Aide-toi, le ciel t‘aidera Quelques petites idées sur la politique monétaire Par: Gerald Braunberger Frankfurter Allgemeine Zeitung Paris, le 6 octobre 2014 Deux points de vue différents ? • « The Lord gave us two eyes to watch both demand and supply » (Paul Samuelson) • Il se peut que… • … en France on regarde surtout la demande • … en Allemagne on regarde surtout l‘offre • Oui – les traditions culturelles influencent aussi la pensée économique • Mais on peut traverser le fossé Le poids des banques • Une négligence du secteur financier dans beaucoup d‘analyses de la politique monétaire • Mais les banques sont très importantes : • En Allemagne les banques n‘ont pas réduit leur financement des entreprises • En France et en Italie les banques ont réduit leur financement des entreprises • L‘économie en Allemagne marche mieux que l‘économie en France et en Italie. Comme par hasard ? La formule magique : Macrofinance • « Macrofinance » essaye d‘intégrer le secteur financier dans les modèles macroéconomiques • La recherche contemporaine est déjà très riche. • J‘utilise un outil de la recherche de Markus Brunnermeier et Yuliy Sannikov. Deux cercles vicieux La BCE n‘est pas un cavalier seul • Les banques se trouvent au centre de l‘analyse • Il y a un lien étroit entre la stabilité des prix, la stabilité du secteur financier et la stabilité de la dette public • Donc il y a un lien étroit entre la politique monétaire (européenne), la régulation du secteur financier (mieuropéenne, mi-nationale) et la politique fiscale (nationale). • En principe la politique monétaire reste une arme puissante : elle sert comme un assureur contre des risques macroéconomiques très graves. • Mais n‘oublions pas le risque moral lié à une assurance : la politique monétaire peut se trouver sous contrôle soit de la politique fiscale (« fiscal dominance ») ou des banques (« financial dominance ») Illusions sur la politique monétaire (1) • Une déflation sérieuse serait certes un danger très grave. Une déflation sérieuse est très rare. • Mais la zone Euro ne se trouve pas en déflation. Et la BCE n‘attend pas une déflation. • Il y a baisse des prix mais pas déflation. La baisse des prix augmente le pouvoir d‘achat des ménages et augmente la compétitivité des entreprises. • Une dévaluation interne n‘est pas une déflation. Illusions sur la politique monétaire (2) • La politique monétaire n‘est pas très efficace dans un monde sans taux d‘intérêt (« zero lower bound »). • Regardons l‘évolution du bilan de la BCE : les banques ne sont pas illiquides. • Rachat des titres (« quantitative easing ») : ne sert à rien en théorie pure (« Neutralité de Wallace ») • En pratique il y a peut-être des effets transitoires. Mais ils sont incertains et difficiles à calculer. Enfin, le taux de change ! • Soyons franc : un fossé très important entre la France et l‘Allemagne • A l‘instant le taux de change est probablement l‘instrument le plus puissant de la BCE. • Tout de même, les effets de la politique monétaire sur le taux de change sont incertains à long terme. On ne connaît pas par avance la réaction d‘autres banques centrales. • L‘Euro avait dévalué face aux monnaies des pays émergents. Voyez-vous des résultats? • Beaucoup de pays ont lié leur monnaie à l‘Euro – en Europe du Nord, en Europe de l‘Est et en Afrique. Revenons aux banques • Il y a trop de banques en Europe. Beaucoup de banques ne sont guère rentables. La qualité des actifs est souvent fragile. • Les banques européennes ont une insuffisance de fonds propres. • L‘Europe a besoin d‘un secteur financier sain. Mais assainir les banques n‘est pas la tâche de la politique monétaire. • Un marché ABS transparent serait bénéficiaire au SME. Il faut chercher des acheteurs dans le secteur privé (assureurs, fonds de pensions…) Pour conclure • Il ne faut pas surestimer la puissance de la politique monétaire. • La stabilité du secteur financier et une politique fiscale crédible sur le niveau national renforcent la crédibilité et la puissance de la politique monétaire. • Il faut peut-être repenser notre notion du secteur financier : « More generally, the fact that a world full of long-term savings and funding needs continues to be served by a financial system that relies mostly on shortterm funding remains a paradox. » (Brunnermeier/Sannikov) • Mais cela n’est pas pour aujourd’hui.