S Éducation thérapeutique des patients dans l’ostéoporose

Éducation thérapeutique
des patients dans l’ostéoporose
E. Lespessailles
(Service de rhumatologie, CHR Orléans-La Source)
Si l’éducation thérapeutique du patient
(ETP) est recommandée dans la prise en
charge des rhumatismes inflammatoires
chroniques, sa place dans l’ostéoporose n’est
pas encore bien définie. À l’heure où le point
de vue du patient est de plus en plus présent
dans les indices d’évolutivité et de suivi des
maladies rhumatismales, l’ETP dans l’ostéo-
porose pourrait également se justifier pour :
améliorer sa compréhension de la maladie,
prévenir les complications liées à l’ostéo-
porose, en particulier les fractures,
améliorer son adhésion aux traitements ainsi
que sa gestion de ceux-ci,
améliorer sa qualité de vie,
favoriser l’expression de son vécu de la
maladie,
favoriser le recours au système de soins à
bon escient.
Une confusion est souvent faite entre les dif-
férents types d’actions :
l’accompagnement des patients,
l’information,
l’éducation thérapeutique au sens strict.
Cette distinction entre accompagnement,
information et ETP est importante, car ces
actions ne sont peut-être pas aussi perfor-
mantes les unes que les autres, notamment
dans le domaine de l’ostéoporose, comme le
montrent un certain nombre d’études(1-3).
Les données de la littérature spécifiques à l’ETP
dans l’ostéoporose sont très peu nombreuses.
L’impact de l’éducation par les professionnels
de santé sur les comportements des patients
dans le domaine de l’ostéoporose a fait récem-
ment l’objet d’une revue systématique de la
littérature(4). Les 9 études colligées concernent
une population essentiellement féminine, âgée
de 45 à 69ans. De manière générale, les inter-
ventions se font soit en session de groupe, soit
en entretien individuel, d’une durée pouvant
aller de 15 à 120mn. Il s’agit le plus souvent
d’une seule intervention, et les durées de
suivi sont courtes, de 1 à 9mois. Ces études
montrent que ces sessions d’ETP entraînent une
amélioration des scores de connaissance sur
l’ostéoporose et un accroissement de l’adhésion
aux exercices physiques. Parmi ces 9 études,
1seule a évalué l’intérêt de l’ETP dans l’ostéo-
porose, sur l’adhésion au traitement. Après
9mois d’intervention, le résultat était négatif.
Dans une autre revue de la littérature, avec
une sélection fondée sur des critères métho-
dologiques stricts, les auteurs n’ont retenu que
7études, et seules 5 d’entre elles comportaient
vraiment une composante d’éducation théra-
peutique structurée. La lecture critique de ces
5études montre que, en réalité, il s’agissait
davantage de procédures d’information avec
remise de brochures ou d’accompagnement
des patients par appel téléphonique. Sur ces
7études, 4 rapportaient un effet positif de
l’ETP dans la prise en charge de patientes
ostéoporotiques, mais avec des effets modestes
si on tenait compte de l’effet-taille(5).
Sous l’égide de la Société française de rhu-
matologie (SFR), les sections spécialisées ETP
et SFR OS ont mis en place un groupe de
travail dont l’objectif est de développer et de
valider un instrument de mesure des besoins
et des attentes en ETP dans la prise en charge
de patients atteints d’ostéoporose. Si l’édu-
cation thérapeutique dans l’ostéoporose se
développe progressivement, avec une bonne
implication des représentants de patients
dans l’élaboration et l’optimisation des pro-
grammes, le chemin vers une ETP spécifique,
adaptée, bien évaluée et validée est encore
long.
1. Guilera M, Fuentes M, Grifols M, Ferrer J, Badia X; OPTIMA
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OPTIMA study. Osteoporos Int 2006;17(5):664-71.
