L2 Mathématiques Structures algébriques et arithmétique Année

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L2 Mathématiques
Structures algébriques et arithmétique
Année 2008-2009
CHAPITRE IV
Polynômes à une ou plusieurs indéterminées
I
- Définition de A[X] pour
Généralisation.
A
anneau commutatif unitaire.
II - Propriétés arithmétiques de
A[X].
III - Fonctions polynômes. Racines.
IV - Compléments sur les polynômes irréductibles,
construction de corps (non rédigé).
I - Définitions de A[X] pour A anneau commutatif unitaire. Généralisation.
Dans tout le I on désigne par A un anneau commutatif unitaire.
1. Définition de A[X].
Donner un polynôme en une indéterminée à coefficients dans A revient à donner la famille de
ses coefficients et non la “fonction polynomiale associée”. On va voir les définitions précises
et plus loin le lien entre ces deux notions.
Définition. On appelle polynôme en une indéterminée à coefficients dans A une suite
(a0 , a1 , . . . , an . . .) d’éléments de A n’ayant qu’un nombre fini de termes non nuls.
On note A[X] l’ensemble obtenu.
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Théorème 1 et définition.
Pour tout (P, Q) ∈ A[X] × A[X] avec
P = (a0 , a1 , . . .)
Q = (b0 , b1 , . . .).
On définit P + Q = (a0 + b0 , a1 + b1 . . .)
P.Q = (c0 , . . . , cn , . . .) avec ∀n ∈ N cn =
ap bq
p+q=n
p≥0,q≥0
Alors les lois + · obtenues sur A[X] sont des lois de composition interne et font de A[X]
un anneau commutatif unitaire.
Cet anneau est appelé anneau des polynômes en une indéterminée et à coefficients
dans A. Désormais A[X] désignera cet anneau.
Démonstration.
1) Soient P = (a0 , . . .) et Q = (b0 , . . .) dans A[X].
Alors ∃N0 , N0 ∈ N tel que n > N0 ⇒ an = 0 et bn = 0.
On a donc pour n > N0 , an + bn = 0 d’où P + Q ∈ A[X]
pour n > 2N0 , cn = 0.
(en effet si p + q = n, alors soit p > N0 soit q > N0 ).
Donc on a P Q ∈ A[X].
2) La vérification que A[X] admet une structure d’anneau commutatif unitaire pour ces
lois est immédiate et laissée en exercice. Il suffit d’utiliser les propriétés d’anneau de A.
L’élément neutre de l’addition est (0, 0, . . .).
L’opposé de P = (a0 , a1 , . . .) est −P = (−a0 , −a1 , . . .). L’élément neutre de la multiplication est (1, 0, 0, . . .).
Proposition 2. Avec les notations du théorème 1, l’application A → A[X] qui à chaque
a0 ∈ A associe (a0 , 0, . . .) est un morphisme injectif d’anneaux unitaires.
Notations.
1) On identifie désormais A a un sous-anneau de A[X], on notera a0 l’élément (a0 , 0, . . .).
On dira que “a0 est une constante.”
On note évidemment 0 l’élément (0, 0, . . .)
1 l’élément (1, 0, . . .).
On a donc a0 · (b0 , . . .) = (a0 , 0, . . .)(b0 , . . .) = (a0 b0 , a0 b1 , . . .).
2) On notera X l’élément (0, 1, 0 . . .).
On vérifie qu’on a
X 2 = (0, 0, 1, 0 . . .)
..
.
X n = (0, . . . , 0, 1, 0 . . .) où le 1 est en (n + 1)ème composante.
47
Théorème 3. Avec ces notations.
Tout élément P peut s’écrire de façon unique sous la forme :
an X n avec an ∈ A
n∈N
an = 0 à partir d’un certain rang.
Les termes a0 , . . . sont les coefficients du polynôme.
Démonstration.
N0
N0
an X = a0 (1, 0, . . .) + a1 (0, 1, . . .) + . . . + aN0 (0 . . . 1, . . .)
n
n=0
= (a0 , a1 , . . . aN0 , 0 . . . 0)
Définition. On dira que X est l’indéterminée de l’anneau A[X].
Remarque. Si A est un corps, il est immédiat que l’application A × A[X] → A[X]
a, P → a.P
fait de A[X] un A-espace vectoriel. Le théorème précédent s’interprète alors comme le fait
que 1, X, X 2 , . . . est une base de cet espace vectoriel (qui est de dimension infinie).
Pour tout N0 ∈ N∗ fixé, AN0 [X] = {P = (a0 , . . . aN0 , 0 . . .)} (an = 0 pour n ≥ N0 ) est
un sous-espace vectoriel de base 1, X, . . . , X N0 .
2. Degré dans A[X].
Définition. Soit P =
an X n ∈ A[X].
n∈N
• Si P =
0 on appelle degré de P le plus grand des n ∈ N tel que an = 0.
• Si P = 0 on dira que degré de P est −∞.
On notera d0 (P ) ou deg(P ) le degré de P.
Proposition 4. Soient P et Q dans A[X]. Alors on a :
1) d0 (P + Q) ≤ max d0 (P ), d0 (Q) . Si d0 P = d0 Q alors d0 (P + Q) = max d0 (P ), d0 (Q) .
2) d0 (P.Q) ≤ d0 (P ) + d0 (Q).
