L’Encéphale
(2013)
39,
432—438
Disponible
en
ligne
sur
www.sciencedirect.com
journal
homepage:
www.em-consulte.com/produit/ENCEP
PSYCHOPATHOLOGIE
Symptomatologie
prémenstruelle,
somatisation
et
anhédonie
physique
Premenstrual
symptomatology,
somatization
and
physical
anhedonia
M.
Bridou,
C.
Aguerre
Département
de
psychologie,
UFR
arts
et
sciences
humaines,
université
Franc¸ois-Rabelais,
EA2114
«
psychologie
des
âges
de
la
vie
»,
3,
rue
des
Tanneurs,
37041
Tours
cedex
1,
France
Rec¸u
le
10
avril
2011
;
accepté
le
25
juin
2012
Disponible
sur
Internet
le
8
octobre
2012
MOTS
CLÉS
Symptomatologie
prémenstruelle
;
Anhédonie
physique
;
Somatisation
;
Dimension
psychologique
Résumé
Introduction.
Des
perturbations
physiques,
émotionnelles
et/ou
comportementales
appa-
raissent
fréquemment
lors
de
la
phase
prémenstruelle
chez
de
nombreuses
femmes.
D’intensité
modérée
à
forte,
ces
symptômes
variés
viennent
parfois
entraver
le
fonctionnement
person-
nel,
social
et/ou
professionnel
habituel
en
générant
une
souffrance
physique
et
émotionnelle
significative.
Malgré
des
liens
solides
associant
la
dépressivité
et
les
troubles
prémenstruels,
la
dimension
psychologique
de
la
symptomatologie
prémenstruelle
reste
encore
méconnue.
Objectif.
L’objectif
de
cette
étude
est
d’examiner
les
liens
éventuels
entre
une
symptoma-
tologie
prémenstruelle
modérée
et
certains
modes
de
traitement
des
informations
corporelles
et
émotionnelles,
à
savoir
la
somatisation
et
l’anhédonie
physique.
Méthode.
Cent
cinq
étudiantes
en
psychologie
de
l’université
de
Tours
(France)
ont
été
invi-
tées
à
remplir
les
versions
francophones
du
Menstrual
Distress
Questionnaire,
de
la
sous-échelle
somatisation
de
la
Symptom
Check-List
90
et
de
la
Physical
Anhedonia
Scale.
Résultats.
Les
principaux
résultats
révèlent
que
la
symptomatologie
prémenstruelle
est
corré-
lée
positivement
avec
la
somatisation
et
négativement
avec
l’anhédonie
physique.
La
capacité
des
femmes
à
éprouver
du
plaisir
et
la
tendance
à
somatiser
seraient
susceptibles
de
participer
à
l’émergence
d’une
symptomatologie
prémenstruelle.
Conclusion.
Ces
résultats
nous
permettent
d’enrichir
nos
connaissances
sur
l’origine
et
la
nature
de
la
symptomatologie
prémenstruelle
qui
seraient
à
la
fois
physiologique,
psycholo-
gique
et
sociale
afin
d’adapter
et
élargir
les
options
thérapeutiques
en
proposant,
en
parallèle
aux
traitements
médicamenteux
spécifiques,
des
interventions
psychologiques
basées
sur
des
techniques
cognitives
et
comportementales
visant
une
décentration
et
une
réattribution
des
symptômes
physiques.
©
L’Encéphale,
Paris,
2012.
Auteur
correspondant.
Adresse
e-mail
:
(M.
Bridou).
0013-7006/$
see
front
matter
©
L’Encéphale,
Paris,
2012.
http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2012.08.003
Symptomatologie
prémenstruelle,
somatisation
et
anhédonie
physique
433
KEYWORDS
Premenstrual
symptomatology;
Physical
anhedonia;
Somatization;
Psychological
dimension
Summary
Introduction.
Physical
(headache,
abdominal
pain,
e.g.),
emotional
(irritability,
diminution
of
self-esteem,
e.g.)
and/or
behavioral
disturbances
(fatigue,
decrease
of
libido,
e.g.)
appear
frequently
during
the
premenstrual
phase
of
menstrual
cycles.
Of
moderate
to
severe
intensity,
these
varied
symptoms
sometimes
hinder
the
usual
personal,
social
and/or
professional
func-
tioning
by
generating
significant
suffering.
