dossier thématique L’échographie dynamique de contraste Dynamic contrast enhanced ultrasonography » L’échographie dynamique de contraste (DCE-US) permet une analyse dynamique de la perfusion tumorale ainsi qu’une évaluation du flux et du volume vasculaires. » L’intérêt de la DCE-US pour l’évaluation des traitements anti- angiogéniques a été pris en compte dans les recommandations européennes et internationales. » L’aire sous la courbe est le paramètre le plus pertinent pour l’évaluation des traitements. Mots-clés : Imagerie fonctionnelle − Échographie dynamique de contraste − Volume vasculaire − Traitements antiangiogéniques. Dynamic contrast enhanced ultrasonography (DCE-US) allows to perform a dynamic analysis of tumoral perfusion and to calculate blood flow and blood volume. The interest of DCE-US to evaluate antiangiogenic treatments was taken into account in European and international guidelines. Area under curve is the most relevant parameter to evaluate antiangiogenic treatments. Keywords: Functional imaging − Dynamic contrast enhanced ultrasonography − Contrast blood volume − Antiangiogenic treatments. être mesurés qu’avec les 2 premières techniques. Ces techniques d’imagerie fonctionnelle ne sont actuellement pas validées dans la version 1.1 des RECIST (3). L’échographie de contraste a initialement montré son potentiel pour prédire précocement la réponse dans les tumeurs stromales gastro-intestinales (GIST) et le cancer du rein à partir de l’évaluation qualitative dans 3 études (4-6). Puis, plus récemment, une quantification objective paramétrique (7) a été mise au point pour que cette technique soit reconnue, validée et incluse de façon systématique dans les essais thérapeutiques, faisant intervenir le terme de DCE-US (Dynamic Contrast Enhanced UltraSonography, “échographie dynamique de contraste”) [8]. Le rehaussement obtenu à partir des données brutes après injection en bolus de microbulles permet d’objectiver clairement la prise de contraste lors de l’enregistrement de la courbe de perfusion tumorale (9). Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - no 3 - juillet-août-septembre 2013 * IRCIV, institut Gustave-Roussy, IR4M, UMR8081, université de Paris, Villejuif. 113 h i g h l i g ht s L a réponse tumorale objective évaluée par l’imagerie sur 2 examens successifs est l’un des paramètres de la décision de poursuivre ou d’arrêter les thérapeutiques. Pour les essais de phases I et II, cette réponse tumorale est le principal critère d’évaluation. Les thérapeutiques ciblées ont montré que la diminution de la taille de la tumeur comme seul critère n’était pas suffisant. En effet, des patients considérés comme non répondeurs aux thérapeutiques sur ce seul critère ont une survie équivalente à celle des patients évalués comme répondeurs. De nouvelles méthodes d’imagerie fonctionnelle, fondées sur l’évaluation initiale et les modifications de l’angiogenèse tumorale sous traitement, sont désormais indispensables pour estimer correctement la réponse tumorale. Ces techniques pourraient être un atout majeur pour le développement de la médecine personnalisée, car elles permettraient de distinguer très tôt les bons des mauvais répondeurs, avant les critères morphologiques traditionnels. Le nombre croissant de patients atteints de cancer traités avec de nouvelles thérapies antiangiogéniques, associé à des enjeux éthiques et économiques, propulse l’imagerie fonctionnelle au premier plan dans la prise en charge. Il est donc de mieux en mieux reconnu que les règles morphologiques internationales (OMS ou RECIST) [1, 2], qui définissent les méthodes de mesure des tumeurs solides et les critères de réponse, ne sont plus adaptées pour ces nouvelles thérapies. Plusieurs techniques – comme le scanner de perfusion, l’IRM dynamique (DCE-MRI) ou l’échographie de contraste – sont maintenant proposées. On peut caractériser la néovascularisation d’une tumeur en étudiant différents paramètres dynamiques