Démonstration. Si P = 0 ou Q = 0, alors les propriétés sont immédiates.
d0 Q
d0 P
n
Supposons P = 0, Q = 0, P =
an X , Q =
bn X n . La propriété 1) étant immédiate,
n=0
n=0
on démontre seulement la propriété 2).
Soit k ∈ N tel que k > d0 P + d0 Q. Soient p et q dans N tels que p + q = k alors on a
ap bq = 0.
soit p > d0 P, soit q > d0 Q et donc ck =
p+q=k
On a donc soit P Q = 0, soit P Q = 0 et d0 P Q ≤ d0 P + d0 Q.
Proposition 5. Si A anneau commutatif unitaire intègre.
Soient P et Q éléments non nuls de A[X].
Alors on a d0 (P Q) = d0 (P ) + d0 (Q).
48
Démonstration. On reprend le raisonnement et les notations de la démonstration précédente,
dans le cas P = 0, Q = 0
0
0
P =
d P
n
an X ,
n=0
Q=
d Q
bn X n .
n=0
Pour k = d0 P + d0 Q, si p + q = k, on a soit p ≥ d0 P, soit q ≥ d0 Q, on en déduit que
ck =
ap bq = ad0 P · bd0 Q .
p+q=k
Comme A est intègre, que ad0 P et bd0 Q sont non nuls, on obtient d0 (P.Q) = d0 P + d0 Q.
Remarque. Le résultat est évidemment faux si A n’est plus intègre.
Ex. dans Z/6Z[X], (2X 2 − 1)(3X) = −3X.
Corollaire 6. Si A est un anneau commutatif unitaire intègre, les éléments inversibles de
l’anneau A[X] sont les éléments inversibles de A.
Démonstration.
1) Soit P ∈ A[X], P inversible. Alors il existe Q ∈ A[X] tel quee P.Q = 1.
On a donc P = 0, Q = 0, d0 P = d0 Q = 0, P = a0 ∈ A, Q = b0 ∈ A et a0 b0 = 1.
2) La réciproque est immédiate.
Remarque. Le résultat n’est plus vrai si A n’est pas intègre, exemple dans (Z/18Z)[X]
on a (6X − 1)(6X + 1) = −1.
Théorème 7. Soit A est un anneau commutatif unitaire intègre. Alors l’anneau A[X]
est intègre.
Démonstration. D’après la proposition précédente, si P
d0 (P Q) = d0 P + d0 Q ≥ 0. Donc P Q = 0.
et Q sont non nuls, on a
3. Généralisation.
On peut définir par récurrence l’anneau A[X1 , . . . , Xn ] des polynômes en n indéterminées
à coefficients dans A.
On pose A[X1 ] = A[X].
Si n ≥ 2 si B = A[X1 , . . . , Xn−1 ] est défini, on pose A[X1 , . . . , Xn ] = B[Xn ] (on note
Xn la nouvelle indéterminée au lieu de X).
On peut vérifier que tout élément de A[X1 , . . . , Xn ] s’écrit de façon unique comme combinaison linéaire finie à coefficients dans A des monômes de base : {X1α1 . . . Xnαn / ∀i αi ∈ N}.
On peut obtenir le théorème suivant :
Corollaire 8. Soit A un anneau commutatif unitaire intègre, soit n ∈ N, n ≥ 1. Alors
l’anneau A[X1 , . . . , X1 ] est intègre.
Définition. Soit P ∈ A[X1 , . . . , Xn ], on peut évidemment définir le degré partiel par rapport
à chaque variable Xi , c’est le degré de P considéré comme élément de A[X1 , . . . , Xi−1 , Xi+1 , . . . , Xn ][Xi ].
49
Exemple : P = 2X12 X3 + X1 + 4 ∈ R[X1 , X2 , X3 ] le degré en X1 est 2, le degré en X3
est 1, le degré en X2 est 0.
On peut aussi définir le degré total de P ( par rapport à l’ensemble des indéterminées),
note dt(P ).
Pour P = 0 dt(P ) =
−∞
Pour P =
0 P =
aα1 ...αn X1α1 . . . Xnαn avec aα1 −αn ∈ A
α1 ,...,αn
On pose dt(P ) = max{α1 + . . . + αn / aα1 ,...,αn = 0}.
par exemple : P = 2X12 X3 + X1 + 4
dt(P ) = 3.
Proposition 9. Soit A un anneau commutatif unitaire.
Soient P et Q dans A[X1 , . . . , Xn ]. Alors n ≥ 1.
1) dt(P + Q) ≤ max dt(P ), dt(Q)
2) dt(P.Q) ≤ dt(P ) + dt(Q).
3) Si A est intègre
dt(P.Q) = dt(P ) + dt(Q).
Démonstration. Les parties 1) et 2) sont immédiates. Démontrons 3). On suppose
P = 0, Q = 0. On a P = P0 + P1 + . . . + Pr où r = dt(P ), Pi est la somme des monômes
de P de degré total i.
Q = Q0 + . . . + Qs où s = dt(Q) Qj est la somme des monômes de Q degré total j.
Il est immédiat que pour tout i et j on a Pi Qj nul ou formé de monômes tous de degré
total i + j.
D’autre part on a Pr = 0, Qs = 0. Donc Pr .Qs = 0 car A[X1 , . . . , Xn ] est intègre.
