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LA FRANCE DE LA CINQUIÈME RÉPUBLIQUE
L’ÈRE GAULLIENNE
1958 1974
Le 3 juin 1958, le ral De Gaulle était investi des pouvoirs constituants
mettant fin, par même, à la quatrième république. Ce retour, motivé par la crise
algérienne, attestait surtout, pour de Gaulle, de l’échec patent de la quatrième
république et, par conséquent, de la nécessité de renouveler en profondeur l’identité
politique de la France en effaçant les erreurs et les errements du régime mainte fois
dénoncées par lui-même.
En conséquence, de nouveau sur la scène politique, le général de Gaulle
entreprit de refondre les institutions politiques, de rénover la politique étrangère ;
tandis que les Français s’abandonnaient aux délices matériels de la prospérité et aux
joies de la consommation ; transformations en profondeur qui culminèrent avec la
crise de 1968, événement parachevant le passage, pour la France, de la tradition à
la modernité.
I - LA FONDATION GAULLIENNE (1958-1968).
Deux objectifs principaux animaient la pensée politique de De Gaulle depuis
son départ en janvier 1946 : d’une part, la condamnation du régime des partis cher à
la quatrième publique et, d’autre part, la réhabilitation de la nation française à
l’étranger. De cela, il a donc découlé la volonté de fabriquer un nouveau type de
régime et la volonté de refonder une politique extérieure cohérente et vigoureuse.
A) Le renouvellement des institutions (1958-1962).
Dans son discours de Bayeux du 16 juin 1946, Charles de Gaulle avait
énoncé les principes auxquels la nouvelle constitution dut s’adosser.
1/ la constitution.
Tout d’abord la nouvelle constitution fut rédigée par petit comité formé de De
Gaulle, Michel Debré, René Cassin, complétés par 4 ministres d’Etat, anciens de la
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quatrième république, et un conseil consultatif constitutionnel. Le texte était achevé
le 3 septembre 1958. Il fut soumis à référendum le 28 septembre et obtint 79,2% de
oui. Dès lors, le texte put être promulgué le 4 octobre 1958 : la cinquième république
venait de naître.
Elle comportait deux les, législatif et exécutif composés de la manière
suivante :
La nouvelle constitution témoignait d’un régime semi-présidentiel ou semi
parlementaire. En effet, d’un côté, le gouvernement est nommé de plein droit par le
Président de la République, mais de l’autre côté, ce même gouvernement est
responsable devant l’Assemblée Nationale, en vertu de l’article 49-3, qui peut voter
la censure sous certaines conditions. Cependant, si le gouvernement est
responsable, l’assemblée Nationale ne peut que questionner (et non interpeller) le
gouvernement et c’est ce dernier qui fixe l’ordre du jour de l’Assemblée.
Mais le grand gagnant de cette constitution, c’est l’institution présidentielle : en
effet, le Président peut nommer, de plein droit, le premier ministre, peut dissoudre
(4× en 48ans) l’Assemblée Nationale, peut organiser un référendum, ou encore
légiférer par ordonnance. De plus, il dispose de l’article 16 en cas de crise. Nous
en déduisons donc que l’institution présidentielle domine au cœur du pôle exécutif,
qui, lui-même, domine l’ensemble des institutions. Le Président de la République est
bien le centre de gravité du régime.
SENAT
(élu pour 3 ans)
ans)
ASSEMBLEE
NATIONALE
(élue pour 5 ans)
Gouvernement
PRESIDENT DE LA
REPUBLIQUE
(élu pour 7 ans)
CITOYENS
Collège électoral de
80 000 notables
Nomme de plein droit
élisent
Elisent au suffrage universel
Responsabilité
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Le 23 novembre 1958, eurent lieu les élections législatives qui donnèrent la
victoire politique à la nouvelle formation gaulliste : l’U.N.R. (fondée le 1 octobre 1958)
qui obtint 20,4% des suffrages exprimés et 198 députés.
Extrême droite
UNR
Radicaux
MRP
SFIO
PCF
0,5%
20,4%
7,3%
11%
15,7%
19,2%
Nous pouvons d’une part, noter l’effondrement de l’extrême droite sous l’effet
du discours gaulliste à haute teneur nationaliste et, d’autre part, la surreprésentation
de l’UNR obtenue grâce au mode de scrutin majoritaire qui amplifie les résultats
électoraux, de manière à fabriquer de la majorité à l’Assemblée Nationale. Ainsi avec
seulement 20,4% des suffrages, l’UNR obtint 42,6% des députés.
La victoire des gaullistes fut amplement confirmée lorsque le général de
Gaulle devint le premier Président élu le 21 décembre 1958, puis lorsqu’il nomma
Michel Debré comme Premier ministre, le 9 janvier 1959.
2/ la réforme de 1962.
Néanmoins le nouveau régime demandait à être parfait. Après avoir réglé
l’affaire algérienne, de Gaulle entreprit de réformer l’élection du Président de la
République. Ainsi, le 8 juin 1962, il annonça sa réforme afin d’élire le Président au
suffrage universel direct. Le 12 septembre, de Gaulle décidait de soumettre la
réforme au référendum, ce qui mécontenta l’Assemblée. Celle-ci vota donc la
censure contre le gouvernement le 5 octobre 1962. Mais de Gaulle maintint le
référendum qui eut lieu le 28 octobre et donna 61,75% de oui (sur 46,4% de votants),
puis il procéda à la dissolution de l’assemblée, provoquant des élections législatives
anticipées les 18 et 25 novembre 1962 :
18/11
25/11
PCF
21,7%
41 (députés)
SFIO
12,6%
66
MRP
8,9%
55
UNR
31,9%
233/489 = 47,6%/+36 =
55%
Les gaullistes sortaient renforcés de cette première crise politique, pour le
moment la seule de ce type. Le général de Gaulle pouvait, désormais, tiré profit de
cette modification ayant renforcé l’institution présidentielle. Désormais, le Président
devenait l’égal de l’Assemblée Nationale, avec laquelle il partageait la légitimité
procurée par la sanction du suffrage universel. Ce renforcement complétait des
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compétences déjà bien étendues et apportait un terme à l’œuvre institutionnelle du
général de Gaulle soucieux de fonder un ordre neuf.
