LE NEPAD et les enjeux du développement en Afrique Préfaces Abdoulaye Wade K.Y. Amoako LE NEPAD et les enjeux du développement en Afrique Sous la direction de Hakim Ben Hammouda et Moustapha Kassé Commission Économique pour l'Afrique Bureau pour l'Afrique Centrale MAisONNEUVE &. LAROSE © MAISONNEUVE ET LAROSE 15. Rue Victor-Cousin 75005 Paris servedit [email protected] SOMMAIRE Préfaces • Le financement entre récession économique et crise des projets politiques, par Abdoulaye Wade • Le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (NEPAD) : pour faire la différence, par K.Y. Amoako Avant-propos, Commission Économique des Nations-Unies, Bureau pour l'Afrique Centrale 9 15 23 Partie I : Le NEPAD : enjeux politiques. économiques et sectoriels • Le NEPAD, un nouvel espoir pour l'Afrique, par Martin Okouda ...... • L'investissement direct étranger en Afrique et le NEPAD, par Lalla Ben Barka • Une nouvelle version du développement intégré et concerté: le NEPAD, par Moustapha Kassé • Infrastructure et développement dans le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique, par Touna Mama • Système financier et développement en zone franc africaine: quels enjeux pour le troisième millénaire ?, par Albert Ondo-Ossa • Les Technologies de l'Information et de la Communication dans le de développement, DISD....................................................................... 29 31 37 69 81 97 Partie II : Le NEPAD et la théorie du développement • Le NEPAD et l'évolution de la réflexion sur le développement, CEABureau pour l'Afrique Centrale 127 • Le NEPAD et la réflexion sur le développement, par Bnmo Bekolo-Ebe 135 Partie III : Le NEPAD, institutions. gouvernance et financement • Le NEPAD et la bonne gouvernance: première radiographie, premiers enseignements, par Fouda Séraphin Magloire • Le NEPAD et le projet d'une Banque centrale africaine, par Abdoulaye Diagne • Le " Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique ", une réponse africaine à la mondialisation de l'économie, par Chérif Salif Sy • Le NEPAD et le développement des capacités : Quelques éléments de discussion, par Alioune sali 153 169 187 199 Partie IV : Le NEPAD et la communauté internationale • Le G8, le Canada et le NEPAD, par Michel Perrault • La Banque Mondiale et le NEPAD, par Madani M. Tall • Le PNUD et le NEPAD, par Patricia de Mowbray 209 213 217 Annexes • Le Document du NEPAD 223 7 Préface Le financement entre récession économique et crise des projets politiques par Maître Abdoulaye Wade] Président de la Répuhliq1le du Sél1é/{al et l'ice-Présidellf du NEI'AD Le NEPAD a été de nouveau salué par le G8, comme une nouvelle vision originale du devenir de l'Afrique, actuellement en marge de la croissance de l'économie mondiale Cl,8 % du commerce mondial, 1 0/0 de l'investissement mondial). Pour la bonne compréhension et pour éviter toute confusion, le NEPAD a des objectifs très précis que, bien souvent malheureusement, certains, par confusion, noient dans des considérations qui, bien qu'importantes, lui sont lointaines. S'il est vrai que tout est important en Afrique, il n'en demeure pas moins vrai qu'il y a des priorités et des super priorités. Les Chefs d'État réunis au Sommet de Lusaka en 2 000 ont fait le choix des super priorités dans le NEPAD, document qui, aujourd'hui, devrait être à la disposition de tous les Africains. Nous invitons donc tous nos compatriotes africains à demeurer dans le cadre du NEPAD et éviter des réflexions du genre « mieux vaut lutter contre le sida que de construire des chemins de fer ". La réponse est qu'il faut faire les deux mais ces deux objectifs étant de nature différente ne peuvent être traités ni économiquement ni financièrement de la même façon. Du reste, en dehors du NEPAD, d'autres programmes sont menés sur tout le continent sur beaucoup d'autres sujets. Le NEPAD a pour objet, au moyen d'investissements mWj'sifs dans des projets de stmCfures fondamentales et de développement humain, de résorber à terme les gaps fondamentaux qui séparent l'Afrique du 1. Professeur Agrégé de Sciences Économiques des Universités françaises et Ancien doyen de la Faculté de Droit et des Sciences Économiques de l'Université de Dakar, auteur du Plall Oil,fEGA, qui a été fusionné avec le MAI' Millenium Afrimn Plan des PrésidenL~ MBEKI, OBASANJO et BOUfEFLIKA et H. MOUBARACK. 9 monde développé, en vue de sa participation pleine et entière à la production mondiale et au commerce international, moteur de la croissance économique. En somme, faire de l'Afrique, un" partenaire et non plus un assisté ". En effet, la raison refuse de considérer comme irrémédiablement condamné un continent qui dispose de ressources humaines et naturelles considérables, potentiellement 700 millions de consommateurs. Pendant 40 ans d'indépendance, l'Afrique s'est essoufflée dans la recherche effrénée du capital financier sous forme d'aide (dons) ou de prêt. Or, on n'a jamais vu un pays se développer avec l'aide ou le prêt ou les deux à la fois. Or d'ailleurs, ce binôme a montré ses limites. En effet l'APD dont l'objectif fixé à 0,7 % de transfert du PNB des pays développés vers les pays en développement en 1969 a à peine atteint la moitié, 0,57 %, certains pays n'ayant pas encore atteint 0,1 %. S'agissant des prêts, ils ont abouti à l'insoluble dette qui fait que des générations, encore devant nous, auront à payer. Du reste aucune étude ou prospective ne s'est aventurée jusqu'ici à prévoir la fin de l'endettement de l'Afrique, comme si la stratégie de l'autruche pouvait préserver du danger. Tout en conservant les avantages de l'APD pour laquelle certains pays, la France en tête, après le Sommet mondial de Monterrey au Mexique, ont lancé un appel en faveur de son augmentation et en soutenant l'idée du Président Bush des 50/50, moitié dette, moitié don, j'estime que nous devrions regarder au-dessus du binôme infernal don/crédit. Après chacune des deux dernières guerres, l'Europe a mis moins de deux décennies pour se reconstruire et se redresser. Bien entendu les conditions sont différentes, mais certains pays asiatiques dépourvus de ressources naturelles, ont réussi, par l'éducation-formation, la performance du développement en 20 ans (Corée, Taiwan, Singapour). Nous aurions donc dû valoriser d'abord nos ressources humaines. Postulant, pour la première fois, que les besoins massifs de l'Afrique en ressources ne peuvent être attendus, principalement, que du secteur privé africain ou mondial, le Sommet des Chefs d'État africains sur le partenariat avec le secteur privé pour le financement du NEPAD tenu à Dakar, à la mi-avril, a réuni plus de 1.000 personnes et groupes d'affaires de tous les continents, sélectionnés sur plus de 1 600 demandes de participation. Le moment est donc venu de faire le point sur la lancinante question du financement de notre ambitieux et novateur plan, bien apprécié par les pays riches du G8 et qui, depuis un an, a fait l'objet de nombreux entretiens, soit entre sherpas du G8 et experts africains, soit entre Chefs d'État africains et dirigeants des pays riches dont certains, ont invité les Chefs d'État africains à des entretiens, Georges Bush, Tony Blair, Jacques Chirac, Versicolore (UE) ou ont visité l'Afrique (Tony Blair, Jean Chrétien). Nous allons montrer que c'est à tort que l'on a pu avoir des appréhensions sur le financement des infrastructures et je dois dire que l'accueil réservé par les dirigeants du G8 à la question des infrastructures 10 Lefimmœmunf dll Né'PAD a été plus enthousiaste que celui de bien des responsables de chez nous qui se demandent encore comment seront financés ces investissements lourds. Mon propos ici est de monter que la charge du G8 à fonds perdus pourrait ne pas être aussi importante qu'on le croit, grâce, en particulier, au recours massif à l'investissement privé et à d'autres sources extra-G8. Le NEPAD repose sur trois options fondamentales ou paramètres que sont (1) la bonne gouvernance, (2) l'espace de la région au lieu de celui de l'État, étant rappelé que l'Afrique est divisée en cinq régions, Afrique de l'Ouest, Afrique du Nord, Afrique Centrale, Afrique de l'Est et Afrique Australe, (3) le recours massif au secteur privé. A l'intérieur de ces paramètres, le NEPAD s'articule autour de huit variables fondamentales dites secteurs super prioritaires (infrastructures, éducation, santé, agriculture, NTIC, environnement, énergie, accès aux marchés). L'interaction des huit variables génère la croissance. Le choix du secteur privé se justifie par le fait qu'on ne connaît nulle part, dans le monde, un pays qui se soit développé autrement. Pour assurer la bonne gouvernance, une sorte de contrôle mutuel périodique de bonne gouvernance entre Chefs d'État est instituée au sein de l'Union Africaine: le Peer Review. L'Afrique, continent gorgé de richesses naturelles, grand marché potentiel de 700 millions de consommateurs, devrait plutôt être convoitée par les investisseurs. Aussi, au-delà d'un transfert controversé de ressources publiques massives, le partenariat avec le G8 devrait, à mon avis, consister principalement à aider notre continent à créer les conditions d'attrait, d'accueil et d'engagement des capitaux privés. Si certains pays africains refusaient la bonne gouvernance ou l'éradication de la corruption, cela ne devrait pas pénaliser les autres. Le principe d'intervention devrait être qu'au-delà d'un programme objectif à réaliser pour toute l'Afrique ou pour une région sans considération de régime, chaque pays développé serait libre d'accorder une aide bilatérale préférentielle à tel ou tel pays, selon son appréciation et ses affinités. Les moyens de financement du NEPAD sont nombreux: l.Voici en vrac une série de possibilités qui tiennent en une idée, exploitation de notre capacité d'autoflnancement, en commençant par nos efforts personnels: contribution immédiate fixe de chaque État et un versement annuel dont les termes restent à définir; contribution spéciale des États africains pétroliers qui bénéficient d'une véritable rente géologique; contribution volontaire, pour chaque million de barils extrait du sous-sol africain, des sociétés pétrolières opérant en Afrique qui seront les premières bénéficiaires des bonnes infrastructures; 11 PréjilCi's rapatriement des ressources du secteur privé africain telles que les assurances et celles cie nos institutions financières qui, paradoxalement, n'arrivent pas toujours à placer tous leurs fonds dans des projets locaux et déposent leurs excédents à l'étranger; recyclage des surliquidités des banques commerciales d'Afrique qui, n'investissant pas pour autant dans les projets locaux, quelle que soit leur faisabilité (paradoxe de l'espace CFA), poussent les États à s'endetter à l'extérieur pour, ensuite, leur confier les ressources obtenues (FPE du Sénégal prêté par l'intermédiaire des banques). 2. Le secteur privé, par les investissements directs, les B.O. ou B.O.T., l'association possible du secteur public international avec secteur privé, autoroute à péage comme au Sénégal, support des coûts de décloisonnements cles activités privées (mines). 3. Autre niche de ressources virtuelles, la levée des obstacles non tarifaires qui, dans les pays développés, s'opposent aux exportations africaines (plus de $100 millions par an pour les pays en voie de développement, selon la CNUCED). 4. emprunts solidaires des pays africains d'une région pour des financements de projets régionaux; idée jamais encore explorée, emprunts avec garantie des bons des Trésors des pays du GS qui n'auraient donc pas besoin, pour cette opération, de débourser dans l'immédiat des liquidités. 5. A cela s'ajoutent les importants investissements des pays hors GS, notamment les pays arabes et les pays d'Asie. 6. Last but not least, les investissements budgétaires des États du Nord dans des grands travaux africains. C'est ici que nous convoquons lM. Keynes pour appliquer sa théorie à l'espace de l'économie mondiale, espace mixte Em avec ses entreprises qui sont celles du GS qui serait l'État keynésien. Illustrons: soit un financement budgétaire (non remboursable évidemmenO, de $1 Md en Afrique. Les 2/3, disons $700 millions, sont attribués par voie d'appel d'offres limité aux entreprises du Nord et le 113, soit 300 millions, cie la même façon aux entreprises africaines. Toutes les entreprises commandent leur équipement dans le Nord. Au total celui-ci recevra 20 % de profit de ses entreprises, soit $140 puis près de $600 millions d'achats d'équipement, ce qui va stimuler ses industries. L'Afrique recevra des salaires et, surtout, bénéficiera des importants ouvrages. Un modèle économétrique fournirait des indications quantitatives plus poussées, mais le modèle général reste valable dans son ensemble. Enfin, il yale financement par les DTS, droits de tirage spéciaux, simple création de monnaie-papier conçue pour les besoins du finan12 Le financement du NEPAD cement du commerce international mise entre les mains du FMI. Cette idée que j'avais émise à la Conférence monétaire d'Abidjan en 1972 2 , puis dans un livre 5 , ensuite dans le Plan OMEGA (page 24), est maintenant soutenue par des hommes d'État et économistes d'Amérique latine. En Europe, certains proposent de financer, par le même moyen, des programmes de lutte contre l'effet de serre et autres dommages majeurs à l'environnement. Se posera l'épineux problème de leur répartition, autrement que proportionnellement aux quotas, ce qui avantagerait encore les pays riches. Singulière façon de définir les besoins que j'avais stigmatisée par cette parabole des trois amis qui se promènent sur une plage. L'un d'eux bute sur une boîte à moitié enterrée. Ils l'ouvrent et la trouvent pleine de dollars. Comment partager cette véritable aubaine ? Ce qui paraissait simple devint un casse-tête. Pour M.• Bon sens .. il faut diviser par trois. On le trouva puéril. "J'ai plus de besoins que vous', réplique le second, "j'ai une femme, cinq enfants, des loyers à payer ". Le troisième aux allures de géant, évoqua la notion de risques: " si on est attaqué, je prends les plus gros risques en vous défendant ". En désaccord total, les trois amis allèrent consulter un économiste distingué. L'homme de science réfléchit et, d'un air inspiré, prononça la sentence: "que chacun d'entre vous pose sur la table ce qu'il a dans ses poches ". Sitôt dit sitôt fait. L'un avait $100, l'autre $35, le troisième $3. "Voilà ", dit l'économiste, "on va partager proportionnellement à ce que chacun a dans sa poche. Car les rapports de vos avoirs traduisent bien les rapports de vos besoins ". En toute vraisemblance, la communauté internationale va créer de nouveaux DTS à répartir selon les" besoins ". Espérons seulement que, trente ans après, on aura trouvé une meilleure définition de la notion de besoins. 2. A. WADE : L'Afrique et la réforme' du Système monétaire International, OUA/BAD, Abidjan, ] 972173. 3. A. WADE, Un destin pour l'Afrique, Ed. Karthala, Paris, ] 989. 13 Préface Le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) : Pour faire la différence par K.Y. Amoako Secrétaire Exéclltilde la COll/mission Éco/lomique des Natiolls-Unit>s pour 1'Afi'ique (CEA) Le NEPAD est une évolution remarquable dans le domaine de la réflexion sur le développement de l'Afrique, du fait qu'il indique la direction à suivre, définie par nos dirigeants, qu'il nous est donc propre et oblige qu'on change les règles régissant les partenariats extérieurs à l'Afrique. Je voudrais, dans le but de promouvoir une façon nouvelle de faire les choses, mettre l'accent sur cinq domaines où il est essentiel d'intensifier les actions pour assurer la mise en œuvre du nouveau Partenariat: • Élaboration par les pays eux-mêmes de stratégies de réduction de la pauvreté; • Renforcement de la planification et du contrôle des dépenses; • Amélioration de l'efficacité de l'aide; • Institutionnalisation des révisions mutuelles et de suivi interne; • Promotion de l'obligation mutuelle de rendre des comptes. Pour chaque domaine, j'évoquerai des défis qui se posent et proposerai des façons différentes de faire. Premièrement, j'aborderai le défi que constitue l'élaboration par les pays eux-mêmes de stratégies de réduction de la pauvreté. Les pays africains à faible revenu élaborent, pour la plupart, des stratégies économiques à moyen terme de réduction de la pauvreté dans le cadre d'un processus participatif impulsé par l'Afrique. Celui-ci a essentiellement pris la forme de cadres stratégiques de réduction de la pauvreté, qui ont permis d'élargir la participation et de s'approprier davantage le processus au niveau national et de définir des actions mieux ciblées dans la lutte contre la pauvreté. Des actions remarquables ont été entreprises à cet égard mais il a été déploré en général que ces stratégies ne sont pas tou jours intégrées dans les plans et démarches au niveau national mais sont 15 Pn!jaces plutôt menées sur la conduite des donateurs. Il n'est pas toujours clair que ces cadres se fondent sur des stratégies de croissance globales. Des questions ont aussi été soulevées en ce qui concerne la légitimité et la conduite du processus de consultation. Pour relever ces défis singuliers, il est essentiel que les pays africains partagent systématiquement l'information et apprennent les uns des autres. Une initiative qui s'avère utile en ce sens est le Groupe d'apprentissage africain sur les PRSP, convoqué par la CEA et approuvé par le NEPAD. Ce forum rassemble des responsables et des experts africains qui discutent franchement de l'expérience des pays africains en matière de PRSP. 11 recense les meilleures pratiques, détermine les contraintes dans les domaines institutionnels et des capacités et recommande les mesures qui s'imposent. Il propose aussi des actions que les Africains et les donateurs doivent mener pour que le processus d'élaboration de ces stratégies contribue de façon optimale à résoudre les défis de développement de l'Afrique. Deuxièmement, j'aborderai la planification et le suivi des dépenses publiques. La gestion des dépenses publiques en Afrique présente des lacunes qui découlent essentiellement de l'élaboration et de l'exécution des budgets. Dans bien des pays, des dépenses sont effectuées sans ouverture de crédits. Des engagements sont contractés alors que les fonds ne sont pas encore disponibles pour effectuer les paiements. Les livres des comptes et de la situation comptable ne sont pas toujours tenus. La vérification et la préparation des comptes de l'administration centrale sont souvent très tardives. Ces lacunes se traduisent par une mauvaise exécution du budget et entraînent même un dépassement important des déficits prévus. Si les gouvernements africains veulent réaliser les objectifs de réduction de la pauvreté: ils doivent intégrer les stratégies de lutte contre la pauvreté dans leurs systèmes de gestion budgétaire et financière et faire preuve de transparence, d'efficacité et de responsabilité dans l'utilisation des ressources publiques. Pour instaurer une gestion saine des dépenses publiques, ils ont besoin de mettre en place des dispositions institutionnelles rigoureuses. Que faudrait-il y inclure? Plusieurs éléments: • Des textes clairs, relatifs à la préparation du budget, prévoyant des règles applicables; • Un cadre macro-économique et budgétaire à moyen terme soutenable; • Un budget détaillé excluant toute opération extrabudgétaire ; • Un système de comptabilité efficace permettant de produire à temps des rapports financiers de qualité; • Des mécanismes de vérification des comptes permettant de s'assurer que les ministères et les divers organismes respectent le règlement financier et rendent des comptes; • Des méthodes participatives de préparation et d'exécution du 16 Le nOUl'eau pm1ellariaf POlll-le dél'eloppemellf de l'Aji-ique (NEPAD) budget et de présentation des comptes, afin que l'intégrité du processus puisse faire l'objet d'une évaluation indépendante. Les pays ne peuvent avoir la maîtrise de leurs stratégies de réduction de la pauvreté s'ils ne disposent pas des capacités nécessaires. On peut dire que mettre en place des dispositions institutionnelles sans avoir la capacité de les mettre en œuvre est tout aussi vide de sens. Ce sont les capacités et leur mise en place qui détermineront la marche future. En ce qui concerne l'assistance fournie par les donateurs, on peut constater que le bilan est contrasté. A certains égards, le système d'acheminement de l'aide présente des dysfonctionnements, en raison de la faiblesse des capacités des États et de la complexité de la communauté des donateurs. C'est pourquoi, une partie importante des dépenses publiques sont souvent financées par un grand nombre d'acteurs extérieurs et la plupart des dépenses ne figurent pas au budget national. La conséquence de cette situation est le grand nombre de visites non coordonnées des missions de gestion de l'aide, les mécanismes parallèles de mise en œuvre, les multiples conditionna lités liées à l'aide et le grand nombre de rapports à fournir et d'activités de suivi à effectuer. Il s'agit là d'autant d'éléments qui pèsent lourdement sur l'administration et occupent une partie importante des services de l'État dans les pays africains et ont un coût élevé. Dans le cadre du nouveau Partenariat, il faut que cela change. Pour que l'aide au développement soit plus efficace, les partenaires de l'Afrique doivent: • Recentrer les programmes d'assistance au développement sur les priorités et stratégies nationales; • Dans la mesure du possible, utiliser les systèmes et mécanismes nationaux actuels et, dans les cas où ils ne conviennent pas, s'employer à renforcer les capacités, au lieu de les affaiblir en insistant sur l'adoption de mécanismes parallèles. Je reviendrai plus tard sur la question des capacités; • Si les conditions existent, fournir l'assistance par le biais des budgets nationaux des pays africains; • Harmoniser les pratiques en matière d'aide pour réduire sensiblement la charge que constitue la gestion de l'aide. Les donateurs doivent réorienter leur approche pour s'assurer que l'assistance réponde aux besoins des pays et tienne compte des capacités de ces derniers. Les pays africains présentent de grandes différences en ce qui concerne leurs stratégies de développement national, la qualité de la gouvernance et les capacités de leurs institutions. C'est pourquoi, l'aide au développement doit tenir compte de la situation de chaque pays. Outre l'aide à apporter aux pays qui obtiennent de bons résultats, qui, à notre avis, devraient bénéficier d'aide supplémentaire et d'aide budgétaire, l'aide au développement 17 PnH"aces devrait permettre d'aider des pays aux prises avec de graves problèmes politiques et des problèmes de capacités et les pays sortant de conflit. Dans le NEPAD, les dirigeants africains ont affirmé qu'ils ont un rôle essentiel à jouer, dans la création d'États capables et efficaces. Un État capable est un État dans lequel la sécurité et la paix de l'ensemble des citoyens sont assurées. C'est un État dans lequel les services publics, le corps législatif, le système judiciaire et les organes statutaires sont habilités à fournir un environnement propice au secteur privé et à la société civile. Ces institutions de gouvernance et une direction politique clairvoyante, sont essentielles pour assurer la viabilité économique et réduire la pauvreté. Pour que cette vision se matérialise, il nous faut mettre en place des mécanismes concrets de révision mutuelle qui est une mesure essentielle si nous voulons assurer le suivi nous-même sur le continent. Il doit en être ainsi si nous voulons renforcer notre partenariat avec la Communauté internationale et surtout nous le devons à nous-mêmes. Le Mécanisme africain de révision mutuelle préconisé par le Comité des Chefs d'État chargé de la mise en œuvre du NEPAD, est un élément crucial du nouveau partenariat. Il nous encouragera à apprendre les uns des autres et renforcera notre maîtrise sur ce plan. Il permettra de suivre les progrès réalisés en ce qui concerne les buts, codes et normes convenus. Il identifiera, évaluera et diffusera les bonnes pratiques. Il permettra aussi de déterminer les lacunes en matière de capacités et de recommander des moyens de les combler. Nous, à la CEA, avons pris une part active aux efforts visant à fournir un appui technique au NEPAD et à conceptualiser le processus de l'examen par des pairs Africains. La Déclaration sur les codes et normes de gouvernance économique et d'administration des entreprises, adoptée par le Comité des Chefs d'État chargé de la mise en œuvre du NEPAD, à sa dernière réunion à Abuja, sur la base des contributions de la CEA, permettra d'améliorer l'examen mutuel dans les domaines indiqués. Le projet mené actuellement à la CEA sur la mesure et le suivi des progrès en matière de bonne gouvernance, que nous exécutons avec des instituts de recherche nationaux, permettra de se faire un tableau général du cadre de gouvernance dans un pays donné, de déterminer l'efficacité des institutions, la représentation politique et la gestion économique. C'est à nous Africains qu'il incombe de faire en sorte que notre continent réalise entièrement ses aspirations. Le financement actuel dans le cadre des objectifs de développement du Millénaire permet de se faire une idée des besoins de l'Afrique. L'aide globale à l'Afrique a baissé, passant de 19 milliards de dollars E. U. au début des années 90 à 12 milliards de dollars E. U. aujourd'hui, soit une diminution par habitant de 40 %. Tout en gardant à l'esprit ce fait, il nous faut 18 Le nOI/I'eal/ pm1el1ariat pOl/r le développement de l'Aji-iql/e (NEPAD) considérer qu'il est largement reconnu que les pays africains doivent réaliser des taux de croissance économique annuels de 7 % ou plus, pour atteindre les objectifs de réduction de la pauvreté énoncés dans les Objectifs de développement du Millénaire pour pouvoir sortir des millions de personnes de la pauvreté. En fin de compte, il nous faut réduire d~ façon draconienne la dépendance à l'égard de l'aide et nous tourner vers des sources plus proches de nous, pour financer notre développement. Comme dans le reste du monde, le développement du secteur privé avec une participation plus grande au commerce mondial dynamique et des flux plus importants d'investissement étranger direct, sera le principal moyen d'engendrer la croissance et de créer des emplois. Dans l'avenir prévisible l'Afrique aura, cependant, encore besoin d'aide. En tout, les promesses de contributions faites par les États-Unis et l'Union européenne à la Conférence des Nations-Unies à Monterrey sur le financement du développement, atteindront à partir de 2006, 12 milliards de dollars par an, destinés à des programmes d'éducation, de santé et de lutte contre la pauvreté. Nous espérons de tout cœur que l'Afrique en bénéficiera grandement. Ceci dit, les engagements pris à Monterrey ne couvrent, qu'un quart des 50 milliards de dollars supplémentaires estimés nécessaires chaque année pour réaliser les objectifs du développement du Millénaire dans le monde. L'aide n'est qu'un élément de l'ensemble. Il nous faut trouver une approche plus intégrée en ce qui concerne les besoins en financement associés, y compris la dette et le commerce. S'agissant du commerce, il nous faut créer un système global qui fournisse aux pays en développement l'appui dont ils ont besoin pour atteindre, grâce au développement de leurs échanges, les objectifs de développement du Millénaire. J'ai, en plusieurs occasions, souligné que si nous voulons faire de réels progrès sur la question de la dette de l'Afrique, il nous faut d'abord revoir l'analyse de la viabilité de la dette dans le cadre actuel de l'Initiative en faveur des pays pauvres très endettés ou PITE. Et C0tru11e le Chancelier de l'Échiquier Gordon Brown l'a dit récemment, il convient d'examiner comment mettre en pratique les nombreuses propositions faites récemment en vue de trouver de nouveaux moyens de combler le déficit de financement - taxe Tobin, taxe sous les armes, droits de tirage spéciaux. Pour de nombreux domaines cruciaux, il est clair que nous aurons besoin de financer des programmes régionaux et sous-régionaux, dans le domaine de l'infrastructure, pour la lutte contre le VIH/SIDA, pour la création de centres d'excellence dans le domaine de l'enseignement supérieur. Il est cependant clair qu'en mobilisant le financement dans le cadre du NEPAD, une bonne partie dépendra des programmes nationaux et c'est pourquoi j'ai souligné le rôle des stratégies élaborées par les pays eux-mêmes, des systèmes de gestion de dépenses 19 Préfaces publiques et de la nécessité, pour les donateurs, d'adapter leur assistance à la situation de chaque pays. Ce qui est nouveau ici, c'est que nous faisons des progrès en ce qui concerne la création de mécanismes d'obligation mutuelle, pour que les pays africains et leurs partenaires agissent dans l'honnêteté. Pour que le NEPAD introduise une réelle différence dans le développement de l'Afrique, il est nécessaire de transformer les relations entre gouvernements africains et partenaires extérieurs en un partenariat reposant sur l'acceptation mutuelle d'engagements dans divers domaines et établissant un processus permettant de suivre dans quelle mesure ces engagements sont respectés. Il s'agit d'instaurer l'obligation mutuelle de rendre des comptes. Du côté africain, il doit exister un engagement à établir et à maintenir la paix et la sécurité, à respecter les fondamentaux macroéconomiques, des systèmes de finances publiques responsables et transparents et à créer un environnement propice au développement du secteur privé. Nous demandons cependant à nos partenaires extérieurs d'augmenter leur assistance au développement aussi bien quantitativement que qualitativement. Nos partenaires internationaux doivent aussi s'assurer que toutes les politiques qui affectent les perspectives de développement de l'Afrique - qu'il s'agisse de l'aide, de l'accès aux marchés et de la dette - sont conformes aux objectifs de développement du Millénaire. Dans le cadre d'une véritable obligation mutuelle de rendre des comptes, l'initiative • Tout sauf les armes· de l'Union Européenne par exemple, ne devrait pas devenir "Tout sauf les fermes", des subventions importantes continuant à être accordées au secteur agricole. La mesure récemment prise par les États-Unis d'augmenter de 80 % les subventions à l'agriculture, dans certains États, illustre parfaitement ce qu'il ne faut pas faire. Les nouveaux partenariats, fondés sur l'obligation mutuelle de rendre des comptes, ne donneront de résultats que si nous disposons de mécanismes nous permettant d'améliorer les relations à différents niveaux entre l'Afrique et ses partenaires pour nous assurer effectivement que les engagements convenus sont respectés. Les mécanismes existants peuvent être renforcés pour assurer le dialogue et le suivi nécessaires dans le cadre du nouveau Partenariat. Parallèlement à ces initiatives, le NEPAD propose un Forum africain sur l'aide publique au développement pour des échanges à un niveau élevé avec le Comité d'aide au développement de l'OCDE. Nous sommes un interlocuteur entre l'Afrique et ses partenaires de développement et nous avons à la CEA, lancé deux initiatives pour promouvoir l'apprentissage mutuel et les échanges. Nous avons en premier lieu, comme je l'ai déjà mentionné, le Groupe d'apprentissage africain sur les PRSP, qui permet aux pays africains de partager l'information en ce qui concerne leur expérience en matière de 20 LI! 1101l1'1!{1lI pU11enariur pOlir le dél'e/oppelllellf de l'Afrique (NEPAD) stratégies de réduction de la pauvreté, recense les meilleures pratiques et les défis que pose la mise en œuvre et encourage l'apprentissage mutuel. Il se réunit parallèlement aux réunions du Groupe technique du Partenariat stratégique avec l'Afrique (SPA). En deuxième lieu, la .. Grande Table .. regroupe les ministres africains des finances et de la planification, les ministres chargés de l'aide au sein du CAO et les chefs de secrétariat et fonctionnaires supérieurs de la Banque mondiale, du FMI, de la BAD, de l'UE et du PNUD. Nous avons, en tant qu'interlocuteur du G8 et à la demande de celui-ci, élaboré conjointement avec l'OCDE un document sur les moyens de suivre dans quelle mesure l'obligation mutuelle de rendre des comptes est respectée, tant au niveau des pays qu'à celui du continent. Les idées que je viens d'exposer sont des mesures pratiques à mettre en œuvre pour réaliser un objectif essentiel du NEPAD, à savoir transformer le partenariat entre l'Afrique et ses partenaires internationaux afin de réaliser les objectifs de développement du Millénaire et améliorer la vie de millions de personnes sur le continent. La Commission Économique pour l'Afrique approuve totalement le nouveau modèle de développement et le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique. Nous utiliserons pleinement nos relations avec les pays africains, avec tous les organes et institutions du système des Nations-Unies ainsi qu'avec les donateurs bilatéraux et multilatéraux pour assurer le renouveau de l'Afrique. Nous plaidons la cause de l'Afrique dans tous les forums sur le développement. Nous utilisons nos connaissances et nos services consultatifs pour aider à mettre en place des capacités durables dans tous les pays africains. Des efforts que nous déployons pour assurer la mise en œuvre effective du nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique afin que ce continent puisse rapidement commencer à réaliser ses aspirations. 21 Avant-propos Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique Bureau de l'Afrique Centrale Avec le NEPAD 1, l'Afrique a certainement repris à son compte l'initiative en matière de proposition pour son développement économique. Une initiative qui lui a échappé des années durant. Cette nouvelle initiative permet à l'Afrique de rét1échir et de formuler des propositions pour relancer sa croissance économique et son insertion dynamique dans l'économie internationale. Le NEPAD est née de la convergence de deux initiatives et propositions: le Plan Oméga du Président Wade, le MAP proposé par les présidents Mbeki, Boutet1ika et Obsanjo. Ce plan a été adopté lors du Sommet des Chefs d'États africains en juillet 2001 à Lusaka. La réunion du Comité de suivi en octobre 2001 à Abuja a entériné l'appellation NEPAD pour mettre en valeur le partenariat équilibré que l'Afrique cherche à construire avec la communauté internationale. L'adoption du NEPAD intervient à un moment crucial dans l'histoire de l'Afrique. En effet, le continent n'a cessé de se marginaliser dans les relations économiques internationales et la pauvreté a connu une progression sans précédent. Les espoirs de la modernisation économique et sociale ont déçu et l'Afrique n'a cessé de s'enliser dans une crise sans fin. Mais, en même temps, la réflexion sur le développement connaît une mutation et des changements importants. Une ère nouvelle est ouverte où la réflexion sur le développement n'est plus cantonné à sa simple dimension économique mais intègre de plus en plus la complexité et l'enchevêtrement entre les sphères politique, économique et sociale. Une complexité que les visions simplistes de ce qu'on appelé le consensus de Washington avait laissé de côté. Des préoccupations que la notion de gouvernance politique et économique cherche à saisir. En même temps, la réflexion sur le développement s'est libérée du discours idéologique qui l'a caractérisé depu is plusieurs années pour adopter des démarches plus pragmatiques et dont le seul souci est de répondre aux défis des situations concrètes. Ainsi en estil, par exemple, de l'opposition État-marché qui a jusqu'à une période récente était au cœur de toutes les oppositions et les divergences en matière de développement. Aujourd'hui, tous les experts reconnaissent 1. Acronyme anglais de New Partenership for Africa's DeveJopment. 23 A l 'CI Jlf-propos la complémentarité entre ces deux formes de régulation des économies et insistent de plus en plus sur le rôle et la place des institutions dans le fonctionnement stable des économies. Enfin, le contexte international est également marqué par une volonté de rééquilibrer les relations entre les pays africains et les bailleurs de fonds. Un équilibre rompu pendant plusieurs années avec des conditionna lités de plus en plus fortes et marquées. La notion de partenariat exprime cette volonté de part et d'autre de retrouver un plus grand équilibre dans les relations entre les pays africains et la communauté internationale. Le NEPAD constitue un cadre stratégique et global pour le développement de l'Afrique. L'innovation majeure est liée au fait que ce plan a été conçu et développé par les dirigeants africains pour relever les défis du développement du continent. Ce plan s'attaque en effet aux principaux problèmes du développement du continent africain et cherche à apporter des solutions aux difficultés économiques, politiques et sociales. Mais, ce plan constitue également un engagement de la part des leaders africains envers les peuples africains en vue de relancer la croissance et d'améliorer le niveau de satisfaction des besoins de base. Le NEPAD offre également un cadre pour un nouveau partenariat avec la communauté internationale. Le NEPAD s'est fixé une série d'objectifs prioritaires. Il s'agit d'abord de promouvoir la croissance et le développement soutenable en Afrique. Ensuite, ce plan se fixe comme priorité de lutter contre la pauvreté qui a explosé dans la plupart des pays africains. Le NEPAD se fixe pour objectif également de relancer les investissements dans le domaine des infrastructures après des années d'oubli. Par ailleurs, la priorité de ce plan est de mettre fin à la marginalisation de l'Afrique dans la globalisation. Ces éléments constituent des facteurs nécessaires à une relance de la dynamique du développement en Afrique et constituent les conditions pour construire une nouvelle expérience historique qui donnera les motifs d'une nouvelle espérance en Afrique. Cet ouvrage constitue un point de départ de la réflexion et de la recherche qui doit accompagner le NEPAD. 11 regroupe une série de contributions qui ont été présentée lors d'un colloque organisé à Yaoundé en avril 2002 par le Centre de Développement Sous-Régional de l'Afrique Centrale de la Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique. Les auteurs sont honorés de la présence de son Excellence le Président Abdoulaye Wade qui a joué un rôle important dans le NEPAD et qui a bien voulu contribuer à cet ouvrage par une brillante préface. Nous sommes également heureux d'accueillir un autre invité d'honneur en la personne de M. K. Y. Amoako, Secrétaire Exécutif de la Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique, qui a également contribué de manière forte dans l'émergence de cette nouvelle initiative. 24 Ce travail est le résultat des efforts et de la réUexion menée depuis plusieurs années sur le développement en Afrique par les experts du Centre de Développement Sous-Régional de la Commission Économique des NationsUnies pour l'Afrique dont le siège est à Yaoundé (Cameroun). L'équipe d'experts du Centre est composée de : Hakim Ben Hammouda (Directeur) Albert Yama Sylvain Maliko Anne Marie Bakyono Gabriel Nahimana David Kamara Samuel Tekié Jean Robert Tsoye-Nkono ILe Centre a également l'appui régulier et constant de deux consultants: ISYlVain Mouyedi IAlain Nkoyock 25 PREMIÈRE PARTIE LE NEPAD: ENJEUX POLITIQUES, ÉCONOMIQUES ET SECTORIELS Le NEPAD, un nouvel espoir pour l'Afrique par Martin Okouda Ministre des Affaires économiques, de la programmation et de l'aménagement du Cameroun Le NEPAD constitue une initiative majeure dans l'histoire récente du continent. Ce n'est pas la première fois qu'une initiative pour le développement du continent est mise en place. On pourrait même parler d'une prolifération d'initiatives pour le continent pendant la fin du siècle dernier. Ce qui diffère aujourd'hui, il me semble, est l'affirmation de la volonté des africains de prendre en main le destin de leur continent. En effet, instruits par les expériences du passé, les dirigeants africains ont considéré la paix, la sécurité, la démocratie, la bonne gouvernance et le respect des droits de l'homme comme des préalables au développement durable, A cet effet, ils se sont engagés, à travers le NEPAD, individuellement et collectivement à assurer la promotion de ces vertus aux niveaux national, sous-régional et continental. Le NEPAD est un important processus qui met non seulement la responsabilité première des dirigeants africains en exergue, pour une destinée économique et politique de l'Afrique toute entière, mais crée aussi des conditions favorables pour un développement soutenu et une réduction de la pauvreté sur le continent. C'est aussi l'engagement des chefs d'État Africains de coopérer dans l'établissement et la mise en œuvre des programmes et stratégies de développement du continent avec les partenaires internationaux de l'Afrique. Enfin, il s'agit d'un contrat de partenariat que l'Afrique va passer avec ses partenaires et les populations africaines. Le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique a été bien accueilli sur le plan international, notamment aux Nations-Unies, à l'Union Européenne et par le G8 qui a mis en place un Comité pour traiter avec les pays qui sont parties prenantes du NEPAD. Son Comité de pilotage a tenu une série de réunions avec le Comité des représentants personnels du G8 pour aider celui-ci à élaborer son plan d'action de Gênes pour l'Afrique en appui au NEPAD. Il a également suscité des réactions encourageantes au niveau des pays nordiques qui ont indiqué qu'ils s'engageaient à appuyer cette initiative. 29 Le NEPAD : el (jellx politilJues, écol/omiques et sectoriels Je voudrais souligner que la structure principale chargée de la mise en œuvre du NEPAD a travaillé sans relâche depuis l'adoption de celleci à Lusaka l'année dernière, générant ainsi de l'espoir au niveau du continent et une certaine confiance pour l'initiative au niveau de la Communauté internationale. A titre d'exemple, tout récemment, plus exactement le 26 mars 2002 à Abuja, au Nigeria cette structure s'est réunie pour examiner les résultats des groupes de travail sur la paix et la sécurité, le renforcement des capacités de prévention des conflits, de gestion et de résolution des conflits en Afrique, la gouvernance politique, la bonne gouvernance et la démocratie, la gouvernance économique et corporative et sur les secteurs prioritaires. Le NEPAD est un processus qui exige débats, réflexion et échanges de points de vue. Il faudra réfléchir sur les conditions préalables au succès de cette initiative. Aujourd'hui, il y a un consensus à tous les niveaux, autour de l'intégration et la coopération régionales comme les moyens les plus sûrs pour minimiser les effets négatifs de la fragmentation des marchés africains, atténuer l'impact des chocs extérieurs et faire des pays africains des acteurs actifs dans l'économie globale. En mettant un accent particulier sur ces éléments clés, le NEPAD a considéré les actions dans des domaines spécifiques tels que la bonne gouvernance et la bonne gestion économique comme préalables pour le développement de l'Afrique. La sécurité, la paix et la bonne gouvernance en sont de ce point, des éléments essentiels qui doivent être approfondis. Les priorités sectorielles définies ont donné lieu à des exercices de planification dans les différentes régions africaines. Un travail qui sera finalisé dans différents fora. Mais il est nécessaire, aujourd'hui de souligner l'importance des dynamiques sous-régionales et nationales dans la mise en œuvre du NEPAD. Comment mettre en œuvre cette initiative? Comment exécuter et assurer le suivi des projets? Le consensus crée autour du NEPAD doit nous amener à réfléchir sur les conditions de sa mise en place notamment aux niveaux sousrégional et national. Car la mise en place de cette initiative permettra de faire renaître l'espérance d'une Afrique dynamique et confiante en son avenir. jO L'Investissen1ent direct étranger en Afrique et le NEPAD par Lalla Ben Barka Secrétaire Exécllfif adjoint de la Commission Économique des Nations-Unies pour l'Aji1qlle (CEA) La corrélation étroite entre accumulation du capital physique et humain, augmentation des revenus et amélioration générale de la qualité de vie ne fait l'objet d'aucun doute. Les progrès de l'Humanité ont toujours été fondés sur l'investissement dans l'avenir, que ce soit en formant les populations à élargir leurs horizons ou en créant le capital social et physique nécessaire à la faisabilité et à la durabilité du progrès. Malheureusement, pour l'ensemble de l'Afrique, le processus d'accumulation du capital, sous l'angle de l'investissement, a été largement insatisfaisant. Je voudrais d'abord donner un aperçu de la situation de l'investissement en Afrique et souligner les mesures essentielles à prendre pour améliorer cette situation. Ensuite, je montrerai en quoi le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD) constitue un bon cadre à même de promouvoir un plus grand rôle du secteur privé en Afrique et résoudre la faiblesse actuelle de l'investissement sur le continent. En conclusion, j'expliquerai en quoi l'intégration régionale est cruciale pour l'accomplissement de nos objectifs de croissance économique et de développement accéléré en Afrique. I. L'investissement étranger en Mrlque : des résultats faibles Permettez-moi de commencer par une question: Pourquoi les taux d'investissement sont-ils si faibles en Afrique? L'analyse des conditions générales de l'investissement, que la CEA a menée pour la période allant de 1974 à 1996, montre une baisse très nette des taux de l'investissement pour l'ensemble du continent. Et pour la sous-région de l'Afrique du Nord, les chiffres révèlent une baisse encore plus forte que la moyenne continentale. En effet, le taux d'investissement de l'Afrique du Nord, qui était, en moyenne, de 36 % du PIB, entre 1974 et 1980, n'était plus que de 24 % entre 1991 et 1996. 31 Le NEPAD: en/eux politiqlles. éco/lomiqlles et sectoriels Il est également important de noter que les niveaux de l'investissement ont chuté en dépit du fait que le taux de rentabilité de chaque dollar investi était nettement supérieur dans la plupart des pays africains que partout ailleurs dans le monde. Alors, pourquoi les investisseurs africains et étrangers hésitent-ils à investir en Afrique, malgré cette incitation au profit? La réponse que nous avons apportée à la CEA, à partir de nos travaux analytiques et empiriques, est que, s'agissant de l'investissement, la stabilité et la prévisibilité du cadre général des incitations - prix relatifs, demande, taux d'intérêt, taxes - importent sans doute plus que le niveau des incitations elles-mêmes. Sur le plan macro-économique, cela signifie, essentiellement, que pour encourager les investisseurs à répondre aux nouvelles incitations, il est essentiel d'asseoir la stabilité macro-économique et la confiance des investisseurs dans la durabilité du cadre de politique économique. En Afrique, on associe souvent les mauvais choix à l'instabilité politique et à l'oppression. Mais les gouvernements sont sur la bonne voie lorsqu'ils corrigent des déséquilibres macro-économiques insoutenables - forte inflation, déficit public important, taux de change surévalué qui sont une cause première d'instabilité macro-économique et d'incertitude relative aux politiques à venir. Des réformes institutionnelles sont mieux accueillies par les investisseurs, lorsqu'elles visent à garantir la prévisibilité des politiques, le respect des droits de propriété (notamment l'exécution des contrats et l'application des normes techniques) et la stabilité de « la règle du jeu ". Tout cela revient à dire qu'un État compétent est une condition sine qua none du développement durable. A la CEA, nous définissons la bonne gouvernance dans un sens très large pour y inclure plus que la gouvernance politique. Pour nous, un État compétent doit également assurer une bonne gestion macro-économique des entreprises et renforcer les capacités institutionnelles. Bref, le gouvernement doit créer un environnement socio-économique stable, diversifié et favorable, qui incite les investisseurs africains et étrangers à s'engager en Afrique. Comme certains d'entre vous le savent, la CEA a récemment lancé un projet important d'évaluation et de suivi de l'état de la gouvernance en Afrique. Dans le cadre de ce projet, un certain nombre de questions cruciales sont posées, entre autres: Sur le plan institutionnel: De quels moyens et compétences le pouvoir législatif dispose-t-il pour mener sa mission? A quel point le pouvoir exécutif et l'administration s'avèrent-ils efficaces et compétents? Quelle est l'autonomie du pouvoir judiciaire, des organes chargés de l'application des lois et des organes de réglementation? Sur le plan de la gestion économique et de la gestion des entreprises: A quel point le recouvrement et la réparation des recettes sont -ils socialement équitables? Quels systèmes a-t-on mis en place 32 L'investissement direct étranger en Afrique et le NEPAD pour l'adoption de normes et de codes reconnus au niveau international? Existe-t-il un cadre juridique et institutionnel destiné à faciliter le fonctionnement normal du secteur privé? Ce sont là des questions que les investisseurs se posent lorsqu'ils songent à risquer de l'argent ou non dans n'importe quel pays. Pour répondre à ces questions, la CEA utilise trois instruments d'enquête: un instrument portant sur l'opinion de groupes cibles, qui permet de collecter les réponses d'experts capables de donner un avis autorisé sur les questions regroupées dans chacun des trois modules; une enquête nationale sur les ménages visant à recueillir les impressions de l'ensemble de la population adulte; un instrument statistique, géré par des institutions de recherche avec lesquelles nous collaborons, pour réunir des informations concrètes et des données solides. Ces indicateurs ont déjà été expérimentés au Bénin et en Afrique du Sud et les résultats sont tout à fait probants. La CEA collabore étroitement avec des institutions nationales de recherche afin de mener des enquêtes nationales dans 14 pays. Nous comptons débattre de nos conclusions à des forums auxquels nous convoquerons nos États membres pour dialoguer avec d'autres parties prenantes, afin de promouvoir l'appropriation du projet et la recherche du consensus. Nous envisageons, à partir de ces éléments, de publier, en 2003, la première version du • Rapport sur la gouvernance en Afrique., une publication biennale phare de la CEA. II. Le NEPAD et l'investissement en Mrique Le NEPAD est un bon cadre pour relever effectivement le défi de l'investissement en Afrique. Il en est essentiellement ainsi parce que ses principaux objectifs sont l'instauration de la paix, de la sécurité et la création d'États compétents. L'Initiative indique également clairement que la promotion du secteur privé visant à assurer le développement de l'Afrique, est un autre objectif majeur. Les activités que la CEA mène actuellement dans le domaine de la gouvernance sont une contribution technique importante à la mise en œuvre du NEPAD. En fait, le Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre du NEPAD a confié à la CEA la tâche de conduire les travaux sur l'Initiative relative à la gestion économique et à la gestion des entreprises du NEPAD et nous nous employons à le faire. Il ressort très clairement du NEPAD que l'Afrique a besoin d'investissements. Il faut des investissements dans des domaines cruciaux tels que les infrastructures, les technologies de l'information et de la communication (TIC), les services sociaux et, naturellement, l'agriculture sur laquelle compte la majorité de la population pour assurer sa subsistance et sortir de la pauvreté. En outre, le NEPAD 33 Le NEPAD . eI(je1lx politiq1les, éco/lomiques et sectoriels préconise une Initiative globale favorisant les flux de capitaux, qui comprendrait des mesures visant à mobiliser plus de ressources internes, à alléger la dette, à réformer l'aide publique au développement CAPO) et à promouvoir les flux de capitaux privés. Pour promouvoir l'accroissement des flux de capitaux privés vers l'Afrique, élément essentiel d'une approche durable à long terme destinée à combler le manque de ressources, le NEPAD demande aux pays africains de prendre les mesures suivantes: - Créer un groupe d'étude qui sera chargé d'examiner la législation et la réglementation relatives aux investissements en vue de réduire les risques et de promouvoir l'harmonisation des textes en Afrique; - Évaluer les besoins en instruments financiers et effectuer une étude de faisabilité pour ce faire afin de limiter les risques que comportent les affaires en Afrique; - Lancer une initiative visant à renforcer les capacités nationales pour mettre en œuvre les Partenariats entre les secteurs public et privé; - Créer un groupe de travail qui sera chargé de l'intégration des marchés financiers pour accélérer l'intégration de ces derniers grâce à l'adoption d'un cadre législatif et réglementaire international uniforme et à la création d'un cadre unique pour le commerce africain. Conclusion En conclusion, il faut souligner que l'accélération de l'intégration régionale pourrait favoriser les investissements directs étrangers en Afrique. A ce niveau le lancement de l'Union africaine à Lusaka en juillet dernier, a été un événement historique qui a montré aux Africains euxmêmes et au monde que nos dirigeants avaient abandonné l'idée romantique de l'unité africaine pour s'engager fermement dans la voie plus réaliste de la coopération et de l'intégration économiques. L'intérêt de la coopération et de l'intégration économiques tient à plusieurs facteurs. Premièrement, nous savons tous que la plupart de nos pays sont petits et que les marchés sont exigus, ce qui a des incidences directes sur l'intérêt que peuvent présenter nos différents pays pour les investisseurs. En outre, l'exiguïté de nos marchés et la taille de nos économies ne permettent pas de diversifier la production nationale et réduisent nos capacités d'exportation. Deuxièmement, la tendance actuelle dans le monde - en Europe, en Amérique et en Asie indique que l'intégration économique sera un volet important dans les efforts visant à améliorer la compétitivité au niveau international. Troisièmement, l'intégration économique sera probablement le meilleur 34 L ï11l'esfissemellf direct ('franger en Afrique ef le NEPAD moyen pour les investisseurs africains de tirer parti du facteur que constitue la mobilité des capitaux grâce à l'accroissement du commerce intra-africain et des investissements. Quatrièmement, du fait de la coopération et de l'intégration peu poussées, d'importantes économies d'échelle sont perdues et les investissements, à leur tour, en subissent les contrecoups, en particulier dans des domaines tels que les infrastructures. 35 Une nouvelle version du développement intégré et concerté: le NEPAD par Professeur Moustapha Kassé Doyen de FASEG Depuis les années 70, l'Afrique est traversée par d'innombrables difficultés économiques et sociales subséquentes d'une part à la chute brutale des cours des matières premières provoquée par la crise financière et économique mondiale, et d'autre part par les conditions climatiques défavorables à l'agriculture et les problèmes engendrés par l'instabilité et les conflits qui ont affecté une bonne partie du continent. Malgré quelques embellies dans des pays limités (Tunisie, Maurice, Botswana, Burkina Faso, Ouganda, Afrique du Sud) et dans certains secteurs, le bilan du développement se lit en termes de contreperformances qui ont conduit progressivement à la marginalisation rampante du continent des affaires du monde. Cette situation économique africaine apparaît dans la détérioration généralisée des fondamentaux des économies nationales: stagnation des économies, inflation galopante, approfondissement du double déficit chronique de la balance des paiements et des finances publiques, massification de l'endettement, et faible croissance économique. Le revenu moyen africain qui représentait 14 % du revenu des pays développés au milieu des années 60, en 1997 le rapport n'était plus que de 7 %. Le taux de croissance annuel moyen du PŒ entre 1965 et 1993 n'était que d'environ 0,5 % de loin inférieur à la croissance démographique (entre 2,9 à 4,1 %). Après la haute conjoncture de 1994, avec un taux de croissance de 5,5 %, celle-ci ne s'est pas consolidée puisque le taux de la région a réamorcé une tendance baissière pour se fixer à 3,2 % en 1998 et à un peu moins de 2 % au début du millénaire. Les économies africaines ont assez mal réagi aux chocs externes comme la morosité de l'économie mondiale, la baisse des cours des matières premières dont le pétrole, la crise asiatique. Ces chocs ont induit des effets désastreux sur le taux d'inflation, la croissance du PŒ, le déficit budgétaire, l'endettement et le taux de change. A la fin des années 90, l'Afrique représente 12 % de la population mondiale mais 37 Le NEPAD : enjeux politiijues, écouomiijues el sectoriels fournit moins de 1 % du PŒ mondial. Les résultats du développement industriel et agricole sont aussi modestes. Il avait été mis en place une stratégie d'industrialisation par substitution aux importations qui avait de faibles relations en aval comme en amont avec le secteur agricole: les performances se sont révélées décevantes. Au niveau des relations avec l'extérieur, la part de l'Afrique dans les exportations est modeste. L'Afrique est complètement absente du commerce mondial dans les branches les plus dynamiques des produits manufacturés et des services. Au plan social, la dégradation du bien-être s'élargit avec la montée de la pauvreté dont l'accroissement est plus rapide que celui des revenus. Dans les années 80, le Plan d'Action de Lagos (PAL) pour le développement économique de l'Afrique 0980-2000) cherchait à résoudre au niveau continental, régional, sous-régional et national, les grands problèmes du développement africain. Cette politique de l'OUA avait été consignée dans le PAL à la XVIe session ordinaire de la Conférence des Chefs d'État et de Gouvernement, tenue à Monrovia en juillet 1979, précédée par des travaux d'experts économistes. Une déclaration a été adoptée. sur les principes directeurs à respecter et les mesures à prendre pour réaliser l'autosuffisance nationale et collective dans le domaine économique et social, en vue de l'instauration d'un nouvel ordre économique international ". Également, les Chefs d'État et de Gouvernement de l'OUA • s'engageaient, au nom de leurs gouvernements et de leurs peuples à promouvoir le développement économique et social et l'intégration de leurs économies en vue d'accroître l'auto dépendance et favoriser un développement endogène et auto-entretenu pour faciliter et renforcer leurs rapports sociaux et économiques; pour l'édification au niveau national, sous-régional et régional d'une économie africaine dynamique et interdépendante, pour l'établissement, chaque année, de programmes spécifiques pour matérialiser cette coopération économique sousrégionale, régionale et continentale ". La mise en œuvre de cette déclaration a été consignée en avril 1980, dans le Plan d'Action de Lagos, dont l'ambition était à la mesure du retard économique du continent. Le contenu concernait des domaines aussi variés que: - l'agriculture et l'alimentation dont le plan de développement a été approuvé à Arusha et adopté dans la déclaration de Monrovia de juillet 1979 ; -l'industrialisation du continent par la poursuite d'objectifs à long, moyen et court terme, visant à atteindre en l'an 2000 au moins 2 % de la production industrielle du monde, conformément aux objectifs de la conférence de Lima; -l'exercice de la souveraineté totale des pays africains sur leurs ressources naturelles, en s'appuyant sur la formation de ressources humaines capables de maîtriser les technologies appropriées; 38 Une HOl/l'elle l'ersion du déwloppement il1tè,;re et COHce11é: le NEPAD -la recherche et l'utilisation rationnelles des ressources humaines et des compétences nécessaires à la mise en œuvre de ce plan d'action; - la mise de la science et de la technologie au service du développement du continent aux niveaux national, sous-régional et régional; - l'adoption et la mise en œuvre d'une stratégie générale en matière de transports et de communications; - la promotion et l'intensification des échanges commerciaux et financiers sur le plan national inter-africains. Cette énumération non exhaustive montre toute l'importance accordée au PAL, ainsi que les grands espoirs qu'il a suscités lors de son adoption et de sa promulgation. Malgré, cela les années 90 vont montrer de très faibles taux de réalisation des objectifs retenus. Ces résultats bien en de ça des espérances, avaient justifié les évaluations sévères comme" la décennie gâchée ", " la décennie des espoirs déçus" ou plus fréquemment" la décennie perdue du développement ". Qu'il s'agisse de la croissance économique, de la résorption du double déficit structurel de la balance commerciale et des finances publiques, de la dette extérieure et intérieure, des niveaux de pauvreté, de la nutrition, de la santé, de l'éducation en un mot de l'amélioration du bien-être social, les performances sont dans l'ensemble très médiocres. L'afropessimisme a amplifié et dramatisé cette réalité comme pour préparer toutes les opinions publiques à des thérapies pénibles. Le cycle qui a suivi est connu; consensus de Washington et imposition des programmes d'ajustement structurel comme solution incontournable. Les insuccès du PAL ou encore le grand écart entre les intentions et la réalité pourraient être imputables aux raisons qui suivent: -la non traduction par les États des orientations et programmes adoptés au niveau continental en politiques et projets nationaux; - l'absence de volonté politique et de détermination à poursuivre des stratégies et politiques économiques et financières pertinentes; - la différence de conception et de perspective entre les Africains, les donateurs et institutions multilatérales; -le manque d'enthousiasme des partenaires de l'Afrique en matière de développement à aider le continent à atteindre les buts et objectifs qu'il s'est fixé; -l'illusion entretenue que chaque pays, agissant à titre individuel, peut surmonter en isolement les énormes handicaps comme l'étroitesse des marchés, le déficit d'épargne et des fonds d'accumulation productive, la faible base technologique; - le développement dans le cadre de l'État-nation à partir des PAS porte préjudice à l'intégration, à la coopération régionale; -la détérioration de l'environnement économique international avec la double crise du Système Monétaire International (SMI) et les 39 Le NEPAD : enjeux politiques, économiques et sectoriels chocs pétroliers successifs qui a complètement étranglé le continent et accentué sa marginalisation ; -la focalisation sur la stabilisation et la gestion des déséquilibres financiers extérieurs et intérieurs au détriment d'une vision de développement planifié; -le rôle croissant des «experts venus d'ailleurs.. qui participent directement ou indirectement à la prise de décisions économiques, politiques et sociales et au détriment de l'expertise interne, des universitaires et de la société civile ; -les effets de la sécheresse et de la désertification; -l'extrême vulnérabilité de l'agriculture aux aléas climatiques; - le poids de la conflictualité africaine avec les guerres civiles, ethnique et tribales qui perturbent les activités productives, détruisent l'infrastructure, entraînent le déplacement de millions de personnes et obligent les gouvernements à détourner les rares ressources des activités de développement. Le fait que le PAL et les autres plans qui l'ont suivi n'ont pas connu de réalisations concrètes, face à la montée des déséquilibres et de l'endettement, les États ont été contraints à appliquer les politiques de stabilisation préconisées par la Banque mondiale. Celles-ci gravitent autour de quatre objectifs: -l'ouverture des économies sur le système des relations économiques et financières internationales; -la réduction du rôle de l'État dans les choix de production et d'allocation des ressources ce qui implique la réduction du secteur public, le démantèlement des monopoles publics naturels et la privatisation; -l'élimination de toutes les distorsions dans le libre jeu de tous les marchés des biens et des services, du travail, de la monnaie, des taux de change; - la promotion du secteur privé dans toutes les activités productives. plus de deux décennies d'application et de .. règne sans partage .. des PAS, la médiocrité des résultats économiques et financiers du continent a amené la Banque mondiale à opérer une évaluation exhaustive des politiques mises en œuvre. Elle publie en 1994, le Rapport .. Adjustment in Africa .. qui montre que les rythmes des réformes restent encore faibles et conséquemment, le niveau de la croissance ne permet pas encore une réduction de la pauvreté et une résolution des nombreux problèmes sociaux liés à une démographie galopante et une urbanisation rapide et chaotique, deux phénomènes conjugués qui font exploser la demande sociale. Ce n'est pas notre objet de nous étendre sur cet aspect de la question relative à la pertinence ou non des PAS. Mais le moins que l'on puisse en dire est que ces politiques ont échoué dans ce qui était 40 Vile /lOl/wlle l'ersion dit dél'r!foppemenl illtèMre el conce/1é,' le NEPAD leur objectif majeur: l'instauration d'un processus vertueux de croissance économique. Si elles se sont avérées aussi peu performantes, c'est parce qu'elles ont, comme le note]. Stiglitz, confondu les moyens avec les fins: la libéralisation, la recherche des grands équilibres, les privatisations sont prises comme des fins plutôt que comme des moyens d'une croissance durable, équitable et démocratique. Elles se sont beaucoup trop focalisées sur la stabilité des prix plutôt que la croissance et la stabilité de la production. Elles n'ont pas su reconnaître que le renforcement des institutions financières est aussi important pour la stabilité économique que la maîtrise des déficits budgétaires et de la masse monétaire. Elles se sont concentrées sur les privatisations, mais n'ont guère attaché d'importance à l'infrastructure institutionnelle nécessaire au bon fonctionnement des marchés, et particulièrement à la concurrence n. Les nombreuses évaluations critiques de l'ajustement menées par des chercheurs universitaires (Sa mir Amin, Ben Hammouda, M. Kassé, M. Diouf et al) ont abouti à l'exigence de Repenser Bretton Woods à partir d'Afrique (thème du Colloque des intellectuels africains patronné par le Président Blaise COMPAORE à Ouagadougou en Avril 2000 avec la participation d'environ 300 enseignants-chercheurs et d'éminents experts des institutions financières internationales). En analysant de plus près cette crise africaine qui est la préoccupation majeure des décideurs politiques en ces débuts du millénaire, elle présente un caractère multidimensionnel à la fois économique, politique et social. Et aucun pays n'y échappe entièrement; "nous traversons tous la même crise et partageons les mêmes conséquences (Blaise Compaoré, 1998). n n n n En premier lieu cette crise africaine est économique. Toutes les recherches et les différentes analyses montrent que les économies africaines sont installées dans une crise durable qui se manifeste sous trois formes à savoir: -la dégradation générale des principaux indicateurs macroéconomiques et macro financiers, l'approfondissement des déficits des finances publiques et de la balance des paiements; - la désintégration des structures de production et des infrastructures de base; - la détérioration des facteurs constitutifs de l'indicateur du développement humain: éducation, santé publique, nutrition et logement. Manifestement, sur chacun de ces points, on peut exhumer des statistiques pertinentes mais quels que soient les indicateurs utilisés, les performances des économies depuis les décennies 1970, 1980 et 1990 sont restées plutôt très médiocres à telle enseigne que globalement ces économies n'ont pas pu améliorer la productivité. Il en est résulté une faible compétitivité qui conduit doublement à la marginalisation du 41 Le NEPAD.' enjel/x politiques, économiques et sectoriels continent sur le marché mondial et à son endettement. La croissance des secteurs productifs a été constamment faible et quelque fois négative faisant de l'Afrique la seule région du monde où la production par tête d'habitant a baissé au cours des années 80. Inexorablement, pareille situation débouche toujours sur une mpture des grands équilibres financiers et surtout la montée des secteurs non productifs. Tout naturellement, ces déséquilibres macroéconomiques et financiers ont contraint les États africains à appliquer des politiques de stabilisation et d'ajustement structurel, prônées par les Institutions Financières Internationales, au détriment des options pour le développement planifié. En second lieu, la crise africaine est aussi politique. Elle se manifeste sur trois plans interconnectés, celui de la détérioration de l'espace politique avec une perte de légitimité des principales institutions dont l'État, celui de la précarité de l'État-nation et celui de la conflictualité africaine. L'aspect le plus important est certainement la crise instmmentale de l'État africain. Elle se manifeste, selon P. Hugon, d'une part dans son extrême précarité provenant d'un débordement d'en haut par l'appartenance à des réseaux régionaux et transnationaux, et d'en bas par l'informalisation et d'autre part, dans son incapacité à financer ses missions les plus fondamentales comme assurer la sécurité, la santé et l'éducation qui accroissent la qualité des ressources humaines et la productivité des facteurs de production. Il en résulte une perte de légitimité des institutions. Cela conduit à la dégénérescence étatique c'est-à-dire un État débordé et surchargé qui tombe facilement dans l'organisation d'un pouvoir patrimonial autoritaire et anti-démocratique. C'est cela qui explique la chute de l'espace démocratique africain et le renforcement de la corruption qui est un échange occulte pour accéder à un avantage indu donc une forme particulière de recherche de rente. L'ampleur de ce phénomène est telle qu'il gangrène la concurrence et introduit des distorsions sur le fonctionnement des marchés. Les chasseurs de rente introduisent alors des biais dans le libre jeu des institutions. Pour les auteurs du Public Choice (Buchanan, Tollison, Tullock) le pouvoir d'intervention de la puissance publique dans l'économie qu'il soit direct grâce aux commandes publiques ou indirect par les réglementations, tarifs et quotas, en fait l'interlocuteur privilégié des chasseurs de rente. Le second volet de la crise politique s'exprime aussi dans la perpétuation et l'élargissement de la conflictualité africaine. La crise de l'État-nation et les questions ethniques et tribales sont incomplètement prises en compte dans l'analyse économique. Pourtant, ces phénomènes se présentent comme des chocs perturbateurs qui placent plusieurs pays dans le chaos économique, politique et social. Il importe 42 Une 1/oll1'elle l'ersion dit dél'efoppement intè;<re et conce/1é: le NEPAD de cerner ces problèmes lancinants qui font partie des préoccupations majeures de tous les dirigeants africains et de leurs diverses organisations continentales, régionales et sous-régionales. En effet, depuis quelques années, on observe la multiplication, l'extension et la complexification des conflits sur l'ensemble du continent africain au moment même où la situation économique et sociale se détériore et que l'exigence démocratique s'impose à tous les États. La majorité des chercheurs (Achille Mbembé, Ben Hammouda, M. Kassé.,.) qui se sont intéressés à la conflictualité africaine mettent en avant la volonté des élites de faire main basse sur les ressources pour disposer de moyens plus substantiels leur permettant d'aller à la conquête des pouvoirs politiques en pleine déconfiture. Ainsi on délimite les lignes de conflits autour des richesses pétrolières: Angola, Congo-Brazzaville, Nigeria; ou des richesses diamantifères: République Démocratique du Congo (ROC), Sierra Léone, République Centre Afrique (RCA), ou des espaces géostratégiques fortement disputées ou plus simplement des vestiges de la colonisation ou de l'ancienne guerre froide: Soudan, Ouganda, Somalie. Ces conflits, qu'ils mobilisent des armées régulières ou des civils en armes, ont des coûts financiers et humains exorbitants. C'est surtout les civils dont le contrôle est l'un des objectifs qui payent les plus lourds tributs à la guerre et aux affrontements. A titre d'illustration, au niveau des 11 pays africains concernés, les divers conflits en question ont fait entre 4 et 7 millions de morts ce qui représente entre 3 et 5 % de leur population totale. Par ailleurs, pour l'ensemble de ces pays en état de guerre, les victimes civiles (réfugiés, déportés, déplacés, destructions de la production et des instruments de travail, insécurité, grande et petite délinquance etc.) ont concerné jusqu'à 90 % de la population alors que pour la seconde guerre mondiale leur nombre était de 50 %. A quoi s'ajoutent les autres préjudices matériels et moraux de tous ordres. Sur un autre plan, les dépenses entraînées par les conflits sont considérables à la fois pour les belligérants et pour la communauté internationale qui est entrain de s'investir à grande échelle par la mise sur pied de forces militaires d'interposition ou de maintien de la paix. Plus globalement, au niveau du financier, on peut observer que des ressources importantes sont mobilisées bien que les armes proviennent pour l'essentiel du marché noir ou de stocks existants dans les pays en développement ou dans les pays développés. Au niveau du financement des conflits, on observe une évolution de leurs formes et une plus grande diversification de leurs sources. Devant la perte des appuis internationaux, qui du temps de la guerre froide constituaient l'essentiel des financements, les mouvements armés développent de nouvelles filières et de nouveaux réseaux de mobilisation de ressources. D'ailleurs, ces financements tentent de s'incruster d'une 43 Le NEPAD : el~iellx politiques, économiques et sectoriels manière durable dans le tissu économique local afin de leur donner un caractère plus durable, plus contrôlable et plus autonome. Dans ce cadre la poursuite de la guerre ne va point se heurter à une quelconque contrainte financière. C'est ainsi que les ressources minières (pétrole, diamant ou autres) sont commercialisées à partir de circuits parallèles et non officiels. Ce sont ces nouvelles formes de financements assez proches de pratiques délictueuses qui se développent et s'élargissent. Aujourd'hui, tous les mouvements armés exploitent la commercialisation illégale de biens ou de services licites ou illicites pour fInancer leurs activités (drogues, diamant, or, pétrole etc.). Or, il est bien établi que le développement durable qui est l'aspiration fondamentale des peuples n'est possible que dans la paix, la sécurité et la stabilité. En troisième lieu, la crise africaine est une crise sociale. Au plan social, on observe une dégradation des indicateurs du bien-être comme l'éducation, la santé, le logement et l'environnement et un accroissement du chômage et de la pauvreté. L'Afrique sub-saharienne compte selon les plus récentes statistiques environ 250 millions de pauvres soit 45 % de sa population. Il semble que le rythme de croissance de la pauvreté est plus rapide que celui des revenus. Ce processus est aggravé par une forte et incohérente croissance urbaine et une démographie galopante deux phénomènes conjugués qui font exploser la demande sociale et vont accentuer les désordres de toutes sortes. Comme quoi, la main invisible du marché est prédatrice de la condition sociale. Cette condition sociale des populations défavorisées sera aggravée dans les pays en développement dès le début des années 80 amenant les ONG ainsi que les organisations internationales à alarmer l'opinion publique mondiale. L'UNICEF (Ajustement à visage humain 1984), le BIT, la FAü ainsi que des chercheurs P. Hugon, H. Singer, Loxley accusent directement les mesures de stabilisation et d'ajustement structurel, la détérioration du cadre macroéconomique et financier, à la récession économique internationale, la dégradation des termes de l'échange et l'endettement massif. Dans les pays soumis aux programmes d'ajustements structurels, les conséquences des mesures économiques et financières accentuent les difficultés de la population par le freinage de la demande et la compression des dépenses publiques, le recul des dépenses sociales, la baisse des effectifs de la fonction publique, la réduction de la fréquentation des écoles et des centres de santé. Les réformes visant la réduction des déficits et la relance de la croissance débouchent sur une dégradation du développement humain avec une recrudescence de la pauvreté. C'est sur le terrain de la réconciliation entre la croissance économique et le développement social que le PNUD se sépare du cadre de 44 Une /lolll'elle l'ersio/l ail aéz'eloppeme1lf i11fègre et co/lce/1é.' le NEPAD référence dominant pour s'élever en créant différents concepts caractéristiques de la condition humaine: l'indicateur du développement durable (IDH), l'indice de la pauvreté humaine (IPH), l'indicateur sexospécifique (ISDH) et l'indicateur de la participation des femmes (IPF). Au regard de l'évolution actuelle, il apparaît que le défi majeur est la réduction de la pauvreté et des inégalités ainsi que l'investissement dans les ressources humaines. Le challenge des démocraties africaines est de montrer leur capacité à trouver les voies et moyens pour y parvenir. Cela devrait certainement passer par l'élaboration et l'exécution de programmes concernant, entre autres, la croissance économique, le droit au développement et la participation des femmes. Dans son rapport intitulé East Asian Miracle, la Banque mondiale (World Bank, 1993) souligne que de nombreuses économies d'Asie de l'Est ont pris le chemin d'une croissance rapide et équitable. "Pourquoi l'Asie s'est-il développée plus rapidement que l'Afrique? ". Une réponse évidente est que l'Asie a fait un effort d'investissement plus important que l'Afrique. Entre 1965 et 1990, le ratio moyen entre l'investissement et le PIB était de 17,3 % en Afrique contre 30,6 % pour l'Asie de l'Est et du Sud-Est. En définitive, la montée de la pauvreté de masse suite aux médiocres résultats de l'ajustement structurel a poussé à la fois les décideurs politiques et la communauté des économistes à chercher des solutions de court terme au détriment du développement à long terme qui a été systématiquement occulté. Les débats et les réflexions portaient principalement sur les problèmes de stabilisation et d'ajustement structurel (amélioration des fondamentaux de la macroéconomie), d'endettement soutenable, d'aide au développement. La pensée néo-libérale dominante incarnée dans la praxis des institutions financières internationales (IFI) dénonçait très fortement les distorsions introduites par l'État dans le processus de fonctionnement des marchés (marché des biens et services, marché du travail, marché des capitaux et marché des changes), L'analyse de ces divers dysfonctionnements dont la source principale est attribuée au "trop d'État" avait conduit les IFI à exiger la réforme systématique de tous les espaces de concentration des pouvoirs: pouvoir politique à travers le redéfinition des missions de l'État et l'élargissement du processus démocratique, pouvoir économique avec le désengagement de l'État, la privatisation et la restructuration du secteur public, pouvoir éducatif et de formation des ressources humaines. Cependant, l'approfondissement de la crise africaine sous tous ses aspects, la baisse continue des niveaux de vie des populations ont réintroduit dans l'analyse économique les problèmes du développement à long terme que les progrès de la recherche économique permettaient de prendre en charge et d'aller bien au-delà de la simple gestion de la crise. 