2. Briot K, Ravaud P, Dargent-Molina P, Zylberman M,
Liu-Leage S, Roux C. Persistence with teriparatide in
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Brown JP. The impact of two educational interventions
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medications: a systematic literature review. Osteoporos
Int 2009;20(12):2127-34.
Références bibliographiques
40 | La Lettre du Gynécologue 371 avril 2012
GRIO
Coordonné par T. Thomas
(Saint-Étienne)
www.grio.org
Dossier thématique
Grossesse et cancer du sein
Coordonnateurs: Brigitte Tebeka et Virginie FourchotteSommaire
Grossesse et cancer du sein
Pregnancy and breast cancer
B. Raccah-Tebeka, C. Jamin, V. Fourchotte
Cancer du sein, parité et allaitement
Breast cancer, parity and breastfeeding
A. Recoules-Arché, V. Fourchotte
Prise en charge du cancer du sein
pendant la grossesse
Breast cancer management in pregnancy
C. Cuvier, F. Ledoux, F. Coussy, M. Espié
Grossesse après cancer du sein
dans un contexte de mutation
des gènes BRCA1 ou BRCA2
Pregnancy after breast cancer in BRCA1/2 mutation
carriers
A. de la Rochefordière
Grossesse survenant après un cancer du
sein : le point de vue du gynécologue
Pregnancy after breast cancer:
the point of view of the gynecologist
C. Lefebvre-Lacœuille, V. Combaud, L. Catala,
L. Sentilhes, Ph. Gillard, Ph. Descamps
Traitements médicaux du cancer du sein
et conséquences sur la fertilité
Medical treatment of breast cancer and impact
on fertility
D. Berton-Rigaud, C. Gourmelon, E Bourbouloux,
S. Sadot-Lebouvier
Préservation de la fertilité dans le cadre
du cancer du sein
Fertility preservation in breast cancer
C. Decanter, A. Mailliez
Prise en charge de l’infertilité
après cancer du sein
Management of infertility after breast cancer
C. Rousset-Jablonski, A. de La Rochefordière, P. This
Numéro Grossesse et cancer du sein
Mars 2012
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Copyright gracieux
8 | La Lettre du Sénologue 55 - janvier-février-mars 2012
DOSSIER THÉMATIQUE Grossesse et cancer du sein
* Cabinet médical, gynécologie
obstétrique, 11, avenue d'Eylau, Paris.
** Département de chirurgie oncolo-
gique, institut Curie, Paris.
Cancer du sein,
parité et allaitement
Breast cancer, parity and breastfeeding
Aude Recoules-Arché*, Virginie Fourchotte**
L
e cancer du sein est une préoccupation majeure
de santé publique. L’Organisation mondiale de
la santé (OMS) estime à 1,2 million le nombre
de cancers du sein diagnostiqués dans le monde en
2002, responsables la même année de 410 000 décès.
L’épidémiologie de ce cancer a été largement étudiée
dans le monde avec identification de facteurs de
risque associés : génétiques, environnementaux,
nutritionnels et hormonaux. Son incidence est en
augmentation, principalement dans les pays occi-
dentaux, atteignant actuellement 1 femme sur 10.
Les changements de mode de vie, avec notamment
la diminution de la parité et de l’allaitement, ont été
décrits comme étant des facteurs de risque de cancer
du sein. Le facteur déclenchant serait l’hyperestro-
génie associée.
De nombreuses études épidémiologiques tentent
de classer les facteurs de risque en rapport avec la
reproduction et l’allaitement et les différents types de
cancer du sein sur les plans histologique et biologique
(présence de mutations génétiques, caractère invasif
ou in situ, récepteurs hormonaux présents ou non).
