A L’oncogériatrie en pleine jeunesse ! DOSSIER THÉMATIQUE

La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 1 - janvier 2010 | 85
DOSSIER THÉMATIQUE
Rétrospective 2009
Loncogériatrie
en pleine jeunesse !
Oncogeriatry in the prime of youth
É. Carola1, T. Cudennec2, H. Le Caer3
1 Upcog, CH de Senlis.
2 Unité mobile gériatrique CHU
Ambroise-Paré, Boulogne.
3 Pôle de cancérologie, CH de la
Dracénie, Draguignan.
A
u cours de l’année 2009, tous les journaux
de cancérologie se sont fait un devoir de
consacrer au moins un article aux aspects
spécifi ques de l’évaluation et du traitement des
personnes âgées atteintes de cancer. Les oncolo-
gues et gériatres ont également eu la possibilité
de confronter leurs expériences et leurs interroga-
tions à l’occasion de 2 réunions phares, les Journées
nationales d’Échanges de pratiques en oncogériatrie
(EPOG) à Lille en septembre et le congrès inter-
national de la Société internationale d’oncologie
gériatrique (SIOG) à Berlin en octobre.
Des progrès incontestables se dégagent de ces
2 réunions, en particulier dans les prises en charge
thérapeutiques tant chirurgicales que médicales.
L’âge physiologique fait l’unanimité comme critère
majeur de sélection, mais, en vérité, quelles que
soient les études publiées et les localisations traitées,
les moyennes d’âge relevées sont loin de corres-
pondre à celles de la population âgée concernée. Pour
autant, les patients au vieillissement harmonieux
ou aux vulnérabilités réversibles selon L. Balducci
peuvent profi ter de prises en charge dynamiques.
EPOG et SIOG sont à l’unisson pour confi rmer l’in-
discutable bénéfi ce apporté par le regard gériatrique
avant toute décision oncologique.
SIOG 2009 :
le point sur les perspectives
en oncogériatrie…
après 65 ans…
Sénescence et cancer
Les 2 principales cibles pour favoriser le dévelop-
pement des nouveaux traitements en oncogériatrie
sont la recherche oncologique et la recherche sur
le vieillissement. Plusieurs mécanismes biologiques
et moléculaires émergent comme facteurs favori-
sant la cancérogenèse au cours du vieillissement :
les altérations de l’ADN, les dysfonctionnements
mitochondriaux, de l’IGF1, du FOXO, de la P53 et de
la P16INKA ainsi que des modifi cations de l’immunité
(IL-6, peroxisome proliferator-activated receptors). La
connaissance approfondie de ces mécanismes devrait
à terme permettre une prise en charge thérapeutique
plus ciblée (1, 2).
Thérapeutiques innovantes
Des progrès considérables ont été réalisés. Depuis
2 ans, des résultats sont communiqués dans les
grandes localisations tumorales avec les thérapies
innovantes dans la population âgée. Ces études sont
malheureusement encore trop fréquemment rétros-
pectives et concernent le plus souvent des patients
de plus de 65 ans. Une étude de F.F. Kabbinavar et al.
(3) confi rme que le bévacizumab améliore, quel que
soit l’âge, la survie sans progression (SSP) et globale
(SG) des patients atteints de cancer colorectal
métastatique. Il s’agit d’une analyse poolée rétros-
pective, dans laquelle 439 patients avaient plus de
65 ans et 276, plus de 70 ans ; 218 ont reçu une
association bévacizumab + chimiothérapie et 221,
placebo + chimiothérapie. La SG dans le groupe
bévacizumab est de 19,3 mois, versus 14,3 mois
dans le bras chimiothérapie exclusive (HR = 0,70 ;
IC95 : 0,55-0,90 ; p = 0,006). Les résultats en faveur
du bévacizumab sont aussi signifi catifs en termes
de SSP.
Il en est de même dans le cancer du rein avancé
en seconde ligne thérapeutique, où le sorafénib
améliore la SSP des patients. Dans l’étude d’Eisen (4),
parmi les 903 patients inclus entre novembre 2003
86 | La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 1 - janvier 2010
Résumé
L’oncogériatrie est à l’honneur en cette fin d’année 2009 avec 2 congrès réunissant oncologues et gériatres
francophones (EPOG) et internationaux (SIOG). Les avancées thérapeutiques semblent profiter aux patients
plus âgés sélectionnés et nous n’en sommes plus à rechercher la place des polychimiothérapies chez
le patient âgé mais à déterminer l’indication des thérapies ciblées dans cette population. L’évaluation
gériatrique et les programmes spécifiques qui en découlent seront les seuls garants d’une proposition
thérapeutique médico-chirurgicale adaptée.
