Chapitre 3 – Les régimes totalitaires dans l`entre-deux

Chapitre 3 – Les régimes totalitaires dans l’entre-deux-guerre
Alors qu’en 1918, les démocraties libérales telles que la France, le Royaume-Uni et les États-Unis
l’ont emporté sur des monarchies autoritaires, trois dictatures d’un type nouveau surgissent dans les
années 1920 et 1930. Malgré leurs différences, le terme « totalitarisme » est utilisé dès l’entre-deux-
guerres pour désigner la parenté entre ces trois régimes politiques : le fascisme italien, le nazisme
allemand et le communisme en URSS. À l’origine l’adjectif « totalitaire » a été créé par des
opposants italiens pour dénoncer le fascisme mais ce terme est repris et assumé par Benito
Mussolini. Dénoncé par les opposants, assumé par ces régimes, le terme « totalitarisme » est enfin
utilisé par les historiens, les philosophes et les politologues pour caractériser ces régimes d’un type
nouveau : au départ des dictatures avec un homme seul au pouvoir soutenu par un parti unique mais
qui finalement dépassent la simple dictature autoritaire. La notion est toutefois controversée car elle
implique de placer sur le même plan des régimes qui présentent toutefois des différences.
Dans quelle mesure les totalitarismes sont-ils des régimes exceptionnels qui ont
profondément marqué le XXe siècle ?
I – La genèse des régimes totalitaires
Comment ces régimes sont-ils apparu ?
A – Un contexte d’après-guerre particulièrement troublé
D’une certaine manière, le totalitarisme trouve son origine dans la violence extrême de la Première
Guerre mondiale : l’horreur de la mort de masse a contribué à rehausser le seuil de tolérance à la
violence. Certains historiens parlent de « brutalisation » ou d’« ensauvagement » de la vie
politique après la Première Guerre mondiale (ex. batailles de rues entre extrême-droite et extrême-
gauche en Allemagne, assassinats politiques).
Les États sont mis en difficulté face à une triple crise : morale, économique et politique.
1
M. Parchemin – Lycée Saint-Exupéry – Année 2013-2014
Classe de première scientifique
NOTIONS : totalitarisme : anti-parlementarisme, parti-État, endoctrinement (propagande, culte de la personnalité),
embrigadement (organisatº de jeunesse, etc.), répression (police pol., camps de concentration, Goulag)
idéologie : communisme, fascisme, nazisme, racisme (antisémitisme), nationalisme, expansionnisme
Dans quelle mesure les totalitarismes sont-ils des régimes exceptionnels ? Faut-il parler d’un totalitarisme ou de
totalitarismes ?
I – La genèse des régimes totalitaires
Comment ces régimes sont-ils apparu ?
A – Un contexte d’après-guerre particulièrement troublé
B – L’ascension au pouvoir de trois chefs
II – Des spécificités idéologiques
→ Quelles sont les spécificités de chacun de ces trois régimes ?
A – Le communisme soviétique, une idéologie de la classe
B – Le fascisme italien, une idéologie de la nation
C – Le nazisme allemand, une idéologie de la race
III – Le fonctionnement des États totalitaires : des caractéristiques communes
Les régimes totalitaires présentent-ils toutefois des caractéristiques communes ?
A – Une société asservie par le parti-État
B – L’économie dirigée par l’État
Crise morale
En Russie, le Révolution de 1917 porte les Bolcheviks (dirigés par Lénine) au pouvoir qui mettent en
place des mesures communistes. La situation dérive en guerre civile entre Rouges et Blancs.
L’Allemagne est humiliée par le traité de Versailles : elle perd 15 % de son territoire et 10 % de sa
population ainsi que son empire colonial. Son armée est limitée à 100 000 hommes (tout armement
moderne est interdit : flotte, avions, tanks, artillerie), la rive occidentale du Rhin est démilitarisée.
L’Allemagne doit enfin payer de fortes réparations de guerre aux pays vainqueurs (132 milliards de
marks or).
