Université Francois Rabelais de Tours Master de Mathématiques Solutions Feuille de Travaux Dirigés n◦ 5 M1, Algèbre Semestre 8 Exercice 1 Soit K un corps et L une extension de K. Soient α, β ∈ L deux nombres algébriques sur K de degrés respectifs p et q. 1) Montrer que [K(α, β) : K] ≤ pq. Solution: D’après le Thérorème de la base téléscopique, on a [K(α, β) : K] = [K(α, β) : K(α)] · [K(α) : K] Le degré de l’extension [K(α, β) : K(α)] = [K(α)(β) : K(α)] est inférieur ou égal à [K(β) : K] . En effet, le polynôme minimal de β sur K est a fortiori, un polynôme annulateur de β sur K(α). Ainsi [K(α, β) : K] ≤ [K(β) : K] · [K(α) : K] = pq. 2) On suppose que p et q sont premiers entre eux. Montrer que [K(α, β) : K] = pq. Solution: D’après le Thérorème de la base téléscopique, on a [K(α, β) : K] = [K(α, β) : K(α)] · [K(α) : K] =⇒ [K(α) : K] divise [K(α, β) : K] et [K(α, β) : K] = [K(α, β) : K(β)] · [K(β) : K] =⇒ [K(β) : K] divise [K(α, β) : K]. Comme [K(α, β) : K] ≤ pq et p et q sont premier entre-eux, on en déduit que [K(α, β) : K] = pq. Exercice 2 On considère le polynôme P (X) = X 4 + X 3 + 2X + 1. 1) Vérifier que dans Z/2Z[X], le seul polynôme de degré 2 irréductible est X 2 + X + 1. En déduire que P est irréductible dans Z/2Z[X]. Solution: Il suffit de remarquer que c’est le seul polynôme de degré deux qui n’a pas de racine. SOit P la réduction modulo 2 de P . On a encore deg(P ) = 2. Le polynôme P n’a pas de racine, donc si on peut le factoriser sur F2 , ce sera comme produit de deux polynômes irréductibles de degré 2. Or c’est impossible puisque (X 2 + X + 1)2 = X 4 + X 2 + 1 6= P . Ainsi P est irréductible sur F2 et P est irréductible sur Q. 2) Soit α ∈ C une racine de P . Déterminer le degré [Q(α) : Q] et donner une base de Q(α) sur Q. Solution: On a [Q(α) : Q] = 4 et (1, α, α2 , α3 ) forme une base de Q(α) sur Q. 3) Exprimer dans cette base les nombres suivants : α4 , α5 , 1 1 , . α α2 + α + 1 Solution: Après calculs, on trouve α4 = −α3 − 2α − 1 α5 = α3 − 2α2 + α + 1 1 = −α3 − α2 − 2 α 1 1 = (α3 + α2 − 3α + 8) α2 + α + 1 7 Exercice 3 Déterminer le corps de décomposition des polynômes suivant ainsi que le degré de l’extension : 1) x4 − 1 Solution: E = Q(1, −1, i, −i) = Q(i) et donc [E : Q] = 2. 1 2) x4 + 1 Solution: The roots of x4 + 1 are eπi/4 , e3πi/4 , e5πi/4 , and e7πi/4 . Therefore E = Q(eπi/4 ), and [E : Q] = 4 (since x4 +1 is irreducible over Q, for example by looking at f (x+1) and using Eisenstein). 3) x4 − 4x2 + 2 p p √ √ Solution: The roots are t1 = 2 + 2, t2 = 2 − 2, t3 = −t1 and t4 = −t2 . Thus E t2 ). √ = Q(t1 , √ 4 − 2 = 2, However we claim that t ∈ Q(t ), and hence E = Q(t ). To see this, note that t t = 2 1 1 1 2 √ and 2 = t21 − 2. Therefore t2 = t1 − 2/t1 ∈ Q(t1 ). Thus [E : Q] = 4 (because x4 − 4x2 + 2 is irreducible, and is the minimal polynomial for t1 ). 