La chirurgie est le traitement princeps du cancer des voies aéro-digestives supérieures. Les patients âgés
représentent 25 % des cas détectés. Leur prise en charge doit être adaptée en fonction de leurs comorbi-
dités. Le statut nutritionnel doit être respecté, et la gastrostomie garde une place certaine pour alimenter
correctement ces patients. Une fois de plus, l’évaluation gériatrique permettra d’organiser la stratégie
thérapeutique la plus adaptée à chaque patient ainsi que le suivi post-thérapeutique.
Mots-clés
SIOG
EPOG
Oncogériatrie
Évaluation
Actualités
Thérapies ciblées
Cancer colorectal
Cancer du sein
Cancer ORL
Cancer pulmonaire
Nutrition
Highlights
Oncogeriatrics is of great
importance for the end of year
2009 with two conferences
gathering French-speaking
(EPOG) and international onco-
logists and geriatricians (SIOG).
Therapeutic progress seems
to benefi t the selected elderly
patients and the polychimiothe-
rapies for elderly patients, are
now behind us and have been
replaced by targeted therapies.
The geriatric assessment and
the specific programs which
will follow will be the only
guarantee of an appropriate
therapeutic medico-surgical
proposal. Surgery is the ENT
cancer’s fi rst treatment. Elderly
patients represent 25% of
detected cases per year. They
must be appropriately handled
according to their comorbidi-
ties. The nutritional status must
be respected and gastrostomy
remains important to feed the
patients properly. Once again,
the geriatric assessement will
allow to organize the most
appropriate, flexible thera-
peutic strategy as well as the
post-therapeutic follow-up.
Keywords
SIOG
EPOG
Oncogeriatrics
Assessment
News
Targeted therapy
Colorectal cancer
Breast cancer
Head and neck cancer
Lung cancer
Nutrition
et mars 2005, 451 avaient bénéfi cié de sorafénib et
452 de placebo. Sur l’ensemble de cette population,
115 malades étaient âgés de 70 ans et plus (70 rece-
vant du sorafénib et 45 un placebo). Lâge moyen
de cette population était de 73 ans. Le bénéfi ce
clinique (addition du taux de réponse complète, de
réponse partielle et de stabilisation) est de 84,3 %
chez les patients âgés traités, de 83,5 % chez les
plus jeunes sujets traités, comparativement à 62,2 %
et 53,8 % pour les groupes non traités. La SSP est
doublée chez les patients âgés comme chez les plus
jeunes quand ils bénéfi cient du traitement par sora-
fénib (26,3 versus 13,9 semaines ; HR = 0,43 ; IC
95
:
0,26-0,69 pour les 70 ans et plus et 23,6 versus
11,9 semaines ; HR = 0,55 ; IC
95
: 0,47-0,66 pour
les plus jeunes) La toxicité de grade 3-4 rapportée
avec le sorafénib est un peu plus fréquente chez les
patients âgés (grade 3 : 40,0 % versus 29,4 %). Les
effets secondaires les plus fréquents sont le rash et
la desquamation, la diarrhée, l’alopécie, la fatigue,
le syndrome mains-pieds et l’anorexie, mais restent
le plus souvent de grade 1-2 et facilement gérables.
En revanche, simplifi er une thérapeutique en espérant
une meilleure tolérance dans cette population peut
conduire à des résultats nettement inférieurs à ceux
obtenus avec les traitements standard. H.B. Muss,
dans l’étude adjuvante prospective comparant capé-
citabine en monothérapie à cyclophosphamide +
métho trexate + uorouracil (CMF) ou anthracyclines
(AC) dans le cancer du sein chez des patientes âgées
(5), montre que la monothérapie est moins effi cace.
