le financement du nepad - Professeur Moustapha Kassé

Professeur Moustapha KASSE : Le financement du NEPAD
Forum des Dirigeants d’Entreprise, Afrique Challenge, Sept.2002
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FORUM AFRIQUE CHALLENGE
Dakar du 12 au 14 Septembre
INTRODUCTION : Le NEPAD un acte fondateur de la renaissance
africaine : un rappel des objectifs.
A/ Les orientations générales
Bâtir une stratégie apte à sortir l’Afrique de la trappe de la pauvreté
de masse.
L’amorce et la consolidation d’une croissance forte et durable dans
l’équité sont la solution aux defis économiques et sociaux du continent.
Or la croissance et le développement résultent fondamentalement de
l’accumulation du capital. Celle-ci permet simultanément d’élargir les
capacités de production et d’élever la productivité. Elle se compose :
- capital physique : routes, chemin de fer, infrastructures pour le
fret maritime et portuaire, ouvrages hydro-agricoles, parc
informatique, télécommunications, énergie, etc.
- infrastructures pour la recherche-développement : laboratoires et
équipements
- capital humain : éducation, santé, population
- capital social : un ensemble complexe de valeurs, normes
comportementales, d’obligations et de canaux d’information visant à
instaurer la confiance, à garantir l’application des contrats, à
instituer des mécanismes d’assurance et à favoriser l’apprentissage
social (Putnam, 1993).
C’est pourquoi le NEPAD fait de l’accumulation du capital un moyen privilégié qui
s’appuie sur un schéma de croissance reposant sur le développement accéléré des
infrastructures économiques et des ressources humaines de l’Afrique. Cela cessite la
mise en place des préalables stabilité et de bonne gouvernance pour amortir les risques
et les incertitudes pour les investissements privés comme publics.
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B/ Les secteurs prioritaires qui vont déterminer les besoins de financement
Il est un point sur lequel tout le monde s’accorde : la hiérarchie des secteurs qui
constituent de fait les leviers de la croissance. A ce niveau les deux initiatives (PLOM et
MAP) montrent leur parfaite complémentarité en ce sens qu’elles mettent l’accent l’une
sur la hiérarchie des secteurs et l’autre sur les structures d’encadrement et les
préalables au développement durable.
Ces secteurs retenus dans le Programme d’action sont au nombre de huit à
savoir :
- L’accès aux marchés mondiaux et la diversification de la production.
- Les infrastructures de base.
- Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication.
- L’éducation .
- La santé.
- L’agriculture.
- L’énergie.
- L’environnement..
En agrégeant certains secteurs, on peut retrouver les deux foyers de
l’accumulation soulignés plus haut à savoir : le capital physique et le capital humain . Le
capital physique comprendrait les infrastructures de base: routes, chemin de fer,
infrastructures pour le fret maritime et portuaire, ouvrages hydro-agricoles, parc
informatique, télécommunications, énergie, etc. Le capital humain comprendrait : l
éducation, la santé, la nutrition et les infrastructures pour la recherche-développement.
Pour chaque secteur, le NEPAD estime que «l’objectif est de combler l’écart
actuel entre l’Afrique et les pays développés afin d’améliorer la compétitivité du
continent et de permettre à l’Afrique de participer au processus de mondialisation ».
Les préoccupations d’une réduction des gaps au niveau des différents secteurs sont fort
justement réaffirmées. Cela appelle des investissements massifs qui ne peuvent être
attendus principalement que du secteur privé. Ces IDE devraient placer les pays
africains individuellement et collectivement sur les chantiers d’une croissance soutenue
qui mettra alors un terme à la marginalisation de l’Afrique.
C/ Les préalables : assurer la paix, la sécurité et la bonne gouvernance
pour rendre plus attractif les marchés africains.
Cette vision appelle des politiques économiques cohérentes et régionalisées en
faveur d’un développement durable par l’intégration et dont les fondements pourraient
être : - la gestion des conflits qui déstabilisent l’espace africain ;
- l’amélioration de la gouvernance qui stabilise les institutions et les
fondamentaux du cadre macroéconomique ;
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- la mise en place d’un environnement incitatif pour les investissements
dans les secteurs moteurs de la croissance qui accroissent à la fois la
compétitivité et la diversification des économies ;
A côté de ces aspects politiques, la gouvernance économique ne doit pas être en
reste car l’environnement économique est latrice d’au moins quatre foyers de
distorsions qui dissuadent les IDE :
- un environnement économique favorable qui se traduit dans
l’inefficacité des politiques sectorielles et une mauvaise structure
d’incitations économiques ;
- la faible efficacité du capital humain imputable à la médiocre qualité des
systèmes éducatifs et de formation en crise permanente;
- l’inadéquation et l’insuffisance quantitative et qualitative des
infrastructures de base ;
- les coûts contrariants des facteurs techniques de production.
Il est également bien établi que le déclin des IDE en Afrique sub-saharienne
procède aussi de déterminants économiques stricto sensu à côté de facteurs plus
diffus tels que les risques, les incertitudes et la confiance. Ces facteurs économiques
qui peuvent freiner les investissements sont maintenant parfaitement bien connus. Il
s’agit des déséquilibres macroéconomiques persistants, des taux d’inflation élevés, de la
surévaluation des monnaies entraînant des taux de change réels dissuasifs, des
politiques de protection inappropriées, des stratégies commerciales mal conçues et de la
mauvaise gestion des affaires publiques.
