L’Encéphale, 2006 ;
32 :
893, cahier 4
S 893
Discussion
J. DALÉRY
(1)
(1) CHS Le Vinatier, 95, boulevard Pinel, 69500 Bron cedex.
La réponse à la question de la pertinence des outils
cognitifs pour le diagnostic précoce de schizophrénie
semble positive, et se situe dans le cadre d’une démarche
médicale classique.
Mais de façon paradoxale, on utilise les outils cognitifs
en recherche, alors que ceux-ci ne sont pas retenus en
terme de critères diagnostiques, en tous cas jusqu’au
DSM IV. On peut donc souligner le contraste important
entre le très grand nombre de publications concernant les
données cognitives dans le domaine de la recherche et
l’absence de ces dysfonctionnements cognitifs dans la
démarche diagnostique classique.
Les données nouvelles obtenues dans le domaine
cognitif posent la question des relations entre les pertur-
bations cognitives et les symptômes : certains suggèrent
une complète indépendance entre symptomatologie – ou
au moins symptomatologie positive – et altérations cogni-
tives, tandis que d’autres tentent d’
expliquer
les symptô-
mes cliniques par les dysfonctionnements cognitifs.
L’étude des grandes dysfonctions cognitives élémen-
taires ouvre des perspectives d’avenir, de même que celle
des fonctions cognitives complexes, telle la planification
ou l’attribution de l’action. Elle permettra peut-être dans
l’avenir une nouvelle lecture de la symptomatologie, où le
niveau cognitif prendra une importance relative plus
grande par rapport à l’analyse sémiologique classique.
En amont de la décompensation, les outils cognitifs
pourront être particulièrement utiles, dans le cadre de
l’hypothèse neuro-développementale ou des modèles de
vulnérabilité, puisque les troubles cognitifs sont le reflet
du trouble neuro-développemental sous-jacent.
Le choix des outils cognitifs est important pour amélio-
rer leur pertinence diagnostique ou prédictive : les batte-
ries habituellement utilisées apparaissent trop peu spéci-
fiques et trop grossières, et il serait utile de définir des
outils qui permettent d’explorer non pas des fonctions
cognitives élémentaires mais des fonctions complexes,
qu’on pourrait alors relier de façon plus spécifique à des
dysfonctions cérébrales ou des altérations neuro-déve-
loppementales.
L’utilisation complémentaire d’échelles d’auto-évalua-
tion de dysfonctions cognitives est un pas important dans
ce sens, d’autant qu’elles explorent leurs conséquences
en terme de fonctionnement social, et qu’il existe des cor-
rélations entre échelles subjectives et évaluations objec-
tives.
Enfin, il faut souligner, en plus de son intérêt comme
modèle explicatif, l’intérêt de l’exploration cognitive pour
définir des outils thérapeutiques, médicamenteux ou non
médicamenteux, qui permettent de proposer des actions
thérapeutiques ciblées sur un déficit cognitif donné.