Le suivi médian a été de 2,4 années ; 317 patientes ont
reçu le traitement standard (133 le CMF, 184 l’AC) et
303 la capécitabine. Deux tiers des patientes avaient
70 ans ou plus ainsi que des récepteurs hormonaux
positifs, 70 % avaient une atteinte ganglionnaire,
10 % surexprimaient HER2. Les 2 groupes étaient
sensiblement homogènes. La rechute dans le groupe
capécitabine s’est avérée 2 fois plus fréquente que
dans le groupe traitement standard (HR = 2,09 ;
p < 0,001). Chez les patientes recevant la capécita-
bine, le risque de rechute est quadruplé en l’absence
de récepteurs hormonaux par rapport à celles recevant
un traitement standard. En termes de toxicité, 2 décès
toxiques ont été rapportés avec la capécitabine. En
revanche, 70 % des patientes recevant du CMF ont
présenté une toxicité de grade 3 ou 4, versus 60 %
dans le bras AC et 34 % dans le bras capécitabine.
Le Dr A. Huria a rappelé que ces bénéfi ces thérapeu-
tiques ne profi tent qu’à une fraction de la population
âgée concernée. D.S. Buist et al. rapportent dans leur
analyse rétrospective (6) que 20 % des patientes de
65 ans et plus à haut risque de rechute de cancer du
sein ne reçoivent aucune chimiothérapie adjuvante.
Programmes gériatriques
Lévaluation gériatrique est un outil indispensable
pour cibler les patients à traiter. Les interventions
qu’elle engendre, comme le soutien diététique et
ergonomique, contribuent à retarder la perte de l’au-
tonomie. Une étude évaluant l’impact de ces interven-
tions (7) a randomisé 641 patients survivant à plus de
5 ans d’un cancer du côlon, du sein ou de la prostate
avec un bon indice de masse corporelle (IMC) en un
groupe (319 patients) qui a bénéfi cié d’interventions
pour promouvoir une activité physique et une qualité
nutritionnelle et un autre groupe (322 patients) sans
suivi particulier. À 12 mois, la qualité de vie était
améliorée et le sentiment de déclin de l’autonomie
était diminué dans le groupe intervention.
Le programme ONCOSENIOR belge est fondé sur
la mise en place d’une équipe mobile oncogéria-
trique très performante avec gériatre, infi rmières
cliniciennes en oncologie et en gériatrie, assistante
sociale, attaché de recherche clinique, pharmacien
clinicien, diététicienne. Le G8 est un outil de dépis-
tage. Si son score est ≤ 14, le patient bénéfi cie d’une
évaluation gériatrique standardisée (EGS). Deux
tiers des patients dans l’expérience rapportée sont
vulnérables. Les principaux problèmes identifi és
sont : la dénutrition, la dépression et l’isolement
social, l’altération des fonctions cognitives, et enfi n
les comorbidités et les polymédications.
À propos de la radiothérapie
La radiothérapie, qu’elle soit palliative ou curative,
est une arme thérapeutique importante dans la prise
en charge des patients atteints de cancer, en parti-
culier chez les sujets âgés, du fait du faible risque
de toxicité systémique avec ce type de thérapeu-
Figure 1. Facteurs de gravité pour la chirurgie : PACE.
Brief fatigue index
(BFI) > 3 modéré ou sévère.
RR = 1,46 (1,18-2,13)
IADL : au moins une anomalie.
RR = 1,36 (1,04-2,05)
Mortalité à 30 jours
ADL : au moins une dépendance.
RR = 2,00 (1,37-2,92) Durée d’hospitalisation
La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 1 - janvier 2010 | 87
DOSSIER THÉMATIQUE
tique. Léquipe italienne du Dr G. Cerrota de l’IRCCS
de Milan rapporte, dans une population âgée de
718 patients, une faisabilité de la radiothérapie
chez plus de 80 % des patients. Ces patients ont
cependant très peu de comorbidités, voire aucune,
et ont un bon performance status (PS). Les tech-
niques récentes et innovantes, comme la radiothé-
rapie conformationnelle en 3D avec modulation
d’intensité, optimisent la dose délivrée aux volumes
cibles en épargnant les volumes ou organes critiques.