après l’injection d’un agent de contraste. L’évaluation du flux sanguin perfusant la tumeur, du volume sanguin tumoral correspondant au pourcentage de vaisseaux par rapport au volume tumoral ou de la diffusion de l’agent de contraste dans l’interstitium sont des indicateurs pertinents calculés à partir de l’acquisition de la courbe de prise de contraste au cours du temps sur plusieurs minutes avec une résolution temporelle très variable d’une technique à l’autre. Le flux sanguin, le volume sanguin tissulaire et le temps de transit moyen peuvent être calculés à partir de l’IRM fonctionnelle (IRMf), du scanner de perfusion et de l’échographie dynamique de contraste. En revanche, la perméabilité capillaire et le volume interstitiel ne peuvent P o i nt s f o rt s N. Lassau* Nouvelles imageries en urologie dossier thématique B A D C Figure. Patient avec néphrectomie en 2000 : carcinome rénal à cellules claires, de stade T2 N0, grade II. En 2004, micronodules dans les poumons ; en 2005, ganglions lymphatiques. Début d’un traitement par interféron-bévacizumab en avril 2005, puis sorafénib, évérolimus, sunitinib. Début d’un nouveau traitement en décembre 2012 : axitinib (5 mg × 2/j). Résultats de la DCE-US : lésion pancréatique de 50 mm. Patient toujours sous traitement en septembre 2013. A. DCE-US et CT-scan à l’inclusion. B. DCE-US après 2 semaines. C. DCE-US après 1 mois. D. CT–scan après 2 mois. E. Contrast uptake curves of DCe-US at baseline D15 and one month. 114 E Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - no 3 - juillet-août-septembre 2013 L’échographie dynamique de contraste Ce type de quantification est actuellement réalisé en préclinique et ce de façon très précoce, dès les premières minutes, pour l’évaluation de l’efficacité des nouvelles thérapies. Il est également utilisé dans plusieurs essais thérapeutiques menés chez l’homme dès les premiers jours du traitement (10). Après modélisation des courbes de perfusion, il est possible de calculer différents paramètres, tels que l’intensité maximale du pic, le temps de transit moyen, le coefficient de la pente et l’AUC (Area Under the Curve). Il est important de rappeler que les agents de contraste utilisés en ultrasons ont la particularité d’être uniquement intravasculaires, ce qui rend la modélisation des courbes plus simple qu’avec la DCE-MRI ; de plus, la relation avec les concentrations utilisées est linéaire. Mais, en contrepartie, il n’est pas possible de calculer le coefficient de perméabilité. Quatre études réalisées par N. Lassau et al. chez des patients souffrant d’un cancer du rein métastatique, de GIST métastatiques ou de carcinome hépatocellulaire (CHC) [11-14] ont montré que l’ASC (correspondant au volume vasculaire) est un paramètre significativement corrélé à la réponse RECIST. L’étude des CHC traités par Nouvelles de bévacizumab montre que ce paramètre est également significativement corrélé à la survie globale (SG) [p = 0,002]. La mise en place de l’étude multicentrique pilotée par l’institut Gustave-Roussy (19 centres et 65 radiologues), soutenue par l’INCa (STIC 2006 DCE-US), a standardisé et diffusé cette technique (15) afin de déterminer le paramètre le plus robuste, mais également le timing le plus adéquat pour confirmer ou infirmer l’efficacité des traitements antiangiogéniques. Au total, 539 patients métastatiques (rein, côlon, sein, GIST, mélanomes) ou porteurs de CHC ont été inclus et traités majoritairement par bévacizumab, sorafénib, sunitinib et imatinib ; les résultats ont confirmé l’intérêt de l’ASC comme biomarqueur. Il a été démontré qu’une diminution de 40 % de l’ASC à 1 mois était non seulement significativement corrélée à la survie sans progression mais également à la SG (16). Des recommandations (17) européennes publiées en 2012 ont proposé cette technique pour le suivi des patients en particulier dans le cancer du rein (figure) [niveau 1b selon les recommandations d’Oxford]. Les recommandations