Effets de l’allaitement
et de sa durée
sur le risque de cancer du sein
En 2002, une méta-analyse regroupant 47 études
épidémiologiques réalisées dans 30 pays, incluant
50 302 femmes atteintes de cancer du sein et
96 973 femmes indemnes, a été publiée dans le
Lancet (1). Le but était de savoir si la parité, l’allai-
tement et la durée de l’allaitement (0, moins de
6 mois, de 7 à 18 mois, de 19 à 30 mois, de 31 à
54 mois et plus de 54 mois) constituaient un facteur
protecteur de cancer du sein. Les autres paramètres
liés à la reproduction ont été étudiés (âge de la
première grossesse, parité, âge de la ménopause)
ainsi que les autres facteurs classiques épidémio-
logiques de cancer du sein.
Les 2 groupes étaient comparables avec une parité
de 2,2 versus 2,6. Le taux de femmes nullipares était
de 16 % versus 14 %, et celui de l’allaitement était
de 71 % versus 79 %.
Le taux de femmes allaitantes dans les pays déve-
loppés est en moyenne de 50 % contre plus de 90 %
dans les pays en voie de développement, au Japon et
en Scandinavie. La durée d’allaitement est plus courte
(8,7 mois versus 29,2 mois) dans les pays développés.
Il ressort de cette étude que, sans allaitement,
chaque naissance vivante permettrait de baisser
significativement le risque de cancer du sein de 7,0 %
(p < 0,0001). Il apparaît que l’allaitement est un
facteur protecteur de cancer du sein indépendant de
la parité avec une diminution du risque de 3,8 % par
enfant allaité plus de 12 mois (p < 0,0001).
Effets de la parité
et de l’allaitement en fonction
du type histologique
(invasif ou in situ)
En juillet 2011, l’étude Women’s Health Initiative
(WHI) [2] cherchait à identifier les facteurs de risque
ou protecteurs de carcinome canalaire in situ (CCIS)
du sein chez les femmes ménopausées, et cherchait
à savoir notamment si les facteurs liés à la repro-
duction avaient le même impact sur les cancers in
situ et sur les cancers invasifs, ce qui semblerait
logique puisque les auteurs indiquent que le stade
in situ précède le stade invasif.
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La Lettre du Sénologue n° 55 - janvier-février-mars 2012 | 9
Points forts Mots-clés
Cancer du sein
Parité
Allaitement
Il s’agit d’une étude prospective randomisée avec
étude observationnelle. Au total, 64 060 femmes
ont été incluses et 664 ont déclaré un CCIS dont le
facteur de risque identifié était la ménopause tardive
(> 55 ans). En revanche, le facteur protecteur était
la multiparité à partir de 5 grossesses (HR : 0,70 ;
IC95 : 0,47-1,03).
La multiparité (de 1 à 4 grossesses) et l’âge au cours
de la première grossesse (< 20 ans versus > 30 ans)
sont à la limite de la significativité comme marqueurs
protecteurs (HR : 1,32 ; IC
95
: 0,92-1,90 ; p = 0,13
pour l’âge lors de la première grossesse). L’allaite-
ment et la durée de l’allaitement n’influencent pas
l’incidence du CCIS.
Les résultats sont superposables quel que soit le
grade histologique tumoral (bas, moyen ou haut
grade).
En 2010, Ma et al. (3) se sont interrogés sur le risque
de carcinome in situ (CIS) et de cancer invasif du
sein en rapport avec les grossesses chez les femmes
ménopausées.
Il s’agit de l’étude de cohorte prospective CTS (Cali-
fornia Teachers Study), menée de 1995 à 2007 et
incluant 133 479 femmes. Seules les femmes méno-
pausées (53 440) ont été incluses dans l’étude.
Les facteurs de risque étudiés étaient la parité (0,
1, 2, 3, 4 et plus), l’âge au moment de la première
grossesse menée à terme (inférieur à 21 ans, entre
22 et 24 ans, entre 25 et 29 ans, entre 30 et 34 ans
et plus de 35 ans), la durée de l’allaitement (0, moins
de 6 mois, de 6 à 11 mois, de 12 à 23 mois et plus
de 24 mois), l’antécédent de nausées et vomis-
sements gravidiques et la survenue ou non d’une
prééclampsie.
