**
–Oxaliplatine
pas plus toxique
*Les données de récidive locale ne sont pas encore disponibles.
**Les données de survie sans maladie ne sont pas encore disponibles.
232 | La Lettre de l’Hépato-Gastroentérologue ̐ Vol. XIV - n° 6 - novembre-décembre 2011
DOSSIER THÉMATIQUE
Cancer du rectum Traitement périopératoire ducancer du rectum :
place des traitements néoadjuvant et adjuvant
Intensification de la radiochimiothérapie
par les thérapies ciblées
Une analyse poolée de 3 essais prospectifs de phase I
et II a évalué l’apport du cétuximab au schéma de
radiochimiothérapie à base d’oxaliplatine et de
capécitabine sur la réponse tumorale (19). L’ajout du
cétuximab était associé à une réduction significative
du score de régression tumorale histologique par
rapport au 5-FU seul (p = 0,0035) mais sans efficacité
sur la réponse histologique complète significative
(9 versus 16 %). La tolérance était correcte, avec des
toxicités aiguës et des complications postopératoires
non majorées. Il est trop tôt pour se prononcer sur
l’efficacité réelle de l’ajout du cétuximab dans cette
indication. Des études de phase III sont nécessaires.
Les investigations concernant le bévacizumab sont
également au stade de la phase II. L’association
bévacizumab et radiochimiothérapie à base d’une
fluoropyrimidine a permis d’obtenir une réponse
histologique complète intéressante dans 15 à 32 %
des cas sans majoration de la toxicité habituelle
de la radiochimiothérapie (20, 21). Comme pour le
cétuximab, ces résultats préliminaires nécessitent
d’être confirmés par des études de phase III.
Intérêt de la chimiothérapie
néoadjuvante
L’intérêt d’évaluer une chimiothérapie d’induction
avant la radiochimiothérapie a initialement été
motivé par les mauvais résultats de tolérance et
d’observance de la chimiothérapie postopératoire
dans de nombreux essais de phases II et III (6-8,
22). Ladministration d’une chimiothérapie néo-
adjuvante présente plusieurs avantages. Grâce à
une meilleure dose-intensité, la réduction de la
masse tumorale pourrait être majorée permettant
d’améliorer sa résécabilité (particulièrement les
lésions T4). Elle pourrait également agir sur d’éven-
tuelles micrométastases au stade précoce de la
maladie tumorale et diminuer ainsi le risque de
récidive métastatique. Les données préliminaires
de cette approche chez 77 patients atteints d’un
cancer du rectum de mauvais pronostic ayant reçu
l’association capécitabine-oxaliplatine (Capox)
ont montré que la résection R0 a pu être obtenue
chez la grande majorité des patients (96 %) avec
une réponse histologique complète dans 24 % des
cas (23). Suite à ces résultats encourageants, un
essai espagnol de phase II randomisé a évalué l’ad-
ministration d’une chimiothérapie de type Capox
en préopératoire avant la radiochimiothérapie ou
en postopératoire. Au total, 108 patients ont été
inclus avec comme objectif principal le taux de
réponse histologique complète. Il n’y avait pas de
différence entre les 2 bras en termes de réponse
histologique complète (Capox en postopératoire :
13,5 %, en préopératoire : 14,3 %), de résection
R0 (87 et 86 %) et de survie sans rechute et globale.
La tolérance et l’observance étaient en revanche
significativement meilleures dans le bras chimio-
thérapie préopératoire (24). Nous attendons par
ailleurs les résultats de l’essai randomisé de phase II
INOVA qui a comparé l’efficacité et la tolérance de
2 stratégies néoadjuvantes, radiochimiothérapie
par 5-FU-bévacizumab précédée ou non d’une
chimiothérapie de type Folfox4-bévacizumab, et
de l’essai de phase III PRODIGE 23 qui va comparer
un bras radiochimiothérapie et un bras chimio-
thérapie première Folfirinox puis radiochimiothé-
rapie dans le cancer du rectum localement avancé.
Certains experts vont encore plus loin et souhaitent
évaluer une chimiothérapie agressive néoadjuvante
de type Folfirinox en remplacement de l’association
radiochimiothérapeutique standard actuellement
recommandée.
Traitements adjuvants
Pas de preuve absolue
mais des arguments dans la littérature
concernant la chimiothérapie adjuvante
Les données publiées des essais historiques, des
méta-analyses et de l’étude QUASAR suggèrent
qu’une chimiothérapie adjuvante par fluoro-
pyrimidines (intraveineuse ou orale), en l’absence
de traitement préopératoire, permet de diminuer
le risque de récidive métastatique après chirurgie
à visée curative d’un cancer du rectum de stade II
ou III. Ce bénéfice semble similaire à celui observé
dans le cancer du côlon. Dans l’étude QUASAR (25,
26), 29 % des 3 239 patients inclus avaient un cancer
du rectum. L’objectif principal était de comparer
une chimiothérapie adjuvante à base de 5-FU en
bolus et acide folinique (schéma du Roswell Park)
à la surveillance. Après une médiane de suivi de
5,5 ans, les risques relatifs de décès spécifique du
cancer colorectal et de récidive étaient de 0,81 (IC
95
:
0,68-0,96 ; p = 0,01) et de 0,78 (IC
95
: 0,67-0,91 ;
p = 0,001), respectivement. En analyse par sous-
groupes, les risques relatifs de décès et de récidive
étaient de 0,77 (IC
95
: 0,54-1,00 ; p = 0,05) et de
1 / 8 100%
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