L’Italie s’était engagé en 1915 du côté de la Triple Entente dans l’espoir de récupérer les terres
irrédentes sur l’Autriche-Hongrie. L’Italie dénonce une « victoire mutilée » car elle gagne certes le
Trentin et Trieste mais Fiume et la Dalmatie sont attribuées à la nouveau Royaume des Serbes,
Croates et Slovènes (rebaptisé Yougoslavie en 1929).
Crise économique
En Russie, la situation économique est catastrophique : pour gagner la guerre civile, les Bolcheviks
réquisitionnent la production et les vivres communisme de guerre ») ce qui provoque une grave
famine (5 millions de morts). La production industrielle a presque disparue, les transports sont
désorganisés, le rouble n’a plus de valeur (retour au troc).
En Italie, la situation économique est également difficile : le pays est endetté, l’inflation est forte (prix
quadruplés par rapport à avant la guerre). Face à la flambée des prix et les faillites d’usines, les
ouvriers organisent des grandes grèves et les paysans sans terres occupent les grandes propriétés
privées.
En Allemagne, l’économie est mise en difficulté par le montant exorbitant des réparations exigées par
la France. Jugeant le paiement insuffisamment rapide, la France décide de ses payer directement en
charbon en occupant militairement la Ruhr. L’Allemagne demande à ses mineurs de cesser le travail
mais doit continuer à payer les mineurs. Pour cela, l’État imprime des billets en grande quantité ce
qui déclenche une phénomène d’hyperinflation.
Crise politique
En Russie, la guerre civile fait rage.
En Italie, la monarchie constitutionnelle est une démocratie récente (le suffrage universel masculin
date de 1912). Le gouvernement est impuissant en raison de l’instabilité gouvernementale. Les
occupations d’usines et des grands domaines agricoles font peur aux classes moyennes et
supérieurs qui craignent une révolution comme en Russie.
En Allemagne, la République de Weimar est une démocratie née seulement en 1919. Elle est
immédiatement agitée par la révolte spartakiste (extrême-gauche) mâtée par la police et l’armée,
aidée par les milices d’extrême-droite. La violence politique est donc importante (plusieurs centaines
d’assassinats politiques visant même des ministres).
En résumé :
Le contexte d’après guerre est très difficile pour ces pays : crise morale et économique mais aussi
violence politique. Aucun de ces trois pays n’a de tradition démocratique bien ancrée. La situation est
exploitée par des partis politiques extrémistes pour parvenir au pouvoir.
2
B – L’ascension au pouvoir de trois chefs
Staline
Pendant la guerre civile russe, les communistes mettent en place une dictature dirigée par Lénine
mais dans laquelle Staline a un rôle important. Après la mort de Lénine en 1924, une lutte pour le
pouvoir s’engage alors : Joseph Staline élimine progressivement ses rivaux (comme Trotski, exilé en
1929 puis assassiné en 1940). Seul maître de l’URSS en 1929, Staline lance le pays dans une
industrialisation accélérée en donnant la priorité à l’industrie lourde. Il procède également à une
collectivisation forcée des terres agricoles. Les paysans sont expulsés, exécutés ou déportés dans
des camps de travail.
Grâce au dirigisme économique, Staline parvient à faire de l’URSS la troisième puissance industrielle
derrière les États-Unis et l’Allemagne à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Il règne par la
terreur jusqu’à sa mort en 1953.
En résumé : Staline arrive donc au pouvoir alors que le régime communiste est déjà en place : il
transforme la dictature communiste de Lénine en véritable système totalitaire.
Mussolini
Benito Mussolini fonde en 1919 les « faisceaux de combat », mouvement politique qui devient en
1921 le Partito Nazionale Fascista (PNF). Il regroupe notamment des anciens combattants organisés
dans un groupe paramilitaire (les squadristi ou « chemises noires ») qui fait régner la terreur : ils
montent des expéditions punitives contre les grévistes et les organisations de gauche. Ils disent aider
à tablir l’ordre et bénéficient de la complicité passive de la police. Le PNF est financé par les
grands propriétaires et les industriels pour lequel Mussolini est un rempart contre le communisme.