Ont été différenciés les CIS d’une part, quels que
soient leurs types histologiques (lobulaire ou cana-
laire) [n = 628], et les carcinomes invasifs (n = 2 828)
d’autre part.
Les résultats sont les suivants : la parité (uni- ou
multi-) constitue à elle seule un facteur protecteur
de CIS (RR : 0,85 ; IC
95
: 0,69-1,04) et de cancer
invasif (RR : 0,91 ; IC
95
: 0,83-1,00). Le risque diminue
dans les 2 cas avec l’augmentation de la parité.
L’âge au cours de la première grossesse est un facteur
de risque indépendant de la parité ; les femmes âgées
de plus de 35 ans pour leur première grossesse voient
leur risque de CIS doubler (RR : 2,18 ; IC
95
: 1,36-
3,4) et une augmentation de 27 % de leur risque de
développer un cancer du sein invasif (RR : 1,27 ; IC
95
:
0,99-1,65) par rapport aux femmes âgées de moins
de 21 ans au moment de leur première grossesse.
La durée de l’allaitement n’était pas associée signi-
ficativement au risque de CIS ou de cancer invasif.
Par ailleurs, les risques calculés pour la parité, l’âge
de la première grossesse et l’allaitement ne variaient
pas, qu’il s’agisse d’un CIS ou d’un cancer invasif.
Les auteurs précisent que, pour les cancers invasifs,
les femmes multipares avec une première grossesse
jeune dont les récepteurs hormonaux sont positifs
(RE+ : récepteurs aux estrogènes positifs et RP+ :
récepteurs à la progestérone positifs) ont un risque
de cancer réduit, alors que ce n’est pas le cas pour
les patientes dont les récepteurs hormonaux sont
négatifs (RE– ; RP–).
Effet de la parité et
de l’allaitement en fonction
du statut hormonal tumoral
En juillet 2006, une méta-analyse de Ma et al. (4)
regroupant les études épidémiologiques recherche
le lien entre cancers du sein dont les récepteurs
hormonaux sont positifs (RE+ ; RP+), ceux dont les
récepteurs hormonaux sont négatifs (RE– ; RP–) et
les paramètres liés à la reproduction (parité, âge
lors du premier accouchement, allaitement, âge
de la ménarche).
Les résultats confirment un effet protecteur de la
parité pour les cancers hormonaux positifs, chaque
naissance réduisant le risque de cancer de 11 %. L’âge
avancé lors de la première grossesse constitue un
facteur de risque de cancers hormonaux dépendants
estimé à 27 %, de manière plus marquée chez les
patientes ménopausées. Dans cette étude, il n’y a
pas d’impact sur les cancers non hormonopositifs.
En revanche, l’allaitement a un effet protecteur
décrit quel que soit le statut hormonal tumoral.
Les auteurs supposent que les mécanismes protec-
teurs de l’allaitement sont différents de ceux liés à
la parité et à l’âge tardif de la première grossesse.
En juillet 2008, Lord et al. (5) reprennent comme
hypothèse les résultats de l’étude décrite précédem-
ment (l’âge jeune lors de la première grossesse et
Highlights
Although we have known
since1920 that parity and
breast feeding are protective
factors for breast cancer, we
still cannot state with preci-
sion the number of births and
the duration of breast feeding
necessary to produce this effect.
Recent studies are beginning to
examine breast feeding dura-
tion and levels of parity in
relation to histological, hormo-
nologic and genetic subtypes.
The World Health Organisa-
tion recommends a 6-month
breast feeding period for pedi-
atric rather than carcinologic
reasons.
Keywords
Breath Cancer
Parity
Breath feeding
»S’il est admis depuis 1920 que la parité et l’allaitement sont des facteurs protecteurs de cancer du sein, nous ne
sommes pas actuellement capables de répondre avec finesse à cette question en termes de nombre d’accouchements
et de durée d’allaitement.
