Rachis, 1996, voL 8, n' 5 pp 251-260 ARTICLE ORIGINAL TRAITEMENT DU CANAL CERVICAL ÉTROIT AVEC MYÉLOPATHIE PAR UN DOUBLE ABORD SYSTÉMATIQUE POSTÉRIEUR PUIS ANTÉRIEUR A propos de 14 cas TREATMENT OF MYELOPATHY DUE TO CERVICAL SPINAL STENOSIS BY SYSTEMATIC DOUBLE APPROACH About 14 cases CH. MAZEL, M. TRABELSI, Institut Mutualiste D. GHOMRI, O.GUINGAND, Montsouris E. DE THOMASSON, R. TERRACHER C.M.C. de la Porte de Choisy 6, Place de Port au Prince - 75013 Paris RESUME SUMMARY Les auteurs présentent une série de 14 cas de myélopathie cervicarthrosique par sténose du canal cervical, traitée par double abord systématique: postérieur puis antérieur. Le temps postérieur consiste en une laminectomie à la scie oscillante, selon la technique de Roy-Camille, associée à une ostéosynthèse par plaques vissées. Le temps antérieur, réalisé systématiquement une semaine ~près, consiste en une corporectomie selon la technique de Simmons, de 15 mm de large environ, et comportant une libération foraminale bilatérale, ainsi que l'excision du ligament vertébral commun postérieur. Une greffe antérieure prélevée aux .<J,épensde la crête iliaque est réalisée sans ostéosynthèse. Tous les patients présentant des troubles de la marche ont été améliorés; dans tous les cas sauf un, la névralgie cervico-brachiale pré-opératoire a disparu totalement. Parmi les complications on note une embolie pulmonaire traitée par filtre cave, un syndrome cordonnal postérieur régressif en 4 jours, une irritation radiculaire par une vis mal positionnée justifiant l'ablation du matériel à 6 mois. Les auteurs défendent donc un double abord postérieur puis antérieur de principe dans le cas de sténose serrée responsable d'une myélopathie cervicarthrosique. The authors report a series of 14 cases of myelopathy due to cervical spinal stenosis, treated by double approach. They first realize a laminectomy according to RoyCamille's technique, using an oscillating saw. An instrumentation with two plates is realized. The second stage is per foramed 8 days later, through a left anterolateral approach: it consists in a corporectomy according to Simmon's technique, and an iliac graft, without instrumentation. ln this series of 14 cases, aU patients had troubles of deambulation, and 7 had radicular pain. AU patients have been improved, and radiculalgia has disappeared in aU cases. The complications were 1 lung embolism, 1 radiculalgia due to a misplaced screw, requiring the removal of the osteosynthesis 6 months later. The authors propose this double approach in severe cases of myelopathy due to cervical spine stenosis, and obtain better results than with a single approach. Mots clés: Canal cervical Keys words : Myelopathy - Cervical spine - Laminectomy Osteosynthesis - Corporectomy. Ostéosynthèse étroit - Laminectomie - Corporectomie postérieure - Arthrodèse antérieure - Myélopathie. - 251 - Arthrodesis - CH. MAZEL. M. TRABELSI, D. GHOMRI, O. GUINGAND, R. TERRACHER Cette tactique opératoire, outre l'intérêt d'une qualité de décompression optimale, permet de travailler dans de bonnes conditions neurologiques: le fait de pratiquer l'abord postérieur de laminectomie et de fixation première, autorise quelques jours plus tard à effectuer un abord de décompression avec un "coussin" protecteur en arrière de la moelle. En effet, la moelle qui est inévitablement refoulée lors de l'abord antérieur par les manœuvres de la curette ou de la fraise n'est plus bloquée en arrière par les lames. Le "coussin" amortisseur ainsi disponible permet une bien meilleure expansion et un moindre traumatisme médullaire. C'est cette expérience que nous rapportons dans cet article, Le traitement chirurgical du canal cervical étroit se heurte à un double impératif neurologique et mécanique, L'impératif neurologique E. DE THOMASSON, est le principal Il est essentiel d'effectuer une décompression de bonne qualité. Cette décompression est le gage de l'arrêt de l'évolution, voire de la régression de la myélopathie cervicarthrosique. Cette décompression est de façon classique effectuée soit par un abord postérieur unique soit par un abord