Thus,
premenstrual
syndrome
(PS)
and
premenstrual
dysphoric
disorder
(PDD)
are
closely
related
to
depressive
disorders
in
many
prior
studies.
In
spite
of
solid
links
associating
depression
with
premenstrual
disorders
in
the
literature,
the
psychological
dimension
of
the
premenstrual
symptomatology
still
remains
underestimated.
Objective.
The
objective
of
this
study
is
to
examine
the
nature
of
possible
relationships
bet-
ween
a
moderate
premenstrual
symptomatology
and
different
modes
of
information
processing
with
physical
and
emotional
stimuli,
such
as
somatization
and
physical
anhedonia,
well-known
symptoms
of
depressive
disorders.
Method.
One
hundred
and
five
students
in
psychology
from
the
Franc¸ois
Rabelais
university
(France),
aged
between
18
to
50
years
old
(M
=
20.98,
SD
=
3.43),
were
invited
to
fill
in
French
versions
of
the
Menstrual
Distress
Questionnaire
[25]
(Moos,
1991),
the
somatization
subscale
of
the
Symptom
Check-List
90
[26]
(Derogatis
&
Cleary,
1977),
and
the
Physical
Anhedonia
Scale
[28]
(Chapman
et
al.,
1976).
Pearson
correlation
coefficients
were
calculated
and
a
multiple
regression
analysis
was
conducted
with
Statistica
software.
Results.
Main
results
reveal
that
premenstrual
symptomatology
is
positively
related
to
soma-
tization
(r
=
0.58;
P
<
0.001)
and
negatively
to
physical
anhedonia
(r
=
0.27;
P
<
0.05).
Physical
anhedonia
(
=
0.20;
P
<
0.05)
and
somatization
(
=
0.55;
P
<
0.001)
may
take
part
in
the
appearance
of
a
premenstrual
symptomatology.
Conclusion.
These
results
allow
us
to
enrich
our
knowledge
on
the
origin
and
the
nature
of
the
premenstrual
symptomatology,
which
would
be
physiological,
psychological
and
social,
in
order
to
adapt
and
widen
the
therapeutic
options
by
proposing,
in
parallel
with
the
specific
medical
treatments,
psychological
interventions
based
on
cognitive
and
behavioral
techniques
aiming
a
decentralization
and
a
restructuration
of
the
physical
symptoms.
©
L’Encéphale,
Paris,
2012.
Introduction
De
nombreuses
femmes
se
plaignent
régulièrement
de
perturbations
physiques
et/ou
émotionnelles
variées,
sur-
venant
préférentiellement
lors
de
la
phase
lutéale
du
cycle
menstruel,
encore
appelée
«
phase
prémenstruelle
».
Les
perturbations
les
plus
fréquemment
citées
peuvent
être
regroupées
en
trois
catégories
distinctes
[1]
:
les
«
perturbations
comportementales
»
(fatigabilité,
diminu-
tion
de
la
libido,
etc.)
;
les
«
perturbations
psychologiques
»
(irritabilité,
baisse
de
l’estime
de
soi,
etc.)
;
et
les
«
perturbations
physiques
»
(maux
de
tête,
douleurs
abdo-
minales,
etc.).
Bien
que
ces
impondérables
soient
plutôt
décrits
comme
gênants
et/ou
contrariants,
ils
sont
généra-
lement
de
faible
intensité
et
ne
vont
pas
nécessairement
jusqu’à
entraver
le
bon
déroulement
des
activités
quoti-
diennes
habituelles.
Nonobstant
ces
faits
non
alarmants,
force
est
parfois
de
constater
que
les
perturbations
de
la
phase
prémens-
truelle
se
manifestent
de
manière
trop
récurrente
(plusieurs
cycles
consécutifs),
et/ou
avec
une
intensité
fulgurante
(apparition
brutale
de
symptômes
d’intensité
modérée
à
forte),
induisant
un
certain
nombre
de
répercussions
néga-
tives
suffisamment
importantes
pour
nuire
à
la
qualité
de
vie,
telles
qu’une
diminution
substantielle
de
la
producti-
vité
au
travail,
un
taux
d’absentéisme
élevé,
ainsi
qu’un
recours
massif
aux
soins
médicaux
et
aux
traitements
médi-
camenteux
[2,3].