Mais, en pratique quotidienne, l’accès à ces tech-
niques est encore peu réservé à la population âgée,
tout comme la tomothérapie, qui affi ne encore la
performance mais, du fait des durées de mise en
place et des contraintes de temps imposées à cette
population, est loin encore d’être à leur portée. La
radiothérapie hypofractionnée reste d’actualité,
en particulier pour les patients fatigués, souvent
en soins palliatifs, chez qui les transports doivent
être limités. Sa place en adjuvant se développe dans
certaines localisations (8). La curiethérapie est aussi
une alternative pour simplifi er un traitement radique
adjuvant dans le sein, en proposant une hospitali-
sation de 5 jours à la patiente âgée (9).
Évaluation gériatrique
au service de la chirurgie
Les résultats sont contradictoires dans le domaine de
la chirurgie des cancers chez le sujet âgé : d’un côté,
H. Rutten publie l’absence de bénéfi ce en termes de
survie à 5 ans de la stratégie radiothérapie préo-
pératoire puis chirurgie optimale du rectum avec
résection totale du mésorectum chez les patients
de 75 ans et au-delà (10), d’un autre G.J. Gardner
constate que des chirurgies de debulking chez des
patientes de 80 ans atteintes d’un cancer ovarien
sont possibles (11). Déterminer les facteurs pronos-
tiques de morbidité et de mortalité postchirurgi-
cales est tout particulièrement indispensable en
chirurgie oncogériatrique. L’outil PACE (fi gure 1)
permet d’identifi er les populations à risque chirur-
gical défavorable : l’IADL (instrumental activities of
daily living), le BFI (brief fatigue inventory) et le PS
sont corrélés à la mortalité à 30 jours ainsi qu’à une
hospitalisation prolongée en postopératoire (12).
Comme bien des évaluations performantes, PACE
est chronophage. Aussi, actuellement, Italiens et
Anglais s’associent pour simplifi er les outils prédic-
tifs du risque opératoire avec l’étude PREOP, qui
compare PACE aux GFI (Groningen frailty index),
VES-13 (vulnerable elders survey 13) et up and go test.
La confusion post opératoire est une complication
fréquente chez les patients âgés opérés : 3 facteurs
de risque indépendants sont identifi és par l’équipe
française de T. Cudennec (13), le score ASA, l’au-
tonomie fonctionnelle et l’utilisation du tramadol
pour contrôler les douleurs en postopératoire. Cet
épisode confusionnel majore signifi cativement la
durée d’hospitalisation, même s’il est le plus souvent
réversible dans le mois suivant la chirurgie.
Avancées et interrogations
dans le cancer colorectal du patient âgé
L’année 2009 a eu son lot de résultats positifs
mais aussi d’études négatives ! Cependant, le bilan
global est plutôt satisfaisant, puisque, dans l’analyse
rétrospective de S. Kopetz, les patients traités pour
un CCR avancé ont vu leur SG passer de 18 mois
dans les années 1998-2000 à 29,3 mois dans les
années 2004-2006, et ce grâce notamment aux
hépatectomies réglées (20 % des patients en béné-
cient) et aux progrès des chimiothérapies (14).
Concernant plus particulièrement la population
âgée, que retenir de cette année ?
De nombreux progrès thérapeutiques sont
rapportés depuis peu, en particulier dans l’identifi ca-
tion de patients pouvant bénéfi cier d’un traitement
ciblé anti-EGFR. La recherche d’une mutation Kras
permet uniquement de détecter les anomalies sur
les codons 12 et 13 et, par conséquent, n’est que
partiellement prédictive de la réponse aux anti-EGFR.
Quoi qu’il en soit, chez les patients âgés (> 70 ans) à
Kras sauvage, l’association cétuximab-capécitabine
à la dose de 2 000 mg/m
2
/j est faisable en termes
de toxicité et donne un taux de réponse ainsi qu’une
SSP et/ou une SG signifi cativement meilleurs que
chez les patients à Kras muté (SG : 19 mois versus
13,4 mois ; log-rank : p = 0,04) [15] (fi gure 2).
100
80
Pourcentage
60
40
20
00 100 200
KRAS muté
SSP médiane : 6 mois
HR = 0,53
p = 0,02
KRAS muté
SSP médiane : 8,4 mois
300 400
SSP
Temps (jours) 500 600
100
80
Pourcentage
60
40
20
00 100 200
KRAS muté
SG globale : 13,5 mois
HR = 0,58
p = 0,11
KRAS muté
SG médiane : 18,8 mois
300 400
SG
Temps (jours)
500 600 700 800
Figure 2. Association cétuximab-capécitabine chez le patient âgé de plus de 70 ans.
