Influence du génotype VHC sur l`évolution hépatique

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Influence du génotype VHC sur l'évolution hépatique
Revue critique
de l'actualité scientifique internationale
sur le VIH
et les virus des hépatites
n°96 - octobre/novembre 2001
VHC-COHORTE
Influence du génotype VHC sur l'évolution
hépatique
Jean-Baptiste Nousbaum
Service d'hépato-gastroentérologie, Hôpital de la Cavale blanche, CHU (Brest)
Outcome of
liver disease in
a large cohort
of histologically
proven chronic
hepatitis C :
influence of
HCV genotype
Roffi L.,
Redaelli A.,
Colloredo G.,
Minola E.,
Donada C.,
Picciotto A.,
Riboli P., Del
Poggio P.,
Rinaldi G., Paris
B., Fornaciairi
G., Giusti M.,
Marin R.,
Morales R.,
Sangiovanni A.,
Belloni G., Pozzi
M., Poli G.,
Mascoli N.,
Corradi C.,
Pioltelli
European
Journal of
Gastroenterology
and Hepatology,
2001, 13,
501-506
En décalage avec de précédents travaux, les résultats de l'étude
d'une importante cohorte italienne ne montrent pas le rôle d'un
génotype particulier dans la carcinogenèse. Par ailleurs, ils
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Influence du génotype VHC sur l'évolution hépatique
mettent en évidence l'impact potentiel du traitement antiviral par
interféron sur les complications de la cirrhose.
La question de l'association de certains génotypes du virus C à la
sévérité de l'atteinte hépatique a été controversée et reste encore
débattue. Les résultats des nombreuses études menées sur ce
sujet sont contradictoires. L'association entre certains génotypes,
le génotype 1 en particulier, et une maladie plus sévère, pourrait
être liée en partie à des facteurs confondants comme la source ou
la durée de l'infection, ou encore l'âge au moment de l'infection.
Les grandes études de cohorte sont cependant peu nombreuses et
peuvent apporter quelques informations intéressantes. Les
objectifs du travail collaboratif de Roffi et coll. ont été d'évaluer
l'influence des génotypes du VHC sur l'évolution de l'atteinte
hépatique et de mesurer l'impact à long terme du traitement par
l'interféron chez les malades atteints de cirrhose.
Roffi et coll. ont étudié une cohorte de 2307 malades italiens
ayant une hépatite chronique C. Le génotype 1b représentait
40% des malades et le type 2 28,5% des malades. L'âge moyen
des malades infectés par le génotype 1b et 2 était plus élevé que
celui des malades infectés par un autre génotype. Le génotype
1b était associé à la transfusion et à l'infection dite sporadique
(sans mode de contamination connu), tandis que les génotypes
1a, 3 et 4 étaient plus fréquents chez les toxicomanes. Dans cette
population, la cirrhose était trouvée chez 12% des malades.
La survie des malades infectés par le génotype 1 était moins
bonne que celle des malades infectés par d'autres génotypes.
L'incidence annuelle du carcinome hépatocellulaire était de 5,9%
chez les malades infectés par le génotype 1a, de 4,5% pour les
malades infectés par le génotype 1b et de 2,8% pour les malades
infectés par les autres génotypes.
Parmi les 271 malades atteints de cirrhose, 119 étaient soumis à
un traitement par l'interféron alpha en dehors d'une étude
contrôlée. La dose totale moyenne était de 388 millions d'unités
(extrêmes : 108-1300). La réponse virologique prolongée était
observée dans 9,2% des cas. La survie était meilleure dans le
groupe traité par l'interféron (75% de survie à 9 ans dans le
groupe traité contre 75% de survie à 5 ans dans le groupe non
traité ; p < 0,01). L'incidence de survenue d'un carcinome
hépatocellulaire était plus faible dans le groupe ayant reçu de
l'interféron (20% à 10 ans) que dans le groupe non traité (52% à
10 ans) (p < 0,01).
Dans la plupart des études épidémiologiques, de nombreux
facteurs sont confondants. Le génotype 1b, en Italie comme en
France, est plus fréquemment trouvé chez les malades âgés avec
une atteinte hépatique sévère. Le travail de Roffi et coll.
confirme le lien significatif entre l'âge des malades et le
génotype viral : les sujets les plus âgés étaient infectés par le
génotype 1a (moyenne : 70 ans), suivis par les malades ayant un
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génotype 1b (âge moyen : 60 ans) ou un génotype 2 (âge moyen
: 58 ans).
L'âge des malades est un facteur confondant puisqu'il peut être
un indice indirect de la durée d'évolution de la maladie. La
probabilité de survie des malades infectés par le génotype 1 était
inférieure à celle des malades ayant un génotype différent. Ceci
est lié à leur âge plus élevé et à la prévalence plus élevée de la
cirrhose dans ce groupe.
Dans l'étude de Roffi et coll., les malades infectés par le
génotype 1b et 2 avaient un âge identique (médiane : 50 ans).
