V-1 : REPONSES EVOQUEES : RECUEIL ET TRAITEMENT DU SIGNAL

publicité
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
V-1 : REPONSES EVOQUEES : RECUEIL ET TRAITEMENT
DU SIGNAL
Jacques Charlier
Jean-François Le Gargasson
Florence Rigaudière
Yvon Grall
Pour citer ce document
Jacques Charlier, Jean-François Le Gargasson, Florence Rigaudière et Yvon Grall, «V-1 :
REPONSES EVOQUEES : RECUEIL ET TRAITEMENT DU SIGNAL», Oeil et
physiologie de la vision [En ligne], V-Les signaux électrophysiologiques, mis à jour le
18/06/2013, URL : http://lodel.irevues.inist.fr/oeiletphysiologiedelavision/index.php?id=203,
doi:10.4267/oeiletphysiologiedelavision.203
Plan
Origine des signaux électrophysiologiques
Sources de courant et leur propagation2
Signaux provenant de la rétine
Signaux provenant du nerf optique et des voies optiques
Signaux provenant du cortex visuel
Recueil des signaux électrophysiologiques
Nature et fonctions des électrodes
Influence de l’épiderme
Différents types d’électrodes
Electrodes pour les électrorétinogrammes
Critères de sélection d’une électrode
Electrodes pour les potentiels évoqués visuels
Electrodes pour les électro-oculogrammes
Contrôle de l’impédance des électrodes
Amplificateurs
Perturbations des signaux recueillis provenant des autres activités bio-électriques
Perturbations des signaux recueillis provenant de l’environnement électromagnétique
Sécurité électrique
Traitement des signaux électrophysiologiques
Des différences de potentiel au traitement numérique
Représentations temporelle et fréquentielle du signal
Principe
Application au filtrage fréquentiel du signal
Application à la séparation des composantes d’un signal
Application à l’extraction des réponses à des stimulations rapides
1
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Signaux et bruits
Comment réduire le niveau de bruit ?
Rejets d’artéfacts
Validation statistique
Analyse statistique des données
Conclusion
Références (février 2010) des principales électrodes citées
Texte intégral
Les stimulations visuelles choisies de façon appropriées évoquent les réponses de milliers
de cellules rétiniennes ou corticales. Ces réponses cellulaires ne sont ni directement
accessibles, ni directement interprétables. Seuls des enregistrements effectués à l’aide
d’électrodes placées en surface, loin des sources génératrices, permettent de recueillir
des signaux.
Ces signaux sont souvent difficilement discernables de ceux émis par l’activité de
l’environnement cellulaire qualifié de « bruit » et sont donc ininterprétables. Pour ce
faire, ils doivent subir un « traitement » mathématique dont il faut connaître les grands
principes pour mesurer les améliorations obtenues entre les réponses de niveaux
cellulaires et les « signaux électrophysiologiques » résultant, mais aussi pour en
connaître les limites… [Binnie CD et al., 1996], [Chiappa KH, 1985], [Regan D, 1989].
Origine des signaux électrophysiologiques
Sources de courant et leur propagation
Comme tous les organes du corps humain, le système visuel génère des signaux
électriques.
Ces signaux ne sont pas strictement des courants électriques qui correspondent à une circulation d’électrons
comme dans les conducteurs électriques classiques de cuivre, mais sont des courants ioniques qui
correspondent à une circulation d’ions, le plus souvent positifs comme les ions sodium ou potassium.
En clinique, ces signaux sont recueillis depuis la surface du corps à l’aide d’électrodes et
d’un équipement électronique appelé amplificateur.
Ce premier paragraphe rappelle comment ces signaux se propagent depuis leur source
jusqu’à la surface de recueil, leur mode de propagation pouvant avoir des conséquences
importantes sur la qualité des signaux recueillis et sur leur interprétation.
2
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
La figure V-1-1 illustre une source de courant ionique, le cœur, située au milieu du
volume conducteur que constitue le torse (représenté ici en coupe). Le courant se
propage dans la totalité du volume conducteur en créant un champ de potentiels
électriques. Suivant la loi d’Ohm (U=R.I), le potentiel électrique diminue depuis la source
jusqu’au puits de courant au fur et à mesure que le courant traverse les tissus. La carte
de distribution des potentiels électriques qui en résulte est ici représentée en niveaux de
gris.
C’est ce potentiel électrique qui est mesuré à l’aide des électrodes disposées en surface.
La carte de la figure V-1-1 montre que ce potentiel dépend très fortement de la position
des électrodes. D’une part, il est d’amplitude maximale dans l’axe du dipôle formé par la
source et le puits de courant. D’autre part, il diminue très rapidement lorsque la distance
entre le dipôle et l’électrode augmente : son amplitude est fonction de l’inverse du carré
de cette distance.
La position de la référence du potentiel mesuré est importante. En effet, ce qui est
mesuré est une différence de potentiel qui s’effectue entre une électrode active et une
électrode de référence.
Pour obtenir le zéro de potentiel électrique, il faudrait placer l’électrode de référence à
très grande distance de la source, ce qui n’est pas réalisable en clinique car il faudrait
plonger le patient dans une grande piscine d’eau salée... L’électrode de référence ne peut
donc pas être au « zéro électrique » et sa position influence donc la différence de
potentiel recueillie.
Signaux provenant de la rétine
La figure V-1-2 montre la circulation des courants générés par les différentes couches de
la rétine. Ces courants traversent le vitré et la chambre antérieure puis reviennent au
travers de la sclère, de la choroïde et de la couche de l’épithélium pigmentaire. Le
maximum de potentiel se situe à l’apex de la cornée puis il diminue pour atteindre
environ 70% de sa valeur maximale au niveau de la sclère. Le potentiel recueilli sur la
peau à proximité de l’œil est de l’ordre de 10 à 20% de ce même maximum.
Remarque : les lignes de courant et la distribution de potentiels qui en résulte dépendent
de la conductivité électrique des tissus. Ainsi, un implant oculaire ou de l’huile silicone
mise dans un oeil, diminue-t-il la conductivité des milieux et modifie la réponse de la
rétine recueillie en surface.
Signaux provenant du nerf optique et des voies optiques
Les structures situées en profondeur, nerf optique, chiasma, corps géniculés et radiations
optiques, sont trop éloignées de la surface pour fournir des signaux exploitables en
clinique (figure V-1-3).
