Jean-Louis CAYATTE http://jlcayatte.free.fr/ -1-
Chapitre 4
La durée du chômage
Quand on parle de la durée du chômage, si l’on n’y prend pas garde, on confond facilement la durée moyenne du chômage (ré-
ponse à la question : quand on devient chômeur, pendant combien de temps le reste-t-on en moyenne ?) et l’ancienneté moyenne au
chômage (réponse à la question : depuis combien de temps les chômeurs actuels sont-ils au chômage, en moyenne ?). Or, on le verra,
l’ancienneté moyenne est nettement supérieure à la durée moyenne.
Pour bien comprendre cela, nous commençons, dans ce chapitre, par formaliser la durée du chômage. Nous revenons d’abord sur
sa nature aléatoire (section 1). Puis nous introduisons la notion de probabilité instantanée de sortir du chômage (section 2) et celle de
fonction de survie (section 3). Nous appliquons ensuite ces notions à notre modèle du chapitre 2 (section 4).
Section 1. — Nature aléatoire de la durée du chômage
Revenons à la définition du chômeur donnée au chapitre 1. Un chômeur est défini par deux propriétés :
a) il n’a pas d’emploi ;
b) il en cherche un.
La deuxième propriété fait du chômeur un individu dont l’activité est la recherche d’emploi. Or une activité de recherche a deux
caractéristiques :
a) elle prend du temps ;
b) le temps qu’elle prend est aléatoire : quand on cherche, on ne sait pas quand on va trouver.
La durée du chômage se présente donc comme une variable aléatoire. Dans ce chapitre, nous ne nous demandons pas (encore)
quels sont les facteurs qui déterminent cette durée (a priori, ils sont nombreux, les uns tenant à la personne du chômeur, les autres à
l’état de l’économie). Nous nous contentons pour l’instant d’être précis sur les différentes probabilités qu’on peut avoir en tête lors-
qu’on parle de la durée aléatoire du chômage.
Commençons par définir la probabilité instantanée de sortir du chômage.
Section 2. — La probabilité instantanée de sortir du chômage
Intuitivement, si une nouvelle entreprise annonce qu’elle s’installe dans telle région, on voudrait dire quelque du genre : la situation
des chômeurs de cette région s’améliore, ou mieux : les perspectives des chômeurs de cette région deviennent meilleures, ou plus
techniquement : leur probabilité de sortir du chômage s’accroît. Mais il faut écrire cette probabilité proprement. C’est ce que nous fai-
sons dans cette section.
§ 1. — Le processus de sortie du chômage
Commençons avec une hypothèse très artificielle, mais très provisoire : supposons qu’on ne puisse devenir chômeur ou sortir du
chômage que le 1
er
jour de chaque mois.
Raisonnons ensuite sur une personne qui devient chômeur le 1
er
janvier. En vertu de notre hypothèse artificielle, elle ne pourra pas
en sortir avant le 1
er
février. A cette date, soit elle en sortira, soit elle y restera pour un mois supplémentaire au moins. Nous exprimons
cela en disant que cette personne a une certaine probabilité
de sortir du chômage le 1
er
février (et donc une probabilité
1
d’y
rester).
Comme on vient de le dire, dans ce chapitre, nous n’essayons pas de préciser les déterminants de
. Nous admettons simplement
que cette probabilité existe. Pour fixer les idées, posons, par exemple,
1
h=
.
Le 1
er
février donc, de deux choses l’une :
– soit cette personne sort du chômage, et cesse donc d’être chômeur ;
– soit elle n’en sort pas. Alors,
a) elle y reste alors au moins jusqu’au 1
er
mars ;
b) le 1
er
mars, elle a, à nouveau, une certaine probabilité d’en sortir. Il n’y a aucune raison que cette probabilité soit la même
que celle du 1
er
février. Supposons, par exemple,
2
h=
. Alors, le 1
er
mars donc, de deux choses l’une :
– soit elle sort du chômage, et cesse donc d’être chômeur ;
– soit elle n’en sort pas, et y reste alors au moins jusqu’au 1
er
avril. Le 1
er
avril, elle a une certaine probabilité d’en sortir,
par exemple
3
h=
. Etc.
La suite de ces probabilités
1 2
t
h h h
caractérise complètement le processus de sortie du chômage. Il n’y a aucune restric-
tion sur ces probabilités, sinon, par définition d’une probabilité,
t
h
. Voyons comment on déduit de ces probabilités la loi de
probabilité de la durée du chômage.