Cependant, la prévalence de la cirrhose chez les malades infectés
par le génotype 1b était supérieure à celle des sujets infectés par
le génotype 2, ce qui fait suggérer aux auteurs un rôle pathogène
propre du génotype 1b. Néanmoins, la durée d'évolution de la
maladie ne peut être réellement estimée dans l'un et l'autre
groupe.
Les résultats des études précédentes ont été controversés : des
études prospectives n'ont pas montré de lien entre le génotype 1b
et la progression de la maladie1, alors que des études
cas-contrôles ont montré une relation entre le génotype 1b et le
développement du carcinome hépatocellulaire chez les malades
cirrhotiques2. Ceci reflète les difficultés méthodologiques de ces
travaux qui font intervenir de multiples paramètres, dont certains
ne sont pas toujours mesurables, comme la consommation
d'alcool ou la durée d'évolution.
Contrairement à l'étude prospective de Bruno et coll.3, le travail
de Roffi et coll. a montré, en analyse multivariée restreinte au
groupe de malades cirrhotiques, que le génotype 1b n'était pas
un facteur de risque indépendant de survenue d'un carcinome
hépatocellulaire. Le rôle d'un génotype particulier du virus C
dans la carcinogenèse n'est donc pas démontré : les études
épidémiologiques plaident plutôt en faveur de facteurs
dépendants de l'hôte et de la durée d'évolution de l'infection. Il
reste à savoir, lorsque les systèmes de culture du virus seront
disponibles, si certaines protéines du VHC peuvent jouer un rôle
direct dans la carcinogenèse hépatique.
Le deuxième point de cette étude concerne l'impact potentiel du
traitement antiviral sur les complications de la cirrhose,
notamment le développement du carcinome hépatocellulaire
(CHC). L'incidence du CHC était plus faible chez les malades
ayant une cirrhose traités par l'interféron à doses standard que
chez les malades non cirrhotiques, indépendamment de la
réponse virologique ou biochimique.
Cette observation est intéressante et a d'importantes
conséquences, mais il existe peut-être des biais que les auteurs
ne mentionnent pas dans l'article : bien que tous les malades de
cette cohorte aient eu une biopsie en intention de traiter, les
auteurs ne disent pas si le stade de la cirrhose était comparable
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dans les 2 groupes analysés rétrospectivement. On peut faire
l'hypothèse que le choix de traiter a été pris pour les cirrhotiques
en meilleure condition et avec une meilleure probabilité de
survie spontanée. Si les groupes étaient comparables, cette
observation s'ajouterait à celles d'autres études récentes qui ont
suggéré que les malades atteints de cirrhose virale C traités par
interféron alpha ont un plus faible risque de développer un CHC
ou une décompensation en cas de réponse virologique4.
La réponse à la question de l'impact du traitement sur la
probabilité de développer un CHC n'est cependant pas encore
résolue. Un premier élément de réponse pourrait provenir de
l'analyse à long terme des cohortes de malades cirrhotiques
inclus dans les essais prospectifs randomisés entrepris au cours
de ces dernières années. On peut s'attendre à ce que la survie des
cirrhotiques répondeurs virologiques soit significativement
améliorée, comme le suggère l'analyse à court terme de ces
essais.
En ce qui concerne les essais à venir, une étude randomisée avec
un groupe contrôle sans traitement ne pourrait pas être envisagée
sur le plan éthique à l'heure actuelle ; en effet, le traitement par
l'interféron pégylé associé à la ribavirine s'accompagne d'une
probabilité de réponse virologique prolongée de plus de 30%
chez les malades cirrhotiques et doit être largement proposé à ce
groupe de malades.
Il sera en revanche très intéressant de mesurer l'impact à long
terme du traitement antiviral prolongé sur plusieurs années chez
des malades non répondeurs virologiques, en espérant pouvoir
démontrer rapidement que l'incidence des complications de la
cirrhose, voire celle du carcinome hépatocellulaire, est
significativement réduite.
1 - Serfaty L, Chazouilleres O, Poujol-Robert A et al.
" Risk factors for cirrhosis in patients with chronic hepatitis C virus
infection : results of a case-control study"
Hepatol, 1997, 26, 776-9
2 - Donato F, Tagger A, Chiesa R et al.
" Hepatitis B and C virus infection, alcohol drinking, and hepatocellular
carcinoma : a case-control study in Italy. Brescia HCC Study"
Hepatol, 1997, 26, 579-84
3 - Bruno S, Silini E, Crosignani A et al.
" Hepatitis C virus genotypes and risk of hepatocellular carcinoma in
cirrhosis : a prospective study"
Hepatology, 1997, 25, 3, 754-8
4 - Fattovich G, Giustina G, Degos F et al.
" Effectiveness of interferon alfa on incidence of hepatocellular carcinoma
and decompensation in cirrhosis type C"
J Hepatol, 1997, 27, 201-5
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