Signaux provenant du cortex visuel
L’aire corticale visuelle primaire se situe en zone occipitale, au niveau de la scissure
calcarine.
Les structures correspondant à la région maculaire sont à proximité de la surface du cuir
chevelu alors que les structures correspondant à la périphérie du champ visuel sont
situées en profondeur (figure V-1-4). Il en résulte, en pratique, que seule l’activité
3
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
électrique provenant de la région maculaire est enregistrable de façon fiable depuis des
électrodes disposées en surface, en regard des aires occipitales.
Les réponses enregistrées en surface dépendent du positionnement des électrodes par
rapport à la scissure calcarine. Il est donc important d’utiliser des repères anatomiques
aussi précis que possible (inion, nasion...) pour obtenir un bon positionnement des
électrodes.
Recueil des signaux électrophysiologiques
Nature et fonctions des électrodes
Les électrodes assurent le rôle d’interface entre le corps du patient et l’appareil qui
recueille les signaux (figure V-1-5).
Cette interface se situe entre deux milieux où les phénomènes de conduction électrique
sont de nature très différente. Au sein du corps du patient, ce sont des ions qui assurent
la conduction alors que pour l’appareillage « électronique », ce sont des électrons.
L’interface entre ces deux milieux de nature différente est le lieu de phénomènes
électriques de nature complexe. Il y a généralement accumulation de charges électriques
et apparition d’une tension de polarisation qui vient se superposer au signal recueilli.
Pour cette raison, les électrodes sont généralement constituées de matériaux « nobles »
(or, platine, argent...) afin d’obtenir une tension de polarisation aussi faible et aussi
stable que possible. Comme ces métaux sont relativement coûteux, ils sont déposés en
couche de très faible épaisseur et sont donc relativement fragiles. Si cette couche est
détruite par l’usure par exemple ou par des actions de nettoyage un peu trop
vigoureuses, l’électrode perd ses propriétés et les signaux recueillis deviennent instables
et facilement perturbés par les mouvements du patient.
Influence de l’épiderme
Les électrodes sont en contact avec la peau. Cette dernière possède des propriétés
électriques particulières.
La couche superficielle (épiderme, figure V-1-6) peut, lorsqu’elle est sèche, présenter une
résistivité élevée et donc diminuer fortement l’amplitude des signaux recueillis. Une
préparation de la peau à l’aide d’une pâte abrasive suivie de l’application d’un gel
conducteur permet de s’affranchir de ce problème.
Remarque. Les gels utilisés pour les sondes à ultrasons ne sont en général pas
conducteurs et ne doivent donc pas être utilisés pour faciliter le contact des électrodes.
Les corps gras sont également mauvais conducteurs. Un nettoyage à l’alcool permet de
les éliminer dans le cas de peaux grasses.
Différents types d’électrodes
Electrodes pour les électrorétinogrammes
Il existe de nombreux types d’électrodes. Chacune présente des avantages et des
inconvénients. Il faut un peu de pratique pour bien en maîtriser la pose et savoir déjouer
les problèmes classiques.
4
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Electrodes sclérocornéennes
Pour le recueil de l’électrorétinogramme, les électrodes sclérocornéennes (figure V-1-7,
figure V-1-8) sont constituées d’une coque sur laquelle sont placés ou non des
blépharostats destinés à maintenir les paupières ouvertes. Un anneau conducteur assure
le contact avec la cornée. Elles sont soit à usage unique -ce qui est recommandé (figure
V-1-7)- soit réutilisables après une stérilisation appropriée(figure V-1-8) .
Electrodes non sclérocornéennes
Il existe plusieurs autres types d’électrodes « non cornéennes » là aussi, à usage unique
ou réutilisable (figure V-1-9 et figure V-1-10) :

L’électrode « DTL » -acronyme de ses inventeurs Dawson,
Trick et Litzkow [Dawson et al., 1979]- est constituée d’un
faisceau de fibres conductrices qui est placé à l’intérieur de
la paupière inférieure et fait ainsi directement contact avec
la sclère (usage unique).

L’électrode « HK-Loop » [Hawlina, Konec, 1992] est
constituée d’un fil d’argent recouvert d’un isolant. Ce fil a la
forme d’une boucle que l’on vient glisser à l’intérieur de la
paupière inférieure. Le contact avec la sclère se fait au
niveau de 3 petites ouvertures pratiquées dans l’isolant
dans la partie centrale de la boucle (usage unique).

L’électrode « gold foil » [Esakowitz et al., 1993] ou feuille
d’or, est constituée d’une fine feuille de mylar sur laquelle a
été déposé une fine couche d’or. Cette feuille est mise en
contact avec la sclère, au niveau de la paupière inférieure
(très fragile, réutilisable).
Electrodes en contact avec la peau
Enfin, il est également possible d’enregistrer un électrorétinogramme à l’aide d’électrodes
placées directement en contact avec la peau, au niveau de la paupière inférieure, à
proximité immédiate de l’œil (figure V-1-10). Elles sont particulièrement utiles chez les
enfants (figure VII-1-20) ou en cas d’abrasion ou autre problème au niveau de la surface
de l’œil.
Ces électrodes peuvent être celles utilisées pour les électrocardiogrammes (ECG) sous
lesquelles on ajoute du gel conducteur ou bien de type « Patch » prégélifiées
fréquemment utilisées comme électrodes de référence pour l’enregistrement des ERG
multifocaux (figure V-1-10)
Critères de sélection d’une électrode
Qualité du signal recueilli
Le premier critère de sélection d’une électrode est la qualité du signal recueilli.
L’amplitude maximale de l’électrorétinogramme est obtenue à l’apex cornéen, ce qui
donne l’avantage aux électrodes en contact avec la cornée. Les électrodes en contact
avec la sclère recueillent un signal d’amplitude 50 à 70 % de ce maximum et les
électrodes cutanées 10 à 20 % de ce même maximum [Bradshaw et al., 2004],
[Zanlonghi, 1999].
En général, le signal recueilli avec les électrodes cornéennes est moins perturbé par les
clignements et l’ouverture des yeux est plus facile à contrôler au cours des différentes
phases de l’examen qu’avec les électrodes cutanées.