antérieur unique, le choix de la voie d'abord était en général dicté par l'étiologie de la compression; à titre d'exemple: • OPLL (ossification of the posterior longitudinal ligament) justifiant une laminectomie, voire une laminoplastie; • discarthrose justifiant plutôt un abord antérieur avec corporectomie multi-étagée, En fait, le canal cervical étroit discarthrosique est rarement isolé antérieur ou postérieur. Dans de nombreux cas opérés par l'un ou l'autre des deux abords, il n'est pas rare dans les années suivant cette décompression chirurgicale, d'étre amené à rediscuter une indication opératoire complémentaire sur le versant qui n'a pas été décomprimé. Ainsi dans le cas d'une décompression postérieure, s'il y a eu une bonne régression des troubles sensitifs, il subsiste encore des troubles moteurs qui font discuter l'opportunité d'une décompression du cordon pyramidal par un abord antérieur. Inversement, dans le cadre d'un abord antérieur de corporectomie, ou de discectomie multi-étagée, si la régression ou la stabilisation des troubles moteurs est bonne, les troubles sensitifs peuvent subsister. HISTORIQUE ET ÉVOLUTION DES TECHNIQUES DE TRAITEMENT DU CANAL CERVICAL ÉTROIT La notion d'une atteinte médullaire par cervicarthrose (Barre 1974, Byron Stookey 1928, Alajouanine 1930) n'a été reconnue avec sa fréquence réelle que peu à peu à travers les études de Marcia Wilkinson 1960, de Breig et Turnbull 1966. La découverte des canaux congénitalement étroits (Payne et Spllane 1957), leur relation avec la cervicarthrose (Hink 1960) a attiré l'attention des chirurgiens sur leur fréquence. Le traitement, par analogie avec les compressions d'origine tumorales, était réalisé initialement par 1aminectomie; au symposium d'Edimbourg en 1960, sur ce sujet, la quasitotalité des auteurs faisait référence aux résultats de laminectomies. Les interventions par voie latéro-cervicale (Robinson et Smith 1955, Cloward i95S) (6,7) commençaient à avoir leur place dans le traitement des radiculalgies cervicobrachiales, mais n'étaient qu' exceptionn~llement proposées pour les atteintes médullaires, Depuis lors les études se sont multipliées, perme.~t~nt la comparaison d'un grand nombre de cas, d~ leur al1atomie, de leur sémiologie et de leur évolution. Les attitudes thérapeutiques s'étant ainsi diversifiées. ~ Le deuxième impératif est mécanique Qu'il s'agisse d'un abord antérieur ou postérieur, la stabilisation du rachis cervical n'est pas évidente. Dans le cas des laminectomies, la fréquence des swan-neck est loin d'être rare, même s'il n'est pas effectué d'arthrectomie, C'est pour cela que des auteurs ont décrit la laminoplastie. Dans le cas des abords antérieurs, un problème mécanique subsiste aussi. En effet, en cas de corporectomie étendue, la reconstruction est confiée soit à un greffon péronier, soit à un greffon iliaque tricortical et il est indispensable d'envisager une ostéosynthèse associée, Nous connaissons le caractère moyennement satisfaisant des ostéosynthèses antérieures isolées. Les démontages ne sont pas rares, La gêne avec dysphagie liée à la présence du matériel est aussi une complication post-opératoire immédiate non négligeable à prendre en compte. e' est l'ensemble de ces arguments qui nous a amenés à reconsidérer la tactique du traitement des canaux cervicaux étroits. Nous avons pris la décision de procéder à un double abord systématique, postérieur puis antérieur pendant la même hospitalisation, Tous les problèmes seraient donc résolus au décours de ces deux interventions chirurgicales. < , ' - -.,. i.' Les abords postérieurs Historiquement, la voie d'abord postérieure était la principale voie d'abord utilisée pour les interventions de myélopathies cervicarthrosiques jusque dans les années 1960 (40,13,15,25,32) , La laminectomie "Libérer" la moelle par laminectomie, lui permettre de s'écarter éventuellement des ostéophytes vertébraux antérieurs, est apparu comme une solution simple, peu aggressive, pouvant s'adresser aux canaux congénitalement rétrécis aussi bien qu'aux sténoses localisées, Les reproches à cette technique ne sont pas négligeables: - elles laissent persister les ostéophytes corporéau~ à la face 252 TRAITEMENT DU CANAL CERVICAL ÉTROIT PAR UN DOUBLE ABORD SYSTÉMATIQUE POSTÉRIEUR PRÉSENTATION antérieure de la moelle, qui continue à s'y appuyer comme sur un chevalet dans les mouvements de flexion. Or, c'est bien la cause de l'ischémie médullaire; - elle est trop limitée en largeur, elle est insuffisante; trop étendue en largeur et en hauteur, génératrice d'instabilité ultérieure (Allen 1952, Epstein 1953), au point que certains complètent la laminectomie par une ostéosynthèse. PUIS ANTÉRIEUR DE LA SÉRIE 14 patients ont été opérés: 8 hommes, 6 femmes. L'âge moyen est de 57 ans, entre 40 et 75 ans. L'étiologie de nos cas est dominée largement par la cervicarthrose dégénérative. Dans un cas, il s'agit de l'évolution arthrosique dans les suites d'une hernie cervicale opérée sans greffe associée. Ont été exclues de l'étude les myélopathies par sténose traumatique ainsi que les myélopathies par trouble statique majeur. La laminoplastie Durant ces dernières années, une autre technique chirurgicale par voie d'abord postérieure a été proposée: la laminoplastie qui comporte également quelques variantes (22,19,20). Par rapport à la laminectomie, elle semble avoir sensiblement les mêmes avantages. De plus, théoriquement, en raison de l'arche osseuse formée par les lames soulevées, elle empêcherait l'invasion du tissu cicatriciel provenant des muscles dans le canal rachidien (23,19,23). Pour certains auteurs, elle réduirait l'instabilité du rachis cervical (63,65), pour d'autres non. Ansi pour Gonzales Feria (19), une déformation en cyphose en post-opératoire était observée dans 30% des cas avec laminectomie et dans 28% des cas avec laminoplastie. ÉVOLUTION DE LA PATHOLOGIE ET NIVEAU DE LA STÉNOSE Le début des troubles chez nos patients date en moyenne d'un an. Seulement deux cas présentent une pathologie plus ancienne. Le début est lent et insidieux. Le tableau clinique des patients a été coté selon l'échelle fonctionnelle proposée par Nurick (25). La symptomatologie chez ces patients est polymorphe. Elle est dominée par plusieurs types de signes qui associent: névralgie cervico-brachiale 7 fois, troubles de la marche et dysesthésies 6 fois, tétraparésie, syndrome pyramidal 2 fois, faiblesse musculaire diffuse mal précisée Il fois, atrophie des deux membres supérieurs notamment au niveau de la première commissure 2 fois, cervicalgies rebelles 8 fois; des troubles sphinctériens par contre n'ont jamais été observés chez nos patients. Le degré d'invalidité est essentiellement constitué par des troubles de la marche: elle est faite selon la classification de Nurick. Stade 0: aucune évidence de lésion médullaire. Les abords antérieurs Robinson et Smith 1955, Cloward 1958 (6), Dereymaker 1963 (9), Verbiest 1966 (33), ont contribué à défendre les décompressions suivies de greffes par voie antéro-latérale. Initialement proposées dans le traitement des radiculalgies cervicales unco-disco-arthrosiques ou par hernie discale, ces techniques ont fait la preuve de leur relative bénignité, de leur efficacité dans la mesure ou elles suppriment le ou les éléments de compression antérieure, et assurent grâce à la greffe une correction parfaite des déformations et une bonne stabilité ultérieure. Stade 1: signes d'atteinte médullaire mais marche normale. Stade II: difficultés à la marche mais possibité de marcher plus d'un kilomètre. Activité professionnelle normale. Stade III: importantes difficultés à la marche, j usqu' à 400m sans assistance, ne peut travailler ou faire certaines tâches domestiques. Stade IV: marche impossible sans canne ou une personne. Stade V: incapable de se tenir debout et de marcher, état grabataire. La répartition pré-opératoire des cas de la série en fonction de cette classification est établie dans le tableau suivant: Stade 0: 0 cas Stade 1: 5 cas Stade II:3 cas Stade III: 3 cas Stade IV: 3 cas Stade V: 0 cas La libération est facile quand il s'agit de compression par ostéophytose cervicale limitée à un ou deux niveaux, sans sténose congénitale du canal cervical et sans éléments