11 s'agit notamment du renouvellement des théories de la croissance, de la théorie des organisations et des institutions 45 Le NEPAD: el(/ellx politiques, économiques et sectoriels considérées comme des vecteurs de réduction des coûts de transactions, de l'information imparfaite et asymétrique enfin de l'emploi de modèle d'équilibre général permettant une meilleure maîtrise des interactions entre les marchés, les institutions et divers acteurs. Manifestement, d'énormes problèmes de développement se posent au continent: déséquilibres macroéconomiques graves, revenu par habitant plus faible aujourd'hui qu'il ne l'était à la fin des années 60, stagnation de la production, part croissante des victimes de la pauvreté, faibles taux de scolarisation, forte mortalité infantile et prolifération de maladies endémiques, disqualification du cadre de l'État-nation. Ces perspectives africaines vont-elles continuer à être aussi sombres? En d'autres termes, l'Afrique est-elle condamnée à vivre encore pour longtemps dans les faubourgs de l'économie mondiale? Que faire pour changer significativement l'environnement économique du continent? Les vertus de la crise africaine ainsi que celles d'une vingtaine d'années d'expérience de réformes économiques, politiques, institutionnelles et sociales sont, entre autres, d'indiquer au moins trois directions de solution pour en sortir: d'abord l'instauration d'un processus durable de croissance, ensuite la création d'un espace optimal et enfin l'insertion dans l'économie mondiale de haute compétition. L'articulation de ces éléments nécessite une nouvelle vision stratégique du développement adossée sur un programme cohérent et opérationnel qui dégage les orientations, fixe les priorités et détermine les moyens pour une croissance forte et durable et une amélioration de la situation sociale à moyen et long terme. En clair, le continent africain pour sortir de la crise a besoin d'une nouvelle vision. et d'un leadership fort pOUf sa mise en œuvre. SECI'ION 1 : L'IMI'I:HATIF D'UNE NOUVELLE VISION DU DI~:VELOI'I'EMENTl'OUH SOHllH DE LA CHISE C'est dans une optique de recherches de nouvelles solutions à la fois pertinentes et performantes que le système des Nations-Unies et toutes les institutions financières internationales s'interrogent pour savoir si " L'Afrique peut revendiquer sa place dans le XXI C siècle ". La Déclaration du Millénaire des Nations-Unies faite par les chefs d'État et de Gouvernement fixe avec clarté ce qui peut constituer les sept objectifs internationaux du développement à savoir: - Réduire de moitié entre 1990 et 2015 la proportion de la population vivant dans l'extrême pauvreté. - Scolariser tous les enfants dans l'enseignement primaire d'ici 2015. - Promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomie des femmes en éliminant les disparités entre les sexes dans l'enseignement primaire et secondaire d'ici 2005. 46 Vile nOl/l'elle l'ersion du dél'eloppemellt illtèl;re et conce/1é: le NEPAD - Réduire des deux tiers les taux de mortalité infantile et juvénile entre 1990 et 2015. - Réduire des trois quarts les taux de mortalité liés à la maternité entre1990-2015. - D'ici à 2015, assurer l'accès aux services de santé génésique entre 1990 et 2015. - Appliquer des stratégies nationales axées sur le développement durable d'ici à 2005, de manière à réparer les dommages causés aux ressources environnementales d'ici 2015. Ces objectifs définis clairement avec des horizons de réalisation fixés, sont avalisés par les décideurs les plus significatifs des institutions internationales: le Secrétaire Général de l'ONU, Kofi Annan, le Secrétaire général de l'OCDE, Donald Johnson, le Directeur Général du FMI, Horst Kahler, et le Président de la Banque mondiale, James Wolfensohn. Ils ont solennellement proclamé que leurs différentes institutions s'emploieraient à faire de ces objectifs de développement le fondement commun de leurs actions et de leurs programmes, et pour mesurer leur efficacité. De ce fait, les tendances actuelles devront être radicalement inversées pour que puissent se concrétiser ces objectifs. Il faut alors au minimum réaliser un taux de croissance annuel moyen de 7 % qui nécessite des investissements colossaux de l'ordre de 65 milliards de dollars pour des pays dont l'épargne intérieure est quasi inexistante. Le recours à l'épargne extérieure s'impose et cela exige le développement d'un partenariat de type nouveau avec les acteurs du système mondial ayant des excédents de ressources. Pour ce faire, l'Afrique aura besoin d'un leadership fort et vigoureusement implanté, d'une meilleure gouvernance économique et politique pour assurer des prestations efficaces aux divers opérateurs économiques et financiers sollicités. C'est dans ce contexte que furent entreprises trois initiatives: le Plan Omega (PLOM) du Président Abdoulaye Wade, Le Millénium Partenarship for the African recove1Y Program (MAP) élaboré par le Président Tabo MBeki avec la collaboration des Présidents Olusegun Obasanjo, Abdou Aziz Boutet1ikha et Hosni Moubarak et le projet Compact élaboré par la Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique. La fusion de ces plans a été réalisée à Pretoria suite à une recommandation du 39 L' Sommet de l'OUA à Lusaka (en juillet 2001) sous l'appellation de la Nouvelle Initiative africaine qui deviendra par la suite le NEPAD acronyme du sigle anglais New Partena/:'ihip for Africa Deve/opment. Contrairement aux plans et programmes antérieurs (Plan de Lagos, Programme Prioritaire pour le Développement de l'Afrique, Décennie des Transports, Programme d'industrialisation, CARPAS ... ), les nouvelles initiatives sont conçues par des Chefs d'État 47 Le NEPAD: enjeux politiques, économiques et sectoriels qui en ont la paternité et qui de surcroît ont pris l'engagement de les réaliser en concertation avec des partenaires extérieurs. 1 - Le Plan Oméga (PLOM) : Un pacte de croissance soutenue et de développement durable à partir d'investissements dans le capital physique et le capital humain Le PLOM conçu par le Président Abdoulaye Wade est construit sur un double constat à savoir: - que la colonisation obéissait au principe du pacte colonial selon lequel économie des colonies était le complément de celle de la métropole? Dans cette logique, toutes les infrastructures construites étaient des voies d'évacuation des matières premières; -le second constat est qu'après les indépendances, avec l'aide des institutions de la communauté internationale, la logique du développement a reposé sur un binôme: le crédit (pour financer les déficits) et l'aide publique à des conditions concessionnelles. Or, dans le temps, ce binôme a conduit à l'impasse de la dette qui, non seulement n'a pas financé la croissance économique mais continue de se massifier tandis que l'aide plafonne malgré les objectifs qui lui avaient été assignés dans les années 1970. Ce constat d'échec impose de trouver d'autres stratégies et d'autres moyens qui assurent une croissance et un développement durables pour l'Afrique. Ce sont ces objectifs qui ont donc conduit à l'élaboration du PLOM. Pour y parvenir, il faut résorber les disparités structurelles entre les pays développés et l'Afrique dans au moins deux secteurs de base: les infrastructures et l'éducation. En effet, pour le PLOM "si l'Afrique disposait des mêmes infrastructures de base, elle pourrait consacrer ses ressources à la production et à l'amélioration de la productivité pour aborder favorablement la compétition internationale. Cette disparité constitue un handicap très sérieux dont la charge de la résorption devrait revenir à la communauté internationale, et plus particulièrement aux pays industrialisés ". Il apparaît clairement que ces principes fondateurs du PLOM ne sont pas trop éloignés de ceux des théories de la croissance endogène confortées par les expériences historiques de développement observées dans le monde d'abord, aux États-Unis entre les années 50 et 70 avec le développement des grandes infrastructures de base et des grands travaux dont le (New Deal) processus bien connu grâce aux travaux de la Nouvelle École Historique américaine. Ces différentes expériences historiques ont pour dénominateur commun l'utilisation pleine et entière des principales sources de la croissance que sont les investissements dans le capital physique comprenant les infrastructures de base, c'est-à-dire les routes, les 48 Ulle nOl/l'elle l'ersioll dl/ dél'eloppement illlè,gre el collee/1é.' le NEPAD chemins fer, les infrastructures portuaire et aéroportuaire, les ouvrages hydro-agricoles, les télécommunications et l'énergie, ensuite les investissements dans le capital humain en faveur de l'éducation, de la santé et de la nutrition et enfin les investissements dans l'agriculture au sens large comprenant les activités agricoles, l'élevage, la pêche et les forêts. Le PLOM en insistant sur la nécessité de réaliser des investissements importants dans les secteurs prioritaires se présente comme un programme de croissance durable et auto-entretenue. Il constitue une avancée inappréciable par rapport aux visions antérieures. Dans sa conception comme dans ses objectifs le droit à la croissance pour l'Afrique est revendiqué et en même temps, il est proposé les voies et moyens de sa mise en œuvre en collaboration avec toute la communauté internationale sur la base d'intérêts communs partagés. Son approche est en beaucoup de points semblables aux nouvelles théories de la croissance endogène qui font dépendre le taux de croissance du comportement des agents et des caractéristiques des systèmes économiques, contrairement aux théories traditionnelles pour lesquelles le taux de croissance est déterminé par des variables supposées exogènes comme le progrès technique et l'accroissement démographique (modèle de Solow). Les modèles traditionnels supposaient que le taux de croissance à long terme dépendait de l'expansion de la population et des gains de productivité qui permettent d'améliorer l'efficacité du travail; ce taux était dépendant de la propension à épargner. En clair, le taux de croissance à long terme était" exogène ", en ce sens qu'il ne dépendait ni du comportement des agents (épargne, investissement, recherche .. .), ni de la politique économique (budget, fiscalité ... ). Une telle approche n'est pas satisfaisante, puisqu'elle, ne permet pas d'expliquer les écarts entre pays, ni les disparités persistantes de niveau de vie. La pensée économique du développement comme les recherches empiriques récentes ont fait apparaître une forte corrélation entre le capital au sens large (y compris le capital humain) et la croissance. Dans ces formulations, les leviers de la croissance sont constitués de quatre facteurs principaux qui s'avèrent être les secteurs prioritaires du Plan Oméga à savoir: le capital physique (infrastructures de base), le capital public, le capital humain (éducation et santé) et l'innovation technologique. La rupture avec l'analyse néo-classique est nette. Toutes les théories de la croissance s'accordent sur le fait que l'accumulation du capital physique est un facteur essentiel de la croissance. De façon générale, ces infrastructures comprennent : - les réseaux routiers (routes internationales reliant le pays à certains de ses voisins, routes nationales et départementales, routes urbaines et pistes de désenclavement) et le réseau d'assainissement; 49 Le NEPAD " el(/eux politiques, éco/lomiques et sectoriels -les infrastructures portuaires et les projets d'extension des ports secondaires; -les infrastructures ferroviaires; -les infrastructures de télécommunication; -le réseau de fourniture d'eau et d'électricité; -les infrastructures aéroportuaires. Ces infrastructures ont un double rôle : accompagner la production des secteurs productifs et satisfaire les besoins des consommateurs. Dans la quasi-totalité des pays africains, la caractéristique marquante de ces infrastructures est leur insuffisance quantitative et leur état de délabrement très avancé: moins de 30 % des routes revêtues sont en bon état, la plupart des ports secondaires ne sont plus fonctionnels, la fréquence des délestages sur la fourniture de l'énergie électrique en dit long sur la vétusté du matériel de production. De plus, comme le souligne le PLOM, le traçage des routes héritées de la période coloniale obéit plus à une logique d'économie de traite qu'à celle d'une économie moderne. Le problème crucial que rencontrent les firmes implantées en Afrique ne demeure-t-il pas la faiblesse des débouchés pour leur production. Cela résulte d'une part de la faiblesse de la demande intérieure solvable, et d'autre part de l'étroitesse des marchés des facteurs de production, des biens et des services. En permettant l'extension et le décloisonnement de ces marchés dans une optique de croissance endogène, l'intégration devient alors très bénéfique. Les besoins en ressources financières particulièrement en ce qui concerne la balance épargne-investissement pour l'Afrique sont énormes et l'APD en est la source principale. D'après la CEA (Rapport 1999), en Afrique, un investissement de 35 % du PNB serait nécessaire pour atteindre un taux de croissance annuel de 7 %. Il faudrait donc 18 % du PŒ d'épargne supplémentaire essentiellement externe. L'APD étant actuellement de 9 % du PŒ, un gap de financement de 9 % reste à combler. La CNUCED propose le même type d'estimation des besoins de financement pour l'Afrique sub-saharienne (Rapport 2000 sur le financement des PMA). Il faudrait 50 à 150 % de ressources supplémentaires pour atteindre un taux de croissance annuel de 6 %. L'Afrique aurait dû bénéficier d'au moins 10 milliards de dollars de transfert de ressources pour qu'elle puisse atteindre le taux de croissance indispensable. Elle ne reçoit même pas le dixième. Dès lors que l'APD constitue la source essentielle et qu'elle accuse une baisse substantielle permanente, il faut rechercher d'autres sources. Aujourd'hui les marchés financiers échangent chaque jour quelques 1200 milliards de dollars. Ces mouvements de capitaux sont commandés par quatre (4) facteurs: -le paiement des transactions commerciales de biens et services; 50 Une IW111'elle 1'ersion du dél'eloppemellt il1lèRre el conce/1é: le NEPAD -les contreparties financières de transferts, d'immobilisations corporelles (IDE) ; - les investissements de portefeuille destinés à en améliorer le rendement, la liquidité ou la répartition du risque; - les spéculations sur les taux de change. Cependant, on observe que les pays africains sont dans leur grande majorité complètement absents de ces courants, ce qui nécessite de nouvelles approches pour participer à la mobilisation des ressources indispensables pour financer les investissements dans les secteurs prioritaires. En matière de recherche de nouvelles sources, le PLOM distingue les ressources africaines et celles provenant de la communauté internationale et du système financier. Les ressources endogènes des pays africains comprennent: - les ressources mobilisées dans le cadre des financements des infrastructures et des secteurs sociaux; - les réserves excédentaires de certains pays africains; - les ressources de certaines institutions financières africaines; -l'épargne intérieure des pays. Les ressources externes sont celles qui sont attendues de la communauté internationale et du secteur privé. Elles comprennent: -l'émission de bons de Trésor par les pays développés pour mobiliser des ressources en faveur du Plan Oméga; -la création de ressources spéciales par l'émission de Droits de Tirage Spéciaux (DTS) spécialement conçus pour l'Afrique; -l'appel aux ressources privées et aux marchés financiers; -les prêts sur 50 ans avec bonification du taux d'intérêt; -les investissements directs étrangers par intéressement des entreprises des pays développés: 2/3 des fonds servent à rémunérer ces entreprises, le 1/3 restant étant réservé aux entreprises africaines. En définitive, si les investissements sont laissés aux seuls efforts de l'Afrique par les deux modes de financement le crédit et l'aide, on peut estimer que la disparité infrastructurelle ne sera pas résorbée avant une cinquantaine d'années au moins, durée qui compromettrait la croissance et le développement durable. Toute l'originalité du Plan Oméga réside dans le caractère novateur des modes de financement. Si les ressources sont essentiellement d'origine à la fois internes et publiques, elles ne peuvent provenir que de la fiscalité. Or, une augmentation du taux d'imposition aurait un double effet: l'arbitrage des agents entre consommation et épargne va se faire au détriment de la seconde (mauvais donc pour la croissance) et ensuite le rendement de l'investissement risque de baisser. En conséquence l'État étant l'agent le plus habilité à valoriser le capital physique et le capital humain, il faut lui trouver des ressources financières spéciales. 51 Le NEPAD : el~ieux politiques, f!COl1omiques et sectoriels La mise en œuvre du Plan par une Haute Autorité Supranationale L'exécution du PLOM est confiée à une Autorité supranationale directement rattachée à un Organe Politique et soumise au contrôle d'un Conseil d'Administration. Cette Autorité mondiale serait proposée après une Session Spéciale de Lancement autour des questions du Développement Africain. Elle disposerait d'un Conseil d'Administration formé des représentants des différentes sous-régions de l'Afrique et aurait pour mission de gérer les ressources et d'assurer la mise en œuvre des projets prioritaires. Cette Haute Autorité en liaison avec les Exécutifs des Plan Oméga va alors procéder à l'évaluation de tous les besoins en investissements dans les secteurs prioritaires des infrastructures physiques de base, de l'éducation, de la santé et de l'agriculture afin de prendre en charge leur gestion mais seulement après leur traduction en projets. Ce mode d'évaluation, de suivi et de gestion des programmes d'action font que le PLOM s'inscrit dans une dynamique de rupture avec les visions antérieures notamment celles du PAL basées sur le développement national autocentré mené par un État dit" développeur ". Il dégage une stratégie proprement économique et se dote de moyens institutionnels pour sa réalisation dans un cadre d'intégration régionale. L'espace intégré permet l'élargissement des marchés, la réalisation des économies d'échelle et l'élimination de la contrainte des débouchés. Les infrastructures taillées à la dimension continentale, régionale ou sous-régionale contribuent à la formation des marchés, au développement des échanges et enfin à la répartition des ressources dans l'espace intégré. II - Le Millenniuim Partership for Recovry Program (MAP): Gouver.nancepolitlque,écononùqueetoptlonssttaté~ques pour le développement durable Cette logique de croissance du Plan Oméga explique sans nul doute sa complémentarité parfaite avec le Millennium Partenership for the African recovery Program (MAP) qui comporte de très fortes préoccupations développementalistes. Dès l'introduction, il est solennellement proclamé que le MAP "est une promesse faite par des dirigeants africains, basée sur une vision commune, ainsi que leur conviction ferme et partagée qu'ils ont un devoir urgent d'éradiquer la pauvreté et de placer leurs pays, à la fois individuellement et collectivement, sur la voie d'un développement durable et de participer activement à l'économie mondiale et au corps social Il est ancré sur la détermination des africains de s'extirper eux-mêmes et de tirer le continent du malaise du sous-développement et de l'exclusion. La pauvreté et le retard de H. 52 Une /1OUl'elle l'l!l"sion d1l développement ill!è/{I"I! I!t conee/1é: II! NEPAD l'Afrique sont en vif contraste avec la prospérité du monde industrialisé. La marginalisation continue de l'Afrique en dehors du processus de globalisation et de l'exclusion sociale de vaste majorité de ses peuples constituent une menace sérieuse pour la stabilité du monde-. Le Plan comporte 107 articles répartis en 5 chapitres. Le premier chapitre traite - De la place de l'Afrique dans la communauté mondiale ". 11 s'agit d'un véritable état des lieux du continent avec une insistance sur le contraste existant entre la pauvreté africaine et la richesse dans le reste du monde. Les inégalités constatées deviennent de plus en plus inacceptables surtout par les populations africaines. Les dirigeants doivent alors le comprendre s'ils veulent rester au pouvoir dans les systèmes démocratiques en construction. Le deuxième chapitre analyse • Les relations de l'Afrique avec la communauté mondiale ". L'idée centrale est que le monde a besoin de l'Afrique qui recèle un potentiel important de ressources qui se décompose en 4 composants: le riche complexe de dépôts minéraux qui fournit la base de l'exploitation minière, de l'agriculture et du tourisme (l), le poumon écologique qui est une commodité publique mondiale qui fait du bien à toute l'humanité (2), les sites paléontologiques et archéologiques qui témoignent de l'évolution de la terre, de la vie et des espèces humaines, une grande variété de la flore et de la faune (3), la richesse de la culture africaine. L'avenir sera au continent s'il réussi à valoriser ces ressources. Or, cette valorisation doit se faire en partenariat avec les pays développés qui détiennent le contrôle des moyens financiers et technologiques. Le troisième chapitre tente d'établir l'Exigence d'un nouveau partenariat avec le reste du monde sur la base des intérêts mutuels. Ce partenariat doit permettre à l'Afrique de tirer profit de la révolution technologique mondiale. Cela nécessite des engagements des gouvernements, du secteur privé, des institutions internationales et même de la société civile. Le quatrième chapitre porte sur l'analyse des résultats de l'Association mondiale c'est-à-dire le nouveau contexte mondial et les avantages qui s'y attachent. La mondialisation est une donnée incontournable et l'Afrique doit chercher les voies et moyens pour s'insérer dans le processus pour en tirer tous les avantages. Le cinquième chapitre est relatif aux domaines de priorité où le Programme d'action doit être simultanément mis en œuvre. Les priorités clés retenues sont : - La paix, la sécurité et la gouvernance. - L'investissement dans les peuples de l'Afrique. - La diversification de la production et des exportations de l'Afrique. - L'investissement dans les TIC et autres infrastructures de base. - Le développement des mécanismes de financement. Le dernier chapitre concerne l'affirmation d'une nouvelle volonté politique des dirigeants africains d'accélérer le développement écono53 Le NEPAD: el~/eux politiques, éco/lomiques et sectoriL'/s mique et social du continent en mettant fin à sa marginalisation et en promouvant son intégration dans l'économie mondiale par l'accès aux marchés extérieurs. A l'échelle du continent africain, l'Afrique du Sud post-apartheid est une locomotive et présente toutes les caractéristiques d'une économie émergente. Après avoir réalisé une transition démocratique réussie qui a montré les capacités de l'ANC à gérer l'économie, le pays doit s'intégrer dans l'économie mondiale d'autant plus qu'il dispose d'importants atouts: une agriculture performante et diversifiée (4 %), un secteur industriel avancé (31,7 %), une bonne économie de services (64,3 %), des infrastructures de base de qualité, un bon système éducatif et de formation avec un taux de scolarisation de 94 % et un PŒ par habitant de 3 225 dollars. Malgré ce tableau de bord reluisant, le pays a d'innombrables défis à relever: épidémies du sida, criminalité, chômage, fuite des cerveaux. Les multinationales ont opéré, au début des années 90, soit un retour, soit une arrivée. D'importants investissements ont été réalisés et ils ont profité directement au secteur industriel. Cependant, la crise financière asiatique et celle de l'or vont coïncider avec une baisse notable des flux de capitaux. Le pays rencontre d'énormes difficultés dans la mobilisation de prêts à des conditions concessionnelles et de capitaux non générateurs d'endettement. Ainsi, en 1998, l'Afrique du Sud n'a drainé que 381 millions de dollars contre 1,7 milliards en 1997 et elle s'est trouvée supplantée par le Nigeria Cl,5 milliards de dollars). C'est dans ce contexte que le Président Thabo Mbeki annonce devant le Parlement la reprise de la croissance avec un taux de 6 % pour l'an 2000. La réalisation de cet objectif doit en principe passer par une reprise des flux d'investissements directs étrangers et un meilleur accès de l'industrie sud-africaine aux marchés extérieurs. Au vu de sa structure, le Plan MAP se présente comme un élément important du dispositif de relance de l'économie sud africaine et vient compléter les programmes d'incitation à l'investissement privé direct étranger (notamment les Spatial Development Initiatives) et les mesures d'ouverture du secteur industriel sur les marchés extérieurs. L'Afrique du Sud mobilise ainsi son espace vital de déploiement: l'Afrique et la Communauté de Développement de l'Afrique Australe (SADC). En définitive, à l'analyse, il apparaît que les deux Plans Oméga et MAP se complètent et poursuivent des objectifs généraux quasi identiques visant à réaliser une croissance durable et au taux le plus élevé possible. C'est au niveau des orientations, des démarches et des les instruments de réalisation qu'apparaissent des différences. Le PLOM est avant tout un plan de résorption des gaps au niveau des quatre secteurs prioritaires retenus. La mise en place d'une économie africaine compétitive commande l'amélioration de la quantité et de la qualité de toutes les infrastructures physiques de base, la valorisation du capital humain et l'accès aux NTIC, or l'épargne intérieure et les différentes ressources financières mobilisées sont insuffisantes pour combler le gap dans ces 54 Vile nOlll'elle l'ersioll dll dél'e/oppemeJlt illti!gre et COJlce/1é: le NEPAD dits secteurs prioritaires. Des investissements massifs sont alors désirés pour le financement des infrastructures et des différentes composantes du capital social. Après quoi, l'Afrique pourrait opérer une allocation plus optimale de ses ressources afin d'aborder plus favorablement la compétition internationale. Cette orientation n'est pas celle du Plan MAP dont le Chapitre traitant des priorités clefs comporte des éléments comme la paix, la sécurité et la gouvernance, la diversification de la production, l'accès aux marchés, les investissements dans les TIC, le développement des mécanismes de financement, la dette et les mouvements de capitaux. Ces éléments comportent des paramètres qui relèvent des préoccupations propres à la situation présente de l'économie sud africaine et de son besoin d'attirer les investissements directs étrangers et de s'insérer au marché mondial. La décision d'investissement est une décision macroéconomique qui peut être obstruée par des facteurs de politiques économiques comme les politiques de protection, le niveau des taux de change réel, les stratégies commerciales ou par des facteurs de risque politique comme l'instabilité, l'insécurité, l'absence de systèmes démocratiques, d'institutions judiciaires fiables. DI - La synthèse des deux plans pour une vision du développement à long terme de l'Mrique : de la nouvelle initiative africaine au NEPAD Au Sommet des Chefs d'État de l'OUA à Lusaka (juillet 2001), il avait été recommandé de fusionner les deux programmes. Cet exercice a été confié à un groupe d'experts désignés par les initiateurs des deux Plans, Le Groupe s'est réuni à Prétoria avec une forte délégation de la CEA et de l'OUA pour finaliser l'exercice de fusion des plans MAP et PLOM. Ce travail a abouti à la rédaction de la Nouvelle Initiative Africaine, officiellement adoptée comme la stratégie commune de développement de l'Afrique lors de la première réunion, le 23 octobre à Abuja, du Comité de mise en œuvre formé de 15 Chefs d'État dont les 5 initiateurs des deux projets. C'est en affinant le document, que le nom de Nouvelle Initiative Africaine (NIA) a été modifié pour devenir le New Partenarship for Africa Development (NEPAD). Au demeurant, la convergence des visions économiques et politiques qui sous-tendaient les deux Plans ont grandement facilité l'élaboration d'une initiative commune à partir d'une synthèse des idées maîtresses. L'exercice a été simple: d'un côté l'argumentaire du pourquoi un nouveau Plan pour l'Afrique est puisé du MAP servant de cadre référentiel général et permettant la définition des orientations et des objectifs; et de l'autre côté, le PLOM a offert l'architecture du Programme d'action, à partir des secteurs prioritaires, qui par les politiques de résorption des gaps relance la croissance économique (l'état des réponses). Ces deux piliers vont alors constituer l'ossature du nouveau 55 Le NEPAD: elljellx politiqlles, c'conOmÙjlleS et sectoriels partenariat avec le reste du monde et surtout les pays industrialisés sous le nom de Nouvelle Initiative Africaine (NIA), Le Schéma de synthèse des deux plans MAP et PLOM Version originelle MAI' 1- Introduction Il - La place de l'Afrique dans la Communauté mondiale - Appauvrissement historique d'un continent Structuration Nouvelle Initiative Africaine (NIA) Hà 17 à 1- Introduction Il - L'Afrique dans le temps du monde: entre 25 2H la pauvreté et la margin:llisation 26 à 39 là 11 (H à 39) & (51 à 61\) III - L'Afrique et la révol ution III - Une nouvelle volonté politique pour en mondiale soI1ir (97) IV - Le cas de l'Association 10 à 15 IV - InseI1ion du l'LOM comme: Mondiale - Programme d'actions prioritaires pour résor- Avantages stratégiques 51 à 55 ber les disparités stnlcturelles et rendre l'Afrique compétitive - Un nouveau contexte - la résorption de la di~parité infrastnlL1urelle (79) - la résorption de la disparité éducationnelle (HO) mondial - la résorption de la disparité de la santé (Hl) - la résorption des disparités de l'agriculture (H2) - les investissements dans les TIC CH3) - les effets attendus (H1) - le financement (H5) V - Priorités clés - la paix, la sécurité et la gouvernance - la diversification de la production et des producteurs - l'investissement dan~ les TIC - le développement des mécanismes de financement - le programme d'action - l'association avec les 1'1) et les institutions multilatérales VI - Conclusion 55 à 10'i V - L'impératif d'un nouveau partenariat pour la mise en œuvre (liO à 50) & (lOl à 1(1) 55-57 7H-H2 H2-H5 H6-% 97-100 100101 105-107 VI - Conclusion (lOS à 107) Dès les premières lignes, le NEPAD évalue la place de l'Afrique dans le système économique et financier mondial afin d'identifier correctement les problèmes à résoudre, Il est alors observé qu'en ce début du 3e millénaire, au moment où l'humanité possède d'appréciables moyens techniques et financiers jamais les inégalités n'ont été 56 Une llOl/1'elle l'ersioll du dél'eloppemem imè~re et concel1é: le NEPAD aussi criardes avec l'avènement en Afrique d'une pauvreté de masse. En effet, l'Afrique compte aujourd'hui un peu plus de 250 millions de pauvres, soit environ 45 % de sa population. Plus grave encore, la pauvreté est en sensible progression en raison d'une stagnation de la croissance des revenus (2,1 % sur la période 1991-1995). Durant la décennie 1990, l'Afrique est le seul continent qui s'est autant appauvri. La croissance, même si elle n'est pas suffisante est essentielle pour diminuer la pauvreté ne fût-ce que par l'amélioration soutenue des revenus des personnes. Sous ce rapport, certaines évaluations montrent que si le continent veut réduire de moitié la pauvreté à l'horizon 2015, il lui faudra réaliser un taux de croissance cible d'au moins 7 % sur une période d'au moins deux décennies. Cela nécessite des investissements de l'ordre de 35 à 40 % du PIE de chaque pays ce qui représente 65 milliards de dollars. Même en mobilisant le volume global de l'épargne intérieure, les excédents en devises, l'aide extérieure et les capacités d'endettement, le challenge est quasiment impossible. Il s'y ajoute que contrairement à d'autres régions notamment l'Asie et l'Amérique Latine, la production moyenne de l'Afrique, par habitant et en prix constants, à la fin des années 1990 était inférieure à ce qu'elle était il y a trente ans et que sa production industrielle comme sa part dans le commerce mondial ont reculé. Plus grave encore, le Continent est en passe d'être laissé à la marge de la révolution mondiale des technologies de l'information et de la communication. A l'analyse, les possibilités de résoudre cette situation des économies africaines existent. Le système mondial dispose, aujourd'hui, de moyens techniques et financiers énormes tandis que l'Afrique possède d'importants atouts dont son gigantesque potentiel de ressources naturelles inexploitées, ainsi que de réserves démographiques et culturelles porteuses de croissance. Ce qu'il faut alors ce sont des politiques économiques cohérentes et régionalisées en faveur d'un développement durable par l'intégration et dont les fondements pourraient être: - l'amélioration de la gouvernance qui stabilise les institutions et les fondamentaux du cadre macroéconomique; la gestion des conflits qui déstabilisent l'espace africain; -la mise en place d'un environnement incitatif pour les investissements dans les secteurs moteurs de la croissance qui accroissent à la fois la compétitivité et la diversification des économies; - la forte réduction de la dépendance du binôme aide et endettement. Les politiques économiques élaborées à partir de ces principes devraient permettre de vaincre tous les obstacles et handicaps à l'avènement d'une économie performante capable d'enclencher un processus soutenu de croissance et d'un système politique démocratique. Ces politiques constituent de nouvelles réponses pour 57 Le NEPAD.' el!iellX politiques, économiques et sectoriels sortir de la pauvreté par une croissance forte, durable et bénéficiant conséquemment à toutes les couches de la population. Cette configuration des objectifs du NEPAD est assez proche des" cercles de causalité cumulative pour l'Afrique" de la Banque mondiale. SECTION 2 : LE NEI'AD: UN A(a~NDA DE CHOISSANCE SOlJ'll~NUE l'OUH L'imAD]CATION DE LA l'AUVHET(~ ET LA HELANCE DES ENJEUX DU DI~VELOI'I'EMENT. Dès le préambule et pour la premlere fois, les dirigeants africains analysent avec lucidité l'état du continent et insistent sur l'urgence des solutions à mettre en œuvre de concert avec la communauté internationale. Désormais, envers leurs peuples et le reste du monde les plus hautes autorités politiques s'engagent à œuvrer ensemble pour la reconstruction du continent par la consolidation de la démocratie, la saine gestion des économies nationales et l'établissement avec les pays développés d'un partenariat fondé sur une coopération mutuellement favorable, des engagements communs et des accords contraignants. Les objectifs toujours réaffirmés graviteront autour de deux préoccupations majeures: élaborer une nouvelle stratégie de développement capable d'éradiquer ou de faire reculer, à l'horizon 2015, la pauvreté et intégrer le continent dans la mondialisation afin d'en tirer tous les avantages, surtout technologiques et financiers. L'ordonnancement des idées maîtresses du Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique tourne autour de trois éléments bien articulés: -les orientations et les objectifs tournés principalement vers l'éradication de la pauvreté; -le vaste programme d'action fondé sur des priorités sectorielles; - et les moyens de sa mise en œuvre et de sa réalisation. Cohérence et opérationnalité constituent les deux préoccu pations sous jacentes à l'ensemble du Programme. 1 - Les orientations pour une prise en mains par les Africains de leurs propres destinées et l'appel à l'extérieur pour compléter les efforts internes Il est affirmé avec insistance que la nouvelle initiative est «une promesse faite par des dirigeants africains fondée sur une vision économique et politique commune ainsi qu'une conviction ferme et partagée qu'il incombe d'urgence d'éradiquer la pauvreté, de placer 58 Ulle llO/n'elle l'ersioll du dél'eloppement intègre et collee/1é: le NEPAD leurs pays individuellement et collectivement sur la voie d'une croissance et d'un développement durables tout en participant activement à l'économie et à la vie politique mondiales. Ensuite, il est réaffirmé la détermination des africains de s'extirper eux-mêmes, ainsi que leur continent, du malaise du sous-développement et de l'exclusion d'une planète en cours de mondialisation ". En outre, l'engagement est pris d'éradiquer tous les maux dont souffre le continent comme la pauvreté et la détérioration de tous les indicateurs du développement humain. Sur tout le continent, les Africains devront désormais refuser d'être conditionnés par les circonstances. Et enfin, tout débouche sur la reconnaissance d'une double nécessité des peuples de prendre en mains leur propre destinée et celle de faire appel au reste du monde pour compléter les efforts internes. Des signes de progrès et d'espoir commencent déjà à apparaître avec l'élargissement des régimes démocratiques qui s'engagent à protéger les droits de l'homme, à axer le développement sur l'individu et à promouvoir des économies de marché. Apparaissent également des convictions nouvelles pour aller dans le sens de la bonne gouvernance et de la poursuite des réformes économiques et sociales. Tout cela montre unes volonté d'aller dans le sens de la bonne gouvernance en poursuivant les réformes économiques et institutionnelles indispensables. n - La gestion de la conflictuallté et la bonne gouvernance comme préalable pour la croissance Les facteurs extra-économiques comme les conflits inter-étatiques, les guerres civiles, les instabilités politiques, les violations des droits de l'homme accroissent les risques, les incertitudes et la confiance. Ces variables deviennent alors très déterminantes dans la décision d'investissement. Des recherches établissent qu'aujourd'hui les investissements publics comme privés sont contrariés par des problèmes liés au processus démocratique éprouvé, à la multiplication des guerres civiles, aux conflits ethniques, toutes choses qui font qu'il y a trop de risques et d'incertitudes pour l'afflux et la rentabilité des investissements. Dans ce contexte, la gestion de la paix et de la sécurité devient une impérieuse nécessité à la limite des préalables pour attirer les capitaux privés. Dès lors, si l'on veut redonner confiance aux investisseurs privés comme publics, il faut impérativement mettre en place des mécanismes de gestion d'un espace stable et sécurisé assis sur des piliers de bonne gouvernance. Sur le premier préalable concernant la gestion des conflits, le NEPAD note que. l'expérience a montré que la paix, la sécurité, la démocratie, une bonne gouvernance, le respect des droits de l'homme et une saine gestion économique, sont des préalables au développement durable. C'est pourquoi, les Chefs d'État s'engagent à promouvoir ces principes 59 Le NEPAD ; el1iellX politiques, économiques et sectoriels individuellement et collectivement, dans leur pays, leur région et sur le continent ". Deux déclarations assez expressives viennent confirmer ce nouvel engagement politique. Il s'agit d'abord celle du Président Thabo Mbeki qui a déclaré devant le Parlement Sud africain lors d'un débat sur le NEPAD le 31 octobre 2001 : « nous devons instaurer une culture des droits de l'homme, lutter contre la corruption et rendre compte de toutes nos actions" et ensuite celle du Président Olusegun Obajanso qui fait observer lors de la réunion du Comité de mise en œuvre du NEPAD à Abuja que· en Afrique contemporaine, la vieille accusation d'ingérence dans les affaires intérieures ne tient plus. Nous devons dialoguer davantage et organiser davantage des consultations les uns avec les autres sur les questions de paix, de sécurité, de démocratie, de droits de l'homme ". Pour bien appuyer ces nouvelles orientations, il a été crée à cette Conférence d'Abuja, un Sous-Comité spécial sur " la paix et la sécurité" présidé par l'Afrique du Sud et dans lequel siègent l'Algérie, le Gabon, le Mali et l'Ile Maurice. Sa mission est de prévenir et régler les conflits. Le second préalable est relatif à la bonne gouvernance politique comme économique qui fait l'unanimité de tous les acteurs publics et privés malgré la relative ambiguïté oui entoure le concept. Ce concept de bonne gouvernance est apparu il y a une dizaine d'années dans le domaine du développement. Il est utilisé pour la première fois, dans une étude de la Banque mondiale. Il s'agissait à l'époque, pour les promoteurs des Programmes d'Ajustement Structurel (PAS), de corriger l'approche" économiciste " de ces programmes et de mettre davantage l'accent sur l'importance de leur environnement normatif et institutionnel. Le concept a été par la suite affiné par de nombreuses institutions internationales et partenaires au développement (PNUD, Banque Mondiale, OCDE, BAD). Généralement, il désigne à la fois 3 éléments: la nature du régime politique, la capacité des pouvoirs publics à créer un cadre d'ordre et de stabilité, à formuler et à exécuter des politiques performantes et la construction d'un environnement propice au développement économique et social. Ainsi compris, la bonne gouvernance intègre toutes les dimensions de l'activité économique et les mécanismes d'allocation et de répartition des ressources. Elle recouvre deux volets importants: un volet politicoinstitutionnel, qui concerne avant tout l'État en tant qu'agent de régulation et un volet relatif à la gestion des ressources. Face à chute de l'espace politique, depuis une dizaine d'années, sous l'instigation des partenaires au développement et des institutions internationales, des efforts louables ont été entrepris en Afrique pour mettre en œuvre la bonne gouvernance politique. Ces efforts sont orientés vers plus de participation, de responsabilité, de décentralisation et de transparence. La gouvernance économique ne doit pas être en reste car l'environnement économique est révélatrice d'au moins quatre foyers de distorsions qui dissuadent les IDE : 60 Une nOl/l'elle l'ersiol1 dl/ dél'eloppement illfèMre et concerté,' le NEPAD - un environnement économique défavorable accompagné d'une forte inefficacité des politiques sectorielles et de la structure des incitations économiques; -la faible efficacité du capital humain imputable à la crise permanente des systèmes éducatifs et de formation; - la détérioration et l'inadéquation des infrastructures de base; - les coûts contrariants des facteurs techniques. La capacité de nuisance de ces facteurs justifie l'inscription de la gouvernance économique à l'ordre du jour des institutions internationales. Elle requiert de l'État et de tous les acteurs politiques, économiques et sociaux de la volonté, du temps et une stabilité institutionnelle somme toute des éléments indispensables pour créer progressivement un environnement de gestion économique et social cohérent, adapté, diversifié et prévisible. La gouvernance économique va alors consister à construire des systèmes, des procédures et des organisations capables de réguler dans la transparence et l'équité, la production et la redistribution des richesses économiques ainsi que les ressources nécessaires au développement de l'ensemble de la société à long terme. ru - Un programme prioritaire d'investissements dans des secteurs porteurs de croissance et particulièrement dans les infrastroctures, les ressources humaines et les TIC Il est un point sur lequel tout le monde s'accorde; il s'agit de hiérarchie des secteurs qui constituent de fait les leviers de croissance. Ces secteurs retenus sont au nombre de huit à savoir: - L'accès aux marchés mondiaux et la diversification de production. - Les infrastructures de base. - Les Nouvelles Technologies de l'Information et de Communication. - L'éducation. - La santé. - L'agriculture. - L'énergie. - L'environnement. la la la la En les agrégeant, on peut retrouver les deux foyers de l'accumulation: le capital physique et le capital social. Pour chaque secteur, le NEPAD estime que .. l'objectif est de combler l'écart actuel entre l'Afrique et les pays développés afin d'améliorer la compétitivité du continent et de permettre à l'Afrique de participer au processus de mondialisation ". Les préoccupations d'une réduction des gaps au 61 Le NEPAD : enjeux politiques, économiques et sectoriels niveau des différents secteurs sont fort justement réaffirmées. Cela appelle des investissements massifs qui ne peuvent être attendus principalement que du secteur privé. Ces IDE devraient placer les pays africains individuellement et collectivement sur les chantiers d'une croissance soutenue qui mettra alors un terme à la marginalisation de l'Afrique. C'est la croissance qui offrira les marges de manœuvre nécessaires pour réaliser les objectifs de réduction de la pauvreté et ceux annoncés dans la Déclaration du Millénaire des Nations-Unies. Les investissements devront porter principalement sur les secteurs clefs constitutifs du capital physique et du capital social comme les infrastructures qui doivent jouer un rôle entraînant par suite des insuffisances quantitatives et qualitatives constatées. L'infrastructure routière est faiblement développée sur le continent et la densité routière y est généralement très en deçà de celle des pays d'Asie et d'Amérique Latine. IV - Un double levier pour la mise en œuvre du programme: l'intégration et la mobilisation des populations Au niveau des moyens, la réalisation des objectifs du NEPAD commande aux dirigeants africains d'assumer ensemble un certain nombre de responsabilités consistant à : - consolider les mécanismes de prévention, de gestion et de résolution des conflits aux niveaux régional et continental et faire en sorte que ces mécanismes soient utilisés pour restaurer et maintenir la paix. - promouvoir et protéger la démocratie et les droits de l'homme dans leur pays et leur région en établissant des normes claires de responsabilité, de transparence et de démocratie directe au niveau local et national. - restaurer et maintenir la stabilité macro-économique en particulier en mettant au point des normes et des cibles appropriées en matière de politiques monétaires et budgétaires et en instaurant des cadres institutionnels adéquats pour en assurer la réalisation. - instaurer des cadres juridiques et réglementaires transparents à l'intention des marchés financiers, pour assurer l'audit des compagnies privées comme du secteur privé. - revitaliser et élargir la prestation des services d'enseignement, de formation technique et de santé en accordant une forte priorité à la lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et autres maladies contagieuses. - promouvoir le rôle des femmes dans le développement socioéconomique en renforçant leurs capacités dans les domaines de l'éducation et de la formation, en développant des activités 62 Vile 1101II'elle 1'ersion du dél'e!oppement illtèJ;re et cOllce11é: le NEPAD lucratives grâce à un accès plus facile au crédit et en assurant leur participation à la vie politique et économique du pays. - renforcer la capacité des États d'Afrique à instituer et faire respecter la législation et à maintenir l'ordre. - promouvoir le développement des infrastructures de l'agriculture et la diversification de celle-ci, orientée vers les agro-industries et les manufactures au service des marchés locaux comme de l'exportation. La réalisation de toutes ces mesures suppose leur appropriation par les peuples africains ainsi que leur mobilisation préalable. Ces peuples devraient alors reprendre confiance en leur génie et en leur capacité pour l'édification d'une Afrique renaissante. Il semble nécessaire pour ce faire de redéfinir les identités, les valeurs et les cultures afin de retrouver les courages perdus pour penser par nous-mêmes et abandonné le fatalisme non justifié. v - Le NEPAD face à la Communauté internationale ou l'exigence d'un nouveau partenariat pour le développement Ce Nouveau Partenariat a donné plus de visibilité aux problèmes du continent à l'ensemble de la communauté internationale qui a manifesté une très grande disponibilité pour contribuer positivement à sa réalisation notamment, au niveau du financement des secteurs clefs et plus particulièrement celui des infrastructures de base. Le G8, l'Union Européenne, les Institutions financières internationales et les principaux pays développés ont trouvé que l'Afrique dispose désormais d'un cadre pertinent et crédible de coopération et de concertation pour relever les défis du développement. Les dirigeants de l'Union Européenne, de la Belgique, de la France (Rencontre, le 8 février entre Treize Chefs d'État africains et le Président J. Chirac, qui a déclaré à cette occasion que .. l'aide décline de façon inacceptable et que l'écart se creuse avec le reste du monde, une approche nouvelle du développement de l'Afrique est entrain d'émerger qui suscite beaucoup d'espoirs,.) de Londres (tournée africaine en février du Premier Ministre Tony Blair accompagnée d'une déclaration du Gouvernement britannique favorable à une accélération de la coopération avec l'Afrique à travers le NEPAD) d'Ottawa et du Japon (Conférence internationale de Tokyo sur le développement de l'Afrique, le 3 décembre lors de laquelle, le Premier Ministre a clairement déclaré que" Le monde du XXl e siècle ne connaîtra la stabilité et la prospérité que si les problèmes de l'Afrique sont résolus) ainsi que les responsables de la Banque mondiale, du FMI et du PNUD ont eu des réactions positives. 63 Le NEPAD " el!ie1lX politiques, écollomiques et sectoriels Analysons de plus près deux attitudes de la communauté internationale vis-à-vis du NEPAD : celle du Gouvernement britannique et celle du G8. La déclaration du Gouvernement britannique lors de la tournée africaine du Premier Ministre Tony Blair (février 2001) reconnaît que les contraintes qui s'exercent sur la croissance dépendent de deux éléments, d'une part les gouvernements africains, et d'autre part les pays industrialisés. Le NEPAD est un excellent cadre de coopération dans lequel, les dirigeants africains s'engagent individuellement et collectivement à préserver la démocratie, à régler les conflits, à améliorer la gouvernance économique et politique, à se concentrer sur la réduction de la pauvreté et à créer les conditions propices à l'investissement et à la croissance. En retour, les pays industrialisés doivent apporter en relation avec le secteur privé les ressources indispensables pour financer les investissements dans les secteurs prioritaires notamment les infrastructures. Parallèlement, des prises de position claires sont prises en faveur d'un accès préférentiel aux marchés de l'Union européenne par levée des barrières tarifaires et non tarifaires ainsi que l'abandon des protections des secteurs agricoles. Le Gouvernement Britannique avance d'autres propositions extrêmement novatrices en recommandant que: -les pays de l'OCDE s'engagent sur un calendrier d'introduction d'un accès en franchise de droits consolidés et de quotas, accompagnés de règles d'origine souples dans le cas des importations africaines; -les pays de l'OCDE s'engagent dans le cadre des négociations de l'OMC, sur un échéancier rapide d'abandon des subventions à l'agriculture qui perturbent les marchés mondiaux; -les pays de l'OCDE et les pays africains devraient travailler ensemble afin que les règlements sanitaires et phytosanitaires ne créent pas de nouveaux obstacles au commerce; -l'investissement privé dans les infrastructures devrait être encouragé; -les pays de l'OCDE devraient apporter un soutien prolongé aux initiatives propres aux pays, qui mobilisent les communautés, et ce depuis la base jusqu'au niveau national et régional, dont le but est d'empêcher la propagation des maladies. Les différentes rencontres initiées par les membres fondateurs avec le G8 lors de ses réunions de Gêes (juin 2001) et Kananaskis (juin 2002) sont révélatrices de l'intérêt que les grandes puissances du monde manifestent au NEPAD considéré comme le cadre pouvant gouverner les rapports entre l'Afrique et le monde. Il est vrai que lors du dernier sommet du G8 aucun engagement financier important n'a été pris en dehors d'un milliard de dollars mobilisé dans le cadre de l'initiative d'allégement de la dette. Toutefois, les règles et les lignes directrices d'un plan d'action se mettent progressivement en place. Il s'agit comme l'a déclaré Tony Blair" d'aider l'Afrique à s'aider elle-même ". Cette 64 Ulle 1l001Id!e l'e/"Sioll du déldoppelnellf illtèRre et collce/1é: !e NEPAD nouvelle coopération sera davantage précisée lors du prochain Sommet en France en prélude à la rencontre, le Président J. Chirac estime" qu'il faut construire un partenariat d'un type nouveau qui ne sera ni complaisant ni rhétorique. Il sera généreux, précis et exigeant ". En conclusion: Tous les analystes conviennent que les taux de croissance actuels en Afrique ne sont pas assez élevés pour freiner les tendances à la baisse des écon'omies et pour réduire ou éradiquer une pauvreté rampante. Les pays isolés ne peuvent point atteindre ces objectifs, une trentaine d'expérience d'ajustement le prouve largement. L'intégration économique est la solution pour l'Afrique, principalement parce qu'elle permet, tout au moins aux économies du continent, d'être mieux présentes sur le marché mondial, de profiter des débouchés de proximité et d'offrir un meilleur cadre d'exploitation des avantages comparatifs, de mettre en commun les ressources pour l'investissement, d'élargir les marchés locaux et de mener un processus d'industrialisation efficace en exploitant les économies d'échelle et en tirant parti des possibilités d'intégration verticale transfrontalière et de partage de la production. En élargissant les marchés, en facilitant l'accès aux intrants et en accroissant le volume potentiel de production des entreprises, l'intégration contribuera à attirer les investissements directs étrangers (IDE) et à atténuer certains effets défavorables de l'environnement économique et monétaire international. Cependant, à l'heure de la globalisation inéluctable, l'objectif n'est plus, certainement pour un pays ou un groupe de pays, de rechercher une autonomie collective sur la base d'un modèle de substitution aux importations et un développement autarcique ou autocentré. Ces illusions sont balayées par les nouvelles perspectives offertes par l'intensification des échanges qui font que chaque pays cherche à tirer profit de la croissance tirée par les exportations. C'est pourquoi, depuis au moins une vingtaine d'années, les économistes tentent de déterminer les coûts et les avantages de la participation à une union économique et monétaire efficiente. Car ce n'est pas en additionnant des marchés étroits et mal constitués, souvent soumis à de multiples barrières qu'on aboutit inéluctablement à l'intégration et bénéficier de ses avantages. 11 y a toute une dynamique à enclencher dans un schéma organisationnel pertinent au double plan technique et institutionnel. C'est cette perspective d'une croissance accélérée au taux le plus élevé possible que tente d'ouvrir le NEPAD qui apparaît ainsi comme un Programme dont l'objectif majeur est l'établissement d'un nouvel ordre politique et économique continental. Dernière initiative pour le développement intégré en Afrique, il est normal et même salutaire que ses objectifs fassent l'objet de très vives controverses particulièrement 65 Le NEPAD.' enieux politiques, économiques et sectoriels au niveau des intellectuels et des États. Les questionnements sont justifiés par les résultats médiocres observés dans les processus d'intégration entamés depuis les années 60, à l'exception de l'UEMOA. En effet, les nombreuses organisations mises en place au cours de cette période ont connu ou connaissent des difficultés et des dysfonctionnements qui constituent des contraintes majeures à leur efficacité. A l'état actuel du débat, trois questions majeures sont soulevées dans le cadre de la mise en œuvre du NEPAD : son orientation que l'on taxe de néo-libérale, la faiblesse de son architecture et le caractère irréaliste des modalités de financement des secteurs prioritaires retenus. Au préalable, il faut rappeler, et tous les développements le montrent largement, que le NEPAD n'est pas un programme de politique économique entendue comme une combinaison d'un ensemble de moyens pour atteindre dans un délai déterminé des objectifs initialement fixés. Il est plus simplement un plan d'action qui vise à décharger les États de la réalisation des investissements qui portent essentiellement sur les secteurs clefs générateurs d'externalités positives pour les économies nationales. En d'autres termes, chaque pays doit se conditionner pour en tirer avantage en accélérant les réformes politiques, économiques, sociales et institutionnelles avec de nouvelles règles de bonne gouvernance, de gestion publique transparente et de lutte contre la corruption. Aujourd'hui, si les analystes ne semblent pas imputer totalement la stagnation économique des pays africains aux seuls programmes d'ajustement structurel, cependant, beaucoup d'entre eux soulignent qu'en accordant une prépondérance quasi absolue aux mesures de stabilisation à court terme, au lieu de s'attaquer aux problèmes structurels fondamentaux, ces programmes ont en fait amené les économies africaines à s'écarter de la voie d'une croissance durable. L'analyse de la stratégie de développement à long terme montre qu'il est vital de trouver des solutions pour remédier à l'insuffisance des infrastructures de base et des ressources humaines. Ce sont ces faiblesses relatives que devrait combler le NEPAD. En ce sens, il offre des opportunités aux États en leur permettant de venir à bout des obstacles et handicaps à l'instauration d'un système politique démocratique et d'une économie nationale performante capable d'enclencher un processus de croissance soutenue qui rend possible tous les arbitrages en faveur du bien-être des populations. Il appartient aux États d'élaborer conséquemment des politiques économiques, financières et sociales pour moderniser leur agriculture, développer leurs bases industrielles, réduire la pauvreté par un plus grand accès aux services de base, élargir leurs infrastructures sociales, accroître l'emploi, maîtriser les Technologies de l'Information et de la Communication afin de les mettre au service du développement, de comprimer les dépenses publiques. Au demeurant, les États disposeront désormais de moyens plus adéquats pour réaliser certaines missions 66 Ulle 1100U'elle l'ersion du dél'e/oppemellt intè;;re et conce/1é: le NEPAD comme l'allégement des impôts et des charges qui pèsent sur les personnes physiques et morales, le financement de la création d'entreprises et des initiatives locales qui fondent la richesse d'un pays, la réforme des systèmes éducatifs et de formation afin de mieux les adapter aux exigences de l'entrée des jeunes dans la vie active, la santé et la nutrition et la sécurité. En réponse aux objections, on peut dire en premier lieu que l'infrastructure théorique du NEPAD s'apparente plus au keynesianisme et aux théories contemporaines de la croissance endogène que de la pensée néo-libérale. C'est Keynes qui a mis en évidence le rôle stratégique de l'investissement dans la relance des activités productives, alors que les théoriciens de la croissance endogène mettent l'accent sur le primat de l'accumulation du capital physique et du capital humain dans le processus de croissance. C'est dire que ce programme impose aux États de nouvelles tâches si bien qu'au lieu de s'affaiblir, ces États devraient au contraire se renforcer. Donc, c'est un mauvais procès de voir derrière ce nouveau programme une sorte de main invisible du néo-libéralisme ambiant. En second lieu, concernant l'architecture, tous les développements qui précèdent montrent que le NEPAD n'est pas une juxtaposition d'engagements ou de vœux pieux émis par des chefs d'État africains mais il est une construction à la fois pertinente, cohérente et opérationnelle. Les enchaînements et les synergies ne sont pas toujours bien perçus. Pourtant, les idées directrices s'articulent parfaitement en ce que premièrement la gestion des conflits et l'amélioration de la gouvernance stabilisent et sécurisent les institutions et les fondamentaux du cadre macroéconomique, deuxièmement les investissements dans les secteurs constitutifs du capital physique et du capital social accroissent la productivité, améliorent la compétitivité et diversifient des économies et troisièmement la forte réduction dans le financement du binôme aide et endettement oblige à la recherche et à la mobilisation de ressources plus qualitatives pour financer les projets de dimension régionale. En troisième lieu, l'énorme déficit d'épargne fait que le financement du Programme d'action prioritaire soulève beaucoup d'interrogations. Cela est dans l'ordre normal des choses car, tous les Programmes et Plans élaborés pour le continent ont toujours buté sur un problème essentiel: les moyens financiers et non financiers exigés pour leur réalisation. Aujourd'hui, le système mondial dispose des moyens techniques et financiers appréciables tandis que l'Afrique possède d'importants atouts à travers son énorme potentiel de ressources naturelles et environnementales inexploitées, ses réserves démographiques et culturelles importantes. C'est dire que les solutions existent à condition d'élaborer des stratégies novatrices de partenariat pour la mobilisation de l'épargne interne et externe. C'est un objectif cardinal du NEPAD. 67 Le NEPAD : enjeux politiques, économiques et sectoriels En définitive, tout processus d'intégration profite avant tout aux États qui présentent des politiques économiques et financières performantes capables de les doter de structures productives souples. En revanche, le développement intégré n'apportera rien aux États ayant des politiques peu flexibles qui ne peuvent tirer avantage des économies d'échelle et des débouchés de proximité. La nouvelle configuration de la régionalisation-mondialisation montre que le processus d'intégration pour réussir appelle un leadership fort mettant en cohérence l'espace polarisé à partir d'une économie «locomotive.. ou d'un pouvoir «hégémonique .. qui exploite les complémentarités internes. Comme quoi, il doit toujours y avoir un pilote dans l'avion. 68 Infrastructure et développement dans le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique par TounaMama Do~'en de la Faculté des sciences économiques et de gestion de l'Unil'ersifé de Yaoundé II - Cameroun INTRODUCTION: LE NEPAD, UN NOlNEAU PIAN DE IAGOS Après les deux premières décennies du développement 0960 et 1970) du Programme des Nations-Unies qui ont entretenu un optimisme relatif sur les possibilités de développement du Tiers-Monde en général et de l'Afrique en particulier, et la troisième décennie du développement qualifiée de perdue qui a alimenté un courant pessimiste sur les possibilités de développement du continent noir encore appelé afro-pessimisme (décennie 1980), on assiste aujourd'hui, dans cette période que certains qualifient de post-ajustement après le passage de la plupart des pays en développement sous les fourches caudines des Institutions de Bretton-Woods au moyen des programmes d'ajustement structurel, à un regain d'optimisme sur l'avenir du développement africain. C'est ce que traduit, notamment, le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (NOPADA), plus connu sous le sigle de ses initiales en anglais NEPAD (The New Partnership for Africa's Development). Par la Déclaration de Monrovia de juillet 1979, sur • les principes directeurs à respecter et les mesures à prendre pour réaliser l'autosuffisance nationale et collective dans le domaine économique et social, en vue de l'instauration d'un nouvel ordre économique international .., les chefs d'États et de gouvernement de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) s'engageaient, au nom de leurs gouvernements et de leurs peuples, • à promouvoir le développement économique et social, et l'intégration de leurs économies en vue d'accroître l'autodépendance et favoriser un développement endogène et auto-entretenu .. : 69 Le NEPAD : el~ie/lx politiques, économiques et sectoriels - pour faciliter et renforcer leurs rapports sociaux et économiques; - pour l'édification aux niveaux national, sous-régional et régional d'une économie africaine dynamique et interdépendante; - pour l'établissement, chaque année, de programmes spécifiques pour matérialiser cette coopération économique sous-régionale, régionale et continentale. La mise en œuvre de cette Déclaration a été décidée en avril 1980 au cours d'une session de l'OUA à Lagos, la première consacrée aux problèmes économiques du continent. Ce plan d'action embrassait des domaines aussi variés que: - l'agriculture et l'alimentation dont le plan de développement avait été approuvé à Arusha et à Monrovia; -l'industrialisation du continent par la poursuite d'objectifs à long, moyen et court terme, visant à atteindre en l'an 2000 au moins 2 % de la production industrielle du monde, conformément aux objectifs de la conférence de l'ONUDI de Lima; -l'exercice de la souveraineté totale des pays africains sur les ressources naturelles, en s'appuyant sur la formation des hommes capables de maîtriser les technologies appropriées; -le développement et l'utilisation rationnels des ressources humaines nécessaires à ce plan d'action; -la mise de la science et de la technologie au service du développement du continent aux niveaux national, sous-régional et régional; -l'adoption et la mise en œuvre d'une stratégie générale en matière de transports et de communications; -la promotion et l'intensification des échanges commerciaux et financiers sur le plan national inter-africain. Le plan d'action de Lagos, comme on le voit, était un plan trop ambitieux par ses objectifs, qui ont suscité beaucoup d'espoirs, espoirs qui se sont malheureusement évanouis devant l'absence de moyens pour le mettre en œuvre. Mal vu par la communauté international, ce plan a été remplacé pratiquement par un contre-plan de la Banque mondiale en 1981 ayant pour titre le développement accéléré en Afrique au sud du Sahara: programme indicatif d'action, plus connu sous l'appellation de Plan Berg, du nom de son principal rédacteur. Comme le plan de Lagos, le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique apparaît comme une « promesse faite par des dirigeants africains, fondée sur une vision commune ainsi qu'une conviction ferme et partagée qu'il leur incombe d'urgence d'éradiquer la pauvreté, de placer leurs pays, individuellement et collectivement, sur la voie d'une croissance et d'un développement durables ". Mais à la différence du plan de Lagos qui voulait favoriser le développement endogène et auto-entretenu, le NEPAD invite les pays africains à 70 !I?/iy<st17lctttre et dél'l!!oppemellf pottr le dél'i!/oppemellt de IAfrique " participer activement à l'économie et à la vie politique mondiale. Il est ancré dans la détermination des Africains de s'extirper eux-mêmes, ainsi que leur continent, du malaise du sous-développement et de l'exclusion d'une planète en cours de mondialisation ... Le NEPAD peut-il réussir là où le plan d'action de Lagos, pour ne pas parler d'autres initiatives de même type, a échoué? Il semble que oui, grâce à une nouvelle volonté politique des dirigeants africains métamorphosés par une démocratisation irréversible. Grâce aussi à la Communauté internationale qui semble être plus disposée à prêter une oreille attentive aux plaintes qui fusent tous azimuts pour renverser la tendance à la marginalisation de l'Afrique et se mettre aux côtés des Africains pour lutter efficacement contre le sous-développement et enrayer la pauvreté comme le témoigne, notamment, la Déclaration du millénaire des Nations-Unies de septembre 2000. Le Programme d'action est axé sur sept secteurs jugés prioritaires: 1. infrastructures ; 2. ressources humaines; 3. santé; 4. technologies de l'information et de la communication; 5. agriculture; 6. énergie; 7. accès des exportations africaines aux marchés des pays développés. Notre contribution est consacrée essentiellement au rôle de l'infrastructure dans le développement. Quelle est la place que le NEPAD réserve à l'infrastructure dans sa vision stratégique? Quel rôle le développement de l'infrastructure peut jouer dans le développement de l'Afrique? 1. LA PI.ACE DES INFRASTRUCTURES DANS LE DISPOSITIF DU NEPAD On peut dire que les infrastructures occupent, la premlere place dans le dispositif de NEPAD. En tout cas, elles sont la première priorité sectorielle parmi les sept retenue. Le NEPAD entend combler l'écart qui sépare dans ce domaine l'Afrique et les régions développées du monde. S'il s'agit de développer tous les secteurs des infrastructures (routes et autoroutes, ports, ports maritimes, chemins de fer, voies navigables et télécommunications), le NEPAD entend entreprendre des actions spécifiques pour combler l'écart numérique, et rationaliser l'action dans les secteurs de l'énergie, des transports et de l'eau. 71 Le NEPAD : enjeux poliliql/l's. économiques el Sl'cloriels 1) Dans le secteur des infrastructures a) Les objectifs sont: - améliorer l'accès aux infrastructures et les rendre plus abordables à la fois pour les entreprises et pour les ménages; - améliorer la coopération et le commerce au niveau régional grâce à de meilleures connexions transfrontalières en infrastructures; - accroître les investissements consacrés aux infrastructures en réduisant les risques auxquels les investissements privés doivent faire face, en particulier en matière de politiques et de réglementation, édifier des bases de compétences adéquates en technologie et en ingénierie pour installer, exploiter et entretenir en Afrique des réseaux d'infrastructures" en dur". b) Les actions à entreprendre sont: - avec l'assistance des institutions spécialisées dans chaque secteur, mettre en place des cadres politiques et législatifs pour encourager la concurrence. Dans le même temps, créer de nouveaux cadres de réglementation et consolider la capacité de formation de personnes responsables de la réglementation afin de promouvoir l'harmonisation des politiques et des réglementations pour faciliter les connexions transfrontalières et l'élargissement du marché; - accroître les investissements consacrés aux infrastructures, en particulier pour leur rénovation, et améliorer les pratiques d'entretien qui assureront la viabilité des réseaux d'infrastructures; - commencer à développer des institutions de formation et des réseaux pour encourager la formation des techniciens et d'ingénieurs de haut niveau dans les secteurs des infrastructures; - promouvoir la participation des communautés et des utilisateurs à la construction, l'entretien et la gestion des infrastructures, en particulier dans les régions urbaines et rurales pauvres, en collaboration avec les initiatives de gouvernance du NEPAD ; - collaborer avec la Banque africaine de développement et d'autres institutions africaines de financement du développement pour mobiliser un financement durable, en particulier au moyen de processus multilatéraux et des institutions et gouvernements donateurs, afin d'obtenir des dons et des fonds consentis à des conditions de faveur, pour atténuer les risques à moyen terme; - promouvoir des partenariats entre les secteurs public et privé qui serviront de véhicule pour attirer les investisseurs privés et concentrer le financement public sur les besoins urgents des pauvres, en consolidant les ca pacités de mise en œuvre et de contrôle des accords de ce type. Outre ces aspects communs, des stratégies spéCifiques à chaque secteur pour les différents types d'infrastructures ont été envisagées. 72 In/rastructure et dél'eloppement pour le délieloppemellt de l'Aji-iqlle 2) Combler l'écart numérique en investissant dans les technologies de l'information et de la communication a) Les objectifs : - doubler la densité des lignes téléphoniques pour parvenir à deux lignes pour 100 personnes d'ici l'an 2005, avec un niveau d'accès adéquat pour les ménages; - diminuer le coût et améliorer la fiabilité des services; - préparer tous les pays d'Afrique à utiliser les communications électroniques; - constituer une pépinière de jeunes et d'étudiants compétents dans le domaine de l'informatique et de la télématique pour en tirer des ingénieurs stagiaires en informatique et télématique, des programmeurs et des créateurs de logiciels; - mettre au point des logiciels à contenu local en particulier sur l'héritage culturel de l'Afrique. b) Les actions à entreprendre sont: - collaborer avec les institutions régionales comme l'Union panafricaine des télécommunications (UPAT) et Africa Connection pour concevoir une politique et une législation modèle pour la réforme des télécommunications, ainsi que des protocoles et des références permettant d'évaluer la préparation à l'utilisation des communications électroniques; - collaborer avec les institutions régionales pour consolider les capacités de réglementation mettre sur pied un réseau d'institutions de formation et de recherche pour consolider la base de compétences de haut niveau ; - promouvoir et accélérer les projets existants visant à connecter les écoles et les clubs de jeunes; - collaborer avec les institutions de financement du développement en Afrique, les initiatives multilatérales (GS, DotForce, Équipe spéciale des Nations-Unies) et les bailleurs de fonds bilatéraux pour mettre sur pied des mécanismes visant à atténuer et à réduire les risques dans ce secteur. 3) Énergie La recherche de sources suffisantes et abordables d'énergie doit être axée sur la rationalisation de la distribution territoriale des ressources existantes mais inégalement réparties et l'impératif de tout mettre en œuvre pour développer les abondantes ressources d'énergie solaire du continent. 73 Le NEPAD : e/~ie/lx politiques, économiques et sectoriels a) Les objectifs ; - accroître l'accès à un approvisionnement commercial en énergie, fiable et abordable, de 10 à 35 % ou plus de la population d'Afrique en 20 ans; - améliorer la fiabilité et réduire le coût de l'approvisionnement en énergie pour les activités de production afin de permettre une croissance économique de 6 % par an ; - renverser la tendance de dégradation de l'environnement associée à l'utilisation des combustibles traditionnels dans les régions rurales; - intégrer les réseaux de transport d'énergie électrique et les gazoducs pour faciliter les flux transfrontaliers d'énergie; - réformer et harmoniser les réglementations et la législation du continent sur le pétrole. b) Les actions à entreprendre sont; - établir un Forum africain pour la réglementation des entreprises d'utilité publique et des associations régionales de réglementation; - mettre sur pied une équipe spéciale qui aura pour tâche de recommander des priorités et des stratégies de mise en œuvre pour les projets régionaux, y compris la génération d'énergie hydroélectrique, les réseaux de transport d'énergie électrique et les gazoducs; - mettre sur pied une équipe spéciale pour accélérer le développement de l'approvisionnement en énergie pour les logements des groupes sociaux à faibles revenus; - Élargir la portée du programme de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC) pour la conservation de l'énergie de la biomasse au reste du continent. 4) Transports : a) Les objectifs - Réduire les délais de la circulation transfrontalière des personnes, des biens et des services; - Réduire l'attente et les temps morts dans les ports; - Promouvoir l'activité économique et le commerce transfrontalier des marchandises sur la base de meilleurs liens de transport terrestre; - Accroître les liaisons de transport aérien des passagers et du fret entre les sous-régions d'Afrique. b) Les actions à entreprendre sont - mettre sur pied des équipes spéciales dans le domaine des douanes et de l'immigration afin d'harmoniser les passages de 74 Illfrastructure et clél'eloppemellt pOlir le clél'eloppemellt cie l'Afrique frontières et les procédures de délivrance des visas; - mettre en place et favoriser des partenariats entre les secteurs public et privé pour l'octroi de concessions pour la construction, l'aménagement et l'entretien des ports, des réseaux routiers, des réseaux ferroviaires et de transport maritime; - promouvoir l'harmonisation des normes et des réglementations selon les modes transport et l'utilisation accrue de services de transport multimodal ; - collaborer avec les organisations régionales pour mettre en place des couloirs de développement du transport ; - promouvoir des partenariats entre les secteurs public et privé pour la rationalisation de l'industrie du transport aérien et le renforcement des capacités dans le domaine du contrôle du trafic aérien. 