5
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Tolérance de l’électrode
Le deuxième critère de sélection d’une électrode est la bonne tolérance par le patient et…
par l’opérateur. Certains opérateurs préfèrent poser des électrodes cutanées plutôt que
des DTL ou gold foil, mais ceci est surtout dû à un manque de pratique ; en effet, la pose
de ces électrodes non cornéennes est aussi aisée que celle d’une lentille de contact.
Qualité optique de l’électrode
Un troisième critère est la qualité optique de l’électrode. Celle-ci n’a pas vraiment
d’importance pour les électrorétinogrammes réalisés avec des stimulations par flash.
Mais pour les électrorétinogrammes utilisant des stimulations structurées -ERG pattern et
ERG multifocal-, l’image de la stimulation sur la rétine doit être aussi nette que possible,
ce qui suppose l’utilisation d’une électrode cornéenne d’une « bonne » qualité optique
(électrodes « Jet », figures V-2-7)ou d’une électrode non cornéenne (figure V-1-9).
Le prix…
Un dernier critère enfin est le prix. Les électrodes cornéennes sont les plus coûteuses,
surtout pour les modèles à usage unique. Tout aussi dépend du fabriquant.
Electrodes pour les potentiels évoqués visuels
Les potentiels évoqués visuels sont recueillis à l’aide d’électrodes cutanées. Il en existe
de nombreux types (figure V-1-11). L’électrode pince oreille, comme son nom l’indique,
pince les lobes des oreilles. Elle sert d’électrode de référence.
Pour l’électrode active, en présence de cheveux, on utilise soit des électrodes cupules soit
des électrodes boules de type électrodes à électro-encéphalogramme (EEG). Pour les
enfants (figure VII-1-21) ou les adultes chauves, on peut utiliser des électrodes collées
de type à ECG.
Electrodes pour les électro-oculogrammes
Electrodes actives
Les électro-oculogrammes sensoriels contiennent des composantes à variation lente. Les
électro-oculogrammes dynamiques -électro-oculomotilogramme : EOMG- ou les
électronystagmogrammes, contiennent en outre une large gamme de fréquences
temporelles, en particulier si on s’intéresse à la dynamique des saccades.
Il est donc important de réaliser leur recueil avec des électrodes de très bonne stabilité :
électrodes cupules de bonne qualité, électrodes patch prégélifiées ou électrodes de
contact de type à ECG (figure V-1-10).
Electrodes de référence
Elles sont de type « Beckmann » (figure V-1-11). Leur partie métallique -argent/argent
chloruré- n’est pas directement en contact avec la peau. La petite cavité située entre la
peau et la partie métallique doit être remplie avec un gel conducteur suffisamment fluide
pour assurer un bon contact. Elles peuvent également être de type à ECG.
Il en résulte une excellente stabilité de recueil du signal et une bonne prévention contre
les artéfacts résultant des mouvements du patient.
Contrôle de l’impédance des électrodes
La qualité du contact des électrodes peut être évaluée par la mesure de leur impédance
électrique. Cette mesure est en général effectuée automatiquement par les appareils
après la pause des électrodes, juste avant le début de l’examen.
6
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Le résultat est exprimé en ohms ; plus il est faible, meilleure est la qualité du contact.
Une valeur inférieure à 3 Kohms (kilo-ohms) est satisfaisante. Une valeur supérieure à
10 Kohms est préjudiciable à la qualité des résultats de l’examen.
Amplificateurs
Définition
Comme leur nom l’indique, les amplificateurs servent à amplifier les signaux recueillis sur
le patient mais leur rôle ne se limite pas à cela. Ils doivent également éliminer les
signaux électriques parasites qui sont produits par l’environnement électromagnétique.
C’est pourquoi les amplificateurs utilisés en électrophysiologie clinique sont de type
différentiel.
Amplificateurs différentiels
Ils mesurent la différence de potentiel électrique entre deux entrées (figure V-1-12) :
° une entrée positive où est connectée l’électrode active et
° une entrée négative où est connectée l’électrode de référence.
Grâce à ce montage différentiel, les signaux produits par l’environnement
électromagnétique sont éliminés puisque identiques pour les deux entrées, d’où
l’expression « signal de mode commun ».
Les amplificateurs sont d’un point de vue technique bien au point ; cependant, ils ne sont
pas parfaits et la réjection des signaux de mode commun n’est pas totale. C’est pourquoi
il est indispensable d’utiliser une troisième électrode appelée électrode neutre ou
électrode indifférente, reliée au corps du patient afin de minimiser le potentiel de mode
commun.
Remarque
L’électrode active et l’électrode de référence jouent un rôle parfaitement symétrique. Si
on les inverse, il en résulte une inversion de polarité du signal recueilli.
Perturbations des signaux recueillis provenant des
autres activités bio-électriques
Pratiquement tous les organes du corps humain génèrent des signaux bio-électriques.
Ceux-ci peuvent, si on n’y prend garde, perturber le recueil des signaux émis par le
système visuel comme, par exemple, les contractions musculaires des mâchoires ou du
cou qui génèrent de l’électromyogramme. Pour les éviter, il suffit de veiller à ce que le
patient soit installé confortablement et de s’assurer de l’absence de mastication pour
éliminer ce type de problème -du chewing-gum par exemple...
L’électrocardiogramme (ECG) généré par le muscle cardiaque, peut parfois perturber les
signaux recueillis, en particulier chez l’enfant, en raison de la faible distance entre le
cœur et les électrodes de recueil.
L’ECG s’élimine normalement lors du moyennage des réponses par absence de
synchronisation entre la stimulation visuelle et le rythme cardiaque (voir traitement du
signal). Il en va de même pour les perturbations générées par les stimulateurs
cardiaques.
7
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Perturbations des signaux recueillis provenant de
l’environnement électromagnétique
L’environnement électromagnétique dans lequel se déroule l’examen peut être source de
perturbations des signaux recueillis. Il est important de les identifier et de les éliminer.
Champs électriques
Sont à éviter
° les moquettes au sol en fibres artificielles car elles peuvent accumuler des charges
électriques (électricité statique) ; la proximité °de moteurs électriques comme une
machinerie d’ascenseur, °de fours électriques, °d’appareils de résonance magnétique
nucléaire… Enfin, °les téléphones portables ou assistants électroniques doivent être
éteints durant les examens.