compressifs postérieurs. Elle est plus difficile si la lésion est plus étagée, si la morphologie du canal est très modifiée avec des éléments compressifs postérieurs et si la sténose du calibre vertébral est quasi complète. Ici l'opération risque d'être incomplète et éventuellement agressive pour la moelle. En outre, elle nécessite des corporectomie étendues suivies de greffes, une immobilisation post-opératoire plus longue. Les interventions combinées, laminectomies et opérations antérieures, apportent alors une solution satisfaisante aux cas où chacune des techniques isolément n'apparaît pas satisfaisante. Examens complémentaires Quel que soit le problème à résoudre existe le risque d'une tétraplégie post-opératoire. Etre efficace sans être agressif n'est pas facile. La chirurgie de la myélopathie cervicarthrosique reste une chirurgie à haut risque. La majorité de nos patients a bénéficié en pré-opératoire d'une double exploration-tomodensitométrique et IRM. 253 CH. MAZEL, M. TRABELSI, D. GHOMRI, O. GUINGAND, E. DE THOMASSON, R. TERRACHER ainsi progressivement la "carapace de homard". Les arcs postérieurs sont ainsi enlevés en monobloc et l'on constate l'expansion de la dure-mère qui dépasse la plan des massifs articulaires. Si l'excision postérieure n'a pas été complète et qu'il reste un spicule osseux appendu au bord interne des massifs articulaires, la dure-mère peut s'invaginer sur cet éperon qui peut ]a comprimer, voire même ]a perforer. Cette laminectomie est effectuée sur ]e nombre de niveaux Ces deux examens permettent de préciser au mieux la topographie de ]a sténose. La sténose ainsi explorée est établie comme présente à ]a fois en arrière et en avant dans les 14 cas. Elle prédomine en C4-C5 et C5-C6. L'atteinte intéresse deux étages dans 1 cas, trois étages dans 2 cas, quatre étages dans 7 cas, cinq étages dans 4 cas. à décomprimer, analysés sur ]'IRM pré-opératoire. Elle est toujours associée à une fixation correspondant aux étages pathologiques. Celle-ci est faite par l'intermédiaire de plaques d'ostéosynthèses de type Roy-Camille. Les vis sont placées dans les massifs articulaires comme habituellement. Au décours de ce temps postérieur, un délai systématique d'une semaine est respecté. Pour des raisons purement médicales (trouble du transit post-opératoire, phlébite ou éventuel syndrome infectieux ne faisant pas sa preuve), il a parfois été de deux semaines (2 cas). TECHNIQUE ET TACTIQUE OPÉRATOIRES DANS NOTRE SÉRIE Celle-ci est univoque et bien stéréotypée aujourd'hui. Le premier temps est effectué par voie postérieure II s'agit d'une ]aminectomie selon ]a technique de la "carapace de homard" décrite par R. Roy-Camille. Nous ]a pratiquons dans tous les cas, car plus rapide, moins hémorragique, moins traumatisante que les techniques de morcellement. Elle consiste à enlever en monobloc les arcs postérieurs responsables de ]a compression. Elle comprend: - une section verticale des lames étage par étage et de chaque côté à ]a scie oscillante. Il faut commencer par ]a partie basse de la zone opérée puis remonter progressivement vers le haut. Ce geste peut paraître à première vue dangereux mais il n'introduit pas d'instruments entre lame et dure mère et, d'autre part ]e ligament jaune protège les éléments nerveux et arrête ]a scie en profondeur. La difficulté est de choisir ]e niveau d'attaque du trait de scie qui ne doit pas être trop externe car la section se ferait alors dans]' épaisseur des massifs articulaires et des pédicu]es. Le trait doit donc être relativement médian. Le point d'attaque se situe au voisinage de ]' insertion des lames sur les massifs articulaires. C'est exactement ]à où ]e massif articulaire fait suite au bord inférieur de ]a lame qu'il faut commencer ]a ]aminectomie. Si ce point est aisé à identifier sur un rachis sain, il l'est beaucoup moins sur un rachis arthrosique car les reliefs sont remaniés et les interlignes parfois fusionnés. Dans de telles situations, i] faut se souvenir que l'on a souvent tendance à être trop externe. On ne parviendrait pas alors à libérer ]a "carapace de homard" car la section