On en déduit : dt(P Q) = r + s.
Corollaire 10. Soit A un anneau commutatif unitaire intègre. Soit n ∈ N, n ≥ 1. Alors
les éléments inversibles de A[X1 , . . . , Xn ] sont les éléments inversibles de A.
Démonstration. Analogue au cas n = 1.
II - Propriétés arithmétiques de K[X1 , . . . , Xn ].
1. Division euclidienne dans K[X].
Théorème 1 (division euclidienne). Soit K un corps commutatif.
Soit B ∈ K[X] \ {0}, soit A ∈ K[X].
Alors il existe des polynômes Q et R uniques tels que :
A = BQ + R
d0 R < d0 B.
50
Remarque. On retiendra l’énoncé précédent dans le cas où K est un corps, mais on peut
remplacer K par un anneau unitaire quelconque, à condition de supposer le coefficient du
terme de plus haut degré de B est inversible.
Démonstration.
1) Unicité.
Supposons qu’on ait A = BQ1 +R1 = BQ2 +R2 avec Q1 , Q2 , R1 , R2 dans K[X], d0 Ri <
d0 B on a B.(Q1 − Q2 ) = R2 − R1 .
Si Q1 = Q2 , alors B.(Q1 − Q2 ) = 0 et d0 (R2 − R1 ) = d0 B + d0 (Q1 − Q2 ) ≥ d0 B.
d0 (R2 − R1 ) ≤ max(d0 Ri ) < d0 B.
Ceci est absurde, et donc on a Q1 = Q2 et R1 = R2
2) Existence.
On pose B = bp X p + . . . + b0 avec bp = 0 p ≥ 0. Pour d0 A < d0 B il suffit de poser
R = A, Q = 0.
On suppose donc d0 A = n ≥ d0 B et on raisonne par récurrence sur n, n ≥ p (B étant
fixé).
an n−p
On pose A = an X n + . . . + a0 avec an = 0 on a d0 A −
X
B) < n.
bp
an
an
B + R avec d0 R < p on pose Q −
.
bn
bn
a
n
• Soit n > p. On pose A = A −
X n−p B.
bp
Alors, soit on a d0 A < p, soit d0 A ≥ p et on peut appliquer à A l’hypothèse
de récurrence.
Il existe donc Q1 , R dans K[X] avec d0 R < d0 B et A = BQ1 + R.
a
n
Finalement A = B
X n−p + Q1 + R d’où le résultat.
bp
• Soit n = p et A =
Rappel. On a l’habitude de disposer les calculs de la façon suivante :
3X 3 + 2X + 4
− (3X + 3X )
3
2
| X +1
3X 2 − 3X + 5
A = −3X 2 + 2X + 4
− (−3X 2 − 3X)
A =
5X + 4
− (5X + 5)
−1
A
(3X 3 + 2X + 4) = (X + 1)(3X 2 ) + (−3X 2 + 2X + 4)
A
A = (X + 1)(−3X) + 5X + 4
A = (X + 1)5 − 1
R = −1.
51
2. Principalité.
• On a démontré que l’anneau Z est principal, en utilisant la division euclidienne dans
Z.
• On va démontrer de même que si K est un corps commutatif, l’anneau K[X] est
principal, en utilisant la division euclidienne dans K[X].
• Le raisonnement pourrait se généraliser pour montrer que certains anneaux possédant
un genre de “division euclidienne” sont principaux. En remarquant que pour n ≥ 2 et
K commutatif l’anneau K[X1 , . . . , Xn ] n’est pas principal, cela permet de voir qu’on
ne peut pas avoir de “division euclidienne” sur K[X1 , . . . , Xn ].
Théorème 12. Soit K un corps commutatif. Alors l’anneau K[X] est principal.
Démonstration. Soit I un idéal de K[X], I = 0.
Soit P0 ∈ I \ {0}, P0 choisi de degré minimal.
On a P0 .K[X] ⊆ I.
Montrons l’inclusion I ⊆ P0 .K[X].
Soit A ∈ I, alors ∃(Q, R) ∈ K[X] × K[X] tel que A = Q.P0 + R avec d0 R < d0 P0 .
Comme on a R = A − QP0 ∈ I, on a d’après le choix de P0 , nécessairement R = 0 et
donc A = QP0 ∈ P0 .K[X].
Conséquence. Soit K un corps commutatif.
Si P et Q sont des éléments non nuls de K[X] il existe des éléments δ et M, définis à
un inversible près dans K[X] tels que
P.K[X] + QK[X] = δ.K[X]
P.K[X] ∩ QK[X] = M.K[X]
on obtient ainsi δ = PGCD(P, Q) et M = PPCM(P, Q) et on a, comme dans Z :
Corollaire 13 (théorème de Bezout). Soit K un corps commutatif.
Soient P et Q des éléments de K[X] \ {0} alors
1) P et Q sont étrangers si et seulement si P et Q n’ont pas de facteurs communs de
degrés supérieurs ou égaux à 1.
2) Il existe u et v dans K[X] tels que uP + vQ = P GCD(P, Q).
Remarque. Comme dans Z, pour trouver le PGCD de deux polynômes P et Q et
trouver u et v tels que uP + vQ = PGCD(P, Q), on peut utiliser l’algorithme d’Euclide.