Sont à éliminer
° la propagation des champs électriques (figure V-1-13).
Solutions
Pour minimiser au maximum l’environnement électromagnétique, il est possible d’utiliser
un blindage constitué d’une enveloppe conductrice reliée à la terre. La salle d’examen
doit être dotée d’une prise de terre de bonne qualité à laquelle sont reliés les châssis des
différents appareils électriques ainsi que les objets métalliques massifs (fauteuil…).
Le « blindage » de la salle d’examen (cage de Faraday) est aussi envisageable mais cette
solution est onéreuse et en général, pas vraiment nécessaire compte tenu des
performances des appareils d’électrophysiologie.
Enfin, des câbles « blindés » sont recommandés pour le recueil de signaux de très faible
niveau, comme par exemple, l’ERG multifocal.
Champs magnétiques
Une maîtrise plus difficile…
La propagation des champs magnétiques (figure V-1-14) est plus difficile à maîtriser.
Ceux-ci proviennent par exemple des transformateurs, moteurs électriques, écrans
cathodiques.
Ils agissent par les boucles formées par les câbles reliés aux électrodes. On peut donc
réduire influence des champs magnétiques en diminuant la surface de ces boucles. Par
exemple, cela consiste à faire passer les câbles des électrodes active et de référence du
même côté de la tête du patient.
Sécurité électrique
Il est indispensable de penser à la sécurité du patient (figure V-1-15).
Les appareils d’électrophysiologie visuelle doivent être conformes aux normes de sécurité
électrique (CEI601-1). L’amplificateur et les électrodes constituent une partie qui doit
être électriquement isolée de l’alimentation électrique, de façon à éviter tout contact
entre le patient et une tension électrique.
Il est interdit de relier l’électrode neutre à la terre. Il est également obligatoire d’utiliser
des fiches d’électrode de sécurité, c'est-à-dire ne présentant pas de partie pouvant entrer
en contact avec un conducteur électrique.
8
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Traitement des signaux électrophysiologiques
Les signaux générés par des groupes cellulaires sont recueillis à l’aide d’électrodes, en
surface loin des sources génératrices, puis amplifiés. Ils sont ensuite traités pour que les
« réponses visuelles » soient discernables du « bruit » et interprétables.
Ces traitements sont réalisés essentiellement de façon numérique, la puissance de calcul
des ordinateurs permettant la mise en œuvre d’algorithmes élaborés.
Il n’est pas question ici de détailler les techniques actuelles complexes de traitement
numérique du signal, mais seulement d’introduire quelques notions essentielles à la
compréhension des résultats fournis par les appareillages d’électrophysiologie clinique
actuellement sur le marché (chapitre I-1 § « Les appareillages du commerce »).
Des différences de potentiel au traitement numérique
Les signaux enregistrés sont des différences de potentiel de variations continues,
recueillies entre deux points; or l'ensemble des traitements informatiques s'applique à
des données numériques discrètes.
Tout appareil d’électrophysiologie effectue la conversion de ces signaux continus en
valeurs discontinues ou « discrètes » sur le principe des convertisseurs analogiquenumérique.
Très schématiquement, la variation continue des signaux est remplacée par des valeurs
discontinues, mesurées à intervalles réguliers et directement traitables par ordinateur
(figure V-1-16).
Représentations temporelle et fréquentielle du signal
Principe
Un signal est habituellement représenté par son amplitude en fonction du temps : c’est la
représentation temporelle. Cependant un signal, même de forme complexe, peut être
décomposé en une somme de signaux élémentaires de forme sinusoïdale. Chacun de ces
signaux élémentaires est alors caractérisé par son amplitude, sa fréquence -nombre
d’oscillations par seconde exprimé en Hz- et sa phase.
Exemple : La figure V-1-17 montre l’exemple d’un signal complexe qui correspond à la
somme de deux sinusoïdes élémentaires.
La transformée de Fourier permet de passer de la représentation temporelle d’un signal
(figure V-1-17 en haut) à sa représentation fréquentielle (figure V-1-17 en bas).
Très schématiquement, la transformée de Fourier est un concept
mathématique qui postule que toute fonction périodique dans le
temps, de fréquence de base f0, peut être décomposée en une
somme infinie de sinus et cosinus dont les fréquences sont des
multiples entiers de la fréquence de base f0 ; cette somme est
appelée série de Fourier.
Grâce à cette transformée, il est possible de représenter le signal
complexe initial par l’ensemble des amplitudes et fréquences des
signaux élémentaires qui le composent.
9
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
La représentation fréquentielle du signal de la figure V-1-17 se compose de deux pics
dont l’amplitude et la fréquence correspondent aux deux signaux sinusoïdaux
élémentaires.
De nombreux phénomènes physiques et physiologiques se manifestent dans un domaine
de fréquences précis, la représentation fréquentielle prend alors tout son intérêt.
Application au filtrage fréquentiel du signal
La figure V-1-18 montre la représentation temporelle d’un électrorétinogramme
contaminé par le champ électrique ambiant capté par les câbles des électrodes.
Le champ électrique est un signal contaminant qui apparaît toutes les 20 ms, soit 50 fois
par seconde ou encore à une fréquence de 50 Hz.
La représentation ou analyse fréquentielle de l’électrorétinogramme contaminé, met en
évidence la fréquence de 50 Hz due au champ électrique.
Pour supprimer cette contamination du signal par le « 50 Hz », il suffit d’imposer dans
cette représentation fréquentielle, la valeur zéro aux fréquences situées autour de 50
Hz : c’est le filtrage. Appliquer ensuite la transformation de Fourier inverse permet
d’obtenir une nouvelle représentation temporelle dans laquelle la contamination due au
champ électrique a été éliminée (figure V-1-19).
L’opération ainsi réalisée est un « filtre de rejet » de la composante 50 Hz qui améliore la
qualité du signal obtenu.
Application à la séparation des composantes d’un signal
Filtre passe-bas – filtre passe-haut
Dans la représentation ou analyse fréquentielle d’un signal
° un filtre passe-bas ne laisse passer que ses basses fréquences temporelles et élimine
donc les fréquences temporelles élevées, alors que
° un filtre passe-haut élimine les basses fréquences temporelles et ne laisse passer que
les fréquences temporelles élevées.
