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R ev u e
de
presse
Coordination : Estelle Louiset (Rouen)
La leptine, la coupable idéale
La leptine,
la coupable idéale
La serpine B1 favorise
la prolifération des
cellules β pancréatiques
Le glucagon est-il
un déclencheur majeur
de l’hyperglycémie
au cours du diabète ?
Thyrotoxicose
gestationnelle :
enfin un second
cas de mutation
du récepteur de la TSH
Utilisation du
pegvisomant
dans la “vraie vie” :
que nous apprend l’étude
française ACROSTUDY ?
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L’obésité est connue pour induire un hyperaldostéronisme qui contribuerait au développement des troubles
métaboliques et cardiovasculaires. La rénine, le potassium et l’ACTH plasmatiques ne sont pas complices de
l’hypersécrétion d’aldostérone associée à l’obésité. En
revanche, la corrélation entre le tour de taille et le taux
d’aldostérone plasmatique avait conduit à mettre en
cause les adipokines. Différents suspects, dont la leptine,
ont été écartés par diverses études. A.C. Huby et al. ont
repris cette quête. Leurs investigations montrent que,
dans la surrénale humaine, le récepteur de la leptine
est exprimé par les cellules productrices d’aldostérone.
In vitro, la leptine stimule l’expression de l’aldostérone
synthase et la sécrétion d’aldostérone par les cellules
d’une lignée corticosurrénalienne humaine. Contre
toute attente, l’effet stimulateur de la leptine sur la production d’aldostérone a également été constaté in vivo
chez la souris. Cet effet est associé à une dysfonction
endothéliale et à une fibrose cardiaque qui peuvent
être prévenues par un traitement par la spirono­
lactone, un antagoniste du récepteur des minéralocorticoïdes. Contrairement aux animaux sauvages, les
souris génétiquement déficientes en leptine (ob/ob)
ou en récepteur de la leptine (db/db) ne développent
pas d’hyper­aldostéronisme lorsqu’on les soumet à un
régime hyper­calorique. La leptine est donc l’adipokine
responsable de l’hyper­aldostéronisme associé à l’obésité
chez la souris. Est-elle aussi coupable chez l’homme ?
Estelle Louiset, Inserm U982, université de Rouen
• Huby AC, Antonova G, Groenendyk J et al. Adipocyte-derived hormone
leptin is a direct regulator of aldosterone secretion, which promotes endothelial dysfunction and cardiac fibrosis. Circulation 2015;132(22):2134-45.
La serpine B1 favorise la prolifération
des cellules β pancréatiques
Il est connu qu’au cours du diabète, la résistance
à l’insuline engendre une hyperplasie des îlots
de Langerhans. Ce phénotype est associé à une
augmentation de la prolifération des cellules β. Les
facteurs responsables de cette élévation restent mal
connus. En utilisant des souris portant une mutation
du récepteur de l’insuline dans le foie (LIR-KO),
A. El Ouaamari et al. suggéraient que la source des
signaux était le foie. Les auteurs ont réalisé une analyse
protéomique qui révèle l’importance de la serpine B1.
Cette molécule est un inhibiteur de protéases très
abondant dans le sécrétome des hépatocytes et
dans le sérum de souris LIRKO. De façon intéressante,
la serpine B1 régule la prolifération des cellules β chez
le poisson zèbre, la souris et l’homme. Son action
semble donc extrêmement conservée entre les espèces.
Par ailleurs, des petites molécules, qui miment les effets
inhibiteurs de la serpine B1 sur l’activité de l’élastase,
augmentent la prolifération des cellules β. De plus, les
souris mutantes pour la serpine B1 ont une prolifération
des cellules β en réponse à une insulinorésistance
qui est atténuée. Enfin, le traitement des îlots de
Langerhans par la serpine B1 permet d’activer des voies
de signalisation impliquées à la fois dans la croissance
et la survie des cellules β.