se ferait en plein massif articulaire. La section du ligament jaune est ]e dernier temps de ]a ]ibération: le ligament jaune doit être sectionné au bistouri à lame fine au niveau de son insertion basse sur ]e bord supérieur du premier arc postérieur restant en place. Le premier arc postérieur à enlever, c'est à dire ]e plus inférieur, est attiré vers ]e haut en saisissant l'épineuse par un davier de Farabeuf tout en veillant à ne pas réaliser de compression médullaire lors de ce geste; ceci facilite ]a section du ligament jaune. Une spatule peut alors être glissée entre ]igament et fourreau duraI. Elle va protéger celui-ci tandis que ]e bistouri sectionne latéralement ]e ligament jaune vers le haut de chaque côté. La traction sur les épineuses emmène Le temps antérieur Il est effectué par une cervicotomie gauche pré-sterno-cleidomastoïdienne permettant de protéger le nerf récurrent, plus profond à ce niveau. Le patient est toujours installé sur une table avec têtière. Après la pose des écarteurs autostatiques de CIo ward qui ne dispensent pas de valves mobiles maniées par les aides, on réalise une excision des disques. Sur un rachis arthrosique il est parfois nécessaire de réséquer les ostéophytes antérieurs pour retrouver et les espaces discaux souvent pincés. La corporectomie est entamée à la pince gouge puis à la fraise, la largeur idéale de la somatotomie doit être de 15 mm environ. Les foramens sont également libérés au micro-rongeur et à la curette coudée. L'excision du ligament vertébral commun postérieur achève la libération, ce qui permet d'exposer la dure-mère sur toute la hauteur de la tranchée. Il faut signaler que ce temps opératoire est souvent hémorragique. Dans tous les cas, i] s'agit d'une corporectomie pratiquée sur ]e nombre des étages pathologiques. Elle est toujours associée à une décompression foraminale avec effondrement des ostéophytes. Dans tous les cas de notre série, la reconstruction a éte confiée à un greffon iliaque tri-cortical prélevé sur la crête iliaque antéro-supérieure gauche dont la convexité s'adapte à la lordose du rachis cervical et dont la solidité s'oppose au risque de cyphose secondaire. La face supérieure de ]a crête est placée en avant. Ce greffon est encastré en force et i] n'a jamais été pratiqué de fixation ou d'ostéosynthèse puisque ]a fixation postérieure permet d'obtenir d'entrée une très bonne stabilisation de la reconstruction par greffe (figures 1,2,3 et 4). La durée moyenne de l'intervention chuirurgicale pour le premier temps opératoire était de 1 H 30. Pour ]e deuxième temps, de 2H. Le saignement est à peu près similaire dans les deux temps 254 TRAITEMENT DU CANAL CERVICAL ÉTROIT PAR UN DOUBLE ABORD SYSTÉMATIQUE POSTÉRIEUR PUIS ANTÉRIEUR Figures lA et B: ..•. Figures 2A et 2B: ..•• Instabilité cervicale dans le cadre d'une polyarthrite rhumatoïde. L'atteinte est polyétagée et intéresse Cl-C2. La compression visualisée à 1'IRM est aussi bien antérieure que postérieure. Le double abord systématique autorise - stabilisation efficace dans cette observation caricaturale. 255 et décompression CH. MAZEL, M. TRABELSI, D. GHOMRI, O. GUlNGAND, - les complications non spécifiques (phlébites, embolies pulmonaires et suppurations): nous n'avons à déplorer qu'un seul cas d'embolie pulmonaire survenue entre le premier et ]e deuxième temps opératoire qui a justifié ]a mise en place d'un filtre cave; - les complications plus spécifiques sont les complications neurologiques, celles de l'ostéosynthèse et de l'évolution statique du rachis cervical: nous avons eu à déplorer dans cette série un syndrome cordonnal postérieur régressif en 4 jours après le temps postérieur de laminectomie. Il faut noter que ce même malade a aussi une embolie pulmonaire, traitée par filtre cave. Ces complications n'ont pas altéré ]e résultat. Figures 3A et B: Canal cervical étroit sur discarthrose multi-étagée. Effacement complet des espaces sous arachnoïdiens à l'IRM aussi bien en avant qu'en arrière. opératoires. Il est en moyenne de 300 cc pour le temps postérieur et de 400 cc pour ]e temps antérieur. Il n'a jamais été noté de