Utiliser d’une part un filtre passe-bas et d’autre part un filtre passe-haut sur la
représentation fréquentielle d’un signal complexe, puis en effectuer la transformée de
Fourier inverse, permet la mise en évidence des composantes du signal qui seraient
passées autrement inaperçues.
Exemple
La figure V-1-20 montre la représentation temporelle d’un électrorétinogramme.
L’application d’un filtre passe-bas élimine les composantes de fréquences temporelles
élevées. Ce filtre a pour effet d’éliminer les potentiels oscillatoires (V-3-A § conditions de
recueil et traitement du signal) ou OPs et de faciliter ainsi l’identification des ondes a et b
de l’ERG flash.
L’application d’un filtre passe-haut élimine les composantes de basses fréquences
temporelles. Ce filtre a pour effet de mettre en évidence les ondes de fréquences
temporelles élevées qui sont de faibles amplitudes ou potentiels oscillatoires et dont les
composantes fréquentielles se situent entre 80 et 300 Hz.
10
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Application à l’extraction des réponses à des stimulations rapides
Plusieurs examens électrophysiologiques font appel à des stimulations « rapides », c'està-dire ayant une fréquence temporelle élevée.
Exemple pour l’ERG flicker
L’ERG flicker (V-3-A § « procédure de stimulation – séquence 5) est évoqué avec une
stimulation flash de fréquence temporelle 30 Hz.
La figure V-1-21 (en haut) montre la représentation temporelle et fréquentielle, obtenues
chez un sujet normal.
La représentation temporelle montre que la réponse se reproduit toutes les 33 ms, ce qui
correspond bien à la fréquence de la stimulation de 30 Hz. La représentation fréquentielle
fournit directement ce résultat.
La figure V-1-21 (en bas) montre les deux types de représentation pour un ERG flicker
enregistré chez un sujet présentant un dysfonctionnement important de la rétine.
La réponse, dans sa représentation temporelle, est d’amplitude faible (attention à la
différence d’échelle d’amplitude : 10 V par division chez le sujet pathologique contre 50
V par division chez le sujet normal). Il est difficile de quantifier cette réponse.
La représentation fréquentielle met en évidence un pic situé à la fréquence de 30 Hz
cependant d’amplitude faible par rapport à celle trouvée chez le sujet normal mais que se
distingue bien des composantes de fréquences voisines. Il est donc possible de dire qu’il
y a une réponse à la stimulation, même si elle est d’amplitude faible. Cette
représentation aide à l’interprétation.
Exemple pour les PEV stationnaire
Un autre exemple peut être donné pour les potentiels visuels, évoqués par une
stimulation de haute fréquence temporelle (supérieure à 8 Hz), dits PEV stationnaire (V-5
§ Caractéristiques des réponses – PEV flash stationnaire) (en anglais « steady state »).
Les signaux recueillis se prêtent bien à une analyse fréquentielle car l’activité électrique
corticale oscille à la même fréquence temporelle que la stimulation sans revenir à un état
de repos (figure V-1-22). L’amplitude de la réponse peut être obtenue rapidement, en
moins d’une seconde, en mesurant l’amplitude du pic à la fréquence de stimulation.
Exemple pour les PEV « sweep »
Cette méthode est appliquée pour les PEV par « balayage de fréquences spatiales » (en
anglais PEV « sweep ») pour mesurer « l’acuité visuelle » chez le bébé [Almoqbel et al.,
2008], [Yadav et al., 2009], [Ridder et al., 1998], [Ridder, 2004].
On utilise des stimulations en damier ayant une fréquence d’alternance élevée de 10 à 16
Hz. On présente successivement des tailles de cases décroissantes (figure V-1-23) ; la
durée totale d’une séquence d’enregistrement est d’environ 10 secondes.
Pour chaque taille de cases du damier, la représentation fréquentielle permet d’extraire
l’amplitude de la réponse obtenue à la fréquence de stimulation. L’ensemble des
réponses est porté sur une même courbe ; elle montre l’évolution de l’amplitude de la
réponse –obtenue par représentation fréquentielle- en fonction de la taille des cases du
damier de stimulation. « L’acuité visuelle » est extrapolée à la plus petite taille de cases
du damier qui donnerait une amplitude presque nulle…
11
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Signaux et bruits
Distinguer une réponse d’un artéfact ou d’un bruit
Afin de s’assurer de la fiabilité d’un enregistrement électrophysiologique, il est
indispensable de déterminer si les réponses recueillies correspondent bien à l’activité
électrophysiologique générée par le système visuel ou s’il ne s’agit pas plutôt d’un
artéfact produit par un mouvement du patient, une électrode défectueuse ou toute autre
source d’activité électrique.
La figure V-1-24 montre quelques exemples classiques d’artéfacts pouvant se produire
durant l’enregistrement d’un PEV. La réponse obtenue correspond à la somme de
l’activité électrophysiologique générée par le système visuel -appelée le « signal »- et
d’autres activités électriques sans rapport avec le système visuel -appelées « bruits »mais sans relation avec un phénomène sonore.
Plus le niveau du bruit est important, plus il est difficile d’interpréter la réponse. Lorsque
le niveau de bruit augmente, la mesure des valeurs de l’amplitude et du temps de
culmination des ondes devient difficile voire peu fiable.
A partir d’un certain niveau de bruit, on peut seulement conclure qu’il y a ou non un
« signal ». Si le bruit augmente encore, on peut juste conclure que le résultat n’est pas
fiable. Il est donc important de pouvoir évaluer le niveau du bruit.
Evaluer le niveau du « bruit »
Plusieurs solutions sont possibles
Enregistrer un « bruit de fond » en dehors de toute stimulation
Une première solution consiste à recueillir une réponse en l’absence de stimulation
visuelle appelée « bruit de fond » (V-5 § condition de recueil et traitement du signal ss §
Enregistrement du bruit de fond). Cependant, cet enregistrement étant fait à un moment
différent ce celui de l’examen, il peut ne pas être représentatif du niveau de bruit,
surtout si ce dernier est inconstant, ce qui est souvent le cas.