5) Eau et assainissement a) Les objectifs: - assurer un accès durable à un approvisionnement en eau pure et potable et à un assainissement adéquats, particulièrement pour les pauvres; - planifier et gérer les ressources en eau pour en faire la base de la coopération et du développement aux niveaux national et régional; - examiner systématiquement et préserver les écosystèmes, la diversité biologique et la faune; - assurer la coopération sur les fleuves que se partagent plusieurs États membres; - aborder la menace du changement climatique de façon efficace ; - accroître l'agriculture irriguée et pluviale pour améliorer la production et la sécurité alimentaire. b) Les actions à entreprendre sont : - accélérer les travaux des projets sur les ressources en eau à objectifs multiples, comme par exemple l'étude du Secrétariat de la SADC de l'exploitation du fleuve Congo et l'initiative du Bassin du Nil ; - mettre sur pied une équipe spéciale pour planifier les effets néfastes de lïmpact du changement climatique sur l'Afrique; - s'associer à l'initiative mondiale pour l'assainissement de l'environnement afin de promouvoir des méthodes et des projets sanitaires d'élimination des déchets; - appuyer le Programme Habitat des Nations unies sur la conservation des ressources en eau dans les villes africaines. 75 Le NEPAD: el1;ellX politiques, écol/omiqlles et sectoriels II. I.E R()Ll~ DES INFRASTHLJCTLJRES DANS LI' D(:VEI.OI'I'EMENT DU CONTINENT Dans son Rapport sur le développement dans le monde de 1994, la Banque mondiale examine le lien entre infrastructures et développement et s'interroge sur les différents moyens que les pays en développement pourraient mettre en œuvre pour améliorer la fourniture et la qualité des services d'infrastructure'. D'après ce rapport, " les services dont la prestation repose sur l'utilisation de l'infrastructure apportent au PIB une contribution (en valeur ajoutée) de l'ordre de 7 à Il %. A lui seul, le secteur des transports représente de 5 à 8 % du total des emplois salariés. D'un échantillon de vingt pays en développement, il ressort que l'infrastructure entre pour 20 % environ de l'investissement total et pour 40 à 60 % dans l'investissement public (même si) ces pourcentages ne rendent pas pleinement compte de l'importance sociale et économique de l'infrastructure dont le degré de développement a une forte incidence sur la croissance, l'efficacité de la lutte contre la pauvreté et la viabilité écologique du développement. ,,2 Nous nous contenterons d'indiquer brièvement le rôle des infrastructures dans la croissance économique d'une part et leurs rôle dans la lutte contre la pauvreté d'autre part. II.1. Infrastructure et croissance économique Les tableaux d'échanges interindustriels des pays développés comme les États-Unis ou le Japon montrent que les télécommunications, l'électricité et l'eau interviennent comme intrants dans la production de la quasi-totalité des secteurs, et que les transports interviennent comme intrants dans la production de tous les biens. Les usagers ne sont pas seulement des consommateurs directs de services d'infrastructure, ils comptent aussi sur ces services pour accroître leur productivité, par exemple, en économisant leur temps et leur peine pour s'approvisionner en eau salubre, transporter les produits agricoles au marché ou simplement se rendre à leur lieu de travail. Pour apprécier les effets de l'infrastructure sur la croissance économique, on est souvent amené à évaluer le rendement des investissements d'infrastructure. 1. Banque Mondiale, Rappol1 sllr le dél'(!/oppemell/ dans le momie 1994: tille ù!/i-as/rucfllre pour le dél'eloppemel1/, Washington, D.C. 2. Banque Mondiale, op. cil., pp. 13-14. 76 Infrastructure et dél!eloppelllent pOlir le déldoppeme1lf de l'AfrilJlIe Le tableau 1 donne une vue synoptique des résultats de diverses études sur la productivité de l'infrastructure. Si ces résultats, qui montrent que les investissements d'infrastructure peuvent avoir des taux de rentabilité pouvant atteindre voire dépasser 60 %, peuvent apparaître comme surestimant le rendement des investissements d'infrastructures, ne fût-ce que parce que la relation entre les investissements d'infrastructure et la croissance n'est pas univoque mais en réalité bi-univoque en ce sens que les investissements d'infrastructure stimulent la croissance et que la croissance stimule à son tour les investissements d'infrastructures, nul ne peut nier la forte corrélation positive entre le degré de développement de l'infrastructure et la croissance des pays en développement en général et de l'Afrique en particulier. D'ailleurs, des études sectorielles qui ont été réalisées dans un certain nombre de pays en développement sur l'incidence du degré de développement de l'infrastructure des régions rurales sur l'économie de ces régions permettent de mieux cerner les effets bénéfiques qui résultent des investissements d'infrastructure. C'est ainsi qu'un groupe de chercheurs qui a étudié des séries chronologiques portant sur 85 districts en Inde, a pu montrer que la réduction des coûts de transport accroît le potentiel de commercialisation de la production agricole et entraîne une forte expansion de l'agriculture, et que le recours aux méthodes modernes d'irrigation accroît les rendements agricoles. D'autre part, l'amélioration des communications (transports routiers, notamment) réduit les frais généraux des banques, qui peuvent ainsi développer leurs activités de crédit agricole; crédit permettant aux agriculteurs d'acheter des engrais, ce qui contribue aussi à augmenter les rendements. En tout état de cause, il existe une forte corrélation entre la présence de certains éléments d'infrastructure - réseaux de télécommunications, réseaux de distribution d'électricité, routes revêtues, réseaux de distribution d'eau salubre - et le PIB par habitant. Cependant, bien qu'elles donnent à penser que le développement de l'infrastructure peut fortement contribuer à la croissance économique, les corrélations observées ne fournissent pas une base suffisante pour déterminer le niveau optimal des investissements d'infrastructure ou leur répartition optimale entre secteurs. De plus, il y a des études qui montrent que les investissements ne sont pas nécessairement, à eux seuls, un facteur de croissance et que les rendements desdits investissements ne sont pas plus élevés que ceux des investissements privés. 77 Le NEPAD: el~iellX politiqlles, économiqlles et sectoriels Tableau 1. Résultats de diverses études sur la productivité de l'infrastructure. Échantillon Auteur/année Eléments d' infrastructure Élasticité" Taux de Rentabilité Implicite" États-Unis 0,39 60 Aschauer, 1989 Équipements publics à usage non militaire États-Unis 0,34 60 Munnell, 1990 Équipements publics à usage non militaire ° Holtz - Eakin, 1992 Équipements publics Duffy - Deno et Eberts, 1991 Équipements publics -- ~. ---- États-Unis États États-Unis, Régions métropolitaines 48 5 ° 0,08 1 -- Japon, diverses régions 0,02 96 Mera, 1973 Infrastructure industrielle France, diverses régions I-:--c--Taiwan, Chine 0,08 12 Prud'homme, 1993 Équipements publics 0,24 77 Corée 0,19 51 Israël 0,31 - 0,44 54·70 Uchimura et Gao, 1993 Uchimura et Gao, 1993 Bregman et Marom, 1993 Shah, 1988, 1992 -Mexique - - 0,05 0,07 P'JYs de l'OCDE 0,07 P'JYs en développement Pays de l'OCDE 0,01 - 0,16 et pays en développement _. 0,16 Pays en développement f---- Transports, eau et communications Transports, eau et communications Transports, électricité, eau et assainissement Transports, électricité, eau et communications Canning et Fay, 1993 Transports Canning et Fay, 1993 Transports -- 5·7 19 95 -- ------l 63 _._---- Baffes et Shah, 1993 Capital d'infrastructure Easterly et Rebelo, 1993 Transports et communication a. Mouvement en rourcentage du volume ues prest~lion.~ rollr une varicltion ue 1 'y;, uu niveau d·équirellll'nt. h. 1larrort elltre la valeur actualisée ue l'augmenLation dl' la variahle cl0renuante et la valeur :lCtualisée des équirell11'nts d'infrastructure. SOllrce: Banqué' Mondiale, op. cit., p.15 On peut donc dire, pour conclure ce point, que: 1. les investissements d'infrastructure sont une condition nécessaire à la croissance, mais ils n'en sont pas la condition suffisante; 78 lI?/i'{/strllctllre et dél'eloppelllel1t pOlir le dél'eloppelllellf de l'Aji-iqlle 2. lïncidence de ces investissements sur la croissance dépend du lieu où sont implantés les nouveaux équipements et de l'échelonnement des implantations, aussi bien que des déséquilibres qui existent au départ entre l'offre et la demande; 3. l'existence d'une infrastructure suffisamment développée et fiable détermine dans une large mesure l'aptitude d'un pays à soutenir la concurrence sur les marchés internationaux, même pour les produits de base traditionnels. On sait, par exemple, qu'en raison notamment de problèmes d'infrastructure, les frais de transport entre l'Afrique et l'Europe sont supérieurs de 30 % pour le contreplaqué à ce qu'ils sont entre l'Asie et l'Europe dont la distance est plus grande; 4. l'aptitude d'un pays à s'implanter sur de nouveaux marchés d'exportation dépend tout particulièrement de la qualité de son infrastructure. On peut rappeler à cet égard que la mondialisation croissante du commerce international observée au cours des deux dernières décennies tient non seulement à la libéralisation de leur politique commerciale par de nombreux pays mais aussi à des progrès décisifs qui ont été faits dans la technologie des communications, des transports et de l'entreposage. Ces progrès se sont surtout manifestés au niveau de la logistique (combinaison des fonctions d'achat, de production et de commercialisation) et ont permis de réduire les coûts grâce à une meilleure gestion des stocks et des fonds de roulement, et aussi de répondre plus rapidement à la demande des consommateurs de plus en plus exigeants qui veulent des livraisons" juste à temps .. ; 5. des enquêtes sur les perspectives d'investissements étrangers dans un vaste échantillon de pays montrent que, pour ces investissemcnts étrangers qui sont, comme on le sait, le moteur de la mondialisation de la production, la qualité de l'infrastructure est un élément important du choix des implantations. Les investissements directs étrangers ne s'empresseront donc pas de prendre le chemin de l'Afrique si par exemple la télématique (les échanges de données électroniques) qui exige une bonne infrastmcture des télécommunications est balbutiante au-delà d'une électrification encore incertaine. II.2. Infrastructure et pauvreté Pour montrer comment le développement de l'infrastmcture peut contribuer à la lutte contre la pauvreté, il suffit de faire remarquer que les taux de desserte par les services d'infrastructure essentiels sont parmi les principaux indicateurs du bien-être d'une population. C'est d'aillcurs pourquoi on peut ranger parmi la population la plus pauvre les individus dont l'approvisionnement en eau salubre est inférieur au 79 Le NEl'AD : eJ!iellx politiques, écol/ol1lirjlles et sectoriels strict minimum, qui doivent vivre dans un environnement malsain et n'ont guère la possibilité de se déplacer hors du périmètre de la collectivité où ils vivent ou de communiquer avec l'extérieur. De ce fait, ils ont davantage de problèmes de santé et moins de chances de trouver du travail. CONCLUSION Pour conclure, l'on peut dire que le développement de l'infrastructure peut jouer un rôle décisif dans le développement du continent africain dans la perspective du NEPAD, compte tenu de l'important retard que le continent enregistre dans ce domaine comme dans beaucoup d'autres, Un grand effort d'investissement et d'expansion s'impose en effet dans les différents types d'infrastructure de façon à ce que les services mis en lace touchent un plus grand nombre de personnes, en particulier les populations des zones rurales et les pauvres des bidonvilles. Mais il faut que l'aspect quantitatif de l'investissement ne soit pas la préoccupation exclusive des pouvoirs publics. Il est également primordial d'améliorer la qualité des services d'infrastructure. On peut rappeler, à cet égard, qu'une faible efficacité de l'exploitation, un entretien insuffisant et une inattention aux besoins des usagers sont des facteurs parmi d'autres qui ont contribué à réduire, dans le passé, l'impact des investissements d'infrastructure sur le développement en Afrique. Si rien n'est fait pour pallier ces maux, la simple augmentation quantitative des infrastnlctures ne suffira pas pour permettre à l'Afrique de répondre aux exigences d'une urbanisation ra pide et de devenir compétitive sur le plan international. ÉLÉMENTS DE BIBUOGRAPHIE Banque Mondiale (994), Rapport sur le dél'eloppemellt dans le monde: une Ï1!frastntctllre pOlir le Dél'eloppement, Washington D.C. Club de Rome (1987), L'Afrique.face à ses priorités, Paris, Economica. Nouveau Partenariat pour le Développement de J'Afrique (NOPADA), Abuja, octobre 2001. 80 Système financier et développement en zone franc africaine : quels enjeux pour le troisième millénaire? par Albert Ondo Ossa A,gn',gé des Facultés des sciences économiques et dl.' ,gestion Preifessellr Titulaire INTRODUCTION Le système financier conditionne le fonctionnement et l'évolution des économies marchandes, car on ne peut objectivement pas concevoir une croissance et partant un développement économique sans une utilisation optimale des moyens de financement disponibles. En fait, tout problème de financement se ramène globalement à un problème de mobilisation des ressources et d'incitation à investir. Ce qui sous-entend la mise en œuvre d'une stratégie en vue de cerner la capacité financière d'une économie, autrement dit les ressources saines susceptibles de financer son développement. Les problèmes de financement se posent aujourd'hui aux économies en développement avec d'autant plus d'acuité qu'il s'agit avant tout pour elles de trouver une meilleure jonction entre leurs besoins de financement toujours en croissance et leurs capacités de financement jusque-là modestes. En effet, face à des besoins de financement très élevés (jnfrastmcture de transport, écoles, hôpitaux) et à un besoin pressant d'industries, l'épargne disponible, du reste partiellement mobilisée, apparaît dérisoire. On pourrait dès lors penser que le problème se pose simplement en terme de choix des modes de financements, autrement dit des liaisons à promouvoir entre offreurs et demandeurs de liquidité. Mais force est de constater que ce choix n'est pas toujours possible, non seulement à cause du nombre limité des sources de financement mais également en raison des conditions de financement peu commodes. Et c'est pour cela que l'analyse du système financier s'impose résolument. Le système financier d'un pays comprend l'ensemble des institutions qui ont pour rôle de satisfaire les besoins financiers de certains agents, 81 Le NEPAD: enjel/x poliriques, éCOl/omiques er secroll'els grâce aux capacités des autres. Un tel ajustement est réalisé à l'aide de deux types de mécanismes (J.G. GURLEY et E. S. SHAW, 1960) : - celui de la finance directe, qui privilégie les fonctions du marché des capitaux; - celui de la finance indirecte, qui fait intervenir les institutions dont l'activité principale est de nature financière. A cet égard, les entreprises peuvent être classées en deux secteurs selon leurs modes de financement (J. HICKS, 1974) : - le secteur des fonds propres et de l'endettement à long terme, dans lequel elles font essentiellement appel au marché pour satisfaire leurs besoins de financement ; - le secteur du découvert ou de l'endettement à court terme, dans lequel elles utilisent surtout des facilités d'emprunt quasiautomatique pour se financer. Cette classification amène à distinguer les économies d'endettement, qui privilégient la finance indirecte assurée notamment par les intermédiaires bancaires, des économies de marchés financiers. En Afrique Subsaharienne et plus précisément dans la zone franc africaine (ZFA), le financement indirect, de nature essentiellement bancaire, est encore prépondérant. Et les plaintes des opérateurs ne cessent de s'élever contre l'État, les banques de développement, les banques commerciales, la banque centrale, le mécanisme de la zone franc, aux motifs que le loyer de l'argent est prohibitif, que les conditions bancaires sont restrictives et n'assurent pas la promotion du développement, Étant donné que l'utilisation efficiente des ressources monetalres d'un pays à des fins de développement dépend fortement de la structure et de l'efficacité du système financier, il apparaît utile de s'interroger, tout d'abord, sur le véritable rôle du système financier de la ZFA au moment où le financement extérieur se fait rare et est par ailleurs soumis à de nouvelles conditions, notamment la bonne gouvernance et la réforme des marchés 1 , ensuite, sur la manière de susciter une épargne domestique longue et à moindre coût, en vue d'augmenter le taux d'épargne et abaisser le coùt du crédit. L'objet de la présente réflexion est donc de déterminer comment le système financier peut, dans les pays africains de la zone franc (PAZF), autant que possible: - permettre une meilleure utilis:.Ition des ressources financières du pays; 1. Il s'agit en fait d'un train de mesures et de dispositions juridiques garantissant le fonctionnement régulier d'une économie de marché, entre autres, la loi anticornlption, la lois sur la concurrence et la loi contre "argent sale, 82 5)'stème jlnancer et dél'eloppemel1t en ZOIl(' jiW1C uji-icaine - assurer un soutien plus efficace aux besoins de son économie - garantir aux opérateurs un crédit moins rare et bon marché. La présente analyse nous conduit à montrer que le système financier en vigueur dans ces pays n'est pas de nature à favoriser leur développement, à cause notamment de ses fortes contraintes structurelles (partie 1). Dans ces conditions, il appartient aux autorités monétaires de favoriser l'émergence d'une économie des marchés financiers, seule à même de faciliter l'accès aux ressources financières et aux placements financiers et de promouvoir ainsi le développement économique (2ème partie). 1. LE SYSTf~ME FINANCIEIl ACTUEL DES PAZF : UNE FAIBLE AI'TITlJDE A FINANCEIl LE DÉVEL()I'I'I~MI':NT Le système financier actuel des PAZF semble incapable de financer leur développement, essentiellement parce que ces pays sont pour la plupart des économies d'endettement administrées, d'une part, à cause de la prédominance de la finance indirecte qui en est la conséquence, d'autre part. 1.1. Les PAZF : des économies d'endettement administrées A l'instar de la France (de 1965 à 1980), les PAZF sont tous considérés comme des économies d'endettement. Plusieurs raisons expliquent cette caractérisation : - les entreprises qui y exercent sont en grande partie financées par les crédits bancaires; -les entreprises financières installées disposent de peu de titres, parce que le marché des capitaux y est pour l'heure inexistant; -la majorité des transactions sont directement liées à l'activité économique réelle (paiement des salaires, achat des facteurs par les employeurs, achat de biens finals par les consommateurs, etc.) et les transactions en valeur concernent principalement l'achat de biens et services et non celui des actifs financiers; - malgré la prépondérance de la quasi-monnaie par rapport aux autres composantes cie M2 (la masse fiduciaire étant la plus faible), on observe un faible développement des moyens de paiements non fiduciaires qui s'explique autant par des contraintes techniques (rareté des terminaux de paiement par carte bancaire 83 Le NEPAD: enjeux politiques, écol/ol1liques el sectoriels par exemple) que par le faible niveau de sécurisation du paiement par chèque; -les autorités monétaires ont souvent recours à l'encadrement de crédit comme instrument de politique monétaire, Or, l'organisation du financement dans une économie d'endettement privilégie le rôle des intermédiaires financiers et leur assure un refinancement quasi-automatique. Ainsi, les institutions financières ont pour rôle essentiel de mobiliser les ressources (nationales et internationales) et de les mettre à la disposition de l'État, des entreprises publiques ou des secteurs jugés prioritaires, En retour, le gouvernement se charge de la gestion de leurs activités et les renflouent en temps de crise. Ces dernières années, la crise de la dette et la réduction de l'apport net des ressources financières d'origine extérieure ont focalisé l'attention sur les ressources domestiques et sur leur affectation efficace. Par ailleurs, suite aux pressions intérieures et aux conditionnalités des bailleurs de fonds, les gouvernements africains ont réduit progressivement leur participation dans la production et les processus de financement intérieurs. Ce qui a contribué à accroître la participation du secteur privé dans le processus de financement du développement. L'appartenance à la zone franc concourt à pérenniser cette situation, car la zone franc apparaît elle-même, à de nombreux égards, comme un élément de rigidité (ONDO OSSA, 1992). En effet, ne pouvant trouver à l'intérieur des financements nécessaires, les États membres sont contraints de s'endetter sur les marchés internationaux à des coûts prohibitifs. A cela il faut ajouter le maintien, pendant de nombreuses années, d'une politique de répression financière dans le but de faciliter et favoriser l'investissement. Ainsi, les économies de la ZFA se distinguent par la prédominance de la finance indirecte, qui reconnaît au système bancaire la responsabilité de financer le développement. 1.2. La prédominance de la Îmance indirecte Tel que défini par GURLEY et SHAW, le mécanisme de la finance indirecte est un mécanisme dans lequel les emprunteurs ultimes émettent, pour satisfaire leurs besoins de financement, des titres primaires souscrits par des entreprises financières qui les financent en émettant des titres secondaires, négociables ou non négociables. Ce mécanisme repose essentiellement sur un processus c!'intermédiation financière (monétaire et non monétaire). L'intermédiation monétaire permet aux institutions qui gèrent des dépôts à vue d'acheter des titres primaires cédés par les agents à besoin de financement avec de la monnaie qu'elles ont le pouvoir de créer. Quant à ]'intermédiation financière non monétaire, elle consiste pour des institutions à acquérir des titres primaires en contrepartie des 84 S)'stème finance/" et dél'e/oppement en zO/le./iwlc africaille versements monétaires et à offrir des créances non monétaires sur ellesmêmes, sous forme de titres secondaires contre de la monnaie. L'intermédiation financière constitue donc, en quelque sorte, une réponse aux imperfections du marché. Elle comporte de nombreux avantages, notamment: - une internalisation des transactions financières, un accroissement des ressources financières et des économies d'échelle; - une meilleure garantie contre les risques financiers, grâce à une plus grande diversification du portefeuille d'actifs. A cela il faut ajouter les avantages de la spécialisation des intermédiaires financiers dans certaines opérations ou dans une certaine clientèle. Une analyse des comportements des différents intermédiaires financiers dans la ZFA nous conduit à nous intéresser principalement à la banque centrale, aux banques commerciales et aux banques de développement, du moins ce qu'il en reste. a) La Banque centrale La Banque centrale a le monopole de l'émission monétaire. Elle se situe au sommet de la hiérarchie des institutions financières. Même si elle n'accorde pas de crédit à moyen et long termes et que son rôle se limite à la gestion de la liquidité, à la promotion de la stabilité, à la viabilité et au développement des institutions, la banque centrale a une incidence sur le marché du crédit. Par le passé, plusieurs pays africains se sont appuyés sur le contrôle direct des variables de quantités (contrôle quantitatif du crédit et du change) plutôt que sur les variables de prix (taux d'intérêt et taux de change) pour contrôler la liquidité et le crédit. Mais, avec l'adoption progressive des systèmes de gestion reposant sur le marché, nombreux d'entre eux ont libéralisé les marchés financiers et s'appuient, de plus en plus, sur les taux d'intérêt et les taux de change pour agir sur la croissance et l'allocation des liquidités. Dans les PAZF, et en raison précisément des relations qui lient désormais le franc CFA à l'euro, les niveaux de taux d'intérêt et de taux de change de la monnaie sont influencés par les arrangements spéciaux (ONDO OSSA, 1999). Et de ce fait, ces niveaux ne sont pas souples 2 . 2. Les caractéristiques principales de ces deux zones monétaires sont: (a) une monnaie unique ayant cours légal au sein cie chaque union; (b) une parité fixe avec l'euro (l euro = 655,957 francs CFA) ; (c) la mise en commun des réserves extérieures (65 % cles réserves cie clevises cie chaque pays) clans un compte au niveau clu Trésor français appelé, compte des opérations .. ; (cl) la convertibilité extérieure de la monnaie clans chaque zone monétaire est garantie par la France (certaines restrictions sur les transferts de capitaux à J'intérieur cie l'Union ont été imposées en 1991 et le rachar cles billets cie banque provenant cie J'extérieur cie chaqué' zone était suspenclu par la Banque centrale vers la fin cie l'année 1993). 85 Le NEPAD : enjellx politiqlles, économiques et sectoriels En Afrique de l'Ouest, la Banque Centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (BCEAO) dispose de trois types d'instruments pour la mise en œuvre de la politique monétaire) : les plafonds des concours globaux aux États, aux banques et aux établissements financiers, les réserves obligatoires et les taux d'intérêt directeurs. Il existe alors quatre taux directeurs : -le taux d'escompte; -le taux des prises en pension; -le taux des appels d'offres; -le taux des bons émis par l'Institut d'émission-i. En Afrique Centrale, la Banque des États de l'Afrique Centrale (BEAC) dispose de deux types d'instruments' : les plafonds de refinancement des banques et les taux d'intérêt. Il s'agit en fait de quatre taux directeurs fixés par le Gouverneur par délégation du Conseil d'administration: -le taux d'intérêt sur les appels d'offres· positifs .. (TIAO) , taux de refinancement des banques qui y soumissionnent (adjudication à la française) ; -le taux d'intérêt sur les placements des banques (TISP), effectués dans le cadre des appels d'offre négatifs; 3. L'article 12 du traité de !'UEMOA confie au conseil des ministres de l'Union la responsabilité de la politique monétaire qui vise à assurer la sauvegarde de la monnaie commune et de pourvoir au financement de l'activité et du développement économique des États de l'Union, Les statuts de la BCEAO précisent par ailleurs un objectif intermédiaire de la politique monétaire (article 51) : le rapport entre le montant des avoirs extérieurs de la Banque et le montant moyen de ses engagements à vue doit être supérieur à 20 %. 4. Le taux d'escompte et celui des prises en pension sont fixés de manière discrétionnaire par la Banque centrale, Les taux des appels d'offres et des bons émis par l'Institut d'émission sont déterminés par une procédure d'adjudication à taux multiples, La BCEAO se réserve cependant le droit, en fonction des circonstances, d'organiser des appels d'offres à taux fixes. 5, La convention entre les États membres de la zone BEAC et, depuis le 25 juin 1999, la convention régissant l'Union Monétaire de l'Afrique Centrale, ainsi que les nouveaux statuts de la BEAC (entrés en vigueur le 25 juin 1999) ont confié à cet institut d'émission communautaire, outre le privilège exclusif d'émettre la monnaie unique, les pouvoirs nécessaires à la mise en oeuvre de la politique monétaire, avec le concours, à l'échelon national, des comités nationaux de crédit. Dans le cadre des exercices de programmation monétaire, le Conseil d'Administration de la BEAC fixe pour chaque État de la zone d'émission des objectifs d'avoirs extérieurs nets, de croissance des crédits à l'économie et de la masse monétaire (Mn, L'objectif final de la politique monétaire défini par l'article 21 de la convention régissant l'UMAC est de garantir la stabilité de la monnaie, Sans préjudice cie cet objectif, la BEAC apporte son soutien aux politiques économiques générales clans les États membres de l'Union monétaire, 86 Sl'slèmefinallcer el dél'e/oppemell! en zonefrallc aji"icaine - le taux d'intérêt des prises en pension (TIPP), égal au TIAO majoré de 150 à 200 points de base ; - le taux de pénalité aux banques (TPB), appliqué au découvert des banques sur leur compte auprès de la BEAC et égal à deux fois le TIAOo. Contrairement aux autres institutions financières, les deux Banques centrales (BCEAO et BEAC) n'ont pas de concurrents. Mais elles travaillent en étroite collaboration avec les ministères des finances des pays membres, en matière de conception et de mise en œuvre de la politique monétaire. Certes, dans de nombreux pays africains, les banques centrales ont perdu leur indépendance dès lors que les États ont été amenés à s'en remettre entièrement à elles pour le financement de leur développement national à travers la création monétaire. De plus, les pressions politiques exercées sur les banques centrales pour les crédits à bon marché vont à l'encontre de l'objectivité et de l'impartialité dont elles ont besoin pour fonctionner avec efficacité dans un système de marché. Et c'est pourquoi le débat a porté, ces dernières années, sur l'indépendance de la banque centrale, qui permet de réduire le biais inflationniste qu'induit une politique discrétionnaire et qui, du reste, revêt plusieurs formes (KOENIG, 1999) : - l'indépendance des instruments, qui est la capacité pour la banque centrale d'utiliser sans restriction tous ses instruments pour atteindre ses objectifs. Elle est incompatible avec l'obligation faite aux banques centrales de financer les déficits budgétaires; - l'indépendance des objectifs, qui correspond à la capacité de la banque centrale de choisir et de poursuivre ses objectifs sans être soumis à une contrainte ou à une influence exercée par le gouvernement. Ainsi, dans la majorité des pays africains, il n'existe pas de systèmes internes de restriction garantissant l'indépendance de la banque centrale. Par ailleurs, les règles ont été souvent contournées par les crédits directs octroyés en vue du financement des entreprises parapubliques, d'une part, par l'emprunt extérieur, d'autre part. La grande difficulté étant que, dans une économie d'endettement, la 6. La BEAC fixe également, au titre de l'article 22 de ses statuts, les taux des avances statutaires aux trésors nationaux consentis en-dessous et au-delà des plafonds et le taux des dépôts spéciaux des trésors et organismes publics. Deux taux bancaires sont réglementés par la BEAC : -le taux créditeur minimum qui ne s'applique plus qu'aux dépôts d'épargne ou sur livret inférieurs à 5 millions de FCFA ; - le taux débiteur maximum, désormais égal au TPB plus 7 %. 87 Le NEPAD : enieltx po/ililjUeS, écollol/liljlles et sectoriels banque centrale n'est pas en mesure de contrôler le volume de refinancement. Elle se sent obligée de refinancer des crédits déjà accordés par le système bancaire. Aussi se contente-t-elle bien souvent d'agir sur l'évolution monétaire issue des opérations de crédits bancaires en influençant les taux d'intérêt. Mais si cette action n'est pas suffisamment efficace, d'où le recours au contrôle du volume des crédits (ONDO OSSA, 2002). Cependant, dans les PAZF, les règlements monétaires garantissent aux deux banques centrales une indépendance vis-à-vis des pressions émanant des gouvernements. En effet, le recours au crédit de la banque centrale est conditionné par les limitations statutaires: les créances sur le trésor public sont plafonnés à un maximum de 20 % des recettes fiscales au titre de l'année budgétaire précédente. Le refinancement du crédit des banques commerciales pour le gouvernement prend la forme de l'escompte de crédit éligible à court, moyen et long termes (avec une échéance de moins de 10 ans). De plus, à la suite de la mise en œuvre des programmes d'ajustement structurel, des restrictions ont été imposées aux gouvernements à travers les conditionnalités des bailleurs de fonds. Et celles-ci ont donné aux banques centrales une forme d'indépendance dans leur coopération avec les ministères des finances. Un important aspect de la fonction de contrôle et de réglementation de la Banque centrale concerne le fait que, de par sa nature, l'activité bancaire implique une prise de risques importante. Sa réussite dépend de la confiance du grand public. La fonction de contrôle de la banque centrale doit, dans ces conditions, contribuer à établir et à maintenir la confiance nécessaire dans la stabilité du système bancaire et financier. Or, à ce qu'il semble, le système monétaire de la zone franc (régime de changes fixes) a perdu de sa crédibilité depuis la dernière dévaluation du franc CFA (ONDO OSSA, 2001). L'adoption d'un système indirect de contrôle monétaire nécessite également la suppression des obstacles institutionnels et non financiers au fonctionnement efficace du système du marché. Ceci va de pair avec le rôle de la banque centrale dans la promotion de la stabilité et la viabilité des institutions des marchés financiers. La Banque centrale a donc ainsi la possibilité de contribuer au renforcement du système financier. De même qu'elle peut promouvoir le développement des marchés financiers afin d'améliorer l'efficacité de lïntermédiation financière. b) Les banques commerciales Généralement, dans la ZFA, les banques commerciales jouissent d'une situation de quasi-monopole en raison de leur prédominance dans le système financier. De plus, la plupart d'entre elles sont des filiales de banques étrangères et pourraient, en cas de nécessité, exploiter les ressources extérieures. 88 Système fi/lClllCl!1" et dr'l'eloppl!ment ell zone Fcmc aFicaille Malheureusement, plusieurs éléments entravent leur fonctionnement, notamment: -leur structure actuelle, qui fait d'elles essentiellement des institutions urbaines; -les procédures rigides, des coûts de fonctionnement élevés, la lenteur administrative et les systèmes de fonctionnement et de gestion archaïques ; -leur préférence pour les avoirs liquides et les prêts à court terme, qui a conduit à la prédominance des avances, des crédits à court terme et des effets escomptables dans leurs portefeuilles. En raison de l'asymétrie d'informations, une demande de crédit généralement excédentaire conduit résolument au monopole bancaire. Elle pousse par ailleurs les banques à avoir une stratégie coordonnée en vue d'accroître l'offre. Elle a malheureusement comme conséquence directe l'augmentation du loyer de l'argent7 . Un tel ajustement conduit donc nécessairement à des situations d'antisélection ou d'aléa moral. Ainsi, les banques commerciales installées dans les PAZF ont de la réticence à accorder des crédits destinées aux activités agricoles et industrielles, excepté là où des directives du gouvernement les y contraignent. Elles marquent leur préférence pour le financement des activités de vente ou de transformation, au détriment des activités de production et de développement. Les banques commerciales manifestent donc un sentiment d'aversion contre le risque. Et cette attitude est particulièrement prononcée lorsqu'il s'agit des petits emprunteurs, à cause notamment de la difficulté qu'elles éprouvent à obtenir des informations de qualité en vue de l'évaluation des perspectives des demandeurs de crédit. Elles préfèrent dans ces conditions accorder des crédits aux entreprises de grande taille, bien organisées et évoluant dans les domaines prioritaires (pétrole et mines), au détriment des PME, même lorsqu'il existe des dispositions pour la couverture de la garantie du crédit et/ou des directives spécifiques en leur faveur. On comprend alors l'importance que les banques commerciales accordent aux garanties conventionnelles (acte, hypothèque et autres actifs négociables). D'une manière générale, les banques commerciales ne financent pas le développement. Et plusieurs raisons peuvent être évoquées à cet égard: 1°) Dans un marché où les procédures légales sont longues et les lois en matière de faillite ambiguës, la garantie devient une 7. Ainsi, avec un taux directeur fixé par la BEAC à 6,5 %, le taux de sortie des banques commerciales s'élève à 18 %. La marge bancaire semble de ce point de vue excessive. 89 Le NEPAD: el\ieux politiques, économiques et sectoriels condition nécessaire pour la mise en application effective du contrat. 2°) La mise en œuvre des PAS a également contribué à renforcer l'aversion contre le risque. La suppression de la protection qui permettait de se prémunir contre l'insolvabilité de certaines entreprises clientes des banques et la fermeture de quelques autres ont augmenté l'incertitude du remboursement des créances. 3°) Les changements en cours, en ce qui concerne les taux d'intérêt et la politique de crédit d'une manière générale, ont conduit les banques a être plus prudentes dans l'octroi des crédits de moyen et de long terme (le respect d'un minimum de règles prudentielles). c) La banque de développement Les banques commerciales qui dominent le système financier sont essentiellement orientées vers le financement du commerce et d'autres investissements à court terme dans les centres urbains. Et même si ces banques accordent des crédits à long terme, elles le font uniquement aux termes et conditions peu attrayants. Les agios sont fixés à un niveau élevé pour tenir compte, ainsi que nous l'avons précisé plus haut, des risques associés au portefeuille des banques. C'est dans ces conditions qu'a été créé, un peu partout en Afrique des banques de développement, essentiellement pour contribuer à la promotion du développement économique. Malheureusement, le bilan de ces banques a été globalement décevant, pour des raisons évidentes: 1°) les banques de développement ont presque toutes fait faillite ; 2°) Là où elles ont résisté comme au Gabon, on observe que la Banque Gabonaise de développement CB.G.D), n'a pas réussi à jouer le rôle escompté en ce qui concerne la promotion des nouveaux entrepreneurs et des nouvelles entreprises, et plus particulièrement les PME. En effet, la B.G.D a plutôt accordé des prêts aux grandes entreprises bien établies, qui auraient pu obtenir un financement des banques commerciales. Elle a par ailleurs procédé à une mauvaise affectation des ressources financières, à des taux d'intérêt inférieurs à ceux des banques commerciales, non pas en raison des coùts des transactions plus bas, mais du fait d'une offre de fonds moins chère, car à des taux subventionnés par le gouvernement. On relève également, le maintien d'un portefeuille excessivement concentré, qui traduit une faible capacité d'adaptation en période de récession économique. Enfin, la BGD n'a pas réussi à mobiliser les 90 S}'stème financer et dél'eloppemellt en zone franc ajdcaine ressources financières autres que celles fournies par les bailleurs de fonds et le gouvernement, la rendant ainsi vulnérable aux pressions politiques qui, en définitive, ont affecté la sélection des prêts et des projets, intensifié les problèmes de recrutement et de gestion d'un personnel de direction compétent. L'incidence négative de la pression politique en matière de tarification des services (intérêts des prêts et intérêts sur les dépôts), de sélection des prêts et de nomination des hauts cadres explique le manque de motivation du personnel. En somme, la BGD pour survivre, a plutôt privilégié un schéma financier proche de celui des banques commerciales. Ce qui, dans un environnement d'économie d'endettement, lui a permis de contenir et de mieux contrôler le risque H. L'incapacité du système financier actuel à promouvoir le développement des pays de la ZFA en général conduit à envisager le passage à une économie de marchés financiers comme solution au problème de financement du développement en Afrique. II. L'I~MER(;ENCE D'LJNE ÉCONOMIE DE MAHClIÉS FINANCIERS EN ZFA : LJNE SOIHJlON ALJ FINANCEMENT Dli DI~VEI.OPPEMENT Dans une économie de marchés financiers, les banques s'alimentent en ressources liquides en collectant des dépôts et en faisant appel au marché des capitaux. Elles recourent peu au refinancement et possèdent des réserves excédentaires. Nous allons tout d'abord présenter les avantages des marchés financiers avant de traiter des aménagements indispensables. 8. Alors qu'elle dispose d'un niveau de fonds propres très élevé par rapport à son activité (86 % des financements de la BGD proviennent de ses fonds propres en 2000, contre 76 % en 1999. Ce qui représentent respectivement un montant de 20 milliards de francs CFA conter 10,'5 milliards de francs CFA), la BGD finance principalement l'équipement et la consommation qui représentent respectivement 30 % et 27 % des crédits en 2000, contre 37 % et 12 % en 1999. La BGD manque donc d'ambition puisqu'elle ne réussit pas à transformer ses ressources propres en financements longs. Son comportement est plutôt proche de celui d'une banque commerciale. Et par rapport à cette dernière option, la BGD se porte plutôt bien puisqu'elle réalise des bénéfices. Pour preuve: un résultat de 3 milliards de bénéfice en 2000 contre 2,8 milliards en 1999, et même si on constate plusieurs crédits en souffrance (les créances douteuses et impayés représentent 24,64 % en 2000 contre 13,04 % en 1999. 91 Le NEPAD " el/jeux politiques, ('col/omiques et sectoriels II.1. Les avantages d'une économie de marchés financiers Dans une économie de marchés financiers, les entreprises financent essentiellement leurs investissements grâce à leur autofinancement et grâce aux émissions d'actions et d'obligations sur de vastes marchés alimentés par l'épargne des agents à capacité de financement. Leurs besoins de financement de court terme sont donc satisfaites, du moins partiellement, par la vente de titres négociables sur un marché monétaire largement ouvert aux agents financiers et non financiers. Les banques commerciales peuvent également recourir au refinancement auprès de la Banque centrale. Mais ce recours est rare et seulement transitoire. La banque centrale est alors un prêteur en dernier ressort non contraint et les banques commerciales sont dites .. hors banque ", du fait de leur indépendance à l'égard de la banque centrale. A cet effet, l'activité traditionnelle consistant à distribuer des crédits est nettement plus faible dans une économie de marchés financiers que dans une économie d'endettement. Les marchés financiers présentent donc de nombreux avantages (KOENIG, 2000) : - ils assurent la négociabilité des titres; - ils facilitent l'accès aux ressources financières et aux placements financiers, de même qu'ils proposent des gammes diversifiées d'actifs susceptibles de répondre à un éventail large de besoins et des titres standards (montants, échéances, taux d'intérêt). Ce qui évite les coûts élevés induits par des contrats spécifiques dans les opérations personnelles ; - ils définissent les taux d'intérêt d'équilibre des titres échangés auxquels les agents qui désirent intervenir peuvent se référer; - ils permettent aux opérateurs d'éliminer ou de réduire certains risques (risque de défaillance des emprunteurs, risque de variation des taux d'intérêt, risque de change ... ). La promotion des marchés des valeurs permet surtout d'étendre la gamme des services financiers offerts et d'améliorer l'efficacité de l'intermédiation financière ainsi que la gestion des ressources financières de l'économie. Développés avec succès, ils peuvent servir d'interface aux entreprises privées et publiques en vue d'une meilleure mobilisation des fonds auprès des institutions financières et du grand public. En fait, le développement des marchés des valeurs offre une variété d'avantages, notamment: -l'introduction d'un plus haut degré de concurrence au sein du système financier, grâce à l'élargissement de la gamme des services et des instruments financiers ; -l'amélioration de la gestion des risques pour des entreprises individuelles et la solvabilité générale du système financier, grâce au financement de long terme qui apparaît comme une solution ou, mieux, un complément au financement par la dette; 92 Système financer et dél'eloppemem en zone jhmc africaine - le renforcement du lien avec les marchés financiers internationaux et, par conséquent, la stimulation des apports des capitaux; Autant d'avantages susceptibles de faciliter l'ajustement et la croissance dans l'économie gabonaise. Ce qui pousse d'ailleurs à un examen succinct de la structure et du rôle des deux composantes de ce type de marché, notamment le marché monétaire et le marché des capitaux. Le marché monétaire concerne le placement des instruments à court terme, hautement liquides et généralement solvables qui sont souvent des obligations à court terme de l'État. Le développement du marché monétaire facilite l'introduction des dépôts inter-banques, des acceptations bancaires, des certificats de dépôts et des effets commerciaux émis par les sociétés non financières. A un moment où les flux nets des ressources financières extérieures diminuent de manière notable, le marché monétaire constitue un moyen non inflationniste de financement du déficit budgétaire de l'État. De plus, il faciliterait la mise en œuvre du contrôle monétaire indirect, grâce aux opérations d'open market et aux fluctuations des taux d'intérêt en lieu et place des contrôles directs et des taux d'intérêt fixes qui avaient contribué à la répression sur le marché financier et à la mauvaise affectation des ressources. En permettant aux grandes entreprises d'émettre des titres à court terme sous forme d'effets commerciaux, le marché monétaire réduit la dépendance vis-à-vis des banques commerciales et rend le marché des prêts plus concurrentiel. Ce qui entraîne nécessairement une baisse des coûts de transaction et des taux d'intérêt. Les marchés monétaires et financiers sont nécessairement liées car le développement du marché des valeurs commence généralement avec celui du marché monétaire d'autant que, de manière générale, les mêmes institutions sont impliquées. Ainsi, le développement du marché financier a des implications positives pour le financement du développement, puisqu'il encourage la diversification de l'actionnariat des entreprises et l'affectation efficace des ressources à travers un mécanisme de tarification compétitif, plutôt qu'à travers des mécanismes de contrôle de crédit. II.2. Les principales réformes financières favorisant l'émergence d'une économie de marchés îmanciers Il s'agit tout d'abord de prendre une série de mesures préalables et de procéder par la suite à des aménagements indispensables. a) Les mesures préalables Il semble opportun de se référer aux réformes qui ont mis un terme à l'économie d'endettement en France et qui ont favorisé le développement d'une économie de marchés financiers. Il s'agit essentiellement 93 Le NEPAD .' er(iellx po/itiqlll!s. écol/omiques et sectoriels des mesures de déréglementation, d'une part, des innovations financières, d'autre part. La libéralisation financière se traduit par une mise en cause des législations et des réglementations nationales à caractère restrictif (opérations de déréglementation). Elle sous-entend, entre autres: - la modernisation des activités financières ; .- la réduction du nombre des taux d'intérêt administrés; -l'abolition de l'encadrement du crédit; -la libre circulation des capitaux, ainsi que la libre circulation des services et des produits bancaires. En ce qui concerne les innovations financières, elles consistent à - créer des marchés nouveaux; - mettre en place des instruments de couvertures de risques; - développer le marché des valeurs mobilières; - ouvrir les marchés, notamment le marché monétaire, à de nouveaux opérateurs (entreprises non financières et particuliers) ; - créer des produits nouveaux en diversifiant des produits anciens, comme les obligations (titres à taux variables ou révisables, titres participatifs ou associatifs). L'ouverture récente de la BVRM à Abidjan en Afrique de l'Ouest et celle prochaine d'une bourse de valeur à Libreville pour l'Afrique Centrale apparaît salutaire. La bourse des valeurs de Libreville verra le jour au deuxième semestre 2003. Et même si elle aura un concurrent au Cameroun, les autorités monétaires de l'Afrique centrale doivent tout mettre en œuvre pour lever certains verrous, le problème essentiel de ces bourses de valeur étant celui de la profondeur du marché. Car la création d'une source supplémentaire de financement devra entraîner la baisse des coûts en raison de la compétition qui va s'instaurer. b) Les aménagements nécessaires Les nouvelles approches en matière de gestion économique reposent d'abord sur le désengagement de l'État, ensuite sur la promotion de la concurrence avec un rôle accru attribué au secteur privé et aux forces du marché. S'agissant du désengagement de l'État, les entreprises publiques - et en particulier celles qui enregistrent de mauvais résultats - sont en train d'être privatisées. Ce mouvement est amorcé un peu partout depuis quelques années. Dans ces conditions, les incitations financières sont déterminés par le jeu de l'offre et de la demande relatives à l'instrument financier. Malheureusement, la vague de privatisations intervenue ces derniers temps, surtout en Afrique centrale, s'est faite dans des conditions peu fiables à cause de l'absence d'un marché de valeurs mobilières. 94 SI'stème/llluncer et dr'l'l!!oppemell/ ell :::olle /iW1C uji-icuine La situation financière fragile des PAZF met les autorités face à de nombreux défis pour rendre les institutions financières efficaces, compétitives et solvables. La promotion d'une concurrence entre les entreprises de production devrait être appuyée par un système financier lui-même compétitif. Et, en ce sens, le désengagement de l'État permet d'éviter l'erreur constante qui consiste à affecter des crédits aux projets de faible performance. Étant donné qu'il existe des domaines prioritaires pour le financement du développement, qui peuvent ne pas intéresser les institutions financières organisées à cause des risques élevés, une intervention politique en faveur des petites entreprises est souhaitable, en tant que moyen d'améliorer le bien-être général (Little, 1987). Cette intervention visera plus spécifiquement la création d'un contexte macroéconomique stable, la fourniture d'incitations fiscales, la suppression des barrières légales et la mise en place d'un cadre de réglementation et de contrôle afin de protéger les droits des investisseurs. CONCLUSION Il ressort de la présente analyse que: 1°) en raison de la nature des économies africaines de la zone franc (économies d'endettement), les deux banques centrales (BCEAO et BEAC) ne sont pas en mesure de contrôler le volume de refinancement. Elles ont souvent été obligées de refinancer les crédits déjà accordés par le système bancaire. Aussi n'ont-elles donc tenté d'agir sur l'évolution monétaire que par le biais des taux d'intérêt. Même si cette action n'a pas toujours été efficace (ONDO OSSA, 2002) ; 2°) Les banques commerciales, qui dominent le système financier des pays africains, sont réduites à accorder des prêts a court terme et à limiter leurs activités en milieu urbain. Leur coût d'adaptation aux besoins des ménages en milieu rural serait très élevé et impliquerait l'acquisition de nouveaux locaux de banques, une formation spéciale du personnel, l'introduction de nouvelles dispositions et options de conditions de dépôt, la réduction des frais de service, etc. Mais, en raison du faible volume des transactions concernées et de la grande dispersion de l'épargne des ménages en milieu rural, les bénéfices escomptés sont trop faibles pour constituer une incitation suffisante. 3°) Les banques de développement, mises en place pour améliorer les perspectives de croissance, n'ont pas réussi à assurer les services escomptés et ont pour la plupart fait faillite. A cause du système (économie d'endettement), celles qui ont survécu ont été contraintes de prendre des décisions purement commerciales. 95 Le NEPAD: el~iel/x poliliql/es, économiques 1'/ seC/oriels Dans tous les cas, le besoin d'accroître le financement des investissements à moyen et long termes en ZFA nécessite un nouveau type d'institutions financières et surtout la création d'un marché financier. Mais compte tenu de l'étroitesse du marché, une telle innovation ne devrait pas nécessairement entraîner la création d'autres institutions financières, mais bien mieux de l'expansion des services des institutions existantes, de leur réforme et de leur réorientation, de manière à les rendre plus efficaces, compétitives et solvables et, par conséquent, mieux adaptées aux contraintes du marché et de la gestion économique. C'est le seul gage d'un financement efficace du développement en ZFA. BIBliOGRAPHIE ABEBE A. 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Introduction et historique Les progrès accomplis au cours de ces dernières années dans les domaines de la science, de la technologie et de la mondialisation ont conduit à une transformation économique, sociale, culturelle et géopolitique au niveau mondial. Au cœur de ce phénomène se trouvent les technologies de l'information et de la communication (TIC). Non seulement elles se sont diffusées plus rapidement que les innovations révolutionnaires des sociétés agraires et industrielles, mais elles sont aussi devenues une puissante force de transformation du développement social, économique et politique dans le monde entier. Leur puissance impressionnante et leur polyvalence ont abouti à la croissance des réseaux mondiaux qui ont changé les affaires et les marchés, créant de nouveaux modes de flux de connaissances et l'émergence d'une nouvelle économie basée sur l'information et le savoir. Avec la réduction des coûts et l'accélération de la vitesse de la communication à travers le monde, la rupture des barrières préexistantes dans le temps et dans l'espace, les TIC affectent tous les domaines de la vie politique, sociale et économique. La capacité des nouvelles technologies à influer sur le processus de production, le commerce, la gouvernance et l'apprentissage peut renforcer la croissance économique et le développement social. Le nombre de réseaux informatiques s'accroît de jour en jour, renforçant ainsi la connectivité globale. Actuellement, Internet compte près de 400 millions d'utilisateurs et ce chiffre sera d'un milliard en 2005, atteignant ainsi la moitié de la population du monde en 2010. Le réseau Internet est en train de devenir le système nerveux du savoir et du progrès. Non seulement la révolution des TIC a changé la manière de vivre, de travailler et de se divertir, mais les TIC ont aussi créé une nouvelle infrastructure pour les affaires, les progrès scientifiques et l'interaction sociale. Cette révolution continue d'alimenter la prolifération de nouveaux 97 Le Nl;PAD, en/enx polifiqnes, (il'O/IOIII ùJlles et sectoriels moyens de communication et la mondialisation des affaires et de la finance. Elle renforce la participation des citoyens aux affaires nationales et internationales. En même temps, elle suscite des questions complexes qui transcendent les frontières nationales notamment l'émergence d'un" fossé numérique» entre les régions, les nations et les communautés. Même s'il va de soi que la plupart de pays bénéficient de cette transformation, il y a aussi des craintes d'un fossé de plus en plus profond entre les riches et les pauvres. La mondialisation rapide et la concurrence accme peuvent affecter négativement les pays où l'environnement et les capacités institutionnelles sont faibles. Cependant, le coût que paieraient les pays africains en se plaçant en dehors de l'économie fondée sur l'information et le savoir est beaucoup plus élevé que le prix de l'adhésion. Tandis que le monde développé poursuit la mise en place des sociétés du savoir, les pays africains font face aux gigantesques défis sociaux, politiques et économiques. Les objectifs cruciaux identifiés par les dirigeants africains sont notamment le renforcement de la paix et de la sécurité, le règlement des conflits, le maintien des valeurs démocratiques, le respect des droits humains et de la primauté du droit, la réalisation de la stabilité macro-économique, le renforcement des capacités institutionnelles, l'accroissement des niveaux de développement humain, la promotion du rôle de la femme et l'extension de l'infrastmcture de développement socio-économique. Le récent Sommet du Millénaire des Nations-Unies a défini des objectifs de développement similaires pour la prochaine décennie, y compris la lutte contre la pauvreté, l'accroissement du niveau de l'éducation, l'amélioration des normes de la santé et le renversement des pertes de ressources environnementales. Il a également lancé un appel pour l'amélioration de l'accès à l'information et au savoir ainsi qu'au renforcement de la participation active de l'Afrique à l'économie mondiale basée sur l'information. Un tel consensus global reflète non seulement la nécessité de lutter contre la pauvreté et les autres besoins humains par l'exploitation de l'information, de la communication et du savoir, mais aussi un sentiment naissant qui place la communauté internationale à la croisée des chemins du processus de développement des TIC. Même si les TIC ne sont pas elles-mêmes une fin en soi, l'analyse de l'expérience dans le monde démontre suffisamment que leur utilisation judicieuse et à des fins qui se justifient influe considérablement sur la réalisation des objectifs spécifiques du développement économique et social, tout en jouant un rôle crucial dans les stratégies nationales de développement global. Elles pourraient offrir de nouvelles opportunités aux jeunes non scolarisés tout en améliorant la qualité de l'enseignement dans tous les secteurs du système éducatif. Les perspectives d'intégration africaine et la possibilité d'arrêter et de renverser "l'exode des cerveaux» de 98 les Techllolo/-iies de l'ln!orllwtion et de la COllllllllllication l'Afrique, pour permettre au continent de mieux utiliser et de tirer profit de ses ressources humaines de la diaspora pourraient être des dividendes de l'usage efficace des technologies. Le secteur des TIC et la richesse générée par le renforcement du savoir et des compétences créent aussi des opportunités d'emploi, ce qui réduit la pauvreté en fin de compte. De même, l'application judicieuse des TIC pourrait créer des opportunités de créneau dans le commerce, l'investissement et la finance pour les institutions et les citoyens africains. Ces technologies jouent aussi un rôle crucial dans le renforcement de l'efficacité des administrations publiques, la gestion des conflits, la lutte contre les pandémies et la mise en place d'un système d'alerte précoce en mettant au point des outils de surveillance constante des zones de tensions. Le stockage, la recherche, le tri, le filtrage, la distribution et l'échange d'informations sans discontinuité peuvent assurer des gains substantiels à la production, la distribution, le marketing, la création de nouveaux produits, les canaux de services et de distribution. Grâce à l'extension novatrice des réseaux, les TIC peuvent transcender les barrières culturelles et linguistiques en dotant les groupes et les individus de la capacité de vivre et de travailler n'importe où, en permettant aux communautés locales de devenir membres du réseau de l'économie mondiale. Ces qualités et tant d'autres font des TIC un outil important pour la renaissance de l'Afrique et représentent en effet un espoir dans la recherche de l'éradication de la pauvreté. L'expérience des pays développés montre que les gains de la productivité de l'industrie, du tourisme, du commerce, des transports et d'autres domaines de production et de services peuvent être attribués aux TIC. L'illustration en est l'agriculture où elles peuvent améliorer les moyens de mise a disposition des intrants, d'accroître l'accès aux marchés ainsi que de faciliter l'interaction entre les agriculteurs et les différentes institutions agricoles. Ces technologies ont le potentiel de créer des populations bien informées et autonomes et elles pourraient être appliquées à diverses activités humaines avec des avantages de rendements d'une croissance exponentielle. En conséquence, les gouvernements africains, les agences de développement et la communauté internationale dans son ensemble, reconnaissent de plus en plus le rôle potentiel des TIC dans le développement social et économique de l'Afrique. Les gouvernements, le secteur privé et les institutions universitaires ont été à l'avant-garde de l'utilisation accrue d'Internet en Afrique. Un certain nombre d'institutions dont la Commission économique pour l'Afrique (CEA), le Centre de recherche pour le développement international (CROI), l'Organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO), la Banque mondiale et l'Union internationale des télécommunications (UIT) ont investi des ressources et des énergies considérables pour améliorer l'état de l'infrastructure de l'information et 99 Le NEPAD, el/jeux politiques, écol1omùJlles et sectoriels La CEA: 25 années de promotion des TIC pour le développement La Commission économique pour l'Afrique a été l'une des institutions de la région à reconnaître la puissante contribution des TIC dès 1975. Depuis 25 ans, elle a assuré la promotion des TIC pour le développement de l'Afrique. Son programme a été mis en place en 1979 avec le système panafricain d'information pour le développement (PADIS). Le concept de PADIS impliquait la création, à la CEA, d'une base de données centralisées sur l'information pour le développement et des bases nationales au niveau des centres participants dans les pays africains. Cherchant le meilleur moyen d'échanger l'information sur le continent africain, la CEA a mis en place une série de projets pilotes de travail en réseau informatique depuis 1989. En 1992, la CEA a initié le Projet de renforcement de capacités pour la communication électronique en Afrique (CABECA) avec l'appui du Centre canadien de recherche pour le développement international (CADI) dont le résultat a été la création des nœuds de communication électronique dans 24 pays africains. Après le projet CABECA, la CEA a mis en place d'autres projets de travail en réseaux électroniques dans la région avec l'appui du Gouvernement des pays Bas et de l'Agence américaine de développement international (USAID). En 1996, les gouvernements africains ont adopté l'Initiative "Société de l'information en Afrique" (AISI) en tant que cadre d'action pour la mise en place de l'infrastructure de l'information et de la communication en Afrique, ce qui a fait de l'Afrique la première région du monde en développement à lancer une telle initiative. La mise en œuvre de l'AISI facilitera la participation du continent à la société mondiale de l'information et à réduire le fossé numérique entre l'Afrique et le reste du monde. Les réalisations des trois années d'existence d'AISI ont été évaluées au cours du Forum pour le développement de l'Afrique de 1999 (ADF 99) qui s'est tenu du 24 au 28 octobre 1999 à Addis-Abeba (Ethiopie)sur le thème: le Défi de la mondialisation et de l'ère de l'information pour l'Afrique. de la communication dans la région. De même, des progrès remarquables dans l'utilisation des TI C pour le développement socioéconomique ont été enregistrés dans les pays africains où le leadership politique a montré son intérêt pour les TIC. C'est le cas pour le Rwanda, le Mali, le Mozambique, le Sénégal et l'Afrique du Sud où les dirigeants jouent un rôle visionnaire et catalyseur dans le développement et l'application des TIC dans leurs pays respectifs. Néanmoins, la capacité de l'Afrique à exploiter le savoir, l'information et le développement a été insuffisante. Le résultat est que la région n'a pas contribué d'une manière significative au développement de la société mondiale du savoir. Cela est dû en partie aux Lcontraintes structurelles complexes, notamment la base de ressources humaines limitée associée à la faiblesse de la capacité institutionnelle et réglementaire. Le manque d'investissement dans l'infrastructure des TIC est aussi une autre raison qui explique pourquoi l'Afrique n'a pas participé activement à la société de l'information et n'a pas exploité les TIC pour son développement. En conséquence, l'infrastructure africaine des TIC est la plus faible du monde. L'insuffisance des cadres réglementaire et politique et la limitation de la base de compétences aggravent la situation. D'une manière générale, les institutions de formation qui peuvent produire l'expertise pertinente requise pour exploiter l'information pour le développement de l'Afrique sont pratiquement inexistantes. Même si les études informatiques se sont étendues au niveau des 100 Les Technologies de lJlljonn{//ioll el de la Commllnicalioll collèges et lycées, les universités continuent de produire de jeunes professionnels avec très peu de connaissances dans l'ingénierie des logiciels modernes, des techniques de développement des réseaux et des systèmes. Cet aspect restera l'un des plus grands défis face à l'effort de l'Afrique de créer sa propre société de l'information. 2. Situation des technologies de l'information et de la communication (TIC) en Afrique En dépit de la faiblesse relative de sa base infrastructurelle, l'Afrique a réalisé une croissance considérable au cours de ces dix dernières années. Les progrès enregistrés dans la formulation des politiques, des réformes réglementaires, des initiatives régionales et nationales des TIC et dans la création de partenariats, ont été encourageants. Cependant, en comparaison avec les autres régions du monde et compte tenu des besoins réels du continent, ces progrès deviennent dérisoires. 2.1 Infrastmcture des nc Les mauvaises infrastmctures constituent l'un des obstacles majeurs au développement de l'Afrique. Beaucoup de pays africains entretiennent encore des infrastructures routières, portuaires, ferroviaires et de télécommunications héritées de la période coloniale auxquelles on a consacré très peu d'investissement depuis lors. En ce qui concerne l'infrastructure de l'information et de la communication en Afrique, la radio est le moyen le plus dominant avec une couverture de 60 % du continent et une pénétration de 216 personnes pour 1000. Le nombre de stations de radio privées et communautaires a augmenté. Même si la couverture de la télévision continue d'être limitée aux grandes villes, l'accès à la transmission par satellite a amélioré la réception de la télévision dans les zones reculées. L'infrastructure de diffusion existante, particulièrement la radio, pourrait être au centre du développement des TIC sur le continent. Un sur huit habitants du monde vit en Afrique et cependant, cette région ne compte que 2 % des lignes téléphoniques mondiales. Environ 2,6 millions de personnes sont sur la liste d'attente des lignes téléphoniques. Le coût et l'accès sont les défis majeurs de la pénétration du téléphone. Le prix d'utilisation des services de télécommunication est très élevé par rapport au niveau de vie. Il varie en moyenne de 71 à 94 $ pour la connexion, 4,9 à 6,5 $ pour l'abonnement mensuel et 0,09 $ pour un appel local de trois minutes. Ces chiffres masquent généralement des réalités et des disparités entre pays et au sein des pays. Il y a des pays dont les densités sont encore à 0,13 % et dont les coûts du téléphone sont exorbitants, tandis que d'autres sont à plus de 10 %. 101 Le NEPAD, enjeux politiqlles, économiqlles et sectoriefs L'accès aux ordinateurs est limité et les estimations actuelles indiquent qu'il y a environ 6 millions d'ordinateurs sur le continent. La distribution varie d'un ordinateur pour 1 000 personnes dans certains pays à plus de 50 pour 1 000 dans d'autres. Dans le monde développé, l'ordinateur est un outil essentiel pour les activités de recherche et de développement et il joue un rôle crucial dans la nouvelle économie de l'information. En Afrique, là où ils sont disponibles, les ordinateurs ne sont pas connectés en réseau et sont généralement utilisés pour des applications très élémentaires tel que le traitement de textes. Parmi les principaux obstacles à la diffusion des ordinateurs figurent les droits et les taxes à l'importation qui sont très élevés, variant entre 0 % à 31 %. C'est pourquoi la Conférence Régionale Africaine Préparatoire au Sommet mondial sur la Société de l'Information (SMSI) qui s'est tenue à Bamako, Mali, du 28 au 30 mai 2002 a adopté un moratoire sur les taxes d'importation du matériel informatique dans les pays africains jusqu'en 2005. Même si tous les pays africains sont maintenant reliés à Internet, les infrastructures sont concentrées dans les capitales et dans les grandes villes. Le coût de la connexion reste très élevé avec une capacité de bande passante très limitée pour les applications multimédia interactives. Néanmoins, l'accès du public à Internet est possible dans beaucoup de pays à travers les kiosques, les cybercafés, les télécentres, les téléboutiques, les hôtels et les autres centres commerciaux, même si le nombre des usagers reste insignifiant. Sur environ 2.6 millions utilisateurs, 1.8 million sont en Afrique du Sud. Après des tendances prometteuses et des progrès substantiels au milieu des années 90, l'Afrique ne représente que 0,3 % du contenu Internet dans le monde. La croissance du nombre de fournisseurs d'accès à l'Internet par rapport au reste du monde a baissé depuis 1997. En 1999, 2,6 % seulement des fournisseurs d'accès étaient en Afrique. Le tableau 1 qui a été préparé par la CEA pour la Conférence sur le Financement du NEPAD, montre la situation comparative globale dans les infrastructures TIC. 102 Les Teclmolo~ies de lïll/onnation et de la COll1lll1lnictltioll Tableau J: Tableau comparatifde l'infrastructure globale TIC compilé par la CEA 21,261,800 Nombre de lignes télënhoni ues Télédensitê (lignes téléphoniques,,", 100 habitanlS) Demande en télénhones Total Satisfaite Yo LiSle d'attente Te~ d'attente (moyenne annuelle) Coùt du télénhonc en USS Connexion 324,484,000 296,508,400 12,310,900 262 1719 1068 4054 35,14 4004 837,145,700 97.0 3D 772,500 192.228,400 97,1 10386,600 321.204,000 11,838,200 288,761.000 984 4,864,600 12,223,400 99,9 9,900 2,4 08 09 1.2 0,3 62 77 86 113 108 139 84 117 t05 114 55 79 50 5,7 0,08 9.6 8.0 0,07 0,04 7,8 9,7 0,10 8,3 17,6 007 8,6 14,3 Dm 3J 182514,100 8,50~,300 12,7 6,867,700 1.38% Taxes SUT le matériel TIC 4,4 63 5,5 156,508,500 31.39% 10 554,636 77,093,000 1.1 144,413.100 28,1)6% 15326,379 lO.g4% 140,591,000 106 774 2.18 158 2,432 900 216 418 8,84% 5,39% 274,7~6 Nombt"e approximatif de micros pour 100 habi..n.. Nombre de postes radio Total (milhems) Nombre de postes radio 1 Dar 1000 habitants 96.4 5,7 498,666,700 100,0Q''{' 141,382,198 100,00'/0 455.366,000 O,ll)Ct/. 7,601,000 Nombre approltiTTlltif de micros 3Ç2,67 1,000 23,044,700 84.3 3,677,400 (Habitations) (Affaires) Abonnement mensuel (H'.birations) (Arrair..) Les 3 lTUl d'lDDellocal Abonnement COJ11)lré % au GDP .,.,. caDi.. 1999 Nombre d'internautes %mondiaJ Nombre de serveurs Internet %mondi.l 1,044,884,600 36.60% 218,295,000 2,731,944 I.Q3% 11,879,000 17,94 2657 39,91 531 81 : 31 255 729 1,011 1,011 1,28% 3,12% 1,70% 0% 7.41% 112,496,371 31 1.71% 79S1'1o importë' .smn.u: World Teieco",,"unicartolf Indkotors JOO1. I1U (Ali art ]()()()jiglireJ: e.xcep' rh, "u"'~,. ofj"",."" userr.ltoslS and estiMa.rd PC! which .~: (I~for JODl) UNESCO's IrtJ/itulr for SwtÜÛCJ ( Itnp:llu"escoJ/Q,.lo!nrJ'Co.o"'/JtDts~"J.fIatinicJI>'eDrbootJtablfl1 C.ltA.dCo","oblejY_SJ.tm/,) 1A/1 .... 1997ftp.....j ~t': CO'"P",~dfrolf/d(,ltQ obllJilf"from Offiu ofJRfo,.",atio1l Ttc1moIGRies.ln,ernational Trark Ad",UtUlrQlioll. U. S. Depa"",e", ofComml!!"t"t' (lttrp-//exponit.ila.doc.gov/ocl>tlTanjJTa.fUp 76fd:62JjrJCDcJ28j1565JaOO679a6015J03~()()jVr.52016dlJ51565Ja0068d5e5!0pe1l DcKwmellt) En conséquence, le continent a besoin d'importants investissements pour développer sa base infrastructurelle en vue d'atteindre les objectifs arrêtés par l'Initiative" Société de l'information en Afrique" (AISI) et plus récemment par le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), 2.2 Cadres politique et réglementaire Les progrès réalisés dans la mise en place des cadres réglementaire et politique sont encourageants. En 2002, 35 pays avaient mis en place des organes réglementaires pour superviser le secteur, avec 15 qui avaient partiellement privatisé les réseaux fixes publics de télécommunications, tandis que quatre autres avaient introduit le système d'opérateurs de la deuxième ligne fixe, Le nombre de pays ayant introduit des services à valeur ajoutée tels que l'Internet et les services de téléphonie mobile a aussi augmenté, Selon l'UIT, la majorité des pays africains (56 %) permettent maintenant la concurrence dans les réseaux de téléphone cellulaire mobile. Le résultat est que les services mobiles connaissent une croissance considérable qui dépasse, dans certains cas, la téléphonie fixe. La tendance de cette dernière est de 103 Le NEPAD, el~iellx politiqlles, (icol/omiqlles et sectoriels privatiser partiellement les opérations d'exploitation du réseau public de télécommunications en vendant des actions à des partenaires stratégiques, généralement une société de télécommunication du monde développé. Quoique limitées en termes qualitatifs, ces mesures ont encouragé l'amélioration de l'infrastructure de télécommunications dans la région. Un certain nombre de pays ont aussi commencé à mettre au point des stratégies nationales globales des TIC en vue de promouvoir la capacité de l'infrastructure et de réglementation comme une action prioritaire. Le fossé structurel dans le domaine de l'infrastructure constitue un obstacle très sérieux à la croissance économique et à la lutte contre la pauvreté. Le volet TIC du NEPAD devrait prendre en charge cette dimension et susciter un investissement massif dans l'infrastructure physique des TIC. 2.3 Initiatives des TIC en Afrique L'Initiative • Société de l'information en • Préparé par un groupe d'experts de haut niveau Afrique. (AISI) est la désigné par la 21 9 Session de la Conférence des première initiative de la Ministres de la CEA qui est composée des 53 ministres africains du développement économique et social et de région qui fournit un la planification; cadre d'action conti• Adopté par la Conférence des Ministres de la CEA nental global considéré responsables du développement économique et social et de la planification à Addis-Abeba (Ethiopie) en mai comme la base des acti1996 ; vités menées au cours • Ratifié par les ministres africains des télécommunications à l'occasion de la Conférence régionale des 6 dernières années. africaine pour le développement des télécommuniAISI a été adoptée à cations tenue à Abidjan (Côte d'Ivoire) en mai 1996 ; • Lancé lors de fa Conférence sur le thème" Société de plusieurs niveaux et par l'information et développement .. qui s'est tenue à beaucoup de partenaires Midrand (Afrique du Sud) en mai 1996 ; . en tant que position • Adopté par la Conférence des Chefs d'Etat et de gouvernement de l'OUA à Yaoundé (Cameroun) en commune africaine dans juillet 1996 ; sa quête, non seulement • Salué par par le Sommet du G-a à Denver en 1997 • Exposé comme modèle au cours du Forum pour le de combler le fossé développement de l'Afrique de 1999 numérique, mais plus • Devenue "la position commune africaine pour une inclusion numérique de l'Afrique" encore, de créer des • Adoptée par la Conférence sur le Financement du opportunités numériques NEPAD (Dakar) en avril 2002 comme base du volet et d'accélérer l'entrée du TIC du NEPAD continent dans l'économie mondiale fondée sur le savoir. Elle sert aussi de cadre de l'ONU pour la coordination des TIC dans le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD). En outre, beaucoup d'initiatives ont été introduites par le système des Nations Unies, les agences de développement internationales et bilatérales ainsi que les communautés économiques régionales telles que le COMESA, la CEDEAO, la SADC, l'UEMOA et l'UMA. Certaines de AISI- L'Agenda numérique de l'Afrique 104 Les T'ecbllologies de l1/iformatioll et de la COl/ll/1l1llicatioll ces initiatives complètent les activités de l'AISI, tandis que d'autres, malheureusement, constituent un chevauchement des efforts. En plus de l'AISI, les principales autres initiatives entreprises en Afrique pour le développement des TIC sont les suivantes: • L'initiative Acacia pour l'Afrique dirigée par le CRDI, qui est un programme intégré de projets cie démonstration et des activités de recherche et développement mis en place pour traiter des questions d'applications, de technologie, d'infrastructure et de politique; • L'initiative Leland qui est un programme du gouvernement américain, dont le but est de fournir une connectivité Internet totale à plus d'une vingtaine de pays africains; • L'Initiative Internet pour l'Afrique, parrainée par le PNUD, dont l'objectif est de renforcer les infostructures internet nationales et de promouvoir le développement des structures de base aux niveaux national et régional, y compris le renforcement de capacités techniques nationales et les compétences télécoms de 15 pays africains; • Africa Connection qui a été lancé il y a près de 4 ans et qui est en cours d'institutionnalisation pour entreprendre des activités d'extension de l'infrastructure dans le cadre de la restructuration de l'Union africaine des télécommunications (UAT) ; • La Francophonie, dont le Fonds de l'autoroute de l'information appuie des projets de promotion de l'adoption et de l'utilisation des TIC dans la production des contenus en français. 2.4 Initiatives internationales On s'accorde de plus en plus à reconnaître qu'il est nécessaire d'améliorer les opportunités numériques conduisant au lancement des initiatives potentiellement importantes et nouvelles à l'appui des applications des TIC dans le monde en développement, particulièrement en Afrique. Un comité international d'experts de haut niveau s'est réuni en avril 2000 sous l'égide du Conseil économique et social des Nations-Unies (ECOSOC). Ils ont lancé un appel à l'organisation mondiale pour qu'elle joue un rôle de leader et de catalyseur afin d'aider à combler le fossé numérique et à accélérer le développement en exploitant le potentiel de développement des TIC. Par la suite, le Comité a recommandé une rencontre des principaux partenaires en une Équipe spéciale internationale sur les TIC et la création d'un fonds d'affectation spéciale y relatif. Dans une déclaration ministérielle en juillet 2000, n:cosoc a adopté les recommandations de l'Equipe de haut niveau et a reconnu le rôle crucial des partenariats entre gouvernements, institutions cie développement bilatérales et multilatérales, le secteur 105 Le NEPAD, el~ieux politÎljlles. économiques et sectoriels privé et d'autres acteurs concernés s'agissant de mettre les TIC au service du développement. Le Sommet du millénaire qui a été organisé par les Nations-Unies en 2000 a entériné la Déclaration ministérielle de l'ECOSOC et a annoncé de nouvelles initiatives importantes dont trois sont liées aux TiC. L'Equipe spéciale a été lancée en novembre 2001. D~lOS le même ordre d'idées, le Sommet du G-S, le groupe des nations industrialisées, a adopté, lors de sa réunion tenue à Okinawa en juillet 2000, la Charte d'Okinawa sur la Société de l'information mondiale et a décidé de créer le Groupe d'experts sur l'accès aux nouvelles technologies (GEANT). La recommandation du GEANT au GS, à savoir de renforcer le cadre réglementaire et politique, développer les ressources humaines, accroître la connectivité et encourager les PME à participer au commerce électronique mondial, a été approuvée par la réunion tenue en 2001 à Gênes. En outre, le PNUD vient de lancer une Initiative de l'opportunité numérique pour appuyer l'élaboration des stratégies nationales des pays en développement et exploiter les TIC dans les secteurs clefs du programme de développement. 