Le procédé est le même, voyons seulement un exemple :
on suppose K = R et on pose P = X 4 + X + 1 et Q = X 2 + X + 2 on a :
X 4 + X + 2 |X 2 + X + 1 ,
2X + 2
X 2 + X + 1 |2X + 2
X
1
( )
2
X2 − X
d’où PGCD(P, Q) = 1 et
X 4
1 = (X 2 + X + 1) −
(X + X + 2) − (X 2 − X)(X 2 + X + 1)
2
X
X
= − (X 4 + X + 2) + (X 2 + X + 1) 1 + (X 2 − X)
2
2
X
1
= − (X 4 + X + 2) + (X 2 + X + 1)(2 + X 3 − X 2 )
2
2
52
Remarque. Les calculs précédents montrent que le PGCD(P, Q) ne dépend pas du corps
contenant les deux polynômes.
Proposition 14 (théorème de Gauss). Soit K un corps commutatif.
Soient P et Q des éléments de K[X] \ K. On suppose que
P et Q sont étrangers
P divise QR.
Alors P divise R.
Démonstration. Il existe des polynômes U V tels que
1 = U P + V Q.
On a donc R = U P R + V QR. Comme P divise U P R et V QR, alors P divise R.
Remarquons que l’anneau K[X1 , . . . , Xn ] est pas principal. La propriété de principalité ne
“passe pas” d’un anneau A à son anneau de polynôme.
Soit par exemple l’idéal I de K[X1 , . . . , Xn ] engendré par (X1 , . . . , Xn ). Il est formé des
éléments de K[X1 , . . . , Xn ] dont le terme constant est nul. Supposons qu’il soit principal
engendré par le polynôme P0 . Soit i ∈ {1 . . . n} on a Xi ∈ P0 K[X1 , . . . , Xn ], donc il existe
Q ∈ K[X1 , . . . , Xn ] tel que Xi = P0 .Q. Soit j ∈ {1 . . . n} j = i. Si on considère le degré
de P0 par rapport à Xj , il est nécessairement nul.
Donc le degré de P0 par rapport à chaque Xi est nul et donc on a P0 ∈ K, ce qui est
impossible.
Donc K[X1 , . . . , Xn ] n’est pas principal mais vérifie une autre propriété qui, elle, “passe”
bien aux polynômes : la factorialité
3. Factorialité de K[X1 , . . . , Xn ].
Définition. Soit A un anneau commutatif unitaire intègre. Deux éléments a et b de
A \ {0} sont associés s’il existe ε ∈ A∗ tel que b = ε.a où A∗ est formé des éléments
inversibles de A.
Définition. Soit A un anneau commutatif unitaire intègre. Un élément non nul de A \ A∗
est dit irréductible s’il n’admet pas d’autre diviseur dans A que ses associés et les inversibles.
Exemples.
1) Les irréductibles de Z sont les nombres premiers.
2) Si K est un corps commutatif alors les éléments irréductibles de K[X] sont les polynômes
P de degrés ≥ 1, n’admettant pas de diviseurs de degrés positifs strictement inférieurs
à celui de P.
Il est clair que les polynômes de degré 1 sont irréductibles, mais ce ne sont pas toujours
les seuls.
On dira qu’un élément de K[X] \ {0} est unitaire si le coefficient du terme de plus haut
degré est 1.
On peut démontrer :
Théorème 15 (de d’Alembert). L’ensemble des polynômes irréductibles unitaires de C[X]
est {X − a/a ∈ C}.
53
et on démontrera plus loin, à partir de ce théorème le corollaire suivant.
Corollaire 16. L’ensemble des polynômes irréductibles unitaires de R[X] est :
{X − a/a ∈ R} ∪







b∈R
X 2 + bX + c / c ∈ R
b2 − 4c < 0







Théorème 17 (factorialité de K[X]).
Soit K un corps commutatif, et soit P ∈ K[X] \ K. Alors
1) Il existe des polynômes irréductibles P1 , . . . , Pr tels que P = P1 . . . Pr .
2) La décomposition obtenue est unique
- à l’ordre des facteurs près,
- à association près.
Remarque. L’unicité signifie que si on a une autre décomposition P = Q1 . . . Qs en produit
de polynômes irréductibles alors :
. r=s
. il existe une permutation σ ∈ Sr telle que ∀i ∃αi ∈ K \ {0} tel que
αi Pσ(i) = Qi .
Exemple.
P = (X − 1)(X − 2) = 3(X − 2) .
P1 = X − 1
1
(X − 1)
3
Q1 = 3(X − 2)
1
Q2 = (X − 1)
3
P2 = X − 2
Démonstration.
1) Existence de la décomposition.
On raisonne par récurrence sur le degré de P
• Si d0 P = 1 P est irréductible.
• Si d0 P et si le résultat est supposé connu pour les polynômes de degrés strictement inférieurs alors
• Soit P est irréductible.
• Soit P n’est pas irréductible, et alors il existe des polynômes Q et
R tels que
1 ≤ d0 Q < d0 P
P = QR
1 ≤ d0 R < d0 P
on applique alors l’hypothèse de récurrence à Q et R.
2) Unicité. On raisonne également par récurrence sur le degré de P.
• Si d0 P = 1 alors P est irréductible.
54
• Si d0 P > 1. On suppose l’unicité des décompositions de polynômes de degrés
strictement inférieurs.