Evaluer le « bruit de fond » avant l’apparition de la réponse
Une autre solution consiste à évaluer l’activité électrique dans les premières
millisecondes qui suivent la stimulation et qui précèdent l’apparition de la réponse.
Pour les PEV par exemple, la réponse ne survient qu’environ 30 ms après la stimulation
(figure V-1-25). Les fluctuations de la réponse, présentes durant ces premières
millisecondes, sont supposées correspondre à du bruit.
Remarque. Ce n’est pas possible dans le cas où la fréquence de
stimulation est élevée, car la réponse à la stimulation précédente
peut empiéter sur la réponse suivante...
Réponse en représentation fréquentielle
Pour les fréquences de stimulation élevées, la représentation fréquentielle de la réponse
permet de déterminer facilement le niveau de bruit. En effet, on ne peut trouver dans la
réponse que la fréquence correspondant à celle de la stimulation et éventuellement à ses
harmoniques -c'est-à-dire des fréquences double, triple -ou plus- de la fréquence initiale
de stimulation. Toute « activité » se situant en dehors de ces fréquences correspond
donc à du bruit.
Exemple : figure V-1-26. A gauche, la représentation fréquentielle d’un ERG flicker, avec
un niveau de bruit faible, montre deux fréquences : 30 Hz avec une amplitude
12
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
importante –correspondant à la fréquence temporelle de la stimulation- et 60 Hz de faible
amplitude –première harmonique, de fréquence double de celle initiale.
A droite, la représentation fréquentielle d’un ERG flicker avec du bruit. Elle montre
plusieurs fréquences d’amplitudes élevées, autour de 10 Hz, 15 Hz, 20 Hz, en pointillé
bleu, qui ne correspondent pas à celle de la fréquence initiale de stimulation. Ce sont les
fréquences « du bruit ».
Comment réduire le niveau de bruit ?
Comme indiqué précédemment, pour que les réponses soient bien discernables et
significatives, il est important que le niveau de bruit soit aussi faible que possible.
La façon la plus efficace de réduire le bruit est d’en éliminer les sources, comme cela a
été dit ci-dessus. Cependant, ce n’est pas toujours suffisant et il faut alors mettre en
œuvre d’autres méthodes de traitement du signal.
Les limites du filtrage fréquentiel
La méthode du filtrage fréquentiel des réponses, décrite ci-dessus, est efficace pour les
bruits qui se produisent à des fréquences différentes de celles du signal, comme par
exemple le 50 Hz généré par l’environnement électromagnétique.
Elle n’est cependant d’aucune efficacité pour les bruits se situant dans la même gamme
de fréquence que le signal.
Sommation/moyennage
Une autre méthode est celle de la « détection synchrone », couramment appelée
sommation/moyennage.
Son principe repose sur une sommation des réponses individuelles effectuée de façon
synchrone à la répétition de la stimulation visuelle. Chacune des stimulations visuelles
répétées dans le temps, est supposée générer une réponse visuelle identique à celle
générée par la stimulation précédente, de même polarité, de même amplitude et
apparaissant avec le même temps de culmination : la réponse visuelle est dite
« synchrone » de la stimulation.
Par contre, les bruits générés après chaque stimulation sont supposés être aléatoires,
avec une polarité, une amplitude et des temps de culmination variables : ils ne sont pas
synchrone de la stimulation. Au cours de la sommation, les bruits ont donc tendance à
s’éliminer.
En effet statistiquement il y a autant de « bruit » de polarité
positive que négative, d’amplitude et de temps de culmination
aléatoires…
Amélioration du rapport « signal sur bruit »
Il est démontré que si on somme n réponses individuelles, la réponse finale contient n
fois le signal visuel et seulement ()n fois le bruit.
On augmente ainsi le rapport signal sur bruit de
()n. La figure V-1-27 montre
l’amélioration de ce rapport « signal sur bruit » en fonction du nombre de réponses
sommées. Par exemple, pour 100 réponses individuelles sommées, l’amélioration du
rapport signal sur bruit est multipliée par 10.
Il est ainsi possible « de voir apparaître » un signal –ou qu’un signal soit « discernable »même lorsque son amplitude est nettement inférieure à celle du bruit.
13
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Compromis : durée d’examen - amélioration du rapport « signal/bruit »
Augmenter le nombre de sommations améliore le signal par rapport au bruit. Cependant,
il faut trouver un bon compromis entre la durée de l’enregistrement qui augmente avec
le nombre de sommations et qui risque d’entraîner une fatigue du sujet et donc des
mouvements anormaux -avec intrusion de bruit supplémentaire- et une bonne qualité du
signal.
En principe pour l’ERG flash,( V-3-§ conditions de recueil et traitement du signal) une
seule stimulation évoquant une seule réponse suffit car le bruit rétinien est très faible. En
pratique, on effectue 10 sommations voire 40 sommations pour extraire les potentiels
oscillatoires [Marmor et al., 2009].
Pour l’ERG pattern (P-ERG) (V-4- B-§ Conditions de recueil et traitement du signal),
l’amplitude du signal étant de quelques micro-Volts, une sommation comprise entre 50 à
60 réponses individuelles apporte une amélioration du signal satisfaisante [Holder et al.,
2007].
Le traitement du signal de l’ERG multifocal est spécifique, il relève d’une série
d’hypothèses et de calculs mathématiques complexes [Sutter, 2000] et demande la
sommation d’un millier de réponses individuelles (V-4-A- conditions de recueil et
traitement du signal) correspondant à une durée de plusieurs secondes pour chaque
séquence d’enregistrement… [Hood, 2000], [Hood et al., 2003].
Exemple de l’extraction d’un PEV de son bruit
La figure V-1-28 montre l’exemple d’un potentiel évoqué visuel, réponse discernable du
« bruit » électro-encephalographique (EEG).
A droite : après traitement du signal, l’amplitude de la réponse évoquée par la
stimulation visuelle est de l’ordre de 20 V.
A gauche : le signal visuel émis au niveau du cortex occipital et recueilli en périphérie à
la suite d’une seule stimulation n’est pas discernable car « noyé » dans
l’électroencéphalogramme ambiant –qui constitue un bruit- dont l’amplitude est de
l’ordre de 50 V.