En conclusion, il semblerait que la serpine B1 puisse être
à la base de nouveaux traitements pharmacologiques
servant à rétablir la masse de cellules β fonctionnelles
chez les patients diabétiques.
Bertrand Duvillié, Inserm U1016, institut Cochin, Paris
• El Ouaamari A, Dirice E, Gedeon N et al. Serpin B1 promotes pancreatic
β cell proliferation. Cell Metab 2016;23(1):194-205.
Le glucagon est-il un déclencheur majeur
de l’hyperglycémie au cours du diabète ?
De façon générale, il est admis que le métabolisme
du glucose dépend de la sécrétion d’insuline et de
glucagon par le pancréas. Selon ce contrôle bihormonal,
le diabète serait dû à la fois à un manque d’insuline,
entraînant une sous-utilisation du glucose, et à un
excès de glucagon, provoquant une surproduction
de glucose. Néanmoins, une étude récente a montré
que l’ablation des cellules β par la streptozotocine
chez des souris ayant une mutation du récepteur
du glucagon n’altère pas leur tolérance au glucose.
Ces souris seraient donc “protégées” par l’inactivation
du récepteur au glucagon, ce qui placerait le glucagon
au premier plan. V.R. Steenberg et al. ont réexaminé ce
concept en utilisant 3 méthodes :
✓✓ la délétion des cellules α ;
✓✓ la neutralisation du glucagon par des anticorps ;
✓✓ l’utilisation d’antagonistes du récepteur du glucagon.
Dans chaque cas, la tolérance au glucose a été évaluée
chez des animaux rendus diabétiques par une injection
de streptozotocine. La destruction des cellules α a été
réalisée par injection de la toxine diphtérique à des
souris transgéniques exprimant le récepteur à la toxine
dans les cellules α. L’efficacité de la méthode a d’abord
été validée en montrant l’absence quasi complète
de cellules α. De façon surprenante, les résultats de cette
étude contredisent ceux de la précédente : la tolérance
Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes et Nutrition - Vol. XX - n° 1-2 - janvier-février 2016
09/02/2016 15:10:20
Revue de presse
au glucose des souris diabétiques n’était pas
améliorée par l’inhibition de la signalisation
du glucagon. Ces travaux redonnent donc
à l’insuline un rôle majeur dans le contrôle
glycémique.
Bertrand Duvillié,
Inserm U1016, institut Cochin, Paris
• Steenberg VR, Jensen SM, Pedersen J et al. Acute disruption
of glucagon secretion or action does not improve glucose
tolerance in an insulin-deficient mouse model of diabetes.
Diabetologia 2016;59(2):363-70.
Thyrotoxicose gestationnelle :
enfin un second cas de mutation
du récepteur de la TSH
P. Rodien et al. ont décrit pour la première
fois en 1998, au sein d’une même famille,
l’existence d’une hyperthyroïdie gestationnelle récidivante en lien avec une mutation
du récepteur de la TSH (Thyroid Stimulating
Hormone) [R-TSH], le rendant anormalement sensible à l’action de l’hCG (Human
Chorionic Gonadotropin). Mais, depuis, aucune
mutation n’a pu être détectée malgré des
recherches itératives. La même équipe vient
de rapporter un second cas de mutation du
R-TSH, qui porte sur le même codon (183)
mais avec un génotype différent. Ce cas ouvre
de nouvelles pistes de réflexion quant à la
traduction clinique, et donc aux patientes à
dépister. L’hyperémèse gravidique a débuté
à 9 semaines d’aménorrhée (SA), en regard
de taux d’hCG peu élevés (60 000 UI/l). Les
vomissements inco­ercibles étaient associés à une perte de poids majeure (20 kg),
à une tachycardie, à un tremblement des
extrémités et à un goitre diffus homogène.