On suppose qu’on a deux décompositions de
irréductibles
(∗)
P
en produit de polynômes
P = P1 . . . Pr = Qr . . . Qs
En utilisant le lemme de Gauss, on voit que P1 ne peut pas être étranger et
chaque Qi i ∈ {1 . . . s} donc ∃i ∈ {1 . . . s} tel que P1 et Qi ne soient pas
étrangers et comme ils sont irréductibles ∃αi ∈ K ∗ Qi = αi P1 on simplifie
alors l’égalité précédente par P1 .
- Soit r = 1 et alors le résultat est immédiat.
- Soit r > 1 on simplifie l’égalité ∗ par P1 et on applique l’hypothèse de
récurrence à P2 . . . Pr .
Pour le cas de K[X1 , . . . , Xn ], n ≥ 2. Le théorème se généralise parce qu’on peut
généraliser le lemme de Gauss. On a en effet le résultat suivant qu’on ne démontrera pas.
Théorème 18 (Lemme de Gauss).
Soit K un corps commutatif. Soit n ∈ N, n ≥ 1.
Soient P, Q, R des éléments de K[X1 , . . . , Xn ] \ K on suppose que
P et Q sont sans diviseurs communs autres que des inversibles.
divise QR.
Alors P divise R.
Théorème 19 (factorialité de K[X1 , . . . , Xn ]).
Soit K un corps commutatif et soit n ≥ 2 et P ∈ K[X1 , . . . , Xn ] \ K. Alors
1) Il existe des polynômes irrédutibles
P = P1 . . . Pr .
P1 , . . . , Pr
de
K[X1 , . . . , Xn ]
tels que
2) La décomposition obtenue est unique
- à l’ordre des facteurs près,
- à association près.
Démonstration. Pour l’existence de la décomposition, il suffit de reprendre la démonstration
du théorème 17 en utilisant cette fois le degré total.
Pour l’unicité, utiliser le lemme de Gauss.
Remarque. Cette propriété de factorialité de K[X1 , . . . , Xn ] permet en particulier de
vérifier que dans K[X1 , . . . , Xn ] on a des notions de PGCD et de PPCM (obtenus à partir
des décompositions en facteurs irréductibles).
On verra aussi en exercice des applications à des calculs de déterminants.
Comme autre corollaire du lemme de Gauss on a aussi :
55
Corollaire 20. Soit K un corps commutatif, n ≥ 1 soit P0 ∈ K[X1 , . . . , Xn ] \ K. Alors
les trois propriétés suivantes sont équivalentes.
1) P0 est irréductible.
2) L’idéal (P0 ) est premier : c’est-à-dire

a) ∀P, Q dans K[X1 , . . . , Xn ]


P Q ∈ (P0 ) ⇒ P ∈ (P0 ) ou Q ∈ (P0 )


b) (P0 ) = K[X1 , . . . , Xn ].
3) K[X1 , . . . , Xn ]/(P0 ) est un anneau intègre.
L’équivalence 2) ⇔ 3) a déjà été vue.
L’équivalence 1) ⇔ 2) est immédiate à partir du théorème 19.
Dans le cas où n = 1 on a :
Corollaire 21. Soit K un corps commutatif, soit P0 ∈ K[X] \ K. Alors les trois
propriétés suivantes sont équivalentes :
1) P0 irréductible.
2) L’anneau K[X]/(P0 ) est intègre.
3) L’anneau K[X]/(P0 ) est un corps.
Démonstration. On a 1) ⇒ 2) d’après le corollaire précédent, et 3) ⇒ 2) est évident.
Montrons 2) ⇒ 3). On suppose (P0 ) irréductible, on pose P0 = a0 + a1 X + . . . + an X n .
Alors (P0 ) est un sous K-espace vectoriel de K[X], et le quotient K[X]/(P0 ) est de
n−1
dimension finie (il est de façon évidente engendré par 1, X, . . . , X
).
Soit a ∈ K[X]/(P0 ) \ {0}. Alors l’application
K[X]/(P0 ) → K[X]/(P0 )
b → a.b
est injective car K[X]/(P0 ) est intègre, c’est d’autre part une application K-linéaire injective
d’un espace vectoriel de dimension finie dans lui-même : elle est donc bijective. Donc a est
inversible dans K[X]/(P0 ).
III - Racines, fonctions polynomiales.
1. Fonction polynomiale en une indéterminée, racine.
Définition. Soit A un anneau commutatif unitaire et soit P ∈ A[X]. On pose
P = a0 + a1 X + . . . + an X n avec ∀i, ai ∈ A
On appellera fonction polynomiale associée à P et on notera P l’application de A dans
A telle que ∀x ∈ A P(x) = a0 + a1 x + . . . + an xn .
56
Proposition 22. Avec ces notations, l’application A[X] → AA est un morphisme
P → P
d’anneaux unitaires vérifiant de plus :
= a.P
∀P ∈ A[X], ∀a ∈ A a.P
(où AA désigne l’anneau des applications de A dans A pour les lois + et · définies
par : ∀f ∈ AA , ∀g ∈ AA , ∀a ∈ A, (f + g)(a) = f (a) + g(a) et (f.g)(a) = f (a).g(a)).
Démonstration. Immédiate.
Remarque.
1) Tout élément de AA n’est évidemment pas une application polynomiale en général.
