Conduites alimentaires Conduites anorexiques, boulimique et hyperphagie chez l’adolescent et l’adulte Alimentation • Fonctions de l alimentation : – Organique – Lien social – Plaisir • Alimentation : 1er lien • Alimentation sujette à des variations dans la population générale Alimentation • Alimentation : régulation par SNC complexe, fonction • des besoins • Stimuli extérieurs, goût, odeurs … • habitudes (horaires …) • normes • Mais aussi : – Émotions (stress, angoisse, anxiété, joies…) modifient l alimentation Alimentation Émotions Sensations alimentaires Motivation et décision Prise alimentaire Cognitions 2 principaux TCA Anorexie Boulimie Anorexie Epidémiologie • 0,5 à 1% des femmes sur la vie entière • Sex ratio : 9 femmes pour 1 homme • A l adolescence et début âge adulte (âge moyen : 17 ans, 2 pics) • Plusieurs formes cliniques Formes cliniques • Anorexie prépubertaire (mauvais pronostic, risque de retard staturo-pondéral) • Anorexie tardive (à l âge adulte) • Anorexie masculine : rare, éliminer une entrée dans la schizophrénie Clinique Triade symptomatique AAA : • Anorexie • Amaigrissement • Aménorrhée > 3 mois, réversible (! contraception!) Anorexie • Restriction alimentaire volontaire avec persistance de la sensation de faim • Préoccupations centrées sur la nourriture • Restriction alimentaire qualitative et/ou quantitative, évitements Amaigrissement • Refus maintenir un poids minimal, > ou égal au poids minimum compte tenu de l âge et de la taille (poids<85% celui espéré) Attention pré-pubères • Stratégies de contrôle du poids • Signes physiques et biologiques de dénutrition Amaigrissement • Estime de soi influencée de façon excessive par le poids et les formes • Déni de la maigreur, dysmorphophobie, peur d être ou de devenir gros, préoccupations excessives autour du poids, obsessions autour de l alimentation 2 sous types • Restrictif pur • Avec conduites d élimination (vomissements provoqués, prise de diurétiques et/ou laxatifs +/- crises de boulimie associées) Signes associés • Stratégies de contrôle du poids : laxatifs, diurétiques, stimulants • Sur-investissement physique et intellectuel • Hypo-investissement de la sexualité, de la libido • Potomanie, restriction hydrique • Isolement social • Privation de sommeil Recommandations HAS Populations à risque • Adolescentes et femmes jeunes • Mannequins • Danseurs et sportifs (disciplines esthétiques ou à catégories de poids) • Sujets atteints de pathologies nécessitant des régimes (diabète type 1, hypercholestérolémie familiale…) Retentissement somatique • Signes de dénutrition : lanugo, atteintes des phanères, amyotrophie • Signes d hypométabolisme : hypotension artérielle, bradycardie, hypothermie • Évaluation du stade pubertaire • Évaluation de la maigreur : Indice de Masse Corporelle (IMC) : poids en kg/(taille en m)² IMC • • • • • • IMC<18,5 : maigreur 18,5<IMC<25 : norme 25<IMC<30 : surcharge pondérale 30<IMC<35 : obésité modérée 35<IMC<40 : obésité moyenne 40<IMC : obésité majeure Retentissement psychologique • Troubles de la concentration • Insomnie • Anxiété • Dépression • Trouble de la personnalité pré existant (rigidité…) +/- présents avant le trouble, aggravés par le trouble • Isolement social Retentissement para-clinique • Rechercher une étiologie organique et évaluer le retentissement de la dénutrition – NFS : anémie, leucopénie – Iono : hypoK, Hypo/HyperNa, hypophosphorémie, hypoCa – Insuffisance rénale fonctionnelle – Bilan hépatique : transaminases et bilirubine Retentissement para-clinique – Bilan lipidique : hyperTG, hypercholestérolémie – Hypoalbuminémie, hypoprotidémie – Hypoglycémie – +/- Bilan endocrinien – ECG : bradycardie, troubles hydro électrolytiques – Ostéodensitométrie Retentissement para-clinique Complications • Cardiovasculaires : – Bradycardie sinusale – hTA – TDR par troubles hydroélectrolytiques, allongement du QT (risque de torsade de pointe) – Péricardite de dénutrition – Insuffisance cardiaque Complications • Digestives – Oesophagite peptique – Altérations dentaires – Perturbations du bilan hépatique voire cytolyse importante et IHC • Osseuses : – Ostéoporose, fractures Complications • Rénales : – Œdèmes périphériques – Insuffisance rénale fonctionnelle – Hypophosphorémie • Dermatologiques : – Hypercarotinémie – Acrocyanose – Escarres, nécroses cutanées Complications • Neurologiques : centrales et/ou périphériques (coma, crises convulsives, neuropathies périphériques…), ralentissement psycho-moteur, confusion • Risque infectieux • Infertilité Signes de gravité • • • • • • Perte >20% du poids en <3 mois, aphagie IMC <14 TAS<9, TAD<6, bradychardie (<40) Température <35°C Troubles hydro-électrolytiques, Anomalies ECG Bradyphémie, bradypsychie, troubles de