86 | La Lettre du Cancérologue • Vol. XIX - n° 1 - janvier 2010
Résumé
L’oncogériatrie est à l’honneur en cette fin d’année 2009 avec 2 congrès réunissant oncologues et gériatres
francophones (EPOG) et internationaux (SIOG). Les avancées thérapeutiques semblent profiter aux patients
plus âgés sélectionnés et nous n’en sommes plus à rechercher la place des polychimiothérapies chez
le patient âgé mais à déterminer l’indication des thérapies ciblées dans cette population. L’évaluation
gériatrique et les programmes spécifiques qui en découlent seront les seuls garants d’une proposition
thérapeutique médico-chirurgicale adaptée.
La chirurgie est le traitement princeps du cancer des voies aéro-digestives supérieures. Les patients âgés
représentent 25 % des cas détectés. Leur prise en charge doit être adaptée en fonction de leurs comorbi-
dités. Le statut nutritionnel doit être respecté, et la gastrostomie garde une place certaine pour alimenter
correctement ces patients. Une fois de plus, l’évaluation gériatrique permettra d’organiser la stratégie
thérapeutique la plus adaptée à chaque patient ainsi que le suivi post-thérapeutique.
Mots-clés
SIOG
EPOG
Oncogériatrie
Évaluation
Actualités
Thérapies ciblées
Cancer colorectal
Cancer du sein
Cancer ORL
Cancer pulmonaire
Nutrition
Highlights
Oncogeriatrics is of great
importance for the end of year
2009 with two conferences
gathering French-speaking
(EPOG) and international onco-
logists and geriatricians (SIOG).
Therapeutic progress seems
to benefi t the selected elderly
patients and the polychimiothe-
rapies for elderly patients, are
now behind us and have been
replaced by targeted therapies.
The geriatric assessment and
the specific programs which
will follow will be the only
guarantee of an appropriate
therapeutic medico-surgical
proposal. Surgery is the ENT
cancer’s fi rst treatment. Elderly
patients represent 25% of
detected cases per year. They
must be appropriately handled
according to their comorbidi-
ties. The nutritional status must
be respected and gastrostomy
remains important to feed the
patients properly. Once again,
the geriatric assessement will
allow to organize the most
appropriate, flexible thera-
peutic strategy as well as the
post-therapeutic follow-up.
Keywords
SIOG
EPOG
Oncogeriatrics
Assessment
News
Targeted therapy
Colorectal cancer
Breast cancer
Head and neck cancer
Lung cancer
Nutrition
et mars 2005, 451 avaient bénéfi cié de sorafénib et
452 de placebo. Sur l’ensemble de cette population,
115 malades étaient âgés de 70 ans et plus (70 rece-
vant du sorafénib et 45 un placebo). L’âge moyen
de cette population était de 73 ans. Le bénéfi ce
clinique (addition du taux de réponse complète, de
réponse partielle et de stabilisation) est de 84,3 %
chez les patients âgés traités, de 83,5 % chez les
plus jeunes sujets traités, comparativement à 62,2 %
et 53,8 % pour les groupes non traités. La SSP est
doublée chez les patients âgés comme chez les plus
jeunes quand ils bénéfi cient du traitement par sora-
fénib (26,3 versus 13,9 semaines ; HR = 0,43 ; IC
95
:
0,26-0,69 pour les 70 ans et plus et 23,6 versus
11,9 semaines ; HR = 0,55 ; IC
95
: 0,47-0,66 pour
les plus jeunes) La toxicité de grade 3-4 rapportée
avec le sorafénib est un peu plus fréquente chez les
patients âgés (grade 3 : 40,0 % versus 29,4 %). Les
effets secondaires les plus fréquents sont le rash et
la desquamation, la diarrhée, l’alopécie, la fatigue,
le syndrome mains-pieds et l’anorexie, mais restent
le plus souvent de grade 1-2 et facilement gérables.
En revanche, simplifi er une thérapeutique en espérant
une meilleure tolérance dans cette population peut
conduire à des résultats nettement inférieurs à ceux
obtenus avec les traitements standard. H.B. Muss,
dans l’étude adjuvante prospective comparant capé-
citabine en monothérapie à cyclophosphamide +
métho trexate + fl uorouracil (CMF) ou anthracyclines
(AC) dans le cancer du sein chez des patientes âgées
(5), montre que la monothérapie est moins effi cace.
Le suivi médian a été de 2,4 années ; 317 patientes ont
reçu le traitement standard (133 le CMF, 184 l’AC) et
303 la capécitabine. Deux tiers des patientes avaient
70 ans ou plus ainsi que des récepteurs hormonaux
positifs, 70 % avaient une atteinte ganglionnaire,
10 % surexprimaient HER2. Les 2 groupes étaient
sensiblement homogènes. La rechute dans le groupe
capécitabine s’est avérée 2 fois plus fréquente que
dans le groupe traitement standard (HR = 2,09 ;
p < 0,001). Chez les patientes recevant la capécita-
bine, le risque de rechute est quadruplé en l’absence
de récepteurs hormonaux par rapport à celles recevant
un traitement standard. En termes de toxicité, 2 décès
toxiques ont été rapportés avec la capécitabine. En
revanche, 70 % des patientes recevant du CMF ont
présenté une toxicité de grade 3 ou 4, versus 60 %
dans le bras AC et 34 % dans le bras capécitabine.
Le Dr A. Huria a rappelé que ces bénéfi ces thérapeu-
tiques ne profi tent qu’à une fraction de la population
âgée concernée. D.S. Buist et al. rapportent dans leur
analyse rétrospective (6) que 20 % des patientes de
65 ans et plus à haut risque de rechute de cancer du
sein ne reçoivent aucune chimiothérapie adjuvante.
Programmes gériatriques
L’évaluation gériatrique est un outil indispensable
pour cibler les patients à traiter. Les interventions
qu’elle engendre, comme le soutien diététique et
ergonomique, contribuent à retarder la perte de l’au-
tonomie. Une étude évaluant l’impact de ces interven-
tions (7) a randomisé 641 patients survivant à plus de
5 ans d’un cancer du côlon, du sein ou de la prostate
avec un bon indice de masse corporelle (IMC) en un
groupe (319 patients) qui a bénéfi cié d’interventions
pour promouvoir une activité physique et une qualité
nutritionnelle et un autre groupe (322 patients) sans
suivi particulier. À 12 mois, la qualité de vie était
améliorée et le sentiment de déclin de l’autonomie
était diminué dans le groupe intervention.
Le programme ONCOSENIOR belge est fondé sur
la mise en place d’une équipe mobile oncogéria-
trique très performante avec gériatre, infi rmières
cliniciennes en oncologie et en gériatrie, assistante
sociale, attaché de recherche clinique, pharmacien
clinicien, diététicienne. Le G8 est un outil de dépis-
tage. Si son score est ≤ 14, le patient bénéfi cie d’une
évaluation gériatrique standardisée (EGS). Deux
tiers des patients dans l’expérience rapportée sont
vulnérables. Les principaux problèmes identifi és
sont : la dénutrition, la dépression et l’isolement
social, l’altération des fonctions cognitives, et enfi n
les comorbidités et les polymédications.
À propos de la radiothérapie
La radiothérapie, qu’elle soit palliative ou curative,
est une arme thérapeutique importante dans la prise
en charge des patients atteints de cancer, en parti-
culier chez les sujets âgés, du fait du faible risque
de toxicité systémique avec ce type de thérapeu-