2.5 Parlenariats dans le domaine des ne Étant donné l'ampleur du programme de développement de l'Afrique, il est indispensable de forger des partenariats dans la mise en oeuvre des opportunités numériques sur le continent. A travers des partenariats qui reflètent la participation active de toutes les parties prenantes, les ressources peuvent être maximisées pour renforcer les programmes et les réalisations existants. Le véritable défi pour tous les concernés serait d'éviter la mise en place de programmes isolés et la du plication des efforts. Les partenariats pour les TIC au service du développement de l'Afrique se sont améliorés ces dernières années, principalement à travers le Partenariat pour les technologies de l'information et la communication en Afrique (PICTA) - un réseau d'organisations publiques et privées, nationales et internationales, ayant des programmes sur les TIC en Afrique, Sa composition hétérogène inclue les organisations des Nations Unies, les gouvernements, les sociétés multinationales et les principales ONG ayant des programmes de TIC sur le continent, ainsi que des donateurs, Outre le programme de travail individuel de ses membres, des actions de collaboration ont été initiées dans les domaines tels que le développement des plans NICI, la prestation de services consultatifs aux pays, la formation et le renforcement de capacités, les mécanismes d'évaluation de l'impact et des projets pilotes dans des secteurs clefs tels que l'éducation, la santé et les affaires. Les membres du PICTA et la CEA coordonnent la section africaine du Partenariat pour le savoir mondial (GKP), en vue de renforcer la voix du continent sur l'échiquier international. Les groupes de la société 106 LI'5 TI'cbllOlol{il'5 dl' /'Information et de la COnnnTmiCllfioll civile, la diaspora et les organisations des TIC ont aussi fait des progrès considérables dans la promotion du rôle proactif de l'Afrique dans la promotion de ses intérêts dans des cadres tels que l'üMC, l'DIT et l'ICANN. En sa qualité de Commissaire de la Commission mondiale pour l'infrastructure de l'information (GIIC), la CEA a par exemple initié des actions auprès du secteur privé. 3. Perspective d'Avenir 3.1 Nécessité des stratégies nationales et régionales des ne Les progrès réalisés par le monde en développement au cours des deux dernières décennies montrent que les TIC pourraient devenir un agent de changement dans le processus de développement. Cependant, la concrétisation de cette théorie exige des efforts et des stratégies concertés aux niveaux national et régional. La croissance économique rapide et soutenue des économies de l'Asie de l'Est et du Sud-est avant leur crise financière et économique, constitue un point de référence pertinent pour les interventions gouvernementales stratégiques visant à stimuler la croissance au moyen des TIC. La transformation des sociétés industriellement faibles basées sur l'agriculture de subsistance en économies fondées sur l'information et le savoir demande l'adoption et la mise en œuvre de politiques et de stratégies socio-économiques globales et intégrées Stratégies de l'infrastructure nationale de basées sur les TIC. l'information et de la communication en Afrique La formulation des (NICI) politiques et des straté- L:AISI affirme que même si les pays africains doivent tirer profit des TIC pour faciliter leur processus de gies détermine en réalité aussi développement socio-économique, ils ne peuvent le rôle des pays et leur espérer transformer leurs sociétés industriellement capacité de mettre au faibles basées sur l'agriculture de subsistance en économies fondées sur l'information et le savoir sans point des innovations développer et mettre en application des politiques, des qui leur assurent des stratégies et des plans socio-économiques globaux et avantages comparatifs intégrés basés sur les TIC, Le NICI implique une série que doivent suivre les gouvernements en vue dans l'économie mon- d'étapes d'exploiter les TIC pour le développement et de mettre en diale. C'est pour cette œuvre l'AIS!. Ces étapes sont notamment les suivants: raison qu'au cœur des • e-readiness: Evaluation de l'état de préparation numérique des pays - pour effectuer les études de base politiques sur les TIC, les et définir le problème général et les domaines États-Unis ont lancé la prioritaires National Information • e-politique - pour déterminer l'engagement du et la direction stratégique Infrastructure (Infra- • gouvernement e-stratégies et actions - pour déterminer comment les engagements politiques sont traduits en programmes structure nationale de concrets et en initiatives pour la mise en oeuvre. l'Information) (NIl) et Même si c'est à différents niveaux de développement, que le Royaume Uni a près de 28 pays africains sont en cours de dévelopmis l'accent sur le pement des politiques et stratégies nationales des TIC. La moitié d'entre eux ont déjà terminé le processus de National Learning Grid développement de leurs plans et stratégies des TIC et (Grille nationale du sont entrain de mobiliser les fonds pour la mise en œuvre savoir) (NLG), S'agissant de leurs divers programmes et projets. ]07 Le Nl:."PAD, enjeux politiques, c'Gol/omiqlles et sectoriels des pays en développement, différentes stratégies ont été adoptées par divers pays pour répondre aux défis de la mondialisation par l'utilisation de la technologie de l'information. Certains ont mis l'accent sur le développement des TIC dans le secteur de l'économie - soit pour accroître les exportations (Costa Rica et Taiwan), soit pour renforcer leur capacité interne (Brésil, Inde et Corée). Ces économies ont renforcé l'orientation du marché de leurs politiques et institutions économiques, ont progressivement supprimé les barrières au commerce et à l'investissement et ont accéléré les changements dans la production des biens et des services. Plus encore, ces pays ont fourni des efforts concertés pour renforcer leurs capacités humaines afin de permettre à leurs citoyens de participer à l'économie de l'information et du savoir. Les autres poursuivent les stratégies qui ont utilisé les TIC comme un facteur habilitant d'un plus grand processus de développement socio-économique. D'aucuns ont principalement mis l'accent sur le repositionnement des économies de leur pays pour leur assurer la compétitivité dans l'économie mondiale (L'Ile Maurice, la Malaisie, la Tunisie, Trinidad et Tobago) et d'autres dont la majorité des pays africains tels que l'Afrique du Sud, le Mozambique, l'Égypte, le Sénégal et le Rwanda, ont focalisé l'attention sur les TIC dans la poursuite des objectifs de développement. Jusque-là, l'expérience a montré que des politiques nationales globales sont essentielles pour l'intégration des TIC dans le programme général de développement. La plupart des pays africains ne doivent pas commencer à zéro le développement de leurs politiques. Des progrès considérables ont été déjà réalisés dans la définition des stratégies globales axées sur la croissance économique. Avec l'assistance de la CEA et de ses partenaires et dans le cadre de l'AISI, près de la moitié des pays du continent ont des plans, des stratégies et des politiques de NICI qui articulent les objectifs à long terme de leur programme de développement national. L'Ile Maurice, le Maroc, le Mozambique, le Rwanda, le Sénégal et la Tunisie ont terminé leurs études de besoin et sont occupés à élaborer des plans d'action dans les domaines prioritaires de leurs économies. Certains pays ont maintenant des plans d'action prêts pour la mise en oeuvre, qui ont besoin de l'assistance des partenaires, tandis que d'autres sont à divers stades de ce processus. Certains pays ont aussi adopté une approche combinée en développant leur NICI pendant qu'ils exploitaient en même temps les applications des TIC dans les secteurs clefs tels que l'éducation et le commerce. L'Égypte, l'Ile Maurice, le Maroc, l'Afrique du Sud et la Tunisie ont utilisé cette approche et ils ont réalisé des progrès considérables. Ils ont commencé à développer des stratégies pour le commerce électronique et à ériger des parcs de technologie de l'information pour attirer l'investissement étranger direct, stimuler une économie basée sur le savoir, créer des emplois pour les jeunes et exploiter le potentiel des TIC. 108 Ü'S Tecbl1oloUies de /JlIjormlllion el de la Communication 3.2 Nécessité de tramfonnation du cadre réglementaire La régulation des télécommunications et du secteur de la radiodiffusion est relativement nouvelle en Afrique. Qu'ils soient autonomes ou sous le contrôle direct de l'État, les régulateurs ont eu peu d'expérience pratique et ont besoin de renforcement de leurs capacités. La mise en œuvre d'un processus de régulation efficace requiert certaines compétences et capacités pour équilibrer les impératifs juridiques, politiques, économiques, sociaux et culturels, par rapport aux conditions et aux intérêts locaux, nationaux et régionaux. Il s'en suit que la transformation des cadres réglementaire et juridique est subordonnée à la capacité de ses régulateurs à fonctionner efficacement aux niveaux national et régional. Des efforts ont déjà été enregistrés dans ce domaine avec plusieurs associations sous-régionales de régulateurs qui essaient d'aider leurs membres nationaux respectifs en leur assurant la formation et en introduisant des initiatives d'harmonisation au niveau régional. Ces organes doivent être soutenus et renforcés dans le cadre du NEPAD afin de pouvoir jouer plus efficacement leur rôle de prestation de services consultatifs et de renforcement de capacités. En conséquence, les réseaux de régulateurs de la région (tels que l'Association pour la régulation des télécommunications en Afrique australe - TRASA, l'Association pour la régulation des télécommunications en Afrique de l'Ouest - WATRA et l'Association des régulateurs de l'Afrique centrale ARAC) sont essentiels pour le renforcement des capacités de régulation en donnant des orientations dans le développement de l'infrastructure régionale tout en harmonisant les politiques nationales qui constituent la base de l'intégration du continent. Le renforcement des capacités des régulateurs, des magistrats, de la société civile et du secteur privé dans le secteur des télécommunications, la mise en place de règles, de procédures et de principes applicables, qui couvrent l'octroi des licences, la fixation des tarifs, l'interconnectivité, l'accès universel, la gestion technique des ressources et l'édification d'un secteur de communication solide et viable sont les tâches à entreprendre d'urgence. La mondialisation et son impact sur les secteurs du commerce et des finances a stimulé l'émergence d'autres questions controversées, telles que la nécessité d'élaborer des lignes directrices et la régulation des activités de commerce électronique à l'échelle mondiale, y compris les questions relatives à la signature électronique, le cryptage, la sécurité, les délits informatiques, la protection de la vie privée et du consommateur. Au niveau global, telles sont certaines des questions auxquelles les régulateurs du monde entier seront confrontés et il est nécessaire de mettre au point des stratégies spécifiques à l'Afrique pour s'assurer que le continent tire le maximum d'avantages de ces opportunités mondiales émergentes. 109 Le NE"'PAD, ellie/Ix po/itiqlles, c'co/lOl1Iiqlles et sectoriels 33 Nécessité de l'application des TIC dans les domaines prioritaires identijlés par le NEPAD Le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique peut bâtir sur les efforts déjà en cours pour accélérer le développement social et économique de l'Afrique par les TIC. Le cadre des TIC, tel que défini par le NEPAD, est constitué des cinq domaines prioritaires interliés suivants, qui sont pertinents pour les objectifs arrêtés par les dirigeants africains: i) renforcement des mécanismes de prévention et de gestion des conflits, (ii) protection de la démocratie et et des droits humains, (iii) restauration et maintien de la stabilité macroéconomique, (iv) relance du développement humain et du développement dans les secteurs clefs et (v) renforcement du plaidoyer pour la participation égale des femmes au développement. En conséquence, la définition d'un cadre des TIC qui touche tous les principaux objectifs du NEPAD devrait inclure ce qui suit : • L'administration publique, les initiatives de gouvernement électronique et de e-démocratie pour promouvoir la paix et la sécurité, la démocratie et la gouvernance publique et d'entreprises; • Les applications des TIC dans les domaines de la santé et de l'éducation en vue de la relance du développement humain; • L'infrastructure visant à améliorer l'accès au savoir, au développement et à la promotion économiques; • La participation du secteur privé pour promouvoir l'entreprenariat par les TIC; • L'exploitation des TIC pour le développement de l'agriculture et la gestion de l'environnement; • La promotion d'un environnement politique et régulateur favorable pour favoriser l'investissement, le partenariat et la participation de tous les acteurs. Les applications dans ces secteurs sont décrites dans les lignes qui suivent. Les priorités pourraient être définies suivant les recommandations du Forum sur le Développement Africain de 99. En effet, le premier Forum pour le développement (ADF 99), organisé sur le thème: l'Afrique face aux défis de la mondialisation et de l'ère de l'information, a identifié quatre domaines prioritaires qui appellent l'attention et l'action de l'Afrique. Il s'agit des jeunes et de l'éducation, de la santé, des affaires et du commerce, ainsi que des questions relatives au cadre politique et réglementaire. Depuis lors, avec les orientations du Comité technique consultatif africain (ATAC) de l'AISI et en collaboration avec ses principaux partenaires, la CEA a initié une série de projets dans les quatre domaines prioritaires définis. 33.1 Amélioration de la gouvernance et de l'administration publique Les processus de démocratisation et de pluralisme politique en Afrique ont stimulé le dialogue croissant et la participation populaire 110 Les Tec!.nlOloMies de 1'1Ii!ornlCltiol/ et de la COl/lml/nicatiol/ aux affaires nationales. Les TIC promettent de favoriser davantage le dialogue entre les gouvernements et leurs citoyens, renforçant ainsi le processus de gouvernance. De même, les TIC peuvent aider les gouvernements dans leurs efforts de réforme de leurs secteurs publics en améliorant l'efficacité de leurs services et administration. L'exploitation des TIC dans la réalisation de la bonne gouvernance et les réformes des services publics pourrait faciliter les réformes du secteur public et améliorer la performance des gouvernements, permettre aux différents ministères, départements, divisions et agences de se connecter les uns aux autres en stockant et en échangeant des données vitales et volumineuses. Cela renforcera en retour la capacité des gouvernements à rechercher, développer et mettre en oeuvre des stratégies et des politiques bien éclairées. En mettant en place les systèmes d'information, les TIC peuvent assurer une plus grande accessibilité aux services publics et à l'information par les citoyens, encourager la participation du public et chercher les voies et moyens d'améliorer l'efficacité et la bonne gouvernance au niveau du secteur public. L'utilisation du courrier électronique pourrait réduire la procédure hiérarchique et la bureaucratie inutile et trop longue des institutions publiques. De même, les technologies pourraient aussi être utilisées pour promouvoir les droits humains, effectuer les réformes de la magistrature et permettre une plus grande accessibilité des procédures parlementaires aux citoyens ordinaires. 3.3.2 Dél'e!oppement humain, santé et éducation 3.3.2.1 L'utilisation des TIC dans le secteur de l'éducation La réalisation du développement humain pour les 800 millions d'habitants que compte l'Afrique pour leur assurer une vie productive et créative, peut être facilitée par l'amélioration de l'accès à l'information et au savoir, qui constituent la base d'une vie plus saine et d'un Réseau pour l'Apprentissage en Afrique meilleur niveau de vie. Le Réseau pour l'apprentissage en Afrique est l'une des Cependant, les systèmes initiatives issues des travaux du FDA 99. Cette initiative suppose au préalable que les technologies de d'éducation africains l'information et de la communication peuvent apporter connaissent une crise des changements significatifs au secteur de l'éducation. profonde. Les écoles sont Les trois piliers de cette initiative sont les suivants: 1. les TIC dans les écoles et création d'une structure surpeuplées, leur perrégionale, SehoolNet A Mea, dont le but est de sonnel est insuffisant et soutenir les activités de travail en réseaux entre les elles n'ont pas suffiécoles aux niveaux national et régional; 2. VarsityNet, qui établit la connectivité au niveau des samment de ressources universités et des institutions apparentées d'enseipour s'acheter le matériel gnement supérieur et de la recherche et stimule le développement de la production des contenus et didactique et d'apprenl'échange d'informations dans ce cadre. tissage, etc. 3. OOSynet, une initiative de travail en réseau des Les technologies de jeunes qui s'occupe des jeunes non scolarisés (OOSY) aux niveaux national et régional. l'information et de la 1 1 - - - _. . . _. __.. _ . - - - - - - - - _. . • 1/1 _.- Le NEPAD, enjellx polifit/lles, économiqlles et sectoriels communication offrent des opportunités de nouvelles formes d'apprentissage et d'enseignement dans une économie du savoir naissante, qui impose des impératifs d'adoption d'urgence de nouveaux programmes d'enseignement à l'aide des présentations audio-visuelles et des programmes créatifs de résolution des problèmes. De même, les capacités interactives de l'Internet permettent des conversations et des exposés en temps réel entre étudiants et enseignants sur de grandes distances. Si elles sont bien exploitées, les TIC pourraient jouer un rôle _____._______ important pour permettre SCHOOLNET AFRICA à ceux ayant abandonné les études d'acquérir de Adoptée par le FDA 99 comme l'une des composantes du grandes compétences Réseau d'Apprentissage en Afrique, la mission de pour retourner à l'école Schoolnet Africa est de renforcer l'éducation en Afrique en assurant l'accès et l'utilisation durables des TIC aux ou entrer dans le marché enseignants et aux élèves au moyen d'un partenariat de l'emploi. De même, entre les initiatives nationales du réseau scolaire et leurs différents intervenants. les institutions d'enseignement supérieur peuvent Au cours des trois à cinq prochaines années, SchoolNet jouer le rôle de laboAfrica se propose ce qui suit: • Appuyer le développement des réseaux scolaires ratoires de recherche & nationaux à travers l'Afrique. développement et/ou • Faciliter la connexion de base, à bon marché, pour les écoles d'Afrique des promoteurs d'initia• Faciliter le renforcement de capacités et du savoir-faire tives basées sur les TIC pour l'intégration des TIC dans l'éducation. et devenir des .. centres • Appuyer le développement du contenu éducationnel local dans le contexte des TIC. du savoir .. de leurs pays. • Collecter, développer et diffuser l'information et les Cependant, les stratégies ressources nécessaires pour le travail en réseaux scolaires. nationales des TIC doivent maintenir l'équilibre entre les avantages de l'investissement dans l'informatique et l'accès à l'Internet et le besoin d'améliorer les services de base de l'éducation. 3.3.2.2. Les nc et la santé L'insuffisance des infrastmctures de la santé empêche l'accès aux soins de santé de base et la prestation de services sur le continent africain, particulièrement dans les zones rurales. Selon des statistiques récentes, il y a en moyenne 1 médecin pour 400 personnes dans la catégorie de la population à revenu élevé et pour 1 000 habitants de la catégorie à faible revenu en Afrique. Dans les milieux mraux, les disparités sont encore plus prononcées avec un médecin pour 20.000 personnes. L'avènement et la diffusion des TIC commencent à améliorer l'efficacité cie la prestation des services de soins de santé. Il est maintenant possible de faire des consultations en ligne et d'échanger le savoir et les informations entre médecins. Grâce aux diverses applications de la télémédecine, les TIC peuvent aussi aider à réduire les disparités entre les services disponibles en milieux urbain et rural et réduire les coûts de transport des patients vers les infrastmctures urbaines. Comme 112 Les Tecbl1o{oJ.;i(Js d(J {'!I?!iJIïI/{/fioll (JI de {a COIlln/lIllic{/fioll cela a été reconnu au cours du FDA 2001, les TIC pourraient répondre aux défis du VIH/SIDA et favoriser des programmes de santé publique à bon marché, en vue de réaliser ce qui suit : • Assurer la formation dans le domaine de la santé par l'utilisation de l'expertise et l'investissement des Africains de la diaspora en initiant des programmes d'apprentissage à distance, de vidéoconférence et de télétravail ; • Promouvoir le débat et la prise de conscience du public sur l'importance des systèmes et des réseaux nationaux d'information sur la santé; • Créer et appuyer les réseaux qui améliorent l'accès à l'information et l'interaction entre les professionnels africains de la santé et leurs homologues; • Déployer des systèmes communautaires d'information sur la santé dans le cadre des stratégies novatrices pour en appuyer l'accès; • Développer des projets de télémédecine/télésanté dans le cadre d'une stratégie du système national d'information sur la santé; • Développer des systèmes d'information multimédia et des sites web d'echanges pour assurer l'éducation à la santé aux étudiants, aux chercheurs et au public en général en ce qui concerne particulièrement la lutte contre le VIH/SIDA. 333 Agriculture et environnement L'agriculture est le principal secteur dans la plupart des économies africaines. Cependant, l'inefficacité des techniques agricoles et les politiques économiques irréalistes, aggravées par les catastrophes naturelles, posent de sérieux défis environnementaux au continent avec des conséquences dévastatrices. Ainsi, la sécurité alimentaire et la lutte contre la pauvreté sont devenues le défi majeur auquel sont confrontés les pays africains suite à ces facteurs susmentionnés. Les pays ont besoin d'améliorer leurs pratiques de gestion de l'utilisation des terres, renforcer leurs intrants et techniques agricoles par la diffusion efficace des conclusions de recherche, surtout auprès des agriculteurs et par la promotion du négoce agricole qui assure des liaisons efficaces entre les secteurs agricole et industriel. Ainsi, l'introduction des TIC et l'installation des systèmes d'information pourraient considérablement aider les gouvernements dans leur travail de planification, en leur assurant l'alerte précoce et d'autres systèmes de géo-information. La dégradation de l'environnement suite à la déforestation, à l'érosion des sols, à la désertification et à la pollution urbaine et industrielle n'est que l'un des défis auxquels sont confrontés les pays africains. La gestion de l'écosystème fragile du continent et des graves catastrophes naturelles causées par l'homme dont l'ampleur influe négativement sur la vie et le bien-être des africains est d'une importance cruciale, La protection effective de l'environnement par tous les secteurs de la société exige des données à jours et pertinentes, ainsi que des 113 Le NEPAD, elliellx politiques. économiques et sectoriels systèmes d'information appropriés. Les TIC fournissent non seulement aux gouvernements les moyens de planifier et de gérer leurs écosystèmes, mais elles sauvent aussi les vies et protègent les moyens de subsistance notanu11ent par les systèmes d'alerte précoce et par l'utilisation de la télédétection. Des données nationales vitales pourraient être stockées et récupérées avec une facilité relative en créant des observatoires et en encourageant l'échange et le partage de l'information entre les services publics et les différents groupes de la société. 33.4 Développement du secteur privé et entreprenariat Le vieux paradigme qui voulait que les gouvernements soient considérés comme les principaux acteurs du développement national change. Le pouvoir et les ressources du secteur privé, local et étranger, dans la mise en œuvre du programme de développement du continent, ne peuvent plus être sous-estimés. Il y a une forte tendance à encourager le développement d'un secteur privé local solide qui devra adopter de nouvelles stratégies pour la compétitivité mondiale et la recherche de solutions pratiques pour les affaires avec des partenaires étrangers et avec les gouvernements. En conséquence, il y a encore beaucoup à faire pour renforcer la capacité des institutions financières locales pour que leur contribution puisse soutenir le secteur des TIC qui émerge dans les pays. Par ailleurs, des politiques devraient être mises en place pour renforcer les capacités d'entreprise, de gestion et techniques du secteur privé local. Le moment est mûr pour les interventions dans ce domaine du fait que l'Afrique a fait des progrès économiques importants au cours des années 1990, avec plusieurs pays qui enregistrent un taux de croissance à deux chiffres. Par conséquent, le marché est devenu favorable à l'investissement aussi bien local qU'étranger. L'Afrique est considérée comme un marché vierge pour les grandes sociétés des TIC, mais l'absence d'instruments de régulation et de politiques adéquats continue à décourager l'investissement et l'innovation. La mise en place de ces cadres juridique et institutionnel peut attirer l'investissement étranger et assurer l'opportunité de développement du secteur privé local par des coentreprises. Le développement des petites et moyennes entreprises pour exploiter les TIC et utiliser les activités de commerce électronique pour la compétitivité sont aussi essentiels pour la participation de l'Afrique à l'économie mondiale de l'information. 4. Stratégies de mise en œuvre 4.1 Néces... ,Ué de prendre en compte les questions transversales Les efforts visant à couvrir avec succès les six domaines interliés des TIC dans le cadre du NEPAD exigent une synergie entre la technologie et le développement social. Il y a un besoin pressant d'assurer l'équité Jl4 Les Techn%p,ies de IInformation u( de la Commllnication et l'égalité dans la société de l'information, si les pays doivent devenir des sociétés du savoir. En conséquence, des thèmes tels que l'accès, l'égalité entre les sexes, les jeunes, le développement des contenus, la formation et le droit il la propriété intellectuelle devraient être pris en compte dans les programmes relatifs aux questions des TIC en Afrique. Ces questions transversales posent non seulement des défis de mise en oeuvre mais servent aussi de repères pour la poursuite de l'Agenda du NEPAD. 4.1.1 Accès L'accès des millions d'Africains aux TIC est soumis il un certain nombre de facteurs qui constituent des barrières. Les groupes marginalisés tels que les femmes, les jeunes et les pauvres ainsi que les populations rurales et défavorisées font souvent face à ces obstacles. En traitant de l'accès des différents acteurs de la société, les questions de coûts, le rôle de la femme, la langue, la dichotomie rural-urbain sont des facteurs qui doivent être pris en compte et qui sont déterminants pour assurer l'équité. La promotion de l'accès ne devrait pas être seulement limitée au domaine politique, même si la disponibilité du cadre peut faire la différence, mais elle doit être soutenue par des actions et des programmes qui favorisent les intérêts des TIC de chacun des partenaires de la société. Ainsi, la société de l'information ne serait pas l'apanage des classes privilégiées et ne perpétuerait pas les inégalités. 4.1.2 Genre La question de genre par rapport à l'accès et à l'applicabilité des TIC est tout aussi importante qu'assurer l'accès. La formulation de la politique et les processus de sa mise en oeuvre devraient inclure et intégrer des lignes directrices et des stratégies pour s'assurer que dans la société, aussi bien les hommes que les femmes, ont accès aux TIC. Ces stratégies devraient tenir compte des besoins spécifiques aux deux sexes dans l'apprentissage des TIC. En conséquence, les stratégies devraient éviter les disparités entre les sexes et fournir la base pour l'utilisation des TIC, particulièrement par les femmes, en vue d'améliorer leur niveau de vie et d'en faire des participantes productives dans l'économie émergeante du savoir. Il y a des craintes et des dangers que les femmes africaines ne soient laissées en arrière si des politiques et des programmes pertinents et appropriés ne sont pas mis en place. 4.1.3 Lesjel/nes La population africaine a la plus jeune structure d'âge avec près de 45 % des enfants de 15 ans, contre 30 % dans le reste du monde. En conséquence, les jeunes d'Afrique constituent un important électorat 115 Le NEPAD, e/ljeux politiques, économiques et sectoriels pour les gouvernements lorsqu'on considère les cadres et les stratégies des TIC, dans la mesure où ils sont la future force laborieuse d'un monde qui sera dominé par le savoir. Les jeunes d'Afrique seront les premiers acteurs pour relier le continent à l'autoroute de l'information. Cependant, le genre de politiques d'éducation basées sur les TIC qui sont mises en place, aux niveaux aussi bien officiel qu'informel, détermineront le niveau de préparation des jeunes africains à entrer dans l'économie du savoir et à saisir les opportunités d'emploi qui en résultent. Dans la création de l'environnement favorable à l'utilisation efficace des TIC, les jeunes méritent une attention particulière. 4.1.4 Développement de contenus Le défi auquel fait face l'Afrique en particulier est de développer un contenu qui répond aux besoins d'information spécifiques de ses populations. Si cela est fait, l'impact des technologies Internet sur le développement et sur les Africains sera plus significatif. En conséquence, il est nécessaire d'effectuer une évaluation profonde des besoins d'information dans les domaines socio-économiques clefs et les ressources d'information de plus en plus croissantes sur le web, notamment les portails Internet qui fournissent une information statique et à jour pouvant influer sur la vie et le travail quotidiens des populations. Cette initiative particulière renforcerait la culture de l'accès Internet et autres matériels des TIC par les populations ordinaires, spécialement avec l'utilisation des langues africaines. L'introduction des langues africaines sur le web devrait être encouragée pour démocratiser l'accès et permettre à la majorité de la population de bénéficier de l'économie du savoir. 4.1.5 Formation, développement des compétences et renforcement de capacités La gestion des TIC, la fourniture d'accès à l'information et la récupération de l'information utile de son réseau nécessitent un certain niveau de compétences techniques et de connaissances Internet. En Afrique, le niveau de compétences informatiques et Internet est extrêmement faible, ce qui bloque sa transformation en société du savoir même lorsque les autres facteurs sont réunis. Les compétences dans les TIC et les méthodes de gestion de l'information et de l'apprentissage doivent être inculquées à tous les niveaux de la société - les enfants, les jeunes, les femmes et les générations plus âgées, individuellement et collectivement. C'est là qu'il faut orienter beaucoup d'efforts pour multiplier les opportunités pour les jeunes à mesure qu'ils deviennent la nouvelle génération des travailleurs du savoir. Pour garantir la capacîté des générations futures à utiliser les TIC, la formation dans les technologies Internet devrait faire partie intégrante des programmes d'enseignement aussi bien du système officiel qu'informel. 116 Ll!s Tl!cJ.molouil!s de /J/lformation I!t dl! la Communication 4.1.6 Droits de propriété intellectuelle (DPI) Avec la nouvelle économie mondiale, les questions relatives aux droits de propriété intellectuelle deviennent de plus en plus importantes pour les décideurs, les communautés d'affaires sur les marchés mondiaux, régionaux et nationaux, avec des implications pour le public en général et les consommateurs du monde entier. Les. systèmes de droits à la propriété intellectuelle, à savoir les brevets, les droits d'auteur et les marques de commerce sont des mécanismes juridiques traditionnels qui soutiennent et encouragent l'innovation technologique et la créativité artistique. L'avènement de l'information et de l'économie du savoir change et modifie les questions relatives aux droits de propriété intellectuelle et actuellement les pays développés cherchent à s'assurer que dans la perspective de l'économie du savoir, ces droits préservent les intérêts de leurs ressortissants. Cependant, la majorité de pays africains connaissent de graves limitations dans la mise a disposition de capacités techniques et de gestion nécessaires pour s'assurer que les questions de droits de propriété intellectuelle soient traitées au profit de l'Afrique et que le continent peut négocier de meilleures conditions dans le cadre du système global de droits de propriété intellectuelle. Les nouvelles opportunités offertes par la promotion des TIC apportent aussi de nouveaux défis tels que la préservation, la conservation et la diffusion de la diversité biologique, l'utilisation de la propriété intellectuelle par les détenteurs du savoir traditionnel, son rôle dans la protection des expressions culturelles indigènes et les implications pour le commerce électronique. En conséquence, l'initiative des TIC dans le cadre du NEPAD devrait se charger des questions de préservation des ressources culturelles, intellectuelles et économiques africaines. 4.2 Suivi et évaluation - Ana~J!se de l'impact Malgré l'investissement considérable dans les applications en faveur des TIC en Afrique, il y a une compréhension limitée de l'efficacité des interventions des agences de développement, du secteur privé et des gouvernements. Dans la mesure où l'avènement de l'ère de l'information est relativement récent, l'étude d'impact des TIC sur le processus de développement n'est pas encore bien documentée. En dehors du secteur des télécommunications, l'information est dispersée, diffuse et isolée à des applications sectorielles, des flux de l'investissement, des activités des donateurs/de financement et des secteurs industriel et des affaires. Néanmoins, il reste vrai qu'il est urgent de développer des indicateurs qui non seulement assurent le suivi du rôle des TIC dans chacun des secteurs applicables, mais aussi pour le développement des mécanismes susceptibles de permettre des évaluations exactes de leur contribution au développement économique et social 117 Le NEPAD, eIZIL'I/X poli/iqlles, rlcol1omiq/lL's e/ sectoriels du continent. En effet, les indicateurs de base pour les activités des TIC Pour développer les capacités de font encore défaut et il l'Afrique dans les domaines de la . . •. • •. " collecte, de l'analyse et de l'orgade plus en plus ; ,.:..;J nisation des données sur la est compris que l'application pénétration et l'utilisation des TIC pour le développement et pour mettre les données en Afrique des indicarelatives aux investissements dans le domaine des TIC à teurs extérieurs crée des la disposition des décideurs, le CRDI et la CEA, avec l'appui de la Commission européenne et de l'Agence distorsions. Il est donc norvégienne de coopération pour le développement nécessaire de mettre au (NORAD), ont lancé le projet Scan-TIC. Les 12 premiers point des indicateurs qui mois de ce projet d'une durée de 3 ans sont consacrés à la phase pilote au cours de laquelle le cadre de l'étude de reflètent l'environnement référence sera testé et affiné le cas échéant. africain. Le Ghana, le Sénégal, le Maroc, l'Ethiopie, l'Ouganda Un certain nombre de et le Mozambique ont été sélectionnés et bénéficient programmes d'évaluad'un parrainage pour élaborer les études de référence en tion de la préparation à utilisant des indicateurs qui reflètent les grands thèmes à savoir l'infrastructure, le développement de contenus, les l'utilisation des TIC ont applications sectorielles comme l'éducation, la santé, le été lancés par des commerce électronique. Dans le cadre d'un programme de développement échelonné, Scan-ICT se propose de agences de dévelopmettre en œuvre des "Observatoires" africains pour pement pour mesurer les surveiller la pénétration, l'impact et l'efficacité des progrès et effectuer une applications des TIC en Afrique. Ils serviront de source d'information centralisée pour les investisseurs, les analyse comparative. décideurs et les praticiens. En Juillet 2002, les premiers Cependant, il est devenu résultats du projet ont été publiés. clair qu'un effort soutenu est nécessaire pour collecter l'information et analyser les données qui doivent guider la prise de décisions et l'investissement dans les TIC. Il est aussi nécessaire de documenter les efforts d'investissement pour permettre aux décideurs de savoir si l'usage et l'application des TIC donnent les résultats souhaités. C'est dans cette perspective que le projet Scan-ICT a été conçu et lancé pour favoriser l'émergence d'une capacité africaine globale à même de collecter et de gérer les informations clefs nécessaires pour appuyer les investissements croissants dans les TIC ainsi que la transition de l'Afrique vers la société de l'information. Les mécanismes de suivi et d'évaluation dans ce domaine devront mesurer la réalisation des objectifs du NEPAD par rapport aux activités générées, en donnant des indications pertinentes sur l'impact des programmes. Le projet Scan-TIC ~ 118 Ll'S Tecl)1/olo,~il's dl' !'In/ormulio11 el de lu COIIIII/II11 icuNolI 5. Cadre de partenariat Centre des technologies de l'information pour l'Afrique: Un partenariat multidimensionnel • Inauguré lors du FDA 99, le Centre des technologies de l'information pour l'Afrique (ITCA), est un centre d'exposition et de gestion du savoir, un centre d'information et d'apprentissage à vie qui a essentiellement pour but de donner aux responsables politiques africains, les moyens de prendre part à la mondialisation. • ITCA, en partenariat avec CISCO, la Banque mondiale et avec l'appui des gouvernements coréen et japonais, organise à l'intention des femmes africaines, des cours de formation sur la technologie de création et de gestion des réseaux. • Ce même Centre, en collaboration avec l'USAID, organise également à l'intention des ambassadeurs africains en poste à Addis Abeba et aux décideurs qui participent aux conférences de la CEA, des ateliers sur les enjeux des technologies de l'information et de la communication. • ITCA crée et gère des portails sur l'expertise africaine, le gouvernement électronique, l'intégration régionale et le VIH/SIDA. L'expérience tirée du processus NICI dans les pays montre l'importance et le bien-fondé de partenariats forts dans ce domaine. Le secteur des TIC encourage également l'établissement de partenariat entre la société civile et le secteur privé, entre les pouvoirs publics, le secteur privé et la société civile, etc. Il ressort de ce qui précède que les partenariats jouent un rôle déterminant dans la mise en œuvre du programme relatif aux TIC du NEPAD. L'immense programme de développement du continent nécessite un meilleur partage ainsi que la valorisation des ressources. Les rôles qui reviennent aux différents partenaires tels que: les pouvoirs publics, le secteur privé, la société civile et la communauté internationale peuvent être définis comme suit : 5.1 Rôle des pouvoirs publics Grâce à leurs actions et à leur clairvoyance, les pouvoirs publics créent l'environnement propice devant permettre l'élaboration des politiques, des stratégies et des plans adaptés au secteur des TIC en Afrique. L'idéal serait que ces politiques favorisent l'égalité et l'accès du plus grand nombre, tout en mobilisant les potentialités des autres acteurs tels que le secteur privé, afin que, grâce aux investissements, ils jouent le rôle qui leur revient dans le développement de ce secteur. Les pouvoirs publics ont également le devoir de rassembler les différents acteurs en vue de mettre en place les synergies requises pour accélérer le développement des TIC dans les pays. Par exemple, grâce à ces technologies, les pouvoirs publics peuvent mettre en place des partenariats cntre les secteurs public et privé dans le domaine des prestations de soins de santé. 119 Le NEPAD, enjel/x poli/illlteS, ('COI/OlI/ùjlIeS et sectoritds 5.2 Rôle du secteur pn'l'é Le secteur privé reste le principal acteur capable de stimuler les investissements pour développer les TIC sur le continent. Ce secteur est connu pour être le terrain de prédilection des inventions et des découvertes dans le domaine des TIC et devrait être l'un des principaux piliers de tout partenariat. Les sociétés d'affaires et les compagnies privées devraient tout particulièrement fournir au secteur des TIC en Afrique, une assistance dans les domaines ci-après: • Fourniture de fonds pour la création d'entreprises, grâce à l'injection de capitaux financiers et humains dans des sociétés et entreprises làcales oeuvrant dans le secteur des Technologies de l'information. • Conseils et élaboration de projets. C'est le domaine où le secteur privé pourrait jouer le rôle de chef de file et encourager l'accès des sociétés locales aux sources étrangères de financement et d'investissements dans les pays du Nord . • Formation et renforcement des capacités, en partenariat avec des établissements d'enseignement. En Afrique, les multinationales, notamment celles des secteurs pétroliers et bancaires, ont toujours parrainé ou aidé les initiatives dans le domaine de l'enseignement dans certains pays. Ces sociétés disposent d'autres possibilités qui leur permettent de financer la formation et de renforcer les capacités dans le secteur des TIC. • Établi!>'Sement defonds d'affectation !>péciale. Des fonds pourraient être établis en partenariat avec les écoles, les pouvoirs publics et les communautés locales pour permettre à l'Afrique de combler le fossé numérique. Ces fonds pourraient servir à aider les télécentres communautaires ou à approvisionner les écoles ou les centres communautaires en matériel TIC ou même à mettre au point du matériel didactique et des logiciels. Les fonds pourraient également être utilisés pour assurer la formation et perfectionner les connaissances techniques des enseignants, des élèves et de l'ensemble de la communauté dans le domaine des TIC. • Intégration régionale. C'est un thème qui trouvera un large écho auprès du secteur privé et l'encouragera à apporter son appui. Les sociétés, surtout les multinationales, grâce à des investissements en capital-risque ou à des partenariats, pourraient fournir l'investissement nécessaire à la mise en place de dorsales régionales de communication et de points d'échange Internet. Ces initiatives constitueront des contributions positives dans la réalisation des objectifs d'intégration régionale du NEPAD. 5.3 Rôle de la société civile La société civile a aussi un rôle important, en ce sens qu'elle travaille plus intimement et plus étroitement avec les communautés de base. Il 1.20 Les Teclmol0f.:ies de l'll?(onnafioll er de la COlllll1ll11icarioll s'avère donc indispensable qu'elle participe à des partenariats dans ce domaine. Les Organisations non gouvernementales ainsi que les organismes communautaires pourraient jouer un rôle de premier plan dans la fourniture d'accès aux groupes marginalisés du fait de leur sexe, de leur invalidité, de leur situation géographique, de leurs revenus, de leur appartenance sociale, etc. La société civile a, entre autres pour activités de : • Faire le plaidoyer de la politique des TIC. • Renforcer la capacité des populations, notamment des groupes vulnérables afin qu'ils prennent des décisions appropriées et contribuent efficacement au processus de prise de décisions. • Favoriser l'accès aux communautés et aux groupes défavorisés, tels que les femmes, les enfants et les infirmes. • Renforcer la fourniture de l'accès à travers les centres d'information conmmnautaires et des télécentres privés à des coûts abordables. La société civile pourrait également jouer un rôle déterminant dans l'intégration des TIC dans leurs secteurs respectifs aux niveaux mondial, régional et national et apporter leur appui aux communautés, tout en jouant un rôle de sensibilisation dans le processus politique. 5.4 Rôle des partenaires internationaux de développement La communauté internationale, à savoir, les institutions de développement et les donateurs sont des partenaires de premier plan dans la promotion des TIC au service du développement. Ils ont besoin d'intégrer la dimension TIC dans leurs activités sur le continent, comme un grand nombre d'entre eux commencent d'ailleurs à le faire. Ensuite, ils pourraient œuvrer pour trouver des méthodes innovatrices de mobilisation des ressources et de financement de la mise en œuvre du programme TIC du NEPAD. Il conviendrait également de consolider les mécanismes tels que le Partenariat pour les technologies de l'information et de la communication en Afrique (PICTA) en vue encourager les alliances et les partenariats stratégiques entre les partenaires de développement et les autres acteurs. Ces partenaires se doivent d'apporter leur appui aux stratégies sous-régionales et régionales afin de créer des économies d'échelle pour l'utilisation des TIC, ce qui pourrait renforcer l'intégration régionale, l'harmonisation des politiques et stratégies ainsi que le partage des ressources. De même, il faudrait que la communauté de développement encourage les échanges d'expériences par le biais des sites Web, des listes de discussion, des réseaux internationaux, des conférences et des ateliers sur les applications des TIC pour la création de richesses. 121 Le NEPAD, e/(jel/x polifiqllf>s, i!colloll7iql/f>s f>f Sf>CfOrie!s 6. Coordination de la mise en oeuvre du programme TIC du NEPAD La coordination du programme du NEPAD constituera l'un des programmes les plus importants du partenariat. C'est ici que les avantages comparatifs de la CEA, grâce à sa capacité d'organisation et au rôle de premier plan qu'elle joue dans la mise en oeuvre de l'Initiative de la société de l'information en Afrique, font de cette organisation le coordonnateur idéal des initiatives TIC dans le cadre du NEPAD. Parce qu'elles lui reconnaissent ce rôle, les autres institutions des Nations-Unies ont convenu à l'unanimité de faire de la CEA, l'agence de coordination des mesures prises par les Nations Unies dans le cadre du Programme d'action du NEPAD relatif aux TIC. La capacité dont dispose la CEA pour coordonner et harmoniser les TIC aux fins de développement de l'Afrique vient de sa capacité et de sa position par rapport aux questions ci-après: 6.1 Plaidoyer et analyse des politiques L'ensemble des activités de la CEA porte essentiellement sur les analyses de politiques qui servent à sensibiliser aux questions essentielles de développement dans le but d'encourager les initiatives et les réformes de politiques nécessaires au progrès économique et social en Afrique. A l'étranger les activités de plaidoyer de la CEA consistent essentiellement à promouvoir une meilleure compréhension de la complexité du cade de développement en Afrique. Elles visent également à informer et à sensibiliser les partenaires de développement étrangers de l'Afrique aux besoins de la région en matière de ressources extérieures supplémentaires durables qui viendront compléter les ressources et les efforts de mobilisation entrepris par les africains euxmêmes. 6.2 Coopération technique et renforcement des capacités La CEA a pour mandat d'aider les États membres et les institutions à développer leurs capacités de conception et de mise en oeuvre des politiques et programmes de développement par des activités dans le domaine de la coopération technique. Cette coopération technique se manifeste à leur demande sous forme de services consultatifs régionaux aux États membres et à leurs organisations intergouvernementales, l'organisation d'ateliers, de séminaires et l'octroi de bourses de formation; de renforcement des institutions et de projets sur le terrain. Les services consultatifs - principaux instruments de la CEA, pour l'appui aux pays - sont assurés par une équipe multidisciplinaire de conseillers régionaux qui mettent l'accent sur les problèmes politiques et techniques clairement définis qui se posent aux États membres et pour lesquels ces derniers ne disposent pas des compétences techniques requises. 122 Les Tecbl1olo,~ies de /'!I!formation et de la Communication 6,3 Capacité de rassemblement des acteurs On considère généralement que les partenariats constituent le moyen de parvenir à un développement plus efficace en Afrique et ils sont pour la CEA au cœur de la renaissance africaine. Les partenariats ont été l'un des thèmes récurrents de tous les programmes de travail de la Commission depuis 1993, année où la CEA s'est lancée dans un programme de réforme et de restructuration, guidée par la conviction que l'aide au développement pour l'Afrique nécessite des efforts concertés, de nouvelles formes de partenariat et de collaboration entre les acteurs du développement du continent. La CEA abrite le secrétariat du Partenariat pour les technologies de l'information et de la communication en Afrique, qui est devenu un élément important du partage des informations entre partenaires africains et de l'élaboration de projets et de programmes de coopération dans le domaine des TIC. Au cours de la dernière réunion du Partenariat pour les technologies de l'information et de la communication en Afrique organisée par la CEA, (Addis Abéba, mars 2002), les membre du Partenariat ont réaffirmé leur engagement à œuvrer de concert pour renforcer leur appui aux pays africains et pour les aider à accélérer le développement de leurs TIC. La Commission apporte également sa contribution au groupe de travail des Nations Unies sur les TIC, a participé au Groupe d'Études (GEANT) du G8 et prend également part aux activités de l'Alliance Mondiale pour le Savoir (GKP). La CEA est également membre de l'initiative du secteur privé, à savoir la Commission de l'infrastructure mondiale de l'information. 6.4 Renforcement des capacités et prise de conscience La CEA dispose de l'équipement nécessaire qui permet de proposer des infrastructures pour les expositions et la formation et elle est devenue un point focal en Afrique. En outre le Centre des technologies de l'information pour l'Afrique a été inauguré en 1999 et est l'un des principaux moyens dont se sert la CEA pour recommander aux hauts responsables politiques de la région comment mettre efficacement à profit les TIC. Le Centre des technologies de l'information pour l'Afrique s'efforce également de consolider les réseaux entre les différents partenaires tout en fournissant une formation, des services consultatifs et en organisant des conférences et des ateliers. Le Centre a déjà organisé des expositions sur les TIC et est entrain de mettre en oeuvre l'enseignement à distance au moyen de l'Internet,. ainsi que des services d'information dans différents domaines des TIC à des fins de développement. Il est devenu une plateforme d'échange d'information ainsi qu'un centre d'acquisition des connaissances pour les responsables politiques et les planificateurs africains sur l'importance des TIC dans le développement de l'Afrique. 123 Le NEPAD, enjeux po/iliques, économiqlles el secloriels 7. Financement du cadre du progranune TIC du NEPAD Le volet TIC du NEPAD susmentionné nécessite des ressources considérables pour permettre aux États membres de mettre en œuvre les projets catalytiques et les programmes à long terme dans des domaines aussi importants que l'infrastructure et la mise en valeur des ressources humaines. On évalue a environ 15 milliards de dollars EU, le montant dont l'Afrique a besoin pour palVenir à l'objectif de densité téléphonique du NEPAD qui est de 2 pour cent. Un montant complémentaire de 22 millions de dollars EU est nécessaire pour la mise en place au niveau régional de dorsales de communication, de points d'échange Internet et des plaques tournantes. Les coûts estimatifs du programme TIC du NEPAD portant sur les cinq autres domaines relatifs au développement humain, au cadre réglementaire et de politiques, au renforcement des capacités institutionnelles, au gouvernement électronique, à l'exploitation des TIC dans les domaines de l'agriculture et de l'environnement nécessite un financement supplémentaire important. Il s'avère nécessaire de trouver des systèmes innovateurs de financement de ce programme du NEPAD. Un mécanisme de financement à utiliser devrait être l'inclusion par les gouvernements des TIC dans le budget national de développement. D'autres mécanismes de financement tels que la vente aux enchères des ressources publiques, y compris le spectre des fréquences radio, l'imposition au niveau mondial de la taxe sur les bit comme impôt TIC, le détournement d'un très petit pourcentage des dépenses militaires pour le développement des TIC et du savoir et l'échange de la dette pour l'éducation, l'information, la communication et le savoir pour l'Afrique doivent aussi être explorés. La communauté internationale devrait aussi créer un fond universel pour les applications TIC en Afrique à travers des initiatives telle que le Groupe de Travail des Nations-Unies sur les TIC. 124 DEUXIÈME PARTIE LE NEPAD ET LA THÉORIE DU DÉVELOPPEMENT Le NEPAD et l'évolution de la réflexion sur le développement Burl!au Salis-Régional pOlir l'Afriqlll! Cl!ntmll! Commission Économiqul! dl!s Nations-Unil!s pOlir l'Afriqul! INTRODUCTION Le NEPAD ouvre dans l'histoire récente une nouvelle phase dans la rét1exion sur le développement en Afrique. Le continent a connu la succession de deux grands paradigmes depuis les premières années de l'indépendance. Le premier paradigme est celui de la modernisation nationale et qui avait pour objectif de construire l'État-nation et de mettre en place de nouvelles structures politiques modernes et la diversification de l'économie afin d'échapper à l'insertion rentière héritée de la période coloniale. Le second paradigme est celui de l'ajustement et de la stabilisation macroéconomique. Un paradigme et une pratique qui ont cherché à faire face à la crise du premier modèle de développement et à l'éclatement de la crise de la dette. Ce paradigme dominera la rét1exion sur le développement au cours des années 80 et 90. Or, force aujourd'hui de constater la faiblesse des résultats du programme des réformes entamées depuis le début des années 80. Le bilan mitigé des résultats des réformes ont amené la communauté internationale à sortir du cadre restrictif de l'ajustement structurel pour renouer avec la complexité des situations dans les pays en développement. Ainsi, la rét1exion économique s'est ouverte à d'autres préoccupations politiques avec le rôle crucial joué par la notion de gouvernance et les relations sociales avec l'accent mis depuis quelques années sur les programmes de lutte contre la pauvreté. Le NEPAD s'inscrit de notre point de vue dans cette ère nouvelle dans la rét1exion sur le développement et cherche à dépasser les deux paradigmes qui ont jusque-là dominé la réflexion sur le développement. Dans cette contribution, nous chercherons dans les deux premières parties à présenter les principales caractéristiques des deux premiers paradigmes de développement qui ont dominé la rét1exion sur le développement lors des deux premières décennies. 127 Le NEPAD et la théorie du dét'eloppelllellf L'identification des limites de chacun de ces paradigmes sera à l'origine du renouvellement du paradigme du développement en Afrique et l'adoption du NEPAD comme expression de ce nouveau consensus. La troisième partie sera consacrée à ce consensus. 1. LE l'AHAI)I(;ME DE LA MODEHNISATION NATIONALE (LES ANNI'ES 60 ET 70) : 1.1. Le contexte: Le contexte de l'adoption du paradigme de la modernisation correspond à l'indépendance des pays africains dès la fin des années 50 pour ceux d'Afrique du Nord et au début des années 60 pour ceux d'Afrique au Sud du Sahara. Les pays nouvellement indépendants se trouvaient dans une situation de forte dépendance économique et leurs structures économiques étaient orientées à la satisfaction des besoins des anciennes métropoles coloniales. Ainsi, les cultures de rente et les activités minières constituaient des intrants pour les industries de transformations installées dans les anciennes puissances coloniales. Par ailleurs, ces pays représentaient des marchés importants pour les excédents commerciaux des entreprises de la métropole. Les pays africains dès l'accès à l'indépendance ont cherché à rompre le cercle vicieux de la dépendance économique afin de renforcer leur liberté retrouvée. Cette volonté a été appuyée par la montée politique du Tiers-Monde sur la scène internationale. Le sommet de Bandoung en 1955 a été à l'origine de la constitution du mouvement des nonalignés qui vont devenir un acteur majeur des relations internationales dans un contexte caractérisé par la guerre froide. Ce mouvement favorisera la mobilisation des pays du Tiers-Monde pour une réforme de l'ordre économique international afin d'appuyer le processus de modernisation. Par ailleurs, durant ces premières décennies de développement, l'opinion publique dans les pays développés était favorable à un appui et à un soutien à l'effort de développement dans les anciennes colonies. Cette attitude a favorisé l'émergence et la croissance rapide de l'aide internationale. 1.2. Les principes: Le paradigme de modernisation nationale était régie par une série de principes qui seront au centre de l'effort de développement entamé par les pays africains. Le premier principe concerne le rôle et le poids des facteurs internes dans le domaine du développement. Ce processus devait s'orienter vers le marché intérieur et la satisfaction des besoins 128 Le NE'PAD et l'él'Olufiol/ de lu réjlexioll sur le dél'e/oppelllelit fondamentaux des populations, En même temps, ce paradigme accordait un rôle majeur à l'État dans la conduite et la régulation du développement. L'État par le biais des nouvelles administrations dans le domaine de la planification devait assurer une répartition des ressources entre les différents secteurs afin d'assurer une croissance harmonieuse entre les différents secteurs et de permettre une répartition équitable des fmits de la croissance, Le troisième principe concernait le rôle de l'industrialisation qui était considérée comme le principal moteur de développement et de changement social. Ce secteur devait entraîner dans sa dynamique les autres secteurs comme l'agriculture et les services. Enfin, le dernier principe est relatif au poids et au rôle de l'aide internationale. L'ensemble des acteurs considérait l'apport de l'aide incontournable dans la mesure où elle devait remplir l'écart entre l'épargne locale et l'investissement nécessaire à une forte relance de la croissance économique. 1.3. Les politiques: Le paradigme de la modernisation a été à l'origine de la mise en place d'une série de stratégies et de choix de développement dans la plupart des pays en développement et en particulier dans les pays africains. La stratégie d'import-substitution a été directement inspiré par ce paradigme. Cette stratégie cherchait à rompre la dépendance commerciale des pays africains en substituant les biens de consommation finale importés par des productions locales. Afin de constmire ces industries et de leur permettre de se développer, les pouvoirs publics dans la plupart des pays africains avaient cherché à les protéger de la concurrence interne et internationale. Par ailleurs, un monopole de l'État et des entreprises publiques a été rapidement érigé sur les principaux secteurs économiques dans ces pays. Ce monopole s'observait également sur le contrôle exercé par les Etats sur les systèmes de prix. Ces politiques devaient dans la logique du paradigme de la modernisation assurer aux pays africains une croissance forte qui devait leur permettre de moderniser leurs économies et leurs stmctures politiques et de rompre par conséquent le cercle de la dépendance et de l'archaïsme. 1.4. Les résultats : La stratégie de modernisation nationale a permis aux pays africains de connaître des niveaux de croissance forte tout au long des années 70. Cette croissance a été favorisée par la valorisation des cours de matières premières et l'accès aux ressources financières internationales. Cette croissance a permis aux pays africains d'accomplir des pas 129 Le NEPAD et la tbéorie du dél'l!/oppel11ellt importants dans la satisfaction des besoins sociaux des populations notamment dans les secteurs de l'éducation et de la santé. Mais, cette embellie ne durera pas longtemps. En effet, dès la fin des années 70 on assistera à l'essoufflement de cette dynamique de croissance. Cette période correspond à une montée forte de l'endettement et à l'éclatement de la crise de la dette dans la plupart des pays africains. Par ailleurs, le projet de diversification des structures de l'économie afin d'échapper à l'insertion rentière a également échoué et la plupart des pays africains, confrontés à l'exigence du paiement du selVice de la dette, ont renforcé leur insertion rentière. La crise économique a remis en cause le modèle rationnel et légal que la modernisation a cherché à mettre en place et on a assisté rapidement à la montée de la corruption qui remettra en cause les régimes de modernisation nationale. La crise du début des années 80 entraînera un déclassement du modèle nationaliste au profit d'un nouveau paradigme de la stabilisation et de l'ajustement. II. LE PAHADICME DE I.'AJlISTEMENT ET DE l.A STABILISATION MACH()(~CONOMIQlIE (LES ANNI~ES 80 ET 90) : II.l. Le contexte : L'adoption du paradigme de l'ajustement et de la stabilisation correspond à la crise du début des années 80 que tous les pays africains ont connu. Cette crise s'est accompagnée par la montée des grands déséquilibres macroéconomiques. Des déséquilibres qui ont été renforcés par la chute des cours de matières premières suite à l'éclatement des accords régissant les marchés de ces produits. Il fallait par conséquent faire face à la montée de ces déséquilibres. La crise des années 80 s'est traduite par une remise en cause profonde des paradigmes nationalistes de développement. Une remise en cause renforcée par la montée de la globalisation devenue le phénomène dominant des relations internationales. Au même moment, on assiste à une marginalisation du Tiers-Monde dans les relations internationales. Ces pays ne représentent plus la force de contestation qu'ils ont jusquelà incarnés et qui a permis de prendre en compte leurs intérêts et leurs préoccupations dans les tentatives de refonte de l'ordre international. C'est dans ce contexte de crise que nous assisterons à l'adoption du paradigme de l'ajustement et de la stabilisation macroéconomique dans tous les pays en développement. 130 Le NEPAD et l'él'OllItioll de la réjlexioll slIr le dél'e!oppemellt II.2. Les principes: Ce nouveau paradigme va s'accompagner d'une forte remise en cause des principes qui ont régis jusque-là le modèle de la modernisation nationale. En effet, désormais il faut réorienter le développement vers l'international et promouvoir une plus grande ouverture sur l'extérieur. En même temps, il fallait encourager un désengagement rapide de l'Etat de toutes les activités économiques. Le rôle régulateur de l'Etat devait par ailleurs être assuré par le marché concurrentiel qui est capable d'assurer une allocation optimale des ressources rares dans ces pays. Ces principes seront à la base des politiques et des stratégies qui seront adoptées par les pays africains tout au long des années 80 et 90. II.3. Les politiques: Ce nouveau paradigme de développement a mis l'accent sur les stratégies de stabilisation macroéconomique afin de réduire les grands déséquilibres des économies africains. Ces stratégies ont cherché rapidement à réduire la demande et à accélérer l'offre de produits comme moyens d'augmentation des richesses produites. Ces stratégies comprenaient un important axe de réformes qui visaient la privatisation des entreprises publiques, la libéralisation des systèmes des prix et l'ouverture des marchés à la concurrence interne et internationale. II.4. Les résultats : Les programmes d'ajustement structurel adoptés tout au long des années 80 et 90 ont permis à un grand nombre d'améliorer leurs grands équilibres macroéconomiques. Les déficits publics ont diminué et les accords de rééchelonnement de la dette et du paiement du service de la dette ont permis de réduire les pressions sur les paiements externes. Mais, en dépit de ces résultats, on a assisté à un accroissement de la dette. En même temps, le désengagement de l'Etat des secteurs sociaux et la diminution de son appui aux secteurs de base se sont traduit par une explosion de la pauvreté. En même temps, par le biais des conditionnalités qu'elles imposent, les bailleurs de fonds prennent un poids de plus importants dans la définition des choix et des stratégies de développement. L'épuisement du mouvement de réformes envisagées dans le cadre de l'ajustement structurel a ouvert la voie à une nouvelle ère dans la rétlexion sur le développement. 131 Le NEPAD et la tIJéorie du d(i{'eloppement III. VERS liN NOIIYEAli l'AHADI(;ME DE DJ'YI'1.01'I'EMENT EN AFIW;>IIE : Une nouvelle ère et une nouvelle période semble aujourd'hui s'ouvrir en matière de réflexion sur le développement. Cette réflexion cherche aujourd'hui à s'extraire de l'excès d'idéologie qui a caractérisé la réflexion sur le développement depuis plusieurs années, Mais, cette réflexion cherche également à dépasser les limites strictes de la réflexion économique pour s'intéresser à d'autres domaines comme la gouvernance politique et qui expliquent l'enchevêtrement et la complexité des relations en matière de développement. En même temps, le nouveau paradigme en matière de développement met l'accent sur l'explosion de la pauvreté ces dernières années et fait de sa maîtrise et de son éradication le cœur de ces priorités, L'intérêt du NEPAD de ce point de vue est qu'il s'inscrive parfaitement dans cette nouvelle ère et cherche à en tirer profit pour relancer dans les pays africains et ouvrir une nouvelle expérience historique pour le continent à l'aube du nouveau millénaire, Ill.l. Le contexte: L'adoption du NEPAD par les Chefs d'États africains lors de leur sommet tenue à Lusaka en juillet 2001 correspond à un nouveau contexte international du point de vue du débat sur le développement et l'Afrique, Un contexte caractérisé par la prise en compte par la Communauté internationale que la marginalisation de l'Afrique ne peut se poursuivre indéfiniment et qu'il fallait par conséquent prendre une série d'engagements afin d'aider les pays africains à relancer un processus de croissance dynamique et compétitif, La mobilisation de la société civile internationale contre l'annulation de la dette et pour la prise en compte des intérêts des pays en développement dans les négociations internationales a joué un rôle non négligeable dans cette prise de conscience généralisée. C'est dans cette perspective que le sommet du Millénaire des Nations-Unies a adopté une série d'engagement précis en matière de développement que la Communauté internationale devrait atteindre, Par ailleurs, ce contexte correspond également à la mise en place des stratégies de réduction de la dette dans un grand nombre de pays en développement. En même temps, les pays en développement ont connu des ouvertures démocratiques qui seront de nature à favoriser un contrôle plus important des sociétés sur la gestion des ressources publiques. Ces mutations et ces changements vont favoriser l'émergence de nouveaux principes qui vont régir la réflexion sur le développement à l'aube de ce nouveau millénaire. 132 le NEPAD el l'él'Olt tfio Il de la n'flexioll slIr le dél'eloppel/lelll 111.2. Les principes: L'ère nouvelle en matière de réflexion sur le développement se caractérise par l'émergence de nouveaux principes et de nouvelles préoccupations qui ne sont plus ceux qui ont dominé le paradigme de l'ajustement et de la stabilisation macroéconomique. Ainsi, les économistes reconnaissent de plus en plus le rôle des institutions et cherchent à construire un équilibre entre l'État et le marché. Par ailleurs, la priorité n'est plus accordée de manière exclusive au marché international et on cherche une plus grande complémentarité entre l'exportation et la demande interne. En même temps, les bailleurs de fonds et les pays en développement cherchent de plus en plus les conditions d'un nouveau partenariat et veulent fonder des relations plus équilibrées. Ce nouveau contexte est aussi caractérisé par l'émergence de la problématique de la bonne gouvernance comme un préalable incontournable à toutes les stratégies de développement. Enfin, le rôle de l'intégration régionale est de plus en plus affirmé. 111.3. Les politiques et les stratégies: Le nouveau contexte en matière de développement se caractérise par la mise en place de nouvelles stratégies et de nouvelles politiques en matière de développement. D'abord, la lutte contre la pauvreté et avec les efforts de réduction de la dette sont au centre des stratégies et des politiques de développement en Afrique. Par ailleurs, les pays africains avec l'ouverture démocratique et l'arrivée de nouvelles élites ont cherché un renforcement des mécanismes et des procédures pour assurer une bonne gouvernance et une meilleure gestion des deniers publics. Par ailleurs, les nouvelles stratégies du développement mettent de nouveau l'accent sur les infrastructures qui ont été oubliées pendant longtemps. Enfin, on assiste partout à une accélération des processus d'intégration régionale sur le continent. En définitive, le NEPAD vient consacrer et donner un nouveau souffle à des mutations profondes en matière de réflexion et de pratiques dans le développement africain. Une dynamique nouvelle est en cours et une prise de conscience de l'Afrique de l'importance cie prendre en charge ses intérêts et cie construire une nouvelle expérience historique porteuse d'espérance et d'enchantement pour les populations. 133 Le NEPAD et la réflexion sur le développement par Bnmo Bekolo-Ebe Recteur de rUllil'el:çifé de Yaoltlldé II - Cameraull L'élaboration et la mise en œuvre du NEPAD repose aujourd'hui le problème de la réflexion sur le développement et conséquemment de la formulation et de la mise en œuvre des politiques de développement. Comment situer le NEPAD par rapport à la réflexion théorique sur le développement? Quels en sont les fondements? Et quel en est l'originalité, voire l'intérêt? Ces questions se posent d'autant plus qu'il n'y a pas longtemps, nombre d'auteurs ont cru de bon ton d'annoncer la mort de la théorie du développement et partant de l'économie du développement, comme pour signifier par là que la réflexion sur le développement était désormais sans objet. Une raison supplémentaire des interrogations que soulève le NEPAD est le fait que sa formulation prenne place dans un continent dont la caractéristique a été jusqu'à présent d'être pratiquement absente du débat d'idées sur le développement, tout en étant le lieu d'expérimentation des diverses théories du développement élaborées ailleurs, Nous voudrions montrer que l'originalité, la signification symbolique et l'importance du NEPAD tiennent précisément au fait qu'il s'analyse comme une rupture avec la passivité intellectuelle de l'Afrique et la tendance de notre continent à laisser son destin défini et déterminé par d'autres, Pour ce faire, nous rappellerons d'abord l'évolution de la réflexion sur le développement pour souligner la faible place occupée par l'Afrique dans cette évolution (1), puis nous montrerons en quoi le NEPAD constitue, de par ses fondements, son mode de formulation et son contenu, une rupture et un tournant décisif dans la prise en main de l'Afrique par elle-même (11), 135 Le NEPAD et la tbrÎ(wie du urÎl'efoppeme11t 1. l:l'YOUITION DE LA HI~FLEXION StlH LE DÉVELOPPEMENT ET LA l'AIIlLE CONTHllllJllON IW L'AFH1QtlE Toutes choses étant égales par ailleurs et abstractions faites des questions épistémologiques et méthodologiques qu'impliquent toute périodisation, on peut distinguer, pour l'analyse, trois grands moments dans l'évolution de la pensée économique sur le développement. La première période couvre la fin de la deuxième guerre mondiale jusqu'à la fin des années 50, marquée par l'émergence des premières théories du développement. La deuxième période qui couvre les années 60 et 70, est une période d'intenses débats scientifiques et idéologiques sur les stratégies de développement et la pertinence des politiques mises en œuvre par les différents pays en développement. La troisième période couvre les années 80 et 90 et s'analyse comme celle de la mort ou pour être optimiste, de l'arrêt de toute réflexion sur le développement, avec le triomphe de l'ajustement structureL Lorsqu'on observe l'évolution de la réflexion sur le développement depuis la deuxième guerre mondiale, on peut en conclure qu'il s'agit de l'histoire d'une pensée qui émerge à la fin des années 40, au lendemain de la guerre et se constitue en un corpus théorique permettant une nouvelle spécialisation dans le champ large de la Science Économique. Elle connaît son âge d'or au cours des années 60 et 70, avec une intensification des débats théoriques sur les stratégies et politiques de développement. Les années 80 et 90 à contrario apparaissent comme une période de déclin au cours de laquelle certains n'hésiteront pas à en prononcer l'oraison funèbre Caractérisons brièvement chacune de ces périodes afin d'en dégager les grandes tendances dominantes par rapport auxquelles on peut mieux situer et comprendre le NEPAD. a) Émergence, apogée et déclin de la réflexion sur le développement: de la fin de la deuxième guerre à la f"m du deuxième millénaire La première période, disions-nous est celle de l'émergence des premières analyses consacrées à la question du développement. On cherche à comprendre les facteurs explicatifs du retard et des écarts observés entre les pays industriels et les pays sous-développés, alors même que la création des Nations-Unies et la Conférence de San Francisco, en 1945 affirment l'objectif de création d'un ordre mondial fondé sur le développement économique et social et stimulant celui-ci. Les bouleversements du commerce mondial durant la crise de 1929 rendent encore plus pertinente la question du développement, d'autant que des mutations importantes s'opèrent dans certains pays en 136 LL' lllEPAD et la n'f7exion slIr le dél'eloppelllel1f développement, en particulier ceux d'Amérique Latine. 11 s'y opère en effet une transition marquée par une croissance tournée vers l'intérieur avec une industrialisation reposant sur la substitution d'importations. Les premières analyses conduisent ainsi à l'élaboration des thèses dualistes, à la suite des travaux de Boeke (953) et de Perroux (955) qui décrivent l'économie sous-développée comme une économie, où coexistent deux secteurs juxtaposés, l'un moderne, capitalistique, l'autre traditionnel et précapitalistique. Cette juxtaposition traduit, selon Perroux la désarticu13tion de l'économie sous-développée. En même temps se développe en Amérique Latine, sous l'égide de la CEPAL et l'impulsion de son Secrétaire Général Raul Prébisch 0951-1954) une analyse spécifiquement consacrée à l'Amérique Latine et montrant d'une part, l'impact négatif du commerce mondial et notamment de la détérioration des termes de l'échange et des désordres affectant les marchés de change comme obstacles à la croissance du sous-continent et d'autre part, l'intérêt de politiques de développement industriel tourné vers le marché intérieur, pour satisfaire une demande constituée à partir des revenus gagnés dans l'échange international. D'une manière générale, le lendemain de la guerre et les années 50 voient émerger un nouveau champ d'analyse qui systématise la réflexion sur le développement en lui appliquant les méthodes et outils d'analyse de l'économie. La réflexion sur le développement gagne en intensité et en approfondissement au cours de la deuxième période couvrant les années 60 et 70. Cette évolution est particulièrement favorisée par le démantèlement des empires coloniaux et l'émergence de nouveaux pays sur la scène politique économique internationale, et affecte particulièrement l'Afrique et l'Asie. Au fur et à mesure de l'avènement de ces pays, la prise de conscience est rapide pour admettre que la consolidation de leur statut politique sur la scène mondiale, ne peut être assurée que si la croissance économique et le développement suivent et permettent la création d'un flux de richesses abondants, garantissant le bien-être de l'ensemble des populations. La réflexion théorique qui se développe au cours de la période se structure autour du paradigme de la modernisation et l'on insiste sur l'urgence qu'il y a à opérer des changements structurels profonds permettant à ces économies de répondre aux besoins et d'être présents au monde. La modernisation doit conduire à la mise en place de structures de production qui mettent fin à la dépendance économique caractéristique de la période coloniale, en même temps qu'elle doit permettre à ces pays d'occuper des positions fortes sur la scène économique internationale. L'analyse du développement s'intéresse donc aux facteurs d'accélération de la croissance. et de modernisation de ces économies. Ceci explique l'importance des débats relatifs à l'accumulation et à son financement. On admet rapidement qu'il faut engager ces économies dans un processus d'industrialisation qui accroissent la production. 137 Le NEPAD et lu tbéorie d1/ dél'doppell1ellt D'où l'importance des théories consacrées à l'accumulation du capital et des réflexions relatives aux questions du financement, et des choix sectoriels permettant de soutenir la croissance. Un accent particulier est mis d'une part sur les obstacles structurels internes, et d'autre part sur les facteurs qui dans ces économies doivent être mobilisés pour enclencher une dynamique de croissance auto entretenue. L'analyse assigne ainsi un rôle particulièrement important à l'État qui doit jouer un rôle moteur dans l'accumulation du capital, et la définition des orientations stratégiques de l'économie. La dépense publique de capital doit jouer un rôle d'autant plus déterminant que d'une part, l'État doit suppléer à l'absence d'une dépense privée de capital, et d'autre part, c'est à l'État de canaliser les flux financiers extérieurs dont on souligne la nécessité et l'urgence pour financer la modernisation de l'économie. L'industrialisation est le moteur central de ce processus de modernisation. Elle doit permettre de mettre fin au dualisme et à la désarticulation, assurer la diversification sectorielle de l'économie, favoriser les transferts de technologies, accroître la valeur ajoutée en modifiant la spécialisation coloniale fondée sur l'exportation des matières premières. Et le mouvement d'industrialisation prend appui sur la substitution des importations, à laquelle la CEPAL accordera un rôle déterminant dans la stratégie de développement latina-américaine. L'entreprise de modernisation doit, admet-on, bénéficier de transferts massifs de capitaux, sous forme de dons, d'investissements directs ou de prêts, ce qui explique l'importance attachée à la question de l'aide publique au développement. Les diverses théories prennent appui sur l'exemple des pays développés où le développement industriel a joué un rôle déterminant, où l'accumulation du capital et la mobilisation du capital apparaissent comme des facteurs décisifs. Ainsi s'explique la convergence des analyses en faveur des transferts massifs de capitaux financiers des économies en développement. Les Nations-Unies et la Banque Mondiale jouent ici un rôle de premier plan dans le développement da la pensée économique consacrée au développement et dans la formulation des politiques y relatives. Certes, de vives controverses opposent les différents courants sur les stratégies à adopter. Ainsi s'explique l'âpreté des débats sur la nature équilibrée ou non de la croissance, sur le rôle des exportations et des importations, sur la place du secteur industriel par rapport à l'agriculture, sur la nature des choix de spécialisation, etc. La rivalité idéologique entre l'Est et l'Ouest exerce d'ailleurs une influence particulièrement pesante tant sur \'impact théorique de tel ou tel courant dans la formulation des stratégies que dans les modalités de mise en œuvre des politiques appliquées par les différents pays. Cette rivalité explique l'importance que prennent dans les années 60 et 70, les thèses d'inspiration marxistes qui développent une forte contestation de la théorie orthodoxe du développement, en mettant en 138 Le NEPAD et la réjlexion .l'II r le dél 'eIOppell7l'ilf évidence l'impact négatif des flux de capitaux, en soulignant l'apparition des phénomènes de dépendance, en critiquant les conditions d'insertion des économies dans un commerce mondial où la détérioration des termes de l'échange et le poids de la dette accentuent l'impact négatif des transferts inverses caractéristiques du paradoxe de l'exportation du capital par des économies où celui-ci est précisément insuffisant. Ces critiques des analyses hétérodoxes poussent dans les années 70 aux tentatives faites pour l'élaboration d'un Nouvel Ordre Économique Mondial, thème dominant de l'après premier choc pétrolier. Mais au-delà de ces critiques plus ou moins pris en compte dans les différentes stratégies et politiques, le processus de développement apparaît, à l'analyse, comme un processus imitatif engageant les pays concernés dans la voie suivie bien avant par les pays industriels. Les prenant comme modèle, les pays en développement en général, les pays africains en particulier admettent que l'aspiration à la modernisation et au développement économique s'analyse comme un rattrapage d'un retard, rattrapage d'autant plus possible qu'était disponible un stock de capital technique et financier suffisait pour réaliser les investissements nécessaires. Ainsi sont formulés de vastes programmes d'industrialisation dont la réalisation repose sur une importation massive d'équipements des pays industriels, favorisés par la mise à disposition de ces pays de moyens financiers nécessaires pour pallier à l'insuffisance de l'épargne interne. Transferts de technologie et transferts financiers sont ainsi allés de pair, les organismes internationaux et les pays aux-mêmes s'employant à éliminer les obstacles à ces transferts. On peut dire de cette période qu'elle constitue l'âge d'or de la réflexion sur le développement. L'âpreté des débats et l'intensité des controverses qui caractérisent cette période traduit l'intérêt particulièrement fort que les uns et les autres ont pour la question du développement. Les Nations-Unies proclament d'ailleurs au cours de cette période la décennie du développement, à la suite de la publication du Rapport Pearton (969). Les pays en développement eux-mêmes contribuent à cet intérêt par la hardiesse de leurs propositions et l'ampleur des politiques qu'ils élaborent et appliquent et pour lesquels ils ne cessent de demander un appui toujours croissant de la communauté internationale. Qui plus est certains thèmes deviennent d'une actualité brülante par l'importance des problèmes y liés, et l'urgence à y trouver des solutions. 11 en est ainsi des questions relatives à l'investissement international, aux firmes multinationales au prix des matières premières, à la dette extérieure, à la révolution verte, à la dépendance pour ne citer que quelques questions dont les controverses discutent du statut théorique dans les stratégies de développement. 139 Le NEPAD et la tbéorie "II "él'eloppemel1t La crise qui frappe la plupart des économies, à la suite des deux chocs pétroliers marque le début de la Ille période. Elle se manifeste par un ralentissement de la croissance, puis par un renversement complet de la tendance se traduisant dans nombre de pays par des taux de croissance négatifs. Il en est particulièrement ainsi des économies africaines, surtout en Afrique subsaharienne, La stagnation et la régression économique vont de pair ave l'occurrence de nombreux et lourds déficits; déficits des balances de paiements, déficits du commerce extérieur déficits des finances publiques, déficits des entreprises publiques, etc. Ces déficits sont alors caractéristiques des déséquilibres et distorsions macroéconomiques affectant ces économies. S'il est en effet vrai que des sauts qualitatifs ont pu s'opérer dans ces économies, permettant de mettre en place dans nombre de cas, une infrastructure productive accroissant les capacités de productions, ces évolutions s'accompagnent de nombreuses distorsions qui caractérisent la crise du processus, Un des problèmes majeurs de ces économies sera la montée de l'endettement qui conduit à la crise de la dette et à l'accumulation d'arriérés que ne résorbent plus les divers rééchelonnements, parce que les ressources budgétaires ne permettent plus de servir la dette, De même apparaît-il que dans bien des cas, l'évolution de la spécialisation n'a pas débouché sur une plus grande diversification de l'économie. Bien au contraire, celle-ci est encore plus fragilisée et est devenue plus dépendante et rentière. Les économies ploient ainsi sous un ensemble de déficits et déséquilibres qui s'aggravent au fur et à mesure de l'approfondissement de la crise. Ils conduisent à l'entrée en scène des Institutions de Bretton-Woods, FMI et Banque Mondiale, dont les modes d'intervention à travers les plans et programmes d'ajustement structurel modifient fondamentalement la problématique de ces économies, Au paradigme de la modernisation va succéder celui de l'ajustement et de la stabilisation macroéconomique, Les politiques économiques vont alors voir leur champ se restreindre en même temps que les objectifs se modifient. Le rétablissement des équilibres macroéconomiques devient l'objectif primordial des politiques économiques dont la configuration et la formulation sont profondément déterminées, Le triomphe de l'ajustement structurel met pratiquement fin à toute réflexion prospective sur le développement, devenue tout à fait superfétatoire. Les débats sur les stratégies de développement s'estompent d'autant que d'une part la prégnance de la crise contraint les responsables de ces pays à parer au plus pressé, en s'abandonnant aux recettes toutes prêtes de l'ajustement structurel et d'autre part, l'effondrement des pays de l'Est s'analyse pour beaucoup comme marquant la fin des débats idéologiques, voire épistémologiques qui fondaient les controverses théoriques sur le développement. On comprend d'ailleurs que certains auteurs aient annoncé la mort de l'économie du développement ou a tout le moins son déclin. Il faut certes souligner que la réduction du champ des 140 Le NEPAD et la réflexio/1 SI/ r le dél 'e/oppemellt politiques économiques ne s'accompagne pas moins de profondes mutations structurelles imprimées à ces économies. Ainsi, alors qu'à la période précédente, on se préoccupait de donner à l'économie des bases internes à son développement, il s'opère au cours de la période, une réorientation où l'insertion à l'économie mondiale redevient la règle, avec la prise d'un ensemble de mesures destinées à accélérer l'ouverture sur l'extérieur. Celle-ci s'inscrit par ailleurs dans une perspective de libéralisation qui à l'intérieur conduit aux privatisations, au démantèlement des secteurs publics, à la limitation du rôle de l'État, à la libéralisation des mécanismes de fixation des prix et à une plus grande exposition de l'économie à la concurrence interne et externe. L'application de ces politiques et le triomphe du nouveau paradigme conduisent au résultat que désormais les bailleurs de fonds déterminent en dernier ressort les choix économiques de ces pays où en dépit du retour aux équilibres macroéconomiques, on assiste à l'aggravation de la pauvreté. b) La place marginale de l'Afrique dans la réflexion sur le développement On peut, s'agissant de l'Afrique, dégager un certain nombre de caractéristiques et tendances d'une période à l'autre de cette évolution. La première caractéristique est la place marginale de l'Afrique dans la réflexion qui se développe. Au cours de la première période, celle de l'émergence de la théorie économique du développement, elle est totalement absente en tant qu'objet d'analyse, puisque la théorie s'élabore à partir des expériences d'Amérique Latine et d'Asie. Si, au cours de la deuxième période, l'Afrique devient elle aussi objet d'analyse, sa place reste cependant secondaire par comparaison à lïmportance des travaux consacrés à l'Amérique Latine et à l'Asie. Cette différence de traitement tient et c'est la deuxième caractéristique, à l'absence de centres de rét1exion apportant une impulsion à la réflexion et animant le débat scientifique, comme lieu de production d'idées et de proposition sur le développement Africain. On sait cn effet le rôle décisif joué par la CEPAL pour le développement de la pensée économique en Amérique Latine, à partir de l'impulsion donnée dès les années 50 par Raul Prebisch. Cette impulsion est prolongée par un intense bouillonnement d'idées et de propositions qui permettent au sous-continent latino-américain d'apporter unc contribution décisive à divers courants de pensée qui articulent les thèses sur le développement, avec des auteurs marquants comme Celso Furtado, Ruy Marini, André Gunder Frank, Arthur Lewis, urquidi, Sunkel, Theotonio dos Santos, Fernando Henrique Cardoso pour n'en citer que quelques-uns. L'Asie connaît la même effervescence de la pensée à travers de nombreux centres d'études pour le 141 Le NEPAD et la théO/ie du déldoppemellt développement qui se créent en Inde, en Malaisie, en Indonésie, au Japon, avec des auteurs marquants tels que M.S. Ahluwalia, J. Bagwati, H. Alavi, A. Singh, Utun Wai, A.K. Bagechi, A. K. sen, P.c. Mahalanobis, Nurul Islam. Pendant toute la période, on ne trouve rien de tel en Afrique. Il faut certes rendre justice à un centre tel que l'IDEP de Dakar, pendant la période où il est animé par Samir Amin. De même faut-il reconnaître les contributions de quelques auteurs à la réflexion théorique sur les stratégies de développement. On citera entre autres, outre Samir Amin, Abdoulaye Wade, Osende Afane, G. Ngango, Tchundjang Pouemi, Matar Diouf, B. Bekolo-Ebe, V. Diarrasouba, Touna Mama. Mais dans la formulation et l'élaboration des stratégies et politiques de développement, ces contributions pèsent de peu de poids et n'exercent aucune influence décisive dans la détermination des choix économiques en Afrique. L'élaboration des politiques et les décisions stratégiques en matière de développement restent l'apanage de l'assistance technique étrangère dans le cadre des coopérations techniques bilatérales et multilatérales. Cette prépondérance de l'analyse étrangère au continent se convertit même en monopole à la faveur de l'Ajustement Structurel où la réflexion et l'analyse fondant les choix économiques sont totalement et exclusivement accaparées par les fonctionnaires du FMI et de la Banque Mondiale qui, à partir de la fin des années 70, mettent progressivement, totalement et systématiquement les économies africaines sous administration séquestre, en faisant habilement jouer des diverses conditionnalités pour écarter toute velléité de réflexion autonome. Ainsi, alors qu'au début des années 80, un effort de réflexion autonome paraissait s'engager sous l'égide de la CEA qui semblait ainsi vouloir s'inspirer de l'exemple de la CEPAL en Amérique Latine, et dont un des résultats marquant était l'élaboration du Plan de Lagos, il est rapidement fait pièce à ces velléités, par la Banque Mondiale qui commande et impose, grâce à sa puissance financière le plan Berg que beaucoup d'Africains ont analysé, non sans raison comme un contreplan Lagos, pour mieux enterrer la Plan de Lagos. S'engage alors une longue hibernation de la pensée sur le développement dont on peut dire aujourd'hui que le NEPAD marque le réveil, ce qui en explique l'importance et l'intérêt qu'il y a à en assurer le succès. II. I.E NEI'AD (HI I.A IHll'TllHE AVEC I.A l'ASSIVIT'~ INTEl.l.l'CTllEl.l.1' DE ':AFHIQLJI' L'élaboration du NEPAD marque, à notre avis la rupture avec l'Afrique consommatrice d'idées produites ailleurs mais dont elle a servi à chaque fois de champ d'expérimentation, et met fin à la longue 142 LI' NEPAD ('/ la l'I!fll'xioll SI/ r II' dr'I'e!0PPI'1II1'11 f période d'hibernation de la pensée économique qu'a constitué la longue période d'application rigoureuse et sans partage des plans d'Ajustements Structurels. Cette rupture tient à un ensemble de caractéristiques qui la singularise et en explique l'importance et l'ampleur des défis qu'il induit pour l'Afrique. Parmi ces caractéristiques, certaines nous paraissent particulièrement déterminantes, à savoir: - ses conditions de formulation et son appropriation politique, - sa globalisation et la mise en perspective des économies africaines, - ses priorités stratégiques centrées sur l'homme. Nous les examinerons d'abord avant de soulever quelques questions dont les réponses conditionnent à notre avis le succès de l'initiative. a) Des caractéristiques du NEPAD 1. Les conditions d 'élahorafiOll el l'appropriation politique Le NEPAD apparaît comme le résultat d'une réflexion approfondie et sans concessions menée par l'expertise africaine. L'effort de réflexion interne engagé par le Plan de Lagos a été en effet repris ici et amplifié pour mettre en évidence les facteurs de blocage du développement en Afrique. Tout au long du document, l'analyse met en relief les facteurs internes et externes de blocage et de marginalisation de l'Afrique dont la conséquence est une pauvreté et un retard croissant de l'Afrique qui contrastent vivement avec la pauvreté du monde développé. Le document souligne certes les effets négatifs pervers générés par l'expérience coloniale en mettant l'accent sur ce qu'il appelle l'appauvrissement historique du continent. Cet héritage colonial a été accentué par la guerre froide et les mécanismes et rouages du système économique mondial. Une des manifestations en a été l'hémorragie des ressources. Mais le document reconnaît tout autant la responsabilité interne de l'Afrique, à travers des politiques économiques mal formulées et mal menées, des États faibles du fait des multiples dysfonctionnements qui en affectent négativement les décisions et interventions. Ces dysfonctionnements, est-il souligné, ont été aggravés par un leadership médiocre, le développement de la corruption et la mauvaise gouvernance (p. 5). La faiblesse de l'État, accentuée par le peu d'effort que nombre de pays africains ont déployé pour habiliter leurs peuples à engager des initiatives de développement, constitue de ce fait une contrainte majeure au développement du Continent Cp. 5), en l'empêchant d'exploiter de façon optimale les nombreuses et riches potentialités qui sont les siennes et que le document identifié à travers les quatre composantes constitutives des ressources de l'Afrique. 143 Le NEPAD el la Il)(iorie dll dél'eloppemelll Si la formulation et l'élaboration en sont faites par l'expertise africaine, le NEPAD pose en même temps comme postulat que sa mise en œuvre est d'abord de la responsabilité des africains eux-mêmes. « Il est ancré dans la détermination des Africains de s'extirper eux-mêmes, ainsi que leur continent, du malaise du sous-développement et de l'exclusion d'une planète en cours de mondialisation" Cp. 1). Cette détermination implique de ce fait que le NEPAD soit axé sur la nécessité d'en assurer la propriété et la gestion aux Africains Cp. 10), il se fonde " sur un ordre du jour dont ont décidé les Africains de leur propre initiative et de leur propre gré, afin de déterminer aux-mêmes leur destin ". Ces affirmations constituent un saut qualitatif décisif, y compris par rapport au Plan de Lagos, en ce qu'elIes signifient que l'Afrique prend enfin conscience qu'il lui appartient de définir son propre destin, mettant ainsi fin à cette passivité qui en faisait une consommatrice d'idées venues d'ailleurs et qui la condamnait à un ajustement structurel passif aux évolutions déterminées ailleurs. Cette prise en main de son destin implique l'assomption de responsabilités décisives que le document définit aussi comme un cahier de charge incontournable, dont les économies, et de manière générale les sociétés africaines ne peuvent plus désormais faire l'économie. Ces responsabilités sont aussi diverses que la mise en place des mécanismes de prévention de gestion et de résolution des conflits, la promotion de la démocratie et des droits de l'homme, la stabilité macroéconomique, l'instauration de cadres juridiques et réglementaires transparents, le développement de l'offre d'éducation et de formation du capital humain, la promotion de la femme, le renforcement des capacités d'actions des États Cp. 11). Ces responsabilités prennent d'autant plus de relief et d'importance que les dirigeants africains s'approprient totalement le NEPAO. Ici plus que jamais, la volonté politique fonde l'appropriation interne du projet, qui s'analyse comme " une promesse faite par les dirigeants africains, fondée par une vision commune ainsi qu'une conviction ferme et partagée qu'il leur incombe d'urgence d'éradiquer la pauvreté, de placer leurs pays, individuellement et collectivement sur la voie de la croissance et d'un développement durable ... " Cp. 1). Les plans nationaux et régionaux donnent de ce fait mandat aux dirigeants africains, en leur confiant la responsabilité d'exprimer les priorités nationales et régionales et d'en diriger la mise en application pour le compte de leurs peuples Cp. 10). L'initiative que constitue le NEPAD est ainsi l'expression de l'engagement des dirigeants africains à traduire en actions concrètes les aspirations profondes de leurs peuples. C'est du fait de cette responsabilité qu'en retour ces dirigeants lancent à tous les peuples africains, dans toute leur diversité, un appel à une prise de conscience de la gravité de la situation et de la nécessité pour eux de se mobiliser pour mettre fin à la marginalisation du continent. 144 Le NEPAD et la n,/lexioll Sil l' le clén!foppeme11f 2. Le caractère global du NEPAD el la mise en perspective des économiques africaines Le NEPAD est un projet global qui s'efforce de prendre en compte la muItidimensionnalité du développement. Ce caractère englobant apparaît d'abord à la détermination des composantes qui concernent non seulement les ressources matérielles, mais aussi les ressources écologiques, paléontologiques et archéologiques, la richesse de la culture africaine. Il apparaît ensuite à l'effort d'exhaustivité faite dans l'analyse des facteurs de blocage du développement dont le document fait l'inventaire interne et externe, en situant les différents niveaux de responsabilité. Il apparaît enfin dans la relation qu'il établit entre le développement du continent et le processus de mondialisation. Le NEPAD situe en effet d'emblée l'Afrique et son évolution dans le contexte de mondialisation, justifiant ainsi qu'il s'analyse de ce fait comme définissant un nouveau partenariat entre l'Afrique et le reste du monde. Ce partenariat tire partie des réalisations du passé et réfléchit sur les leçons tirées d'une expérience douloureuse, pour le rendre crédible et réalisable. Le caractère global du NEPAD apparaît aussi dans sa structuration et son contenu. Les objectifs sont englobants pour couvrir l'ensemble des dimensions du développement. Ainsi la Stratégie Africaine pour assurer un développement durable couvre neufs domaines prioritaires en identifiant dans chacun des domaines les activités à entreprendre à court, moyen et long termes. " L'objectif du NEPAD est d'imprimer un nouvel élan au développement du continent en comblant l'écart actuel dans les secteurs prioritaires, afin de permettre à l'Afrique de rattraper son retard par rapport aux régions développées du monde. Ainsi outre les initiatives relatives à la paix, la sécurité, la démocratie et la bonne gouvernance, les priorités sectorielles suivantes articulent le contenu de la stratégie: - Infrastructures, - Ressources Humaines, - Santé, - Technologies de l'Information et de la Communication, - Agriculture, - Énergie - Accès des exportations africaines aux marchés des pays développés. Le caractère global du NEPAD en explique la cohérence et la mise en perspective qu'i! fait des économies africaines. La cohérence tient d'abord à la nature des priorités définies, mais aussi aux caractères structurants du cadre de réalisation. Ainsi, la réalisation se situe à l'échelon régional, l'intégration régionale étant définie comme le 145 Le NEPAD et lu tbéorie du dél'e!oppelllel7t postulat opératoire par excellence. Les pays africains est-il souligné, "ont besoin de mettre leurs ressources en commun et de favoriser la coopération et l'intégration économique régionale du continent pour améliorer leur compétitivité sur le plan régionale ". Le NEPAD met l'accent sur la prestation de services publics régionaux et sur la promotion du commerce et des investissements intra-africains ... et donnera la priorité à la consolidation des capacités pour améliorer l'efficacité des structures régionales existantes et rationaliser les organisations régionales existantes (p. 20). Les économies africaines sont ainsi mises en perspective d'abord sur le plan spatial. Mais elles le sont aussi par rapport au temps. L'horizon choisi est d'emblée le long terme, en rupture avec le court terme qui a caractérisé la période d'ajustement structurel en dépit des lourdes hypothèques que les décisions de court terme prises dans ce cadre ont fait peser sur l'avenir de ces économies. " Le NEPAD se veut une vision à long terme du programme de développement de l'Afrique par les Africains eux-mêmes" (p. 13). 3. Les priorités stratégiques centrées sur l'homme Le choix des priorités est déterminé par leur caractère structurant tant en ce qui concerne l'économie que s'agissant de cette dernière. L'accent mis sur les conditions préalables requises pour un développement durable est de ce point de vue, significatif de ce que peut avoir d'impact positif la plasticité des structures sociales. Ainsi la sécurité, la démocratie, la bonne gouvernance, le respect des droits de l'homme et une saine gestion économique sont posées comme des conditions préalables indispensables au développement durable. Tout aussi indispensable est la promotion de la culture et la préservation du patrimoine écologique. Ces priorités d'ordre social sont en cohérence avec les priorités sectorielles qui articulent le développement humain. Il en est particulièrement ainsi de l'accent mis sur la formation des ressources humaines dans un monde où la hiérarchie des nations est déterminée par la maîtrise de la capacité de production du savoir et de la technologie, en particulier les technologies de l'information et de la communication. La construction d'économies solides, dynamiques et compétitives suppose donc que l'offre de formation assure la disponibilité de capital humain en quantité et en qualité suffisantes. L'éducation devient donc une priorité absolue, et celle-ci ne concerne pas seulement la formation, mais aussi l'utilisation de ressources formées pour imprimer à la société les mutations indispensables et surtout lui donner la capacité d'anticiper l'avenir. On doit ainsi saluer la prise de conscience de l'incidence négative de l'exode des cerveaux et l'urgence à créer les conditions d'utilisation optimales des ressources humaines de la diaspora. 146 Le NEPAD et la n>flexion 5111" le dél'e!oppemenr Le NEPAD affirme dans le même sens l'importance de la culture qui " fait partie intégrante des efforts de développement du continent et qu'il est indispensable de protéger et d'utiliser correctement le savoir autochtone qui représente une dimension importante de la culture du continent et d'en faire bénéficier toute l'humanité ". Et c'est parce que la vision déterminant les priorités situe l'homme au centre du projet de développement que le NEPAD implique dans sa mise en œuvre, que tous les acteurs sociaux en contribuent à la mise en réalisation. Ainsi, devraient se développer les partenariats créatifs entre les secteurs public et privé. Cette nécessaire implication de tous les acteurs sociaux pose ainsi l'urgence de l'appropriation du NEPAD non plus seulement par les dirigeants mais aussi par les sociétés civiles africaines et les principaux acteurs économiques que sont les chefs d'entreprises et les syndicats des travailleurs. b) De quelques questions fondamentales conditionnant le succès du NEPAD Si le NEPAD constitue un tournant positif dans l'évolution de la réflexion économique en Afrique et si sa mise en œuvre ouvre des perspectives nouvelles à notre Continent, la matérialisation de ces perspectives dépendra des réponses qui seront apportées à un certain nombre d'interrogations dont trois nous paraissent particulièrement importantes, à savoir: - la question du financement, -la foi dans la mutation conceptuelle qui se serait opérée du côté des organisations internationales de financement, -l'appropriation effective du NEPAD par les populations et sa mise en œuvre effective par les Africains eux-mêmes. 1) Le financement du NEPAD L'enthousiasme que l'on peut avoir du NEPAD ne doit pas occulter les interrogations liées à son financement. Le NEPAD, nous l'avons dit, se veut particulièrement ambitieux pour la croissance et le développement du continent. Cette ambition s'exprime à travers l'objectif de réaliser un taux de croissance annuel de 7 %. Cette ambition suppose une forte mobilisation de ressources que le NEPAD évalue à 64 milliards de dollars. La question vient immédiatement de savoir comment en assurer le financement. Il est envisagé de mobiliser l'épargne interne et d'améliorer les recettes fiscales, et dans cette perspective, un accent est mis sur le renversement de la tendance à la fuite des capitaux. Mais pour l'essentiel, le financement " devra être obtenu de l'extérieur du Continent .. <p. 37). C'est précisément là qu'on peut s'interroger pour 147 Le NEPAD et lu tbéorie dit dél'eloppement exprimer quelques inquiétudes quant à la capacité à assurer la mise en œuvre du programme, car cette option ne marque pas de changement significatif par rapport aux 40 ans d'après les indépendances, où toute la stratégie de développement a été fondée sur le recours aux capitaux extérieurs. Certes, ce recours repose pour une large part et à court et moyen terme sur l'allégement de la charge de la dette, à travers les mécanismes existants et à travers d'autres initiatives nouvelles. Mais il n'y a là rien de particulièrement rassurant au regard des expériences historiques. Le Forum sur l'Aide Publique au Développement (APD) apparaît, de ce point de vue comme une nébuleuse peu rassurante quant à la disponibilité effective des fonds pour financer les différentes priorités retenues. Un approfondissement de la réflexion sur la croissance et le développement des ressources intérieures apparaît ici comme urgence, quand on sait que la Plan de Lagos n'a pu justement être mis en œuvre parce que l'hypothèse fondant son application était celle d'un afflux massif de capitaux extérieurs. L'approfondissement s'impose d'autant plu qu'il n'est pas évident, comme on semble l'admettre, que les organisations financières internationales aient opéré une mutation fondamentale dans leur perception des problèmes de l'Afrique et de son devenir. 2) L'ambiguïté de l'appui des organisations financières internationales Le document renvoie de manière régulière à la Banque Mondiale, au FMI, à l'OMC, à côté du rôle central assigné à la Banque Africaine de Développement. L'hypothèse est ainsi implicitement faite que la vision du Continent qui sous-tend le NEPAD est convergente avec celle de ces organisations. Certes la Banque Mondiale et le FMI ont assuré de leur appui total la nouvel1e donne envisagée par le NEPAD. La Banque Mondiale ne cesse depuis de souligner l'appui technique qu'elle est disposée à accorder en même temps qu'elle se pose en facilitatrice du dialogue avec les partenaires. Mais peut-on dire qu'au niveau de ces organismes, il s'est produit un véritable aggiornamento leur permettant de comprendre et d'admettre que c'est aux Africains eux-mêmes que doit revenir l'initiative et la détermination de leurs choix de développement? Il est permis d'en douter lorsqu'on sait d'une part, que les vingt dernières années ont été marquées par la prise en main totale des économies africaines par les bailleurs de fonds en général, ces organismes en particulier, et d'autre part que les grandes orientations qui fondent le comportement de ces organismes sont définis à des niveaux où les préoccupations de l'Afrique sont totalement absentes. Or ces orientations obéissent à une logique à bien des égards 14!:J Le NEPAD et la réflexion Sil l' le d(il'("oppemellf antinomiques par rapport à celles qui fondent le NEPAD. Peut-on s'attendre véritablement que la part de l'Afrique dans le commerce mondial puisse substantiellement croître sur la seule base de la négociation de conditions plus équitables dans le cadre des accords multilatéraux de l'OMC, alors que précisément l'OMC postule le démantèlement de tous les systèmes de préférence, ainsi qu'on l'a vu avec la position prise au sujet de la banane? Il Y a là une interrogation grave dont les réponses conditionnent le succès du nouveau partenariat. 3° L'appropriation du NEPAD par les populations et sa mise en œuvre par les Africains Le NEPAD est au départ une initiative politique des Chefs d'États Africains, s'appuyant pour sa mise en musique sur l'expertise africaine. Mais il importe que les populations se l'approprient pour que sa mise en œuvre par les Africains eux-mêmes soit assurée. Les Chefs d'États en sont d'ailleurs conscients, qui invitent les peuples d'Afrique à reprendre confiance en leur génie et à participer à l'édification de la nouvelle Afrique. Cette appropriation implique que les débats sur le nouveau partenariat s'élargissent aux différents secteurs d'activités et intéressent l'ensemble des acteurs sociaux. On peut dès lors s'interroger sur l'impression que les débats actuels donnent de ne se limiter qu'à quelques cercles ou que la préoccupation principale soit d'intéresser les partenaires extérieurs au Continent en négligeant les acteurs internes. Il peut de ce point de vue paraître surprenant par exemple que jusqu'à présent, les divers parlements africains n'en aient pas fait l'objet de débats et de discussions avec les gouvernements, ni que les représentations nationales s'en imprègnent elles-mêmes, pour ensuite en disséminer le contenu auprès de leurs mandants. La mise en place des structures chargée d'en assurer la dissémination et la réalisation est par ailleurs inégales suivant les pays, la plupart n'en disposant d'ailleurs pas. De même, alors que le NEPAD fait de l'intégration un des moyens essentiels de sa mise en œuvre, toutes les organisations régionales et sous-régionales ne semblent pas en avoir fait l'enjeu essentiel de leur agenda. On observe aussi une certaine passivité du côté des institutions universitaires et centres de recherches, alors même CJue leur réflexion devrait en faciliter l'appropriation, l'intelligence et la détermination des axes de mise en œuvre. Il faut par ailleurs s'assurer que le partenari:lt ne se traduira pas par une confiscation du NEPAD par les organisations internationales ou par les bailleurs de fonds qui en dénatureraient la vision en déterminant les conditions de réalisation et d'exécution des projets, à partir des conditionnalités accompagnant les financements. 149 Le NEPAD et III théorie du dél'efoppe1l1ent Le problème de l'appropriation demeure donc une interrogation fondamentale, dont il faut se saisir pour donner aux peuples africains qu'il ne s'agit pas d'une initiative de plus extérieure à eux et qui viendrait une fois de plus dépouiller le Continent de sa capacité à décider de son destin. 150 TROISIÈME PARTIE LE NEPAD, INSTITUTIONS, GOUVERNANCE ET FINANCEMENT Le NEPAD et la bonne gouvernance Première radiographie, premiers enseignements par Pro Fouda Séraphin Mag/oire CEREG!FSEG - Unil'ersité ue l'aol/nué Il - Cam(!rOl/n INTRODUCTION Le NEPAD place au cœur de sa problématique la bonne gouvernance comme facteur de développement et de succès de son programme d'actions. En particulier, dans le cadre de • l'initiative pour la démocratie et la bonne gouvernance ", les dirigeants africains reconnaissent que" le développement ne peut se réaliser en l'absence d'une démocratie véritable, du respect des droits de l'homme, de la paix et de la bonne gouvernance ... (ils prennent en conséquence) l'engagement de respecter les normes mondiales en matière de démocratie, dont les principales composantes sont le pluralisme politique, l'existence de plusieurs partis politiques et de plusieurs syndicats, l'organisation périodique d'élections démocratiques libres, justes et transparentes afin de permettre aux populations de choisir librement leurs dirigeants ". L'objectif de. l'initiative pour la démocratie et la bonne gouvernance ", de l'avis des promoteurs du NEPAD, est ainsi de contribuer à • renforcer le cadre politique et administratif des pays participants, en accord avec les principes de démocratie, de transparence, de responsabilité, d'intégrité, de respect des droits de l'homme et de primauté du droit. Elle est renforcée par l'initiative pour la gouvernance économique qu'elle soutient et avec laquelle elle partage des caractéristiques clés. Ensemble, elles doivent contribuer à utiliser l'énergie du continent pour progresser sur la voie du développement et de l'éradication de la pauvreté ". Dans cette contribution, je m'intéresse aux liens entre la bonne gouvernance et le développement. Je voudrais, tout d'abord, proposer ici ma définition de la bonne gouvernance. Je dirais que la bonne gouvernance se réfère à un ensemble de règles de gouvernement justes et équitables qui, premièrement, permettent au plus grand nombre 153 Le NEPAD, il/stitlltiol/s, f!,(!llI'enwl/ce et.!immcemellf l'accès aux richesses et à la gestion des affaires publiques, et qui, deuxièmement, contribuent à l'efficacité des politiques économiques et des entreprises et à l'épanouissement du monde des affaires 1. Dans cette acception, ma définition englobe aussi bien la gouvernance politique, que la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises. La bonne gouvernance suppose ainsi, non seulement l'absence de corruption et la mise en place de politiques macroéconomiques saines, mais aussi le respect des droits de l'homme et des droits de propriété. Je voudrais aussi, en guise de remarque liminaire et pour formuler ma problématique, évoquer brièvement l'accueil réservé par les populations africaines au NEPAD. Je voudrais, à cet égard, rappeler que le NEPAD a suscité au cours de ces derniers mois deux réactions contrastées auprès de l'opinion publique africaine: le scepticisme, d'une part, et l'enthousiasme, d'autre part. De manière générale, le scepticisme est venu de ce que les opinions publiques considèrent le NEPAD comme une n-ième initiative des dirigeants africains succédant à d'autres initiatives, comme le Plan d'action de Lagos de 1980 ou le Traité d'Abuja de 1991, qui ne sont restées que des calendriers de bonnes intentions et dont les recommandations sont restées, la plupart du temps, lettre morte. Comme ces initiatives précédentes, le NEPAD n'aurait, de l'avis des sceptiques, que très peu de chances de succès. Ce scepticisme est accentué par le fait qu'il intervient dans un environnement international caractérisé par un appel, par les leaders africains, à l'accroissement de l'aide internationale et à une implication plus importante du secteur privé international dans les économies, alors même que l'aide internationale en direction de l'Afrique ne cesse de s'amenuiser et que le secteur privé international semble davantage tourné vers d'autres régions du monde, et en particulier, vers l'Asie. A titre d'exemple, l'aide internationale par habitant en Afrique subsaharienne est passée de 33 dollars en 1991 à 20 dollars en 1999 (Banque Mondiale, 1999, 2002). En termes d'investissements directs étrangers, l'Afrique au Sud du Sahara a reçu 7949 millions de dollars US en 1999 alors que l'Asie de l'Est et la région Pacifique ont reçu 56041 millions de dollars au cours de la même année, soit six fois plus que l'Afrique Subsaharienne (Banque Mondiale, 2002). L'enthousiasme suscité par le NEPAD est venu, pour sa part, de ce que le NEPAD se présente comme la reconnaissance par les dirigeants 1. Sur les 101 dirigeants qui ont perdu le pouvoir à la suite d'un coup d'État, les deux tiers environ ont été assassinés, emprisonnés ou contraints à l'exil. Plus précisément vingt-sept ont péri de mort violente, trente-sept ont été arrêtés, jetés en prison ou assignés à résidence, vingt-neuf ont été contraints à l'exil, tout au moins temporairement. Sur cette question, voir Banque Africaine de Développement (2001). 154 Le NEPAD et lu honne MOlll'en/{/nce africains eux-mêmes d'erreurs et d'errements passés dans la gestion de leurs États, dont la gravité requiert un ajustement rapide dans un monde en mutations. Comme le souligne le document de présentation de cette initiative, "Le NEPAD reconnaît que, dans le passé, des tentatives visant à formuler des programmes de développement au niveau des programmes de développement au niveau du continent ont été faites. Pour des raisons, à la fois internes et externes, y compris un leadership et un degré de participation douteux des Africains euxmêmes, ces programmes n'ont pas été couronnés de succès ". Aujourd'hui, 340 millions de personnes, soit près de la moitié de la population du continent, vivent avec moins d'un dollar US par jour. Le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans est de 140 pour 1000. L'espérance de vie à la naissance est de 54 ans seulement. 58 % de la population a accès à l'eau potable. Le taux d'alphabétisation des personnes de plus de 15 ans est de 41 % ... Ces faits appellent à une attention accrue, dans la mesure où ils sont un facteur réel d'instabilité sodo-politique et, surtout, un facteur susceptible de menacer le maintien au pouvoir de nombreux dirigeants. Comme le rappelle opportunément la Banque Africaine de Développement (2001), sur les 180 passations de pouvoir qu'a connue l'Afrique depuis les indépendances, 101 dirigeants ont quitté le pouvoir à la suite d'un coup d'État ou d'un événement extra-constitutionnel similaire 2 . En particulier, les années 1990-1999 n'ont pas conduit à un affaiblissement de cette tendance qui paraît avoir la même force que dans les années 1980-1989. En effet, le nombre de renversements de Chefs d'État est resté identique et égal à 22 pour les deux périodes. Je voudrais dire, pour ma part, que, face au parti du scepticisme, et ne serait-ce que par le fait que le NEPAD est, dans une certaine mesure, une reconnaissance des erreurs passées (inédite dans l'histoire du continent), j'ai définitivement choisi le parti de l'enthousiasme. Aussi, dans cette contribution, je me propose de montrer, d'une part, que le NEPAD est une initiative ambitieuse qui représente le triomphe des règles de gouvernement internalisées sur les règles de gouvernement imposées (I). Je me réfère ici, pour ces dernières notamment, à la conditionnalité. Je me propose, d'autre part, de définir les conditions de succès du NEPAD dans son volet du rôle de la bonne gouvernance dans la promotion d'un développement durable OI). Je montrerai, à cet égard, que le NEPAD est une initiative actuellement contrariée par la corruption et la faiblesse de l'engagement démocratique. 2. Ceci explique dans une large mesure les rét1exions actuellement en cours sur la réforme cle la conditionna lité. Sur une première ébauche, voir Collier et Alii (997). En particulier, ces auteurs plaident pour le passage cl'une • conditionnalité cl'instolments " à une" conclitionnalité de performance ". Voir aussi sur cette question, Guillaumont et Chauvet (2001). 155 Le NEPAD, institutiolls, U0111'elïllmce et jlllU11cemellt 1. LE NEI'AD : lINE INITIATIVE AMBITIElISE Le NEPAD est une initiative ambitieuse qui peut être présentée comme le triomphe des règles de gouvernement internalisées sur les règles de gouvernement imposées. A. Le NEPAD ou le constat d'échec des règles de gouvernement imposées Le début des années 1990 a été marqué par l'adoption par de nombreux pays africains des plans d'ajustement structurel. Ceux-ci ont été mis en place à la suite de récessions et de graves dysfonctionnements des systèmes économiques et politiques dans ces pays. L'appui des bailleurs de fonds aux programmes d'ajustement s'est accompagné de la formulation de conditionnalités destinées à améliorer l'efficacité des mesures de réformes économiques et politiques. De manière générale, les conditionnalités sont apparues comme un ensemble de règles de gouvernement imposées par les bailleurs de fonds bilatéraux et surtout multilatéraux parmi lesquels le FMI et la Banque Mondiale se présentaient comme les acteurs les plus virulents, pour contraindre les décideurs concernés à mettre en place des réformes radicales dans leur gestion quotidienne. Les conditionnalités définies par les bailleurs de fonds ont ainsi généralement comporté à la fois des aspects d'ordre économique et des aspects d'ordre politique. Les aspects d'ordre économique se référaient essentiellement à la subordination de l'octroi de financements extérieurs au respect par le gouvernement d'un pays donné de la réalisation des objectifs d'une certaine politique économique. Les aspects d'ordre politique, pour leur part, se rapportaient à la subordination de l'attribution de financements extérieurs, soit au respect du déroulement" normal" du processus démocratique, soit au respect des droits de l'homme. La logique de la définition et de la mise en œuvre de la conditionnalité est bien résumée par Collier et Alii (997). D'après ces auteurs, on peut dire que, pour les bailleurs de fonds, la conditionnalité a servi, premièrement, d'incitation ou de moyen d'encouragement aux dirigeants pour modifier les politiques macroéconomiques jusque-là mises en œuvre. Deuxièmement, elle a constitué un critère (de sélection) pour choisir les gouvernements auxquels devait être accordée l'aide à la réforme. Troisièmement, elle a été utilisée pour limiter ou éviter la fongibilité de l'aide reçue Le., que celle-ci soit utilisée à d'autres fins que celles à laquelle elle est destinée. 156 Le NEPAD et la honne ,golll'ernul1ce Quatrièmement, la conditionnalité a été utilisée comme une menace crédible pour forcer les gouvernements à ne pas abandonner la voie des réformes. Cinquièmement, enfin, elle a servi de signal avertisseur, en vue de la réduction des coûts d'acquisition de l'information sur les gouvernants, par le secteur privé. Ces cinq motivations sont aujourd'hui généralement résumées sous les concepts génériques d'" incitation" de " sélectivité ", de " paternalisme ", de " restriction" et de "signalisation ". Un bref bilan de la conditionnalité permet aujourd'hui de dire, malgré les critiques, que quelques résultats positifs ont été atteints. En effet, de nombreux pays africains ont évolué vers la démocratie, même si les processus électoraux s'accompagnent encore de formes de contestations diverses des résultats. Ainsi, depuis le début des années 1990, 42 pays ont organisé des élections présidentielles ou parlementaires multipartites. De même, de nombreuses économies africaines ont retrouvé, malgré quelques vicissitudes, le chemin de la croissance économique. En 2000, 30 pays sur les 53 qui composent le continent affichent un taux de croissance supérieur à 0,5 %. A la fin des années 1980, seule une quinzaine de pays, à peine, exhibaient un taux de croissance positif. Comme on le sait aujourd'hui, la conditionnalité a été marquée par de nombreuses faiblesses. On peut citer parmi celles-ci, sa définition tatillonne, son absence d'internalisation par les principaux utilisateurs, son paternalisme... D'un autre côté, la conditionnalité ne s'est pas seulement accompagnée d'un accroissement des exigences des bailleurs de fonds, mais également d'une confusion dans les rôles entre ceux-ci. On peut sans conteste imputer l'échec ou la lenteur des réformes et la résistance des dirigeants aux réformes préconisées au cours de la décennie 1980-1990 à ces différentes faiblesses de la conditionnalité.:l. Enfin, les conditionnalités n'ont pas enrayé de manière significative l'accroissement de la pauvreté dans la plupart des pays africains. Ceci montre que, de manière générale, les règles de gouvernement non endogènes ne peuvent promouvoir le développement. Sur les 162 pays considérés par le PNUD (2001) dans son classement mondial des pays en fonction de l'indice de développement humain, aucun pays africain n'apparaît dans le groupe des pays à "développement humain élevé ". On compte, par contre, dans ce groupe, quatre pays d'Amérique Latine (Argentine, Uruguay, Chili, Costa Rica). Le pays africain le mieux classé (i.e., la Libye) apparaît à la cinquante-neuvième place. L'Afrique du Sud, qui dispose cie l'économie la plus puissante du continent, occupe une modeste quatre-vingt-quartozième place. 3. Ceci explique dans une large mesure les rétlexions actuellement en cours sur la réforme de la conditionnalité. Sur une première ébauche, voir Collier et Alii (997). En particulier, ces auteurs plaident pour le passage d'une" conditionnalité d'instruments" à une "conditionnalité de performance ". Voir aussi sur cette question, Guillaumont et Chauvet (2001). 157 Le I\iEPAD, institutiolls. ~01/1'en1Ullœetjillullœmellt Le NEPAD traduit la volonté d'une appropriation des règles de gouvernement justes et équitables par les gouvernants et les populations locales, en vue d'un développement durable. B. Le NEPAD ou le triomphe des règles de gouvernement internalisées Avant de m'intéresser à ce en quoi le NEPAD constitue le triomphe des règles de gouvernement internalisées, je voudrais remarquer que le NEPAD tranche avec le Plan de Lagos de 1980 et le Traité d'Abuja de 1991 sur au moins deux points. Tout d'abord, il constitue essentiellement une initiative des hommes politiques, et non des technocrates. Ensuite, il définit les conditions de succès d'un partenariat entre l'Afrique et le reste du monde dans une perspective nouvelle de long terme. L'une des faiblesses du Plan de Lagos et du Traité d'Abuja est qu'ils sont apparus comme des projets élaborés par les technocrates. Il en a résulté, comme pour la conditionnalité, une insuffisante appropriation par les hommes politiques et les populations locales de l'essence de ces projets. La théorie économique, à travers l'étude des délais de la politique économique, a contribué à montrer le rôle majeur joué par l'homme politique dans la mise en oeuvre et le succès de la politique économique. En effet, l'homme politique détermine le choix du moment de l'intervention, mais aussi souvent le mode d'intervention sur la base de choix alternatifs. Avec le NEPAD, les hommes politiques africains semblent avoir choisi de prendre eux mêmes le leadership dans la vision stratégique du développement de l'Afrique pour le troisième millénaire. Le NEPAD est, en effet, comme le résume l'un de ses initiateurs, Olusegun Obasanjo, .. un plan conçu par l'Afrique à l'intention du peuple africain ". Plus précisément, il est le fruit de la fusion préconisée, lors du Sommet des Chefs d'État de l'OUA de Lusaka de juillet 2001, entre le Partenariat du millénaire pour la relance de l'Afrique (Millenium Africa Renaissance Program) élaboré par les Présidents Thabor Mbeki (Afrique du Sud), Olusegun Obasanjo (Nigeria) et Abdelaziz Bouteflika (Algérie) et le Plan Oméga de Abdoulaye Wade (Sénégal). En ce qui concerne le partenariat avec le reste du monde, le NEPAD apparaît comme un glissement de l'appel aux initiatives publiques en général, qui a dominé la politique africaine de coopération internationale, vers un appel aux initiatives privées, comme en témoigne l'organisation récente à Dakar d'un Forum sur la question. Bien que cela traduise une évolution qui est dans l'air du temps, on ne peut manquer de constater que ce glissement apparaît également comme une absolue nécessité. La dette publique des États africains représente en moyenne de 40 % à 60 % de leur dette totale. Le service de la dette 158 Le NEPAD et la h01l1le p,OIlI'erllallce pour l'ensemble des pays reste élevé. Il équivaut en moyenne à 5,1 % du PIE et à 16,5% des exportations de biens et services, avec des pointes de 14 et 46 OfrJ pour certains pays comme la Zambie CPNUD, 2001). L'Afrique subsaharienne ne génère que 2 % des exportations mondiales. Dans les faits, l'internalisation des règles de bonne gouvernance est consacrée par le document du NEPAD qui définit les modalités d'exécution et de mise en œuvre des résolutions prises. plus précisément le NEPAD prévoit" une série d'engagements par les pays participants à instituer ou consolider les pratiques et les processus fondamentaux de bonne gouvernance; la promesse faite par les pays participants de jouer un rôle déterminant en soutien aux initiatives qui encouragent une bonne gouvernance; l'institutionnalisation des engagements par les dirigeants du NEPAD pour assurer que les valeurs fondamentales de l'initiative soient respectées. Les États membres du NEPAD vont aussi prendre plusieurs engagements pour satisfaire aux normes fondamentales de bonne gouvernance et de conduite démocratique tout en s'aidant les uns les autres C.. ') Les pays participants joueront un rôle déterminant en appuyant et en mettant sur pied des institutions et des initiatives qui protègent ces engagements c. ..) Le forum des Chefs d'État du NEPAD servira de mécanisme grâce auquel les dirigeants du NEPAD pourront suivre et évaluer les progrès réalisés Si le NEPAD est une initiative ambitieuse, mais aussi, je ne l'ai peut être pas assez souligné, louable, il reste cependant une initiative largement contrariée par la persistance de la corruption et la faiblesse de l'engagement démocratique. c...). ". II. LE NEI'AD : lINE INITIATIVI' CONTIlAIlII'E l'Ail LA COlllllll'TION ET LA FAIBLESSE IW L'EN(;M;EMENT D(~MOCIlATI<J[lE La question à laquelle je voudrais m'efforcer de répondre dans cette deuxième partie de mon intervention est la suivante: à quelles conditions le NEPAD, à travers la bonne gouvernance, peut-il promouvoir le développement africain? La réponse à cette question suppose d'abord que je fasse un point rapide sur les liens entre la bonne gouvernance et le développement, en général, et, de manière plus spécifique, sur ces liens en Afrique. A. Bonne gouvernance et développement: des liens complexes Au cours de ces dernières années, on a assisté à une multiplication des travaux mettant l'accent sur la relation entre la bonne gouvernance 159 Le NEPAD, illStifUfiol1s, ~01II'erllClllce etfil/{illcemeUf et le développement, La Banque Mondiale (2002) et la Banque Africaine de Développement (2001) ont, par exemple, consacré leur rapport annuel sur le développement à cette question 1 , Ces deux rapports ont été précédés, au cours des années antérieures, par un foisonnement de travaux sur cette question qui ont établi, de manière générale, que les facteurs institutionnels comptent dans le processus d'élaboration et de mise en œuvre des politiques économiques, mais aussi dans le succès ou l'échec de ceux-ci 5 , Pour faire le point sur les liens entre la bonne gouvernance, je vais me limiter ici à l'étude des relations entre la démocratie et le développement, d'une part, et des liens entre la corruption et le développement, d'autre part, Pour examiner ces deux relations, je pars des données de quarante-et-un pays en développement et en transition relatives à la corruption, à la démocratie, et au développement humain pour l'année 1999, La corruption est saisie à l'aide de l'indice de perception de la corruption calculé par Transparency International<1. La démocratie est saisie à l'aide de l'indice des libertés politiques proposé par la Freedom House 7 , Le développement humain est évalué à l'aide de l'indice de développement humain (IDH) élaboré par le Programme des NationsUnies pour le Développement. La discussion des problèmes méthodologiques liés aux différents indicateurs utilisés est volontairement laissée de côté, De manière générale, on s'attend à ce que: 10 la relation entre la démocratie et le développement humain soit positive, indiquant que la démocratie contribue au développement durable ; 20 la relation entre la corruption et le développement humain soit négative, traduisant l'idée que la corruption est un facteur de blocage du développement durable. 4. De manière générale, les travaux ont été stimulés par le développement prodigieux de la théorie des choix publics ou collectifs depuis la fin des années 1950 dont l'influence a été consacrée dans la deuxième moitié des années 1980 par l'attribution d'un Prix Nobel d'Économie à l'un de ses chefs de file, James Buchanan. . 5. Sur un point rapide sur les conclusions des différents travaux sur la question, voir Prezworski et Limongi (993) de Haans et Siermann (995). 6. L'indice de perception de la corruption mesure la corntption telle qu'elle est perçue par les hommes d'affaires, les spécialistes de l'analyse du risque et le grand public Il est compris entre 0 (qui correspond à une corntption extrême) et 10 (qui correspond à une grande probité). Les données fournies peuvent être consultées sur la page web de Transparency International (http://www.gwdg.de/uwww/2000Data.htm\). 7. L'indice des libertés politiques est compris entre 1 (qui correspond à une existence de libertés politiques importantes) et 6 (qui correspond à l'absence de libertés politiques), Les donnes relatives à cet indicateur peuvent être consultées sur la page web de Freedom House (http://ww.freedomhouse.org/ratings/index.htnù 160 Le NEPAD et la hO/l11e gOlfl'erml1lce Les résultats sont donnés par les deux graphiques ci-dessous. Il apparaît ainsi que ces graphiques confirment l'idée que la corruption est un frein le développement humain, d'une part, (étant entendu qu'un indice de perception de la corruption inférieur à 5 traduit un niveau de corruption élevé). En effet, les pays les plus corrompus affichent, de manière générale, un IDH relativement plus faible que les autres pays. Graphiques 1 et 2. (source: auteur) r- Corruption et développement humain i .. ë E CI c. c. 0,8 oi -! e 0,6 .~ ~ .Ê 0,4 'o:l ... .: CI 0,2 :ei O.L----+---t-----+-----'t-----l o 8 6 4 2 10 Indice de corruption Libertés politiques et développement humain 0,9 0,8 ...c • • CI 0.7 E Il c. 0,6 c. e c ëi -; 0.5 ~ ë 0,4 'tl ... .c: 'tl 0,3 .... =6 .: t •• • • • = 0,2 •• ••• -.• • • 0,1 0 0 2 4 Libertés politiques 6 8 Ils confirment, d'autre part, que les libertés politiques sont un aiguillon du développement durable. Il faut dire que ces graphiques confirment enfin les conclusions des travaux économétriques qui 761 Le NEPAD, institlltions, ~OIlI'erI1Ul/ce etjllUlllcelllellt établissent, de manière générale, l'imprécision de la relation entre la démocratie et le développement H. La théorie économique soutient, pourtant, que le processus démocratique, l'existence de libertés civiles génèrent des conditions susceptibles de conduire au développement. En particulier, les institutions démocratiques libèrent les capacités d'innovation des agents économiques et limitent les "comportements cleptocratiques" des gouvernants i.e., la possibilité pour les dirigeants des pays d'amasser des fortunes personnelles colossales et de mettre en œuvre des politiques impopulaires. La théorie économique montre également que la corruption paralyse le développement à travers différents canaux9. Elle détourne les ressources des secteurs auxquels elles étaient destinées et fausse la politique publique, Elle met à mal le principe de primauté du droit et sape les fondements des institutions nationales dont dépend le développement. En outre, la corruption accentue les inégalités économiques et sociales et amoindrit la crédibilité du gouvernement et des institutions publiques. De même, elle entame la confiance des investisseurs privés étrangers et décourage l'investissement direct étranger 10, Elle attire au contraire les investisseurs qui espèrent réaliser des gains rapides en montant des opérations hasardeuses, De ce fait, les capitaux qui devraient être mis à profit pour stimuler la croissance ont d'autres destinations, au détriment du développement économique. Enfin, le coût de la corruption oblige les petites entreprises à se réfugier dans l'économie parallèle, réduisant ainsi les recettes fiscales de l'État et ses chances d'équilibrer son budget. Je voudrais maintenant me tourner plus particulièrement vers la question relative aux conditions (ou aux chances) de succès du NEPAD aujourd'hui. 8. Près d'une vingtaine de travaux empiriques ont été consacrés à l'étude de la relation entre la démocratie et la croissance économique depuis le début des années 1970. Au total, deux études concluent à J'existence d'une relation négative entre la démocratie et la croissance; trois concluent à l'existence d'une relation positive; dix ne détectent aucun lien significatif entre la démocratie et la croissance; cinq concluent à l'existence d'une relation conditionnelle. Sur une discussion de ces résultats et des problèmes méthodologiques sous-jacents, voir Prezworski et Limongi (993) ou encore De Haans et Siermann (995). 9. Sur cette question, voir aussi Bardhan (997) et Tanzi (998). 10. En particulier, Wei (2000) montre qu'un accroissement de la corruption comparable à la différence entre Singapour (qui a un indice de perception de la corruption relativement faible et le Mexique (qui a un indice de perception de la corruption relativement élevé) aurait le même impact négatif sur l'investissement direct qu'un accroissement de 50 % des taux d'imposition marginale sur les revenus de l'investissement. 162 Le NEPAD el la han ne .qolll'ernUilce B. Crise de gouvernance et développement africain: entre guérison et rémission Une observation attentive des faits révèle que la corruption n'a pas reculé en Afrique en 2000. Un examen de l'échantillon des 90 pays examinés par Transparency International en 2000, révèle que dans le groupe des 46 pays considérés comme étant parmi les plus corrompus, se retrouvent 18 pays africains contre 9 pays d'Amérique Latine. Le Nigeria avec un score de 1,2 apparaît comme le plus corrompu des 90 pays qui constituent l'échantillon. Quatre pays se situent cependant dans la moitié supérieure de l'échelle de probité relative. Il s'agit du Botswana, de la Namibie, de la Tunisie et de l'Afrique du Sud. Les vingt-deux pays africains couverts par Transparency International obtiennent une moyenne de 3,4 points, contre 3,9 pour l'Amérique Latine et 4,5 pour l'Asie 11 . De même, les faits révèlent que l'approfondissement des processus démocratiques a été relativement timide sur le continent depuis la fin des années 1980. On peut certes constater, avec satisfaction, que la probabilité pour un chef d'État d'être renversé a diminué environ de moitié depuis les premiers temps de l'indépendance. Le taux de coups d'État est passé de 0,087 par pays-année dans les années 1960 à 0,046 par pays-année dans les années 1990. De même, on peut souligner, toujours avec satisfaction, que depuis le début des années 1990,42 pays ont organisé des élections présidentielles ou parlementaires multipartites, et que, entre 1998 et 1999, 68 % de la population d'Afrique subsaharienne vivent dans des conditions de " liberté partiellti, alors que dans les années 1980, 88 % de la population vivaient dans des conditions de " non-liberté .. (Banque Africaine de Développement, 2001). Cependant, l'engagement démocratique est resté relativement faible sur l'ensemble du continent. Depuis 1982, en effet, 13 chefs d'État en exercice (je puis dire seulement) ont été écartés du pouvoir par la voie d'élections. Ceci représente environ un sixième des changements de dirigeants intervenus sur le continent depuis cette date. Si l'on considère la période 1990-1999, on notera que sur les 63 changements de pouvoir intervenus au cours de cette période, 12 seulement ont fait appel à la voie démocratique. Le nombre de coups d'État est encore resté relativement plus élevé que le recours à la voie d'élections libres et pluralistes. Enfin, l'alternance ou la durée de maintien au pouvoir confirme définitivement ce faible engagement démocratique. En effet, quatorze des chefs d'État actuels sont au pouvoir depuis dix à vingt ans, et neuf depuis plus de vingt ans. Il. Les données fournies peuvent être consultées sur la page web de Transparency International Chttp://www.gwdg.de/-uwww/2000Data.html). 163 Le NEPAD, institlltions, Moul'erllance rt filial/cement 11 apparaît dès lors que le succès du NEPAD dépend de l'inversion des ces tendances. La corruption doit reculer. L'engagement démocratique doit augmenter. Les conditions de succès de cette double inversion des tendances peuvent être ici rapidement esquissées. Je voudrais tout d'abord remarquer que les causes de la faiblesse de l'engagement démocratique dans les pays africains tiennent essentiellement de la volonté manifeste de nombreux dirigeants à rester aux affaires le plus longtemps possible. L'un des facteurs qui détermine cette volonté est le degré généralement élevé de corruption des régimes politiques en place. Aussi, faut-il traiter, dans une certaine mesure, le problème général de la gouvernance et du développement en relation étroite avec la lutte contre la corruption. Je dois dire qu'il est cependant assez difficile d'établir une relation claire et nette entre la gouvernance et la corruption comme le montre le graphique 3 cidessous, bien que l'on puisse suspecter (comme le montre la droite de tendance) une relation négative. Ceci vient, en effet, de ce que la corruption touche des pays aux régimes politiques divers allant des dictatures aux démocraties établies. Graphique 3. (source: auteur) r'·--····_- i Libertés politiques et corruption 1 7.,---..............- - - - - - - - - - - - - _ - . . g6 • • st • ••• ==:s. 5 • • ••• ~ 4 ~ 3 .. .... "" 2 ~ '01· .:: 0+-----1-----1----+-----4-----1 o 2 4 6 8 10 Indice de corruption Les causes de la corruption sont relativement bien connues et bien documentées. Dans le rapport sur le développement dans le monde publié en 2002, la Banque Mondiale examine quelques facteurs qui sont à l'origine de la corruption. Elle identifie ainsi, entre autres, l'absence de participation du plus grand nombre à l'exercice du pouvoir, l'absence d'efficacité du système judiciaire, le nombre élevé de procédures écrites, la complexité des réglementations ou encore le sentiment d'injustice dans l'accès aux ressources (e.g., faibles rémunérations du facteur travail) comme étant des déterminants majeurs de la corruption. 164 Le NEPAD et la h01111e ~Oll/'erna11ce En particulier, il s'en dégage (comme l'indiquent les graphiques 4 à 6 ci-dessous) 1° gue la complexité des réglementations réduit j'efficacité du système judiciaire; 2° gue le nombre élevé des procédures écrites réduit l'accès à la justice; et 3° gue l'absence d'indépendance de la justice freine la mise en place des droits de propriété. Graphiques 4, 5 et 6 (source: Banque Mondiale, 2002). Complexité des procédures et efncaclté de la Justice 0,26-0,5 0-0,25 0,51-0,75 0,76-1 Complexité des procMures ,._--------Procédures écrites ct accès à la justice Procédures écrites (% dcs actions en Justice) Indépendance de la justice ct droits de propriété 0-0,2 0,210,40 0,410,6 0.61- 0,81- 0,8 1 Indépendance du système judiciaire Le NEPAD, institutions, MOIII'e/ïUII1CU et j/lUmee/llellt Ces éléments tracent les voies de succès du NEPAD. En particulier, il apparaît que le succès des programmes de bonne gouvernance doivent s'accompagner d'une réduction de la complexité des réglementations, ainsi que du nombre de procédures écrites. Il apparaît également qu'i! faut renforcer l'efficacité et l'indépendance du système judiciaire. Ceci justifie sans doute que parmi les réformes institutionnelles envisagées dans le cadre du NEPAD on retrouve, par exemple, la réforme de la fonction publique et de l'administration, le renforcement du contrôle parlementaire, la promotion de la démocratie directe et participative, la lutte contre la corruption et les détournements de fonds ainsi que la réforme des systèmes judiciaires. CONCLUSION Dans cette contribution, je me suis attelé à présenter le NEPAD de manière attrayante, en montrant qu'il constitue le triomphe des règles de gouvernement internalisées sur les règles de gouvernement imposées. J'ai aussi tenté de tracer les conditions de succès du NEPAD, qui peuvent ici se résumer à la lutte sans merci, ni concession contre la corruption. Celle-ci apparaît comme le meilleur moyen de conforter la démocratie, d'attirer les investisseurs étrangers et de fixer les investisseurs locaux. Elle apparaît également comme le meilleur canal de réduction de la pauvreté, dans la mesure où elle fixe efficacement les ressources locales. Ce programme attrayant pose le problème du financement de l'ensemble des mesures relatives à la lutte contre la corruption, dans un contexte de resserrement des budgets nationaux et de raréfaction de l'aide internationale. Je ne voudrais pas finir sur une note pessimiste, après avoir démarré mon propos sur une note d'enthousiasme. Aussi je dirais tout simplement, pour conclure qu'étant donné la justesse du diagnostic effectué par les dirigeants en place, je ne doute pas un seul instant qu'ils lui trouvent et lui appliquent une juste médication. BmUOGRAPHIE Banque Africaine de Développement, 2001, Rapport sur le défJeloppement en Afrique 2001, Paris: Economica. Banque Mondiale, 1999, Le savoir au service du développement, Rapport sur le détoeioppement dans le Monde, Paris: ESKA. Barclhan, P., 1997, "Cormption and development : a review of issues ",joumal of Economie Literature, Vol. 35, september, pp. 1320-1346. Collier, P., Guillaumont, P., Guillaumont, S., et Gunning, ].W., 1997, "Redesigning conditionality., World Det1elopment, Vol. 25 (9), pp. 13991407. 166 Lr> NEPAD r>f la hall Ile ,~Olll'r>1ïlllIlCe De Haan, J, et Siermann, C, 1995, "New evidence on the relationship between democracy and economic growth ", Public Choice 86, pp. 175-188. GuilIaumont, P., et Chauvet, L., 2001, "Aid and performance: a reassessment ", nJeJoumal ofDeœlopmem Stlldies, Vol. 37 (6), august, pp. 66-92. Prezworski, A., et Limongi, F., 1993, " Political regimes and economic growth ", Journal of Economie Pel'>opeetil·es,Vol. 7 (3), pp. 51-69. Programme des Nations-Unies pour le Développement (PNUD), 2001, Maki/If{ new teehnolof{ies workfor hl/man developmem, New York, Oxford: Oxford University Press. Tanzi, V., 1998, "Cormption arounc1 the world : causes, consequences, scope, and cures ", Ill1.F Stalf Papers, Vol. 45(4), c1ecember, pp. 559-594. Wei, S., 2000, "How taxing is corruption on international investors ", Review ~f Economies and Statisties, Vol. 82(1), pp. 1-11. World Bank (The), 2002, Buildillf{ institutions for markets, World Development Report, World Bank, Oxford: Oxford University Press. 167 Le NEPAD et le projet d'une banque centrale africaine par Abdoulaye Diagne Directellr UII CREA, Dt/kar - Sé11éRal INTRODUCTION: La création à Lomé en 2000 de l'Union économique africaine et l'élaboration du NEPAD rentrent dans la même logique que l'idée de la mise en place d'une Banque centrale africaine (BCA) et d'une monnaie unique à l'échelle continentale. Il s'agit de la nécessité d'intégrer aux plans économique et monétaire les pays africains si l'on veut mettre rapidement un terme à la marginalisation du continent et à l'extension de la pauvreté. Le projet de création d'une BCA soulève cependant une série de questions auxquelles il conviendra de donner des réponses appropriées pour parvenir à sa réalisation. L'appartenance à une union monétaire comporte des coùts et des avantages économiques. Il faut donc se demander si ses bénéfices sont supérieurs à ses coùts. La réponse à donner à cette interrogation dépend d'abord de la taille de l'union envisagée. C'est pourquoi on doit décider s'il faut créer une union monétaire pour chacune des cinq sous-régions de l'Afrique, ou pour tout le continent? En d'autres termes, quels devraient être les contours de l'espace d'intégration monétaire? Étant donné que la décision est déjà prise de créer l'Union économique africaine, la question de la zone monétaire optimale paraît avoir déjà trouvé une réponse : c'est à l'échelle de tout le continent qu'il faut l'envisager. Les bénéfices nets tirés de l'appartenance à une union dépendent ensuite de la forme - union incomplète ou intégrale? - qu'elle va revêtir. On s'intéressera à une union monétaire complète, c'est-à-dire à un système au sein duquel les pays africains ont supprimé leur monnaie nationale pour la remplacer par une unité monétaire commune à tous ses membres. Dans une telle union, la Banque centrale nationale n'existe plus ou n'a plus un pouvoir réel. 169 Le NEPAD. institutions, J!0lll'eIïU/1/C(' et/in(/1/celllent C'est sur la base de ces deux choix fondamentaux - intégration monétaire à l'échelle continentale, une monnaie unique - que sera analysé le projet de création d'une Banque centrale africaine (BCA). Nous montrerons dans les sections 1 et 2 que les coüts, bien qu'ils existent, sont souvent surestimés alors que les bénéfices sont très importants. Nous en conclurons que l'intégration monétaire complète sera un facteur de progrès économique à terme pour tous les pays du continent. Ceci nous amènera à proposer dans la section 3 un modèle de la future BCA avant d'indiquer dans la section 4 les jalons à poser pour arriver à sa mise en place. I. LES OBSTACLES À LA CH(,ATION D'lINI-: BANQlIE CENTRALE AFHICAINE 1. Les coûts économiques L'abandon de sa monnaie entraîne pour un pays le renoncement à un instrument de sa politique économique, à savoir la conduite d'une politique monétaire nationale indépendante. En d'autres termes, il n'a plus un pouvoir d'émission et ne détermine donc plus la quantité de monnaie en circulation, ni ne peut modifier son taux de change (dévaluer ou surévaluer). Les coüts d'une union monétaire découlent de ce renoncement. En effet, dans beaucoup de circonstances, ces politiques monétaires nationales autonomes sont utiles pour un pays: dévaluation du taux de change pour retrouver une compétitivité sur les marchés intérieurs et extérieurs, engranger plus de recettes fiscales tirées des importations de biens et services, corriger le déficit de la balance commerciale, recours à l'émission de monnaie pour faire face à des dépenses jugées incompressibles. L'abandon de ces avantages constitue les coûts d'entrée dans une union monétaire. Il faut y ajouter la nécessité de mener une politique monétaire et budgétaire de rigueur si l'on n'est loin de remplir les critères de convergence conditionnant l'adhésion à l'union (voir section 4). Les coûts liés à celle-ci sont donc d'ordre macro-éconofllique. Beaucoup de raisons amènent à penser cependant que ces coüts sont surestimés. Si l'on a sa propre monnaie et qu'on a tendance à être plus inflationniste que les pays à monnaies convertibles, le seul résultat possible est que l'utilisation de la monnaie nationale dans le pays se restreint progressivement au profit d'autres monnaies inspirant plus de confiance. Le contrôle des changes ou l'interdiction d'utilisation des devises étrangères dans les transactions nationales ne modifient pas la tendance fondamentale qu'est la fuite devant la monnaie nationale, qui ne remplit pas toutes ses fonctions. C'est là une situation fort bien connue sur le continent africain, qui explique le développement des 170 Le NEPAD et le pn)jet d'ltlle hal1iJlle cel1trale aji"icaille marchés parallèles de devises dans nombre de pays et la recherche effrénée de devises étrangères, Sur le territoire national, la monnaie du pays n'est plus seule à circuler, on recourt à d'autres monnaies ce qui contribue à une désintégration des structures de production, de distribution et de collecte d'épargne. Les monnaies étrangères réduisent la capacité des pouvoirs publics à asseoir une gestion macro-économique efficace. C'est le phénomène bien connu de dollarisation qui sévit dans beaucoup d'économies africaines. Si l'exigence de rigueur qui pèse sur la gestion de la monnaie nationale n'est pas pleinement acceptée, le pays s'expose à une monétisation excessive de ses déficits budgétaires, par conséquent à l'apparition de spirales inflationnistes, à l'accentuation des déséquilibres macroéconomiques, et à l'appauvrissement rapide des couches vulnérables qui n'ont pas la capacité d'indexer leurs revenus à la hausse des prix. Compte tenu des difficultés monétaires inextricables auxquels sont confrontés nombre de pays africains, l'adhésion à une monnaie unique africaine serait une manière d'importer de la rigueur. Elle permettrait aussi de se concentrer sur d'autres questions de politique économique, la gestion monétaire étant déléguée à une autorité crédible (voir section 3). 2. Les obstacles politiques En dépit des nombreux facteurs économiques qui peuvent accélérer la marche vers l'intégration monétaire continentale au cours des quinze prochaines années, des freins puissants risquent de bloquer le processus. Ces derniers sont avant tout d'ordre politique. La création d'une union monétaire ne peut se faire sans une volonté politique très forte non seulement des dirigeants mais aussi des leaders politiques dans l'opposition. En effet, celle-ci doit survivre aux changements des gouvernements pouvant intervenir dans les différents pays, notamment les plus importants. Une dimension importante de cette volonté politique est le règlement de l'épineuse question du leadership. Certains pays, en raison de leur poids économique et démographique, devrait jouer un rôle de locomotive en même temps que l'Union économique et monétaire de l'Afrique de l'ouest (UEMOA) et la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale (CEMAC) considérées dans leur entièreté. Certains de ces grands pays exercent cependant une faible attraction en raison de leurs désordres économiques et politiques et des craintes d'hégémonie qu'ils suscitent auprès des autres pays. Le jeu des puissances métropolitaines peut aussi retarder durablement le processus d'intégration. Si certains d'entre eux continuent à manifester la même volonté de conserver leur place privilégiée dans certains groupes de pays africains, elles seront un frein au processus d'intégration monéta ire africaine. 171 Le NEPAD, institlltions, ~olll'e/ÏIUl1Ce etfilUillcemellt Les chances d'un progrès substantiel vers l'union monétaire africaine au cours des quinze prochaines années dépendront largement de l'affirmation et de la traduction en actes concrets d'une grande volonté politique par les chefs d'état africains. II. LES HAISONS DE CHI-:EH tlNE BANQtlE CENTIlALE AFHICAINE 1. Les avantages économiques Les bénéfices attendus de l'entrée dans une union monétaire intégrale sont de nature micro-économique. Ces bénéfices sont les suivants: 1. des économies importantes résultant de la mise en commun des devises; 2. une variabilité plus faible des taux de change favorisant l'expansion du commerce et des investissements à l'intérieur de l'union; 3. une stabilité plus grande des prix effectifs ou anticipés conduisant à une allocation plus efficiente des ressources; 4. des économies importantes sur les coûts de transactions et une comparaison plus facile des prix d'un pays à un autre stimulant le commerce et les investissements dans l'union ; 5. des économies substantielles sur les intérêts à payer sur la dette publique en raison de la baisse à la fois des taux d'intérêts nominaux et de la prime de risque de taux de change; 6. des économies de ressources engendrées par la délégation de la politique monétaire à la seule banque centrale plutôt qu'à une multitude d'instituts d'émission qui forcément nécessitent chacun des coûts de fonctionnement élevés. Le recours à une monnaie unique entraîne donc une meilleure efficience économique qui résulte de l'élimination des coûts de transaction dus à la conversion des devises étrangères et de la suppression du risque de change lié aux mouvements futurs inattendus des cours des monnaies africaines. 