On
parle
alors
de
«
syndrome
prémenstruel
»
(SP),
fai-
sant
référence
à
:
«
un
ensemble
polysymptomatique
de
signes
psychologiques
et/ou
physiques
survenant
élective-
ment
avant
les
règles
et
cédant
avec
celles-ci
»
[4].
Notons
que
ce
type
de
diagnostic
peut
être
posé
uniquement
s’il
existe
une
période
rigoureusement
asymptomatique
au
début
de
chaque
cycle
[5].
Le
«
trouble
dysphorique
pré-
menstruel
»
(TDP)
représente
quant
à
lui
la
forme
la
plus
sévère
du
SP
avec
des
symptômes
particulièrement
marqués
(au
moins
six
symptômes
par
cycle)
et
des
conséquences
délétères
sur
le
bon
déroulement
de
la
vie
quotidienne
[6].
Certaines
recherches
tendent
à
montrer
que
le
SP
et
le
TDP
ne
sont
pas
aussi
rares
que
l’on
pourrait
le
penser
au
sein
de
la
population
générale.
Plusieurs
études
évoquent,
dans
5
à
8
%
des
cas,
des
symptomatologies
modérées
et
sévères
ayant
des
répercussions
importantes
sur
la
vie
quotidienne
nécessitant,
par
même,
le
recours
à
un
avis
médical
et
à
un
traitement
[7,8].
En
France,
une
récente
étude
épidémio-
logique
menée
auprès
de
2863
femmes
en
âge
de
procréer
indique
que
12,2
%
d’entre
elles
répondraient
aux
critères
du
SP
[9].
Notons
par
ailleurs
que
40,5
%
des
femmes
de
cette
étude
expérimenteraient
régulièrement
un
certain
nombre
de
symptômes
prémenstruels
sans
que
l’on
puisse
évoquer
un
diagnostic
de
SP
[9],
suggérant
une
proportion
plus
importante
de
femmes
concernées
par
une
détresse
prémenstruelle
que
présupposée.
Les
études
portant
sur
le
SP
insistent
habituellement
sur
l’importance
des
variations
de
l’humeur
dans
la
434
M.
Bridou,
C.
Aguerre
symptomatologie
prémenstruelle.
Il
a
en
effet
été
constaté
que
les
femmes
éprouvaient
des
niveaux
de
dépression
significativement
plus
élevés
pendant
la
phase
prémens-
truelle
comparativement
aux
autres
phases
du
cycle
menstruel
[10,11].
Outre
une
humeur
dysphorique,
d’autres
symptômes
généralement
associés
aux
troubles
de
l’humeur
ont
pu
être
identifiés
chez
les
femmes
se
plaignant
d’une
symptomatologie
prémenstruelle,
tels
qu’un
net
désintérêt
pour
les
activités
habituelles,
une
grande
fatigabilité,
un
ralentissement
psychomoteur,
des
troubles
du
sommeil,
ou
des
difficultés
de
concentration
[12—14].
Par
ailleurs,
on
retrouve
davantage
de
troubles
dépressifs
majeurs
chez
les
femmes
souffrant
d’un
TDP
avéré
[15,16].
Ainsi,
le
TDP
est
actuellement
mentionné
dans
le
DSM-IV
[17]
parmi
les
troubles
de
l’humeur
non
spécifiés,
en
l’attente
de
données
provenant
d’études
complémentaires
permettant
de
mieux
le
caractériser.
Bien
que
plusieurs
auteurs
s’accordent
pour
considérer
ce
trouble
comme
une
variante
du
trouble
dépressif,
certains
d’entre
eux
s’interrogent
sur
le
fait
qu’il
puisse
s’agir
bel
et
bien
d’une
entité
clinique
distincte
[18,19],
dans
la
mesure
les
symptômes
physiques
éprou-
vés
lors
de
la
phase
prémenstruelle
seraient
étroitement
associés
aux
symptômes
dépressifs
ressentis
lors
de
cette
même
phase
[20].
Sur
la
base
de
ces
constats,
l’objectif
de
notre
étude
est
d’examiner
la
nature
des
liens
éventuels
entre
une
sympto-
matologie
prémenstruelle
et
certains
modes
de
traitement
des
informations
corporelles
et
émotionnelles
fréquemment
associés
à
des
états
dépressifs,
à
savoir
la
«
somatisation
»
et
l’«
anhédonie
».