Le caractère novateur du NEPAD réside dans le financement qui a fait capoter
toutes les initiatives antérieures comme le PAL et le Programme Prioritaire
I/ LES BESOINS DE FINANCEMENT DU NEPAD
Les besoins en ressources financières particulièrement en ce qui concerne la
balance épargne-investissement pour l’Afrique sont énormes et l’APD en est la source
principale.
D’après la CEA (Rapport 1999), en Afrique, un investissement de 35% du PNB
serait nécessaire pour atteindre un taux de croissance annuel de 7%. Il faudrait donc
18% du PIB d’épargne supplémentaire essentiellement externe. L’APD étant
actuellement de 9% du PIB, un gap de financement de 9% reste à combler.
La CNUCED propose le même type d’estimation des besoins de financement pour
l’Afrique sub-saharienne (Rapport 2000 sur le financement des PMA). Il faudrait 50 à
150% de ressources supplémentaires pour atteindre un taux de croissance annuel de 6%.
L’Afrique aurait bénéficier d’au moins 10 milliards de dollars de transfert de
ressources pour qu’elle puisse atteindre le taux de croissance indispensable. Elle ne
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reçoit même pas le dixième. s lors que l’APD constitue la source essentielle et qu’elle
accuse une baisse substantielle permanente, il faut rechercher d’autres sources.
II/ LES SOURCES DE FINACEMENT DU NEPAD
Aujourd’hui les marchés financiers échangent chaque jour quelques 1200 milliards
de dollars. Ces mouvements de capitaux sont commandés par quatre (4) facteurs :
- le paiement des transactions commerciales de biens et services ;
- les contreparties financières de transferts, d’immobilisations
corporelles (IDE) ;
- les investissements de portefeuille destinés à en améliorer le
rendement, la liquidité ou la répartition du risque ;
- les spéculations sur les taux de change.
Cependant, on observe que les pays africains sont dans leur grande majorité
complètement absents de ces courants, ce qui nécessite de nouvelles approches pour
participer à la mobilisation des ressources indispensables pour financer les
investissements dans les secteurs prioritaires. En matière de recherche de nouvelles
sources de financement, on peut distinguer les ressources africaines et celles provenant
de la communauté internationale et du système financier.
A/ Les ressources endogènes des pays africains comprennent :
Niveau de l’épargne intérieure africaine: niveau, évolution, particularités
Épargne publique : niveau, évolution, particularités
Épargne privée : niveau, évolution, particularités
Stratégies novatrices
- Introduire et développer les systèmes de retraites par capitalisation
- Généraliser les systèmes de financement décentralisés et assurer
leur articulation avec le système financier formel
- Émettre des bons du Trésor destinés au financement des
infrastructures
- Regrouper les moyens financiers disponibles dans les PAST (intérêt :
économies d’échelle, mise en cohérence des réseaux routiers
nationaux, ferroviaires, etc. selon une logique d’intégration sous-
régionale)
- Utiliser une partie des réserves de change des pays africains
momentanément non employées
- Création de droits de tirage spéciaux
- Utiliser une partie des ressources économies dans le cadre de la
Stratégie de réduction de la pauvreté pour financer les
infrastructures retenues dans le NEPAD.
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B/ Les ressources externes sont celles qui sont attendues de la
communauté internationale et du secteur privé.
Elles comprennent :
- l’émission de bons de Trésor par les pays développés pour mobiliser des
ressources en faveur des Projets du NEPAD ;
- la création de ressources spéciales par l’émission de Droits de Tirage
Spéciaux (DTS) spécialement conçus pour l’Afrique ;
- l’appel aux ressources privées et aux marchés financiers ;
- les prêts sur 50 ans avec bonification du taux d’intérêt ;
- les investissements directs étrangers par intéressement des entreprises
des pays développés : 2/3 des fonds servent à rémunérer ces
entreprises, le1/3 restant étant réservé aux entreprises africaines.
C/ Les désendettement de l’Afrique comme mode de financement
Les multiples plans et initiatives sur la dette africaine ont un point commun : le
refus des créanciers d’annuler la dette qui se massifie chaque jour. L’impasse du
désendettement est donc totale.
L’emprunt extérieur a été pendant longtemps considéré comme une source de
financement des déficits interne et externe (modèles à double déficits de Chenery et
Strout, 1966). Au niveau interne, le déficit renvoie à l’insuffisance de l’épargne
intérieure qui doit financer les besoins d’investissement alors qu’au niveau externe, il
s’agit de trouver les ressources nécessaires au financement du solde déficitaire de la
balance courante. Nombre de pays vont donc recourir à l’épargne extérieure pour
couvrir leurs besoins de consommation et d’investissement. En ce sens, l’emprunt
extérieur permet de desserrer les contraintes intérieures et de différer des mesures
impopulaires de politique économique comme la réduction des consommations des élites
urbaines ou la diminution de la pression fiscale.
En ce qui concerne l’endettement de l’Afrique, comme souligné plus haut au niveau
de l’introduction, il est à la fois excessif et insoutenable (Kassé,1994). Dans ce
contexte, toute la question est comment éviter de ne pas basculer dans l’un ou l‘autre
de ces deux précipices : accorder trop peu de crédits au continent, c’est le freiner à
court terme dans son développement ; mais également lui octroyer trop de crédits, c’est
l’étrangler à long terme dans son endettement.
Le problème est aujourd’hui d’aller vers des solutions de désendettement négocié
qui pourrait alors s’inspirer des principes des SWAPS. Une autre voie pourrait être une
réallocation de la dette en fonction des priorités du NEPAD comme les secteurs de
l’éducation et de la santé.
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