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Marsyas, par Ovide.
« Lorsque le conteur, dont j’ignore le nom, eut rapporté en ces termes la triste fin
des paysans Lyciens, un autre rappela le châtiment infligé par le fils de Latone au satyre
qu’il avait vaincu dans le combat de la flûte, due à la déesse du Triton : “Pourquoi
m’arraches-tu à moi-même ?” demandait celui-ci. Et il criait : “Ah ! quel est mon
repentir ! Ah ! une flûte ne vaut pas d’être payée si cher !” En dépit de ses cris, la peau
lui est arrachée sur toute la surface de son corps ; il n’est plus qu’une plaie ; son sang
coule de toutes parts ; ses muscles, mis à nu, apparaissent au jour ; un mouvement
convulsif fait tressaillir ses veines, dépouillées de la peau ; on pourrait compter ses
viscères palpitants et les fibres que la lumière vient éclairer dans sa poitrine. Les
Faunes rustiques, divinités des bois, les Satyres, ses frères, Olympus, qui même à ce
moment lui est encore cher, et les Nymphes le pleurèrent, et, avec eux, tous les bergers
qui sur ces montagnes faisaient paître les bêtes à laine et les troupeaux de bœufs.
Leurs larmes, en tombant, baignèrent la terre fertile, elle les recueillit dans son sein et
s’en abreuva jusqu’au fond de ses veines ; puis, les ayant changées en eau, elle les
renvoya vers les libres espaces de l’air. Ainsi est né un fleuve qui va, entre les pentes
de ses rives, se jeter dans la mer orageuse ; c’est celui qu’on appelle le Marsyas, le plus
limpide de la Phrygie. »
OVIDE, Les Métamorphoses, édition présentée et annotée par Jean-Pierre Néraudau,
traduction de Georges Lafaye, Paris, Gallimard, 1992, p. 204-205.
Ovide, en lat. Publius Ovidius Naso (Sulmona, