Bon usage des antifongiques dans le traitement des candidoses et

ARTICLE ORIGINAL
Bon usage des antifongiques dans le traitement
des candidoses et aspergilloses invasives
The good use of antifungal drugs in the treatment of invasives candidosis and aspergillosis
A. HULIN
1
*, A.M. DEGUILLAUME
2
, S. BRETAGNE
3
, Y. BÉZIE
2
1
Service pharmacie - Laboratoire de pharmacologie, CHU Henri Mondor, Créteil
2
Service pharmacie, Hôpital Saint-Joseph, Paris
3
Laboratoire de parasitologie-mycologie, CHU Henri Mondor, Créteil
Résumé
.Les infections fongiques restent des affections graves et leur fréquence a augmenté de façon considérable au
cours des dernières années en raison principalement du nombre accru de patients immunodéprimés et d’interventions
médicochirurgicales invasives. C’est pourquoi, l’arsenal thérapeutique s’est élargi et comprend actuellement la
flucytosine, l’amphotéricine B sous différentes formes galéniques, les azolés et la caspofungine. La flucytosine, utilisée
en association, présente une efficacité et des toxicités médullaire et hépatique corrélées aux concentrations sériques ce
qui implique son suivi thérapeutique. L’amphotéricine B possède une efficacité importante et un spectre d’action large.
Les nouvelles formulations galéniques permettent de limiter sa néphrotoxicité. Les azolés ont une pharmacocinétique
complexe et une affinité pour les cytochromes humains induisant des interactions médicamenteuses nombreuses.
Parmi eux, l’itraconazole et le voriconazole présentent un spectre d’action et une activité intéressants dans les
pathologies sévères. Enfin, la caspofongine possède des propriétés antifongiques importantes en cas d’infections
réfractaires ou d’intolérance. Nous analysons les recommandations d’utilisation et d’optimisation des antifongiques
en vue d’améliorer l’utilisation de ces traitements longs et coûteux.
Mots clés :
antifongique, amphotéricine B, fluconazole, itraconazole, voriconazole, caspofungine, candidose,
aspergillose invasive
Abstract
.Fungal infections are severe and their incidence has grown considerably in the last years because of the
increase number of immunosupressive patients and invasives medical and chirurgical operations. That is why the
number of antifungal treatments increases. Currently antifungal drugs are flucytosine, amphotericin B using with
differents galenic formulations, azole drugs and caspofungin. Flucytosine, used in association, presents an efficacy
and medullar- and hepato-toxicities which are correlated with seric concentrations. A therapeutic monitoring of
flucytosine is essential. Amphotericin B has a good efficacy and a large antifungal spectrum. The new galenic
formulations limit his nephrotoxicity. Azoles drugs have a complex pharmacokinetic and a different affinity for human
cytochromes which induces many drugs interactions. Amongst them, itraconazole and voriconazole present interes-
ting spectrum and activity notably in severe pathologies. In brief, caspofungin has interesting antifungal properties in
the cases of refractory infections and intolerance. We analyse some recommandations for the use and optimization of
these cost and long treatments.
Key words:
antifungal drug, amphotericin B, fluconazole, itraconazole, voriconazole, caspofungine, candidosis,
invasive aspergillosis
Les infections fongiques systémiques restent des affec-
tions graves dont l’incidence est en constante pro-
gression depuis ces dix dernières années. Elles sont
associées à une élévation significative de la morbidité et
de la mortalité des patients immunodéprimés. Outre les
mycoses d’importation dues à la multiplication des voya-
ges, la principale cause de cette progression réside dans
l’augmentation considérable des facteurs de risques
comme l’immunosuppression (sida, transplantation, pa-
thologies cancéreuses et hématologiques), l’utilisation de
cathéters vasculaires et l’administration d’antibiothéra-
pies à large spectre.
Jusqu’en 1978, les options thérapeutiques pour traiter les
infections fongiques systémiques se limitaient à l’amphoté-
ricine B (AmB) et à la flucytosine. La tolérance médiocre,
notamment rénale, de l’AmB est souvent source d’échec
thérapeutique par arrêt prématuré du traitement ou non
*Correspondance et tirés à part : A. Hulin
ORIGINAL ARTICLE
J Pharm Clin 2005 ; 24 (3) : 125-38
J Pharm Clin, vol. 24, n° 3, septembre 2005 125
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atteinte des posologies cibles. Les antifongiques représen-
tent désormais une classe thérapeutique en pleine expan-
sion, malgré un surcoût économique important. Les formu-
lations phospholipidiques d’AmB, mieux tolérées,
permettent une meilleure prise en charge thérapeutique
des patients. L’apparition des antifongiques azolés, le
fluconazole, l’itraconazole et le voriconazole et depuis
peu, de la classe des échinocandines dont la caspofun-
gine est le premier représentant a enrichi l’arsenal théra-
peutique. Les azolés représentent à ce jour la classe la
plus utilisée dans le traitement des mycoses systémiques.
Physiopathologie
Candidoses invasives
Les candidoses invasives sont actuellement responsables
de plus de 10 % des septicémies en réanimation [1-4]. On
distingue les candidoses chroniques hépatospléniques,
les endocardites, les pneumopathies, les atteintes du sys-
tème nerveux central et les candidémies. Tout diagnostic
de candidose systémique impose de débuter en urgence
un traitement antifongique.
Même si Candida albicans est l’espèce la plus impliquée,
la part relative des espèces non albicans comme glabrata
s’accroît [5-7]. Les Candida non albicans étant souvent
résistants aux thérapeutiques conventionnelles, l’apport
des nouveaux antifongiques offre donc des perspectives
intéressantes pour la prise en charge de ces pathologies.
Aspergilloses invasives
Les espèces d’Aspergillus les plus fréquemment retrouvées
en clinique sont Aspergillus fumigatus (90 %) et flavus
(10 %). Une aspergillose invasive affecte principalement
les poumons mais aussi les sinus et le système nerveux
central de l’hôte. Le taux de mortalité associé à une
aspergillose invasive approche les 90 % chez les patients
sévèrement immunodéprimés malgré un traitement spécifi-
que. Le diagnostic, basé sur l’identification de la moisis-
sure par culture ou par biopsie histopathologique est
particulièrement difficile. En hématologie, un changement
de la radiographie pulmonaire ou la présence d’un halo
au niveau de la scintigraphie chez les patients à risque est
souvent le seul indice d’une aspergillose pulmonaire pro-
bable. En raison de la gravité extrême de l’aspergillose
invasive et de la faible efficacité des traitements actuels, il
est évident que le risque aspergillaire doit être évalué et
géré en amont de cette complication.
Principaux antifongiques systémiques
Classification
La classification est présentée dans le tableau 1.
Mécanismes d'action et résistance aux antifongiques
La figure 1 présente la structure des champignons Can-
dida et Aspergillus et indique les sites d’action des princi-
paux antifongiques.
Après pénétration dans les cellules fongiques, la 5-FC est
transformée en 5-FU par la cytosine désaminase [1] qui va
s’incorporer à l’ARN fongique inhibant la synthèse protéi-
que et après transformation en 5-fluorodeoxyuridine, inhi-
bera la thymidylate synthase et donc la synthèse de l’ADN
fongique [8]. La flucytosine est fongistatique aux doses
thérapeutiques.
Les polyènes, en se fixant sur l’ergostérol de la membrane
fongique, forment des pores transmembranaires provo-
quant la fuite de cations intracellulaires (Na
+
,K
+
)etla
mort des cellules fongiques [9]. D’autres mécanismes
complémentaires ont également été évoqués pour expli-
quer la lyse cellulaire comme la genèse d’un stress oxy-
dant par auto-oxydation. Le spectre d’activité antifongi-
que de l’AmB inclut les champignons levuriformes
(Candida sp., Cryptococcus neoformans) les filamenteux
(Aspergillus sp. et mucorales), et les dimorphiques (Histo-
plasma sp., Blastomyces dermatidis). La résistance intrin-
sèque à l’AmB est rare, elle concerne principalement
Candida lusitania et Aspergillus terreus [10].