»Les études récentes commencent à s’intéresser à la durée et au curseur de la parité en fonction des sous-types
histologiques, hormonologiques et génétiques.
»
L’Organisation mondiale de la santé recommande une durée d’allaitement de 6 mois pour des raisons pédiatriques
et non carcinologiques.
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La Lettre du Sénologue
n° 55 - janvier-février-mars 2012
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27
Points forts Mots-clés
Aménorrhée chimio-
induite
Préservation de la
fertilité
Chimiothérapie
adjuvante
Cancer du sein
Hormonothérapie
»
L’aménorrhée chimio-induite est le paramètre le plus utilisé pour évaluer le risque d’infertilité après
traitement médical d’un cancer du sein.
»
L’âge, le type de chimiothérapie et les doses utilisées sont les facteurs déterminants du risque
d’amén orrhée chimio-induite.
»
Le cyclophosphamide et les anthracyclines sont à haut risque d’aménorrhée ; l’effet des taxanes et des
anticorps monoclonaux n’est actuellement pas bien défini.
»Le projet de grossesse doit être discuté dès la prise en charge initiale du cancer du sein, avant le début
du traitement, pour mettre en œuvre, le cas échéant, les démarches utiles à la préservation de la fertilité.
adaptée vont être fondamentales dès la consul-
tation d’annonce.
Chimiothérapie
et risque d’aménorrhée
Évaluation de la fertilité après
traitement
La chimiothérapie adjuvante induit fréquemment
une aménorrhée, dont le caractère réversible ou
non, dépend des réserves ovariennes initiales et des
effets délétères du traitement sur le tissu ovarien
(follicules ovariens et cellules de la granulosa). Il est
généralement admis que l’âge physiologique des
ovaires chez une patiente traitée pour un cancer
est de 10 ans supérieur à l’âge réel.
L’évaluation dans la littérature médicale du risque
d’aménorrhée chimio-induite (ACI) est difficile du
fait de l’hétérogénéité de sa définition dans les diffé-
rentes études. L’ACI peut être définie comme l’absence
de cycles plus de 3, 6 ou 12 mois par rap port au
début ou à la fin de la chimiothérapie. Pour un même
protocole, le pourcentage d’ACI peut donc différer
en fonction de la définition : avec le CMF, le pour-
centage d’aménorrhée est respectivement de 50 %,
70 % et 80 % à 3, 6 et 12 mois (5). Il semble que
la meilleure définition de l’ACI soit la persistance
d’une aménorrhée 12 mois après la fin de la chimio-
thérapie. La durée de suivi, les caractéristiques des
patientes étudiées et les traitements reçus (type de
chimiothérapie, hormonothér apie ou non) rendent
compte également de l’hétérogénéité des études
rapportées dans la littérature.
La reprise de cycles réguliers n’est pour autant pas
synonyme de fertilité optimale et les études qui
n’évaluent la réserve ovarienne qu’à travers les cycles
menstruels sous-estiment l’impact de la chimio-
thérapie sur la fertilité ultérieure.
De ce fait, d’autres marqueurs de fertilité sont en cours
d’évaluation. Des marqueurs biologiques tels que l’hor-
mone antimüllérienne (AMH), l’inhibine B, l’estradiol,
la FSH à J2 et à J5 du cycle ont été étudiés de même
que le compte des follicules antraux par échographie
transvaginale. Une diminution des réserves ovariennes
se manifeste par des taux bas d’estradiol, d’AMH, d’inhi-
bine B (produits par les cellules de la granulosa des
follicules ovariens) mais aussi par une diminution des
follicules antraux. Ces tests de réserve ovarienne chez
la femme en bonne santé ou hypofertile ne permettent
pas de prédire les chances de grossesse mais évaluent
le risque de ménopause précoce. La validité de ces tests
après chimiothérapie n’est actuellement pas établie.
