Ammoniémies L’ammoniaque est un constituant azoté non protéique du sang. À pH physiologique, l’ammoniémie est représentée par l’ion NH4+ pour 98 % et seulement à 2 % par le NH3. NH4+ provient de la désamination oxydative des acides aminés et des fermentations bactériennes. Sa synthèse a lieu principalement dans l’intestin, un peu au niveau rénal et musculaire où il est formé à partir des acides aminés mais aussi des nucléotides puriques. Il circule dans l’organisme sous forme de glutamine formée à partir de l’acide glutamique mais on retrouve un peu d’ammonium libre dans le sang. L’ammoniaque est un élément toxique qui doit rapidement être transformé. Sa détoxication a lieu au niveau hépatique par formation d’urée qui sera ensuite éliminée dans les urines. Il est également utilisé au niveau rénal comme transporteur des ions H+ pour leur excrétion urinaire. Les taux physiologiques de l’ammoniaque sont faibles : < 40 μmol/l. Ils sont influencés par l’alimentation. Augmentée au cours des régimes riches en protéines, l’ammoniémie est diminuée au cours des régimes végétariens. Une hyperammoniémie transitoire peut être observée chez le nouveau-né. Elle peut être due à une immaturité des enzymes du cycle de Krebs ; le dosage répété montrera un retour rapide aux valeurs classiques. Les valeurs normales de l’ammoniémie sont : • hommes : 14,7 à 55,3 μmol/l ; • femmes : 11,2 à 48,2 μmol/l. Elles varient en fonction du prélèvement, elles sont plus basses sur du sang veineux. Elles varient légèrement en fonction du sexe et surtout elles sont plus élevées chez le nouveau-né. Hyperammoniémie L’hyperammoniémie peut être la conséquence d’anomalies héréditaires du métabolisme, mais aussi d’anomalies acquises. — Anomalies héréditaires • Anomalies du cycle de l’urée, dues à un déficit pouvant porter sur l’une des 6 enzymes de ce cycle. Le plus fréquent est celui de l’ornithine carbamyltransférase, de transmission génétique liée à l’X. La gravité des signes cliniques est liée à l’importance du déficit qui peut être variable. • Anomalies du transfert des métabolites de ce cycle de l’urée : hyperlysinurie, triple H (hyperammoniémie, hypercitrullinurie et hyperornithinurie). • Acidémies organiques : propionique, méthylmalonique, isovalérique. Ces pathologies sont rares. Un dosage des acides aminés et organiques urinaires permet une orientation diagnostique, qui doit être confirmée par le dosage de l’activité enzymatique. — Anomalies acquises • Surtout représentées par les insuffisances hépatiques sévères, puisque le foie est le seul organe capable d’éliminer l’ammoniaque. Elles peuvent être aiguës : intoxications, hépatites fulminantes, syndrome de Reye, ou chroniques comme la cirrhose. • Les shunts porto-caves, car il n’y a pas de passage hépatique et donc pas de détoxication. • L’acidose : elle déséquilibre la transformation de NH4+ en NH3 (seul élément participant au cycle de l’urée) et ralentit donc son excrétion, en particulier dans l’insuffisance rénale. • Certains traitements médicamenteux à base d’acides organiques, comme l’acide valproïque. • L’ammoniaque est augmenté en cas de libération massive dans la circulation : hémorragies digestives, par exemple. Les signes cliniques de l’hyperammoniémie sont identiques quelle que soit la cause, mais sont liés à sa durée et à la concentration plasmatique : • une hyperammoniémie aiguë entraîne un phénomène de léthargie, de vomissements, une perte de conscience pouvant aller jusqu’au coma et entraîner la mort ; • une hyperammoniémie chronique et récurrente est associée à des dommages cérébraux irréversibles avec retard mental. Chez le nouveau-né, la pathologie métabolique se déclare rapidement, dans la première semaine de vie et même souvent le premier jour par une léthargie, un refus de téter et des pertes de conscience. L’ammoniaque est un stimulant respiratoire et l’alcalose respiratoire est souvent une bonne orientation diagnostique. Chez l’adulte, l’apparition des hyperammoniémies peut être épisodique et aller de formes modérées à sévères. Une hyperammoniémie modérée entraîne souvent des vomissements et des céphalées progressant vers la léthargie et la confusion. Dans les formes plus sévères, il existe des troubles neurologiques et des troubles de la conscience. Les signes cliniques évocateurs doivent amener à effectuer un dosage de l’ammoniaque, dont l’augmentation se révèle très importante dans les cas d’intoxications aiguës (100 μmol/l) mais qui peut être discrète, voire normale dans les phases non décompensées. Il peut alors être utile d’effectuer un cycle d’ammoniémie au cours d’une journée, avant et après chaque repas. Pour éliminer l’ammoniaque accumulé, on a recours à l’hémodialyse, la dialyse péritonéale, dans le traitement d’urgence ou à l’injection d’arginine, de benzoate de sodium ou de phénylacétate de sodium en fonction du déficit enzymatique détecté, car ceux-ci suppléent ou stimulent les activités déficitaires. Lorsque le diagnostic de ces maladies est posé, il est nécessaire d’éliminer ou de tenter d’éliminer toute source d’apport d’ammoniaque et en particulier de respecter un régime strict sur la quantité de protides, en ne donnant que la ration protéique correspondant au minimum des besoins. L’étape préanalytique est capitale pour un dosage fiable. Le sang doit être recueilli impérativement sur EDTA et rapidement centrifugé. Tout délai entre la séparation du plasma et des globules entraîne une augmentation de l’ammoniaque in vitro ; • l’hémolyse gêne la détermination, les érythrocytes contenant de l’ammoniaque ; • le plasma doit être congelé rapidement pour éviter la désamidation de la glutamine. Sans congélation, l’analyse doit être effectuée dans la demi-heure qui suit le prélèvement.