D’une
part,
les
états
dépressifs
sont
bien
connus
chez
des
patients
se
plaignant
de
symptômes
ou
dou-
leurs
somatiques,
que
ceux-ci
soient
les
fruits
d’une
lésion
ou
affection
somatique
réelle
ou
non.
Par
exemple,
des
scores
élevés
à
l’échelle
de
somatisation
ont
été
retrouvés
chez
les
femmes
dépressives
atteintes
d’un
syndrome
pré-
menstruel
[21].
D’autre
part,
certains
auteurs
n’hésitent
pas
à
considérer
l’anhédonie
comme
un
indicateur
important,
voire
central,
d’un
état
dépressif
[22].
Méthode
Les
participants
Les
données
ont
été
recueillies
auprès
de
105
étudiantes
en
psychologie
de
l’université
de
Tours,
âgées
de
18
à
50
ans
(M
=
20,98
ans,
SD
=
3,43).
Elles
ont
été
sollicitées
en
début
de
cours
magistraux
à
l’université
de
Tours.
Elles
ont
toutes
donné
explicitement
leur
accord
écrit
pour
participer
à
l’étude
et
ont
été
invitées
à
remplir
une
batterie
de
ques-
tionnaires
standardisés
présentés
ci-après.
Les
variables
évaluées
La
symptomatologie
prémenstruelle
Il
existe
plusieurs
outils
permettant
de
mesurer
la
sympto-
matologie
prémenstruelle
subsyndromique
qui
concernerait
de
nombreuses
femmes.
Le
choix
du
Menstrual
Distress
Questionnaire
(MDQ
;
[23]),
pour
cette
étude,
s’est
tou-
tefois
imposé
car
il
s’agit
de
l’instrument
le
plus
connu
et
le
plus
cité
dans
la
littérature
portant
sur
les
troubles
prémenstruels
[24].
De
plus,
il
s’agit
d’un
outil
pouvant
être
utilisé
de
manière
rétrospective.
Le
MDQ
est
un
auto-questionnaire
de
47
items
utilisé
pour
évaluer
l’intensité
et
la
prévalence
de
la
symptomatolo-
gie
apparaissant
spécifiquement
pendant
le
cycle
menstruel
et
notamment
pendant
sa
phase
lutéale.
Une
analyse
fac-
torielle
a
permis
de
dégager
huit
facteurs
pour
la
version
originale
anglophone
:
«
douleur,
concentration,
change-
ment
de
comportement,
réaction
autonome,
rétention
d’eau,
affectivité
négative,
excitation/éveil
et
contrôle
».
Les
coefficients
alpha
de
Cronbach
oscillent
entre
0,54
et
0,94
pour
ces
différents
facteurs
et
la
fiabilité
test-retest
semble
satisfaisante
[25].
À
notre
connaissance,
il
n’existe
pas
encore
de
version
en
langue
franc¸aise
du
MDQ.
Une
version
francophone
du
MDQ
a
donc
été
créée
par
nos
soins.
Des
analyses
fac-
torielles
en
composantes
principales
ont
été
effectuées
pour
vérifier
la
structure
factorielle
de
cette
version
fran-
cophone.
Ces
analyses
ont
mis
en
évidence
un
modèle
unifactoriel
rassemblant
l’ensemble
des
items
et
expli-
quant
27,60
%
de
la
variance
(valeur
propre
=
12,97).
La
fiabilité
de
cette
version
est
relativement
bonne
(
de
Cronbach
=
0,93).
Une
structure
factorielle
reprenant
les
huit
dimensions
du
MDQ
a
également
été
vérifiée
(variance
expliquée
=
60,14
;
de
Cronbach
allant
de
0,41
à
0,86).
La
somatisation
Le
Symptom
Check-List
90-R
(SCL
90-R
;
[26])
est
une
échelle
d’auto-évaluation
de
90
items
permettant
de
mesu-
rer
l’intensité
de
certains
symptômes
psychologiques
et
psychopathologiques.
La
version
franc¸aise
du
SCL
90-R
a
été
publiée
par
Pariente
et
al.
[27].