En procédant à un traitement du signal par sommation/moyennage de 100 réponses
individuelles par exemple, enregistrées en phase avec la répétition de la stimulation
visuelle, l’électro-encéphalogramme ambiant qui constitue ici le « bruit » est atténué d’un
facteur 10, ce qui ramène son amplitude de 50 à 5 V. La réponse visuelle qui est de
l’ordre de 20 V peut donc être discernable de ce bruit ; on a procédé à « l’extraction »
de la réponse de son bruit : c’est le PEV…
Rejets d’artéfacts
La technique de détection synchrone suppose plusieurs conditions qui doivent être
respectées pour lui donner toute son efficacité.
Dans le cas de fortes perturbations des réponses occasionnées par exemple par les
mouvements du patient, le nombre de sommations des réponses nécessaire pour
éliminer le bruit, peut s’avérer rédhibitoire. Dans ce cas, il est préférable de ne pas tenir
compte des réponses contenant des artéfacts.
14
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Elimination des réponses contenant des artéfacts
Pour ce faire, la plupart des logiciels de traitement des réponses évoquées incluent un
filtre de rejet d’artéfacts. Les réponses dont les amplitudes sont trop élevées ou de
vitesse de variation trop rapide, sont rejetées et ne sont pas sommées pour la
constitution de la réponse.
Contrôle de la stabilité des réponses individuelles
Par ailleurs, la réponse doit être présente dans chacun des enregistrements. Par
exemple, les enregistrements obtenus quand le patient ferme les yeux ou détourne son
regard de l’écran de stimulation, ne contiennent pas de réponse.
Il est donc nécessaire de les éliminer pour éviter que la moyenne des réponses ne soit
d’amplitude plus faible que celle de la réponse attendue. Il est donc souhaitable que
l’opérateur dispose d’un moyen de surveillance du sujet (caméra vidéo) et d’une
commande qui lui permette d’éliminer les « mauvaises » réponses.
Eviter les bruits synchrones au stimulus visuel
Enfin, les sources de bruits ne doivent pas être synchronisées à la stimulation visuelle.
Certains opérateurs essaient parfois d’attirer l’attention du patient en tapotant
régulièrement sur l’écran de stimulation ; le stimulus sonore ainsi produit est plus ou
moins synchrone de la stimulation visuelle. L’intention est louable mais peut générer une
réponse auditive qui interfère avec la réponse visuelle…
Validation statistique
La technique de détection synchrone permet d’améliorer le rapport signal sur bruit.
Cependant, à l’issue d’un examen, la question reste posée de savoir si le bruit a été
suffisamment atténué pour que la réponse obtenue soit significative et interprétable.
Nombre d’accumulations adapté mais constant
Il est souhaitable de choisir le nombre adapté d’accumulations, en fonction du rapport
signal sur bruit des réponses et de s’y tenir, quelles que soient les circonstances pour ne
pas faire apparaître artificiellement une réponse.
En effet, augmenter par exemple, le nombre de sommations des réponses individuelles
au cours de fortes altérations pathologiques, peut générer une réponse qui semble
discernable du bruit, alors que si on se tient au nombre prédéfini de sommations, elle est
d’amplitude comparable au bruit donc non discernable… une telle réponse n’est pas
fiable.
Validation de la réponse obtenue
Répétition de l’enregistrement : réponse reproductible ?
Une solution couramment utilisée pour valider la réponse consiste à répéter l’examen et
à regarder si les deux réponses ainsi obtenues sont similaires.
Cette procédure double la durée de l’examen ; sa répétition à un moment différent n’est
pas un gage de bonne qualité ; la seconde réponse obtenue peut être différente de la
première, ne permettant pas alors de conclure.
Cette procédure est cependant souvent utilisée chez l’enfant pour juger de la
reproductibilité de la réponse même au cours de conditions difficiles d’examen.
15
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Analyse statistique de la distribution des réponses
Une solution plus efficace consiste à faire une analyse statistique de la distribution des
réponses [Grall Y, 1977], [Hugeux JP et al., 1985].
La figure V-1-29 montre les courbes moyennes de réponses obtenues à l’issue d’examens
de potentiels évoqués visuels. Sur ces courbes moyennes apparaissent en pointillés les
courbes limites de l’intervalle de confiance de la réponse moyenne soit, pour chaque
point, la moyenne plus ou moins deux écarts-type.
On peut dès lors appliquer un critère statistique comme le test de Student pour
déterminer si une onde de la réponse moyenne est significativement différente du niveau
de bruit ou si deux ondes successives sont significativement différentes l’un de l’autre.
La figure V-1-30 montre deux exemples de ce type d’analyse statistique.
Pour la réponse moyenne figurée en haut, trois ondes sont bien individualisées ;
l’application du test de Student indique qu’il y a une probabilité de 99% pour que ces
ondes soient différentes du bruit.
Pour la réponse moyenne figurée en bas, cette probabilité n’est plus que de 69% pour les
trois ondes identifiées.
Probabilité des ondes d’appartenir à une réponse : 90%
Pour qu’un potentiel évoqué visuel soit bien discernable du bruit, il faut que ses ondes
soient différentes du bruit avec une probabilité supérieure à 90%, ce qui veut dire qu’il
n’y a que 10 % de chances que cette onde n’appartienne pas à la réponse.
Par contre, pour pouvoir interpréter les paramètres quantitatifs tels que les amplitudes
des ondes ou leurs temps de culmination, il est souhaitable d’obtenir une probabilité de
95 % ou plus.
Analyse statistique des données
Les réponses obtenues sont-elles normales ?
Si les réponses obtenues sont fiables, c'est-à-dire si la probabilité de survenue de leurs
ondes est élevée, comment savoir si ces réponses sont normales, c'est-à-dire si leurs
paramètres quantitatifs sont dans les limites de la normale ?
Pour ce faire, il faut appliquer un test statistique entre les valeurs obtenues et celles
d’une population dite « normale ». L’ISCEV recommande que chaque laboratoire réalise
ses propres normes, ce qui suppose d’effectuer chaque examen sur une centaine de
sujets pour tenir compte de l’influence de l’âge...
Normes issues d’études multicentriques
Les constructeurs d’appareillages fournissent souvent des normes qui ont été obtenues
lors d’études multicentriques. Ces normes permettent de déterminer la normalité des
résultats à l’aide de « p-values » ou d’un code de couleur.