Les 27 et 28 octobre 1922, Mussolini organise la « Marche sur Rome ». 25 000 chemises noires
marchent vers la capitale ce qui incite le roi Victor-Emmanuel III à nommer Mussolini chef du
gouvernement. Il ne s’agit pas d’un coup d’État, les fascistes n’ayant pas utilisé la violence mais leur
démonstration de force a impressionné.
Une fois au pouvoir Mussolini obtient les pleins pouvoirs et se proclame Duce (guide). En 1924, le
PNF obtient 65 % des voix aux élections législatives en usant de l’intimidation et de la violence des
chemises noires. Le député socialiste Matteoti dénonce le trucage des élections : il est assassiné.
En 1925, les « lois fascistissimes » permettent de combattre « légalement » les adversaires du
régime : la liberté de la presse est supprimée, le PNF est le seul parti autorisé, le droit de grève est
supprimé, un syndicat fasciste unique est créé. L’administration, l’armée et l’enseignement sont
épurés.
En résumé : Mussolini arrive donc au pouvoir légalement mais non démocratiquement : il installe
rapidement un régime totalitaire.
Hitler
Ancien combattant de la Première Guerre mondiale, Adolf Hitler est révolté par l’humiliation du traité
de Versailles. Employé par l’armée pour surveiller le Deutsche Arbeiterpartei (parti des travailleurs
allemands) dans le contexte d’agitation politique d’extrême-gauche, Hitler y commence sa carrière
politique. Il transforme le nom du parti en National-Sozialistisch Deutsche Arbeiterpartei (NSDAP
abrégé en parti nazi) : il s’agit d’un parti nationaliste, antidémocratique, anticapitaliste et antisémite.
En marge du parti il créé les SA et SS : des milices qui luttent contre les communistes...
3
En 1923, Hitler tente un coup d’État à Munich. Il échoue et se retrouve en prison il écrit Mein
kampf (mon combat) : il y développe sa vision d’un État fort, ayant pour mission de préserver la race
aryenne des Juifs, dont la trahison explique seule, d’après lui, la défaite de 1918.
Si la deuxième moitié des années 1920 est marquée par un retour à la prospérité, l’Allemagne est
durement touchée par la crise des années 1930 (le chômage triple). Par peur du communisme, les
industriels se rallient à Hitler. Aux élections de 1932, le NSDAP devient le premier parti politique
allemand. Hitler est nommé chancelier le 30 janvier 1933.
Peu après son arrivée au pouvoir, le Reichstag est incendié : les nazis accusent un jeune
communiste et en profitent pour suspendre les libertés individuelles et d’interdire le parti communiste
puis les autres partis. Les premiers camps de concentrations sont ouverts dès 1933 pour y incarcérer
les opposants (communistes en premier lieu). En 1934, lorsque le président Hindenburg meurt, Hitler
se fait proclamer Reichsführer : il cumule les pouvoirs de chancelier et de président.
En résumé : Hitler arrive au pouvoir démocratiquement en exploitant la rancoeur des Allemands
(traité de Versailles et crise économique) puis met rapidement en place un régime totalitaire.
En résumé : Mussolini, Staline et Hitler arrivent au pouvoir de trois manières différentes mais mettent
tous les trois en place un régime totalitaire très rapidement et avec beaucoup d’efficacité.
II – Des spécificités idéologiques
Quelles sont les spécificités de chacun de ces trois régimes ?
Idéologie : système d’explication du monde proposant un projet d’évolution de l’humanité vers un
stade final et parfait.
Dans les trois cas, l’objectif est de conduire le pays vers une société parfaite leurs yeux) et de
construire un « homme nouveau ». Les trois régimes se basent sur trois idéologies différentes.
A – Le communisme soviétique, une idéologie de la classe
Staline ne développe pas d’idéologie propre, il reprend l’idéologie communiste créée par Karl Marx
au XIXe siècle et adaptée par Lénine (marxisme-léninisme).