Les azolés antifongiques sont des triazolés fongistatiques
qui inhibent l’enzyme fongique C14 déméthylase, dépen-
dante du cytochrome P450 nécessaire à la conversion du
lanostérol en ergostérol, principal stérol de la membrane
cellulaire du champignon [11]. Le fluconazole (Triflucan
®
)
présente un spectre d’activité préférentiel pour Candida
albicans et Cryptococus neoformans. En revanche, il est
inactif sur Candida krusei (résistance primaire) et l’Asper-
gillus. L’itraconazole est actif sur les espèces d’Aspergil-
lus. Le voriconazole présente un spectre d’action large
vis-à-vis des espèces d’Aspergillus et de Candida ainsi
que des pathogènes émergents tels que des espèces de
Gluco-, mannoprotéines
Chitine Polymères
de glucanes
Cible candines
Biosynthèse de
la paroi cellulaire
Phospholipide Ergostérol
Cible amphotéricine B
Fonctions de la paroi
membranaire
Réticulum
endoplasmique
Vacuole
Noyau
Golgi
Paroi membranaire
Paroi cellulaire
Cible 5-fluorocytosine
Biosynthèse d'ADN,
ARN Cible azolés,
allylamines, morpholines
Biosynthèse de métabolites
essentiels (ergostérol)
Mitochondrie
Squalène
Ergostérol
Figure 1. Sites d’action des différentes classes d’antifongi-
ques
A. Hulin, et al.
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Scedosporium et de Fusarium. Un problème récent ob-
servé avec le voriconazole est l’émergence d’espèces non
aspergillus telles que mucor [12].
La caspofungine est le premier et le seul représentant
actuellement disponible de cette nouvelle classe thérapeu-
tique dont la cible pharmacologique est la paroi fongi-
que. Les échinocandines inhibent des glucanes de la
paroi, par inhibition non compétitive de la bêta-1,3 glu-
cane synthase [13]. Le blocage de cette enzyme entraîne
l’arrêt de la synthèse de la paroi cellulaire (effet fongistati-
que), puis sa destruction (effet fongicide). Le 1,3-b-
glucane est le composant principal de la paroi des Sac-
charomyces et des Candida, ce qui explique l’activité
fongicide rapide de la caspofungine contre la plupart des
souches de Candida, y compris celles résistantes au
fluconazole [14]. L’activité de la caspofungine vis-à-vis
des Candida commence à évoluer et des résistances à
C. glabrata ont été récemment décrites [15]. D’autres
molécules de cette famille, comme la micafungine [16] ou
l’anidulafungine [17] actuellement en développement,
paraissent également prometteuses [18]. Les échinocandi-
nes n’ont qu’une activité fongistatique sur Aspergillus sp.,
avec inhibition toutefois quasi complète de leur croissance
[19, 20, 21].
Les spectres d’activité des différents antifongiques sont
résumés dans le tableau 2.
Statut réglementaire et financier des antifongiques
Tous les antifongiques systémiques sous soumis à prescrip-
tion hospitalière et sont dispensés en prescription res-
treinte.
Les formes vectorisées d’AmB (Abelcet
®
et Ambisome
®
),
le voriconazole, l’itraconazole et la caspofungine font par
ailleurs partie de la liste des médicaments onéreux de la
circulaire T2A.
Critères de choix thérapeutiques
Indications et service médical rendu
L’indication phare de la flucytosine est le traitement de la
cryptococcose en association à l’AmB. La flucytosine n’a
pas d’effet sur les filamenteux.
L’AmBD injectable (Fungizone
®
) est utilisée pour traiter
l’ensemble des infections fongiques systémiques (candido-
ses, aspergilloses). Elle est indiquée dans le traitement
d’attaque des aspergilloses invasives pulmonaires ou dis-
séminées, des candidoses systémiques, le traitement empi-
rique de fièvre chez le granulopénique, et le traitement de
la cryptococcose neuro-méningée. Les formulations lipidi-
ques d’AmB sont généralement utilisées en cas d’insuffi-
sance rénale, ou d’intolérance à l’AmB conventionnelle,
surtout lors d’aspergillose ou de candidose disséminée.
Ainsi, bien qu’Abelcet
®
(ABLC) n’apporte pas de bénéfice
clinique supplémentaire démontré, elle représente toute-
fois une amélioration du service médical rendu (ASMR)
modeste de niveau III par rapport à Fungizone
®
injectable
en terme de tolérance rénale. Dans le traitement empiri-
que des infections fongiques présumées chez des patients
neutropéniques fébriles, Ambisome
®
représente une
ASMR importante (niveau II) par rapport à Fungizone
®
injectable en terme de tolérance rénale.
Le fluconazole (Triflucan
®
) formes orale et injectable,
représente une ASMR importante (niveau II) par rapport à
la stratégie de prise en charge usuelle des candidoses
systémiques.
L’itraconazole (Sporanox
®
) est indiqué dans le traitement
des mycoses systémiques viscérales (aspergillose, chro-
momycose, histoplasmose, sporotrichose et autres myco-
ses rares à germes sensibles).
Le voriconazole (V-Fend
®
) représente une ASMR majeure
(niveau I) en terme de survie dans les aspergilloses invasi-
ves et de réponses favorables obtenues dans les candido-
ses résistantes au fluconazole et les infections à Scedospo-
rium spp.ouFusarium spp.
Tableau 1.Classification des principaux antifongiques
systémiques.
Famille Dénomination
commune Spécialité Présentation
Polyènes Amphotéricine B
désoxycholate
Fungizone
®
Injectable 50 mg
Amphotéricine B
lipidique
Abelcet
®
Injectable 100 mg
Amphotéricine B
liposomale
Ambisome
®
Injectable 50 mg
Azolés Itraconazole Sporanox
®
Gélule 100 mg
Solution buvable 10 mg/mL
Injectable, 250 mg
Fluconazole Triflucan
®
Injectable 100, 200, 400 mg
Gélule 50, 100, 200 mg
Poudre pour suspension orale
50, 200 mg/5 mL
Voriconazole Vfend
®
Injectable 200 mg
Comprimé 50, 200 mg
Poudre pour suspension orale
40 mg/mL
AntimétabolitesFlucytosine Ancotil
®
Injectable 2,5 g
EchinocandinesCaspofungine Cancidas
®
Injectable 50, 70 mg
Tableau 2.Spectre d’activité des principaux antifongiques disponibles.
Aspergillus spp. Candida
albicans Candida
tropicalis Candida
parapsilosis Candida
glabrata Candida
krusei Candida
lusitaniae
Amphotéricine + + + + + + -
Flucytosine - ± ± ± ± ± -
Fluconazole - +++± - +
Itraconazole + +++± ± ±
Voriconazole + ++++ + +
Caspofungine +++++ + +
+ : actif ; – : inactif;±:inconstamment actif ; rouge : fongistatique ; noir : fongicide.
Bon usage des antifongiques
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La caspofungine (Cancidas
®
) apporte un service médical
rendu important mais une ASMR mineure de niveau IV en
termes de tolérance par rapport à Ambisome
®
dans le
traitement empirique des infections fongiques présumées
(notamment à Candida ou Aspergillus) chez les patients
adultes neutropéniques fébriles à haut risque d’insuffi-
sance rénale. La caspofungine est un apport important
dans la prise en charge des candidoses invasives de
l’adulte non neutropénique, notamment chez les patients
prétraités par un azolé ou colonisés par une espèce de
moindre sensibilité au fluconazole. La commission de
transparence a jugé difficile lors de l’obtention des AMM
de situer la caspofungine par rapport aux autres antifongi-
ques déjà commercialisés (dont le voriconazole) dans
l’aspergillose invasive.
Recommandations internationales :
Conférences de consensus
Candidoses invasives
Plusieurs recommandations ont été récemment publiées
pour traiter les candidoses invasives (figures 2 et 3)
[22–24].
Tout diagnostic de candidose systémique impose de débu-
ter en urgence un traitement. En première intention,
jusqu’à identification de l’espèce, les dernières recom-
mandations favorisent l’utilisation de l’AmBD en l’absence
d’insuffisance rénale, ou le fluconazole injectable
(12mg/kg/j), sauf chez le neutropénique ou le patient
préalablement traité par fluconazole [23]. Le choix de ces
deux molécules se justifie par leur faible coût et un large
spectre d’activité sur les Candida pour l’AmB, et par une
bonne tolérance associée à une grande facilité d’utilisa-
tion pour le fluconazole. La caspofungine, qui bénéficie
d’un meilleur profil de tolérance [25] que l’AmBD, et
d’une efficacité équivalente tend à la remplacer. Les
formes lipidiques d’AmB (Ambisome
®
ou Abelcet
®
) sont
également moins toxiques et aussi efficaces que l’AmBD
lorsqu’elles sont utilisées à des posologies correctes
[26, 27].
