Colloque ULB/METICES « Secteur non marchand, milieux associatifs, organismes communautaires : des mondes en recomposition » Suite à vos remarques voici quelques précisions méthodologique, théorique et bibliographique (cf. infra) PROPOSITION DE COMMUNICATION. 1er axe de travail : Les vicissitudes du Social. Hervé Jory, Maître de conférences, Université de Lorraine, 19ième section sociologie. Laboratoire de rattachement : 2L2S (Laboratoire Lorrain en Sciences Sociales). Département de sociologie/ethnologie, UFR SHS Metz. Ile du Saulcy BP 30309 57006 Metz cedex 1 [email protected] I Titre : La recomposition du social : pour quel(s) régime(s) d’action ? (titre provisoire) Le développement du secteur qualifié de non-marchand est aujourd’hui particulièrement soumis aux tensions générées par « la nouvelle gestion publique ». L’objectif de cette communication vise à préciser l’expression de ces tensions, ses enjeux et les lieux de recomposition du Social qu’elles impliquent. L’activité associative, bien que porteuse de valeurs et de formes d’engagement distinctes ou précisément parce qu’elle est porteuse de ces valeurs, n’échappe pas à ces tensions. Les pressions isomorphiques émanant de l’environnement institutionnel précipitent souvent les valeurs alternatives portées par les associations dans des régimes d’action nourris par le souci d’efficacité dans la mise en œuvre de dispositifs publics. Il y a aujourd’hui nombre d’associations gérées par des professionnels du travail social se pliant aux réglementations étatiques. Pour autant, sans relever du service public, elles assurent des missions de service public. Dans ce contexte, les formes de régulation du travail social se transforment. Dans le champ qui nous concerne, c’est-à-dire celui des politiques publiques de lutte contre le chômage, il s’agira d’explorer les formes d’action encastrées dans des cadres plus ou moins intentionnels et plus ou moins institutionnels sous-tendus par des objectifs opérationnels de formation et de retour à l’emploi. Cependant la recherche de l’efficience met aux prises des rationalités diverses et parfois contradictoires générant aussi des effets pervers par rapport à cette recherche elle-même. Le terrain sur lequel va reposer cette communication s’appuie sur une recherche au long cours menée depuis une dizaine d’années concernant un tissu associatif impliqué dans la mise en œuvre de l’insertion par l’activité économique (IAE) mais pas seulement. Elle a déjà fait état d’une transformation de la structure générale du réseau des relations impliquant associations et institutions de l’emploi et a conduit à une réflexion sur la question de l’innovation sociale au risque de l’isomorphisme institutionnel. Nous préciserons entre autre dans le cadre de cette communication la qualité des régimes d’action à l’origine des recompositions en cours. 1 Colloque ULB/METICES « Secteur non marchand, milieux associatifs, organismes communautaires : des mondes en recomposition » Mots clés : section non marchand, économie sociale et solidaire, politiques sociales, politiques d’emploi, chômage, associations, nouvelle gestion publique II Quelques précisions méthodologique, théorique et bibliographique. Le terrain a été constitué par un ensemble d’associations et d’entreprises d’insertion impliquées dans des activités d’aide et de soutien aux résolutions de problèmes sociaux d’ordre éducatif (aide aux devoirs, formations, réorientations…) d’insertion économique et sociale (aide à la création d’entreprise, micro-crédits, aide à la recherche d’emploi, mise en emploi via des ateliers d’insertion ou des chantiers d’insertion, d’hébergement…) de santé (soutien psychologique voire psychiatrique, prise en charge et lutte contre la dépendance…). Initialement, les monographies au nombre de dix procèdent d’une investigation au long cours réalisée une première fois en 2003 puis en 2011 pour les mêmes structures. A l’occasion de la deuxième phase d’entretiens une association avait disparu et un autre s’était implantée dans un autre territoire. Des entretiens ont quand même été réalisés auprès d’un ancien membre pour le premier cas et le responsable pour le second cas. Enfin, en 2014 (en cours de réalisation) seules deux structures ont été privilégiées ; un centre social et une structure développant à la fois des chantiers d’insertion et des entreprises d’insertion. S’agissant de la communication qui est proposée ici dont la thématique est la recomposition du social dans l’axe « les vicissitudes du Social » nous nous efforcerons de faire ressortir les lignes de force qui participent à une reconfiguration du travail social. A la mise en place, de ce que nous pourrions