brèche durale aussi bien lors de l'abord antérieur que lors de l'abord postérieur. Dans tous les cas, les soins post-opératoires ont été simi]aires avec une verticalisation à la 24e/h post-opératoire et une immobilisation par une minerve moulée pendant une période de trois mois. Il faut rappeler qu'entre les deux temps opératoires, ]e malade a toujours été vertica]isé à ]a 24e/h et la déambulation autoriséee. La durée d'hospita]isation moyenne a été de 21 jours. ÉVOLUTION E. DE THOMAS SON, R. TERRACHER Nous n'avons pas observé de mobilisation du greffon antérieur ni du matériel d'ostéosynthèse. Il n'a pas été observé de déplacement secondaire avec swan-neck. Aucun cas de pseudarthrose n'a été retrouvé dans cette série. Nous avons aussi à déplorer un cas de névralgie induite par une vis articulaire qui a justifié l'ablation du matériel d'ostéosynthèse à 6 mois post-opératoire POST-OPÉRATOIRE Les complications Résultat Nous n'avons aucun décès à déplorer. Les complications post-opératoires peuvent être divisées en deux groupes: Le recul moyen de nos patients est de 15 mois, avec des extrêmes allant de 6 mois à 36 mois. Les résultats fonctionnels seront analysés avec appréciation 256 CH. MAZEL. Figures 4A M. TRABELS1, D. GHOMRI, O. GUINGAND, E. DE THOMASSON, R. TERRACHER Les meilleurs résultats ont concerné des malades gravement handicapés depuis peu de temps par un processus rapidement évolutif. Les lésions d'installation lente récupèrent moins bien. et B: Le double abord systématque avec synthèse postérieure et greffe antérieure permet une décompression efficace et évite toute mobilisation des implants ainsi que j'ostéosynthèse antérieure complémentaire. de la disparition des toubles fonctionnels pré-opératoires et stabilisation ou non de la myélopathie cervicarthrosique, dont nous savons le caractère rarement régressif. Dans tous les cas sauf un, la névralgie cervico-brachiale a totalement disparu. Dans un cas une vis postérieure a été à l'origine d'une irritation transitoire jusqu'à l'ablation du matériel. Le résultat à plus long recul n'a cependant pas été altéré. DISCUSSION Le traitement des myélopathies par cervicarthrose a fait l'objet de nombreuses publications qui ont pour la plupart, éte analysées en 1976, par Gorter (17) et en 1982, par Epstein (14). Il apparaît que la laminectomie ne permet d'obtenir globalement que 67% d'amélioration, et la chirurgie antérieure 73%. Peu de travaux permettent une analyse rigoureuse du groupe de patients qui constituent notre série, c'est à dire de myélopathies associées à une sténose du canal rachidien de 3 niveaux et plus. En 1965, Aboulker (1) rapportait une technique de décompression des sténoses pour le traitement des myélopathies par cervicarthrose par une laminectomie extensive allant du foramen magnum à la seconde vertèbre thoracique. En 1976, Jung et Aboulker (1,22) publient une série de 345 Tous les patients présentant des troubles de la marche ont vu leur autonomie nettement améliorée comme l'indique la répartition post-opératoire des cas selon la classification de Nurick: Stade 0: 5 cas Stade 1: 7 cas Stade II: 2 cas Stade III: 0 cas Stade IV: 0 cas Stade V: 0 cas La fonction motrice a toujours été améliorée. La fonte musculaire n'ajamais récupéré ad-integrum. 258 TRAITEMENT DU CANAL CERVICAL ÉTROIT PAR UN DOUBLE ABORD SYSTÉMATIQUE POSTÉRIEUR PUIS ANTÉRIEUR Notre étude propose une attitude peut être plus systématique quant à la tactique de décompression dans le cadre des canaux cervicaux étroits. Elle confirme l'intérêt du patients par cette technique, sur les 300 cas revus avec 2 à 12 ans de recul, 57% restaient améliorés lors de la révision des cas. Epstein (17) fait état de 85% de résultats satisfaisants en utilisant une laminectomie extensive associée à une foraminotomie et à l'ablation minutieuse des ostéo- double abord tant sur le plan mécanique que neurologique puisqu'elle permis d'obtenir une décompression d'excellente qualité sans nécessité à moyen terme d'envisager une reprise chirurgicale pour un complément chirurgical. Elle met à l'abri sur le plan mécanique tant des déformations