2. Les progrès de l'Afrique en matière d'intégration économique et monétaire L'Afrique a une longue tradition d'engagement en faveur de l'unité régionale qui peut constituer un tremplin pour accomplir les pas décisifs vers une intégration monétaire continentale. Déjà dans les années 1950, Kwamé Nkrumah et d'autres leaders de l'indépendance 172 Le NEPAD et le pmjet d'l/Ile hallqlle centrale ajricaille africaine avaient lancé le mot d'ordre d'unité du continent. La Communauté économique des États de l'Afrique de l'ouest (CEDEAO) a été créée en 1975 à Lagos, la SADEC en Afrique Australe, l'UMA en Afrique du Nord, la CEMAC en Afrique Centrale, etc. En 1980, les Chefs d'Etat africains ont adopté le Plan d'action de Lagos (PAL) qui" mènerait à la création, aux niveaux national, sous-régional et régional, d'une économie africaine dynamique et interdépendante et [. .. ] jetterait ainsi les bases de la création éventuelle d'un marché commun africain conduisant à la communa uté économique africaine ". En prenant l'exemple de la sous-région" Afrique de l'ouest ", le traité de la CEDEAO a été révisé par le sommet des Chefs d'État tenu à Cotonou en juillet 1993. Le nouveau traité indique de façon précise les processus devant conduire à l'intégration régionale en Afrique de l'ouest. C'est ainsi que la CEDEAO devrait être à terme la seule communauté économique et monétaire de la sous-région, les décisions qui y seraient prises seraient exécutoires dans les États membres. Des initiatives similaires ont été prises dans les quatre autres sous-régions de l'Afrique, Tous ces efforts reflètent l'existence d'un courant de pensée en Afrique très favorable à l'intégration régionale. Un autre facteur favorable à la création d'une union monétaire africaine est l'uniformisation progressive des politiques économiques sous l'action des institutions de Bretton Woods qui ont signé avec la plupart des pays africains des programmes d'ajustement. Ceux-ci incluent invariablement la libéralisation des échanges extérieurs et la dévaluation nominale du taux de change qui ont pour conséquence une ouverture accrue des économies au reste du monde, donc aux autres pays de la sous-région. C'est ainsi que la plupart des pays ont consenti au cours des dernières années à un désarmement tarifaire, alors qu'avec l'ajustement monétaire dans les pays africains de la zone franc, toutes les monnaies ouest africaines ont maintenant des taux de change effectifs réels qui se sont largement dépréciés par rapport à leur niveau des années 1960 à 1993. Cette situation des années 1994-2000 contraste fortement avec celle des années 1970 et 1980-1993 marquées par une forte surévaluation des monnaies ouest africaines. L'action des institutions de Bretton Woods en matière d'ouverture des économies ouest africaines est maintenant renforcée par le traité de l'Organisation mondiale du commerce qui a été adopté par les pays de l'Afrique de l'ouest. Ce dernier contraint les pays signataires à abaisser sensiblement leurs barrières tarifaires et non tarifaires. Les bailleurs de fonds de l'Afrique sont devenus plus réceptifs aux arguments en faveur de l'intégration régionale. Des projets communautaires dans le domaine des transports, de l'énergie, etc. attirent maintenant leur intérêt. L'Union européenne appuie la CEDEAO dans ses efforts d'intégration. La réunion de Bamako entre douze Chefs d'État africains et les institutions de Bretton Woods ont été une opportunité pour ces dernières de marquer leur adhésion à une vision sous-régionale du développement de l'Afrique. 173 Le NEPAD, institlltiolls, p,OIl1'enumce et !in{{/lcement Les pays de la CEDEAO en Afrique de l'ouest, de la CEMAC en Afrique centrale et de la SADEC en Afrique australe ont défini des critères de convergence macro-économique qui portent sur le régime de taux de change (variabilité de taux de change dans une fourchette de 0 à 10 % dans la CEDEAO, libéralisation totale du compte courant), la réduction des taux d'inflation à un chiffre, la baisse sensible du ratio déficit budgétaire sur PIB et du financement du déficit budgétaire par la Banque centrale. Certes, beaucoup de chemin reste à parcourir pour beaucoup de pays, notamment en matière d'inflation et de financement du déficit budgétaire par la Banque centrale. Des succès durables au cours des prochaines années en matière de convergence macroéconomique permettraient aux États africains de franchir plus facilement le pas vers l'union monétaire intégrale. En effet, plus les politiques économiques se rapprochent, plus faibles sont les coûts liés à la participation à une intégration monétaire. En matière d'union monétaire complète, l'Afrique bénéficie déjà d'une riche expérience que représentent la BCEAO et la BEAC qui regroupent Il pays membres. Ces derniers ont déjà l'expérience des avantages liés à l'appartenance à une union monétaire complète: utilisation d'une monnaie convertible, élimination de tout risque de change pour les investissements dans la zone franc, économies d'échelle obtenues grâce à l'émission d'une monnaie unique, création d'une banque centrale supranationale indépendante capable de mener des politiques cohérentes dans le temps. L'existence d'une BCA peut être un instrument précieux d'accélération de l'intégration économique comme le montre l'expérience de la Banque centrale des États de l'Afrique de l'ouest (BCEAO). Elle a créé la Banque ouest africaine de développement, élaboré un système de comptabilité de l'Afrique de l'ouest (SYSCOA), installé à Abidjan une Commission bancaire indépendante chargée de veiller sur l'intégrité financière des institutions bancaires, financé les travaux préparatoires pour la mise en place d'une Union économique et monétaire ouest africaine (UÉMOA) ainsi que d'une Bourse régionale des valeurs mobilières, et s'attelle actuellement à la mise en place, dans chacun des États membres, d'une centrale des bilans. La gestion de la dévaluation de 1994 du franc CFA a été finalement une réussite. Elle a impulsé la croissance dans tous les pays membres et réduit les déficits budgétaires. Les spirales inflationnistes, tant redoutées, ne se sont pas manifestées. Ainsi les pays de !'UEMOA et de la CEMAC ont mené à bien une expérience d'ajustement monétaire et pourraient à l'avenir y recouvrir avec moins d'appréhension que par le passé. 174 Le NEPAD 1'1 II' projel d'ulle hanque œil/mIe ({!Î'icaine III. <JlIFL MO])['I.I' ])1' BAN<Jlll': CENTHAI.I' 1'0llH L'AFHI<JlIl' ? Une Banque centrale, à l'échelle de tout un continent, devrait revêtir des caractéristiques qui lui permettent d'assumer pleinement les fonctions d'un institut d'émission sur une aire géographique aussi vaste et aussi riche en traditions monétaires, financières et économiques qu'est l'Afrique. Comme toute Banque centrale, la BCA aura pour fonctions: - la définition et la mise en œuvre de la politique monétaire du continent; -la conduite des opérations de change avec l'extérieur ; -la centralisation et la gestion des réserves de change des États membres et la promotion d'un système ordonné de paiements. Pour que la BCA joue parfaitement tous ces rôles, des options fondamentales devront être faites dans les domaines suivants: le choix du régime de taux de change, l'objectif assigné à la politique monétaire, le modèle d'organisation monétaire et la nature des relations entre la Banque centrale et les institutions financières. Les développements qui suivent sont des propositions visant à préciser la nature des choix permettant à une banque centrale continentale de bien fonctionner dans un contexte de globalisation économique et financière. 1. Le régime de change On peut choisir entre quatre catégories de reglmes de taux de change: les régimes de rattachement du taux de change, les régimes de change flexibles, les régimes de marges de fluctuation, les régimes de taux de changes doubles ou multiples ( voir annexe pour les différentes catégories de régimes de change). L'environnement international dictera probablement le choix d'un régime de change flexible. La plupart des banques centrales africaines ont en effet évolué vers une gestion flexible de leur taux de change. Celle-ci est déjà la règle dans tous les pays développés. Le graphique de l'annexe 2 montre l'évolution du pourcentage de pays en développement à taux de change rattaché entre 1970 et 1997. Depuis l'effondrement du Système de Bretton Woods de parités fixes mais ajustables du début des années 70, leur nombre a considérablement diminué. L'examen de leur répartition par continent montre que c'est en Afrique qu'on trouve le plus grand nombre d'entre eux. Si l'on soustrait les pays africains membres de la zone franc de leur effectif (11 au tata!), seuls quatre autres pays africains conservent encore ce régime de change. 175 Le NEPAD. institutions. 1{0ul'erl1tJllGe et jll/{mœment La flexibilité signifie que la monnaie demeurera internationalement convertible. La libre transférabilité des capitaux entre pays membres et avec le reste du monde devrait être assurée. Il appartiendra au marché de change de déterminer le cours de la monnaie africaine. La BCA interviendra sur ce marché si elle le juge nécessaire. Elle centralisera les réserves extérieures des pays membres. 2. L'objectif de la politique monétaire L'objectif majeur de la politique monétaire devrait être clairement affirmé. Il s'agirait probablement d'assurer la stabilité de la valeur interne de la monnaie en maintenant l'inflation domestique proche de zéro - entre 1 et 2 %. Tout autre objectif qu'on ajoutera à celui-ci ne peut que conduire à des errements. On peut, à titre d'illustration, rappeler les conséquences qu'ont entraînées les objectifs multiples (maintien de la valeur de la monnaie, financement de l'économie, promotion et mobilisation de l'épargne, etc.) qu'on a assignés aux Banques centrales africaines. Ces objectifs étaient nombreux et contradictoires bien qu'a priori ils apparaissent tous à la fois nobles et généreux. Au résultat, c'est le financement du développement avec la monnaie qui a prévalu dans la qua i-totalité des pays africains. Or plus un pays va loin dans ce domaine, plus ses désordres monétaires et économiques sont importants et se traduisent par une incapacité croissante de sa monnaie à jouer ses fonctions essentielles: être moyen de paiement, unité de compte et réserve de valeur dans sa sphère de circulation. Aussi, le maintien de la stabilité des prix doit-il être l'objectif majeur auquel la politique monétaire est affectée. Un autre argument important en faveur de l'adoption de l'objectif de stabilité des prix est que les pays à faible inflation manifesteraient peu d'empressement à entrer dans une union monétaire puisqu'ils n'auraient rien à y gagner en inflation et en chômage, tous les avantages allant aux pays à forte inflation. Ceci signifie que la BCA doit assurer une stabilité des prix au moins aussi bonne que celle des pays de l'UEMOA et de la CEMAC qui ont les taux d'inflation les plus faibles en Afrique. 3. L'organisation monétaire Les caractéristiques principales d'une union monétaire intégrale doivent se retrouver dans la nouvelle zone monétaire africaine: - La banque centrale est unique; 176 Le NEPAD et le projet d'/iiie hC/IIqlle celltrale aji-icaille - La centralisation des réserves de change est appliquée et celles -ci sont gérées par l'Institut d'émission qu'est la BCA 1 ; - La BCA a le privilège exclusif d'émission de signes monétaires qui ont cours légal et pouvoir libératoire sur le continent. A des fins de production de statistiques monétaires et financières, elle prendra les dispositions appropriées pour l'identification des billets ainsi que le suivi des opérations génératrices de l'émission monétaire; - La BCA jouit d'une indépendance totale vis-à-vis des gouvernements. La question cruciale à laquelle la nouvelle zone monétaire devra donner une réponse, est celle de savoir comment atteindre et maintenir un haut niveau de discipline collective si aucune puissance extérieure à l'Afrique ne joue ce rôle. La meilleure réponse que les pays membres pourraient apporter à cette interrogation est de doter la BCA d'une réelle indépendance. Diverses études empiriques ont montré la corrélation forte qui existe entre le degré d'indépendance de la banque centrale et l'inflation dans un pays (V. Grilli, M. Donato, T. Guido, 1991). Sur le plan théorique, la notion de cohérence temporelle des politiques économiques introduite par Kydland et Prescott (977) a mis en évidence le manque de crédibilité d'une règle de politique monétaire si elle n'est pas enfermée dans des mécanismes qui la rendent irrévocable dans le temps. Seront donc jugées crédibles les mesures de politique monétaire prises par une autorité convaincante, à savoir une Banque centrale indépendante et apolitique dont l'expérience ou les statuts montrent un engagement à atteindre un objectif unique et réaliste comme le maintien de l'inflation à un faible niveau. En se référant à l'expérience de la BCEAO, de la BEAC et des banques centrales non africaines réputées entièrement maîtresses de leurs décisions (Réserve fédérale des USA, Bundesbank en Allemagne, Banque centrale européenne, . .), on peut énumérer les moyens d'assurer cette indépendance: - le marché détermine le taux de change de la monnaie commune et le Gouverneur de la Banque centrale décide seul, sur avis du comité monétaire 2 , de l'opportunité d'intervenir sur le marché des devises pour influencer ce taux de change dans la direction souhaitée ; -le mode d'élection du Gouverneur et les procédures de sanction - positives comme négatives - le protègent contre les gouvernements et les groupes de pression ; L'annexe 4 évalue les excédents de réserves des pays africains. 2, Il fauclra créer un comité cie politique monétaire chargé cie la gestion cie la monnaie et par conséquent cie la politique de taux cie change, 177 Le NEPAD, il1slillIfiol1s, ~OIl/,(!lïlUllcel!t(il1(IIIU!1I1el1f -les avances aux Trésors sont totalement discrétionnaires, c'est-àdire que la Banque centrale ne peut être forcée de prêter à ces derniers; -les parlements nationaux n'ont pas de prise directe sur la conduite de la politique monétaire; -les trésors peuvent effectuer tous dépôts auprès de la Banque centrale. L'indépendance de la Banque centrale aura pour principale conséquence, sous un régime de change flexible, qu'une intervention éventuelle sur le marché monétaire pour influencer le taux de change de la monnaie commune sera laissée entièrement à la discrétion du comité monétaire. Aucun gouvernement ne devrait avoir une influence directe sur la détermination de la valeur externe de la monnaie commune. La compétitivité externe du continent peut être maintenue par des ajustements successifs et de faibles ampleurs du cours de la monnaie africaine si le comité monétaire juge nécessaire de telles interventions. Les arrangements institutionnels et juridiques garantissant l'indépendance effective de la BCA devront être élaborés par un comité d'experts et approuvés par les Chefs d'État africains. 4. Les relations entre la BCA et les institutions f"mancières extérieures. La BCA pourra conclure des arrangements avec d'autres institutions financières étrangères aux termes desquels elle pourra bénéficier de certaines facilités sous forme de prêts en devises fortes. Si les pays africains refusent à une Banque centrale étrangère un droit de regard sur la conduite de leur politique monétaire, les accords n'iraient pas audelà de l'octroi de facilités permettant de faire face à des besoins de trésorerie de très court terme. La convertibilité externe de la monnaie commune sera fondamentalement assurée par la qualité des politiques économiques et financières et les performances économiques qui en résultent. 5. La convergence des politiques économiques nationales Une convergence des politiques économiques doit être activement poursuivie par les États membres même après leur adhésion à l'union monétaire. Les institutions s'occupant d'intégration économique sont cependant les lieux appropriés pour discuter de cette question. En conclusion, la création du modèle de banque centrale décrit cidessus permettrait aux pays de l'union d'assumer solidairement leur 178 Le NEPAD et le projet d'Itlle hanqlle cellfmle africaine "indépendance monétaire, La compétitivité externe serait rétablie par un ajustement monétaire chaque fois que la Banque centrale le jugera nécessaire, La stabilité monétaire préservée favoriserait la mobilisation de l'épargne privée, Avec l'application du NEPAD dans le domaine des infrastructures, de l'éducation, de la santé et de l'agriculture, les conditions d'une croissance économique forte et durable du continent seraient ainsi créées, IV LES 1~'1AI'ES VEHS L'lINION M()NI~'1AI HE AFHICAIN l' C()MI'Lf~TE 1. Mise en place d'une Agence monétaire africaine Le processus d'intégration monétaire de l'Afrique devra être conduit par l'Union économique africaine, Il lui appartient en conséquence de mettre en place une Agence monétaire africaine chargée de la préparation de l'ensemble des décisions devant être prises par les Chefs d'État africains relatives à la création d'une monnaie unique pour le continent. Un comité d'experts devra soumettre à l'UÉA pour adoption un projet des statuts et moyens d'action de l'Agence, 2. Sommet des Chefs d'État africains sur la Banque centrale africaine Un sommet des Chefs d'État se tiendra pour statuer sur la création d'une union monétaire africaine complète, A ce sommet, seront prises les décisions relatives aux questions suivantes: a) La stratégie d'unification monétaire de l'A.f1'ique Les unifications monétaires peuvent être organisées de manières différentes, En se référant à des expériences récentes de création de réformes monétaires majeures, on peut distinguer entre: - la stratégie du Traité de Maastricht qui est fondée sur deux idées maîtresses : i) le gradualisme: la progression vers l'union monétaire sur une période de plusieurs années ( au moins dix ans) ; ii) la conditionnalité : l'entrée dans l'union est soumise au respect de critères de convergence, - l'unification monétaire allemande réalisée en juillet 1990 qui est caractérisée par : 179 Le Né'PAD, il/Slill/lions, gOI/I'e/ïlUI/W el/il1ul/WlIle11l i) une grande rapidité: décision prise en fin 1989 et l'union réalisée six mois plus tard en juillet 1990, ii) une absence d'exigences de convergences : l'ex-Allemagne de l'Est a été admise dans l'union monétaire ouest-allemande sans aucun préalable, sinon l'unification n'aurait pas eu lieu. Les pays africains doivent eux aussi définir un scénario precIs d'intégration monétaire complète, Celui-ci devra comporter un agenda indiquant entre autres domaines : i) la date d'abolition de tous les contrôles de capitaux dans les pays candidats à l'union ; ii) la définition du degré de coopération sur les questions monétaires entre les banques centrales africaines avant l'entrée en vigueur de la monnaie unique africaine ; iii) la durée de la période de transition vers l'étape finale de l'unification monétaire; iv) la forme que revêtirait le gradualisme : Banques centrales sousrégionales entretenant des liens de coopération monétaire d'abord, BCA ensuite; ou création de la BCA avec le premier groupe de pays qualifiés, les autres rejoignant l'union au fur et à mesure qu'ils rempliront les conditions d'entrée? b) Les critères de convergence Si le principe en est retenu, les critères de convergence devant être remplis par tout pays candidat à l'union devront être adoptés, Ils porteront principalement sur sur le niveau d'inflation toléré, les taux d'intérêt à long terme, la stabilité du taux de change, le déficit budgétaire et la dette publique c) L'adoption d'un Pacte de stabilité du cadre macro-économique Le fait qu'un pays respecte les critères de convergence lors de son entrée dans l'union ne signifie pas qu'il continuera à le faire. Aussi estil nécessaire qu'il souscrive à un engagement le contraignant à se conformer à ces critères une fois qu'il est admis dans l'union. Deux des domaines importants qui devraient être inclus dans ce pacte sont la dette publique et le niveau de déficit budgétaire soutenable, 3. Le désendettement de l'Afrique Le niveau insoutenable d'endettement extérieur de la quasi-totalité des pays africains est un obstacle majeur à la mise en place d'une monnaie unique. En effet, le service de la dette constitue une hémorragie de devises pour le continent, creuse les déficits budgétaires des f:tats qui, après avoir satisfait le service de la dette extérieure disposent 180 Le NEPAD et le projet d'III/(! fJcmCjlle celltrale c!l'ricaille de peu de ressources pour faire face aux autres dépenses. Pour financer ces déficits, ils sont contraints à recourir à l'émission de monnaie source de plus d'inflation et/ou à un endettement extérieur accru. Les Chefs d'État africains doivent donc démultiplier leurs efforts en direction de la communauté financière internationale pour que la proposition de désendetter l'Afrique soit acceptée dans les meilleurs délais. C'est un préalable à la réussite au projet de création d'une monnaie unique africaine. CONCLUSION Une intégration monétaire africaine, avec création d'une monnaie unique contribuerait à l'émergence d'un vaste espace économique où les biens et les capitaux circulera ient librement, constituerait un puissant stimulant à la croissance et au développement économique de tous les pays membres. Les économies d'échelle seraient pleinement exploitées. Seraient supprimés aussi les obstacles actuels au règlement des transactions entre les pays africains. BIBUOGRAPHIE B. Baccara, S. Devarajan, "Determinants of int1ation in the Franc Zone in Africa ", World Bank pO/iLY Research Working Paper, n° 1197. Cobham D. et Robson P. (996), " Intégration monétaire à la lumière du débat européen .., dans Réal Lavergne (édition) Intégration et Coopération régiollales en Afrique de l'Ouest, Karthala-CRDI, Paris, Ottawa. Devarajan S. (997), .. Real Exchange rate misalignment in the CFA Zone .., Jou mal qj'Africall Ecollomies. Vol 6, n° l, March. Lavergne R. et Daddieh C. K. (996) .. Visions et approches des bailleurs de foncls ", clans R. Latlf?rglle . Intégration et Coopération régionales en Afrique cle l'Ouest ", Karthala-CRDI, Paris, Ottawa. Meclhora R. (996), .. Les leçons cle l'UEMOA .., clans R. Lavergne (ecl) Intégration et Coopération en Afrique cie l'Ouest, Karthala-CRDI, Paris. Ottawa, Stasavage D., .. The CFA Franc Zone ancl fiscal discipline .., Journal of African Economies, vol. 6, n° 1, March. 181 Le NEPAD, insfifllfions, UOlll'emulfce effilllmcellle11f ANNEXE 1 TYPOLOGIE DES RÉGIMES DE TAUX DE CHANGE La gamme de régimes de taux de change existants actuellement dans le monde est très large. On peut les ranger en quatre catégories: les régimes de rattachement de taux de change, les régimes de change flexibles, les régimes de marges de fluctuation, les régimes de taux de changes doubles ou multiples. 1. Les régimes de rattachement de taux de change. Ils peuvent revêtir des formes variées. On peut distinguer entre les caisses d'émission, les parités ajustables et les parités rampantes. Les caisses d'ém..ission sont un régime où la monnaie nationale est fixée de manière irrévocable par rapport à une monnaie étrangère. L'émission est couverte intégralement en devises. La quantité de monnaie en circulation se gonfle ou se rétrécit en fonction des aft1ux ou sorties de devises. Ce régime a prévalu pendant la période coloniale. Il a connu cependant une nouvelle popularité au cours des années 1980 et 1990 en Amérique latine et dans les anciens pays socialistes d'Europe confrontés à de très fortes inflations. L'intérêt majeur est d'imposer une discipline monétaire rigoureuse qui augmente la confiance en la monnaie nationale et réduit considérablement l'inflation. Ses inconvénients sont d'abord la perte de flexibilité face à des chocs internes ou externes. Ensuite, la banque centrale ne peut jouer le rôle de prêteur en dernier ressort en cas de crise de liquidité du système bancaire puisqu'elle ne peut mettre à disposition des banques et en quantité illimitée sa propre monnaie sans disposer au préalable d'une contrepartie en devises adéquate. Les parités ajustables correspondent à un régime où le taux de change est fixé par rapport à une monnaie étrangère et est modifié en de très rares occasions. Une bonne illustration de ce type de régime en est le système monétaire des pays africains de la zone franc dont les monnaies (franc CFA, franc comorien) ont maintenu leurs parités respectives avec le franc français inchangée pendant quarante années. Les parités rampantes sont un régime où le taux de change de la monnaie nationale est fixé par rapport à une monnaie étrangère mais les autorités monétaires peuvent, à des intervalles réguliers, l'ajuster pour prendre en compte le différentiel d'inflation par rapport aux principaux partenaires commerciaux et maintenir ainsi la compétitivité extérieure du pays. 2. Dans les régimes de change flexibles le cours de la monnaie résulte de la confrontation de l'offre et de la demande sur le marché des devises. Si la banque centrale s'abstient de toute intervention sur ce marché on est dans un régime de flottement pur, dans le cas contraire on est dans un régime de flottement dirigé. 182 Le NEPAD er le projer d'ulle banq1te cenrrale africaine 3. Les régimes de marges de fluctuation consistent en un système où un taux de change pivot est annoncé ainsi qu'une marge de fluctuation autour de ce taux. Ce dernier peut être géré de manière à être maintenu fixe ou rampant et la marge peut être symétrique ou non. La détermination de celle-ci correspond à un engagement implicitement de la banque centrale d'intervenir sur le marché des devises à chaque fois que le cours de sa monnaie atteint les limites de cette marge sont atteintes. La banque centrale doit définir aussi un ensemble cohérent de règles devant guider son intervention sur le marché des devises. 4. Les régimes de taux de changes doubles ou multiples fixent un taux auquel les opérations commerciales sont effectuées, alors que les transactions financières se font à un taux flottant. Celui-ci est souvent plus déprécié que le taux fixe. C'est pourquoi on note d'importantes fuites entre les différents compartiments du marché des devises, ce qui explique que ces régimes n'aient jamais bien fonctionnés. 183 Le NEPAD, institl/fiolls, UOI/I'erlltl lice et !ilulIlcemellf ANNEXE 2 PAYS EN DÉVELOPPEMENT: Régime de taux cie change Asie Afrique 18 16 50 45 14 12 ~g :lIl 10 25 e 20 Hi 10 6 4 2 5 0 0 l~'rt d~ fltJlt~mel"' l'.lUX .c.tI8n!Je dII;y1l f\l!~lble teux de 1IOlIemenI Change cfirloé retlaché li r<>tt~ché " une unité de leux flexible une unieS de référence ré1érence Amérique latine et Cafllibes Europe et Moyen.Orient 25 25 20 15 10 20 15 10 5 5 o o taux de ch'!lnge flOttemerrt dîrigé taux m1982 taux de ffctlemert flexible change ratt(lch~ ~ ral1!lché ~ une unfté unerlé de de référence référence dIrlgé teux tlexl:ile .1989 01997 Sources: Fonds Monétaire International Note: Les pays ;\ taux dl' changL' LlllacitC' ;\ UOL' devise dl' rl'iC'!"L'iKL' :lpp:lnieIlIlL'IlI, dans l<l classific;llion du FM 1, à la cat0gorie des p<l ys dont IL' taux dl' change est soit gliss<lnt, soit rattach0 à une seule monnaie ou ;\ lin [1<lnier (k monnaies. Les pays à flottement dirig0 ont, dans la c1<lssification du l'MI, Il' taux de change qui s'ajuste en fonction des indicateurs 0conomiqlles et qui flotte de fa~'(>n contrCllC'e. Les pays à taux dL' change flexihle ont, dans la classification du l'MI, le taux de change qui flotte lihrement. 184 Le NEPAD et le pnJjet d'Ilne hal1{j/1e cemrale (!/i"icail1e ANNEXE 3 NOTE SUR L'ESTIMATION DES EXCEDENTS DE RESERVES EXTERIEURES AFRICAINES Méthodologie Toutes les données sont extraites de .World Bank Data Base (2000),. La période considérée est 1995-1998. La moyenne arithmétique des trois dernières années disponibles a été calculée pour atténuer la volatilité qui caractérise les réserves de change. Certains pays n'ont pas de données pour la période retenue. C'est le cas de la Libye, du Libéria, et de la Somalie. Quant au Soudan, seules les données de 1998 sont disponibles. Les excédents de réserves de l'Afrique sont estimés selon la démarche suivante. Pour chaque pays, on a d'abord calculé le volume de réserves de change nécessaire pour couvrir un nombre donné de mois d'importation. En effet, on a supposé que les réserves servent dans les pays africains principalement à financer les importations de biens et services. On a ensuite calculé la différence entre le stock brut de réserves et ce montant nécessaire pour obtenir l'excédent de réserves. C'est cet excédent qui pourrait être utilisé pour financer l'acquisition de biens et services supplémentaires destinés à la réalisation des projets retenus dans le cadre du NEPAD. Le stock brut de réserves est égal aux avoirs en devises et en DTS plus l'or valorisé à son prix sur le marché de Londres. Pour déterminer le montant de réserves nécessaires pour couvrir les importations on a retenu 6 mois (hypothèse haute) et 3 mois (hypothèse basse). 1. Réserves nécessaires pour 6 mois d'importation le montant moyen annuel des importations est divisé par 2. 2. Réserves nécessaires pour 3 mois d'importation le montant moyen annuel des importations est divisé par 4. 3. Excédents nécessaires pour 6 mois d'importation = Stock brut de réserves - Réserves nécessaires pour 6 mois d'importation 4. Excédents nécessaires pour 3 mois d'importation = Stock brut de réserves - Réserves nécessaires pour 3 mois d'importation Pour déterminer les réserves excédentaires au niveau de l'Afrique, on a retenu uniquement les pays qui peuvent couvrir 3 mois (6 mois) d'importations de biens et services. Les excédents de réserves africaines sont exprimés en millions de dollars US ainsi qu'en pourcentage du PŒ, de l'investissement brut intérieur et de l'épargne brute intérieure. 185 Tableau 1: Stock de résen'es excédentaires détenus par certains pays africains (en millions de dollars US) Moye.Dedes Ep~rgne fDCF import~tions PIB IDt~rleure des 3 derDlhes R~er,,"s Rherv.. Rherve. Décessolres nécess~ires (devlses+ de pour6 mols pour 3 mois DTS+i:lr) pour 6 mols Escédents(+)ou dénclts(-) ~.erves Escédents(+)ou Mndts(-) de réserve. ,..., pour 3 mols '"" ~ années 150420 9492E 75210 87910 509039 3760'; 59253 & Ellc~eDts FBCF ta de réserves v. Epugoe ~c;: en% PID eu eh duPIB Int~rleure pour 6 mols 9492~ 17,6 ~ ,Q :r:o deFBCF lotérleure de l'ép.rgne 1677 2813E ~§. Tableau 2: Stock de réserves excédentaires détenus par certains pays africains après couverture de 6 mols d'Importation ( millions de dollars US) (en pourcentage de la FBCF, du PIB et de l'épargne intérieure) ..... 16771 19,OE 87910 509039 3,2~ ~ 3 § ;:; '~"" ? Tableau 3: Stock de réserves excédentaires détenus par certains pays africains après couverture de 6 mols d'Importation ( millions de dollars US) (en pourcentage de la FBCF, du PIB et de l'épargne Intérieure) Esc~ents FBCF en de réserves -1. deFBCF Epargne Int~rleure -1. ~ PID de l'ép.rllne en -J'. du PIB Intérieure DOur 3 mols 28l3B fa ::;:; 949U 29,64 879H 32,01 509039 S,53 ~ Le nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique ", un réponse africaine à la mondialisation de l'économie H par Dr Chérif Salif Sy Ministre-Conseiller Représellfclllt du Président dl! la Répuhlique du Sél1é,gal à la Dirl'ctioll Continentale du NEPAD Depuis les années 70, l'Afrique est traversée par des difficultés économiques et sociales qui ont progressivement conduit à sa marginalisation de plus en plus importante dans les affaires du monde. Les indicateurs macroéconomiques montrent que les performances ont été dans l'ensemble assez médiocres donnant lieu à des économies stagnantes marquées par un double déficit chronique de la balance des paiements et des finances publiques, un endettement massif et une croissance faible. Alors que le revenu moyen africain représentant 14 % du revenu des pays développés au milieu des années 60. En 1997, ce rapport n'était plus que de 7 %. Quant au taux de croissance du PIB, son niveau annuel moyen entre 1965 et 1993 n'était que d'environ 0,5 et était de loin inférieur à la croissance démographique (entre 2,9 à 4,1 %). En 1994, l'Afrique qui représentait 12 % de la population mondiale fournissait moins de 1 % du PIB mondial. L'agriculture et l'industrie apportent les meilleures preuves de cette stagnation. Le secteur agricole souffre de plusieurs maux comme l'appauvrissement des sols, les aléas climatiques, les instabilités et incertitudes sur les cours et les productions, la faible productivité, la faible mécanisation, le réseau hydro-agricole limité. L'agriculture vivrière n'arrive pas encore à couvrir les besoins d'une population en expansion rapide et d'une urbanisation accélérée et cela pour trois séries de raisons; pourvoyeuse de devises, bas niveau de la production agricole et environnement technologique et institutionnel inadéquat. Ces facteurs montrent qu'aucun pays africain n'a véritablement réussi une révolution verte avec semences sélectionnées et variétés à haut rendement permettant une élévation de la productivité par surface cultivée et par actif rural. 187 Le NEPAD, il/stifllfiollS, MOllI'ernune(' ('tlillul/cement Les résultats du développement industriel sont aussi modestes. Les stratégies d'industrialisation par substitution aux importations misent en place, ça et là avaient de faibles relations en aval comme en amont avec le secteur agricole. Les performances se sont révélées décevantes. Au niveau des relations avec l'extérieur, la part de l'Afrique dans les exportations des pays en développement et celles du monde entier étaient respectivement de 6,7 % et 1,8 % en 1995. Le constat est encore plus alarmant si on se limite seulement à l'Afrique sub-saharienne qui représentait à la même époque 2,6 % des exportations des pays en développement et 0,7 % des exportations mondiales. L'Afrique est complètement absente du commerce mondial dans les branches les plus dynamiques des produits manufacturés et des services. Depuis les indépendances et l'apparition des pays sous-développés dans le jeu mondial, les institutions de Bretton Woods ont voulu s'adapter aux nouvelles conditions en utilisant le levier de l'aide et celui du prêt. Malheureusement ce binôme, après quarante ans a démontré son incapacité à résoudre les problèmes des pays sous-développés puisque d'une part l'objectif d'aide dans les années 70 de 0,7 % du PNB des pays développés à transférer aux pays en voie de développement se trouve aujourd'hui aux environs de 0,28 %. D'un autre côté, la politique du prêt, l'autre composante du binôme, a abouti à l'endettement qui, lui aussi, est sans issue. La dette s'est alourdie sans avoir servi à financer le développement et notamment l'industrialisation et l'agriculture. Elle a contribué à financer de nombreux projets d'investissements non rentables. Elle dépasse les capacités de remboursement et asphyxie en conséquence les finances publiques. Au plan social, on observe une dégradation du bien-être avec un accroissement du chômage et de la pauvreté. L'Afrique sub-saharienne compte selon les plus récentes statistiques environ 250 millions de pauvres soit 45 % de sa population, Il semble même, que le rythme de croissance de la pauvreté est plus rapide que celui des revenus. C'est pour cette raison que les pays africains ont proposé le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique qui, en comblant les disparités dans huit secteurs prioritaires permettrait aux pays africains de se hisser à un niveau où le libre échange aurait un sens. LE 11I~AJl /STEMI:N'I' DL ) SYST[~ME l'CONOMIQL JE MONDIAL Tout cela se passe à un moment de restructuration sans précédent de l'économie mondiale. Sans revenir sur l'histoire du système économique capitaliste rappelons simplement que le phénomène appelé «mondialisation. n'est pas un nouveau. Il a débuté lorsque, 188 LI'" nOlll'I'UIi pUHenuriut pour II' dél'l'loppl'mellt dl' l'Aji"iql1e" chaque matin en se levant, les marchands se sont mis à rechercher de nouveaux marchés, c'est-à-dire donc, depuis l'aube des temps. Mais son développement contemporain est surtout lié à celui du capitalisme. C'est pourquoi, depuis le moyen âge, depuis Christophe COLOMB et Vasco de GAMMA, depuis le • tout l'univers .. de SISMONDI et le «marché mondial .. de MARX, les marchands ont toujours poussé à une ouverture de plus en plus grande des marchés. A travers l'histoire, si l'on considère le développement du capitalisme, on peut lui reconnaître trois grandes caractéristiques: 1. Sa dynamique non linéaire (croissance, dépression, découverte de l'Amérique, colonisation, recherche effrénée de débouchés... 2. La dynamique de l'offre (biens et services) amélioration des équipements, fordisme, économies d'échelle, concentration... 3. L'ouverture des marchés et l'extension à des territoires nouveaux de l'activité marchande. Cette évolution s'est appuyée sur deux leviers essentiels: a) les innovations et les progrès techniques; surtout dans les moyens de communication et dans la production. b) le renforcement de l'autorité étatique (par exemple l'église interdit la guerre) et l'établissement de relations d'échanges de services avec l'État, même si la mondialisation, c'est aussi pour le capital un moyen de s'abstraire des règles que lui impose l'État sur un territoire donné. Mais, l'établissement de relations économiques régulières et répétées suppose la paix, et leur extension à de nouveaux espaces passe souvent par la violence et la guerre, ou par d'autres moyens de domination dans les finances, l'industrie, le commerce ... ; C'est ainsi que, selon les caractéristiques dominantes de l'époque, la mondialisation de l'économie a eu une appellation différente: de la croisade de Charlemagne pour l'occidentalisation des marchés orientaux de l'Europe de l'Ouest, on est passé à l'impérialisme colonial avec le règne des 3 M: militaires, missionnaires et marchands. Ce fut ensuite l'ère de l'Économie-Monde, (exploits scientifiques des XVIIIe et XIX e siècle), de l'Économie internationalisée et depuis les années 1970 de la Mondialisation. LES CAllACTI~HISTIQlIES DE l.A MONDIALISATION La mondialisation que nous appelons quelques fois «nouvelle mondialisation .. n'est rien d'autre donc que l'évolution du marché. Elle 189 Le NEPAD, institutions, ~oul'erllullceC't./il/(IIIC1'I1lC'lIt a débuté dans sa forme actuelle après la seconde guerre mondiale, avec le développement des entreprises multinationales dont l'intégration interne se réalise par le biais de transactions entre éléments de la même entreprise, afin d'accroître la rentabilité. A ce phénomène se greffe un nouveau: l'interpénétration économique au travers des frontières, dans la production, la commercialisation, le fInancement et la recherche-développement. En d'autres termes, ils émergent des entreprises qui distribuent leurs activités industrielles et financières au niveau international, avec comme résultat, une progression du commerce international, des flux de capitaux et de l'investissement, plus rapide que la production. On peut noter par ailleurs que, de 1990 à 1995, le commerce mondial a été multiplié par cinq. Au niveau du PŒ mondial, il représente aujourd'hui plus de 25 %, contre 7 % il Y a cinquante ans. Les flux de capitaux à destination des pays sous développés sont passés, entre 1990 et 1996, de 100 milliards à 284 milliards U5$. Mais l'origine des fonds s'est profondément modifiée. C'est à dire que, la part de l'aide publique, qui était de plus de 50 % du total, n'est plus que de 20 %, l'essentiel des apports étant d'origine privée, sous formes d'investissements, de prêts de banques commerciales, d'émissions d'obligations internationales etc. En d'autres termes, c'est le marché qui finance le développement. Flux ue capitaux 1lJ90 - 1990 (en milliards LJS$) 1990 1991 1992 Cumul Privé Puhlic lOO.o . i . i ,It 50,3 122,5 50,9 05,0 110,0 90,0 55,1t Apports privés: par région (en milliards LJS$) 1990 1991 1993 199-1 1995 1990 212,0 157,1 55,0 207,0 101,3 15,7 237,2 1H1,2 53,0 2H1,O 213,H ItO.H 1992 1993 1991 199'5 1990 90,0 0,3 30,9 2,9 21,H 2H,7 0,5 157,1 -0,5 02,1 0,0 25,0 59,H 3,9 101,3 5,2 71,0 H,5 17,2 53,0 5,H 1H1,2 9,1 H1,1 5,2 30,1 51,3 1,1 213.H 11,H 1OH,7 10,7 31,2 71,3 0,9 - Total PV)) Afrique suhsaharienne Asie de l'Est!Pacifique Asie du Sud Europe! Asie Centrale Am, Latine!( :araîhe M-() ct Afr-Nord 11,1 0,3 19,3 2,2 9,5 12,5 0,5 50,9 O,H 20,H 1,9 7,9 22,9 2,2 Source,' Jeune Afrique, n° 1H93 - Du 10 au 22 avril 1997. Malheureusement, l'Afrique semble être la seule reglon du monde qui n'attire pratiquement pas l'investissement direct étranger (IDE). 190 LI' " 1I01l1'1'(/1( plll·telluriat pOlir le dr!l'l'foppemel1t de l'Aji-ùj1le» Mais le marché, résultant de la division avancée du travail, est un rapport social. Il met en relation des acteurs situés au sein d'une structure sociale. Il n'introduit pas nécessairement un rapport de réciprocité équitable. Le marché mondial est un système complexe dans lequel s'affrontent ou coopèrent les États et les agents économiques. Tout le monde peut participer au feu sans disposer des mêmes moyens dans la fixation des règles. C'est ce qui fait dire au Président A.WADE que « nos partenaires du Nord, partisans de la globalisation comme nous, ne raisonnent malheureusement pas en termes d'intérêt de l'économie mondiale globale". "En réalité, pour eux, poursuit-il, l'économie mondiale se confond avec l'économie des pays développés. Cette erreur d'optique les conduit, qu'ils le veuillent ou non, à ne rechercher fondamentalement la croissance de la composante agricole de l'économie mondiale qu'à travers le développement de l'agriculture des pays développés. Ce qui aboutit à la marginalisation de l'agriculture des pays du Sud ". Les tendances de la mondialisation La mondialisation de l'économie telle qu'elle fonctionne réellement peut aussi être définie comme la construction de monopoles dans les domaines suivants: • finances internationales, appelée aussi, globalisation financière; • multinationales (développement desfirmes-réseauxJ; • science et technologie; • communication et l'information; • accès aux ressources naturelles; • le monopole de lafabrication des armes de destruction massive. Ces tendances entraînent des conséquences sociales, politiques, culturelles et idéologiques sur lesquelles nous n'allons pas nous attarder. Mais les conséquences que constituent le défi de l'intégration régionale et la sécurité intérieure des pays du Sud représentent les défis majeurs. Le défi de l'intégration régionale en Afrique Comme nous l'avons montré, la mondialisation de l'économie, interpénétration des capitaux et des systèmes productifs, se développe très vite. Elle met en place une économie mondiale dominée collectivement par l'interpénétration tripolaire. C'est à dire que nous sommes en présence de trois pôles, identifiés comme tels, qui cherchent à former une" région sud ,,1. 1. Voir sur ce chapitre, Bernard FOUNOU-TCHUIGOUA, « Afrique de l'Ouest: les conditions de la relance cie la coopération", in Africa Dpl'l'lopment Vol, XXI, n° 2 et 5, 1996, pp, 279-300), 191 Le NEPAD, institutions, MOlll'emance et financelllent A - USA-MEXIQUE-CANADA - - - - - l..~ ALE NA- MERCOSUR B - JAPON-USA ------i.~ C - UE-EUROPE DE L'OUEST ASIE DE L'EST (APEC/AFTA) ------i.~ AFR/SS-AFR/NORD Que les USA manifestent un intérêt nouveau pour l'Afrique, ou que l'Union européenne veuille être plus présente en Amérique latine, ne change rien à la logique qui sous-tend cette forme d'organisation régionale. En effet, la formule, « marché conunun ", ouvert sur l'économie mondialisée, est, selon la théorie néo-libérale, la seule forme de régionalisation acceptable; elle permet l'intensification des échanges entre régions et au niveau mondial, et donc «la croissance que tout le monde veut ". Concernant l'Afrique, en réalité, la part des échanges extrarégionaux du continent dans son produit intérieur brut est de 46 % contre seulement 13 % pour l'Europe ou l'Amérique du Nord. En vérité, elle est fortement intégré à l'économie mondiale, mais sur la base de produits de faible valeur ajoutée, comme on dit. Nous le disons comme cela, parce que nous ne sommes pas d'accord avec cette thèse. Car, si l'on considère l'agriculture paysanne, il faut quand même admettre qu'elle est faite sur la base d'une qualification multifonctionnelle et qu'elle incorpore bien savoir-faire et connaissances. Malheureusement, en mondialisant ses pratiques, l'économie capitaliste mondialisée universalise sa logique. Cette logique qui érige la loi de la valeur en paramètre économique indiscutable et en fait la norme de fonctionnement de l'ensemble de la société. Tout devient marchandise et la loi de la valeur mondialisée, engendre nécessairement la polarisation. Mais avant d'en arriver là, les grands pays se sont efforcés de faire des «régions nord" des économies de plus en plus dynamiques et autocentrées maîtrisant parfaitement les conditions de l'accumulation: c'est ainsi que les trois blocs du Nord polarisent 90 % du total des échanges et 80 % des investissements dans le monde. (l'Afrique détient respectivement .' 2,5 % et 2 %, alors que l'Asie attire 11 % des investissements). Comme on peut le voir, une telle organisation pour le Nord, qui n'est pas du tout incompatible avec la mondialisation des marchés, facilite la déconnexion ou le repli, en cas de crise grave dans les régions du sud, comme ce fut le cas avec la crise en Amérique latine et en Asie. Sur la question de l'intégration régionale donc, les pays 192 Le .. J/01l1'eall pm1el1uriat pour le dél'eloppl.'lnel1t de l'Afrique .. africains devraient avoir, une vision et des démarches qui permettent d'assurer un degré d'autonomie relative. En outre, il apparaît de plus en plus que toute forme de régionalisation qui ne prendrait pas sérieusement en compte, la pauvreté, la paupérisation des classes moyennes, l'exclusion et les questions liées à la protection de l'environnement, sera vouée à l'échec, sans nul doute. Le défi de la sécurité intérieure De plus en plus, certaines forces arrivent à développer une capacité à créer des conflits locaux compte tenu de la fragilité de certains pays, liée à la diversité ethnique, religieuse ou à certaines disparités régionales. C'est pourquoi, il nous faut soutenir, tous les groupes, toutes les organisations, ainsi que toutes les initiatives crédibles, susceptibles de concourir à l'instauration de la paix entre régions, ethnies et pays. En conclusion, on peut retenir malgré tout, même si dans les nouvelles batailles pour contrôler, voire dominer le monde, la concurrence est accrue et dure, que la mondialisation, par l'essor de nouveaux pays industrialisés, introduit une contribution positive à la croissance de l'économie mondiale. La tâche immédiate n'est-elle donc pas d'arriver à un développement autocentré et protégé, dans une mondialisation qui puisse garantir les échanges entre régions du monde inégalement développés? Car, la mondialisation est un fait de l'histoire moderne et même si on peut l'analyser en termes de crises des capacités autonomes 2, elle est indubitablement un fait positif, un progrès dans l'histoire des hommes. De ce point de vue, il faut plutôt une insertion active, à même de modifier, les conditions de la mondialisation, au lieu de poser le problème en terme de refus. Car, le capitalisme, comme le montre son histoire, engendre toujours des contre-pouvoirs, susceptibles de limiter des effets pervers. L'enjeu, le véritable défi, c'est d'être positif dans la bataille pour un monde multipolaire, introduisant un rapport de réciprocité équitable, dans lequel le Droit et l'Équité jouent un rôle important en tant que facteurs de régulation ou de transformation. De ce point de vue la réponse de l'Afrique pour relever la tête tourne autour des cinq points suivants : - Combler les disparités dans les domaines fondamentaux; - Partir d'une approche régionale; - Au de-là du diagnostic perpétuel, réaliser des projets réels de développement ; - Amener nos partenaires à financer avec nous le développement avec des ressources nouvelles; 2, Philippe Norel • Nord-Sud: les enjeux du développement; autonomie, travail fantôme, servitude, .. Éd, Syros. Paris, 1986, 193 Le NEPAD, il/sfifufiol/s..~olll'eIïIUllce et'/II/{/lIcelllellf - Assurer le développement par les hommes. Les spécificités du NEPAD Le NEPAD est articulé en une double stratégie, d'une part l'option de la région comme espace opératoire de base et le recours aux investissements privés massifs comme l'ont fait les autres continents. L'option centrale de la région Le NEPAD a fait l'option d'un développement de l'Afrique à partir des régions et non plus des États. A ce sujet, rappelons que l'Afrique est divisée en cinq sous-régions : -l'Afrique du Nord, -l'Afrique de l'Ouest, -l'Afrique Centrale, -l'Afrique de l'Est et océan Indien -l'Afrique Australe. Donc, sans remettre en cause la souveraineté des États autrement que par leur engagement dans l'Union Africaine, le NEPAD considère que l'Afrique ne peut s'en sortir que par la promotion de l'espace régional qui offre un plus grand marché à nos industries et de plus grandes possibilités pour les investissements étrangers. Bien entendu, le développement à partir des régions sera coordonné au sommet pour des raisons de cohérence. On notera d'ailleurs que les projets, au plan spatial, seront de plusieurs types. Par exemple, en ce qui concerne les routes, ou les infrastructures en général, on pourra distinguer des projets intrarégionaux Cà l'intérieur d'une région), des projets trans-régionaux Cà cheval sur plusieurs régions), des projets continentaux. Le secteur privé Pour la première fois, dans son histoire, l'Afrique, à travers le NEPAD, a décidé de faire un appel au secteur privé qu'elle considère comme devant être au cœur de la croissance. Sans démissionner de son rôle historique de protecteur des populations à travers une politique économique et sociale efficace et de progrès, pour le NEPAD, le secteur privé est le seul en mesure d'apporter à l'Afrique les immenses capitaux dont elle a besoin. Bien entendu, il y a d'abord le secteur privé africain, des africains du continent et de la diaspora et aussi les importantes possibilités qu'offre la mobilisation de l'épargne publique et de l'épargne privée. Il n'en demeure pas moins vrai que les capitaux restent une dimension sine qua non de la croissance et du développement de l'Afrique qui doit s'organiser pour faire observer ses lois par les investisseurs. Dans cette direction, le NEPAD encourage le développement 194 Le· 1/Olll'ealt pm1el1ariat pOlir le dél'eloppel1lellf de l'Afriqlle" d'un secteur privé africain qui peut être soit autonome, soit associé au secteur privé étranger en " joint-ventures ". Les secteurs prioritaires Le NEPAD estime que s'il est vrai que tout est prioritaire en Afrique, il y a quand même une hiérarchie dans les priorités qui font apparaître des sortes de fondements sans lesquelles, il n'y a aucune possibilité de développement. C'est pourquoi, le NEPAD propose un partenariat avec les pays riches en vue de la conception en commun et de l'exécution d'un plan d'urgence de ces super-priorités. A l'origine, le NEPAD n'avait retenu que six secteurs prioritaires. Mais il apparaissait tellement évident que la bonne gouvernance sous sa forme politique et économique est une condition sine qua non du développement. C'est pourquoi, il en a été fait une explicitation qui a aboutit à dix secteurs prioritaires: 1. La bonne gouvernance politique : démocratie se traduisant par des élections libres et honnêtes ainsi que des institutions démocratiques, le respect des droits de l'homme, de la femme et de l'enfant, la transparence dans la gestion du patrimoine public, l'éradication de la corruption. 2. La bonne gouvernance économique et les flux de capitaux privés par une justice indépendante et honnête dans les litiges impliquant des investisseurs étrangers, la gestion honnête et transparente des sociétés privées, etc. 3. Les infrastructures: les routes, chemins de fer, ports et aéroports, sont des éléments de coûts qui pèsent sur la compétitivité des produits africains appelés à être vendus à l'étranger. Au surplus, les infrastructures sont amplificatrices et créatrices d'activités économiques. 4. L'éducation: aujourd'hui, il est apparu que les ressources humaines sont le facteur le plus important de la croissance parce que facteur entrant directement dans la production: créativité, inventivité, productivité. Des pays sans ressources naturelles comme le Japon, la Corée du Sud, Taiwan, Singapour ont montré qu'un pays pouvait se développer en investissant massivement dans l'éducation et la formation. 5. La santé est un pari important pour l'Afrique à cause de son taux très important de mortalité due à des maladies endémiques, malaria, tuberculose et sida. La bataille de la santé devient ainsi, à son tour, une priorité pour l'Afrique. 6. Les Technologies de l'information et de la communication ont l'avantage d'être accessibles à tous les peuples en ce sens qu'elles ne demandent que de l'intelligence heureusement répartie de façon équitable entre les communautés humaines. Ils constituent un facteur de contact permanent d'échanges de biens et services. 195 Le NEPAD, institutions, ROIlI'emullCC! et jil1ll11CC!ment Au plan économique, les TIC produisent des services générateurs de revenus élevés. L'accès aux nouvelles technologies doit être assuré aux populations africaines dès la petite enfance et il doit être étendu à toutes les activités, de l'agriculture à l'industrie, aux transports, services et échanges. 7. L'agriculture: L'Afrique a un retard énorme en agriculture et ce retard se traduit par sa dépendance alimentaire, ce qui est difficilement concevable pour un continent immense qui dispose de terres et de l'eau. Au moment où les consommateurs occidentaux se détournent des produits agricoles de leurs pays affectés par les pesticides, l'agriculture-bio offre à l'Afrique une opportunité sans précédant de produits et exportations pour gagner les devises nécessaires au financement de son développement. A cette fin, l'Afrique a besoin de la technologie et du savoir-faire des pays développés. L'agriculture participera largement à l'accroissement de la part de l'Afrique dans le commerce international si les pays du G8 suppriment les obstacles non tarifaires d'accès à leur marché et créent des conditions d'une réelle compétitivité internationale. 8. L'énergie est une dimension du développement. Or, la plupart des pays africains sont non producteurs de pétrole et ne disposent que d'énergie hydraulique très mal répartie sur le territoire. De sorte que la plupart des pays sont dépendants des fluctuations des cours du pétrole. Cela poussent les gouvernements à augmenter les prix du pétrole lorsque le prix du brut augmente, ce qui se traduit par un effet immédiat sur les conditions de vie des travailleurs et plus généralement les populations. C'est pourquoi, le NEPAD a inscrit l'énergie parmi ses priorités, invitant la communauté internationale à une réflexion sur cette question. Certains pays africains disposant de gaz ont déjà envisagé des gazoducs vers les pays démunis. Mais le problème général demeure, l'énergie étant un intrant important dans les coûts de production et ayant donc un impact direct sur la compétitivité de nos entreprises. 9. Accès aux marchés des pays développés: la volonté affichée de développement de l'agriculture et sa diversification ne peuvent être opérantes que si les pays développés nous ouvrent leurs frontières ainsi que cela était dit ci-dessus. 10. Environnement : le poids d'un environnement détérioré sur la condition des populations, surtout dans les grandes villes, est aujourd'hui établi, outre que ses aspects les plus connus, la désertification et la sécheresse sont des menaces très sérieuses à la vie même des populations au sud du Sahara. A cela, il faut ajouter la dégradation rapide des côtes africaines qui s'avance comme la sentinelle inexorable de l'avancée de la mer. A cela, il faut ajouter les menaces réelles de transfert de déchets toxiques 196 Le· /lOI/tWill pcll1enariat pOl/r le dét'e/oppelllent de l'AJhql/e" ou de farines contaminées vers l'Afrique, autant de danger pour le cheptel et pour les êtres humains. La prise en compte de ces priorités strarégiques devraienr permenre au NEPAD de relancer le développemenr en Afrique. 197 Le NEPAD et le développement des capacités quelques éléments de discussion par Alioune Sali Coordol1l1uteur RéUiol1ul - Futurs AJdcUil1S INTRODUCTION: Le NEPAD légitime, s'il en était encore besoin, la réflexion sur le renforcement des capacités en Afrique, principale raison d'être de la Fondation africaine pour le renforcement des capacités 1. Elle identifie en effet de façon explicite plusieurs domaines - six pour être précis dans lesquels un renforcement des capacités s'impose. Ce sont: -la création des conditions du développement, avec une référence toute particulière à : • la promotion de la croissance économique et du développement et la mise en œuvre de programmes de réduction de la pauvreté, • l'instauration de la paix et de la sécurité, • la bonne gouvernance (respect des normes minimales et des codes de bonne conduite). - la promotion de la coopération régionale et continentale, à travers le renforcement des communautés économiques régionales existantes; - la promotion de la collaboration entre l'État et le secteur privé, à travers le "partenariat public-privé., particulièrement pour combler le déficit infrastructure! ; - la formulation des politiques de long terme; elle est présentée comme l'un des défis majeurs de l'Afrique; - la négociation d'une nouvelle relation avec les partenaires au développement extérieurs qui prendrait comme point de départ les programmes et priorités des pays africains; 1. Dans ce texte, on utilise aussi l'acronyme anglais de ACBF (Afrique Capacity Building Foundation). 199 Le NEPAD, il/sfifl/fiollS, MOI/I'enlance ('tfil/clI/cement - la rationalisation de différents programmes de coopération qui existent entre les pays africains et les pays industrialisés Ce.g. Plan d'Action du Caire issu du sommet Afrique-Europe, TICAD2, AGOA)) d'une part, les pays africains et les institutions multilatérales, d'autre part, CUNDAFi, PRSP, Global Compact for Africa, PSA5). A l'heure actuelle, le NEPAD n'est pas très explicite sur la nature ou l'étendue de besoins dans ces différents domaines; il ne l'est pas non plus sur les modalités de réponse envisagées ou envisageables par rapport à ces besoins; il ne l'est pas davantage sur les besoins spécifiques des différents acteurs de développement que sont l'État, le secteur privé et la société civile, besoins qui, aujourd'hui, font l'objet d'une inégale réflexion/attention. Mais, dès à présent, il apparaît que l'État est, de tous les acteurs, celui qui, en matière de renforcement des capacités, est le plus immédiatement interpellé par le NEPAD. En effet, quatre des six priorités de le NEPAD correspondent à des besoins stratégiques de l'État. Ces quatre priorités pour lesquelles l'État devrait, en toute logique, être le principal bénéficiaire de programmes éventuels de renforcement de capacités sont: - l'analyse et la formulation des politiques, -la mise en œuvre des réformes et des politiques de développement, -le suivi et l'évaluation de ces politiques. Notre contribution sera donc centrée sur les besoins en renforcement des capacités de l'État. Dans une première section, nous procéderons à \In rapide état des lieux/survol de cette problématique en Afrique. EnsLite, dans une section 2, seront identifiées et discutées quelques priorités majeures liées au NEPAD. Dans une troisième section seront suggérées des réponses envisageables en matière de renforcement des capacités. 1. LA l'HOBLEMATIQliE DU HENFOIlCEMENT DES CAI'AClT('S : UN (èTAl' IWS LIEUX Lorsqu'on considère les besoins en capacités de l'Afrique, ceux actuels des États comme ceux futurs qui ressortent d'une lecture du NEPAD, trois constats peuvent être faits, qui ont chacun des implications importantes. a. Le premier constat qui s'impose est que, de plus en plus, les besoins en capacités, qu'il s'agisse de ceux qui sont identifiés par les 2. 3. 4. 5. TICAD : Tokyo International Conference on African Developmem. AGOA : Africa Growth Opportunity Act. UNDAF : United Nations Developmem Assistance Framework. PSA : Programme Spécial pour l'Afrique. 200 Le NEPAD et le drS1'('/oppelllel1f des c(/pacÎf('s États ou de ceux qui sont mentionnés dans le NEPAD, se situent à différents niveaux: ils sont en amont et en aval du processus de développement. En soi cela est positif; il n'en a pas toujours été ainsi les projets et programmes des États Ol!, volontairement ou non, l'accent a été mis quasi-exclusivement sur des programmes et, pour cette raison, l'effort de développement des capacités s'est situé en aval du processus. Il n'en a pas été ainsi dans les initiatives régionales (continentales) et on peut penser que l'évolution positive que l'on observe avec le NEPAD tient au fait que cette initiative marche sur deux jambes, au sens où elle se veut à la fois une vision et un programme. Une telle démarche doit être encouragée. b. Un second constat que l'on peut faire est que les réponses actuelles aux types de besoins identifiés sont aujourd'hui inégalement prises en charge par les pays africains et leurs partenaires de la communauté internationale. Ainsi, alors qu'on peut noter un fort investissement sur des projets visant à accroître les capacités d'analyse et de formulation des politiques (c'est le domaine de prédilection d'ACBF, par exemple) ou de suivi/évaluation des politiques (les agences d'aide bi et multilatérale ont longtemps rivalisé dans la fourniture généreuse d'outils, méthodes et processus de suivi/évaluation), force est de constater que la planification à long terme, d'une part, et la ca pacité de mise en œuvre cie réformes et politiques de développement, d'autre part, ne suscitent pas le même engouement. Il faut corriger ce déséquilibre à la faveur de la mise en œuvre du NEPAD. c. Un troisième constat que l'on peut dresser est que les initiatives de développement des capacités mises en œuvre souffrent de sérieuses limites du fait qu'elles: • prennent la forme de projets d'accompagnement des politiques financées sur ressources extérieures; • obéissent plus à une logique d'offre des partenaires que de demande des pays ; • sont victimes d'une certaine insularité institutionnelle qui renforce leur extranéité ; • ont enfin des horizons limités inadéquats, Tl faut surmonter ces limites et les dépasser si l'on veut donner au NEPAD une chance, II. (JlIELLES l'HIOHITnS ? Deux hypothèses centrales sont à la base de ce document. La première est que la capacité de l'État à stimuler le processus de développement (en créant en particulier un " enabling environment "), 201 Le NEPAD. il/stitl/tiol/s, R011l'eI'/Ul1lce etjzl/(/llcenlel1t à accompagner les acteurs et à formuler des politiques à long terme est une incertitude critique pour le NEPAD. Il Y a dix ans, il n'en aurait certainement pas été ainsi. L'État minimaliste était dans l'air du temps, qui se déclinait dans la formule "moins d'État, mieux d'État" avec, comme corrolaire, la glorification du secteur privé, associé parfois à la société civile. Aujourd'hui, les approches sont plus nuancées. L'État n'est certes plus l'alpha et l'oméga du développement qu'il était dans les années 60, mais même les tenants de l'État minimaliste conviennent sans peine aujourd'hui qu'il n'est pas de développement qui se puisse envisager sans que l'État ne joue un rôle capital pour garantir la sécurité mais aussi pour consolider la nation. Mieux d'État ne signifie pas nécessairement moins d'État ni en Europe ni encore moins en Afrique: voilà ce sur quoi le consensus s'est formé, à partir notamment d'une analyse des expériences asiatiques. L'on comprend dès lors que le NEPAD, qui s'inscrit pourtant résolument dans une optique néo-libérale, fasse la part belle au renforcement des capacités de l'État. Mais quelles capacités de l'État faut-il renforcer? A quelles fins? Avec quelles ressources? Selon quels processus? Voilà autant de questions sur lesquelles une réflexion s'impose. Le seconde hypothèse est qu'une des tâches de l'État consiste à créer les conditions d'une démocratisation des processus de développement. Cela signifie que l'État se doit de faire en sorte que les intérêts du plus grand nombre servent de plate-forme, de référent dans la formulation des politiques de développement, soient pris en compte dans la négociation de ces politiques (tant avec les acteurs internes qu'avec les partenaires extérieurs) et dans le suivi et l'évaluation de ces politiques. Il faut souligner que cette idée fort juste s'impose comme une urgence pour deux raisons. D'abord, pour corriger les effets pervers du processus de développement qui, en Afrique plus qu'ailleurs, s'est accompagné d'un accroissement des disparités aujourd'hui si significatif qu'il compromet les chances de durabilité des systèmes en place. Cet accroissement des disparités ne se résorbera pas de lui-même; bien au contraire il se poursuivra si la régulation du processus de développement est laissée aux seules lois du marché, comme le voudrait un certain libéralisme. Ensuite, parce que tout en acceptant le principe d'une économie de marché, les dirigeants africains du NEPAD sont loin d'être acquis à l'idée d'une société régie par le seul marché, d'une société encastrée dans l'économie. Pour eux, même si la formulation n'est pas très explicite, l'État a un rôle de régulateur à jouer pour éviter certaines dérives, et démocratiser le processus de développement. Il doit pour cela pouvoir intervenir de façon stratégique. Mais une telle intervention ne va pas de soi; elle suppose que l'État dispose de bonnes capacités d'anticipation d'une part, de négociation avec les autres acteurs du développement, d'autre part. 202 Le NEPAD et le déueloppemellt des capacités a. Des capacités d'anticipation Le développement est un pari sur le futur. Mais le futur n'est plus ce qu'il était. Il est plus ouvert qu'il ne l'a jamais été mais il est plus difficile que jamais à cerner en raison de multiples interférences. 11 faut être capable d'anticiper ces modifications, ou, à tout le moins, de réduire les incertitudes qui s'y rapportent. Les capacités à le faire existent-elles au sein des États? Sont-elles utilisées? La réponse va varier d'un point à un autre du continent mais il demeure que cette fonction « anticipation" est essentielle. Si l'on veut planifier à long terme, les capacités à anticiper les changements doivent être créées là où elle n'existent pas, elles doivent être valorisées davantage là où elles existent déjà. Pourtant la capacité à mener des réflexions prospectives sur le continent - puisque c'est de cela qu'il s'agit - n'est guère mentionnée de façon explicite et directe dans le NEPAD. C'est par ailleurs un domaine de connaissances, un champ qui ne suscite, comme on l'a signalé plus haut, que peu d'intérêt des donateurs l1 . A supposer que la volonté politique de développer cette fonction anticipation existe et que puisse être mobilisé un certain appui de la communauté internationale, la tâche n'en continuera pas moins d'être difficile du fait de la grande variété d'approches en matière de réflexion prospective, approches entre lesquelles il faudra choisir7 . Toutefois, si une bonne capacité d'anticipation est nécessaire pour une intervention stratégique de l'État, il reste qu'elle n'est pas une condition suffisante. Encore faut-il en effet pouvoir négocier, avec les acteurs qui font évoluer le système, des programmes ayant pour finalité la transformation de l'existant et la création des futurs souhaités et possibles. b. Des capacités de négociation Une bonne connaissance des acteurs du processus de développement, y compris de l'État lui-même, et une bonne compréhension du jeu des acteurs seront nécessaires pour négocier la mise en œuvre du NEPAD. En effet, ni la perception de l'intérêt ou de l'enjeu que constitue le NEPAD, ni le positionnement par rapport au NEPAD, ne 6. Une exception notable à cet égard est constituée par le PNUD qui finance depuis 1992 un projet régional c1'appui aux études nationales cie perspectives à long terme en Afrique, connu sous le nom de programme" Futurs Africains ". 7. Voir sur ce point l'ouvrage" Un guide pour les rél1exions prospectives en Afrique". Publié en co-édition par Futurs Africains, Karthala-Futuribles. 203 Le NEPAD, institlltions, /4oul'enul/lce et !ilUl/lCeIlU'/1t peut être identique pour tous les acteurs/groupes sociaux. La mise cn œuvre du NEPAD va en effet s'inscrire dans un champ économique, social, politique, symbolique dominé par la compétition entre groupes sociaux et façonné par les stratégies différenciées que ces groupes sociaux déroulent/déclinent dans cette compétition. On peut faire l'hypothèse que l'équilibre des forces entre acteurs et groupes sociaux dans ces champs va être, sinon modifié, du moins interpellé par la mise en œuvre de l'Initiative, et que même pour chaque catégorie d'acteurs, les intérêts à court terme ne se conciliant pas nécessairement avec ceux à plus long terme, l'on peut être tenté de sacrifier les seconds aux premiers. Il se trouve qu'à ces deux niveaux - connaissance des acteurs et connaissance du jeu des acteurs - il y a de sérieuses insuffisances. Ainsi, les différentes catégories d'acteurs sont appréhendées à travers des grilles d'analyse pas toujours appropriées (analyse marxiste, structuraliste, fonctionnelle). Quant au jeu des acteurs, ni en Afrique ni ailleurs, il n'est facile à analyser. Le faire est d'autant plus difficile que, d'une part, les acteurs peuvent n'avoir aucun intérêt à dévoiler leur jeu et, au contraire, tout intérêt à le masquer; d'autre part, les motivations et les ressorts des acteurs ne se situent pas tous dans un seul champ (celui de la rationalité économique par exemple) mais relèvent le plus souvent de divers registres. Au total, développer des capacités d'anticipation du changement au moyen d'une réflexion prospective menée de façon démocratique, dans la perspective d'une planification stratégique: voilà un défi majeur pour les États qui voudraient donner au NEPAD une chance de devenir ce qu'elle voudrait être. Mais qu'il s'agisse d'entamer une réflexion ouverte sur l'avenir, qu'il s'agisse de négocier, sur la base d'une vision à long terme du développement, des programmes auxquels contribueraient plusieurs acteurs, force est de reconnaître que des révisions déchirantes seront nécessaires dans le modus operandi de l'État. Celui-ci est en effet, d'une part, plus enclin et plus habitué à élaborer des scénarios normatifs que des scénarios exploratoires; d'autre part, du fait du déficit démocratique, il est plus enclin et habitué à décider en cercle restreint qu'à soumettre sa vision du futur au débat démocratique avant de décider. III. <..lI lE FAillE POL III IlENFOHCEH I.ES CAPAClT('S ? Le développement des capacités a été : Ca) dominé par des approches sectorielles, avec un fort accent mis sur des activités en aval du processus de développement; c'est récemment 204 Le NEPAD I!t II! dél'eloppeml!lIf des capacités seulement que les activités qui se situent en amont du processus de développement (formulation de politiques et recherches orientées vers la formulation de politiques) ont commencé à retenir l'attention; (b) implicitement marqué par le paradigme dominant du développement qui négligeait le capital social au profit d'autres formes de capitaJi~ ; (c) régi par l'offre, consacrant ainsi l'asymétrie et renforçant la dépendance. Pour cette raison, les programmes de développement des capacités ont été le plus souvent des programmes de transfert des compétences - sous forme d'outils, méthodes et processus élaborés ailleurs - qu'autre chose. Ces démarches comportent de sérieuses limites: on apprend en effet à gérer ce qui existe, mais pas à inventer. Elles engendrent aussi des effets pervers: effets d'éviction de l'expertise nationale par une assistance technique ou substitution de l'expertise privée nationale à celle de la Fonction publique. Une autre approche est-elle possible? En théorie, oui. Le renforcement des capacités en Afrique devrait se fixer les priorités suivantes: 1. promouvoir une approche alternative en matière de renforcement de capacités : cela consisterait à partir de la définition par les communautés elles-mêmes de ce qu'elles veulent, de ce qu'elles savent et de ce qu'elles peuvent dans le cadre d'une vision à long terme de leur développement. L'accent mis sur le long terme serait justifié par le fait que le développement des capacités est un processus long d'accumulation de savoir, mais aussi de savoir faire et d'expériences d'apprentissage de savoir apprendre ; et un processus qui commence dès les premières années de la vie et pas seulement lorsqu'on entre dans la vie professionnelle comme le suggère l'approche fonctionnaliste de développement des capacités qui a cours actuellement, et qui exclut toute prise en compte de la formation initiale. Quant à partir des aspirations des communautés, cela se justifierait par le fait que le développement est, tout autant qu'affaire de capacités à trouver les leviers qui permettent de transformer une réalité donnée, une affaire de volonté. Volonté de valoriser ses propres forces, de limiter ses faiblesses, dans une optique d'innovation et d'invention par une société de son futur. En un mot, une attitude phénoménologique est à promouvoir. 2. Favoriser les échanges d'expériences et promouvoir les meilleures pratiques particulièrement en ce qui concerne les processus de 8, Voir à ce propos: A. Sail, National Long TenTI Perspective Studies : A tool for sustainable human development in Africa ; Beijing-China 1998. 205 Le NEPAD, instill/tions, }tolll'elïllI1lCl! et financement développement des capacités car, en ce domaine comme en d'autres, le processus est aussi important sinon plus que le produit. 3. Soutenir les initiatives qui visent à développer les capacités d'anticipation et de négociation au sein des pays africains. 206 QUATRIÈME PARTIE LE NEPAD ET LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE Le G8, le Canada et le NEPAD par Son Excellence Michel Perrault Hallf-Colllmissuire dit Cunada uu Cameroul1 Le groupe des pays du G8 qui s'est réuni à Kannaskis en Alberta ICCanada) a consacré une de ses sessions de travail à la nouvelle initiative africaine le NEPAD. Ce groupe avait donné mandat au gouvernement !canadien qui assurait la présidence du groupe depuis le 1~rianvier ~002 de préparer une proposition à soumettre au Sommet des Chefs d'Etats en vue de leur appui à cette nouvelle initiative. Ainsi, le gouvernement a entrepris depuis le mois de janvier un processus de consultation avec les partenaires africains avant de formuler une série de propositions pour le sommet de juin. Des consultations qui ont amené le Premier Ministre Chrétien à effectuer une tournée en Afrique. Par ailleurs, le gouvernement canadien a élaboré en coordination avec ses partenaires du G8 l'ordre du jour du sommet du G8. Parallèlement aux questions liées au renforcement de la croissance économique mondiale et aux efforts de lutte contre le terrorisme, le gouvernement canadien a inscrit avec l'appui de ces partenaires la question de la création d'un nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique. Une première dans les sommets du G8 et qui exprime la volonté des pays les plus industrialisés à apporter leurs concours et leur appui pour aider l'Afrique à sortir de la crise et à retrouver une croissance forte et dynamique lui permettant de s'insérer de manière compétitive dans l'économie mondiale. Pourquoi l'Mrique ? Pourquoi maintenant? L'intérêt accordé par le gouvernement canadien et l'ensemble de ses partenaires dans le cadre du G8 à l'Afrique s'explique par la situation difficile du continent noir. Au niveau économique, la crise et la faiblesse des dynamiques de croissance se sont traduites par une explosion de la pauvreté. L'Afrique est aujourd'hui le seul continent où la pauvreté progresse et on estime que près de la moitié des 637 millions 209 Le NEPAD et lu cOit/mlll/UlIté interl/atiollule d'habitants de l'Afrique Sub-saharienne subsistent avec moins d'un dollar par jour. Parallèlement aux difficultés économiques, l'Afrique a connu une progression des grandes épidémies ces dernières années. Ainsi, sur les quarante millions de personnes infectées par le VIH/Sida plus des deux tiers vivent en Afrique du Sud Sahara. Un phénomène d'autant plus insupportable que cette épidémie a laissé près de 12,1 millions d·orphelins. Ainsi, les conditions économiques et sociales difficiles de l'Afrique expliquent l'intérêt croissant accordé par la communauté internationale à l'avenir du développement sur le continent. En même temps, l'Afrique a décidé de prendre en charge son propre avenir et à définir une nouvelle initiative commune afin de relever les enjeux du développement. Ainsi, les pays africains ont élaboré le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique. Un document qui a été adopté par les 53 États membres de l'Organisation de l'Unité Africaine lors de son dernier Sommet en juillet 2001 à Lusaka. Cette nouvelle initiative préconise un nouveau partenariat mondial sur la base de responsabilités et d'intérêts mutuels. Cette initiative met également l'accent sur le leadership de l'Afrique et sa prise en charge du processus de développement. Cette initiative a été jugée de manière positive par la communauté internationale et les partenaires du développement de l'Afrique. Car il s'agit pour la communauté internationale d'un programme réaliste et dont l'objectif est de mettre fin à la marginalisation du continent. Cette initiative accorde une place de choix au partenariat avec la communauté internationale pour la relance du développement sur le continent. Par ailleurs, la communauté internationale accorde beaucoup d'intérêt aux conditions préalables du développement que les pays africains se sont fixés eux-mêmes. Plus particulièrement, le consensus autour de la question de la bonne gouvernance est de bonne augure pour l'avenir du développement sur le continent. La bonne gouvernance favorisera sans nul doute une meilleure gestion des deniers publics et un usage efficient des ressources de l'aide internationale. En même temps le NEPAD fait également de la résolution des conflits un préalable important au développement. L'Afrique a longtemps souffert des conflits armés et qui ont hypothéqué ces chances de développement. Aujourd'hui l'Afrique a besoin de résoudre de manière pacifique ses conflits et de s'inscrire résolument dans le pluralisme et la démocratie. L'intérêt du NEPAD réside également dans les priorités qu'il s'est donné pour relever les défis du XXIl' siècle. Parmi ces priorités, il faut noter la nécessité de combler la fracture numérique et de faire face à ce fossé qui ne cesse de grandir et de créer les conditions d'une nouvelle marginalisation du continent. Par ailleurs. le NEPAD cherche 2JO Le CS, le Canada et le NEPAD à attirer les investissements étrangers et à favoriser l'accès pour les produits africains à de nouveaux marchés. Au niveau social, le NEPAD met l'accent sur les secteurs de l'éducation et de la santé qui sont les secteurs d'avenir pour les populations africaines. La réponse des pays du G8 au NEPAD. Les pays du G8 ont accueilli positivement cette nouvelle initiative africaine. Ils ont surtout salué le fait qu'elle a été élaborée par les pays africains et qu'elle fait l'objet d'un consensus large auprès des pays africains. La communauté internationale a été sensible au fait que les pays africains font de la bonne gouvernance une de leurs priorités, notamment la revue par les pairs et les mesures contre la corruption. Par ailleurs, les questions de la paix et de la sécurité sont aussi incontournables pour le développement ce qui suppose l'adoption de stratégies pour prévenir les conflits et amener les pays africains à gérer de manière pacifique leurs conflits. Mais, ceci suppose également d'aider les pays en post-conflit à reconstruire leurs économies et à dépasser les traumatismes des guerres et des violences. La communauté internationale considère également que l'éducation et le savoir, y compris les technologies de l'information et de la communication, sont des secteurs prioritaires qui exigent un intérêt particulier de la part des pays africains. Par ailleurs, dans un contexte de prolifération des épidémies, y compris le VIH/Sida et d'autres maladies infectieuses notamment le paludisme et la tuberculose, l'Afrique doit consacrer également des efforts importants au secteur de santé. Les secteurs de l'eau et de l'agriculture méritent également une attention particulière parmi les priorités des pays africains. Enfin, la relance de la croissance économique exige également l'attraction des investissements directs étrangers et une meilleure utilisation de raide publique au développement. Afin de répondre de manière positive à cette initiative africaine, les dirigeants du G8 ont nommé des représentants pour l'Afrique. A partir de là, un processus de consultation présidé par le Canada a été engagé aussi bien au sein des pays du G8 qu'avec le Comité directeur du NEPAD, le Comité de mise en œuvre du NEPAD, la Commission Économique des Nations Unies pour l'Afrique ou l'Organisation de l'Unité Africaine. Des consultations ont été également menées avec les partenaires du développement non membres du G8. L'ensemble de ces consultations ont permis à la communauté internationale d'élaborer un programme d'appui au NEPAD qui vient d'être adopté par les pays du G8 lors de leur dernier Sommet à Kannaskis au Canada. L'objectif de ce plan d'action est de favoriser le déblocage de ressources publiques et privées à long terme. 