Exemple : Si f : R → R est non constante polynomiale, on a
−∞. De nombreuses fonctions ne vérifient pas cette propriété.
lim f (x) = +∞ ou
x→+∞
Si A est un corps fini A = {a1 , . . . , ar } si f : A → A est donnée par f (ai ) = bi
r
X − aj (polynômes
alors f est polynomiale car on a f = P pour P =
bi
ai − aj
j=1...r
i=1
j=i
d’interpolation).
2) Dans R on confond en général polynôme et fonction polynomiale. On verra que cela est
en effet possible car l’application P −→ P est injective.
3) Prenons maintenant A fini A = {α1 , . . . , αn } et soit P ∈ A[X], P = (X − α1 ) . . . (X −
αn ). Alors on a P = 0 et P = 0.
On ne peut donc pas dans cas confondre polynôme et fonction polynomiale.
4) Un autre exemple en ce sens. On a vu que d’après petit le théorème de Fermat, si p est
premier
∀x ∈ Z/pZ on a xP = x.
Soit P ∈ Z/pZ [X]
P = X p − X.
Alors on a P = 0 et P = 0.
5) Si (A, +, ·) est un anneau unitaire, et que de plus A possède une structure d’espace
vectoriel (A, +, ∗), avec la même addition de sorte que :
∀(x, y) ∈ A × A, ∀λ ∈ K
(λ ∗ x) · y = x · (λ ∗ y)
On dit que A, +, ·, ∗) est une K-algèbre.
= −λ ∗ (x · y).
Exemple. K[X], K K , Mn (K) sont des K-algèbre pour les lois usuelles.
La proposition signifie que P → P est un morphisme d’algèbres, c’est-à-dire à la fois un
morphisme d’anneaux et d’espaces vectoriel.
On peut d’autre part, si A est un K-algèbre et M ∈ A définir un morphisme d’algèbre
ϕ : K[X] → A
tel que ϕ(X) = M.
On se bornera ici à ne considérer que des applications polynomiales A → A.
57
Définition. Soit P ∈ A[X] \ {0} et soit α ∈ A. On dit que α est une racine de P
si on a
P(α) = 0.
Remarque. Par la suite, par abus de langage on écrira P (α) au lieu de P(α).
Proposition 23. Soit P ∈ A[X] \ {0} soit α ∈ A. Alors α est racine de P si et
seulement si (X − α) divise P.
Démonstration.
1) Si (X − α) divise P alors il existe Q ∈ A[X] tel que P = (X − α)Q d’où P (α) = 0.
2) Réciproquement, soit Q ∈ A[X] et β ∈ A tel que
P = (X − α)Q + β.
(Pour vérifier qu’une telle décomposition existe, on peut remarquer que la division euclidienne par X − α est toujours possible car le coefficient de X est inversible, on peut
aussi poser Y = X − α et substituer Y + α à X dans P et ordonner suivant les
puissances de Y ) :
si on a P (α) = 0, alors β = 0 donc X − a divise P.
On peut revenir ici sur une propriété admise précédemment.
théorème de d’Alembert.
On suppose connu le
Théorème 24 (théorème de d’Alembert). Tout polynôme P ∈ C[X] \ C admet au moins
une racine dans C.
Théorème 25.
1) Les polynômes irréductibles unitaires de C[X] sont les polynômes X − a pour a ∈ C.
2) Les polynômes irréductibles unitaires de R[X] sont
a) Les polynômes X − b pour a ∈ R.
b) Les polynômes X 2 + bX + c pour b, c ∈ R, b2 − 4c < 0.
Démonstration.
1) On a vu qu’un polynôme de degré 1 est irréductible.
Soit P ∈ C[X], avec d0 P ≥ 2. Soit α une racine de P dans C. Alors (X − α)
divise P. Donc P n’est pas irréductible dans C[X].
2) a) Soit P ∈ R[X]. Si P est du type X − a, a ∈ R, il est irréductible. Si P est du
type X 2 + bX + c avec b, c ∈ R, b2 − 4c < 0 alors s’il n’était pas irréductible, il
admettrait un facteur de degré 1 dans R[X], donc une racine dans R, ce qui est
faux. Donc il est irréductible dans R[X].
b) Réciproquement, soit P ∈ R[X] un polynôme irréductible de degré ≥ 2. Alors
P n’a pas de racine réelle.
58
Soit α ∈ C un racine complexe non nulle, alors α est aussi racine, donc P est
divisible par (X − α)(X − α) qui est dans R[X]. Donc
P = (X − α)(X − α)
= X 2 + bX + c avec b2 − 4c < 0.
Définition. Soit A un anneau commutatif unitaire. Soit P ∈ A[X] \ {0} et soit α ∈ A.
On appelle multiplicité de α comme racine de P dans A le plus grand des entiers h, h ≥ 0
tels que (X − α)h divise P dans A[X].
Proposition 26. Avec ces notations α est de multiplicité k comme racine de P si et
seulement si
∃Q ∈ A[X] tel que P = (X − α)k Q et Q(α) = 0.
Démonstration.
1) Si α est de multiplicité k comme racine de P alors il existe Q ∈ A[X] tel que
P = (X − α)k Q.
On a Q = 0 car P = 0. Supposons Q(α) = 0, alors on aurait Q divisible par X − α
et donc P divisible par (X − α)k+1 ce qui est faux. Donc on a Q(α) = 0.
2) Réciproquement. Supposons P = (X − α)k Q avec Q(α) = 0.
Montrons que P ne pas s’écrire sous la forme (X − α)k+1 R avec R ∈ A[X]. Si c’était
le cas on aurait :
(X − α)k Q = (X − α)k+1 R
ce qui entraı̂nerait Q = (X − α)R et donc Q(α) = 0.
En effet dans A[X], n’est pas “diviseur de zéro” (c’est-à-dire qu’on peut effectuer la
simplification par (X − α)k .
Théorème 27. On suppose A intègre.
Soient P1 ∈ A[X] \ {0} et P2 ∈ A[X] \ {0}.
Soit α ∈ A.
Soient k1 la multiplicité de α comme racine de P1 (k1 ≥ 0)
k2 la multiplicité de α comme racine de P2 (k2 ≥ 0)
k la multiplicité de α comme racine de P1 P2 (k ≥ 0).
Alors
k = k1 + k2 .
Remarque. La propriété est fausse dans le cas non intègre. Exemple dans Z/6Z on a :
(X − 2)(X − 3) = X(X − 5).
Considérer la multiplicité de la racine 0 dans le produit (X − 2)(X − 3).
Démonstration. On a :
P1 = (X − α)k1 Q1 avec Q1 (α) = 0
P2 = (X − α)k2 Q2 avec Q2 (α) = 0
donc P1 P2 = (X − α)k1 · (X − α)k2 Q1 Q2 .
59
On a Q1 (α) = 0, Q2 (α) = 0 et A intègre, donc (Q1 Q2 )(α) = 0.
Corollaire 1. A intègre ; P ∈ A[X] \ {0}.
Si α1 , . . . , αr sont des éléments deux à deux distincts de multiplicité k1 , . . . , kr comme
racine de P alors P est divisible par :
(X − α1 )k1 . . . (X − αr )kr .
En particulier d0 P ≤ k1 + . . . + kr .
Démonstration. On a P = (X − α1 )k1 Q.
Pour tout i ∈ {2, . . . , r} la multiplicité de αi comme racine de Q est égale à ki (puisqu’elle
est nulle pour (X − α1 )k1 ).
Corollaire 2. A intègre infini l’application
A[X] → AA
P → P
est injective.
Démonstration. Soit P ∈ A[X] \ {0}. Supposons P = 0 et P = 0. Soit n = d0 P. (On
a donc n ≥ 1). D’après le corollaire précédent, P ne peut pas avoir strictement plus de n
racines dans A. Or A est infini, et tout élément de A est racine de P. Ceci est absurde.
Donc l’application P → P est injective.
Corollaire 3. Soit A un anneau commutatif intègre infini.
Soit n ≥ 2 et P ∈ A[X1 , . . . , Xn ].
Soit P : An → A l’application (polynomiale) qui à tout (α1 . . . , αn ) associe P (α1 , . . . , αn )
(obtenu en substituant chaque αi à Xi dans P ). On suppose que P = 0, alors P = 0.
Démonstration. On raisonne par récurrence sur n. Le cas n = 1 est le résultat du
Corollaire 2.
Supposons n > 1 et supposons le résultat vrai sur A[X1 , . . . , Xn−1 ]. Soit P ∈ A[X1 , . . . , Xn ]\ {0}.
On pose P = P0 (X1 , . . . Xn−1 ) + Xn P1 (X1 , . . . , Xn−1 ) + . . . + Xnk Pk (X . . . Xn−1 ) avec
∀i, Pi [X1 , . . . Xn−1 ] ∈ A[X1 , . . . , Xn−1 ].
Il existe j ∈ N, tel que Pj ∈ A[X1 , . . . , Xn−1 ] \ {0} et alors ∃(α1 , . . . , αn−1 ) ∈ An−1 tel
que Pj (α1 , . . . , αn−1 ) = 0.
Considérons le polynôme en une indéterminée Xn :
Q(Xn ) = P (α1 , . . . , αn−1 , Xn ).
Il est non nul, et donc il existe αn ∈ A tel que Q(αn ) = 0 c’est-à-dire P (α1 , . . . , αn ) = 0.
Donc P = 0.
Corollaire 4. Soit K un corps commutatif, et soit G un sous-groupe fini de (K ∗ , ×).
Alors G est cyclique.
En particulier si p est un nombre premier, le groupe U(Z/pZ) est cyclique.
60
Démonstration. On suppose G non réduit à un élément.
αr
1
Soit n = pα
le cardinal de G, où p1 , . . . , pr sont des nombres premiers distincts
1 . . . pr
(r ≥ 1) et α1 , . . . , αr des entiers supérieurs ou égaux à 1.
n
n
Soit i ∈ {1, . . . , r}. Comme le polynôme X pi − 1 admet au plus
racines distinctes
pi
n
p
dans K (donc dans G), il existe au moins un élément ci de G tel que ci i = 1. Posons
n
α
p i
di = ci i .
αi
p
On a di i = 1 car cni = 1 car ci ∈ G donc l’ordre de di est une puissance de pi .
αi −1
p
di i
n
p
i
= ci i = 1. Donc di est d’ordre pα
i .
Comme G est abélien et que les ordres de ces éléments d1 , . . . , dr sont premiers entre eux
deux à deux, l’élément g = d1 . . . dr est d’ordre n.
1. Fonction polynomiale en une indéterminée, racine.
Définition. Soit A un anneau commutatif unitaire et soit P ∈ A[X] \ {0}. On pose
P = a0 + a1 X + . . . + an X n avec n ≥ 0, an = 0 on définit la dérivée formelle de P notée
P comme élément
P = a1 + 2a2 X + . . . + nan X n−1 de A[X].
On définit la dérivée du polynôme nul par 0.
On définit par récurrence, pour tout n ≥ 0 la dérivée nème de P :
P (0) = P, ∀n ≥ 0 P (n+1) = (P (n) )
Théorème 28. Soient P, Q dans A[X]. Soit a ∈ A.
Alors
1) (P + Q) = P + Q
2) (aP ) = a.P 3) (P.Q) = P Q + P Q .
Remarque. Attention le degré de P est en général d0 P − 1 mais il peut être plus petit
(par exemple, si A = Z/pZ, avec p nombre premier, et si on considère le polynôme X p − 1,
ce polynôme a pour dérivée 0).
Exercice. Démontrer la formule de Leibniz ∀(P, Q) ∈ A[X], ∀n ∈ N, n ≥ 1, (P Q)(n) =
n
Cnk P (k) Q(n−k) .
k=0
Comme dans le cas des fonctions réelles on a une formule de Taylor, mais elle n’est vraie que
si on peut diviser par les différents k! Limitons-nous au cas des polynômes sur un corps de
caractéristique zéro. On a :
Théorème 29 (Formule de Talor).
Soit K un corps commutatif de caractéristique zéro, soit n ∈ N, n ≥ 1. Soit P ∈ K[X]
un polynôme de degré ≤ n, soit α ∈ K. Alors on a :
P (X) =
n
(X − α)k (k)
P (α).
k!
k=0
61
Démonstration. Par linéarité, on peut se limiter à démontrer le théorème pour P =
X m , m ≤ n. Le résultat est immédiat pour m = 0.
Pour m ≥ 1, on utilise la formule du binôme de Newton :
X m = (X − α + α)m =
m
k
Cm
(X − α)k (αm−k )
k=0
(par convention (X − α)0 = 1, α0 = 1).
On a P (k) (α) = m(m − 1) . . . (m − k + 1)αm−k .
Le coefficient obtenu pour (X − α)k est donc :
k m−k
Cm
α
=
1 (k)
P (α).
k!
Remarque. Le résultat est encore vrai dans le cas d’un corps commutatif de caractéristique
p, p > 0 à condition qu’on ait n < p.
Corollaire 1. Soit K un corps commutatif de caractéristique zéro, soit P ∈ K[X], soit
m
P (k) (α)
α ∈ K, soit m ∈ N alors il existe S ∈ K[X] tel que P (X) =
(X − α)k +
k!
k=0
(X − α)m+1 S(X).
Démonstration. Si n = d0 P, on écrit le développement de Taylor qu’on prolonge par des
zéros :
∞
P (k) (α)
P (X) =
(X − α)k .
k!
k=0
Les termes du membre de droite sont nuls pour k assez grand. On tronque la formule pour
obtenir le Corollaire.
Remarque. Dans le cas où K est de caractéristique p, p > 0, on peut écrire la formule
du binôme et remplacer uniquement les coefficients d’ordre 0 et 1 de (X − α) par P (α) et
P (α). On obtient :
P (X) = P (α) + (X − α)P (α) + (X − α)2 S(X) avec S(X) ∈ K[X].
Corollaire 2. Soit K un corps commutatif de caractéristique zéro. Soit P ∈ K[X] \ {0}
et soit α ∈ K et k ∈ N.
Alors α est une racine de multiplicité k de P si et seulement si
P () (α) = 0 ∀ k
P (k) (α) = 0.
Démonstration. On a :
P (X) = P (α) + (X − α)P (α) + . . . +
(X − α)k (k)
P (alpha) + (X − α)k+1 S(X)
k!
avec S(X) ∈ K[X] qu’on peut écrire sous la forme
P (X) = (X − α)k
P (k) (α)
k!
62
+ (X − α)k S(X) + R(X)
X − α)k−1 (k)
P (α).
k!
k
Alors P est divisible par (X − α) et non par (X − α)k+1 si et seulement si on a :
R(X) = 0 et P (k) (α) = 0 c’est-à-dire : P () (α) = 0 ∀ k et P (k) (α) = 0.
avec R(X) = P (α) + . . . +
Remarque. Cette propriété ne se généralise pas au cas où la caractéristique est non nulle.
Ex. : pour K = Z/pZ, p premier P (X) = X p − 1 admet 1 comme racine de multiplicité
p, car on a P (X) = (X − 1)p , mais on a ∀k ≥ 0 P (k) (1) = 0. On a cependant le résultat
suivant :
Théorème 30. Soit K un corps commutatif, soit P ∈ K[X] \ {0}, soit α ∈ A.
Pour que α soit racine simple (c’est-à-dire de multiplicité 1) de P il faut et suffit qu’on
est
P (α) = 0 et (α) = 0.
Démonstration. D’après la remarque qui suit le Corollaire 1 on a :
P (X) = P (α) + (X − α )P (α) + (X − α)2 S(X) avec S(X) ∈ K[X].
Le résultat est alors immédiat.
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