4) (x2 − 2)(x2 + 3) √ √ √ √ Solution: The roots are ± 2, ± 3i. Thus E = Q( 2, 3i). Furthermore, √ √ √ √ √ √ [Q( 2, 3i) : Q] = [Q( 2, 3i) : Q( 2)][Q( 2) : Q] = 2 × 2 = 4. √ √ √ √ Here we have computed [Q( 2, 3i) : Q( 2)] by noting that x2 +3 is irreducible over Q( 2) because the roots are not real. 5) x3 − 5x2 + 9x − 5 Solution: We can’t as easily write down the roots in this case. However note that the polynomial is not irreducible, because of the root x = 1. After factorising we have f (x) = (x − 1)(x2 − 4x + 5). The roots of the quadratic are 2 ± i. Thus E = Q(1, 2 + i, 2 − i) = Q(i), and so [E : Q] = 2. Exercice 4 Dans chacun des cas suivants, déterminer un polynôme ayant le corps donné comme corps de décomposition : √ 1) Q( 2) Solution: There are infinitely many possible polynomials : For example f (x) = x2 − 2, or f (x) = (x2 − 2)(x + 1). √ 2) Q( 3 2, e2πi/3 ) Solution: For example, f (x) = x3 − 2. √ √ 3) Q( 2 + 3) √ √ √ √ Solution: Let t = 2+ 3. Then (t− 2)2 = 3, and so t2 −2 2t−1 = 0. Thus 8t2 = (t2 −1)2 = t4 − 4 2 4 2 2t2 +1, √ and √ so t√−10t √ = 1 = 0.√So t√is a root of the polynomial f (x) = x −10x +1. √ The √ other √ roots √ are 2− √3, −√2+ 3, and − 2− 3. Thus the splitting field of f (x) is E = Q( 2+ 3, 2− 3). √ √ √ √ √ √ However 2 − 3 = −1/( 2 + 3) ∈ Q( 2 + 3), and thus E = Q( 2 + 3). Remark : Sometimes we need to do some clever simplifications to see splitting fields in their simplest formulations. The above is a good example : Suppose that we are asked to compute the splitting field of f (x) = x4 − 10x2 + 1 (that is, working back p the√other direction). We’d go about finding the roots, √ √ t2 = 5 ± 25 − 1 = 5 ± 2 6. Thus t = ± 5 ± 2 6. Hang from √ these √ don’t look like the roots √ √ √ on, 6 = ( √2 ± 3)2 , we have t = ±( 2 ± 3), the paragraph above ! We need to simplify.√Since√5 ± 2 √ and so E = Q(t1 , t2 , −t1 , −t2 ) where t1 = 2 + 3 and 2 − 3. Then, as above, since t2 = −1/t1 we have E = Q(t1 ). 2 2 Remark √ √ : Another possible polynomial is f (x) = (x − 2)(x − 3).√This√has splitting √ √field E = Q( 2, 3), and as an exercise (see last week) you can check that Q( 2 + 3) = Q( 2, 3). Exercice 5 Montrer que l’ensemble des complexes algébriques sur Q est la clôture algébrique de Q. Solution: Rappelons la définition de clôture algébrique de Q. C’est la plus petite extension algébrique L de Q dans laquelle tout polynôme à coefficient dans L se factorise complètement. En particulier, tout polynôme à coefficients dans Q doit se factoriser complètement, on voit que donc l’ensemble des complexes algébriques M sur Q estPinclu dans L. Si on montre que M est algébriquement clos, on aura le résultat. Soit un polynôme P = ai X i de degré n à coefficients dans M . Le polynôme est en fait à coefficients dans Q(a0 , . . . , an ). Or cette extension est de degré fini puisque Y [Q(a0 , . . . , an ) : Q] ≤ [Q(ai ), Q]. 2 Soit α une racine de P . On a [Q(a0 , . . . , an , α) : Q] ≤ [Q(a0 , . . . , an , α), Q(a0 , . . . , an )] · [Q(a0 , . . . , an ) : Q] < +∞. | {z } ≤n Puisque [Q[α] : Q] | [Q(a0 , . . . , an , α) : Q] on voit que α est algébrique sur Q. Ainsi M est algébriquement clos et M = Q. Exercice 6 On considère le polynôme P = X 3 + pX + q ∈ C[X]. Soient x1 , x2 , x3 les racines de P dans C. On définit le discriminant de P par ∆ = (x1 − x2 )2 (x1 − x3 )2 (x2 − x3 )2 . 