évolutives par swan-neck que des démontages. Il est certain qu'une telle méthode ne peut étre proposée de façon systématique à toute pathologie cervicarthrosique.Elle est particulièrement intéressante dans les canaux cervicaux étroits phytes. Mayfield (24) sur une série de 27 patients enregistre par la même technique 78% de bons résultats, mais il conclut cependant que la laminectomie expose à l'instabilité rachidienne avec subluxations génératrices de douleurs et d'aggravation. En fait, Jung et Aboulker (22) signalent le risque de récidive de la myélopathie dans un tiers des cas et Hirabayashi (3) note une instabilité rachidienne dans 43% des cas à 10 ans de recul par cette méthode de décompression. Globalement la laminectomie est grevée de7 à 14% d'aggravation (5) et de 4% de mortalité. La chirurgie antérieure semble par contre donner des résultats assez constants. Sénégas (29,30) obtient ainsi 73% de bons résultats sans qu'une aggravation ne soit à déplorer. Dereymacker et Ghosez (9) avaient constaté en 1963 la supériorité de la voie antérieure (65% de bons résultats contre 27% pour la laminectomie ), Grandall et Batzorff (8) sont similaires, 71 % de bons résultats dans la voie antérieure contre 40% isolée, La décompression antérieure traite directement le conflit disco-médullaire. Son action sur le évolués. La faible morbidité neurologique de cette chirurgie pousse à ce geste chirurgical et nous sommes convaincus que le coussin amortisseur, créé lors de l'abord initial postérieur, est un facteur qui explique le faible taux de complications post-opératoires lors de l'abord antérieur. Nous insistons aussi sur le fait que étant dans des conditions anatomiques satisfaisantes, les gestes de décompression foraminale, ont peut être été plus étendus que ceux qui auraient été pratiqués en l'absence de laminectomie préalable. CONCLUSION syndrome médullaire est efficace comme cela était déjà rapporté dans la série de Pecker (thèse de Jan.21) cependant le taux de complications et surtout le risque d'aggravation neurologique parait moins important qu'après laminectomie mais non négligeable. Dereymacker et Ghosez (9) avaient signalé 16% l'aggravation neurologique. Roycamille (28) note également trois aggravations sur une série de 22 corporectomies. Tous les auteurs s'accordent à reconnaître des avantages et des inconvénients à la voie postérieure et à la voie antérieure, Simoen (31) et Herkowitz (18) en dressent une liste exhaustive: La double voie d'abord systématique postérieure puis antérieure, en matière de myélopathie cervicarthrosique, se présente comme une technique intéressante car: - elle permet une meilleure décompression en agissant sur tous les éléments compressifs (postérieurs, antérieurs et latéraux); - elle diminue le risque opératoire neurologique; - elle évite les complications mécaniques à court et long terme. 92% 66% 86% B et et Abord TB Ant Swan-neck 20% Repris neurologiques 37% Pseudarthrose25% Résultats mécaniques 1 1 RÉFÉRENCES 1.- ABOULKER J., METZGER J., ENGEL P.: Les myélopathies cervicales d'origine rachidienne. Neuroch. 1965, 11,87-198. 2.- ALLENK K.L.: C'est l'analyse de ces résultats qui nous a amenés a essayer dans quelques cas graves de myélopathies cervicarthrosiques, de concilier les avantages des deux voies. Certains auteurs partagent notre souci et proposent une décompression élargie; c'est le cas de JM. Privat (26) qui réalise une double voie antérieure et postérieure et il effectue en plus lors du temps postérieur une section des digitations du ligament dentelé, complétant ainsi le recul de la moelle et son éloignement des éléments ostéophytiques antérieurs. Il rapporte une amélioration dans 65% des cas, une stabilisation dans 30% des cas, seuls 5% des cas font preuve d'une aggravation progressive malgré le geste opératoire. Cervical spondylosis with accompanging myelopathy alleviation by removal of the bony spur South Afr. J. Surg., 1968,6,5-25. its 3.- BARNES MP., SAUDERS M.: The effect of cervical mobility on the natural history of cervical spondylotic myelopathy. 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