RÉSUMÉ
Dans un pays en voie de développement comme le Mali où l’austérité généralisée se
conjugue mal avec le vide laissé par l’État, certains segments de la population,
notamment les femmes et les enfants, subissent la crise économique de plein fouet. En
réponse à cette situation, des groupes de femmes de Bamako ont décidé de s’engager
dans le petit commerce des biens de première nécessité alimentaires et d’équipement.
La précarité de la situation de ces femmes a été longtemps ignorée ou sous estimée
par les pouvoirs publics. En prenant en main leur destinée, elles ont créé des réseaux
commerciaux entre le Mali, le Togo et le Bénin. Nous examinons ici les fonctions
économiques et sociales de ces réseaux et analysons en profondeur leurs mécanismes de
fonctionnement.
Après un portrait succinct des membres et des leaders du réseau, nous montrons les
modes d’organisation de leurs opérations : le convoi de cars, l’hébergement et les
différentes prises en charge, l’acquisition des marchandises au Togo et au Bénin et leur
écoulement au Mali. Nous n’avons pas non plus ignoré les difficultés auxquelles le réseau
est confronté (tracasseries administratives, douanières et policières) ainsi que les
difficultés plus individuelles (accès au crédit, concurrence acharnée des commerçants
chinois, harcèlement des services de taxes de marchés, etc.).
Dans la dernière partie, nous discutons l’opportunité d’une plus grande intervention
de l’État dans ce secteur compte tenu des nombreuses contradictions qu’il comporte : son
importance économique et sa fonction sociale de filet de sécurité face aux dangers pour la
santé publique et l’évasion fiscale généralisée.
Nous estimons que ce secteur devrait être accompagné par des autorités publiques
en valorisant l’activité de ces femmes qui luttent âprement contre la pauvreté, grâce à des
mesures législatives incitatives (abattement de taxes et certaines franchises fiscales). Les
pouvoirs publics devraient tout faire pour faciliter expressément l’accès des femmes
commerçantes au micro crédit et à la formation qualifiante, par exemple.