Oral
Oxaliplatine
Irinotécan
Overall
0,2 ,04 0,6 0,8 1
Âge < 70 ans
Âge ≥ 70 ans
Hazard-ratio
Overall survival
1,41,2 1,6 1,8 2 2,2
Figure 3.
Survie globale.
88 | La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 1 - janvier 2010
L’oncogériatrie en pleine jeunesse!
DOSSIER THÉMATIQUE
Rétrospective 2009
Les antiangiogéniques effi caces en situation avancée
(cf. chapitre précédent – étude de F.F. Kabbinavar
et al. [3]) posent le problème de leur toxicité thrombo-
embolique (4 % versus 1,5 % accident artériel thrombo-
embolique [ATE] dans l’étude BRITE). Leur utilisation
en l’absence de comorbidité est envisageable, mais des
données supplémentaires sont nécessaires.
La question de la monothérapie en première
ligne reste posée pour les patients âgés fragiles ou
présentant une maladie peu agressive.
En situation adjuvante, l’actualité est dominée
par les résultats négatifs de l’analyse poolée du
groupe ACCENT (figure 3) présentée à l’ASCO 2009
concernant les patients de plus de 70 ans. Cette
analyse a comparé, à partir des données de 6 études
randomisées, le 5-FU aux nouveaux traitements
(associations avec oxaliplatine, irinotécan ou capé-
citabine). Cette analyse rétrospective a porté sur
plus de 2 000 patients de plus de 70 ans avec une
tumeur majoritairement de stade III (75 %). Le
bénéfi ce observé aussi bien avec les chimiothérapies
avec oxaliplatine qu’avec les chimiothérapies orales
dans la population plus jeune ne l’a pas été dans la
population âgée. Aucune donnée n’est rapportée
concernant le statut gériatrique de ces patients,
et il est diffi cile de conclure à l’absence d’intérêt
d’une association dans ces conditions mais elle peut
être réservée chez des patients ciblés. Des analyses
complémentaires sont prévues pour essayer de
comprendre les raisons de ce résultat. Cette étude a
aussi permis de confi rmer que, quel que soit l’âge du
patient, la survie sans maladie à 3 ans est corrélée à
la survie à 5 ans et celle-ci le serait aussi à la survie
sans maladie à 2 ans. Ainsi, une analyse précoce des
résultats permettrait d’anticiper sur les probabilités
de survenue d’événements futurs (16).
Enfi n, les connaissances en profi l génomique
pourraient à court terme jouer dans la décision
thérapeutique (17).
Anthracyclines dans le cancer du sein
de la femme âgée : le meilleur choix ?
La grande question concernant l’actualité dans le
traitement du cancer du sein en adjuvant, et plus
particulièrement chez les femmes âgées, est celle
de la place des anthracyclines face aux taxanes. La
cardiotoxicité des anthracyclines nest plus à prouver
(18) [tableau I]. Leur administration devra en tout
Tableau I. Cardiotoxicité des anthracyclines (19).
CHEMO CMF DOX CAF
Maladie
cardiaque Hazard-ratio IC95 Hazard-ratio IC95 Hazard-ratio IC95 Hazard-ratio IC95
CM 1,55 1,38-1,74 1,33 1,11-1,59 2,48 2,10-2,93 2,33 1,83-2,96
CHF 1,20 1,14-1,27 1,13 1,03-1,23 1,38 1,25-1,52 1,29 1,12-1,50
HD 1,22 1,17-1,26 1,14 1,07-1,21 1,35 1,26-1,44 1,37 1,24-1,51
MI 1,03 0,87-1,21 1,08 0,83-1,40 0,90 0,64-1,26 1,09 0,70-1,71
CHEMO : chimiothérapie ; CMF : cyclophosphamide + méthotrexate + uorouracil ; DOX : doxorubicine ; CAF : cyclophosphamide + doxorubicine + uorouracil ; CM : cardiomyopathie ; CHF :
congestive heart failure ; HD : heart disease ; MI : myocardial infarction.
* Controlled for age, race, stage, year of diagnosis, pre-existing HD, comorbidity, and year of diagnosis.