La sécrétion de TSH était freinée, en regard
de taux très élevés de T4 (100 pmol/l) et de
T3 (> 40 pmol/l) et en l’absence d’anticorps
antithyroïdiens. La patiente a nécessité un
traitement par propylthiouracile (PTU) tout
au long de la grossesse (doses allant de 100
à 300 mg/j) et a donné naissance, au décours
d’une prééclampsie, à un garçon à 36 SA présentant un goitre avec une TSH au 95e percentile (25 mUI/l) en rapport probable avec le
traitement par PTU. Les patientes à dépister
seraient donc celles présentant une hyper­
émèse gravidique précoce, sévère et durable,
associée à une sécrétion de TSH freinée en
l’absence d’anticorps antithyroïdiens et pour
des concentrations normales d’hCG.
Nicolas Chevalier, CHU de Nice
• Coulon AL, Savagner F, Briet C et al. Prolonged and severe
gestational thyrotoxicosis due to enhanced hCG sensitivity
of a mutant thyrotropin receptor. J Clin Endocrinol Metab
2016;101(1):10-1.
Utilisation du pegvisomant
dans la “vraie vie” : que nous
apprend l’étude française
ACROSTUDY ?
Bien que le traitement de première intention de l’acromégalie consiste en une exérèse chirurgicale de l’adénome hypophysaire
somatotrope, les traitements médicaux
trouvent leur place en cas de contre-indication ou d’échec de la chirurgie. Le pegvisomant, antagoniste du récepteur de l’hormone
de croissance (GH), est utilisé le plus souvent
en combinaison avec les analogues de la
somatostatine, lorsque ceux-ci aboutissent
à un contrôle insuffisant de la maladie (1).
Les essais cliniques ont montré une normalisation de l’IGF1 (Insulin-like Growth Factor 1)
dans la grande majorité des cas (97 %) sous
pegvisomant, sans effet indésirable majeur.
L’étude française ACROSTUDY est une étude
observationnelle évaluant l’efficacité et la tolérance du pegvisomant dans le traitement de
l’acromégalie en pratique réelle (2). La durée
moyenne de traitement a été de 4,9 ± 2,7 ans.
Sur les 292 patients inclus, 75,7 % avaient été
opérés, 28,8 % avaient reçu une radiothérapie
et 93,2 % des analogues de la somatostatine
avant de commencer le pegvisomant. En
termes d’efficacité, le taux de normalisation
de l’IGF1 est passé de 11 % avant l’instauration
du pegvisomant à 43 % à 6 mois et à 63 % à
5 ans de traitement. En moyenne, la diminution de l’IGF1 était de 62 % à 5 ans. Une étude
espagnole récente montrait une normalisation de l’IGF1 dans 89,5 % des cas avec une
durée moyenne de traitement de 9 ans (3).
Dans ces 2 études, le profil de tolérance était
bon, avec comme principal effet indésirable
une élévation modérée des transaminases.
Ces études confirment donc l’efficacité, mais
surtout la bonne tolérance du pegvisomant
dans le traitement de l’acromégalie.
Anne-Gaëlle Decoux-Poullot, CHU de Nice
1. Franck SE, Muhammad A, van der Lely AJ, Neggers SJ.
Combined treatment of somatostatin analogues with
pegvisomant in acromegaly. Endocrine 2016 (sous presse).
2. Chanson P, Brue T, Delemer B et al. Pegvisomant treatment
in patients with acromegaly in clinical practice: the French
ACROSTUDY. Ann Endocrinol 2015;76(6):664-70.
3. Ramos-Levi AM, Bernabeu I, Álvarez-Escolá C et al. Longterm treatment with pegvisomant for acromegaly: a 10-year
experience. Clin Endocrinol 2016 (sous presse).
Les auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels
liens d’intérêts.
Grandir ensemble,
c’est magique…
Continuons en 2016 !
Bonne et heureuse année à tous
Claudie Damour-Terrasson
et toute l’équipe Edimark
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09/02/2016 15:10:20
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