1) Pour k ∈ N, on note sk = xk1 + xk2 + xk3 . En utilisant les relations entre coefficients et racines, calculer sk en fonction de p, q pour 1 ≤ k ≤ 6 . Solution: On a σ1 σ2 σ3 = x1 + x2 + x3 = 0 = x1 x2 + x1 x3 + x2 x3 = p = x1 x2 x3 = q De plus s0 = 3 s1 = x1 + x2 + x3 = σ1 = 0 s2 = x21 + x22 + x23 = σ12 − 2(x1 x2 + x1 x3 + x2 x3 ) = s21 − 2σ2 = −2p s3 = (x21 + x22 + x23 ) · (x1 + x2 + x3 ) − (x1 + x2 + x3 )(x1 x2 + x2 x3 + x1 x3 ) + 3x1 x2 x3 = s2 σ1 − s1 σ2 + s0 σ3 = 3q s4 = (x31 + x32 + x33 ) · (x1 + x2 + x3 ) − (x21 + x22 + x23 )(x1 x2 + x2 x3 + x1 x3 ) + (x1 + x2 + x3 )x1 x2 x3 = s3 σ1 − s2 σ2 + s1 σ3 = 2p2 On peut montrer que pour tout n ≥ 3, on a sn = sn−1 σ1 − sn−2 σ2 + sn−3 σ3 2) On introduit la matrice de Van der Monde M ∈ M3 (C) définie par mij = xij−1 . En remarquant que ∆ = det(t M M ) montrer que ∆ = −4p3 − 27q 2 . Solution: On a 1 M := 1 1 x1 x2 x3 x21 x22 x23 et on sait que det(M ) = (x1 − x2 )(x2 − x3 )(x1 − x3 ) d’où det(t M M ) = ∆2 . On a aussi s0 s1 s2 3 0 −2p t −2p 3q . M M = s1 s2 s3 = 0 s2 s3 s4 −2p 3q 2p2 Après calcul du déterminant on trouve ∆ = −4p3 − 27q 2 . 3) On suppose que p et q sont réels. Discuter le nombre de racines réelles de P en fonction du signe de ∆. Solution: Puisque le degré de P est impair, P admet au moins une racine réelle par le théorème des valeurs intermédiaire. De plus, si P admet une racine complexe non-réelle α alors, comme ses coefficients sont réels, P admet aussi α comme racine. On remarque que dans ce cas P n’a pas de racine double. On a donc trois possibilités : 3 (a) P a trois racines réelles distinctes alors ∆ = ((x1 − x2 )(x2 − x3 )(x1 − x3 ))2 > 0. (b) P admet une racine de multiplicité au moins 2 alors toutes les racines de P sont réelles et ∆ = 0. (c) P admet une racine réelle x et deux racines complexes conjuguées α = a + ib et α = a − ib. Alors ∆ = ((x − α)(x − α)(α − α)) 2 = −4b2 · (x2 − 2ax + |α|2 )2 < 0. Finalement, on voit que (a) si ∆ > 0 alors P admet 3 racines réelles distinctes ; (b) si ∆ = 0 alors P admet une racine (au moins) double et toutes ses racines sont réelles ; (c) si ∆ < 0 alors P admet une racine réelle x et deux racines complexes conjuguées. 4) On suppose que p et q sont rationnels et que P est irréductible dans Q[X]. Soit L = Q(x1 , x2 , x3 ) le corps engendré par les racines de P . (a) Montrer que ∆ 6= 0. Solution: Il suffit pour cela de montrer que P n’admet pas de racines doubles. Supposons que α est racine double de P . Alors α est racine de P et P 0 , c’est-à-dire : ( α3 = −pα + q α2 = − p3 Le cas p = 0 donne alors q = 0 et P = X 3 ce qui absurde. Si p 6= 0 alors α = 3q ∈ Q ce qui est 2p impossible puisque P est irréductible sur Q. (b) Déterminer le degré [Q(x1 ) : Q]. Solution: Puisque P est irréductible et x1 est racine de P , on a [Q(x1 ) : Q] = 3. (c) En utilisant les relations entre coefficients et racines, montrer que (x1 − x2 )(x1 − x3 ) = 3x21 + p. Solution: On a (x1 − x2 )(x1 − x3 ) = x21 − x1 (x2 + x3 ) + x2 x3 | {z } =−x1 = = = = √ x21 x21 + + 2x21 3x21 x21 x21 + (p − x1 x3 − x1 x2 ) + p − x1 (x3 + x2 ) + p + x21 + p. √ (d) En déduire que L = Q(x1 , ∆) où ∆ ∈ C est une racine carrée de ∆. √ Solution: On peut prendre ∆ = (x1 − x2 )(x2 − x3 )(x1 − x3 ). On a √ √ √ ∆ = (x2 − x3 ) ∈ Q(x1 , ∆) et x1 = −x2 − x3 ∈ Q(x1 , ∆). 2 3x1 + p √ Et comme x1 = −x2 − x3 ∈ Q(x1 , ∆), on a aussi √ √ 1 1 − ((x2 − x3 ) + x1 ) = x3 ∈ Q(x1 , ∆) et ((x2 − x3 ) − x1 ) = x2 ∈ Q(x1 , ∆). 