la conscience • Psychiatriques Evolution • • • • 30 à 55 % : guérison 70 % : évolution favorable, à long terme 1/3 : chronicisation, rechutes Mortalité élevée : 5 à 10% des cas, soit 12 fois + élevée que dans la population générale du même âge (complications somatiques, suicide) Facteurs de bon pronostic • • • • • • Début à l adolescence Prise en charge précoce Forme restrictive pure Bon entourage Existence d un facteur déclenchant Déni modéré du trouble Diagnostics différentiels • Étiologies somatiques d anorexie : – Néoplasique – Digestives (maladie de Crohn…) – Endocriniennes (hyperthyroïdie, diabète…) – Tuberculose, SIDA… Diagnostics différentiels • Étiologies psychiatriques d anorexie : – Dépression – Schizophrénie (refus alimentaire délirant) – Phobie – TOC Boulimie Epidémiologie • Prévalence : 1 à 3% des adolescentes et femmes jeunes • Sex ratio : 9 femmes/1 homme • Adolescentes et adultes jeunes, pic vers 18-20 ans Clinique • Crises de boulimie • Présence de comportements compensateurs inappropriés pour éviter la prise de poids • Les crises et les comportements compensateurs sont survenus au – 2 fois/ semaine pendant les 3 derniers mois • Estime de soi excessivement influencée par le poids et les formes Crise de boulimie • Manger sur une courte période (<2 heures) une quantité très importante de nourriture • Sentiment de perte de contrôle pendant la crise • Prodromes : anxiété, malaise vague, dysphorie Crise de boulimie • Début brutal, impérieux • Soulagement des émotions à court terme • Fin de l accès : malaise physique (asthénie, douleurs, pesanteur, nausées) et psychique (honte, culpabilité) Sous types • Avec vomissements ou prise de purgatifs • Sans vomissements ni prise de purgatifs (autres mécanismes compensatoires) Stratégies de contrôle du poids • • • • Vomissements provoqués Prise de laxatifs/diurétiques/anorexigènes Hyperactivité physique Jeûne (dans 50% des cas : anorexieboulimie associées) Examen clinique • Poids : >, <, normal • Douleurs abdominales, troubles digestifs • Complications dues aux vomissements : parotidomégalie, ulcérations buccopharyngées, troubles dentaires • Signes liés à la restriction alimentaire (cf anorexie) Complications liées aux vomissements • Syndrome de Mallory-Weiss • Rupture œsophagienne • Hypokaliémie avec retentissement cardiaque • Pneumopathie d inhalation • Pneumomédiastin Complications dues à abus laxatifs/ diurétiques • Déshydratation extra-cellulaire avec hypovolémie • Insuffisance rénale • Maladie des laxatifs (diarrhée, amaigrissement, hypokaliémie) Comorbidités • Épisode dépressif • Trouble anxieux • Trouble de la personnalité en particulier borderline (état limite) • Conduites addictives (alcool, toxiques) • Scarifications Évolution et pronostic • Guérison/amélioration : 2/3 des cas • Chronicisation : 1/3 des cas • Mortalité : 0,3% Diagnostics différentiels • Grignotages • Hyperphagie / Binge eating disorder (pas de contrôle du poids) • Pathologies organiques : sd frontal, démence, séquelles de TC ou d infection, tumeur, épilepsie temporale, Sd de Kleine-Levin (hypersomnie/hypephagie) • Iatrogènes (anti-psychotiques) • Autres pathologies psychiatriques Traitement • Ambulatoire en 1ère intention (sauf urgence), sur le long terme • Évaluation initiale : somatique, psychique, familiale et sociale • Critères d hospitalisation (cf) : – Somatiques – Psychiatriques – Environnementaux • Importance de l adhésion et de la coopération de la patiente Traitement • Pluridisciplinaire : – Psychothérapique – Diététique – Somatique – Sociale, prise en charge de l entourage • Importance de la continuité et de la coordination des soins Aspect nutritionnel • Déterminer un objectif pondéral avec le patient mais objectif pas que pondéral : alimentation qualitative et quantitative satisfaisante • Re-nutrition progressive, surveillance ingestats • Éducation diététique • Surveillance clinique et biologique si dénutrition importante, avec supplémentations initiales • Sevrage : crises boulimie et vomissements Aspect somatique • Surveillance clinique et biologique : prévenir et traiter les complications somatiques • Chez les enfants et adolescents : croissance et stade pubertaire • Sevrage médicamenteux (laxatifs, diurétiques) Aspects psycho-sociaux • Thérapies les plus usuelles : – De soutien – Analytique ou psychodynamique – Thérapie Cognitive et Comportementale (TCC) – Thérapies systémiques et stratégiques – Enfants et adolescents : thérapie familiale Aspects psycho-sociaux • +/- associées à : – Prise en charge corporelle (relaxation, kinésithérapie…) – Thérapie de groupe, hôpital de jour – Art-thérapie – Groupe de familles, PEC des familles • PEC sociale : professionnelle, scolaire Hospitalisation temps plein • • • • Urgences somatiques ou psychiques, cf critères Sous contrainte si indication Contrat thérapeutique (cadre, rassurant) PEC pluri-disciplinaire – Nutritionnelle : +/- re-nutrition par sonde, Attention au syndrome de re-nutrition inappropriée – Somatique, psychiatrique, sociale • Stabilisation (poids, psychique) avant sortie Contrat thérapeutique • Toujours défini avec la patiente • Objectif pondéral • Cadre de l hospitalisation : – Repas – Pesées – Visites, téléphone, sorties – Surveillance Recommandations HAS www.has-sante.fr Traitement • Traitement médicamenteux : – Non systématique – Antidépresseur si EDM – +/-anxiolytiques – +/-anti-impulsivants (thymo-régulateurs…) Traitement Boulimie • Hospitalisation : – Mêmes critères que pour l anorexie – État de mal boulimique • Prise en charge : idem anorexie Hypothèses étiologiques • Plurifactoriel • Psychodynamique : perturbation du lien précoce mère-enfant • Cognitive et comportementale : distorsion acquises de l image du corps et de l alimentation Hypothèses étiologiques • Génétique : agrégation familiale et étude de jumeaux • Biologique : anomalies de certains neurotransmetteurs (MAO, sérotonine) intervenant dans la régulation de la faim (à l origine et entretenant le trouble) Etiopathogénie Modèle BioPsycho-Social TCA Facteurs Prédisposants Individu Développement Facteurs psychologiques traits de personnalité comorbidité déficit cognitif et émotionnel ? Biologie Génétique Acquis Stress/carences? Facteurs pérennisants Facteurs précipitants bio-psycho-sociaux Evénement (séparation) Adolescence bio-psycho-sociale insatisfaction concernant le poids et la silhouette Famille comorbidité identifications éducation génétique Relations familiales Socio- Culturel Minceur idéalisée Adaptation sociale Adaptation de Garner 1993 Lancet Régime pour augmenter estime de soi maitrise de soi Symptômes de dénutrition réaction des autres La restriction cognitive (Herman et Polivy) • Intention de contrôler mentalement son comportement alimentaire dans le but de maigrir ou de ne pas grossir • Ne préjuge pas de la réussite ou de l échec du contrôle du comportement alimentaire ou du poids • Le contrôle mental aboutit à une alimentation réflexive, qui s oppose à une alimentation intuitive, où, au contraire, le mangeur se fie principalement à ses sensations alimentaires pour déterminer les aliments consommés et les quantités La restriction cognitive • Le contrôle cognitif domine les mécanismes de régulation alimentaire : – Effacement des signaux physiologiques – Dégradation de la relation avec les aliments, dont le contenu émotionnel devient négatif – Aliments interdits – Cognitions parfois erronées autour de l alimentation Alimentation Émotions Sensations alimentaires Motivation et décision Prise alimentaire Cognitions La restriction cognitive • Dans les phases de boulimie : – Relation addictive à la nourriture : désir exacerbé du produit interdit, obsession, lutte pour ne pas le consommer, caractère compulsif du passage à l acte et soulagement – Alternance de phase d hyper-contrôle et de perte de contrôle -> cercle vicieux autoentretenu Exemple d une PEC en HDJ • Groupe de patientes 1 jour/semaine • PEC : – Thérapie de groupe d inspiration TCC : travail sur les cognitions et les comportements – Diététique : ré-éducation, cahier de surveillance alimentaire – Repas thérapeutiques Exemple d une PEC en HDJ • Évaluation des conséquences : – Émotionnelles – Relationnelles – Pondérales – Physiques • Utilisation du carnet alimentaire Exemple d une PEC en HDJ • Travail sur les aspects cognitifs : – Distorsions cognitives, croyances irrationnelles autour de l alimentation, pensées automatiques – Lien image du corps/poids et estime de soi – Alimentation intuitive – Mettre en évidence les facteurs déclenchant/ favorisant (aspect émotionnel) Exemple d une PEC en HDJ • Travail sur les aspects comportementaux : – Évaluation et auto observation des comportements – Carnet alimentaire – Exposition à la nourriture, repas thérapeutiques – Exercices à domicile • Lutte contre les facteurs de maintien (bénéfices secondaires) Régulation des émotions Pensées négatives sur Soi-même Les autres Les conditions de vie Axes de prise en charge EMOTIONS NEGATIVES Intolérance émotionnelle Prises alimentaires Image négative du corps Acceptation de soi, approche corporelle Relation négative avec les aliments 72 Traitement de la restriction cognitive Alimentation intuitive • • • • Sensations corporelles, écoute des besoins Sensation faim, générale et spécifique Sensation satiété, générale et spécifique Image de soi et poids Bibliographie • www.has-sante.fr : recommandations sur l anorexie, juin2010 • L infirmière magazine, cahier de formation continue, mai 2010