Facteurs influençant le risque
d’aménorrhée chimio-induite
L’âge est le facteur prédictif d’ACI le plus impor-
tant. Dans la plupart des études, la comparaison
a lieu entre les patientes de moins et de plus de
40 ans, même si, en réalité, il semble que le risque
diffère plutôt entre les patientes de moins ou de
plus de 30 ans. Après traitement par CMF, 61 % des
patientes de moins de 40 ans et 95 % des patientes
de plus de 40 ans ont une ACI. Avant 30 ans, après
6 cycles de CMF, le risque d’ACI est estimé à 3 % (6).
Dans l’étude française PACS 01, 72 % des femmes
traitées avant l’âge de 40 ans par 6 cycles de
5-fluorouracil, épirubicine, cyclophosphamide
(FEC) à 1 00 mg /m
2
récupèrent des cycles à 1 an
tandis qu’après 40 ans seules 10,5 % ont à nouveau
des cycles. Sous 3 FEC 100-3 docétaxel, 71,5 % des
patientes avant 40 ans et 20,5 % des patientes après
40 ans sont à nouveau réglées à 1 an (7).
Les doses de chimiothérapie utilisées (en particu-
lier le nombre de cures) participent au risque d’ACI.
Le type de protocole de chimiothérapie influence
le risque d’ACI. Les alkylants sont les molécules les
plus gonadotoxiques. Les produits de chimiothérapie
peuvent être classés selon leur risque de gonado-
toxicité en 4 groupes (tableau I).
Tableau I. Risque d’aménorrhée sous chimiothérapie (recommandations ESMO 2010).
Risque d’aménor-
rhée permanente
Haut risque
(> 80 %)
Risque intermé-
diaire (80 %-20 %)
Faible risque
(< 20 %)
Risque
inconnu
Mono-
chimiothérapie
Cyclophos-
phamide
Anthracyclines Méthotrexate
5-FU
Taxanes
Anticorps
monoclonaux
Poly-
chimiothérapie
CMF, FAC,
FEC x 6
> 40 ans
CMF, FAC, FEC x 6
entre 30 et 39 ans
AC, EC x 4 > 40 ans
CMF, FEC,
FAC x 6 < 30 ans
AC x 4 < 40 ans
AC : adriamycine-cyclophosphamide ; CMF : cyclophosphamide-méthotrexate-5-fluorouracil ; FAC : 5-fluorouracil-
adriamycine-cyclophosphamide ; FEC : 5-fluorouracil-épirubicine-cyclophosphamide.
1. Jemal A, Bray F, Center MM,
Ferlay J, Ward E, Forman D. Global
cancer statistics. CA Cancer J Clin
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comparaison aux États-Unis. Bull
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3. Azim HA Jr, Santoro L, Pavlidis N
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4. Dalberg K, Eriksson J, Holm-
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5. Padmanabhan N, Wang DY,
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rapy for early breast cancer. Eur J
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6. Ludwig Breast Cancer Study
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rapy with or without prednisone
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7. Berliere M, Dalenc F, Malin-
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Références
bibliographiques
Séno 55mars2012.indd 27 22/03/12 10:45
26
| La Lettre du Sénologue
n° 55 - janvier-février-mars 2012
DOSSIER THÉMATIQUE
Grossesse et cancer du sein
* Institut de cancérologie de l’Ouest,
centre René-Gauducheau, Saint-
Herblain.
Traitements médicaux
du cancer du sein et
conséquences sur la fertilité
Medical treatment of breast cancer and impact on fertility
D. Berton-Rigaud*, C. Gourmelon*, E. Bourbouloux*, S. Sadot-Lebouvier*
L
e cancer du sein est le cancer féminin le plus
fréquemment diagnostiqué dans le monde. En
2008, il représentait 23 % des nouveaux cas
de cancers (1,38 million de cas) [1]. La proportion
de femmes jeunes a été étudiée dans différentes
populations : actuellement on estime que 2 % des
cancers du sein sont diagnostiqués entre 20 et 34 ans
et 11 % entre 35 et 44 ans. En France en 2010, 52 000
nouveaux cas de cancers du sein ont été diagnosti-
qués dont plus de 6 000 chez les femmes de moins
de 40 ans (2).