Neuf
facteurs
ont
été
identifiés
:
«
somatisation,
symptômes
obsessionnels,
sensibilité
interpersonnelle
ou
vulnérabilité,
dépression,
anxiété,
hostilité,
phobie,
traits
paranoïaques,
traits
psy-
chotiques
et
symptômes
divers
».
Par
ailleurs,
Derogatis
et
Cleary
[26]
indiquent
l’existence
d’une
consistance
interne
acceptable
de
l’échelle
avec
un
alpha
de
Cronbach
de
0,77.
La
fidélité
test-retest
est
satisfaisante
sur
une
durée
de
huit
jours
(coefficient
de
corrélation
de
0,78).
Dans
cette
étude,
nous
avons
choisi
de
ne
faire
passer
que
la
sous-échelle
somatisation
de
la
SCL
90-R
qui
comprend
12
items.
L’anhédonie
physique
La
Physical
Anhedonia
Scale
(PAS
;
[28])
est
une
échelle
d’auto-évaluation
de
61
items
mise
au
point
pour
mesurer
l’anhédonie
physique.
La
capacité
diminuée
à
éprouver
du
plaisir
physique
est
définie,
ici,
par
l’absence
de
plaisir
lié
à
la
nourriture,
au
toucher,
aux
odeurs,
à
l’activité
sexuelle,
à
la
température,
aux
mouvements,
aux
sons
et
aux
sensa-
tions
physiques
en
général.
La
PAS
a
été
adaptée
et
validée
en
franc¸ais
par
Loas
et
al.
[29,30]
qui
ont
mis
en
évidence
une
consistance
interne
satisfaisante.
Les
analyses
statistiques
L’ensemble
des
données
a
été
saisi
et
analysé
à
l’aide
du
logiciel
informatique
STATISTICA
version
9.
Une
analyse
des
coefficients
de
corrélation
de
Pearson
a
permis
de
préciser
la
Symptomatologie
prémenstruelle,
somatisation
et
anhédonie
physique
435
Tableau
1
Moyennes
et
écart-types
des
scores
obtenus
au
Menstrual
Distress
Questionnaire
(MDQ),
à
la
Physical
Anhe-
donia
Scale
(PAS)
et
à
la
sous-échelle
somatisation
de
la
Symptom
Check-List
90-R
(SCL
90-R).
Questionnaires
(n
=
105)
M
SD
MDQ
Total 102,02 28,48
Douleur
18,28 5,55
Concentration
13,66 5,22
Changement
de
comportement
11,80
4,86
Réaction
autonome
6,94
3,01
Rétention
d’eau
9,77
3,47
Affectivité
négative
18,39
7,49
Excitation/Éveil
11,55
4,92
Contrôle
9,65
3,44
PAS
15,08
7,26
SCL
90-R
(Somatisation)
7,17
5,43
nature
des
relations
entre
les
différentes
variables
de
cette
étude.
Enfin,
une
analyse
de
régression
linéaire
multiple
a
été
réalisée
afin
de
déterminer
les
éventuelles
variables
explicatives
de
la
symptomatologie
prémenstruelle.
Enfin,
des
tests
t
de
Student
ont
été
effectués
afin
d’étudier
la
significativité
des
coefficients
de
régression
partielle
réduits
des
prédicteurs
supposés.
Résultats
Les
scores
moyens
obtenus
pour
chaque
questionnaire
par
les
femmes
interrogées
dans
cette
étude
sont
présentés
dans
le
Tableau
1.
Les
plaintes
se
centrent
particulièrement
sur
les
symptômes
caractérisant
les
facteurs
«
douleur
»
et
«
affectivité
négative
»,
tels
que
des
maux
de
ventre
(40,26
%),
des
douleurs
dans
le
dos
(25,97
%),
une
fatigue
(25,32
%),
une
irritabilité
(20,13
%),
un
mal-être
général
(18,83
%),
des
sautes
d’humeur
(18,18
%),
une
attitude
casa-
nière
(16,88
%)
et
des
maux
de
tête
(15,58
%).
Les
corrélations
entre
les
différentes
variables
ont
été
étudiées
pour
déterminer
la
fac¸on
dont
elles
s’associent
entre
elles
(Tableau
2).
Ces
résultats
indiquent
une
corré-
lation
négative
(r
=
0,27
;
p
<
0,05)
entre
les
scores
moyens
obtenus
à
l’échelle
«
d’anhédonie
physique
»
(PAS)
et
ceux
obtenus
à
l’échelle
évaluant
la
«
symptomatologie
prémens-
truelle
»
(MDQ).