11 ne s'agira pas d'un apport massif de nouveaux fonds et les attentes de ce point de vue 211 Le NEPAD et la C0ll1111111IUlIté illtematio/Ulle doivent être réalistes. Mais, la communauté internationale cherchera à marquer son engament vis-à-vis du NEPAD en affectant de nouvelles ressources, financières et techniques. Par ailleurs, depuis son accès à la présidence du GB, le Canada a fait des efforts importants afin d'appuyer la nouvelle initiative africaine. Ainsi, en dépit des évènements du 11 septembre, le Canada a convaincu ses partenaires dans le groupe du GB de maintenir l'Afrique à l'ordre du jour du prochain sommet. Un engagement que le Premier Ministre canadien a confirmé lors de son intervention au Forum économique mondial à New York en février dernier. Il a notamment indiqué que" le Plan d'action pour l'Afrique visera à aider les gouvernements africains déterminés à travailler avec et pour leurs citoyens pour instaurer une paix et une sécurité durables, pour résoudre les crises dans le secteurs de l'éducation et de la santé, pour renforcer la gouvernance démocratique et pour libéraliser le commerce et l'investissement". Un engagement qui s'est également concrétisé par la visite officielle du Premier ministre canadien dans certains pays africains et la décision du gouvernement canadien d'affecter 500 millions de $ canadiens à la mise en œuvre du Plan d'action pour l'Afrique du GB. EN CONCLUSION Le NEPAD offre une occasion historique pour définir de nouvelles relations entre les principaux pays industrialisés et l'Afrique. L'objectif est aujourd'hui de créer un partenariat renforcé pour aider les pays déterminés à mettre en œuvre le NEPAD. L'initiative du GB est une occasion sans précédent, une occasion qui ne se présentera peut-être plus jamais. L'Afrique doit par conséquent tirer le maximum d'avantages de cet appui et de l'engagement de la communauté internationale. 212 La Banque mondiale et le NEPAD par Madani M, Tall Représelltallt de la Ballque mondiale pOlir le Cameroull, la RCA et la Gulllée Équatoriale La Banque mondiale a joué depuis sa création un rôle important dans le développement de l'Afrique, La Banque durant les quatre dernières décennies a accompagné les pays dans leurs efforts de développement tant au niveau de la réflexion, de la formulation de politique que dans l'appui financier aux différents projets de développement en Afrique. Le NEPAD offre à la Banque mondiale une nouvelle occasion pour appuyer les efforts des pays africains dans la relance de leurs stratégies de développement afin de favoriser une insertion dynamique et compétitive dans l'économie mondiale et dans leurs efforts de lutte contre la pauvreté. Quel rôle pour la Banque Mondiale dans le NEPAD ? La Banque mondiale a suivi avec beaucoup d'intérêt, et dès le départ, la nouvelle initiative des Chefs d'États africains. Elle a participé ainsi, sur invitation des Chefs d'États africains, aux différentes réunions et forums pour la préparation de cette initiative. L'adoption du NEPAD par les Chefs d'États africains lors de leur Sommet à Lusaka en juillet 2001 a été considérée par la Banque mondiale comme un événement important qui pourrait redonner confiance aux pays africains et leur permettre avec l'appui des bailleurs de fonds, de relever les défis du développement. Dès l'adoption de cette initiative, la Banque mondiale a organisé une série de réunions techniques à son siège à Washington ainsi que dans ses différentes missions résidentes sur le continent afin d'étudier les meilleurs moyens d'appuyer cette nouvelle initiative. Ces différentes discussions et consultations internes ont conduit la Banque mondiale à consacrer les dernières réunions du Programme spécial pour l'Afrique 213 Le NE'PAD et la commlll/allté illt(!/ïUltional(! (SPA-Strategie Partnership for Africa) à cette nouvelle initiative. Parallèlement à son appui, la Banque Mondiale encourage les promoteurs du NEPAD à recourir à l'expertise africaine, y compris celle de la BAD, des organisations régionales comme la Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique (CEA) ou l'Union Africaine ainsi que les organisations sous-régionales comme l'UEMOA en Afrique de l'Ouest, la CEMAC en Afrique Centrale et la SADEC en Afrique du Sud et australe. L'appui de la Banque mondiale à cette nouvelle initiative peut prendre plusieurs formes dont l'appui technique aux différentes projets et actions, la facilitation du dialogue avec les partenaires au développement de l'Afrique ainsi que le financement de certaines activités inscrites dans le cadre du NEPAD. L'appui technique de la Banque au NEPAD L'appui technique de la Banque au développement en Afrique n'est pas récent. Compte-tenu de la faiblesse des capacités techniques, la Banque s'est toujours employé à apporter l'appui et l'aide nécessaire aux pays en développement pour les aider à formuler avec la rigueur nécessaire leurs projets et leurs initiatives en matière de développement. Dans le cadre du NEPAD, la Banque mondiale s'est engagée à appuyer entre autres le volet sur la gouvernance économique avec la Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique. Il faut souligner par ailleurs que cette question fait partie des préoccupations de la Banque depuis plusieurs années et notre institution a cherché ~l aider les pays africains à effectuer des avancées dans le domaine de la gouvernance économique. L'amélioration de la gouvernance conditionne le renforcement de l'efficacité des efforts d'investissement et la gestion des ressources publiques et de l'aide internationale. De ce fait, la gouvernance économique constitue un préalable de taille au développement du continent. Par ailleurs, la Banque Mondiale cherche également depuis plusieurs années à apporter un appui technique aux pays africains pour relancer le secteur agricole. Au même niveau, les secteurs de la santé, notamment tout le volet de la lutte contre la prolifération des épidémies dont le VIH/Sida, et l'éducation reçoivent depuis plusieurs années un appui technique et financier important de la Banque mondiale. La Banque Mondiale joue également un rôle important du point de vue technique en aidant les pays africains à accéder aux marchés des pays développés. Une question cruciale qui est au centre des préoccupations de ces pays lors des négociations commerciales internationales. Par ailleurs, la Banque apporte son appui technique, avec d'autres institutions comme la Banque africaine de développement, dans le 214 La Btwljlte Mondiale et le NEPAD domaine des infrastructures régionales, notamment dans le domaine du transport. La Banque appuie aussi les efforts des pays africains dans la conduite des réformes nécessaires pour encourager les investissements directs étrangers (IDE) sur le continent. Enfin depuis plusieurs années, la Banque mondiale s'est résolument engagée dans la lutte contre la pauvreté en Afrique. Récemment, elle a appuyé l'initiative PPTE et elle met son expertise technique à la disposition des pays africains dans le cadre de l'élaboration de leurs stratégies de lutte contre la pauvreté. La facilitation du dialogue avec les partenaires La Banque a joué depuis plusieurs années un important rôle de facilitation du dialogue entre les pays africains et certains partenaires au développement à travers diverses réunions de groupes consultatifs et tables rondes. Cette action est importante car d'une part, elle assure une meilleure coordination de l'appui de la communauté internationale à l'Afrique, d'autre part, elle conduit à la mise à la disposition de financements plus importants qui permettent aux pays africains de réaliser des actions et des investissements d'envergure. Le fmancement du développement Les ressources IDA en direction de l'Afrique ont atteints, pendant l'année fiscale 2001, un montant record de 3,4 milliards de dollars US, montant jamais égalé depuis dix ans. Pour l'année fiscale 2002, il est prévu que les ressources IDA destinés ~l l'Afrique dépassent les 3,5 milliards de dollars. Cette progression constante devrait se poursuivre dans les prochaines années. En tout état de cause, la Banque mondiale envisage de consentir à l'Afrique, au moins 50 % des allocations de l'IDA (son guichet concessionne1). L'affectation des ressources IDA entre les pays se fera en fonction des avancées constatées dans le domaine des réformes et des politiques de développement mises en place par les différents gouvernements. Déjà, des pays comme le Burkina Faso, le Ghana, le Mali, le Mozambique, le Sénégal, la Tanzanie, et l'Uganda, ont reçu une assistance financière en nette progression par rapport aux années précédentes. Par ailleurs, la Banque Mondiale reprend ses activités en Côte-d'Ivoire, RDC, Érythrée, et Éthiopie, pays qui sortent de conflits ou de périodes d'instabilité politique plus ou moins longues. Les financements envisagés par la Banque mondiale vont contribuer à accélérer la réalisation des Objectifs de Développement du Millenium (Millenium Development Goals) et seront en phase avec les stratégies élaborés dans le cadre du NEPAD. Dans les années à venir, quatre 215 Le NEPAD el la COIII/II//IlUit/c> illlerllaliollClle domaines d'intervention seront privilégiés: l'amélioration de la gouvernance et la résolution des contlits; le développent des ressources humaines; la diversification de la production et l'amélioration de la compétitivité; et la réduction de la dépendance de l'aide extérieure ainsi que du poids de la dette, notamment à travers l'initiative PPTE (des 22 pays bénéficiaires, 18 sont en Afrique). Perspectives d'avenir Le NEPAD est certainement une initiative qui sera confrontée aux défis majeurs du continent africain pour le prochain siècle. La Banque mondiale estime que son avènement est un développement extrêmement positif car il jette les bases d'une véritable appropriation par les africains eux-mêmes de leur propre développement dans un cadre de gouvernance renforcée. De ce point de vue, les Documents de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP) en cours de préparation dans divers pays impliqués dans l'initiative PPTE pourraient contribuer assez facilement à renforcer le processus du NEPAD. Enfin, la Banque mondiale estime que la concrétisation du NEPAD est une œuvre de longue haleine qui mérite une implication de tous les partenaires au développement. A la demande des pays, la Banque mondiale continuera à apporter sa modeste contribution. Celle-ci visera à conforter les priorités régionales, renforcer les programmes d'allègement de la dette, appuyer les efforts de reconstruction après les conflits, apporter une assistance dans la lutte contre le VIH-SIDA et les maladies contagieuses, l'intégration régionale, le renforcement des capacités, et l'ouverture des marchés aux produits Africains. 216 Le PNUD et le NEPAD par Patricia de Mowbray Coordonnareur RésidemlReprésemam Résidem de l'ONUIPNUD au Cameroun Le Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (plus connu sous son appellation anglo-saxonne de NEPAD) est une initiative politique promue par les dirigeants africains, fondée sur une vision commune et sur une conviction ferme et partagée qu'il leur incombe d'urgence d'éradiquer la pauvreté, et de placer leur pays sur la voie d'une croissance et d'un développement durables, tout en participant activement à l'économie et à la vie politique mondiales. Né en réalité de la fusion de deux grands projets : l'Association du millénaire pour le programme de redressement africain (PRA) du Président sud-africain et le Plan Omega du Président sénégalais, le NEPAD promeut une nouvelle approche des questions de développement en Afrique qui repose sur un partenariat mieux équilibré et plus efficace aux niveaux: • national, dans lequel le NEPAD se propose de concevoir un développement endogène mené dans le cadre d'une collaboration fructueuse avec la société civile et le secteur privé; • régional, dans le cadre d'entités sous-régionales viables, disposant des moyens de concrétiser l'intégration régionale dans les domaines prioritaires affectant le développement du continent; • international, à travers des échanges plus équitables avec la communauté internationale et une participation accrue de l'Afrique à l'économie globale. Ainsi présenté, le NEPAD apparaît comme un vaste plan africain de relance économique. Depuis son lancement en octobre 2001, le NEPAD suscite l'adhésion des grandes puissances telles que les États-Unis, le Japon, l'Union Européenne, la Chine, etc ... , ainsi que des forums comme le G-S, et des grandes institutions/organisations internationales telles que le Fonds monétaire internationale, la Banque mondiale, le PNUD, etc ... 217 Le NEPAD el la COl1l11l1l11aufé il/lenll/fio1lale L'objet de ce papier est d'apporter les éléments explicatifs du soutien du PNUD au NEPAD d'une part, et de présenter les mécanismes de ce soutien d'autre part. Autrement dit, il s'agit de répondre à la question pourquoi et comment le PNUD soutient-il le NEPAD ? 1. JUSTIFICATION D[I SOUTII~N Dli l'NllD ALI NI\I'AD Il importe à ce titre de préciser d'abord ici les trois (3) principes constituant les principaux piliers du NEPAD, à savoir: Ci) l'initiative pour la paix, la sécurité, la démocratie et la bonne gouvernance, (ii) l'initiative pour la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises; et (Hi) les approches sous-régionales et régionales du développement. Ces piliers du NEPAD sont en fait assez proches des domaines actuels de concentration du PNUD (gouvernance démocratique, réduction de la pauvreté, nouvelles technologies de l'information et de la communication, lutte contre le VIH/SIDA, prévention et gestion des catastrophes, protection de l'environnement) et du mandat même du PNUD. En effet, le PNUD a pour mission de contribuer aux efforts des pays de parvenir à un développement humain durable, en les aidant à se doter des moyens propres à concevoir et à mettre en œuvre des programmes de développement dans les domaines de l'élimination de la pauvreté, de la création d'emplois et des moyens d'existence durable, de la promotion de la femme et de la protection et la régénération de l'environnement. En plus, le PNUD a joué par le passé un rôle important et stratégique dans les domaines d'action du NEPAD d'une part, et dispose ainsi d'un avantage comparatif certain dans ces domaines d'autre part. Enfin, tous les acteurs impliqués dans la mise en œuvre du NEPAD (OUNUA, Commission Économique des Nations-Unies pour l'Afrique, Banque Africaine de Développement, etc ... ) sont déjà des partenaires du PNUD. Ceci permettra de faciliter la collaboration du PNUD avec ces institutions dans la mise en œuvre du NEPAD. II. MÉCANISMES DI' SOllTIEN Dl! l'NUl) ALI NEI'AD Le PNUD soutient actuellement le NEPAD à deux niveaux: le Siège du PNUD et les Bureaux de terrain africains du PNUD. 218 Le PNUD ef le NEPAD 11.1. Appui du Siège du PNUD II est réalisé par le Bureau Régional Afrique du PNUD. C'est ainsi que ce Bureau s'est engagé dans le NEPAD depuis sa proclamation. A cet égard, il s'est engagé dans la conduite du NEPAD aux niveaux à la fois technique et politique afin de mieux comprendre les objectifs du NEPAD, sa structure institutionnelle, programmatique et opérationnelle, l'engagement des dirigeants politiques, et surtout afin de définir où le Bureau Régional Afrique pourrait mieux appuyer ce nouveau Partenariat africain. De manière plus concrète, le Directeur du Bureau Régional Afrique, les consultants indépendants et quelques Représentants Résidents du PNUD se sont réunis avec plusieurs Chefs d'État d'Afrique et les experts du Secrétariat du NEPAD pour travailler sur cette nouvelle structure. Les représentants du Bureau Régional Afrique se sont également réunis à ce sujet et ont préparé les documents pour plusieurs donateurs intéressés à appuyer le NEPAD, y compris le G-S et le Commonwealth. En ce moment, le Bureau Régional Afrique finance trois (3) études/ activités importantes: • un consultant indépendant vient juste d'achever un étude sur la question de savoir comment le PNUD peut renforcer son soutien au Secrétariat du NEPAD afin de mieux articuler, coordonner et appuyer les engagements pris dans le cadre du NEPAD, y inclus l'identification des domaines de programme prioritaires qui pourraient bénéficier de l'appui du PNUD ou qui pourraient immédiatement profiter de l'appui des programmes/projets en cours du Bureau Régional Afrique. • le Bureau Régional Afrique travaille également en ce moment avec la fondation internationale" Business Leadership .. pour préparer un étude plus exhaustive sur l'appui du secteur privé au NEPAD. Cette étude a commencé avant la réunion de Dakar sur le NEPAD du mois de mai dernier. • Le Bureau dispose actuellement d'un consultant qui travaille avec le Secrétariat du NEPAD sur les recommandations de la réunion du Comité de mise en œuvre tenue au mois de mars dernier à Abuja au Nigeria. Ce consultant est impliqué dans la conception des méthodologies, des instruments, des procédures et des mécanismes du processus de surveillance et de sanction du NEPAD dans le domaine de la gouvernance. Enfin, à travers un projet régional d'assistance préparatoire, le Bureau Régional appuie également le Secrétariat de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA) dans la préparation des documents constitutifs importants et dans le processus consultatif relatif à la transition de l'OUA à l'Union Africaine (UA). 219 Le NEPAD et la commllluwté illferllatiollale Au vu de ce qui précède, le Secrétaire Général de l'OUA a nommé le Directeur du Bureau Régional Afrique au panel d'éminentes personnalités qui le conseillent pour une transition sans problèmes à l'UA, Y compris sur les liens entre l'OUA et le NEPAD. II.2. L'appui des Bureaux de terrain: Exemple du Bureau du Cameroun Dans le sillage du Siège, le Bureau du PNUD Cameroun a récemment initié une série de rencontres visant à définir un cadre de réflexion et d'actions prioritaires sur les liens entre le NEPAD et la TICAD (Conférence Internationale de Tokyo sur le Développement de l'Afrique) pour accélérer le développement durable de l'Afrique. La première rencontre du genre a eu lieu le lundi, 13 mai 2002 à Yaoundé et réunissait les représentants du gouvernement, du secteur privé, de la société civile, des média, de l'ONU et les universitaires. Cette rencontre visait à : » susciter un intérêt national à ces deux mécanismes pertinents du développement de l'Afrique et en améliorer la connaissance par le public; » stimuler la réflexion partagée entre tous les acteurs (gouvernement, secteur privé, société civile)sur la contribution possible du Cameroun à la mise en œuvre du NEPAD dans le cadre des stratégies de développement au niveau national et sousrégional; » présenter les acquis que le Cameroun a tiré de sa participation aux activités du processus TICAD et améliorer la compréhension par tous les acteurs des opportunités de coopération qui pourraient en résulter pour son développement ; » assurer un meilleur positionnement du Cameroun dans le NEPAD, en tirant avantage des partenariats développés à travers TICAD pour la mise en œuvre des Objectifs du Développement de la Déclaration du Millénaire. Les résultats immédiats attendus de cette rencontre étaient les suivants: » » » » une meilleure compréhension du NEPAD et de la TICAD sur le plan national; une meilleure participation du Cameroun aux processus NEPAD et TICAD; un renforcement de l'engagement du Cameroun dans les deux processus NEPAD et TICAD ; une contribution du Cameroun à la préparation de TICAD III, par des suggestions pour un appui effectif de TICAD aux objectifs du NEPAD ; 220 Le PNUD ef le NEPAD ~ une meilleure vision à long terme du positionnement du Cameroun dans le processus de mise en œuvre du NEPAD. Par ailleurs, cette première rencontre a permis entre autres la mise sur pied d'un Groupe de travail mixte (Gouvernement, Bailleurs, Société civile, et Secteur privé) pour l'élaboration d'un plan d'action NEPAD/TICAD du Gouvernement du Cameroun. Ce groupe de travail mixte a tenu sa première réunion le 24 mai 2002. Cette réunion a permis de définir le mandat, les grandes orientations des réflexions et les domaines d'action prioritaires de ce groupe. Ainsi, son mandat est de : ~ définir les orientations des réflexions à mener ; ~ élaborer un calendrier de travail ; ~ définir une stratégie d'approche vis-à-vis d'un certain nombre de partenaires clés intéressés par le processus NEPAD/TICAD. Ses grandes orientations de réflexion sont : ~ réfléchir sur un schéma de coordination entre le NEPAD et la TICAD; ~ réfléchir autour des domaines d'action prioritaires qui pourraient montrer que la TICAD est utile au NEPAD ; ~ réfléchir sur la meilleure stratégie pour le Cameroun d'assurer un leadership dans tel ou tel domaine dans la préparation de la TICAD III. Les domaines d'action prioritaires retenus comme les axes de recherche de ce groupe de travail mixte sont: ~ les leçons que l'Afrique pourrait tirer de l'expérience asiatique de développement ; ~ les infrastructures routières et les télécommunications; ~ les Nouvelles technologies de l'information et de la communication (NTIC) ; ~ la délocalisation des entreprises japonaises dans les sous-régions d'Afrique pour faciliter l'insertion de ces dernières dans l'économie mondiale ; ~ l'expérience de gouvernance économique et politique des pays d'Asie. 221 ANNEXES LE DOCUMENT DU NEPAD NOUVEAU PARTENARIAT POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'AFRIQUE (NOPADA) OCTOBRE 2001 Sigles et acronymes AGOA APD CAO CEA CEDEAO CEl CGIAR DSRP EBA FAO Loi américaine sur la croissance et le commerce en Afrique Aide publique au développement Comité d'aide au développement Commission économique des Nations unies pour l'Afrique Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest Commission internationale de l'électrotechnique Groupe consultatif sur la recherche agricole internationale Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté "Tout sauf les armes .. Organisation des Nations-Unies pour l'alimentation et l'agriculture FARA Forum pour la recherche agricole en Afrique Fonds pour l'environnement mondial FEM Forum international d'accréditation FIA Fonds monétaire international FMI Association internationale de développement IDA Initiative mondiale pour la salubrité de l'environnement IMSE ISO Organisation internationale de normalisation NOPADA Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique Organisation de coopération et de développement OCDE économiques Organisation mondiale du commerce OMC Organisation mondiale de la propriété intellectuelle OMPI Organisation mondiale de la santé OMS Obstacles techniques au commerce OTC Organisation de l'unité africaine OUA Produit intérieur brut PIE Produit national brut PNB Initiative pour l'allégement de la dette des pays pauvres très PPTE endettés Communauté de développement de l'Afrique australe SADC Système d'informations géographiques SIG Système généralisé de préférences SGP Technologies de l'information et de la communication TIC Union africaine UA UNESCO Organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture 227 Table des matières 1. Introduction 231 II. L'Afrique dans le monde d'aujourd'hui: entre pauvreté et prospérité 232 L'appauvrissement historique d'un continent L'Afrique et la révolution mondiale 234 236 III. La nouvelle volonté politique des dirigeants africains 239 IV. L'appel aux peuples africains 241 V. Progranune d'action: stratégie africaine pour assurer un développement durable au XXl c siècle 242 A. Conditions requises pour réaliser un développement durable.. Al. Initiative pour la paix, la sécurité, la démocratie et la bonne gouvernance......................................................................... Ci) Initiative pour la paix et la sécurité (ii) Initiative pour la démocratie et la bonne gouvernance A2. Initiative pour la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises Approches sous-régionales et régionales au développement... 244 B. Priorités sectorielles BI. Combler l'écart dans le domaine des infrastructures Ci) Tous les secteurs des infrastnJctures (iD Combler l'écart numérique: investir dans les technologies cie l'information et de la communication (iiD Énergie (iv) Transports Cv) Eau et assainissement B2. Initiative de la mise en valeur des ressources humaines, y compris l'inversion de la tendance à la fuite des cerveaux .. Ci) Réduction de la pauvreté (iD Combler l'écart dans le domaine cie l'éducation (iH) Inversion cie la tendance à la fuite cles cerveaux 250 250 250 229 244 245 246 247 248 251 253 254 255 256 256 256 257 Alillexes: le doel/Illelll dl/ NEPAD (iv) Santé Agriculture Initiative pour l'environnement Culture Tribunes sur la science et la technologie .. 258 260 261 262 263 C. Mobilisation des ressources Cl. Initiative en faveur des flux de capitaux (0 Augmenter la mobilisation des ressources internes (ii) Initiative au sujet de la dette (iii) Initiative pour transformer l'ADP (iv) Initiative pour les apports de capitaux privés 264 264 264 264 265 266 B3. B4. B5. B6. C2. Initiative pour l'accès aux marchés Diversification de la production (ii) Agriculture (iii) Industries extractives (iv) Manufacture (v) Tourisme (vi) Services (vii) Promotion du secteur privé (viii) Promotion des exportations de l'Afrique (ix) Élémination des barrières non tarifaires (i) VI. Un nouveau partenariat mondial 267 267 268 269 269 271 272 272 273 275 275 Instaurer de nouvelles relations avec les pays industrialisés et les organisations multilatérales 277 34 VII. Mise en œuvre du Nouveau Partenariat pour le Développement de l'Afrique (i) Agriculture (ii) Promotion du secteur privé OH) Infrastnlctures et intégration régionale VIII. Conclusion 279 280 280 281 282 230 Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NOPADA) 1. INTllODLJCTION 1. Le présent Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique (NOPADA) est une promesse faite par des dirigeants africains, fondée sur une vision commune ainsi qu'une conviction ferme et partagée qu'i! leur incombe d'urgence d'éradiquer la pauvreté, de placer leurs pays, individuellement et collectivement, sur la voie d'une croissance et d'un développement durables, tout en participant activement à l'économie et à la vie politique mondiales. Il est ancré dans la détermination des Africains de s'extirper eux-mêmes, ainsi que leur continent, du malaise du sous-développement et de l'exclusion d'une planète en cours de mondialisation. 2. La pauvreté et le retard de l'Afrique contrastent vivement avec la prospérité du monde développé. La marginalisation continue de l'Afrique du processus de mondialisation et l'exclusion sociale de la vaste majorité de ses peuples constituent une grave menace pour la stabilité mondiale. 3. Depuis les années 70, lorsque les pays d'Afrique sont devenus membres des institutions de la communauté internationale, le binôme crédit-aide est resté la base logique du développement de l'Afrique. Le crédit s'est traduit par l'impasse de la dette qui, de versements en rééchelonnements, continue d'entraver la croissance des pays d'Afrique. L'on est parvenu au bout de cette option. Quant à l'autre élément du binôme, l'aide, l'on a aussi observé la réduction de l'aide privée et le plafonnement de l'aide publique, contrairement aux objectifs des années 70. 4. En Afrique, 340 millions de personnes, soit la moitié de la population, vivent avec moins d'l dollar EU par jour. Le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans y est de 140 pour 1 000 et l'espérance de vie à la naissance de seulement 54 ans. 58 pour cent seulement de la population a accès à de l'eau potable. Le taux d'alphabétisation des personnes de plus de 15 ans est de 41 pour cent. Il n'y 231 Annexes: le aOClllllellt dll NEPAD a que 18 lignes téléphoniques pour 1 000 personnes en Afrique, par rapport à 146 dans le monde entier et 567 dans les pays à revenus élevés. 5. Le NOPADA exige le revirement de cette situation anormale en changeant les relations qui la soutiennent. Les Africains ne demandent ni une perpétuation de la dépendance par le biais de l'aide, ni des concessions marginales. 6. Nous sommes convaincus qu'une occasion historique se présente de mettre fin au fléau du sous-développement qui afflige l'Afrique. Les ressources, y compris le capital, la technologie et les compétences humaines, requises pour lancer une guerre mondiale contre la pauvreté et le sous-développement, sont abondantes et à notre portée. Pour mobiliser ces ressources et les utiliser correctement, ce qui est requis est un leadership courageux, imaginatif et vraiment résolu à déployer des efforts soutenus afin d'améliorer les conditions de vie et d'éradiquer la pauvreté, ainsi qu'un nouveau partenariat mondial fondé sur la responsabilité conjointe et l'intérêt mutuel. 7. Sur tout le continent, les Africains déclarent qu'ils ne se laisseront plus conditionner par les circonstances. Nous déterminerons notre propre destinée et nous ferons appel au reste du monde pour compléter nos efforts. Des signes de progrès et d'espoir sont déjà apparents. Le nombre de régimes démocratiques qui se sont engagés à protéger les droits de l'homme, à axer le développement sur l'individu et à promouvoir des économies de marché est en train de s'accroître. Les Africains ont commencé à manifester leur refus d'accepter un leadership économique et politique médiocre. Mais ces progrès sont inégaux et inadéquats et doivent être accélérés davantage. 8. Le NOPADA cherche à consolider et à accélérer ces gains. C'est un appel pour une nouvelle relation de partenariat entre l'Afrique et la communauté internationale, et en particulier les pays fortement industrialisés, afin de franchir l'abîme du développement qui s'est élargi au fil de siècles de relations inégales. II. L'AFllIQlIE DANS LE MONDE D'Al:,10lIHD'11l1I : ENlllE PAUVRETI' ET PROSPI::RITI~ 9. La place de l'Afrique dans la communauté mondiale est définie par le fait que le continent est une base de ressources indispensables qui sert toute l'humanité depuis bien des siècles. 10. Ces ressources peuvent être décomposées en éléments constitutifs de la façon suivante : 232 NOU1 'eal/ Purtel/ariat pour le Dél'efoppel1lellt de l'A./i-ùj1le (NOPADA) - riche complexe cie dépôts de minerais, de pétrole et de gaz, sa flore et sa faune et son vaste habitat naturel encore intact, qui fournissent la base de l'exploitation minière, de l'agriculture et du tourisme (Composante 1) ; - le poumon écologique que fournissent les forêts tropicales du continent, et la présence minime d'émissions et d'effluents nuisibles à l'environnement - une commodité publique mondiale qui bénéficie à toute l'humanité (Composante II) ; - les sites paléontologiques et archéologiques qui contiennent des preuves de l'évolution de la terre, de la vie et des espèces humaines, les habitats naturels qui renferment une grande variété de flore et de faune et les espaces libres inhabités qui sont une caractéristique du continent (Composante III) ; -la richesse de la culture africaine et sa contribution à la variété des cultures de l'univers (Composante IV). Il. La première de ces composantes, la Composante 1, est celle avec laquelle le monde est le plus familier. La deuxième, la Composante II, n'a attiré l'attention que récemment, l'humanité commençant à saisir l'importance cmciale du problème de l'environnement. La troisième, la Composante III, est aussi en train de prendre de l'importance, n'étant plus un sujet de préoccupation pour une discipline scientifique seulement ou d'intérêt uniquement pour les musées et leurs conservateurs. La quatrième de ces composantes, la Composante IV représente la créativité des Africains qui demeure considérablement sous-exploitée et sous-développée. 12. L'Afrique a un rôle très important à jouer en ce qui concerne le problème cmcial de la protection de l'environnement. Les ressources africaines comprennent des forêts tropicales, l'atmosphère pratiquement dépourvue de gaz carbonique au-dessus du continent et la présence minime d'effluents toxiques dans les rivières et les sols qui interagissent avec l'océan Atlantique et l'océan Indien, la Méditerranée et la mer Rouge. Le NOPADA comprendra une stratégie visant à entretenir ces ressources et à les utiliser pour le développement du continent africain et le commerce par celui-ci, tout en les conservant pour toute l'humanité. 13. Il est évident que, si on ne donne pas aux communautés vivant à proximité des forêts tropicales d'autres moyens de gagner leur vie, elles contribueront à la destmction des forêts. Comme la conservation du patrimoine environnemental est dans l'intérêt cie l'humanité, il est impératif que l'Afrique soit placée sur une voie de développement qui ne le mette pas en danger. 233 Anllexes: le doellment dll NEPAD 14. La science moderne reconnaît que l'Afrique est le berceau de l'humanité. Dans le cadre du processus de reconstruction de l'identité et de la confiance en eux-mêmes des peuples d'Afrique, il est nécessaire que les Africains eux-mêmes comprennent et apprécient cette contribution à l'existence humaine. Le statut de l'Afrique comme berceau de l'humanité devrait être chéri par le monde entier en tant qu'origine de tous ses peuples. En conséquence, le NOPADA doit conserver le patrimoine commun et l'utiliser pour établir les fondations d'une compréhension universelle du besoin historique de mettre fin au sous-développement et à la marginalisation du continent. 15. L'Afrique a aussi un rôle majeur à jouer pour maintenir un lien solide entre les êtres humains et la nature. Les progrès technologiques tendent à mettre en évidence le rôle des êtres humains en tant que facteurs de production, qui rivalisent pour une place dans le processus de production avec les outils contemporains ou futurs. Les espaces libres inhabités, la flore et la faune, ainsi que les diverses espèces animales qui sont uniques à l'Afrique, offrent une rare chance à l'humanité de maintenir son lien avec la nature. L'Afrique est exceptionnellement bien placée pour offrir ce patrimoine à l'humanité. 16. L'Afrique a déjà contribué considérablement à la culture mondiale par le biais de la littérature, de la musique, des arts visuels et d'autres formes culturelles, mais son vrai potentiel demeure inexploité à cause de son intégration limitée à l'économie mondiale. Le NOPADA permettra à l'Afrique d'accroître sa contribution à la science, à la culture et à la technologie. 17. En ce nouveau millénaire, où l'humanité est en train de chercher une nouvelle façon de construire un monde meilleur, il est essentiel que nous combinions ces attributs aux forces de la volonté humaine pour placer le continent sur un piédestal de partenariat égal afin de faire progresser la civilisation humaine. L'appauvrissement historique d'un continent 18. L'appauvrissement du continent africain a été principalement accentué par l'héritage du colonialisme, de la guerre froide, des rouages du système économique international et des insuffisances et faiblesses des politiques menées dans de nombreux pays après l'indépendance. 19. Depuis des siècles, l'Afrique est intégrée dans l'économie mondiale principalement en tant que fournisseur de main-d'œuvre et de matières premières bon marché. Ceci a nécessairement signifié une hémorragie des ressources de l'Afrique plutôt que leur utilisation pour 234 NOIll'mlt Partenariat pOlir le Dt>l'eloppemellt cie l'Aji-iqlte (NOPADA) le développement du continent. L'Afrique a raté à cette époque l'occasion d'utiliser les minerais et les matières premières pour développer des industries de transformation ainsi qu'une base humaine très qualifiée afin de soutenir la croissance et le développement. Par conséquent, l'Afrique demeure le continent le plus pauvre alors qu'elle est l'une des régions les plus richement dotées du monde. 20. Dans d'autres pays et d'autres continents, le contraire s'est produit. Une richesse a été injectée sous la forme d'investissements qui ont créé de plus grands volumes de richesses grâce à l'exportation des produits porteurs de valeur ajoutée. Il est temps que les ressources africaines soient exploitées pour développer la création de richesses sur le continent pour le bien-être de ses populations. 21. Le colonialisme a ébranlé les structures, institutions et valeurs préexistantes ou les a asservies aux besoins économiques et politiques des puissances impériales. Il a aussi retardé le développement d'une classe animée d'un esprit d'entreprise ainsi que d'une classe moyenne dotée de compétences et de capacités de gestion. 22. Au moment des indépendances, presque tous les nouveaux États se caractérisaient par une pénurie de professionnels qualifiés et par une faible classe capitaliste, ce qui a abouti à un affaiblissement du processus d'accumulation. L'Afrique post-coloniale a hérité d'États faibles et d'économies en dysfonctionnement. Cette situation a encore été aggravée par un leadership médiocre, la corruption et la mauvaise gouvernance dans de nombreux pays. Ces deux facteurs, ainsi que les divisions causées par la guerre froide, ont entravé l'avènement de gouvernements responsables sur le continent. 23. Un grand nombre de gouvernements africains n'ont pas habilité leurs peuples à engager des initiatives de développement afin de réaliser leur potentiel créatif. Aujourd'hui, la faiblesse de l'État demeure une contrainte majeure au développement durable dans un certain nombre de pays. En fait, l'un des défis majeurs pour l'Afrique est de renforcer la capacité à gouverner et de mettre au point des politiques à long terme. Dans le même temps, il est également urgent de réaliser des réformes et des programmes d'une portée considérable dans de nombreux États africains. 24. Les programmes d'ajustement structurels n'ont fourni qu'une solution partielle. lis ont promu des réformes tendant à éliminer de graves distorsions des prix mais n'ont pas accordé suffisamment d'attention à la prestation de services sociaux. En conséquence, ces programmes n'ont permis qu'à un petit nombre de pays d'atteindre un niveau de croissance plus élevé durable. 235 Al1l1exes: le docl/mel1t du NEPAD 25. En fait, l'expérience de l'Afrique montre clairement que le taux d'accumulation au cours de la période post-coloniale n'a pas été suffisant pour reconstruire les sociétés à la suite du sous-développement colonial ou pour maintenir l'amélioration du niveau de vie. Ceci a eu des effets corrosifs supplémentaires sur le processus politique et a accru le népotisme et la corruption. 26. L'effet net de ces processus a été la perpétuation d'un cercle vicieux, dans lequel le déclin économique, la capacité réduite et la gouvernance médiocre se renforcent, confirmant le rôle périphérique et de moins en moins important de l'Afrique dans l'économie mondiale. Au fil des siècles, l'Afrique a été définie, par nécessité, comme le continent marginalisé. 27. Le NOPADA cherche à tirer parti des réalisations du passé et à les célébrer ainsi qu'à réfléchir sur les leçons tirées d'une expérience douloureuse afin de mettre sur pied un partenariat qui soit à la fois crédible et réalisable. Ce faisant, nous enjoignons aux peuples et aux gouvernements d'Afrique de comprendre que le développement est un processus de responsabilisation et d'autosuffisance. En conséquence, les Africains ne doivent pas être les pupilles de gardiens bienveillants, mais plutôt les architectes d'une amélioration soutenue de leurs conditions de vie. L'Afrique et la révolution mondiale 28. Le monde s'est engagé dans le nouveau millénaire au beau milieu d'une révolution économique, Cette révolution pourrait fournir à la fois le contexte et les moyens de la modernisation de l'Afrique. Tandis que la mondialisation a augmenté le coût de l'incapacité de l'Afrique à faire concurrence, nous soutenons que les avantages d'une intégration gérée efficacement présentent les meilleures perspectives pour une prospérité économique et une réduction de la pauvreté dans l'avenir, 29. La révolution économique actuelle a été rendue possible, en partie, par les progrès dans le domaine des technologies de l'information et de la communication (TIC) qui ont réduit le coût et augmenté la vitesse des communications à travers le globe, abolissant les anciennes barrières du temps et de l'espace, et ayant donc une incidence sur tous les domaines de la vie sociale et économique. Cette révolution a permis l'intégration des systèmes nationaux de production et de finance et se reflète dans la croissance incroyable de l'échelle des flux transfrontaliers de biens, de services et de capitaux. 30. L'intégration des systèmes nationaux de production a rendu possible le " découpage en tranches de la chaîne des valeurs .. dans un 236 NOlll'eall Partenariat pour le Dél'eloppemellt de l'A/rüple (lVOPADA) grand nombre de processus de production du secteur industriel et du secteur des selVices. Simultanément, la plus grande mobilité des finances signifie que les empnmteurs, publics ou privés, doivent rivaliser les uns avec les autres pour trouver des capitaux sur des marchés mondiaux plutôt que nationaux. Ces deux processus ont accru les coûts pour les pays qui sont incapables d'une concurrence réelle. L'Afrique a, dans une large mesure, supporté ces coûts de façon disproportionnée. 31. Si aucune partie du monde n'a échappé aux effets de la mondialisation, les contributions des diverses régions et nations ont nettement différé. Les nations fortement industrialisées ont été le moteur de ces progrès majeurs. Celles-ci mises à part, seuls quelques pays dans le monde en développement jouent un rôle important dans l'économie mondiale. Un grand nombre de pays en développement, en particulier en Afrique, y contribue, en général passivement, essentiellement sur la base de leur patrimoine environnemental et naturel. 32. C'est dans la répartition des profits que le déséquilibre mondial est le plus flagrant. D'une part, les occasions d'accroître la richesse, d'acquérir des connaissances et des compétences et d'améliorer l'accès aux marchandises et aux selVices - en bref, d'améliorer la qualité de la vie - se sont accrues. Dans certaines parties du monde, la recherche d'un plus grand accès à l'économie mondiale a offert la possibilité de sortir des millions de personnes de la misère. 33. D'autre part, une plus grande intégration a aussi conduit à marginaliser davantage les pays qui sont incapables d'une concurrence réelle. En l'absence de règles mondiales justes et équitables, la mondialisation a accru la capacité des plus forts à promouvoir leurs intérêts au détriment des plus faibles, surtout dans le domaine du commerce, des finances et de la technologie. Elle a limité la capacité des pays en développement à contrôler leur propre développement. Les conditions de ceux qui sont marginalisés dans ce processus ont empiré en termes réels. Une fissure entre l'inclusion et l'exclusion a émergé au sein des nations et entre elles. 34. L'incapacité de l'Afrique à exploiter les processus de mondialisation résulte en partie d'obstacles structurels à la croissance et au développement que sont les sorties de ressources et les termes défavorables de l'échange. NOLIS reconnaissons en même temps que les échecs des leaderships politiques et économiques dans de nombreux pays africains empêchent la mobilisation cohérente des ressources dans des domaines d'activité de plus en plus indispensables pour attirer et faciliter les investissements locaux et étrangers. 237 Annexes: /e docl/ment dl/ NEPAD 35. Le faible niveau d'activité économique signifie que les instruments nécessaires à l'injection véritable de fonds privés et à la prise de risques ne sont pas disponibles, ce qui résulte en un déclin supplémentaire. Dans un cycle qui se perpétue indéfiniment, la capacité de l'Afrique à répondre à la mondialisation est affaiblie, ce qui conduit à une marginalisation supplémentaire. La polarisation. croissante de la richesse et de la pauvreté est l'un des nombreux processus qui ont accompagné la mondialisation et qui menacent sa viabilité. 36. La fin du siècle dernier a vu un effondrement financier majeur dans une grande partie du monde en développement qui n'a pas seulement menacé la stabilité du système financier mondial mais l'économie mondiale dans son ensemble. L'un des effets immédiats de la crise financière a été d'exacerber les niveaux existants de pauvreté structurelle profonde dans laquelle vit environ la moitié de la population mondiale, avec moins de 2 dollars EU par jour, et un cinquième de la population, avec moins de 1 dollar EU par jour. 37. Il existe également des dynamiques plus lentes qui présentent des risques à plus long terme. Il s'agit notamment de l'accroissement rapide du nombre de personnes socialement exclues dans diverses zones du globe, ce qui contribue d'une part à l'instabilité politique, à la guerre civile et aux conflits militaires et, d'autre part, à un nouveau mode de migration massive. L'expansion de la production industrielle et l'accroissement de la pauvreté contribuent à la dégradation environnementale de nos océans, de l'atmosphère et de la végétation naturelle. Si ces problèmes ne sont pas abordés, ils déclencheront des processus qui échapperont de plus en plus au contrôle des gouvernements, à la fois dans les pays développés et en développement. 38. Les moyens de retourner ce scénario lugubre ne sont pas encore hors de notre portée. L'amélioration du niveau de vie des marginalisés offre un énorme potentiel de croissance pour toute l'économie internationale, grâce à la création de nouveaux marchés et à l'exploitation d'une capacité économique accrue. Ceci résultera en une plus grande stabilité à l'échelle mondiale, accompagnée par le bien-être social et l'exubérance culturelle qui prospèrent dans des conditions de certitude. 39. L'impératif du développement ne pose donc pas seulement un défi de conscience morale, il est fondamental à la viabilité du processus de mondialisation. Nous admettons sans hésiter que la mondialisation est un produit des progrès scientifiques et technologiques qui ont été imposés, en grande partie, par le marché, Cependant, les gouvernements, particulièrement dans le monde développé, ont, en partenariat avec le secteur privé, joué un rôle important dans la détermination de sa forme et de son contenu. NOl/I'eali Parfellilriaf pOlir le Dél'eloppemem de l'A{riqlle (NOPADA) 40. L'argument en faveur d'un rôle pour les autorités nationales et les institutions privées dans l'orientation du programme de la mondialisation sur une voie durable dont les avantages sont donc répartis plus équitablement, reste fort. L'expérience montre qu'en dépit des occasions sans précédent offertes par la mondialisation à quelques pays auparavant pauvres, rien d'inhérent au processus ne réduit automatiquement la pauvreté et l'inégalité. 41. Ce qui est nécessaire est un engagement de la part des gouvernements, du secteur privé et d'autres institutions de la société civile, à une intégration authentique de toutes les nations dans l'économie et dans la vie politique mondiales. Cela exige la reconnaissance de l'interdépendance mondiale en ce qui concerne l'offre et la demande, la base environnementale qui soutient la planète, la migration transfrontalière, une architecture financière mondiale qui récompense une bonne gestion socioéconomique et une gouvernance mondiale qui reconnaisse un partenariat entre tous les peuples. Nous soutenons que la communauté internationale a la capacité de créer des conditions justes et équitables dans lesquelles l'Afrique puisse participer réellement à l'économie et à la vie politique mondiales. III. LA NOlIVELI.E VOLONTI:: POLlTIQlIE DES DI/W;EANTS AFRICAINS 42. Le NOPA DA reconnaît que, dans le passé, des tentatives visant à formuler des programmes de développement au niveau du continent ont été faites. Pour des raisons diverses, à la fois internes et externes, y compris un leadership et un degré de participation douteux des Africains eux-mêmes, ces programmes n'ont pas été couronnés de succès. Cependant, de nouvelles circonstances, qui se prêtent à une mise oeuvre pratique intégrée, existent aujourd'hui. 43. La nouvelle phase de mondialisation a coïncidé avec une restructuration des relations internationales à la suite de la guerre froide. Celleci est associée à l'émergence de nouveaux concepts de sécurité et d'intérêt personnel, qui comprennent le droit au développement et à l'éradication de la pauvreté. La démocratie et la légitimité de l'État ont été redéfinies afin d'y inclure, comme éléments centraux, un gouvernement responsable, une culture des droits de l'homme et la participation du peuple. 44. Fait révélateur, de plus en plus de dirigeants sont élus par la voie démocratique. Par leurs actions, ils ont déclaré que les espoirs des peuples d'Afrique pour une vie meilleure ne peuvent plus reposer sur la magnanimité d'autrui. 239 Arll1exes: le document du NEPAD 45. Sur le continent, la démocratie continue à se propager, soutenue par l'Union africaine qui s'est montrée résolue à s'occuper des conflits et à censurer toute déviation par rapport à la norme. Ces efforts sont renforcés par des voix qui se font entendre au sein de la société civile et qui incluent des associations de femmes, la jeunesse et des médias indépendants. De plus, les gouvernements africains sont beaucoup plus résolus à atteindre les objectifs de coopération et d'intégration économiques au niveau régional et continental. Cela sert à la fois à consolider le redressement économique et à renforcer les avantages de l'interdépendance mutuelle. 46. Le changement des conditions en Afrique a déjà été reconnu par des gouvernements du monde entier. La Déclaration du millénaire des Nations-Unies, adoptée en septembre 2000, confirme l'empressement de la communauté mondiale à soutenir les efforts de l'Afrique visant à aborder le sous-développement et la marginalisation. La Déclaration souligne son soutien à la prévention des conflits et à la création de conditions de stabilité et de démocratie sur le continent ainsi qu'aux défis clés de l'éradication de la pauvreté et des maladies. La Déclaration attire également l'attention sur l'engagement de la communauté mondiale à accroître le flux de ressources vers l'Afrique, en améliorant les relations dans le domaine de l'aide, du commerce et de la dette entre l'Afrique et le reste du monde, et en augmentant le flux de capitaux privés vers le continent. Il est maintenant important de traduire ces engagements en réalités. 47. Le NOPADA est axé sur la nécessité d'en assurer la propriété et la gestion aux Africains. Grâce au présent programme, les dirigeants de l'Afrique établissent l'ordre du jour du renouveau du continent. Cet ordre du jour se fonde sur les priorités nationales et régionales et les plans de développement qui doivent être mis au point au moyen d'un processus de démocratie directe et participative. Nous estimons que si ces plans donnent leurs mandats aux dirigeants africains, leur rôle est de les exprimer et d'en diriger la mise en application pour le compte de leurs peuples. 48. Ce programme constitue un nouveau cadre d'interaction avec le reste du monde, notamment avec les pays industrialisés et les organisations multilatérales. Il est fondé sur un ordre du jour dont ont décidé les Africains de leur propre initiative et de leur propre gré, afin de déterminer eux-mêmes leur destin. 49. Pour réaliser ces objectifs, les dirigeants africains devront assumer en commun un certain nombre de responsabilités: - Consolider les mécanismes de prévention, de gestion et de résolution des conflits aux niveaux régional et continental et faire en 240 NOIll'eUII Pa l'tenu riat pOlir le Dél'eloppement de l'Afrique (NOPADA) - - - - - sorte que ces mécanismes soient utilisés pour restaurer et maintenir la paix; Promouvoir et protéger la démocratie et les droits de l'homme dans leur pays et leur région en établissant des normes claires de responsabilité, de transparence et de démocratie directe aux niveaux local et national; Restaurer et maintenir la stabilité macro-économique, en particulier en mettant au point des normes et cibles appropriées en matière de politiques monétaires et budgétaires et en instaurant des cadres institutionnels adéquats pour en assurer la réalisation; Instaurer des cadres juridiques et réglementaires transparents à l'intention des marchés financiers, pour assurer l'audit des compagnies privées comme du secteur public Revitaliser et élargir la prestation des services d'enseignement, de formation technique et de santé, en accordant une forte priorité à la lutte contre le VIH//SIDA, le paludisme et autres maladies contagieuses; Promouvoir le rôle des femmes dans le développement socioéconomique en renforçant leurs capacités dans les domaines de l'éducation et de la formation, en développant des activités lucratives grâce à un accès plus facile au crédit et en assurant leur participation à la vie politique et économique des pays d'Afrique; Renforcer la capacité des États d'Afrique d'instituer et de faire respecter la législation et de maintenir l'ordre; Promouvoir le développement des infrastructures, de l'agriculture et de sa diversification vers les agro-industries et les manufactures au service des marchés locaux comme de l'exportation. IV. 1: APPEL AliX PEliPLES AFRICAINS 50. La réussite du projet de Renaissance africaine, qui devrait permettre à notre continent, marginalisé pendant des siècles, d'occuper la place qui lui revient dans le monde, dépend de l'avènement d'une économie africaine forte et compétitive, en ce moment où l'économie mondiale est soumise à une plus grande libéralisation et faire face à une compétitivité accrue. 51. Le NOPADA ne réussira que si les peuples africains, unis dans leur diversité, se l'approprient. 52. L'Afrique, appauvrie par l'esclavage, la corruption et la mauvaise gestion économique, décolle dans des circonstances difficiles. Toutefois, si ses énormes ressources naturelles et humaines sont mobilisées et utilisées de manière appropriée, il y a lieu de s'attendre à une croiss3nce équitable et durable sur le continent, ainsi qu'à une accélération de l'intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale. 241 Annexes,' le docl/ment dit NEPAD 53. C'est la raison pour laquelle nos peuples, en dépit des difficultés actuelles, doivent reprendre confiance en leur génie et en leur capacité à surmonter les obstacles et doivent participer à l'édification de la nouvelle Afrique. La présente initiative est l'expression de l'engagement des dirigeants africains à traduire en actions concrètes les aspirations profondes des peuples africains. 54. Toutefois, le succès des efforts de nos dirigeants dépend de l'engagement de nos peuples à prendre en main leur propre destin. 55. Aussi, les dirigeants politiques africains lancent-ils à tous les peuples du continent, dans toute leur diversité, un appel pour qu'ils prennent conscience de la gravité de la situation et de la nécessité de se mobiliser pour mettre un terme à la marginalisation continue de l'Afrique et promouvoir son développement en réduisant le fossé qui le sépare du monde développé. 56. En conséquence, nous demandons aux peuples africains de se préparer à relever le défi de la mobilisation de l'appui à la mise en oeuvre de l'initiative en mettant sur pied, à tous les niveaux, des mécanismes leur permettant de s'organiser, de se mobiliser et d'agir. 57. Les dirigeants du continent sont conscients du fait que le vrai génie d'un peuple se mesure à sa capacité à mener une réflexion audacieuse et innovatrice, et à sa détermination à appuyer les efforts de développement. 58. Nous devons poursuivre la mise en œuvre de l'ambitieux programme de promotion d'économies stables et robustes, et d'édification de sociétés démocratiques. A cet égard, les dirigeants africains sont convaincus que le continent dont le processus de développement a toujours été caractérisé par de faux départs et des échecs, sera couronné de succès avec la présente Initiative. V. PHOc;HAMME D'ACTION: STHATÙ;lI' AFllICAINE POl III ASSI IRE" liN D(~VELOP­ PEMI'NT DllllABI.E Ali XXI C SI[':CLI~ 59. Dans son approche et sa stratégie, le NOPADA diffère de tous les plans et initiatives antérieurs visant à promouvoir le développement du continent, bien que les problèmes qu'elle cherche à résoudre demeurent sensiblement les mêmes. 60. Le NOPADA se veut une vision à long terme du programme de développement de l'Afrique par les africains eux-mêmes. 242 NOIl1'eau Partenariat pOlir le n'I'eloppemellt de l'Ajdtjlle (NOPADA) 61. Le Programme d'action est axé sur neuf domaines prioritaires présentés de la même manière que dans la stratégie proposée. Il identifie les activités à entreprendre à court terme, bien que ces activités soient de plus longue portée. 62. Bien que le financement à long terme soit prévu dans le cadre de l'initiative, il faudrait cependant, dans l'immédiat, exécuter rapidement les projets visant à éradiquer la pauvreté sur le continent et à placer les pays africains, individuellement et collectivement, sur la voie d'une croissance et d'un développement durables pour mettre ainsi un terme à la marginalisation de l'Afrique dans le contexte de la mondialisation. 63. Bien qu'il existe d'autres priorités urgentes, celles qui ont été retenues dans le Programme d'action auront un effet catalyseur pour les interventions futures dans les autres domaines prioritaires. 64. Les taux de croissance revêtent certes une importance, mais ils ne permettent pas à eux seuls aux pays africains de réaliser l'objectif de la réduction de la pauvreté. Le défi à relever par l'Afrique consiste donc à se doter de la capacité de maintenir la croissance aux niveaux requis pour réduire la pauvreté et promouvoir un développement durable. A cette fin, d'autres facteurs sont à prendre en considération, notamment le développement des infrastructures, l'accumulation du capital, les ressources humaines, les institutions, la diversification structurelle, la compétitivité, la santé et la salubrité de l'environnement. 65. L'objectif du NOPADA est d'imprimer un nouvel élan au développement du continent en comblant l'écart actuel dans les secteurs prioritaires, afin de permettre à l'Afrique de rattraper son retard par rapport aux régions développées du monde. 66. La vision à long terme nécessite des investissements massifs et importants pour combler l'écart actuel. A cet égard, le défi à relever par l'Afrique consiste à mobiliser les ressources nécessaires dans les meilleurs conditions possibles. Nous lançons donc un appel à nos partenaires de développement pour qu'ils nous apportent une assistance dans nos efforts. 67. Objectifs à long terme - Éradiquer la pauvreté en Afrique et placer les pays africains, individuellement et collectivement, sur la voie d'une croissance et d'un développement durables pour mettre ainsi un terme à la marginalisation de l'Afrique dans le contexte de la mondialisation; - Promouvoir le rôle des femmes dans toutes les activités. 243 Annexes . le document du NEPAD 68. Buts - Parvenir à une croissance annuelle moyenne du produit intérieur brut (PIB) de plus de 7 % et s'y maintenir pendant les 15 prochaines années; - Faire en sorte que le continent réalise les objectifs convenus en matière de développement international, à savoir: • Réduire de moitié, de 1990 à 2015, le pourcentage de gens vivant dans des conditions d'extrême pauvreté; • Assurer la scolarisation de tous les enfants en âge de fréquenter les écoles primaires d'ici 2015 ; • Progresser vers l'égalité entre les sexes et habiliter les femmes en supprimant les disparités entre les sexes dans les inscriptions à l'enseignement primaire et secondaire d'ici 2005 ; • Réduire les taux de mortalité infantile et post-infantile de deux tiers de 1990 à 2015 ; • Réduire les taux de mortalité liée à la maternité des trois quarts de 1990 à 2015 ; • Assurer que tous ceux qui en ont besoin aient accès à des services de santé génésique d'ici 2015 ; • Mettre en œuvre dès 2005 des stratégies régionales de développement durable pour que les pertes de ressources écologiques aient été compensées d'ici 2015. 69. Les résultats attendus de cette stratégie sont les suivants: - Croissance économique, développement et augmentation des emplois; - Réduction de la pauvreté et des inégalités; - Diversification des activités de production, amélioration de la compétitivité sur le plan international et augmentation des exportations; - Meilleure intégration de l'Afrique. 70. Conscients qu'à moins que ne soient prises des mesures novatrices et radicales, l'Afrique ne réalisera ni les objectifs de développement international ni un taux de croissance annuelle du PIB de 7 %, les chefs d'État africains proposent le programme ci-après. Ce programme, qui se fonde sur des thèmes clés, est étayé par un programme d'action détaillé. A. Conditions requises pour réaliser un développement durable Al. Initiative pour la paix, la sécurité, la démocratie et la bonne gouvernance 71. L'expérience a appris aux dirigeants africains que la paix, la sécurité, la démocratie, une bonne gouvernance, le respect des droits 244 NOlll 'i!{111 Parfi!llariat pOlir le Dé1'eloppi!lI1i!nt de l'Afi'üJlli! (NOPADA) de l'homme et une saine gestion économique sont les conditions préalables indispensables au développement durable. Ils s'engagent à promouvoir ces principes, individuellement et collectivement, dans leur pays, leur région et le continent. (i) Initiative pour la paix et la sécurité 72. L'Initiative pour la paix et la sécurité consiste en trois éléments: - La promotion de conditions à long terme qui favorisent le développement et la sécurité; - La consolidation des capacités d'alerte rapide des institutions africaines et l'amélioration de leur capacité à prévenir, gérer et résoudre les conflits; - L'institutionnalisation des engagements envers les valeurs essentielles du NOPADA par le biais de ses dirigeants. 73. Des conditions à long terme permettant d'assurer la paix et la sécurité en Afrique nécessitent des mesures pour réussir à combattre les vulnérabilités politiques et sociales qui sont à l'origine des conflits. Celles-ci sont abordées dans les Initiatives de gouvernance politique et économique, les Initiatives sur les flux de capitaux et l'accès au marché et celle sur la mise en valeur des ressources humaines. 74. Les efforts visant à consolider la capacité de l'Afrique à gérer tous les aspects d'un conHit doivent mettre l'accent sur les moyens nécessaires pour renforcer les institutions régionales et continentales existantes dans quatre domaines clés: -la prévention, la gestion et la résolution des conflits; - La recherche de la paix, le maintien de la paix et l'imposition de la paix; - La réconciliation, le relèvement et la reconstruction suite à un conflit; - La lutte contre la prolifération illicite des armes légères et des mines terrestres. 75. Dans les six mois suivant la mise en place du NOPADA, ses dirigeants étudieront les recommandations décrivant les mesures détaillées, assorties de leurs coûts, qui sont requises dans chacun des quatre domaines susmentionnés. Ce travail portera aussi sur les mesures requises des partenaires, ainsi que sur la nature et les sources du financement de ces activités. 76. Le Forum prévu des chefs d'État servira de tribune où les dirigeants du NOPADA chercheront à améliorer la capacité des mécanismes africains à promouvoir la paix et la sécurité sur le continent, à partager les expériences et à mobiliser une action collective. Le Forum 245 Annexes: le document du NEPAD veillera à ce que les principes et les engagements implicites dans l'Initiative soient respectés. 77. Compte tenu de cette exigence, les africains doivent tout mettre en œuvre pour trouver des solutions durables aux conflits actuels, renforcer leur sécurité intérieure et promouvoir la paix entre les pays. 78. Lors du Sommet de Lusaka, l'Union africaine a décidé de prendre des mesures énergiques pour réactiver les organes chargés de la prévention et du règlement des conflits. (ü) Initiative pour la démocratie et la bonne gouvernance 79. Il est maintenant généralement accepté que le développement ne peut se réaliser en l'absence d'une démocratie véritable, du respect des droits de l'homme, de la paix et de la bonne gouvernance. Avec le NOPADA, le continent prend l'engagement de respecter les normes mondiales en matière de démocratie, dont les principales composantes sont le pluralisme politique, l'existence de plusieurs partis politiques et de plusieurs syndicats, l'organisation périodique d'élections démocratiques libres, justes et transparentes afin de permettre aux populations de choisir librement leurs dirigeants. 80. L'objectif de l'initiative pour la démocratie et la gouvernance est de contribuer à renforcer le cadre politique et administratif des pays participants, en accord avec les principes de démocratie, de transparence, de responsabilité, d'intégrité, de respect des droits de l'homme et de la primauté du droit. Elle est renforcée par l'initiative pour la gouvernance économique qu'elle soutient et avec laquelle elle partage des caractéristiques clés. Ensemble, elles doivent contribuer à utiliser l'énergie du continent pour progresser sur la voie du développement et de l'éradication de la pauvreté. 81. L'Initiative est composée des éléments suivants: - Une série d'engagements par les pays participants à instituer ou consolider les pratiques et les processus fondamentaux de bonne gouvernance; - La promesse faite par les pays participants de jouer un rôle déterminant en soutien aux initiatives qui encouragent une bonne gouvernance; - L'institutionnalisation des engagements par les dirigeants du NOPADA pour assurer que les valeurs fondamentales de l'initiative soient respectées. 82. Les États membres du NOPADA vont aussi prendre plusieurs engagements pour satisfaire aux normes fondamentales de bonne gouver246 NO/ll'eall Pa rtenarillt pOlir le Dét'doppement de l'AFiqlle (NOPADA) nance et de conduite démocratique tout en s'aidant les uns les autres. Les États participants recevront un appui pour entreprendre les réformes institutionnelles souhaitées lorsque cela s'avérera nécessaire. Dans les six mois suivant l'institutionnalisation du NOPADA, ses dirigeants étudieront des recommandations portant sur le déploiement d'outils de diagnostic et d'évaluation appropriés, pour faciliter le respect des objectifs partagés de bonne gouvernance, afin d'identifier les faiblesses institutionnelles et de chercher des ressources et des compétences pour combattre ces faiblesses. 83. Afin de renforcer la gouvernance politique et de consolider la capacité à respecter ces engagements, les dirigeants du NOPADA engageront un processus d'initiatives ciblées de renforcement des capacités. Ces réformes institutionnelles se concentreront sur: - Une réforme de la fonction publique et de l'administration; - Le renforcement du contrôle parlementaire; - La promotion de la démocratie directe et participative; - Une lutte efficace contre la corruption et les détournements de fonds; - La réforme du régime judiciaire. 84. Les pays participants joueront un rôle déterminant en appuyant et en mettant sur pied des institutions et des initiatives qui protègent ces engagements. Ils s'efforceront de créer et de renforcer des structures nationales, régionales et continentales qui soutiennent une bonne gouvernance. 85. Le Forum des chefs d'État du NOPADA servira de mécanisme grâce auquel les dirigeants du NOPADA pourront suivre et évaluer les progrès réalisés par les pays africains dans la réalisation des objectifs convenus dans le domaine de la bonne gouvernance et des réformes sociales. Le Forum constituera également une tribune dans laquelle les pays partageront leurs expériences afin de favoriser la bonne gouvernance et les pratiques démocratiques. A2. Initiative pour la gouvernance économique et la gouvernance des entreprises 86. Le renforcement des capacités de l'État est un aspect crucial de la création d'un environnement propice au développement. L'État a un rôle important à jouer dans la promotion d'une croissance et d'un développement durables et dans la mise en œuvre des programmes de réduction de la pauvreté. Toutefois, la réalité est que de nombreux gouvernements ne sont pas en mesure de jouer un tel rôle. En conséquence, un bon nombre de pays ne disposent pas des cadres d'orientation 247 Anllexes: le document du NEPAD et de réglementation nécessaires pour une croissance axée sur le secteur privé, Ils ne disposent pas non plus de la capacité à mettre en oeuvre les programmes, même lorsque les ressources financières requises sont disponibles. 87. C'est pour cette raison qu'il convient d'accorder la priorité au renforcement ciblé des capacités. Les programmes à mettre en œuvre dans tous les domaines doivent être précédés par une évaluation des capacités en place, et suivis par la fourniture d'un appui approprié dans ce domaine. 88. Objectif Promouvoir des programmes concrets, assortis d'un échéancier, visant à améliorer la qualité de la gestion économique et des finances publiques ainsi que la gouvernance des entreprises dans tous les pays participants. 89. Actions - Une équipe spéciale des ministères des Finances et des banques centrales sera chargée d'examiner les pratiques de gouvernance économique et de gouvernance des entreprises dans les différents pays et régions. Au bout de six mois, cette équipe devra soumettre à l'examen du Comité des chefs d'État chargé de la mise en oeuvre des recommandations sur les normes et les codes de bonne pratique appropriés. - Le Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre soumettra ses recommandations aux États africains pour qu'ils les mettent en application. - Le Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre accordera un rang élevé de priorité à la gestion des finances publiques. Les pays mettront en place un programme visant à améliorer la gestion des finances publiques, fixeront des objectifs et conviendront des mécanismes de suivi. - Le Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre mobilisera des ressources pour consolider les capacités afin de permettre à tous les pays de respecter les normes minimales et les codes de bonne pratique convenus mutuellement. Approches sous-régionales et régionales au développement 90. La plupart des pays d'Afrique sont petits en termes de population comme de revenus par habitant. Leurs marchés étant restreints, ils n'offrent pas de perspectives intéressantes de rendement aux investisseurs potentiels, tandis que la diversification de la production et des exportations y est retardée. Les possibilités d'investissements consacrés 248 N01/l'eaU Partenariat pour le Délleloppemem de l'Afrique (NOPADA) aux infrastructures essentielles dont la viabilité dépend d'économies d'échelle y sont donc limitées. 91. Cette conjoncture économique montre que les pays d'Afrique ont besoin de mettre leurs ressources en commun et de favoriser la coopération et l'intégration économique régionales du continent pour améliorer leur compétitivité sur le plan international. Il faut consolider les cinq groupements économiques régionaux du continent: Afrique de l'Ouest, Afrique du Nord, Afrique centrale, Afrique de l'Est et Afrique australe. 92. Le NOPADA met l'accent sur la prestation de services publics régionaux (transports, énergie, eau, informatique et télématique, éradication des maladies, protection de l'environnement et mise en place de capacités régionales de recherche) et sur la promotion du commerce et des investissements intra-africains. Il s'agira avant tout de rationaliser le cadre institutionnel de l'intégration économique en repérant des projets communs qui soient compatibles avec les programmes intégrés de développement nationaux et régionaux et d'harmoniser les politiques et pratiques en matière d'économie et d'investissements. Il faut assurer la coordination des politiques sectorielles nationales et suivre soigneusement les décisions régionales. 93. Le NOPADA donnera la priorité à la consolidation des capacités pour améliorer l'efficacité des structures régionales existantes et rationaliser les organisations régionales existantes. La Banque africaine de développement doit jouer un rôle de pointe dans le financement des études, programmes et projets régionaux. 94. Les secteurs couverts par le plan actuel et considérés comme des domaines prioritaires sont les suivants i) ii) iii) iv) y) vi) vii) Infrastructures Ressources humaines, y compris l'éducation, le développement des compétences et l'inversion de la tendance à la fuite des cerveaux; Santé; Technologies de l'information et de la communication; Agricu!ture ; Énergie; Accès des exportations africaines aux marchés des pays développés. 95. Toutefois, pour chaque secteur, l'objectif est de combler l'écart actuel entre l'Afrique et les pays développés afin d'améliorer la compétitivité du continent et de permettre à l'Afrique de participer aux processus de mondialisation. La situation particulière des États insulaires et sans littoral d'Afrique devra être prise en compte dans ce contexte. 249 Annexes: le document du NEPAD B. Priorités sectorielles BI. Combler l'écart dans le domaine des infrastructures (1) Tous les secteurs des infrastructures 96. Les infrastructures concernées sont les routes, les autoroutes, les aéroports, les ports maritimes, les chemins de fers, les voies navigables et les installations de télécommunications. Toutefois, l'accent sera mis uniquement sur les infrastructures à caractère régional ou continental. 97. Les infrastructures sont des paramètres essentiels de la croissance économique, ce pourquoi il faut trouver des moyens de placer l'Afrique au même niveau que les pays développés en termes d'accumulation de capital, matériel et humain. 98. Si l'Afrique était dotée des mêmes infrastructures de base que les pays développés, elle serait mieux en mesure de se consacrer à la production et à l'amélioration de la productivité pour faire face à la concurrence internationale. Les insuffisances structurelles des infrastructures handicapent sérieusement la croissance économique et la réduction de la pauvreté. Améliorer les infrastructures, y compris le coût et la fiabilité des services, serait dans l'intérêt de l'Afrique comme de la communauté internationale, qui pourrait obtenir des biens et services africains à meilleur marché. 99. Dans de nombreux pays d'Afrique, les colonisateurs n'ont construit d'infrastructures que pour pouvoir exporter les matières premières africaines et importer en Afrique les produits de leurs industries. 100. Il convient cependant de reconnaître que pour améliorer les infrastructures africaines, il faudra absolument des financements privés étrangers pour compléter les deux principales méthodes de financement que sont le crédit et l'aide. 101. L'initiative dans le domaine des infrastructures comprend des éléments communs à tous les secteurs ainsi que des éléments spécifiques à chacun d'entre eux. 102. Objectifs - Améliorer l'accès aux infrastructures et les rendre plus abordables et fiables à la fois pour les entreprises et pour les ménages; - Améliorer la coopération et le commerce au niveau régional grâce à de meilleures connexions transfrontalières des infrastructures; - Accroître les investissements consacrés aux infrastructures en réduisant les risques auxquels les investissements privés doivent 250 NO/Il'eau Parlenarial pOlir le Dél'eloppemenl de l'AFique (NOPADA) faire face, en particulier en matière de politiques et de réglementations; - Édifier les bases de compétences adéquates en technologies et en ingénierie pour installer, exploiter et entretenir en Afrique des réseaux d'infrastructures" en dur ". 