Le traitement du cancer du sein localisé est fondé
sur les caractéristiques de la patiente et de la tumeur
et repose sur une prise en charge multidisciplinaire
associant chirurgie, radiothérapie et traitements
médicaux (chimiothérapie, thérapies ciblées et
hormonothérapie). La réalisation d’une chimiothé-
rapie adjuvante est recommandée si elle permet une
diminution du risque de rechute d’au moins 5 % à
10 ans. Le jeune âge (≤ 35 ans) au diagnostic de
cancer du sein étant un facteur pronostique péjoratif,
ces patientes sont souvent éligibles à une chimio-
thérapie adjuvante. Le protocole de chimiothérapie
associant cyclophosphamide, méthotrexate et
5-fluorouracile (CMF) n’est plus guère utilisé, mais
son effet sur la fertilité a été bien étudié. Les chimio-
thérapies actuellement validées incluent principale-
ment les anthracyclines et les taxanes. L’utilisation
de trastuzumab, un anticorps monoclonal ciblant
HER2, en association à la chimiothérapie, est systé-
matique en cas de surexpression ou d’amplification
de HER2. Lorsque la tumeur exprime les récepteurs
hormonaux (estrogène et/ou progestérone), il existe
une indication d’hormonothérapie adjuvante. Chez
les patientes non ménopausées, un traitement par
tamoxifène est recommandé. Les agonistes de la
LH-RH sont une alternative thérapeutique qui n’a
pas prouvé sa supériorité par rapport au tamoxifène.
Cancer du sein et fertilité
Avec le recul actuel de l’âge de la première gros-
sesse, la question de la fertilité devient centrale dès
la prise en charge initiale du cancer du sein pour de
nombreuses patientes n’ayant pas pu mener à bien
leur projet parental.
Le fait d’avoir reçu une chimiothérapie ou une
hormonothérapie dans le cadre du traitement d’un
cancer du sein n’est pas une contre-indication à la
grossesse. En effet, le risque de récidive de la maladie
n’est pas augmenté en cas de grossesse (3). Après
traitement d’un cancer du sein, la grossesse est clas-
siquement considérée comme à risque, notamment
de petit poids de naissance (4) sans qu’il y ait un
surrisque de malformations. Il est recommandé de
respecter un délai de 2 à 3 ans après la fin des trai-
tements ayant comporté une chimiothérapie, avant
de programmer une grossesse, principalement pour
éliminer le risque d’une rechute précoce.
Parmi les effets indésirables à long terme des trai-
tements médicaux du cancer du sein chez la femme
jeune, le risque d’aménorrhée chimio-induite est
à prendre en compte. Pour les femmes ayant un
projet parental (3/4 des femmes de moins de 35 ans
sans enfant au diagnostic souhaitent préserver leur
fertilité) ou tout simplement pour les femmes qui
vont être concernées par les conséquences à long
terme d’une ménopause précoce, une information
détaillée et, le cas échéant, une prise en charge
Highlights
Chemotherapy-induced amen-
orrhea is the most frequently
used parameter for the evalu-
ation of infertility risk after
medical treatmen t of b reast
cancer. Age, the type of
chemotherapy and the doses
administered are the factors
determining the risk of chemo-
therapy-induced amenorrhea.
Cyclophosphamide and anthra-
cyclines are linked to a high
risk of amenorrhea; the effect
of taxanes and monoclonal
antibodies has not yet been
established.
Planned pregnancy should be
discussed as soon as a breast
cancer diagnosis is made,
before the start of treatment,
in order to implement, if need
be, the necessary measures for
infertility prevention.
.
Keywords
Chemotherapy related
amenorrhée
Fertility preservation
Adjuvant chemotherapy
Breast cancer
Hormonotherapy
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VIENT
DE PARAÎTRE
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