appeler, de formes de rationalisation du travail social dans le cadre notamment de la nouvelle gestion publique. Ces structures sont situées sur un territoire (Borny) comportant près de 15 000 habitants, « périphérique » d’une agglomération constituée elle-même hors territoire concerné de près 125 000 habitants (Metz). La structuration du territoire comparée à l’agglomération au regard des principaux indicateurs socio-économiques montre une sur-représentation de la population jeune des moins de vingt ans (39% contre 22%), d’une taille des ménages de quatre personnes et davantage plus importante (48,5% contre 15,5%), d’un taux de chômage plus important (près de 30% contre 12,6%). L’une des caractéristiques culturelles de ce territoire est une proportion plus forte d’individus issus de l’immigration (près de 24% contre 6%), un taux de bas revenu plus élevé (41,6% contre 28%) et enfin il concentre près d’un quart des bénéficiaires du RMI/RSA1. Un taux de sortie de l’école avant la classe de troisième important (41% contre28%). La mobilité résidentielle de la population y est plus faible (22% contre 36%), un taux d’équipement en voiture inférieur (27% contre 38%). Enfin, ce territoire a fait et fait encore l’objet de diverses préoccupations locales de type Grand projet de ville et a été à plusieurs reprises labellisées zone d’intervention sous des acronymes distincts (ZEP, ZUP, zone franche…). Le choix des monographies s’est effectué sur la base de leur dimension (nationale, locale), de leur implication dans l’espace du développement local et de leurs actions économiques et sociales. Les principaux indicateurs de recherche ont porté sur leurs organisations interne et externe, leur recours au salariat/bénévolat, leur mode de financement, leurs liens avec les 1 Respectivement Revenu minimum d’insertion et Revenu de solidarité active. Ces données issues de l’INSEE, l’ANPE/Pôle emploi, La Caisse d’allocation familiale, doivent être pondérées car liées à la réglementation de la distribution des allocations, des inscriptions en tant que demandeurs d’emploi. 2 Colloque ULB/METICES « Secteur non marchand, milieux associatifs, organismes communautaires : des mondes en recomposition » institutions et d’autres associations. Dans un premier temps2 les entretiens ont concerné les responsables locaux des associations et une partie du personnel, la seconde investigation (en 2011) a concerné les responsables pour l’essentiel. Enfin, pour la dernière phase, ont été interrogés deux responsables de service ou de pôle d’insertion ainsi que quatre salariés titulaires d’un contrat unique d’insertion (CUI) ou de contrat unique d’accompagnement dans l’emploi (CUAE). Ces différentes investigations ont été menées sur la base de guides d’entretien semi-directifs et à questions ouvertes sur des axes de recherche qui ont trait aux formes de partenariat et à l’action des structures dans la mise en œuvre de la politique publique de lutte contre le chômage et pour les politiques dites de cohésion sociale. Sur la base de ces axes il est question de comprendre les recompositions en cours, les marges de manœuvre des structures, les transformations du « cœur du métier » pour reprendre l’expression d’une responsable d’un secteur d’insertion. L’inscription théorique d’ensemble relève d’une démarche socio-économique plus précisément socio-institutionnelle pour analyser les politiques publiques s’inspirant du « Workfare » imposant de façon plus ou moins contraignante des régimes d’action poursuivant des objectifs parfois contraires à ceux affichés par les dispositifs eux-mêmes. La recomposition du Social interroge la notion et la réalité du Social, comme forme d’action « encastrée » dans des cadres institutionnels, devenues perméables non seulement à des structurations normatives de l’ordre institutionnel interne (l’atteinte d’objectifs opérationnels de retour à l’emploi, sorties dynamiques, développement des activités marchandes…) mais aussi externe car dépendantes de contraintes qui excèdent cet ordre (pour faire bref, la transformation économique des activités y compris par voie de conséquence celle de l’insertion). En terme de bibliographie les références à des auteurs qui s’inscrivent dans le courant néo-institutionnaliste occuperont une place importante tels que DiMaggio et Powel, Fligstein, Granovetter…ainsi que des travaux plus spécifiques à la sociologie des services tels que ceux de J.L. Laville pour exemples. 2 Amadio S., Engels X., Jory H. « L’association fait-elle partie de l’économie sociale et solidaire ? », Rapport commandité par la Délégation interministérielle à l’innovation sociale et à l’économie sociale, ERASE, GREE, avril 2003 3