2 2 √ Ainsi L ⊂ Q(x1 , ∆). L’inclusion inverse est évidente d’où l’égalité. (e) En déduire que √ 3 si ∆ ∈ Q [L : Q] = 6 sinon √ √ Solution: Si ∆ ∈ Q alors [L : Q] = [Q(x1 ) : Q] = 3. Si ∆ ∈ / Q alors √ [L : Q] = [Q(x1 , ∆) : Q(x1 )] · [Q(x1 ) : Q] = 6. | {z } =2 car ∆ ∈ Q 4 5) Calculer [L : Q] pour chacun des polynômes suivants : (a) x3 − x + 1 √ Solution: On trouve ∆ = −23 et donc [L : Q] = 6 puisque ∆ ∈ / Q. (b) x3 − 3x + 1 √ Solution: On trouve ∆ = 34 et donc [L : Q] = 3 puisque ∆ = 9 ∈ Q. (c) x3 − 4x + 1 √ Solution: On trouve ∆ = 229 et donc [L : Q] = 6 puisque ∆ ∈ Q. Exercice 7 1) Montrer que le polynôme X 2 + 1 est irréductible sur Z/7Z. Solution: Ce polynôme est de degré deux et n’a pas de racine dans F7 , il est donc irréductibles. 2) Soit L le corps de rupture de X 2 + 1 sur Z/7Z et i une racine de X 2 + 1 dans L. Quel est le cardinal de L ? Donner une base de L sur Z/7Z. Solution: Puisque L est de dimension 2 en tant que F7 espace vectoriel, |L| = 72 = 49. Par exemple (1, i) est une base de L sur F7 . 3) Calculer dans L : (2 + 3i) × (4 + 5i), (3 + 2i)−1 . Solution: On a (2 + 3i) × (4 + 5i) = 8 + 10i + 12i − 15 = i. Il ya plusieurs possibilités pour calculer (3 + 2i)−1 . Par exemple : 1 3 − 2i 3 − 2i = = = −3 + 2i. 3 + 2i (3 + 2i)(3 − 2i) −1 4) Vérifier que 3+i est un générateur du groupe multiplicatif (L∗ , ×). Quel est le nombre de générateurs de ce groupe ? Les exprimer en fonction de 3 + i. Solution: Il faut montrer que (3 + i) est d’ordre 48. Il suffit pour cela de montrer que (3 + i) n’est pas d’ordre 2, 3, 4, 6, 8, 12, 16, 24. Si (3 + i)1 6 6= 1 alors (3 + i) ne pourra pas être d’ordre 2, 4, 8, 16. De même si (3 + i)2 4 6= 1 alors (3 + i) ne pourra pas être d’ordre 3, 6, 12. Il suffit donc de montrer que (3 + i)1 6 6= 1 et (3 + i)2 4 6= 1. Nous sommes dans un corps de caractéristique 7, ainsi (a + b)7 = a7 + b7 pour tout a, b ∈ L. De plus, pour tout a ∈ F7 , on a a7 = a. Finalement : (3 + i)1 6 = (3 + i)7 (3 + i)7 (3 + i)2 = (37 + i7 )(37 + i7 )(1 − i) = (3 − i)(3 − i)(1 − i) = (1 + i)(1 − i) =2 et (3 + i)2 4 = (3 + i)7 3 (3 + i)3 = (3 − i)3 (3 + i)3 = (2)3 = −1 d’où le résultat. Tous les autres générateurs de F∗7 sont de la forme (3 + i)k où pgcd(k, 48) = 1, il y en a donc ϕ(48) où ϕ est l’indicatrice d’Euler. 5) Montrer que tout élément de Z/7Z admet une racine carrée dans L. (On ne demande pas de calculer ces racines carrées.) Solution: Soit a ∈ F7 . Il existe k tel que a = (3 + i)k . De plus a6 = 1 et donc (3 + i)6k = 1 ce qui implique que 48 divise 6k. On voit alors que 8 divise k, en particulier, k est pair. Ainsi (3 + i)k/2 est une racine carré de a. 5 6) Soit x ∈ Z/7Z. Montrer que si x admet une racine cubique dans L, alors en fait x admet une racine cubique dans Z/7Z. Déterminer explicitement les x ∈ Z/7Z qui vérifient cette propriété. Solution: On considère le polynôme P = X 3 − x. Si x admet une racine cubique dans L, cela signifie que P admet une racine α dans L. On a de plus 2 = [L : F7 ] = [L : F7 (α)] · [F7 (α) : F7 ]. Si P n’admet pas de racine dans F7 alors P est irréductible puisqu’il est de degré 3 mais alors [F7 (α) : F7 ] = 3 ce qui impossible. On voit donc que P admet nécessairement une racine dans F7 . Il est clair que 0 admet pour unique racine cubique 0. Soit x ∈ F∗7 tel que x admet une racine cubique. Il existe a ∈ F∗7 tel que x = a3 . On a donc, en passant au carré, x2 = a6 = 1 puisque le groupe F∗7 est cyclique d’ordre 6. Ainsi x = ±1. Réciproquement, 1 et −1 admettent 1 et −1 pour racine cubique. 6