Après identification de l’espèce de Candida, le flucona-
zole est actuellement le traitement de première intention si
l’espèce y est sensible et si le patient n’est pas neutropéni-
que. Pour les espèces résistantes ou de sensibilité intermé-
diaire au fluconazole, un autre antifongique doit être
utilisé. Il peut s’agir de l’AmBD, sauf si le patient est
insuffisant rénal ou neutropénique et déjà traité par
d’autres médicaments néphrotoxiques [23]. Dans ces cas,
les formes lipidiques d’AmB ou la caspofungine sont
préconisées [28].
Le voriconazole a l’AMM dans les candidoses réfractaires
au fluconazole, et présente l’avantage d’être utilisable
par voie orale. Il est efficace vis-à-vis de certains isolats
résistants au fluconazole [29], notamment C. krusei [30].
Toutefois, l’extrapolation aux autres espèces de Candida
résistantes ou de sensibilité intermédiaire au fluconazole
reste controversée. Cela explique certaines réserves quant
à son utilisation systématique pour les levures résistantes
au fluconazole [23]. Actuellement, dans ce contexte, le
relais oral par voriconazole n’est proposé que lorsque
l’infection est contrôlée [23]. Une étude multicentrique
mondiale, en cours d’analyse, doit prochainement per-
mettre de répondre à cette question [22].
Les associations d’antifongiques (AmB et flucytosine) sont
préconisées pour traiter les endocardites, méningites et
endophtalmies. Les autres associations d’antifongiques,
comme celles associant la caspofungine à un azolé ont
déjà été employées de façon empirique. Toutefois, aucune
évaluation précise n’a encore été effectuée, et dans l’at-
tente de résultats mieux étayés, ces associations sont
actuellement contre-indiquées. Les traitements prophylacti-
ques sont rarement indiqués. Seules les transplantations
hépatique ou pancréatique et les allogreffes de moelle
présentent un risque majeur de candidose justifiant d’une
prophylaxie. La mise en place d’un traitement préemptif
précoce (traitement d’une candidose probable ou possi-
ble) peut se justifier chez les patients à haut risque
(immunosuppression, modification de la flore bactérienne
ou présence de facteurs mécaniques aggravants comme
les cathéters intraveineux ou artériels, une nutrition paren-
térale, une hémodialyse ou dialyse péritonéale) [23]. Les
traitements possibles sont alors l’AmB sous forme vectori-
sée ou non et la caspofungine.
Créatininémie < 1,5 fois la normale
Neutropénique
recevant 2 traitements
néph rotoxiques ?
Non-neutropénique
Tt. antérieur par azolé ?
Non-neutropénique
Tt. antérieur par azolé ?
Neutropénique
Créatininémie 1,5 fois la normale
Oui Non Oui Oui
Non Non
Fungizone® IV
1 mg/kg/j
Fungizone® IV 1 mg/kg/j
OU Triflucan® IV 12 mg/kg/j
Triflucan® IV
12 mg/kg/j
Cancidas® IV, 70 mg J1 , 50 mg/ j
OU AmBIsome® IV, 3 mg/kg/ j
Figure 2.Traitement des candisoses invasives : après isolement d’une levure et avant identification de l’espèce.
A. Hulin, et al.
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Aspergilloses
Dans le cas du traitement des aspergilloses invasives, la
Société française d’hématologie clinique a proposé un
arbre décisionnel. Il consiste en un traitement de première
intention soit par voriconazole IV à raison de
6 mg/kg/12 h à J1 puis 4 mg/kg/12 h ou per os
(si > 40 kg : 400 mg/12 h à J1 puis 200 mg/12 h et
si < 40 kg : 200 mg/12 h à J1 puis 100 mg/12 h) soit
par polyène IV sous formes lipidiques ou non. Après 7 à
14 jours de traitement, un bilan est effectué. En cas
d’amélioration sous voriconazole, il convient de le pour-
suivre par voie orale. La durée du traitement est alors à
discuter en fonction de la situation de sortie d’aplasie et
des séquences thérapeutiques à venir. En cas d’améliora-
tion sous polyènes, il est recommandé de poursuivre le
traitement pendant 21 jours puis d’effectuer un relais
per os par voriconazole en cas d’allogreffe ou de poly-
médication importante ou d’itraconazole dans les autres
situations.