B) L’ordre neuf (1962-1968).
Avec sa nouvelle constitution, de Gaulle initiait une nouvelle vie politique pour
la France. Le régime des partis s’éloignait définitivement, et la vie politique prenait un
tour nettement plus personnel marquée par l’affirmation monarchique du Président
de la République, la recomposition des forces politiques, qui débouchait sur un
champ politique fortement bipolarisé.
Dotées de nouvelles compétences et élu au suffrage universel direct, le
Président était le centre du système politique. En effet, il disposait tout d’abord du
droit référendaire, autrement dit le pouvoir de consulter directement le peuple et
d’en retirer des avantages en terme de légitimité. De Gaulle usa cinq fois du
référendum :
28/9/58
8/1/61
8/4/62
28/10/62
27/4/69
79,2%
75,2%
91%
61,75%
46,8%
Il lui fut favorable quatre fois, lui apportant le soutien direct du corps électoral,
qu’il interprétait de manière plébiscitaire, c’est-à-dire en sa faveur personnel. Ainsi, la
pratique référendaire renforçait le caractère personnel du pouvoir.
A cela s’ajoutait la pratique du domaine réservé. La notion fut amorcée dès
novembre 1959, puis complètement codifiée le 31 janvier 1964. Elle supposait que le
Président exerce ses pleines compétences en matière de politique étrangère,
d’Europe, de défense, ou de constitution. Pour ce faire, le Président était entouré
d’un super cabinet se substituant au Gouvernement.
Enfin, les conférences de presse, les entretiens télévisés achevaient
d’intensifier la relation directe et personnelle entretenue par le Président et la
population.
Par là, une nouvelle pratique politique prenait forme reposant sur la
personnalisation accrue du pouvoir que le mode de scrutin uninominal facilitait en
présentant aux électeurs, avant tout, un homme, une personne, une personnalité à
tel point que les partis politiques eurent tendance à être relégués au second plan et
subirent, de ce fait, une large recomposition.
La relégation des partis politiques au second plan s’observait dans le cadre de
la relation entre le parti gaulliste l’UNR et son leader Charles de Gaulle. En effet, ce
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dernier recevait le soutien de l’UNR, mais ne fut jamais membre de ce parti, ni
d’ailleurs aucun de ses Premiers ministres successifs : Georges Pompidou (avril 62
juin 68), ou Maurice Couve de Murville (juin 68-juin 69). L’UNR servait à de Gaulle de
point d’appui au sein de l’Assemblée Nationale en lui garantissant de confortables
majorités :
Novembre 1962
Mars 1967
Juin 1968
31,9%
37,7%
46%
233+36
200+44
294+64
Ces confortables majorités étaient aussi obtenues grâce à la capacité
d’attraction exercée par l’UNR à l’égard des formations politiques de droite plus
petites telle que les Républicains Indépendants. D’ailleurs, l’UNR était appelée « les
godillots du général » !
La relégation des partis politiques s’observait également dans la
recomposition dont ils furent l’objet. En effet, la plupart des partis sous la cinquième
république se modifièrent et se recomposèrent systématiquement autour, et au
service, d’une personnalité politique.
La première formation à être le produit de ce phénomène fut justement
l’Union pour la Nouvelle République. Elle se constitua autour du général de Gaulle
le 1er octobre 1958, afin de soutenir son projet politique.
La deuxième étape se déroula à propos de la première élection du Président
de la République, au suffrage universel, en 1965. Face à de Gaulle, la gauche trouva
en François Mitterrand le candidat à lui opposer. Et derrière l’homme qui s’était doté
de la Convention des Institutions publicaines, s’assembla la SFIO afin de donner
naissance à la Fédération de la Gauche Démocratique et Socialiste le 10
septembre 1965 ; véritable cartel électoral au service de la candidature de François
Mitterrand.
Les élections présidentielles donnèrent la victoire à de Gaulle avec 54,5% des
S.E. au deuxième tour, le 19 décembre 1965 (Au premier tour du 5 décembre 1965 :
De Gaulle = 43,7% ; Mitterrand = 32,2% ; Lecanuet = 15,9% ; Tixier = 5,3%.).
Cette première élection joua le rôle de révélateur des modes de
fonctionnement de la cinquième république : l’élection présidentielle devenait l’enjeu
majeur polarisant toutes les attentions et coagulant les énergies partisanes. Ainsi,
après l’UNR, et la FGDS, ce fut la création du Centre Démocrate, le 2 juin 1966,
autour de la personne de Jean Lecanuet (MRP+CNIP+Radicaux).
Les coagulations successives opérées autour d’une personnalité entraînèrent
la disparition des anciens partis de la quatrième république au profit de nouvelles
formations qui tendirent à se polariser autour de deux pôles, l’un à droite et l’autre à
gauche.
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