Plus
particulièrement,
les
scores
moyens
à
la
PAS
sont
inversement
proportionnels
aux
scores
obte-
nus
aux
facteurs
«
réaction
autonome
»
(nausées,
bouffées
de
chaleur),
«
rétention
d’eau
»
(prise
de
poids,
problèmes
de
peau),
«
affectivité
négative
»
(tension,
changements
d’humeur),
«
excitation/éveil
»
(excitation,
sentiment
de
bien-être)
et
«
contrôle
»
(bourdonnements
dans
les
oreilles,
augmentation
du
rythme
cardiaque).
De
plus,
les
scores
obtenus
au
MDQ,
dans
sa
globalité
(r
=
0,58
;
p
<
0,001)
et
pour
chacune
de
ses
sous-échelles,
sont
corrélés
avec
ceux
obtenus
à
l’échelle
de
«
somatisation
»
(SCL
90-R).
Il
n’existe
pas
de
corrélation
significative
entre
les
scores
Tableau
2
Corrélations
entre
les
scores
obtenus
au
Mens-
trual
Distress
Questionnaire
(MDQ)
et
ceux
obtenus
à
la
Physical
Anhedonia
Scale
(PAS)
et
à
la
sous-échelle
soma-
tisation
de
la
Symptom
Check-List
90-R
(SCL
90-R).
Questionnaires
(n
=
105)
PAS
r
SCL
90-R
(Somatisation)
r
MDQ
0,27*0,58**
Douleur
0,09 0,46**
Concentration
0,16 0,45**
Changement
de
comportement
0,11
0,35**
Réaction
autonome
0,20*0,34**
Rétention
d’eau
0,26*0,30*
Affectivité
négative
0,26*0,56**
Excitation/Éveil
0,29*0,26*
Contrôle
0,22*0,61**
*p
<
0,05
;**p
<
0,001.
obtenus
aux
échelles
«
d’anhédonie
physique
»
(PAS)
et
de
«
somatisation
»
(SCL
90-R).
Une
analyse
de
régression
multiple
a
été
réalisée
afin
de
spécifier
la
nature
et
le
poids
statistique
des
variables
qui
participent,
en
partie,
à
l’émergence
d’une
symptomatolo-
gie
prémenstruelle
teintée
de
symptômes
psychologiques.
Les
coefficients
de
régression
partielle
réduits
ont
été
examinés
pour
chacune
des
variables
supposées
jouer
un
rôle
dans
la
survenue
d’une
symptomatologie
prémens-
truelle
(pour
la
PAS
:
=
0,20
;
pour
la
SCL
90-R
:
=
0,55).
Afin
d’étudier
la
significativité
des
coefficients
de
régres-
sion
partielle
réduits
des
prédicteurs
supposés
anhédonie
et
somatisation,
des
tests
t
de
Student
ont
été
effec-
tués.
Les
résultats
révèlent
que
les
coefficients
de
ces
variables
indépendantes
sont
significatifs
(respectivement
t
=
2,53
;
p
<
0,013
et
t
=
7,00
;
p
<
0,0001).
Ainsi,
le
modèle
fait
intervenir
l’absence
d’anhédonie
et
la
somatisation
comme
prédicteurs
d’une
symptomatologie
prémenstruelle.
De
plus,
un
coefficient
de
détermination
R2a
été
calculé
afin
de
mettre
en
évidence
le
pourcentage
de
variation
de
la
symptomatologie
prémenstruelle
expliqué
de
fac¸on
conju-
guée
par
l’absence
d’«
anhédonie
»
et
la
«
somatisation
».
L’absence
d’«
anhédonie
»
et
la
«
somatisation
»
expliquent
plus
de
37
%
de
la
variance
de
la
«
symptomatologie
prémens-
truelle
»
(Fig.
1).
Anhédonie
(PAS)
Somat
isat
ion
(SCL 90
-R)
Sévérité d
e la
symptoma
tolog
ie
prémenstruelle
(MDQ)
ß= -.20
ß= .55
Figure
1
Modèle
de
régression
linéaire
susceptible
d’expliquer
l’émergence
de
la
symptomatologie
prémens-
truelle.