En raison de la gravité extrême de l’aspergillose invasive
et de la faible efficacité des traitements actuels, il est
évident que le risque aspergillaire doit être évalué et géré
en amont de cette complication. L’Agence nationale d’ac-
créditation et d’évaluation en santé et la Société française
d’hygiène hospitalière ont organisé une conférence de
consensus sur la prévention du risque aspergillaire chez
les patients immunodéprimés.
Les modalités de surveillance retenues concernent le
contrôle de l’environnement dans une démarche globale
d’assurance qualité dont les protocoles restent à établir, et
la surveillance épidémiologique au niveau de chaque
hôpital par la déclaration et l’analyse des cas certains et
probables au sein du CLIN. La mise en place d’une
surveillance épidémiologique centralisée est souhaitable
de façon à déceler d’éventuelles modifications du profil
de la maladie.
Le consensus a par ailleurs défini qu’en hématologie, tout
type d’affection comportant une neutropénie sévère et/ou
prolongée et exposant à un déficit immunitaire induit un
risque potentiel mortel d’aspergillose invasive. Est quali-
fiée de situation à très haut risque tout type d’affection
traitée par allogreffe de cellules souches. Les autres ris-
ques d’importance inégale sont les leucémies aiguës
myéloblastiques en traitement de première ligne ou en
rechute, les aplasies médullaires sévères, rechutes d’hé-
mopathies et lymphomes traités par chimiothérapie et
corticothérapie à posologie forte, les déficits immunitaires
combinés sévères. Il convient de se rappeler d’un risque
potentiel au cours du traitement d’induction et de consoli-
dation des leucémies aiguës, des myélomes et après
autogreffe de cellules souches. En transplantations d’orga-
nes, le risque concerne principalement les retransplanta-
tions précoces, les patients traités par corticoïdes à forte
posologie pendant de longues périodes, les suites post-
transplantations compliquées.
En raison de l’émergence de résistances, l’utilisation en
monothérapie de la flucytosine est actuellement limitée à
certains cas de chromoblastomycoses. Dans les autres
cas, elle est toujours associée à l’amphotéricine B pour le
traitement des mycoses systémiques.
Terrain
Le choix des thérapeutiques est lié et adapté au terrain des
patients (caractéristiques physiologiques, variabilité phar-
macocinétique intra-individuelle, pathologie sous-
jacente). Quelques situations cliniques sont ainsi présen-
tées.
Patient mucoviscidosique
Chez les patients atteints de mucoviscidose, les aspergillo-
ses invasives sont fréquentes et le plus fréquemment bron-
choalvéolaires. Elles nécessitent des traitements au long
cours car les aspergillus sont difficilement accessibles au
traitement du fait de la présence de grandes quantités de
sputum très visqueux. Ainsi, le recours aux formes orales
est indispensable pour ces traitements chroniques de plus
de 6 mois. À ce titre, l’itraconazole et le voriconazole sont
les traitements de choix. Chez ces patients, la grande
variabilité inter-individuelle de l’absorption de l’itracona-
zole, au niveau gastrique notamment, nécessite un suivi
thérapeutique. Le voriconazole présente une moindre
variabilité d’absorption.
Candida Triflucan® -S
Neutropénique ou non Neutropénique ou nonNon-neutropénique
Triflucan® IV 6 mg/kg/j
Relais per os dès que possible
Candida Triflucan® -R ou -SDD
Créatininémie < 1,5 fois la normale Créatininémie 1,5 fois la normale
Neutropénique
recevant 2 traitements
néphrotoxiques
Fungizone® IV
1 mg/kg/j Non Oui
Cancidas® IV 50 mg/j
OU Ambisome® IV, 3 mg/kg/ j
OU, si C. krusei Vfend® 6-12 mg/kg/j
Relais par Vfend® oral si
infection contrôlée
Figure 3.Traitement des candisoses invasives : après identification de l’espèce de Candida sp.
Bon usage des antifongiques
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