Cependant, ces normes correspondent à des conditions d’examen bien précises. Pour les
utiliser valablement, il est impératif de les respecter : même stimulation, même durée
d’adaptation, mêmes électrodes, même tranche d’âge du patient … D’où l’intérêt d’une
standardisation des conditions d’examen et des calibrations des appareillages entre
laboratoires.
16
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Dans l’exemple de la figure V-1-31, le temps de culmination de l’onde P100 est de 136
ms, surligné en rouge, ce qui signifie que sa probabilité d’être normale est inférieure à
0,5%. Il s’agit effectivement d’un temps de culmination augmenté par rapport à celui
normal d’une onde P 100.
Ce code de couleur est une aide précieuse à l’interprétation ; il recouvre une analyse
statistique de normalité ou non de la réponse et attire tout de suite l’attention comme ici,
sur l’anormalité du temps de culmination.
Conclusion
Les signaux interprétés résultent du recueil et traitements de différences de potentiel,
générées à la suite de stimulations appropriées, par les réponses de groupes cellulaires
situés loin des zones de recueil. Ils doivent en être le reflet le plus fidèle possible.
Les électrodes utilisées doivent introduire un minimum de signaux parasites et les
traitements mis en oeuvre aboutir à l’émergence d’une « réponse électrophysiologique »
discernable et interprétable.
Au médecin de connaître les grandes lignes des opérations de traitement du signal
effectuées pour y aboutir, d’en comprendre les limites et variations qui s’en suivent et de
faire la part entre une réponse, véritable reflet d’altérations fonctionnelles ou seule
traduction de distorsions liées aux traitements des signaux sous jacents...
Références (février 2010) des principales électrodes citées
BURRIAN ALLEN: http://www.hansenlab.com
DENCOTT: http://www.dencott.com
ERG JET: Fabrinal SA rue de la Tuilerie 42- La Chaux-de-Fonds CH-2300 SZ
GOLD LENS: http://www.diagnosysuk.com/html/goldlens.html
HK-LOOP : Pr. M. Hawlina. University Eye Clinic, Medical Centre Ljubljana, Ljubljana, Slovenia.
[email protected]
17
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Figures
18
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
19
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
20
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
21
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
22
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
23
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
24
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
25
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
26
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
27
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
28
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
29
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
30
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
31
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
32
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
33
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Bibliographie
Almoqbel, F., Leat, S.J., & Irving, E. (2008). The technique, validity and clinical use of
the sweep VEP. Ophthalmic Physiol Opt, 28 (5), 393-403. [Abstract]
Binnie CD, Cooper R, Fowler CJ, Maugières F, & Prior PF (1996). Clinical Neurophysiology,
Electromyography, Nerve conduction and Evoked Potentials. (p. 572): Osselton JW, Ed
in Chief, Butterworth Heinemann.
Bradshaw, K., Hansen, R., & Fulton, A. (2004). Comparison of ERGs recorded with skin
and corneal-contact electrodes in normal children and adults. Doc Ophthalmol, 109 (1),
43-55. [Abstract]
Chiappa KH (1985). Evoked potentials in clinical medicine. (p. 340): Raven Press, New
York.
Dawson, W.W., Trick, G.L., & Litzkow, C.A. (1979). Improved electrode
electroretinography. Invest Ophthalmol Vis Sci, 18 (9), 988-991. [Abstract]
for
Esakowitz, L., Kriss, A., & Shawkat, F. (1993). A comparison of flash electroretinograms
recorded from Burian Allen, JET, C-glide, gold foil, DTL and skin electrodes. Eye, 7 ( Pt
1), 169-171. [Abstract]
Grall Y (1977). Les potentiels évoqués du cortex visuels. J Psychologie normale et
pathologique, (1), 39-42.
Hawlina, M., & Konec, B. (1992). New noncorneal HK-loop electrode for clinical
electroretinography. Doc Ophthalmol, 81 (2), 253-259. [Abstract]
Holder, G.E., Brigell, M.G., Hawlina, M., Meigen, T., Vaegan, & Bach, M. (2007). ISCEV
standard for clinical pattern electroretinography--2007 update. Doc Ophthalmol, 114 (3),
111-116. [Abstract]
Hood, D.C. (2000). Assessing retinal function with the multifocal technique. Prog Retin
Eye Res, 19 (5), 607-646. [Abstract]
Hood, D.C., Odel, J.G., Chen, C.S., & Winn, B.J.
electroretinogram. J Neuroophthalmol, 23 (3), 225-235.
(2003).
The
multifocal
Hugeux JP, Charlier J, Hache JC, & Moschetto Y (1985). Validation et traitement assistés
par ordinateur des signaux électrophysiologiques recueillis en clinique ophtalmologique
chez les très jeunes enfants. Innov Tech Biol Med, (6), 407-419.
Marmor, M.F., Fulton, A.B., Holder, G.E., Miyake, Y., Brigell, M., & Bach, M. (2009).
ISCEV Standard for full-field clinical electroretinography (2008 update). Doc Ophthalmol,
118 (1), 69-77. [Abstract]
Regan D (1989). Human brain electrophysiology. Evoked potentials and evoked magnetic
fields in Science and medicine. (p. 672): Elsevier, New York, Amsterdam, London.
Ridder, W.H., 3rd (2004). Methods of visual acuity determination with the spatial
frequency sweep visual evoked potential. Doc Ophthalmol, 109 (3), 239-247. [Abstract]
34
Œil et Physiologie de la Vision - V-1
Ridder, W.H., 3rd, McCulloch, D., & Herbert, A.M. (1998). Stimulus duration, neural
adaptation, and sweep visual evoked potential acuity estimates. Invest Ophthalmol Vis
Sci, 39 (13), 2759-2768. [Abstract]
Sutter, E. (2000). The interpretation of multifocal binary kernels. Doc Ophthalmol, 100
(2-3), 49-75. [Abstract]
Yadav, N.K., Almoqbel, F., Head, L., Irving, E.L., & Leat, S.J. (2009). Threshold
determination in sweep VEP and the effects of criterion. Doc Ophthalmol, 119 (2), 109121. [Abstract]
Zanlonghi, X. (1999). ERG de l'enfant. In Exploration de la fonction visuelle (pp. 595618). Paris: Masson.
35
Téléchargement