436
M.
Bridou,
C.
Aguerre
Discussion
L’objectif
de
cette
étude
était
d’étudier
les
liens
éven-
tuels
entre
la
tendance
à
somatiser,
l’incapacité
de
ressentir
du
plaisir
physique
et
l’expression
de
symptômes
prémens-
truels.
En
premier
lieu,
une
corrélation
positive
a
pu
être
obser-
vée
entre
symptomatologie
prémenstruelle
et
somatisation.
Les
femmes
ayant
généralement
tendance
à
somatiser
sont
davantage
enclines
à
se
plaindre
de
symptômes
pen-
dant
la
phase
lutéale
de
leur
cycle
menstruel.
Ce
résultat
est
à
rapprocher
des
recherches
actuelles
qui
associent
le
concept
de
somatisation
à
un
style
perceptivo-cognitif
appelé
«
amplification
somatosensorielle
»
[31,32].
Ce
der-
nier
est
défini
comme
une
propension
à
percevoir
de
manière
sélective
de
nombreuses
sensations
corporelles,
y
compris
les
plus
anodines
et
inoffensives,
et
à
les
interpréter
comme
les
signes
et
symptômes
d’une
pathologie
somatique
plus
ou
moins
sérieuse.
Cela
pourrait
expliquer,
du
moins
en
partie,
que
les
femmes
ayant
une
forte
propension
à
somatiser
et
à
amplifier
les
sensations
somatiques,
quelles
qu’elles
soient,
remarquent
particulièrement
les
changements
corporels
qui
surviennent
préférentiellement
durant
la
phase
prémens-
truelle
et
les
interprètent
négativement,
augmentant
de
la
sorte
le
nombre
de
plaintes
s’y
rapportant.
Une
corrélation
négative
a
également
pu
être
mise
en
évidence
entre
«
l’anhédonie
physique
»
et
la
«
symptomatologie
prémenstruelle
».
Ce
constat
peut
notamment
s’expliquer
par
le
fait
que
les
menstruations
sont
susceptibles
de
perturber
certaines
activités
physiques
ou
sensorielles
potentiellement
sources
de
plaisir
(activités
sportives
et/ou
sexuelles,
par
exemple).
Durant
cette
période,
une
frustration
pourrait
naître
chez
certaines
femmes,
du
fait
de
ne
pas
pouvoir
pratiquer
ou
apprécier
pleinement
les
activités
qui
leur
procurent
habituelle-
ment
du
plaisir.
Dès
lors,
il
s’ensuivrait
une
appréciation
particulièrement
négative
des
modifications
physiques
et
physiologiques
liées
au
cycle
menstruel
[33].
Cela
pourrait
notamment
favoriser
l’émergence
et
l’amplification
des
symptômes
comportementaux
et
affectivo-émotionnels
caractéristiques
d’un
trouble
prémenstruel.
Par
consé-
quent,
les
femmes
capables
d’éprouver
du
plaisir
physique
rapporteraient
davantage
de
plaintes
au
moment
de
la
phase
prémenstruelle,
du
fait
de
ne
pas
pouvoir
profiter
dans
les
meilleures
conditions
des
sources
habituelles
de
plaisir
physique.
Quelques
données
de
la
littérature
peuvent
venir
étayer
l’hypothèse
selon
laquelle
les
symptômes
prémenstruels
sont
parfois
vécus
comme
une
entrave
au
bon
déroulement
des
activités
de
la
vie
quotidienne,
qu’elles
soient
plaisantes
ou
non.
Notons
tout
d’abord
à
cet
égard
que
des
symptômes
physiques
prémenstruels
plus
importants
sont
remarqués
chez
les
femmes
enclines
au
perfectionnisme,
fort
pro-
bablement
car
elles
tendent
à
percevoir
les
changements
physiologiques
apparaissant
lors
de
la
phase
prémenstruelle
comme
des
éléments
perturbateurs
restreignant
leur
lati-
tude
d’action
optimale
[34,35].
Force
est
par
ailleurs
de
constater
que
la
propension
à
se
plaindre
de
symptômes
prémenstruels
tend
à
être
associée
à
la
«
recherche
de
nouveauté
»,
un
trait
de
tempérament
évoquant
un
compor-
tement
impulsif,
une
excitabilité
et
un
engagement
dans
de
nouvelles
activités
[36].