L’objectif poursuivi est une société sans classe et sans État tous les hommes sont égaux,
l’exploitation de l’homme par l’homme n’existe pas. Ce bonheur universel passe par une étape de
dictature du prolétariat (et l’élimination de la classe bourgeoise) qui organise la suppression de la
propriété privée et le collectivisme. Le communisme dénonce aussi le nationalisme et le colonialisme.
B – Le fascisme italien, une idéologie de la nation
L’idéologie fasciste repose sur :
l’exaltation de la nation italienne à travers le culte de la grandeur passée (retrouver la
puissance de la Rome antique)
la puissance de l’État qui doit assurer la paix intérieure et le progrès économique et social
le militarisme : volonté d’insuffler à la société civile un esprit militaire (discipline, sens du
sacrifice, goût de la guerre)
C – Le nazisme allemand, une idéologie de la race
L’idéologie nationale-socialiste reprend l’idéologie fasciste en y ajoutant une dimension raciste. Hitler
4
considère que les races humaines sont inégales (Aryens, autres peuples germaniques, peuples
latins, peuples slaves, noirs et juifs) leur attribuant un statut en fonction de leur position supposée
(dominants, associés, tolérés, réduits en esclavage, élimination physique). C’est donc une idéologie
raciste dont l’antisémitisme a conduit à un génocide (voir cours sur la Seconde Guerre mondiale).
Selon l’idéologie nazie, le peuple allemand doit se prémunir de la contamination des races inférieures
mais aussi des asociaux (alcooliques, homosexuels, etc.) qui sont également envoyés en camps de
concentrations voire éliminés (ex. handicapés).
Cette idéologie est également expansionniste : la race supérieure doit dominer, les Allemands
doivent étendre leur espace vital sur les territoires de l’Est, les nations occidentales doivent être
soumises au Reich.
Trois visions différentes de ce que doit être « l’homme nouveau » et des ennemis désignés :
Chacune des trois idéologies définit ainsi ce que doit être l’homme nouveau :
pour les communistes, l’homme nouveau est un prolétaire libéré de l’exploitation bourgeoise
pour les fasciste, l’homme nouveau est un homme viril et fort au service de la nation
pour les nazis, l’homme nouveau est un aryen de race pure qui domine les autres peuples
Elles définissent donc aussi les cibles de la répression de chaque régime :
en URSS, les ennemis de classes (bourgeois, koulaks)
en Italie, les opposants à la grandeur de la nation (ex. communistes)
en Allemagne, ceux qui menace la pureté du sang allemand (Juifs, Tsiganes, handicapés,
asociaux)
III – Le fonctionnement des États totalitaires : des caractéristiques communes
Les régimes totalitaires présentent-ils toutefois des caractéristiques communes ?
A – Une société asservie par le parti-État
Le totalitarisme est un système politique caractérisé par le pouvoir d’un parti unique dont l’ambition
est d’englober toute la société. Aucune opposition n’est tolérée. L’État et le parti sont confondus.
Ce parti-État tend à confisqué la totalité des activités de la société et utilise trois moyens pour cela :
Endoctrinement (le contrôle des esprits) :
Le contrôle des esprits passe par la propagande qui constitue toujours un ministère important (ex.
Goebbels en Allemagne). Tous les médias sont contrôlés par le parti-État qui peut ainsi inculquer
sont idéologie et glorifier son chef.
À la tête du parti figure un homme seul, considéré comme infaillible. Le chef fait l’objet d’un véritable
culte : il est présenté comme un individu extraordinaire qui sacrifie son existence au service au
peuple et de l’État. Le culte de la personnalité est une dimension importante du totalitarisme :
Staline « l’homme d’acier » : portraits et statues le présentent comme un homme bienveillant
et protecteur (« le petit père des peuples »).
Mussolini : le « duce », guide infaillible qui redonne à l’Italie la grandeur de l’Empire romain
Hitler : le « führer », guide pour relever son peuple de l’humiliation et assurer la domination de
l’Allemagne.
Par la propagande, on cherche l’adhésion des masses en promettant un avenir jugé « positif »
(grandeur nationale, pureté raciale, société sans classe et sans État) c’est-à-ire conforme à
5
1 / 7 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !