La Lettre de L’Hépato-Gastroentérologue - n° 3 - juin 1998 101
quasi constante dans les 10 mois suivant l’arrêt du traitement.
Un an après, seuls 3 % des patients traités conservaient des
ALAT normales (6). La méta-analyse des essais publiés montre
que la mise en rémission de l’hépatopathie est plus fréquente
avec 5 MU d’IFN quotidiens ou 9 MU 3 fois par semaine,
durant un an (7). La normalisation de l’ALAT est insuffisante
pour prédire une réponse durable, la plupart des équipes éva-
luent l’efficacité sur la réplication delta par la recherche de la
négativation de l’ARN VHD. Certains cherchent également à
obtenir l’indétectabilité du VHB par la technique bDNA. La
lamivudine n’a été évaluée que de façon anecdotique dans cette
situation clinique.
En cas de triple infection B-D-VIH, la réplication du VHD est
exaltée, la réplication du VHB est également augmentée, son
inhibition par le VHD chutant parallèlement à l’immunosup-
pression attestée par le taux des CD4 ; la sévérité est encore
accentuée : les lésions histologiques sont plus rapidement évo-
lutives, la mortalité de ces infections triples est accentuée, des
formes fulminantes ou sub-fulminantes ont été décrites lors de
réactivations virales.
L’interféron a permis d’interrompre une évolution fulminante
dans quelques cas de réactivation et peut être proposé dans cette
situation (8).
TRAITEMENT DES HÉPATITES CHRONIQUES B
CHEZ LES PATIENTS CO-INFECTÉS PAR LE VIH
Dix pour cent environ des patients infectés par le VIH sont por-
teurs chroniques de l’antigène HBs, mais un marqueur du VHB
est présent chez 60 à 80 % d’entre eux. L’immunodépression
induite par le VIH stimule la réplication du VHB et favorise le
portage chronique du VHB ; lorsque la virémie est élevée, l’ac-
tivité biologique et histologique est habituellement faible (9).
L’immunodépression peut masquer l’infection par le VHB, le
titre des anticorps anti-HBc devenant indétectable. Même après
disparition de l’antigène HBs circulant, le VHB peut continuer
à se répliquer dans les cellules mononucléées. C’est ainsi que la
réapparition de l’antigène HBs et de l’ADN-VHB sérique peut
s’observer, quand les lymphocytes CD4 chutent au-dessous de
50/mm
3
, chez des patients chez lesquels ils avaient disparu. Ce
type de réactivation virale B peut s’accompagner d’un pic cyto-
lytique sévère et d’une dégradation brutale des fonctions hépa-
tocellulaires. Liée aux progrès thérapeutiques récents, l’aug-
mentation de l’espérance de vie des patients infectés par le VIH
incite désormais à ne plus négliger les hépatites virales asso-
ciées dont le traitement est compliqué par cette co-infection ;
d’autant plus que la restauration de l’immunité peut provoquer
un regain d’activité de l’hépatite à VHB et que des hépatites
cholestatiques fibrosantes conduisant à la constitution accélérée
d’une cirrhose ont été décrites.
L’analyse rétrospective des études publiées sur le traitement des
hépatites chroniques à VHB par la vidarabine a montré que la
co-infection par le VIH et une virémie B élevée étaient asso-
ciées à une mauvaise réponse au traitement. Il n’a donc pas été
conduit d’étude prospective sur l’efficacité de la vidarabine
chez les patients co-infectés par ces deux virus.
Avec l’interféron alpha recombinant, des annulations de répli-
cation virale,des séroconversions anti-HBe et même anti-HBs
ont été observées chez des patients co-infectés par le VHB et le
VIH. L’ADN du VHB est toutefois toujours resté détectable par
PCR et la co-infection par le VIH réduit très significativement
le taux de réponse prolongée (annulation persistante de l’ADN-
VHB dans moins d’un tiers des cas malgré de fortes posologies
et sérovonversion anti-HBe exceptionnelle). Les meilleures
réponses ont été observées avec des posologies élevées (9MU,
3 fois par semaine) (10). L’interféron est le plus souvent bien
toléré sur les plans clinique et immu n o l ogi q u e, bien que
quelques cas de chute des CD4 aient été rapportés.
La zidovudine n’a pas d’impact sur la réplication du VHB. Le
foscarnet et le ganciclovir ont été utilisés, dans des cas isolés,
pour interrompre des réactivations virales B sévères. Leur utili-
sation par voie parentérale et leurs effets secondaires potentiels
en cas d’utilisation prolongée n’ont pas incité à la réalisation
d’études contrôlées.
La lamivudine, un inhibiteur des reverses transcriptases des VIH
1 et 2, s’est révélée très efficace pour inhiber l’activité trans-
criptase inverse de l’ADN-polymérase du VHB. Dans cette
situation de co-infection virale, elle a permis d’interrompre la
réplication du VHB après échec de l’interféron ou après réacti-
vation B brutale liée à l’immunodépression et ce, presque
constamment. L’utilisation d’une posologie journalière de 300 à
600 mg permettrait un arrêt plus précoce de la réplication que la
posologie de 100 mg/j. La tolérance,au cours de traitements
d’un an, a été excellente. La disparition de l’ADN-VHB est tou-
tefois isolée, avec séroconversion anti-HBe dans moins de 10 %
des cas, et le rebond à l’arrêt du traitement très fréquent.
Surtout, la lamivudine semble favoriser des mutations virales,
avec apparition de résistance à la molécule,et son utilisation ne
se justifie qu’en cas d’hépatite active (11, 12).
L’association ou la succession de la lamivudine et de l’interfé-
ron mériterait d’être testée.
Le famciclovir n’a, pour l’instant, pas été bien évalué dans cette
situation.
Par ailleurs, l’introduction d’un traitement antirétroviral chez un
patient immunodéprimé co-infecté par le VHB devrait s’accom-
pagner d’une surveillance régulière des transaminases et de
l’ADN du VHB, parallèlement aux marqueurs immunitaires.
Enfin, chez des patients infectés par le VIH et non infectés par
le VHB, la vaccination anti-VHB est possible. La réponse séro-
logique vaccinale est corrélée avec le statut immunitaire, signi-
ficativement moins bonne que chez l’immunocompétent. Des