internationales ont également inclus cette indication (18). ■ l’industri e L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Retrouvez l’intégralité des références bibliographiques sur www.edimark.fr pharma ceutique Communiqués des conférences de presse, symposiums, manifestations, organisés par l’industrie pharmaceutique Radium 223 dichloride et métastases osseuses de cancer prostatique Le New England Journal of Medicine (1) vient de publier les résultats de l’étude pivotale de phase III ALSYMPCA (ALpharadin in SYMptomatic Prostate CAncer). Celle-ci compare, chez 921 patients issus de plus de 100 centres de 19 pays, l’efficacité du radium 223 dichloride (Bayer HealthCare) au placebo ; le traitement (ou son absence) était associé aux meilleurs soins de référence (best standard of care) et s’adressait à des patients souffrant d’un cancer de la prostate résistant à la castration (CRPC), avec des métastases osseuses symptomatiques, mais indemnes a priori de maladie métastatique viscérale. La survie globale, critère principal, est significativement augmentée, que les patients aient ou non été traités en première intention par docétaxel, avec un risque de décès diminué de 30,5 % (HR = 0,695). L’efficacité du radium 223 dichloride est confirmée par les critères secondaires, tel le délai avant un premier événement squelettique symptomatique qui oblige à un traitement antalgique, par exemple (15,6 mois, versus 9,8 mois pour le placebo). En outre, le médicament retarde la progression des phosphatases alcalines et du taux de PSA, 2 des principaux biomarqueurs des CRPC avec des métastases osseuses. Les effets indésirables, dont la plupart sont légers à modérés, sont moindres avec le radium 223 dichloride qu’avec le placebo. Enfin, 56,5 % des patients traités par le radium et 62,5 % des patients ayant reçu un placebo ont développé des effets secondaires de grade 3 ou 4, hématologiques essentiellement. B. Blond D’après le communiqué de presse de Bayer HealthCare du 17 juillet 2013. 1. Parker C, Nilsson S, Heinrich D et al.; ALSYMPCA Investigators. Alpha emitter radium-223 and survival in metastatic prostate cancer. N Engl J Med 2013;369(3):213-23. Astellas, le pari de l’innovation ciblée Le laboratoire japonais, avec 5 nouvelles molécules lancées en 5 ans sur le marché européen et 45 molécules en développement (phase I à phase III), dont 10 au moins en oncologie, recueille les fruits des investissements octroyés (16 à 18 % de son chiffre d’affaires) à ses 9 centres de recherche internationaux. Les 2 médicaments qui contribuent actuellement le plus à la croissance du laboratoire sont le Prograf®, un immunosuppresseur destiné à la prévention et au traitement du rejet des greffes, et le Vesicare®, pour le traitement des symptômes liés à l’hyperactivité vésicale. Né de la fusion entre Yamanouchi et Fujisawa en 2005, le groupe est aujourd’hui le deuxième laboratoire japonais et figure parmi les 20 premiers laboratoires pharmaceutiques au monde. Il s’est spécialisé dans des domaines thérapeutiques où existent des besoins médicaux non couverts. Après l’urologie et la transplantation, l’oncologie devrait être sa troisième aire de développement stratégique, avec des thérapies ciblées (des anticorps monoclonaux) sur la base de facteurs génétiques, et ce, grâce à une politique d’acquisition (celle d’Agensys et de produits à un stade avancé de développement comme l’enzalutamide pour le traitement du cancer de la prostate métastatique) et d’alliances technologiques (avec Regeneron Pharmaceuticals et MorphoSys AG). Par ailleurs, Astellas vient de mettre à la disposition des médecins hospitaliers le premier antibiotique de la nouvelle classe des macrocycliques, la fidaxomicine (Dificlir®), indiquée chez l’adulte pour le traitement des infections à Clostridium difficile. Il a été reconnu fin 2012 qu’elle fournit une amélioration du service médical rendu (ASMR) de niveau 3. B. Blond D’après le dossier de presse du laboratoire Astellas du 20 juin 2013. Nouvelles imageries en urologie dossier thématique L’échographie dynamique de contraste Dynamic contrast enhanced ultrasonography N. Lassau R é f ér en c es (suite) 1. WHO. Handbook for reporting results of cancer treatment. Geneva: Offset publication, 1979. 