1,0
0,8
SSP estimée
0,6
0,4
0,2
006
7,7
10,3
Population ITT
HR stratifié = 0,67 (0,54-0,83), p = 0,0002
SSP médiane : 8 mois versus 10 mois
12 18
Bévacizumab 15 mg/kg q3w + docétaxel (n = 48)
Placebo + docétaxel (n = 38)
HR stratifié = 0,48 (0,27-0,85), p = 0,0102
Mois 24 30
Figure 6. Survie sans progression : patiente âgée améliorée avec bévacizumab.
1,0
0,8
0,6
0,4
0,2
0
Survie sans maladie
0
Nombre de patients à risque
24 48 72 96 120
TAM
EPI-TAM
155
163
117
144
93
107
60
60
16
23
TAM
EPI-TAM
Mois
144
Figure 4. Efficacité
des anthracyclines
chez la patiente âgée
(20).
0,8
0,9
1,0
0,7
0,6
0,5
0,4
Survie sans maladie
0 1224364860
Mois
TC alternative aux anthracyclines
72 84
< 65 TC
< 65 AC
> 65 TC
> 65 AC
n = 1 016 patientes
stade I à III opérées R
96
0,8
0,9
1,0
0,7
0,6
0,5
0,4
Survie globale
0 1224364860
Mois
72 84
< 65 TC
< 65 AC
> 65 TC
> 65 AC
96
AC × 4
TC × 4
Figure 5. AC versus TC en fonction de l’âge.
La Lettre du Cancérologue Vol. XIX - n° 1 - janvier 2010 | 89
DOSSIER THÉMATIQUE
état de cause tenir compte au plus haut point de
l’état cardiaque des patientes. La fraction d’éjection
ventriculaire (FEV) était un paramètre incontournable,
certains attachent de l’importance à la fraction dias-
tolique, peut-être plus spécifi que.
Une chose est certaine, ne proposer aucun traite-
ment à une patiente âgée est délétère sur la survie
à 5 ans, qui passe de 90 % dans le groupe traité à
46 % en cas d’abstention (19).
Le traitement par anthracyclines a largement été
validé en situation adjuvante et métastatique (20).
Chez la patiente âgée, le seul essai adjuvant de
phase III (figure 4) comparant chimiothérapie
plus hormonothérapie (tamoxifène) à hormono-
thérapie seule utilisait de l’épirubicine hebdomadaire
et confi rmait en termes de survie sans rechute le
bénéfi ce apporté par la chimiothérapie (21). Létude
récente du sous-groupe âgé de S. Jones montre
qu’une association taxotère + cyclophosphamide
(TC) peut être une alternative aux anthracyclines.
L’analyse rétrospective de cette étude a porté sur
les patientes de 65 ans et plus (178/1 116 patientes
étudiées). L’âge moyen est de 69 ans. La différence
en survie sans rechute est signifi cativement en faveur
du bras TC par rapport au bras anthracyclines (81 %
versus 75 % ; p = 0,033). Il en est de même pour la
survie globale (87 % versus 82 % ; p = 0,032) [22].
La tolérance hématologique est cependant moins
bonne dans le bras TC (figure 5). “Doxorubicine
might not be the best choice” a dit M. Aapro. Pour
autant, les données récentes sont probablement
insuffi santes pour remettre en cause la place des
anthracyclines en situation adjuvante (23). Le facteur
prédictif génomique de réponse aux anthracyclines
comme la topoïsomérase IIα pourrait conforter
certaines indications mais est loin d’être utilisé en
pratique courante (24).
Au quotidien, l’indication de la chimiothérapie adju-
vante chez les femmes âgées reste discutée princi-
palement en fonction de l’expression des récepteurs
hormonaux.
En situation métastatique, les thérapies ciblées,
et en particulier le bévacizumab, prennent une
place indéniable en première ligne. Létude AVADO
(fi gure 6) avait prévu l’analyse des patientes de plus
de 65 ans. Cette analyse a porté sur 127 patientes
(sur 705 évaluées au total). L’association bévaci-
zumab + docétaxel s’avère statistiquement meilleure
en termes de réponse et de survie sans progression
que le docétaxel seul (25). Les craintes d’accidents
thromboemboliques secondaires au bévacizumab
plus fréquents dans la cohorte de BRITE chez les plus
de 75 ans (cancer colorectal avancé) ne semblent pas
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