103. Actions - Avec l'assistance des institutions spécialisées dans chaque secteur, mettre en place des cadres politiques et législatifs pour encourager la concurrence. Dans le même temps, créer de nouveaux cadres de réglementation et consolider la capacité de formation de personnes responsables de la réglementation afin de promouvoir l'harmonisation des politiques et des réglementations pour faciliter les connexions transfrontalières et l'élargissement du marché; - Accroître les investissements consacrés aux infrastructures, en particulier pour leur rénovation, et améliorer les pratiques d'entretien qui assureront la viabilité des réseaux d'infrastructures; - Commencer à développer des institutions de formation et des réseaux pour encourager la formation de techniciens et d'ingénieurs de haut niveau dans les secteurs des infrastructures; - Promouvoir la participation des communautés et des utilisateurs à la construction, l'entretien et la gestion des infrastructures, en particulier dans les régions urbaines et rurales pauvres, en collaboration avec les Initiatives de gouvernance du NOPADA ; - Collaborer avec la Banque africaine de développement et d'autres institutions africaines de financement du développement pour mobiliser un financement durable, en particulier au moyen de processus multilatéraux et des institutions et gouvernements donateurs, afin d'obtenir des dons et des fonds consentis à des conditions de faveur, pour atténuer les risques à moyen terme; - Promouvoir des partenariats entre les secteurs public et privé qui serviront de véhicule pour attirer les investisseurs privés et concentrer le financement public sur les besoins urgents des pauvres, en consolidant les capacités de mise en oeuvre et de contrôle des accords de ce type. - Outre ces aspects communs, les stratégies suivantes sont spécifiques à chaque secteur pour les différents types d'infrastructures: (ü) Combler l'écart numérique: investir dans les technologies de l'information et de la communication 104. Les technologies de l'information et de la communication (TIO, fondées sur l'interaction entre les ordinateurs, les télécommunications et les médias classiques, revêtent une importance cruciale pour l'économie de demain, fondée sur les connaissances. Les progrès 251 Annexes: le document du NEPAD rapides réalisés dans le domaine technologique et la baisse du coût du matériel TIC offrent de nouvelles perspectives aux pays africains pour ce qui est de l'accélération de leur croissance et de leur développement économiques. La mise en place d'un Marché commun et d'un Union africaine peut être facilitée, dans une très grande mesure, par la révolution des technologies de l'information. En plus de promouvoir le commerce intra-régional, l'utilisation des TIC peut accélérer l'intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale. 105. L'utilisation généralisée des TIC sur le continent peut présenter des avantages comparatifs sans précédent, comme suit: - Elle peut imprimer un nouvel élan au processus de démocratisation et à la bonne gouvernance ; - Elle peut faciliter l'intégration de l'Afrique dans la nouvelle société de l'information, sur la base de sa diversité culturelle; - Elle peut donner lieu à diverses applications dans des domaines tels que la télédétection, la planification de l'agriculture et des infrastructures; - Elle facilite la complémentarité entre les outils existants de promotion de la formation d'une masse critique de professionnels à l'utilisation des TIC; - Elle facilite, dans le domaine de la recherche, la mise en place de programmes africains et de programmes d'échange dans le domaine technologique, avec un accent particulier sur la lutte contre l'analphabétisme ; - Elle permet d'identifier et d'exploiter les opportunités en matière de commerce, d'investissement et de finance ; - Elle permet de mettre en place des programmes régionaux d'apprentissage à distance et d'éducation à la santé pour améliorer la situation dans les secteurs de la santé et de l'éducation; - Dans la gestion des conflits et la lutte contre les pandémies, elle facilite la mise en place d'un système efficace d'alerte précoce en fournissant les outils nécessaires à la surveillance constante des foyers de tension ou d'épidémie. 106. Les infrastructures des technologies de l'information et de la communication en Afrique sont insuffisantes, de même que les cadres politiques et réglementaires et les ressources humaines requises dans ce domaine. De ce fait, l'accès à des services abordables en fait de téléphone, de radio-télédiffusion, d'ordinateurs et de l'Internet est inadéquat. La densité de lignes téléphoniques y reste inférieure à une ligne pour 100 personnes. Les coûts des services sont élevés puisqu'une connexion coûte en moyenne en Afrique 20 % du PŒ par habitant par rapport à une moyenne mondiale de 9 % et à 1 % dans les pays à revenus élevés. L'Afrique n'a pas encore pu tirer parti de l'outil que 252 NOl/l'eau Pm1el1aria( pour le Dél'l!loppe1nel1f de l'AJi1que (NOPADA) constitue informatique et télématique pour améliorer les conditions de vie des populations et créer de nouvelles possibilités d'affaires. Les liaisons entre les pays du continent et avec les marchés mondiaux en souffrent. Quoique de nombreux pays d'Afrique aient engagé des réformes politiques dans ce domaine, ni la pénétration des services, ni leur qualité, ni leurs tarifs ne se sont encore améliorés. 107. Objectifs - Doubler la densité des lignes téléphoniques pour parvenir à deux lignes pour 100 personnes d'ici l'an 2005, avec un niveau d'accès adéquat pour les ménages; - Diminuer le coût et améliorer la fiabilité des services; - Préparer tous les pays d'Afrique à utiliser les communications électroniques; - Constituer une pépinière de jeunes et d'étudiants compétents dans le domaine de l'informatique et de la télématique pour en tirer des ingénieurs stagiaires en informatique et télématique, des programmeurs et des créateurs de logiciels; - Mettre au point des logiciels à contenu local fondés en particulier sur l'héritage culturel de l'Afrique. lOS. Actions - Collaborer avec les institutions régionales comme l'Union panafricaine des télécommunications (UPAT) et Africa Connection pour concevoir une politique et une législation modèle pour la réforme des télécommunications, ainsi que des protocoles et des références permettant d'évaluer la préparation à l'utilisation des communications électroniques; - Collaborer avec les institutions régionales pour consolider les capacités de réglementation; - Mettre sur pied un réseau d'institutions de formation et de recherche pour consolider la base de compétences de haut niveau ; - Promouvoir et accélérer les projets existants visant à connecter les écoles et les clubs de jeunes; - Collaborer avec les institutions de financement du développement en Afrique, les initiatives multilatérales (GS DotForce, Équipe spéciale des Nations-Unies) et les bailleurs de fonds bilatéraux pour mettre sur pied des mécanismes financiers visant à atténuer et à réduire les risques dans ce secteur. (ill) Énergie 109. Objectifs L'énergie joue un rôle crucial dans le processus de développement, d'abord en tant que nécessité domestique, mais aussi en tant que facteur de production dont le coût affecte directement le prix des autres 253 Annexes: le dacU/lw/ll du NEPAD biens et services, ainsi que la compétitivité des entreprises. Compte tenu de la répartition inégale des ressources énergétiques sur le continent, il est recommandé que la recherche de sources suffisantes et abordables d'énergie soit axée sur la rationalisation de la distribution territoriale des ressources énergétiques existantes, mais mal réparties. En outre, l'Afrique doit tout mettre en oeuvre pour développer ses abondantes ressources d'énergie solaire. - Accroître l'accès à un approvisionnement commercial en énergie, fiable et abordable, de 10 à 35 % ou plus de la population d'Afrique en 20 ans; - Améliorer la fiabilité et réduire le coût de l'approvisionnement en énergie pour les activités de production afin de permettre une croissance économique de 6 % par an ; - Renverser la tendance de dégradation de l'environnement associée à l'utilisation des combustibles traditionnels dans les régions rurales; - Exploiter le potentiel hydro-électrique des bassins fluviaux d'Afrique; - Intégrer les réseaux de transport d'énergie électrique et les gazoducs pour faciliter les flux transfrontaliers d'énergie; - Réformer et harmoniser les réglementations et la législation de continent sur le pétrole. 110. Actions - Établir un Forum africain pour la réglementation des entreprises d'utilité publique et des associations régionales de réglementation; - Mettre sur pied une équipe spéciale qui aura pour tâche de recommander des priorités et des stratégies de mise en œuvre pour les projets régionaux, y compris la génération d'énergie hydroélectrique, les réseaux de transport d'énergie électrique et les gazoducs; - Mettre sur pied une équipe spéciale pour accélérer le développement de l'approvisionnement en énergie pour les logements des groupes sociaux à faibles revenus; - Élargir la portée du programme de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADO) pour la conservation de l'énergie de la biomasse au reste du continent. (Iv) Transports 111. Objectifs - Réduire les délais de la circulation transfrontalière des personnes, des biens et des services; - Réduire l'attente et les temps morts dans les ports; - Promouvoir l'activité économique et le commerce transfrontalier des marchandises sur la base de meilleurs liens de transport terrestre; 254 Noul'eau Partenariat pOlir le Dêl'e!oppemellf de l'A}i"ique (NOPADA) - Accroître les liaisons de transport aérien des passagers et du fret entre les sous-régions d'Afrique. 112. Actions - Mettre sur pied des équipes spéciales dans le domaine des douanes et de l'immigration afin d'harmoniser les passages de frontières et les procédures de délivrance des visas; - Mettre en place et favoriser des partenariats entre les secteurs public et privé pour l'octroi de concessions pour la construction, l'aménagement et l'entretien des ports, des réseaux routiers, des réseaux ferroviaires et de transport maritime j - Promouvoir l'harmonisation des normes et des réglementations selon les modes de transport et l'utilisation accrue de services de transport multimodal j - Collaborer avec les organisations régionales pour mettre en place des couloirs de développement du transport ; - Promouvoir des partenariats entre les secteurs public et privé pour la rationalisation de l'industrie du transport aérien et le renforcement des capacités dans le domaine du contrôle du trafic aérien. (v) Eau et assainissement 113. Objectifs - Assurer un accès durable à un approvisionnement en eau pure et potable et à un assainissement adéquats, particulièrement pour les pauvres j - Planifier et gérer les ressources en eau pour en faire la base de la coopération et du développement aux niveaux national et régional; - Examiner systématiquement et préserver les écosystèmes, la diversité biologique et la faune; - Assurer la coopération sur les fleuves que se partagent plusieurs États membres; - Aborder la menace du changement climatique de façon efficace j - Accroître l'agriculture irriguée et pluviale pour améliorer la production et la sécurité alimentaire. 114. Actions - Accélérer les travaux des projets sur les ressources en eau à objectifs multiples, comme par exemple l'étude du Secrétariat de la SADC de l'exploitation du fleuve Congo et l'initiative du Bassin du Nil ; - Mettre sur pied une équipe spéciale pour planifier les effets néfastes de l'impact du changement climatique sur l'Afrique j - S'associer à l'initiative mondiale pour l'assainissement de l'environnement afin de promouvoir des méthodes et des projets sanitaires d'élimination des déchets; 255 Annexes: le document du NEPAD - Appuyer le Programme Habitat des Nations-Unies sur la conservation des ressources en eau dans les villes africaines. D2. Initiative pour la flÙse en valeur des ressources humaines, y compris l'inversion de la tendance à la fuite des cerveaux (1) Réduction de la pauvreté 115. Objectifs - Fournir un leadership déterminé en accordant la priorité à la réduction de la pauvreté dans toutes les composantes du NOPADA et dans les politiques macroéconomiques et sectorielles des gouvernements nationaux; - Mettre particulièrement l'accent sur la réduction de la pauvreté chez les femmes ; - Assurer une responsabilisation des pauvres dans les stratégies de réduction de la pauvreté; - Appuyer les initiatives visant à combattre la pauvreté au niveau multilatéral, comme le Cadre global pour le développement de la Banque mondiale et le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté liée à l'Initiative d'allégement de la dette pour les pays pauvres très endettés (PPTE). 116. Actions - Exiger que les programmes nationaux préparés pour les initiatives dans le cadre du présent programme d'action évaluent la situation avant et après leur mise en œuvre, et mesurent leur impact sur la réduction de la pauvreté; - Travailler avec la Banque mondiale, le FMI, la BAD et les institutions des Nations-Unies pour accélérer la mise en œuvre et l'adoption du Cadre global de développement, de la Stratégie pour la réduction de la pauvreté et des initiatives apparentées; - Mettre sur pied une équipe spéciale sur la question de l'égalité des sexes pour assurer que les stratégies de réduction de la pauvreté du NOPADA abordent les problèmes spécifiques aux femmes pauvres; - Mettre sur pied une équipe spéciale afin d'accélérer l'adoption de processus décentralisés de participation pour la construction des infrastructures et la prestation des services sociaux. (li) Combler l'écart dans le domaine de l'éducation 117. Objectifs - Collaborer avec les bailleurs de fonds et les institutions multilatérales pour assurer que l'objectif international du développement, visant à parvenir à une éducation primaire universelle d'ici l'an 2015, soit réalisé; 256 Noltl'etllt Ptll1elltlritlf pour le Dél'eloppemellf de l'Afrique (NOPADA) - S'efforcer d'améliorer l'élaboration et la réforme des programmes, la qualité de l'enseignement et l'accès à l'informatique et à la télématique; - Élargir l'accès à l'enseignement secondaire et améliorer la pertinence de celui-ci par rapport au monde du travail ; - Favoriser la mise en place de réseaux d'établissements spécialisés de recherche et d'enseignement supérieur. 118. Actions - Examiner les initiatives actuelles conjointement avec l'organisation des Nations-Unies pour l'éducation, la science et la culture (UNESCO) et les autres principaux bailleurs de fonds; - Examiner les niveaux des dépenses effectuées dans le domaine de l'éducation par les pays d'Afrique et prendre l'initiative d'un processus de mise au point de normes relatives aux dépenses gouvernementales dans le domaine de l'éducation; - Mettre sur pied une équipe spéciale pour accélérer l'introduction de l'informatique et de la télématique dans les écoles primaires; - Mettre sur pied une équipe spéciale pour examiner les capacités de recherche dont le continent a besoin dans chaque région et présenter des propositions à ce sujet. 119. Les principaux problèmes qui se posent à l'éducation en Afrique proviennent de l'insuffisance des installations et des systèmes de formation de la vaste majorité des Africains. Ceux d'entre eux qui ont eu la possibilité de fréquenter des établissements d'enseignements ailleurs ont démontré qu'ils étaient capables de réussir. 120. Le plan soutient la consolidation immédiate des établissements d'enseignement supérieur dans toute l'Afrique, en créant, suivant les besoins des universités spécialisées, des programmes de coopération avec des enseignants africains. Il faut aussi insister sur la nécessité de mettre en place des instituts technologiques. (li) inversion de la tendance à la fuite des cenreaux 121. Objectifs: - Inverser la tendance à la fuite des cerveaux pour en faire une tendance au "gain des cerveaux· en Afrique; - Renforcer et retenir sur le continent les capacités humaines nécessaires au développement de l'Afrique; - Élaborer des stratégies pour l'utilisation du savoir-faire et des compétences des Africains de la diaspora dans le domaine scientifique et technologique en vue du développement de l'Afrique. 257 Annexes: le docl/ment du NEPAD 122. Actions - Créer en Afrique un environnement politique, social et économique propice à la réduction de la fuite des cerveaux et au flux des investissements dont le continent a tant besoin; - Mettre en place une base de données fiable sur la fuite des cerveaux pour déterminer l'ampleur du problème et promouvoir la coordination et la collaboration entre les experts des pays d'origine et ceux de la diaspora; - Établir des réseaux scientifiques et techniques pour favoriser le rapatriement des connaissances scientifiques dans les pays d'origine et promouvoir la coopération entre les experts des pays d'origine et ceux de la diaspora; - Veiller à ce que l'expertise des africains installés dans les pays développés soit utilisée dans le cadre de l'exécution de certains des projets prévus dans le NüPADA. (iv) Santé 123. Objectifs - Renforcer les programmes de lutte contre les maladies transmissibles afin qu'ils soient à la hauteur de la tâche d'alléger le fardeau des maladies; - Disposer d'un système de soins de santé solide qui réponde aux besoins et qui appuie efficacement la lutte contre les maladies; - Assurer l'appui nécessaire au développement durable d'un système de soins de santé efficace ; - Habiliter les peuples d'Afrique à agir pour améliorer leur propre santé et assurer l'éducation sanitaire en Afrique; - Réussir à avoir un impact sur le fardeau de maladies qui pèse sur les personnes les plus pauvres en Afrique. 124. Actions - Renforcer la participation de l'Afrique aux processus visant l'obtention de médicaments à des prix abordables, notamment ceux auxquels sont engagées les compagnies pharmaceutiques internationales et la société civile internationale et examiner les possibilités d'utiliser d'autres systèmes d'approvisionnement pour les médicaments et les fournitures essentiels; - Mobiliser les ressources requises pour intervenir de façon efficace contre les maladies et mettre en place de solides systèmes sanitaires; - Mener campagne en faveur d'un appui financier international accru pour lutter contre le VlH/SIDA et les autres maladies transmissibles; 258 NOlll'ean Partenariat pour le Dél'eloppement de l'Afrique (NOPADA) - Collaborer avec d'autres organisations internationales comme l'OMS et les bailleurs de fonds afin de s'assurer que l'appui au continent est accru pour atteindre au moins 10 milliards de dollars EU par an; - Encourager les pays africains à accorder la priorité aux soins de santé dans leurs propres budgets et à accroître progressivement ces budgets pour parvenir à un niveau déterminé d'un commun accord; - Mobiliser conjointement des ressources pour consolider les capacités afin de permettre à tous les pays d'Afrique d'améliorer les infrastructures et la gestion des soins de santé. 125. L'Afrique est le domaine privilégié de graves maladies endémiques. Bactéries et parasites, portés par des insectes, des personnes en déplacement et autres vecteurs, y prospèrent, notamment grâce à la faiblesse des politiques écologiques et aux mauvaises conditions de vie des populations. Un des principaux obstacles aux efforts de développement en Afrique est la lourde incidence des maladies transmissibles, en particulier le VIH/SIDA, la tuberculose et le paludisme. A moins que l'on ne mette un frein à ces épidémies pour ultérieurement les éradiquer, il restera impossible de véritablement mettre en valeur les ressources humaines du continent. 126. Dans le domaine de la santé, l'Afrique soutient fort mal la comparaison avec le reste de la communauté internationale. En 1997, les taux de mortalité des enfants et des adolescents y étaient respectivement de 105 et 169 pour mille par rapport à 6 et 7 pour mille dans les pays développés. L'espérance de vie y est de 48,9 ans par rapport à 77,7 dans les pays développés, Il n'y a que 16 médecins pour 100000 habitants par rapport à 253 dans les pays industrialisés. La pauvreté, que reflète le très faible niveau de revenus par habitant, est un des principaux facteurs empêchant les populations de surmonter leurs problèmes de santé. 127. La nutrition affecte aussi la situation sanitaire. La consommation quotidienne moyenne de calorie va de 2 384 dans les pays à faibles revenus à 2 846 dans les pays à revenus moyens et 3 390 dans les pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). 128. La santé, que l'OMS définit comme étant un état complet de bien-être physique et mental, contribue à l'augmentation de la productivité et par conséquent à la croissance économique. Les effets les plus évidents de l'amélioration de la santé de la force de travail sont la diminution des journées de travail perdues pour cause de maladie, le relèvement de la productivité et la possibilité d'avoir des emplois mieux 259 Annexes . le document du NEPAD payés. En fin du compte, améliorer la santé et la nutrition contribue directement à relever le bien-être des populations, à arrêter la propagation des maladies, à diminuer les taux de mortalité infantile, à prolonger l'espérance de vie et à améliorer les capacités d'étude des jeunes scolarisés. On peut donc nettement établir le lien entre l'amélioration de la situation sanitaire et la lutte contre la pauvreté. B3. Agriculture 129. La majeure partie des populations d'Afrique vit dans les régions rurales. Néanmoins, les systèmes agraires sont généralement faibles et improductifs. Comme ils sont associés à des handicaps extérieurs tels que l'incertitude climatique, les déformations de la politique économique et les changements des prix mondiaux, ces systèmes ont entravé l'approvisionnement agricole et l'accroissement des revenus dans les régions rurales, ce qui a conduit à la pauvreté. 130. La nécessité pressante de parvenir à la sécurité alimentaire dans les pays d'Afrique impose que la question des systèmes agricoles inadéquats soit abordée pour que la production alimentaire puisse être accrue et les niveaux nutritionnels améliorés. 131. L'amélioration de la performance agricole est une condition préalable au développement économique du continent. L'accroissement du pouvoir d'achat des populations rurales qui en résultera conduira également à une augmentation réelle de la demande de produits industriels africains. La dynamique induite constituerait une source significative de croissance économique. 132. L'accroissement de la productivité agricole repose sur l'élimination d'un certain nombre de contraintes structurelles qui affectent le secteur. Une contrainte clé est l'incertitude climatique, qui augmente le facteur de risque auquel une agriculture intensive, fondée sur l'afflux significatif d'investissements privés, doit faire face. En conséquence, les gouvernements doivent appuyer la mise en place d'infrastructures d'irrigation et mettre en valeur des terres irrigables lorsque les entreprises privées y rechignent. L'amélioration de l'infrastructure rurale (routes, électrification des zones rurales, etc.) est également essentielle. 133. L'environnement institutionnel de l'agriculture a aussi un effet significatif sur la productivité et la performance de ce secteur dans le domaine de l'approvisionnement. Un appui institutionnel sous la forme de centres et d'instituts de recherche, la fourniture de services de vulgarisation et d'appui ainsi que des foires commerciales agricoles stimuleront la production d'excédents commercialisables. Le cadre des réglementations relatives à l'agriculture doit également être pris en 260 NOU1'eau Partenariat pour le Déwloppemel1f de l'Afrique (NOPADA) considération, avec notamment l'encouragement des dirigeants des communautés locales dans les régions rurales et la participation de ces communautés à la formulation des politiques et à la prestation des services. 134. Depuis quelques temps, les bailleurs de fonds bilatéraux et les institutions multilatérales n'accordent que peu d'attention au secteur agricole et aux régions rurales, dans lesquelles vivent 70 % des pauvres d'Afrique. Par exemple, dans le portefeuille de la Banque mondiale, les crédits destinés à l'agriculture s'élevaient à 39 % en 1978 mais étaient tombés à un niveau de 12 % en 1996 et à un niveau de 7 % en l'an 2000. La communauté des bailleurs de fonds dans son ensemble doit renverser cette tendance négative. B4. Initiative pour l'environnement 135. L'on sait qu'un environnement sain et productif est une condition préalable indispensable à la réussite du NOPADA. L'on sait aussi que tous les aspects indispensables à l'entretien de cette base écologique sont nombreux et complexes et qu'il faudra une combinaison systématique d'initiatives pour mettre au point un programme cohérent de protection de l'environnement. Il faudra faire des choix et établir l'ordre de priorités des premières interventions. 136. L'on sait de plus que l'objectif qui doit être au cœur de l'initiative en matière d'environnement doit être de lutter contre la pauvreté et de contribuer au développement socio-économique de l'Afrique. L'expérience a montré que nombre de mesures prises pour protéger l'environnement peuvent beaucoup contribuer à créer des emplois, à responsabiliser les populations et à leur offrir cohésion sociale et dignité tout en combattant la pauvreté. 137. Il convient de mentionner aussi que l'Afrique va accueillir le Sommet mondial sur le développement durable en septembre 2002. La gestion de l'environnement est à la base de toute une gamme de sujets que le sommet examinera et nous pensons que cela relève particulièrement le statut des délibérations en matière d'environnement dans le cadre du NOPADA. 138. L'on visera dans ce cadre huit interventions prioritaires: - Lutter contre la désertification. L'on envisage des interventions modèles de remise en état des terres dégradées visant les facteurs qui en ont provoqué la dégradation. Nombre de ces activités seront à forte intensité de travail, à savoir des programmes de travaux publics qui contribueront à répondre aux besoins de développement social du continent. 261 Allnexes; le docl/ment du NEPAD - Protection des zones humides. Multiplier des interventions modèles africaines de protection des zones humides dont les bénéfices socio-écologiques offrent un excellent rendement. - Espèces exotiques envahissantes. Il faudra établir des partenariats pour empêcher l'implantation d'espèces exotiques envahissantes ou lutter contre elles. Ces partenariats seront indispensables tant pour assurer l'intégrité des écosystèmes naturels que pour protéger l'économie. D'importantes initiatives à forte intensité de travail pourront être envisagées. - Gestion des côtes. Pour protéger les ressources côtières et en assurer la meilleure exploitation possible, l'on suggère encore une fois des interventions modèles qui pourront être suivies d'un programme plus vaste. - Réchauffement planétaire. L'accent sera mis tout d'abord sur le suivi et la réglementation de l'impact des changements climatiques en même temps que des contributions qui y sont apportées. Des mesures à forte intensité de travail sont indispensables pour une lutte intégrée contre les incendies. - Zones transfrontières de protection de l'environnement. Il s'agirait de tirer parti des initiatives naissantes de partenariats entre les pays pour protéger l'environnement, favoriser le tourisme et par conséquent créer des emplois et les protéger. - Gouvernance écologique. 11 s'agit de répondre aux besoins en termes d'institutions, de législations, de planification, de formation et de renforcement des capacités indispensables à la réalisation de toutes les actions susmentionnées. - Financement. Il faudra assurer au travail de financement un cadre soigneusement structuré et équitable. 139. L'initiative pour l'environnement offre le net avantage de regrouper de nombreuses initiatives qui peuvent être engagées dans des délais relativement courts et dont le rendement par rapport aux investissements est exceptionnel en termes de création d'une base socio-écologique permettant au NOPADA de prospérer. B5. Culture 140. La culture fait partie intégrante des efforts de développement du continent. C'est pourquoi il est indispensable de protéger et d'utiliser correctement le savoir autochtone qui représente une dimension importante de la culture du continent et d'en faire bénéficier toute l'humanité. Le NOPADA consacrera une attention toute particulière à la protection et au développement du savoir traditionnel. C'est-à-dire aux oeuvres littéraires et artistiques nourries de tradition comme aux travaux scientifiques, performances, inventions, découvertes, conceptions, marques, appellations et symboles, informations encore non divulguées 262 NOill'ell1l Partenariat pour le Dél'eloppemew de l'Afrique (NOPADA) et toutes autres innovations et créations fondées sur la tradition et des activités intellectuelles dans les domaines industriel, scientifique, littéraire ou artistique. Ce concept englobe aussi le patrimoine génétique et les connaissances médicales traditionnelles qui y sont associées. 141. Les dirigeants du NOPADA prendront d'urgence des mesures pour faire en sorte que le savoir autochtone de l'Afrique soit protégé par des législations appropriées. Ils favoriseront aussi sa protection au niveau international en travaillant pour ce faire en étroite collaboration avec l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). DG. Tribunes sur la science et la technologie 142. Objectifs - Promouvoir une coopération et une amélioration des connexions transfrontalières en utilisant les connaissances dont disposent les centres d'excellence existants pour tout le continent; - Développer et adapter la capacité de collecte et d'analyse de l'information pour appuyer les activités de production et les exportations de l'Afrique; - Générer une masse critique de compétences technologiques dans des domaines ciblés qui présentent un potentiel de croissance élevé, en particulier la biotechnologie et les sciences de la Terre; - Assimiler et adapter les technologies existantes pour diversifier la production des industries manufacturières. 143. Actions - Établir une coopération régionale pour la mise au point et la diffusion de normes pour les produits, ainsi que pour les systèmes d'information géographique (SIG) ; - Mettre au point des réseaux entre les centres d'excellence existants, en particulier au moyen de l'internet, d'échanges de personnel et de programmes de formation transfrontaliers et fournir une assistance aux scientifiques et aux chercheurs réfugiés - Collaborer avec L'UNESCO et l'Organisation des Nations-Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) ainsi que d'autres organisations internationales pour exploiter la biotechnologie afin de développer le potentiel commercial de la riche diversité biologique et de la base de connaissances autochtones de l'Afrique, en améliorant la productivité agricole et en développant la production pharmaceutique; - Développer la recherche dans le domaine des sciences de la terre pour accroître l'exploitation des richesses en minerais de l'Afrique; - Mettre en place et développer une base de compétences dans le domaine des techniques de fabrication des produits et du contrôle de la qualité pour appuyer la diversification des industries de transformation. 263 Annexes: le document du NEPAD C. Mobilisation des ressources Cl. Initiative en faveur des flux de capitaux 144. Pour réaliser la croissance annuelle d'environ 7 % par an envisagée dans les objectifs internationaux de développement et surtout pour diminuer de moitié l'incidence de la pauvreté en Afrique d'ici l'an 2015, le continent a besoin de combler un déficit annuel de 12 % de son PŒ, soit 64 milliards de dollars EU. Il faudra pour ce faire augmenter l'épargne domestique et améliorer la perception des recettes fiscales. Cependant, la majeure partie de ces ressources devra être obtenue de l'extérieur du continent. Selon le NOPADA, ce sont avant tout la réduction de la dette et l'APD qui apporteront les ressources extérieures requises à court et moyen terme, tandis que les apports de capitaux privés doivent être envisagés plutôt à long terme. Un principe fondamental en matière de flux de capitaux est que l'augmentation des apports de capitaux est inséparable de l'amélioration de la gouvernance. C'est pourquoi la participation aux initiatives en matière de gouvernance économique et politique est une condition préalable indispensable à la participation à l'initiative relative aux flux de capitaux. (i) Augmenter la mobilisation des ressources internes 145. Pour relever la croissance et réduire plus efficacement la pauvreté, l'Afrique a besoin de mobiliser des ressources supplémentaires. Dans les pays, les ressources proviennent de l'épargne domestique des entreprises et des ménages qui devaient être nettement augmentée. Il faudrait aussi augmenter les revenus fiscaux pour augmenter les recettes publiques tout en rationalisant les dépenses des pouvoirs publics. Les pays d'Afrique perdent une importante partie de l'épargne locale du fait de la fuite des capitaux. C'est une tendance qui ne pourra être renversée que si les ressortissants pensent qu'ils ont intérêt à conserver leurs richesses en Afrique. C'est pourquoi il faut aussi d'urgence créer des conditions favorables aux investissements du secteur privé, local et étranger. (U) Initiative au sujet de la dette 146. Le NOPADA vise à obtenir un allégement de la dette qui aille au-delà des niveaux actuels (fondés sur le concept de • viabilité .. de la dette) l ~squels imposent encore des paiements au titre du service de la dette qui contribuent pour beaucoup au déficit. A long terme, l'objectif du NOPADA est de lier l'allégement de la dette aux résultats mesurés des activités de réduction de la pauvreté. En attendant, les plafonds du service de la dette devraient être fixés au prorata des recettes budgétaires, avec des plafonds différents pour les pays de l'Association 264 NOl/l'eaU Partenariat pOl/r le Dél'eloppemellf de l'A.Ji"ique (NOPADA) internationale de développement (IDA) et les autres. Pour obtenir le maximum d'engagements à des conditions de faveur - allégement de la dette plus APD - dont l'Afrique a besoin, les dirigeants du NOPADA négocieront avec les gouvernements créanciers. Les pays devraient s'adresser aux mécanismes existants d'allégement de la dette - PPTE et Club de Paris - avant d'essayer d'obtenir de l'aide par le biais du NOPADA. L'Initiative au sujet de la dette exigera des pays d'adopter des stratégies convenues de réduction de la pauvreté, des stratégies au sujet de la dette, ainsi que leur participation à l'initiative en matière de saine gestion économique, afin que ces pays soient en mesure d'absorber ces ressources supplémentaires. En plus d'essayer d'alléger plus encore b dette au moyen de la stratégie transitoire susdite, les dirigeants du NOPADA mettront en place un forum qui permette aux pays d'Afrique d'avoir des échanges d'expériences et de se mobiliser pour améliorer les stratégies d'allégement de la dette. 147. Actions - Les chefs d'État du NOPADA vont essayer de négocier avec la communauté internationale un accord pour obtenir un allégement plus important de la dette en faveur des pays participant au NOPADA, sur la base des principes illustrés plus hauts; - Les dirigeants du NOPADA vont mettre en place un forum où les pays d'Afrique pourront procéder à des échanges d'expérience et se mobiliser pour améliorer les stratégies d'allégement de la dette. Ils y auront des échanges de vue sur la révision et l'amélioration du processus de PPTE. (iii) Initiative pour transformer l'APD 148. Le NOPADA vise à obtenir une augmentation des apports d'APD à moyen terme et d'en transformer le système d'acheminement afin que ces ressources puissent être utilisées de manière plus efficace par les pays d'Afrique qui en bénéficient. Le NOPADA créera un Forum sur l'APD où les pays d'Afrique pourront mettre au point une prise de position commune sur la transformation de l'APD, avoir des pourparlers avec le Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE et d'autres bailleurs de fonds pour rédiger une charte qui serve de base au partenariat pour le développement. Aux termes de cette charte, la participation à l'initiative en faveur d'une saine gestion économique sera une condition préalable mur améliorer la capacité des pays d'Afrique à tirer parti de l'augmentation des apports d'APD ; la charte proposera un mécanisme complémentaire indépendant d'évaluation, chargé d'assurer le suivi de la performance des bailleurs de fonds. Le NOPADA appuiera la mise en place d'un Groupe d'étude sur le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté (DRSP) qui travaillera de concert avec la Banque mondiale et le FMI au sujet de ce processus. 265 Annexes: le document du NEPAD 149. Actions - Créer, en contrepartie au CAO de l'OCDE, un Forum de l'APD qui permette aux pays d'Afrique de mettre au point une prise de position commune sur la transformation de l'APD ; - Par le biais du Forum sur l'APD, négocier avec les institutions donatrices l'institution d'une charte du partenariat pour le développement dans laquelle seraient inscrits tous les principes décrits plus haut; - Appuyer les efforts de la CEA pour la mise en place d'un groupe d'étude sur le DRSP ; - Mettre en place un mécanisme indépendant chargé d'évaluer les performances des bâilleurs de fonds et des pays bénéficiaires. (iv) Initiative pour les apports de capitaux privés 150. Le NOPADA vise à augmenter les apports de capitaux privés venant de l'extérieur de l'Afrique, pour en faire un moyen durable essentiel à long terme afin de combler les déficits. 151. La première des priorités sera de s'attaquer à la perception de l'Afrique par les investisseurs comme étant un continent à " haut risque .. du fait de l'insécurité des droits de propriété et des insuffisances des réglementations et des marchés. Plusieurs éléments du NOPADA vont contribuer à diminuer ces risques progressivement, notamment les initiatives relatives au maintien de la paix et de la sécurité, à la bonne gouvernance politique et économique, à l'amélioration des infrastructures et à la réduction de la pauvreté. Parmi les mécanismes transitoires destinés à minimiser les risques devraient figurer des plans de garantie des crédits et la consolidation des cadres réglementaires et législatifs relatifs aux investissements. - La priorité suivante sera de mettre en œuvre un programme de renforcement des capacités en partenariat public/privé par le truchement de la Banque africaine de développement et des banques régionales de développement, afin d'aider les pouvoirs publics, aux niveaux local et national, à structurer et réglementer les transactions concernant les infrastructures et les services sociaux. - La troisième priorité sera de promouvoir l'amélioration des marchés financiers domestiques, leur harmonisation et leur intégration pardelà les frontières, grâce à une Equipe de travail chargée de l'intégration des marchés financiers qui commencera par mettre l'accent sur la législation et la réglementation des régimes financiers. 152. Actions - Mettre en place une équipe de travail chargée de l'audit des législations et réglementations portant sur les investissements afin d'en réduire les risques et d'en assurer l'harmonisation en Afrique; 266 NOl/l'eau Partenariat pOl/r le Dél'eloppemel/f de l'Ajhqlle (NOPADA) - Effectuer une étude d'évaluation des besoins et de faisabilité à propos des instruments financiers en vue de minimiser les risques associés à la conduite des affaires en Afrique; - Engager une initiative pour améliorer les capacités des pays de mettre en place des partenariats entre secteur privé et pouvoirs publics; - Créer une Équipe de travail sur l'intégration des marchés financiers qui permettra d'accélérer ladite intégration en mettant en place des cadres législatifs et réglementaires compétitifs sur le plan international et en créant une plate-forme unique pour les affaires en Afrique; - Il va néanmoins être aussi important, en particulier à court et moyen termes, d'obtenir des ressources supplémentaires en APO et la réduction de la dette. Plus d'APO serait nécessaire pour permettre aux pays les moins avancés d'atteindre les objectifs internationaux de développement, en particulier en matière d'enseignement primaire, de santé et d'éradication de la pauvreté. Réduire plus encore la dette est aussi crucial. L'Initiative améliorée pour alléger l'endettement des pays pauvres très endettés (PPTE) impose encore à de nombreux pays en bénéficiant un très lourd fardeau d'endettement, compte tenu de la nécessité de consacrer plus de ressources à la réduction de la pauvreté. De plus, certains pays qui ne bénéficient pas de cette Initiative auraient besoin que leur dette soit réduite pour pouvoir consacrer des ressources à la lutte contre la pauvreté. C2. Initiative pour l'accès aux marchés Diversification de la production 153. Les économies africaines sont vulnérables parce qu'elles dépendent de produits primaires et de secteurs fondés sur les ressources et que leurs exportations sont peu nombreuses. Il faudrait d'urgence diversifier la production et cela devrait logiquement se faire pour commencer à partir de la base de la production africaine actuelle, à savoir les ressources naturelles du continent. Il faut augmenter la valeur ajoutée dans les agro-industries et dans l'enrichissement des minerais et développer plus avant la production de biens d'équipement, grâce à une stratégie de diversification économique fondée sur des liaisons intersectorielles. Il faut appuyer les entreprises privées, aussi bien les micro-entreprises du secteur informel que les petites et moyennes manufactures, principaux moteurs de croissance et de développement. Les pouvoirs publics doivent supprimer les obstacles aux affaires et encourager les talents créatifs des entrepreneurs africains. (i) 267 Annexes: le cloclImellf clu NEPAD (H) Agriculture 154. Objectifs - Améliorer la productivité de l'agriculture en accordant une attention particulière aux petits exploitants et aux agricultrices; - Assurer la sécurité alimentaire pour tous et accroître l'accès des pauvres à une alimentation et à une nutrition adéquates; - Promouvoir des mesures pour lutter contre la dégradation des ressources naturelles et encourager des méthodes de production qui soient écologiquement durables; - Intégrer les pauvres ruraux à l'économie de marché et leur fournir un meilleur accès aux marchés à l'exportation; - Transformer l'Afrique en exportateur net de produits agricoles; - Jouer un rôle stratégique prédominant dans le domaine des sciences agricoles et du développement de la technologie. 155. Actions Au niveau de l'Afrique : - Relever la sécurité de l'approvisionnement en eau pour l'agriculture en mettant sur pied des dispositifs d'irrigation à petite échelle, en améliorant la gestion des ressources en eau au niveau local et en accroissant l'échange de l'information et du savoir-faire technique avec la communauté internationale; - Améliorer la sécurité du régime foncier, traditionnel et moderne, et promouvoir les réformes foncières nécessaires; - Encourager la sécurité alimentaire au niveau régional, sousrégional, national et au niveau des ménages en assurant et gérant l'accroissement de la production, du transport, du stockage et de la commercialisation des cultures alimentaires, de là production animale et de la pêche. Accorder, ce faisant, une attention particulière aux besoins des pauvres, et mettre sur pied des systèmes d'alerte précoce pour surveiller la sécheresse et la production agricole; - Améliorer les mécanismes de crédit et de financement agricole ainsi que l'accès au crédit des petits exploitants et des agricultrices; - Réduire la prépondérance des dépenses publiques dans les zones urbaines en Afrique en transférant des ressource des activités urbaines aux activités rurales. Au niveau international : - Mettre au point de nouveaux systèmes de partenariat pour des projets agricoles particuliers de grande envergure afin de combattre la saturation des bailleurs de fonds; - Obtenir l'aide de pays en développement pour permettre à l'Afrique de mener et de développer ses propres capacités de recherche-développement dans le domaine de l'agriculture 268 Noul'eau Partenariat pour le Dél'eloppemel7t de l'Afrique (NOPADA) - Promouvoir l'accès des produits alimentaires et agricoles d'Afrique et, en particulier, des produits transformés aux marchés internationaux en améliorant la qualité de ces produits pour qu'ils répondent aux normes de ces marchés; - Soutenir la création de réseaux africains avec des partenaires extérieurs dans les domaines de la technologie et du savoir-faire agricoles, des services de vulgarisation et des infrastructures rurales; - Appuyer les investissements dans la recherche dans les domaines des cultures à grand rendement et des méthodes de conservation et de stockage durables; - Fournir un appui afin de consolider les capacités nationales et régionales dans le domaine des négociations commerciales multilatérales, y compris les réglementations sanitaires et les autres réglementations sur la commercialisation des produits agricoles. (ID) Industries extractives 156. Objectifs - Améliorer la qualité des informations sur les ressources minières; - Mettre en place un cadre réglementaire favorable au développement des industries extractives; - Instituer des pratiques exemplaires pour assurer l'efficacité de l'extraction des ressources minières et de minerais de qualité supérieure. 157. Actions Au niveau de l'Afrique : - Harmoniser les politiques et réglementations pour se conformer aux niveaux minimums convenus en matière d'exploitation; - Harmoniser les engagements en vue de diminuer constamment la perception de risques associés aux investissements en Afrique; - Harmoniser les sources d'information sur les opportunités d'investissements ; - Collaborer plus intensément pour le partage des connaissances sur les ressources naturelles et les moyens d'en augmenter la valeur ajoutée; - Respecter les conditions d'apports en valeur ajoutée (enrichissement) dans les investissements destinés au secteur minier en Afrique; - Créer une École africaine des mines (qui offre enseignement, formation et qualification à tous les niveaux). Ceci pourrait se faire en assurant la collaboration entre des écoles existantes. (iv) Manufacture 158. O/<jectijs Relever la production, la compétitivité et la diversification du secteur domestique privé, en particulier dans les sous-secteurs de 269 Annexes: le documelll du NEPAD l'agro-industrie, des mines et des manufactures, là où s'offrent des possibilités d'exportations et de création d'emplois; - Créer dans les pays d'Afrique des offices nationaux des normes; - Harmoniser les réglementations techniques des pays d'Afrique. 159. Actions Au niveau de l'Mrlque : - Créer de nouvelles industries ou moderniser celles qui existent dans les pays d'Afrique qui jouissent d'avantages comparatifs, notamment pour les agro-industries, la production d'énergie et les industries dépendant des ressources minières; - Devenir membres des organes normatifs internationaux pertinents. Une participation active de l'Afrique lui permettrait d'y mieux faire entendre sa voix et d'assurer une contribution véritable des industries africaines à la formulation des normes internationales. Cela assurerait aussi le transfert des copyrights des normes internationales aux offices nationaux des normes; - Mettre en place des institutions nationales de métrologie en liaison avec le système international de métrologie. Ceci resterait toujours la responsabilité des pouvoirs publics; - Faire en sorte que des laboratoires d'essais et des organismes de délivrance de certificats soient mis en place pour faire respecter les réglementations techniques nationales pertinentes. Ces institutions devraient être mises en place le plus rapidement possible là où il n'en existe pas encore; - Mettre en place une infrastructure d'agrément semblable à l'Organisation internationale de normalisation (50) qui soit acceptée par la communauté internationale. Une telle infrastructure pourrait être nationale dans les pays où l'industrie est suffisamment solide pour s'en charger ou bien l'on pourrait envisager des structures régionales. Il faudrait consacrer des fonds adéquats pour devenir membres des structures internationales telles que le Forum d'accréditation internationale et la Commission internationale de l'électrotechnique (CIE). - Faire assurer la reconnaissance réciproque des résultats des essais et des certificats délivrés par les principaux partenaires commerciaux de l'Afrique. En général, cela n'est possible que si l'on a mis en place des cadres normatifs, des réglementations techniques, des mesures de métrologie et d'agrément et que l'on peut démontrer qu'ils remplissent les critères internationaux. Au niveau international : - Faciliter, en créant divers rùécanismes dont des associations d'hommes d'affaires, les échanges d'informations entre les entreprises d'Afrique et celles de l'extérieur du continent pour viser la mise en place de co-entreprises et d'accords de sous-traitance; 270 NOlll't!all Partenariat pour ft! Dél't!loppement de f'Ajî"iqlle (NOPADA) - Aider à consolider les institutions africaines de formation en matière de développement industriel, en particulier en favorisant l'établissement de réseaux avec des partenaires internationaux; - Promouvoir les transferts de technologies nouvelles et appropriées vers les pays d'Afrique; - Mettre au point et faire accepter des pratiques exemplaires en matière de réglementations techniques qui remplissent les critères de l'Accord de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) sur les obstacles techniques au commerce (OTC) tout en répondant aux besoins de l'Afrique. Les réglementations techniques des pays développés sont marquées par le passé et souvent inutilement compliquées pour de nombreux pays d'Afrique; - Créer des offices des normes offrant aux industries et aux pouvoirs publics les informations requises sur les normes nationales, régionales et internationales pour faciliter l'accès aux marchés. Ces centres devraient être reliés aux autres institutions semblables existantes aux niveaux national, régional et international et pourraient aussi servir de points d'information nationale pour l'Accord de l'OMC sur les OTC ; - Assurer la formulation de normes nationales et régionales appropriées en instituant des comités techniques qui représentent de façon appropriée les parties prenantes du pays et faire en sorte que ces comités soient gérés conformément aux directives de l'ISO et aux exigences de l'Accord de l'OMC sur les OTe. (v) Touris~e 160. Objectifs - Repérer aux niveaux national et sous-régional les projets-clés pouvant avoir d'importants effets de percolation et contribuer à l'intégration économique interrégionale; - Mettre au point une stratégie régionale de marketing; - Créer une capacité de recherche sur le tourisme et les statistiques touristiques; - Promouvoir les partenariats semblables à ceux formés dans le cadre d'organes sous-régionaux tels que l'Organisation régionale du tourisme en Afrique australe (RETOSA), la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et la SADe. 161. Actions Au niveau de l'Mrique : - Forger des relations de coopération qui permettent de tirer parti d'un partage des connaissances tout en offrant une base aux autres pays souhaitant s'engager dans des activités relevant du tourisme; - Offrir aux peuples d'Afrique la possibilité de participer activement à des projets durables de tourisme au niveau des communautés; 271 Annexes: le document du NEPAD - Donner la priorité à la sécurité et à la sûreté des consommateurs; - Commercialiser les produits touristiques africains, comme le tourisme d'aventure, l'écotourisme et le tourisme culturel; - Assurer une meilleure coordination des initiatives régionales de tourisme en Afrique poix multiplier les produits et en assurer la diversité; - Tirer le meilleur parti possible de la forte demande inter-régionale d'activités touristiques en concevant des campagnes de marketing spécialisées et taillées sur mesure pour les consommateurs. (vi) Services 162. Les services peuvent constituer des activités très importantes pour les pays africains, en particulier ceux qui sont bien équipés dans le domaine des TIC (téléservices). (vU) Promotion du secteur privé 163. Objectifs - Créer un environnement sain et favorable aux activités du secteur privé, en mettant surtout l'accent sur les entrepreneurs locaux; - Favoriser les investissements étrangers directs et les échanges commerciaux, en mettant l'accent sur les exportations; - Développer les micro-entreprises, les petites et moyennes entreprises, en particulier dans le secteur informel. 164. Actions Au niveau de l'Afrique: - Prendre des mesures pour améliorer les capacités du secteur privé dans les domaines de l'esprit d'entreprise, de la gestion et des techniques en appuyant l'acquisition de technologies, les améliorations de la production, la formation et le développement des compétences; - Consolider les chambres de commerce, les associations commerciales et professionnelles ainsi que leurs réseaux régionaux; - Organiser le dialogue entre pouvoirs publics et secteur privé pour mettre au point une vision commune de stratégie du développement économique et supprimer les obstacles au développement du secteur privé; - Renforcer et encourager la croissance des micro-industries, des petites et moyennes industries, grâce à un soutien technique adéquat des institutions de service et de la société civile et améliorer leur accès à des capitaux en consolidant les programmes de microfinancement, tout particulièrement en faveur des femmes entrepreneurs. 272 NOl/l'eau Partenariut pour le Développement de l'Afn'que (NOPADA) Au niveau international: - Promouvoir des programmes de développement de l'esprit d'entreprise pour assister des entreprises africaines; - Offrir une assistance technique pour contribuer à la mise en place de réglementations appropriées et à la promotion de petites et moyennes entreprises et de micro-entreprises et de programmes de microfinancement pour le secteur privé africain, (viü) Promotion des exportations de l'Afrique 165, Objectifs - Améliorer les procédures douanières et les programmes de drawback; - S'attaquer aux barrières au commerce international en relevant les normes; - Augmenter le commerce intra-régional en favorisant les contacts entres les entreprises africaines de part et d'autre des frontières; - Changer l'image négative de l'Afrique en apportant des solutions aux conflits et en faisant le marketing du continent; - Remédier aux pénuries de compétences à court terme en donnant des encouragements appropriés et en assurant la formation au niveau des entreprises. 166. Actions Au niveau de l'Afrique : - Promouvoir le commerce intra-africain afin que les pays d'Afrique se procurent sur le continent des importations qui provenaient jusqu'à présent du reste du monde; - Créer des mécanismes et institutions de marketing pour mettre au point des stratégies de commercialisation des produits africains ; - Faire connaître les sociétés africaines d'importation et d'exportation et leurs produits, notamment grâce à des foires expositions commerciales; - Réduire les coûts des opérations et des transactions; - Promouvoir et améliorer les accords commerciaux reglonaux, libéraliser plus avant le commerce interrégional et harmoniser les règles d'origine, les tarifs douaniers et les normes des produits; - Réduire les droits de douane sur les exportations. Au niveau international : - Négocier des mesures et accords de facilitation pour améliorer l'accès des produits africains aux marchés du monde entier; - Encourager les investissements étrangers directs; - Aider à consolider les capacités du secteur privé tout en renforçant les capacités nationales et sous-régionales en matière de négociations commerciales, de mise en application des règles de l'OMC et 273 Annexes: le documunt du NEPAD pour identifier et exploiter les nouvelles possibilités d'échanges commerciaux issues du système commercial multilatéral; - Les chefs d'État doivent assurer une participation active aux échanges commerciaux mondiaux, gérés sous les auspices de l'OMC depuis 1995. Si un nouveau cycle de négociations commerciales multilatérales commence, il devra tenir compte des préoccupations, besoins et intérêts du continent africain et les inscrire dans les règles futures de l'OMC. 167. La participation au système commercial mondial permettra: - d'assurer aux exportations de l'Afrique un accès aux marchés ouvert, prévisible et diversifié sur le plan géographique; - d'offrir une tribune où les pays en développement puissent collectivement exiger des pays développés des ajustements structurels dans les industries pour lesquelles le monde en développement dispose actuellement d'un avantage comparatif naturel; - de faire de la transparence et de la prévisibilité des conditions préalables indispensables à l'augmentation des investissements, ce qui permettrait d'améliorer les capacités d'offre et de multiplier les bénéfices provenant des accès existants aux marchés; - d'apporter une assistance et un appui techniques pour améliorer les capacités institutionnelles des États africains à tirer parti de l'OMC et à conduire des négociations commerciales multilatérales. 168. En plus d'un soutien d'ordre général à l'OMC, les chefs d'État africains doivent déterminer des domaines stratégiques d'intervention et consolider, avec l'aide de la communauté internationale, la contribution du commerce au redressement du continent. 11 s'agirait notamment: - de repérer les domaines d'exportation essentiels dans lesquels l'offre est gravement entravée; - de diversifier la production et les exportations en particulier dans les domaines existants et potentiels dans lesquels le continent a un avantage comparatif, compte tenu de la nécessité de relever la valeur ajoutée de la production; - d'évaluer les possibilités de libéraliser plus avant le secteur des manufactures, vu que les marchés donnent essentiellement accès aux secteurs à faible valeur ajoutée et entravent les activités à forte valeur ajoutée dont le potentiel est le plus important pour la croissance économique; - de raviver l'action politique des pays d'Afrique afin d'intensifier et d'approfondir les diverses initiatives d'intégration prises dans tout le continent, ce pourquoi il faudrait envisager les possibilités suivantes: Cl) un régime continental discrétionnaire de préférences commerciales pour le commerce intra-africain ; (2) l'alignement des politiques commerciales et industrielles nationales et régionales 274 NOl/I'eall Partenariat pOl/r le Dél'e/oppement de l'Afriql/e (NOPADA) pour augmenter les possibilités d'échanges intra-industries indispensables à la durabilité des accords économiques régionaux. 169. Les chefs d'État doivent agir pour : - obtenir et stabiliser le traitement préférentiel consenti par les principaux partenaires des pays développés (comme le Système généralisé de préférence (SGP), l'Accord de Cotonou, l'Initiative Tout sauf des armes et l'AGOA, Loi américaine sur la croissance et le commerce en Afrique) ; - faire en sorte que la libéralisation multilatérale future n'affecte pas les marges préférentielles offertes par ces arrangements; - repérer leurs faiblesses en termes de conception et mise en application et y remédier. (ix) Élimination des barrières non tarifaires 170. Les dirigeants africains sont persuadés qu'il serait crucial d'améliorer l'accès aux marchés des pays industrialisés des produits pour lesquels l'Afrique est compétitive. Malgré les nettes améliorations en fait de diminution des droits de douanes ces dernières années, il subsiste d'importantes exonérations tarifaires et des barrières non tarifaires qui constituent des obstacles majeurs. Tout progrès dans ce domaine améliorerait énormément la croissance économique et la diversification de la production et des exportations de l'Afrique. On réduirait ainsi la dépendance vis-à-vis de l'APD et les projets d'infrastructures seraient rendus plus viables du fait de l'accélération de l'activité économique. VI. LIN NOLIVEAli l'AHTENAHIAT MONDIAL 171. L'Afrique reconnaît l'injustice historique séculaire et le besoin d'y remédier. Cependant, le partenariat enjoint que des efforts combinés améliorent la qualité de la vie des peuples d'Afrique aussi rapidement que possible. L'Afrique et ses partenaires partagent des responsabilités dans ce domaine dont ils peuvent retirer des bénéfices mutuels. 172. La révolution technologique mondiale nécessite une base croissante de ressources, une sphère de marchés de plus en plus grande, de nouvelles frontières d'efforts scientifiques, une capacité collective de sagesse humaine et un système écologique bien géré. Nous sommes conscients qu'une grande partie des ressources minérales et des autres ressources matérielles de l'Afrique sont des intrants essentiels dans les processus de production des pays développés. 275 Annexes: le document du NEPAD 173. En plus de cette base de ressources indispensables, l'Afrique offre un marché vaste et croissant aux producteurs de par le monde. Une Afrique se développant, avec des effectifs accrus de travailleurs employés et qualifiés et une classe moyenne en plein essor, constituerait un marché en pleine expansion pour les produits manufacturés, les produits intermédiaires et les services au niveau mondial. 174. En même temps, l'Afrique offre de grandes occasions d'investissements. Le NOPADA crée des possibilités d'efforts internationaux conjoints pour le développement des infrastructures, en particulier pour l'informatique et la télématique et pour les transports. 175. L'Afrique fournit également des perspectives de partenariats créatifs entre les secteurs public et privé dans le domaine de l'enrichissement des minerais, des industries agricoles, du tourisme, du développement des ressources humaines et pour relever les défis de la rénovation urbaine et du développement rural. 176. En outre, la biodiversité de l'Afrique, y compris la richesse de sa flore et de sa faune et les forêts tropicales, est une ressource mondiale importante pour lutter contre la dégradation de l'environnement causée par l'appauvrissement de la couche d'ozone et le changement climatique ainsi que par la pollution de l'air et de l'eau par les émissions industrielles et les effluents toxiques. 177. L'expansion des possibilités dans le domaine de l'éducation et dans d'autres domaines en Afrique accroîtrait la contribution du continent à la science, à la technologie et à la culture au niveau mondial, au profit de toute l'humanité. Après tout, la science moderne reconnaît que l'Afrique est le berceau de l'humanité. Les fossiles, les objets fabriqués, les oeuvres artistiques et les vestiges d'anciens villages humains peuvent être trouvés d'un bout à l'autre de l'Afrique et y fournissent une preuve matérielle de l'émergence de l'homo sapiens et de l'évolution de l'humanité. 178. Dans le cadre du processus de reconstruction de l'identité des peuples d'Afrique et de leur confiance en eux-mêmes, il est nécessaire que cela soit compris et apprécié par les Africains eux-mêmes. Dans le même esprit, le statut de l'Afrique en tant que lieu de naissance de l'humanité devrait être chéri par le monde entier en tant qu'origine de tous ses peuples. 179. Le riche héritage culturel de l'Afrique se reflète dans l'artisanat du passé, dans sa littérature, ses philosophies, son art et sa musique. Tout cela devrait servir à la fois à consolider la fierté des Africains au 276 NOlll!eali Partenariat POUl" le Déuefoppemellt de l'Afrique (NOPADA) sujet de leur propre humanité et à confirmer l'humanité commune des peuples du monde. 180. L'un des fondements du NOPADA est l'expansion des frontières démocratiques et l'approfondissement de la culture des droits de l'homme. Une Afrique démocratique deviendra l'un des piliers de la démocratie, des droits de l'homme et de la tolérance au niveau mondial. Les ressources mondiales actuellement consacrées à la résolution de conflits civils et inter-états pourraient ainsi servir àfinancer des projets plus gratifiants. 181. Le contraire d'une telle initiative, l'effondrement de davantage d'Etats africains, est une menace non seulement pour les Africains mais aussi pour la paix et la sécurité mondiales. En ce qui concerne les pays industrialisés, le développement en Afrique réduira les niveaux d'exclusion sociale mondiale et minimisera une source potentielle majeure d'instabilité sociale au niveau mondial. 182. L'Afrique s'engage à développer et consolider les partenariats Sud-Sud. - Instaurer de nouvelles relations avec les pays industrialisés et les organisations multilatérales 183. Un élément critique pour que les africains puissent prendre la responsabilité de l'avenir du continent est la nécessité de négocier de nouvelles relations avec ses partenaires pour le développement. La façon dont l'aide au développement est acheminée est extrêmement problématique pour les pays en développement. La nécessité de négocier séparément avec les bailleurs de fonds appuyant le même secteur ou programme et de leur rendre compte individuellement est aussi gênante qu'inefficace. Les conditions imposées à l'aide au développement suscitent des inefficacités supplémentaires. L'on souhaite établir une nouvelle relation dont le point de départ soit les programmes nationaux. Une telle relation établirait des cibles de performances et des normes dont conviendraient ensemble bailleur de fonds et bénéficiaire. On pourrait citer de nombreux exemples démontrant clairement que l'échec d'un projet n'est pas seulement dû à une mauvaise performance du bénéficiaire mais aussi à de mauvais conseils des bailleurs de fonds. 184. Les divers partenariats entre l'Afrique et les pays industrialisés d'une part et les institutions multilatérales d'autre part devront être maintenus. Les partenariats dont il est question sont notamment: le 277 Annexes: le document du NEPAD Nouvel Ordre du jour des Nations-Unies pour le développement de l'Afrique dans les années 90; le Plan d'action Union européenne Afrique du Caire; le Partenariat stratégique de la Banque mondiale pour l'Afrique; le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté du Fonds monétaire international (FMI) ; le Plan d'action de Tokyo sur l'initiative du Japon; la Loi américaine sur la croissance et le commerce en Afrique et le tout récent Nouveau contrat mondial de la Commission économique des Nations-Unies pour l'Afrique (CEA). L'objectif sera une rationalisation qui assure que chaque partenariat rapporte de véritables avantages. 185. Les dirigeants africains envisagent les responsabilités et obligations suivantes pour les pays développés et les institutions multilatérales: - Apporter un soutien matériel aux mécanismes et processus de prévention, de gestion et de résolution des conflits en Afrique, ainsi qu'aux initiatives de maintien de la paix; - Accélérer la réduction de la dette des pays pauvres très endettés, en conjonction avec les programmes les plus efficaces de lutte contre la pauvreté pour lesquels le Partenariat stratégique pour l'Afrique et le Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté constituent des bases importantes; - Améliorer les stratégies d'allégement de la dette pour les pays a revenus moyens; - Renverser la tendance à la diminution des apports d'APD à l'Afrique et aux autres pays en développemeit en réalisant la cible d'une APD équivalent à 0,7 % du produit national brut (PNB) de chacun des pays développés dans un délai à court terme dont il faudrait convenir. Cette aide accrue devrait servir à compléter les fonds libérés par la réduction de la dette pour accélérer la lutte contre la pauvreté; - Traduire en engagements concrets les stratégies internationales adoptées en matière d'éducation et de santé; - Faciliter l'instauration de partenariats entre les États, les sociétés pharmaceutiques internationales et les organisations de la société civile pour faciliter et accélérer l'accès des Africains souffrant de maladies infectieuses aux médicaments idoines; - Assurer aux produits des pays en développement l'accès aux marchés des pays développés au moyen d'initiatives bilatérales et négocier en faveur des pays d'Afrique des conditions plus équitables dans le cadre des accords multilatéraux de l'üMC ; - S'efforcer avec les dirigeants africains d'encourager les investissements du secteur privé des pays développés en Afrique, notamment par la mise en place de mécanismes d'assurance et 278 N01l1'eall Partenariat pOlir le Dél'eloppement de l'Afrique (NOPADA) - - - - - d'instruments financiers qui contribuent à diminuer les primes de risque en matière d'investissement en Afrique; Relever les normes de protection des consommateurs eu égard aux exportations des pays développés vers les pays en développement aux mêmes niveaux que ceux qui s'appliquent sur les marchés domestiques des pays développés; Faire en sorte que la Banque mondiale et les autres institutions multilatérales de financement du développement apportent des investissements aux projets cruciaux d'infrastructures économiques, pour faciliter et appuyer la participation du secteur privé; Offrir un soutien technique pour accélérer la mise en œuvre du programme d'action, notamment la consolidation des capacités de l'Afrique pour la planification et la gestion du développement, les réglementations en matière de finances et d'infrastructures, la comptabilité et l'audit ainsi que la conception, la construction et la gestion des infrastructures; Appuyer les réformes à la gouvernance des institutions financières multilatérales pour qu'elles tiennent mieux compte des besoins et des préoccupations des pays d'Afrique en particulier; Mettre en place des mécanismes coordonnés de lutte contre la corruption et s'engager à rendre à l'Afrique tous les gains provenant de ces pratiques. VII. MISE EN ŒlIVHE Dli NOUVEAU PARTENARIAT POUR LE DÉVELOPPEMENT DE L'AFRIQUE 186. Conscients de la nécessité d'établir un ordre des priorités, les Présidents qui ont pris l'initiative proposent de réaliser le plus rapidement possible, en collaboration avec les partenaires en développement, les programmes suivants: - Maladies transmissibles - VIH/SIDA, paludisme et tuberculose; - Technologie de l'information et de la communication; - Réduction de la dette; - Accès aux marchés. 187. Diverses institutions internationales de partenariat ont déjà engagé des travaux sur tous ces programmes, mais il faut y consolider la participation et le leadership de l'Afrique pour en assurer une meilleure réalisation. Nous estimons que tous ces aspects pourraient permettre d'accélérer la régénération du continent. (Des propositions détaillées sur chaque programme ont été regroupées en annexe). 279 Annexes: le docume1lf du NEPAD Projets 188. Tout en étant conscients des dangers qu'aborder le développement au moyen de projets risque de poser, les initiateurs du NOPADA proposent un certain nombre de projets indispensables au développement régional intégré que conçoit le NOPADA. Ces projets devraient non seulement consolider les programmes nationaux et régionaux de développement mais aussi contribuer énormément au démarrage rapide de la revitalisation du continent. 189. Les projets présentés ci-après ne servent que d'illustration. Une liste détaillée de projets se trouve sur le cybersite du NOPADA (www.marstrategy.com) (1) Agriculture 190. Élargir la portée et les opérations du plan d'action pour la gestion intégrée des terres et des ressources en eau de l'Afrique: Ce projet porte sur la maintenance et la revalorisation des fragiles ressources naturelles agricoles de l'Afrique. De nombreux gouvernements africains ont déjà engagé des initiatives dans le cadre de ce programme. Les partenaires sont notamment le fonds pour l'environnement mondial (FEM), la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la FAO et des bailleurs de fonds bilatéraux. 191. Consolider et renouveler les capacités des systèmes de recherche et de vulgarisation agricole en Afrique: Ce projet porte sur la revalorisation des infrastructures et des institutions de soutien à l'agriculture en Afrique. Les innovations technologiques et leur diffusion offrent d'immenses possibilités d'accélération de la production et de la productivité agricole, mais le continent n'a pas suffisamment de capacités de recherche pour faire d'importants progrès. Les principaux acteurs de ce projet sont le Forum pour la recherche agricole en Afrique, la Banque mondiale, la FAO et le Groupe consultatif pour la recherche agricole internationale (CG AR). (il) Promotion du secteur privé 192. L'expérience acquise de par le monde indique qu'un des meilleurs moyens de promouvoir les entreprises dans les domaines fortement novateurs est de créer des Pépinières d'entreprises. Le projet formulera les directives et politiques requises pour la mise en place de ces pépinières dans chaque pays, en tirant parti de l'expérience et des pratiques exemplaires internationales, mais en les adaptant aux besoins et à la conjoncture de l'Afrique. 280 Nall1'eult Pm1enuriut pour le Dé/'elappement de l'Afrique (NOPADA) (üi) Infrastructures et intégration régionale 193. L'on a identifié, dans le processus de mise en place du NOPADA, de nombreux projets d'énergie, de transport et d'adduction d'eau cruciaux pour le développement intégré de l'Afrique. Il faudrait des fonds pour ces projets qui en sont à divers stades de mise au point. Il faudra ensuite en accélérer l'exécution en collaboration avec la Banque africaine de développement, la Banque mondiale et d'autres institutions multilatérales. 194. Les Présidents qui ont lancé l'initiative estiment qu'à moins que l'on ne s'occupe des infrastructures sur la base d'une planification tenant compte du développement régional intégré, le renouveau continent ne pourra jamais démarrer. L'on exhorte donc la communauté internationale à s'associer à l'Afrique pour accélérer la mise en place de ces infrastructures. (Voir le détail des projets d'infrastructures sur le cybersite du NOPADA : www.mapstrategy.com). Évaluation des besoins 195. Pour déterminer les mesures à prendre dans les secteurs prioritaires, il faudra faire une étude d'évaluation des besoins, allant du niveau national, au niveau sous-régional et continental. Il s'agira d'évaluer les besoins dans les cinq secteurs prioritaires en termes de structures et d'effectifs. 196. L'évaluation des besoins sectoriels sous-régionaux se fera sur la base de l'évaluation des besoins nationaux. L'on propose que les experts et ministres de chaque sous-secteur se réunissent dans l'une des capitales de la sous-région. Pour chaque secteur, il faudra réunir les données de chaque pays et s'en servir afin de mettre au point le plan sectoriel sous-régional. Lorsque les besoins sectoriels sous-régionaux auront été évalués dans les cinq secteurs, ils pourront être regroupés pour évaluer les besoins d'ensemble de la sous-région. 197. Il convient de souligner qu'il ne s'agit pas simplement d'additionner les besoins sous-régionaux sectoriels, il faut commencer par avoir une perspective sous-régionale pour aboutir à au moins deux nouveaux éléments: - Les besoins spécifiques de la sous-région perçus comme un espace unique en réunissant tous les pays; les routes et voies ferrées par exemple ne devraient pas être conçues dans une perspective nationale mais plutôt sous-régionale; - Les besoins devraient être rationalisés sur une base sous-régionale; par exemple les universités devraient être réparties dans une perspective territoriale sous-régionale. - Finalement, les besoins du continent seront évalués dans les cinq secteurs considérés comme prioritaires en fonction des plans sous281 Annexes,' le docume11f du NEPAD régionaux d'ensemble. On trouvera des détails sur le cybersite du NOPADA. Mécanisme directeur du Nouveau Partenariat pour le développement de l'Afrique 198. Les chefs d'État initiateurs indiqueront à l'Union africaine quel serait le mécanisme approprié de mise en œuvre du NOPADA. 199. Ce mécanisme aura besoin d'un soutien technique de base en matière de recherche et de formulation de politiques. Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre 200. Un Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre, composé des cinq chefs d'État initiateurs du NOPADA, plus dix autres Cà raison de deux par région), sera mis sur pied pour veiller à la mise en œuvre de l'Initiative. 201. Le Comité des chefs d'État chargé de la mise en œuvre aura les fonctions suivantes: - Déterminer quelles sont les questions stratégiques qui doivent faire l'objet de recherche, de planification et de direction au niveau du continent; - Mettre en place les mécanismes d'évaluation rétrospective des progrès accomplis en vue de la réalisation des cibles convenues d'un commun accord et du respect des normes acceptées par tous; - Examiner les progrès accomplis dans l'exécution des décisions prises afin de prendre les mesures idoines pour surmonter tout problème ou rattraper tout retard. VIII. CONCLUSION 202. Le NOPADA a pour objectif de consolider la démocratie et la saine gestion économique du continent. Les dirigeants africains s'y engagent envers les peuples d'Afrique et le reste du monde à œuvrer de concert pour reconstruire le continent, Ils promettent de promouvoir la paix et la stabilité, la démocratie, une saine gestion économique et un développement axé six les êtres humains et s'engagent à être mutuellement responsables en vertu des accords contenus dans le programme. 203. En proposant cette association, l'Afrique reconnaît qu'elle détient la clé de son propre développement. Nous proclamons que le NOPADA offre aux pays développés du monde une occasion historique d'établir avec l'Afrique un véritable partenariat fondé sur des intérêts mutuels, des engagements communs et des accords contraignants. 282 NOUl'eall Partenariat pOlir le Dél'eloppement de l'Afrique (NOPADA) 204. L'adoption de la stratégie de développement esquissée à grand trait ci-dessus ainsi que d'un programme d'action détaillé marquera le début d'une nouvelle phase de partenariat et de coopération entre l'Afrique et le monde développé. 205. En réalisant les promesses qui y sont contenues, le présent programme devra permettre à l'enfant africain émacié d'espérer qu'en vérité le xx,C siècle sera bel et bien le siècle de la renaissance de l'Afrique. Abuja (Nigeria), octobre 2001 283 Achevé d'imprimer en France le 28 novembre 2002 sur les presses de ~ Imprimerie O. Guéniot à Langres - Saints-Geosmes Dépôt légal: décembre 2002 - N° d'imprimeur: 4898