2. Therasse P, Arbuck SG, Eisenhauer EA et al. New guidelines to evaluate the response to treatment in solid tumors. J Natl Cancer Inst 2000;92(3):205-16. 3. Eisenhauer EA, Therasse P, Bogaerts J et al. New response evaluation criteria in solid tumours: revised RECIST guideline (version 1.1). Eur J Cancer 2009;45(2):228-47. 4. Lamuraglia M, Escudier B, Chami L et al. To predict progres- sion-free survival and overall survival in metastatic renal cancer treated with sorafenib: pilot study using dynamic contrastenhanced Doppler ultrasound. Eur J Cancer 2006;42(15):2472-9. 5. Escudier B, Lassau N, Angevin E et al. Phase I trial of sorafenib in combination with IFNα-2a in patients with unresectable and/or metastatic renal cell carcinoma or malignant melanoma. Clin Cancer Res 2007;13(6):1801-9. 6. Lassau N, Lamuraglia M, Chami L et al. Gastrointestinal stromal tumors treated with imatinib: monitoring response with contrastenhanced sonography. AJR Am J Roentgenol 2006;187(5):1267-73. 7. Peronneau P, Lassau N, Leguerney I et al. Contrast ultrasono- graphy: necessity of linear data processing for the quantification of tumor vascularization. Ultraschall Med 2010;31(4):370-8. II 8. Dietrich CF, Averkiou MA, Correas JM et al. An EFSUMB 14. Lazar V, Lassau N, Meurice G et al. Sorafenib plus dacarbazine 9. Cosgrove D, Lassau N. Imaging of perfusion using ultra- 15. Lassau N, Chapotot L, Benatsou B et al. Standardization introduction into Dynamic Contrast-Enhanced Ultrasound (DCE-US) for quantification of tumour perfusion. Ultraschall Med 2012;33(4):344-51. sound. Eur J Nucl Med Mol Imaging 2010;37(Suppl.1):S65-85. 10. Lassau N, Chami L, Chebil M et al. Dynamic contrastenhanced ultrasonography (DCE-US) and antiangiogenic treatments. Discov Med 2011;11(56):18-24. 11. Lassau N, Koscielny S, Albiges L et al. Metastatic renal cell carcinoma treated with sunitinib: early evaluation of treatment response using dynamic contrast-enhanced ultrasonography. Clin Cancer Res 2010;16(4):1216-25. 12. Lassau N, Chami L, Koscielny S et al. Quantitative functio- nal imaging by dynamic contrast enhanced ultrasonography (DCE-US) in GIST patients treated with masatinib. Invest New Drugs 2012;30(2):765-71. 13. Lassau N, Koscielny S, Chami L et al. Advanced hepato- cellular carcinoma: early evaluation of response to bevacizumab therapy at dynamic contrast-enhanced US with quantificationpreliminary results. Radiology 2011;258(1):291-300. in solid tumors: a phase I study with dynamic contrast-enhanced ultrasonography and genomic analysis of sequential tumor biopsy samples. Invest New Drugs 2013 (Epub ahead of print). of dynamic contrast-enhanced ultrasound for the evaluation of antiangiogenic therapies: the French Multicenter Support for Innovative and Expensive Techniques Study. Invest Radiol 2012; 47(12):711-6. 16. Lassau N, Vilgrain V, Taieb S et al. Evaluation with DCE-US of antiangiogenic treatments in 539 patients allowing the selection of one surrogate marker correlated to overall survival. J Clin Oncol 2012;30(Suppl.), abstr. 4618. 17. Piscaglia F, Nolsøe C, Dietrich CF et al. The EFSUMB guide- lines and recommendations on the clinical practice of contrast enhanced ultrasound (CEUS): update 2011 on non-hepatic applications. Ultraschall Med 2012;33(1):33-59. 18. Claudon M, Dietrich CF, Choi BI et al. Guidelines and good clinical practice recommendations for contrast enhanced ultrasound (CEUS) in the liver – update 2012: a WFUMB-EFSUMB initiative in cooperation with representatives of AFSUMB, AIUM, ASUM, FLAUS and ICUS. Ultrasound Med Biol 2013;39(2):187-210. Correspondances en Onco-Urologie - Vol. IV - no 3 - juillet-août-septembre 2013