
La Lettre du Cancérologue • Vol. XVIII - n° 10 - décembre 2009 | 527
DOSSIER THÉMATIQUE
présentaient un contrôle locorégional supérieur en
étude de sous-groupes (patientes traitées de façon
conservatrice avec atteinte axillaire histologique à
5 ans de 97 % versus 91 %) [21, 22]. Le prix à payer
pour cette amélioration du contrôle est une augmen-
tation de la toxicité tardive et un retentissement
esthétique (23, 24). La voie de l’association radio-
thérapie/traitements systémiques en préopératoire
ou de façon exclusive doit également être envisagée
pour augmenter les possibilités de traitements
conservateurs (25, 26). Ils devraient également
rendre opérables un certain nombre de cancers loca-
lement avancés. Les traitements ciblés ouvrent de
larges perspectives d’associations concomitantes à la
radiothérapie et nécessitent une nouvelle approche
dans la construction d’études de phase I pour évaluer
leur tolérance (27). Parfois, le développement de
molécules est si rapide qu’elles sont évaluées en
traitement adjuvant avant même qu’on ait pu vérifier
l’innocuité de leur association avec la radiothérapie
locorégionale du cancer du sein. C’est ce qui s’est
passé avec le trastuzumab, délivré tôt en situation
néo-adjuvante ou en situation adjuvante précoce,
alors que les données concernant son administra-
tion en cours de radiothérapie sont pour le moins
ténues. La situation semble se reproduire en ce
moment avec de nouveaux traitements ciblés tels
que le lapatinib ou le bévacizumab, nous engageant
à participer largement aux observatoires tels que
ToléRAB (Tolérance de la radiothérapie du cancer
du sein associée ou non au bévacizumab).
Un régime allégé
Le diagnostic de très petites tumeurs, peu agressives,
est fréquent depuis la généralisation des dépistages
nationaux et individuels. Lorsqu’il est posé chez une
patiente âgée, on s’interroge sur son retentissement,
tant sur le plan de son pronostic vital que sur celui
de la qualité de vie. Y a-t-il un risque au “surtrai-
tement” ? La désescalade thérapeutique peut être
abordée de deux façons, qui peuvent être combinées
mais ne doivent pas être confondues : la diminution
du volume irradié ou celle du nombre de séances de
radiothérapie. Commençons par la seconde.
Peut-on diminuer le nombre de séances
de radiothérapie ?
Quatre grandes études randomisées se sont intéres-
sées au traitement hypofractionné sur l’ensemble du
sein. Toutes concluent que celui-ci est possible avec
une efficacité et une toxicité comparables à celles
de la radiothérapie normo-fractionnée. Exprimons
cependant quelques réserves :
➤
la dose équivalente de la modalité hypofrac-
tionnée est souvent inférieure à 50 Gy pour une
tumeur dont l’α/β est élevée ;
➤l’association à un boost a été peu évaluée ;
➤
l’irradiation des aires ganglionnaires selon un
mode hypofractionné a été peu évaluée.
Dans notre département, nous avons préféré les
41,6 Gy, en 13 séances de 3,2 Gy × 3/sem., du proto-
cole START-A (28) et avons réservé ce fractionne-
ment aux patientes de plus de 60 ans n’ayant ni
indication à un boost (marges largement saines,
facteurs histo-pronostiques peu agressifs), ni indica-
tion à une irradiation des aires ganglionnaires. L’ex-
périence que nous avions eue d’une dose légèrement
supérieure (42,9 Gy en séances de 3,3 Gy) [29] était
qu’elle exposait les patientes à une toxicité cutanée
subaiguë non négligeable, environ 2 semaines après
la fin de la radiothérapie (30).
La situation particulière des patientes âgées a déjà
fait l’objet de plusieurs études qui démontrent l’ap-
plicabilité de radiothérapies très hypofractionnées
(“en flash”, comme disent les Anglo-Saxons) avec
une tolérance et une efficacité satisfaisantes (31-33).
Cette radiothérapie peut même, dans certains cas,
se substituer à la chirurgie (34).
Peut-on diminuer le volume
d’irradiation ?
◆◆Aires◆ganglionnaires
La question de la place de l’irradiation de la chaîne
mammaire interne a fait l’objet d’une revue récente
de la littérature (35). Elle sera tranchée par l’étude
22922/10925 de l’EORTC qui, avec 4 004 patientes,
a un effectif suffisant pour évaluer un bénéfice en
termes de survie globale avec un recul suffisant (4 %
de bénéfice à 10 ans) [36]. L’étude française portant
sur 1 281 patientes mastectomisées avec atteinte
ganglionnaire histologique ou tumeur centrale ou
interne devrait être publiée prochainement. D’ici
là, les sociétés expertes font preuve de retenue
dans leurs recommandations et ne se prononcent
pas de façon dogmatique sur son usage. On doit
en revanche insister sur l’importance, si on retient
l’indication d’irradiation mammaire interne, de
procéder en préservant le cœur et en évitant les
zones d’hétérogénéité, comme on l’a vu plus haut.
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