Quelle avenir pour les autorités administratives indépendantes ?
Introduction aux autorités administratives indépendantes :
Le vocable d'« autorité administrative indépendante » (AAI) apparaît pour la première fois à
travers les conclusions du commissaire du gouvernement Rivaud1, avant d'être repris par la loi
n°78-17 portant création de la Commission nationale de l'informatique et des libertés. « Devenu un
terme « passe-partout » »2, il se rapporte classiquement à une structure de droit public à vocation
générale ou spéciale. Structure qui est dotée d'une assise juridique et morale. L'organisme dispose,
dans un premier volet, d'un pouvoir de décision lui permettant, selon ses statuts, de transiger, de
concilier, d'enjoindre, d'attribuer des droits individuels, d'adopter des sanctions pécuniaires ou
administratives, outre des règlements « de portée limitée tant par leur champ d'application que par
leur contenu »3. La seconde sphère s'apparente à l'office d'une « magistrature morale »4. Elle se
traduit par l'édiction de mesures souples, dont l'avis et la recommandation sont la plus nette
illustration. Dépourvues, en principe, de personnalité morale, ces autorités sont « des institutions
publiques qui relèvent de l'exécutif (…) partie intégrante de l'administration au sens courant du
terme »5. On peut les regarder comme « des prolongements de l’État, des représentations de
l’État »6. Le Conseil constitutionnel à ce titre use parfois des termes d'« administrations de l’État »7
pour les décrire. « C'est toujours l’État qui parle et agit par l'intermédiaire et sous couvert de ces
autorités »8. S'il appartient à ce dernier de répondre de leurs actions9 devant la juridiction
administrative, ces entités peuvent néanmoins ester en justice10. L'indépendance et l'impartialité de
leurs membres à l'égard de l'exécutif comme des acteurs concernés constituent finalement un de
leurs critères d'identification ; qualités faisant l'objet d'une surveillance accrue de la part des juges
ordinaires, constitutionnels et européens à propos de leur posture quasi-juridictionnelles. Ces traits
n'en demeurent pas moins « l'expression d'un oxymore (…) : celui d'être à la fois une autorité
administrative, (...) relevant de l'exécutif de l’État, mais en même temps une autorité indépendante,
et donc soustraite au principe rappelé par l'article 20 de la Constitution »11.
1 - Concl. sur CE, 6 déc. 1968, Ministre des armées c/ Ruffin
2 - M-J Guédon, N. Decoopman, « Les autorités administratives indépendantes dans le domaine économique et financier », Mission de recherche
Droit et Justice, Oct. 2000, p. 16
3 - Notamment, DC n°89-260, 28 juill. 1989, Loi relative à la sécurité et à la transparence du marché financier
4 - P. Icard, « Les autorités administratives indépendantes », Thèse, Dijon, 1992, p. 538
5 - F. Gazier, Y. Cannac, « Étude sur les autorités administratives indépendantes », EDCE, 1983-84, p. 39
6 - D. Linotte, R. Romi, « Services publics et droit public économique », 5e éd, Litec, 2003, p. 189
7 - V. DC n° 86-217, 18 sept. 1986, Loi relative à la liberté de communication
8 - J. Chevallier, « Réflexion sur l'institution des AAI », JCP G, 1986. 3254
9 - CE, 5 nov. 1993, Commission des opérations de bourse
10 - CE, 6 févr. 1981, Lacaze ; 12 oct. 1983, Lévi ; 22 juin 1984, Sté Pierre et Cristal ; v. également, CE, Ass, 30 nov. 2001, Min. c/ Kechichian
11 - Intervention de J-M. Sauvé du 11 février 2010, audition par C. Vanneste et R. Dosière, Députés, rapporteurs de la missions mission mise en place
par le Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) sur les autorités administratives indépendantes