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Résumé :
Cette thèse s‟intéresse au développement phonologique et lexical précoce d‟enfants
arabophones d‟origine tunisienne. Son objectif est de considérer à la fois l‟influence des
contraintes articulatoires (maturité phonatoire) et les caractéristiques de l‟input (LAE :
langage adressé à l‟enfant) dans les premières productions lexicales. Le corpus de cette
étude longitudinale est constitué de productions spontanées de 8 enfants arabophones qui
on été enregistrés à leur domicile en situation de communication naturelle avec leurs mères
entre 11 et 24 mois. L‟analyse des données collectées s‟effectue en deux parties. Dans un
premier temps, nous mesurons l‟influence des contraintes articulatoires (biomécaniques) en
examinant l‟évolution de la complexité phonétique des premiers mots en utilisant l‟Indice
de Complexité Phonétique (ICP) de Jakielski (2000). Dans un second temps, nous tentons
d‟évaluer les effets de l‟input maternel par la fréquence d‟occurrence des sons présents
dans le LAE. Les effets de ces deux facteurs sont observés en fonction des différents stades
de développement. Les résultats découlant de notre analyse montrent que la complexité
phonétique des productions enfantines augmente avec l‟âge et la taille du vocabulaire. Au
cours du développement les enfants produisent des mots de plus en plus complexes mais
dont la complexité est toujours inférieure à celle des mots visés (cibles). Les premières
réalisations enfantines procèdent ainsi d‟une forme de « sélection lexicale » que les enfants
semblent opérer en fonction de leur maturité phonatoire. Nous avons observé également
que la valeur de la complexité phonétique des mots cibles (LAE) est inférieure à celle des
mots adultes, ce qui semble témoigner d‟une adaptation des mères aux capacités de
l‟enfant en produisant des mots dont la forme sonore est simplifiée. Par ailleurs, les
inventaires phonétiques établis révèlent que l‟acquisition du système consonantique est
guidée aussi par l‟influence de la fréquence des consonnes présentes dans le LAE. Les
consonnes bilabiales, approximantes et nasales ont été acquises plus tôt en raison de leur
plus haute fréquence dans le LAE. Les formes des mots produits par les enfants tunisiens
semblent être influencées aussi par la langue ambiante (arabe tunisien). Avec l‟âge, les
enfants tunisiens produisent des mots de plus en plus longs (3 syllabes et plus) composés
de différentes syllabes de plus en plus complexes (CVCC, CCVC). Enfin nous avons pu
décrire, à travers l‟analyse des données collectées, le développement des premières
productions lexicales en arabe tunisien qui semblent avoir été plus influencées par la
complexité phonético-phonologique que par la fréquence d‟occurrence.
Mots-clés : acquisition, phonologie, input, premiers mots, arabe