Les
femmes
avides
de
changements
pourraient
se
sentir
frustrées
lors
de
la
phase
prémens-
truelle
du
fait
de
ne
pouvoir
assouvir
leurs
besoins
en
la
matière
aussi
bien
qu’à
l’ordinaire.
Enfin,
plusieurs
études
se
sont
intéressées
aux
bienfaits
potentiels
de
l’exercice
physique,
dans
le
cadre
de
la
prise
en
charge
des
formes
modérées
à
sévères
du
syndrome
pré-
menstruel
[37—41].
Tout
particulièrement,
il
s’avère
que
la
course
à
pied
ou
la
pratique
de
l’aérobic,
pratiquées
de
manière
régulière,
diminueraient
la
sévérité
de
cer-
tains
symptômes
physiques
prémenstruels
et
favoriseraient
le
maintien
d’un
sentiment
de
bien-être
psychologique.
La
capacité
à
éprouver
du
plaisir
durant
notamment
la
pratique
régulière
d’un
sport
et/ou
d’une
activité
physique
donnée,
est
susceptible
de
modifier
la
perception
des
symptômes
prémenstruels,
décentrant
l’attention
des
femmes
de
ces
derniers
en
encourageant
leur
interprétation
comme
des
variations
physiologiques
anodines.
Conclusion
Le
caractère
protéïforme
de
la
symptomatologie
prémens-
truelle
s’exprime
notamment
à
travers
ses
composantes
physiologiques,
psychologiques
et
sociales.
Ce
constat
se
trouve
renforcé
par
les
résultats
de
cette
étude
qui
sou-
lignent
la
complexité
des
hypothèses
étiopathogéniques
susceptibles
d’expliquer
la
symptomatologie
prémens-
truelle.
Quoi
qu’il
en
soit,
cette
étude
comporte
plusieurs
écueils
qui
en
limitent
la
portée.
D’une
part,
l’échantillon
interrogé
ne
permet
peut-être
pas
d’élucider
la
nature
des
troubles
prémenstruels
avérés.
Aussi,
il
faudrait
compléter
cette
étude
par
des
recherches
menées
au
sein
d’une
population
clinique
présentant
une
symptomatologie
prémenstruelle
plus
marquée,
motivant
le
recours
à
des
consultations
médicales.
D’autre
part,
l’utilisation
d’une
méthodologie
rétrospective
ne
permet
pas
vraiment
de
parler
de
syn-
drome
prémenstruel
dont
le
diagnostic
ne
peut
être
posé
que
de
manière
prospective.
Cette
étude
ne
nous
auto-
rise
donc
pas
à
rendre
compte
de
résultats
spécifiant
le
SP
ou
le
TDP
à
proprement
parler,
mais
caractérisant
plutôt
une
souffrance
prémenstruelle
plus
discrète
et
subclinique,
induisant
des
répercussions
négatives
moindres
sur
la
vie
quotidienne
et
sociale.
En
outre,
rappelons
que
la
mesure
de
la
somatisation
à
l’aide
de
la
SCL
90-R
consiste
à
établir
l’intensité
d’une
liste
de
symptômes
physiques
fréquem-
ment
retrouvés
dans
la
symptomatologie
prémenstruelle.
Le
recours
à
une
autre
échelle
serait
préférable
pour
limiter
la
redondance
éventuelle
des
items,
en
vue
d’augmenter
leur
spécificité.
Il
serait
de
surcroît
intéressant,
dans
le
cadre
de
pro-
chaines
recherches,
d’élargir
le
champ
de
nos
investigations
en
prenant
en
considération
d’autres
facteurs
psycholo-
giques
et
comportementaux
susceptibles
de
jouer
un
rôle
dans
l’apparition
et
le
maintien
d’une
symptomatologie
prémenstruelle.
Cet
effort
nous
semble
primordial
pour
par-
faire
la
compréhension
des
troubles
prémenstruels
et
ainsi
mettre
au
point
des
prises
en
charge
multimodales
adap-
tées.
En
effet,
les
traitements
médicamenteux
tels
que
des
psychotropes
sont
insuffisants
pour
traiter
la
plupart
des
patientes
vues
en
consultation
pour
des
troubles
prémens-
truels.
Comme
le
préconisent
certains
auteurs
[42],
il
est
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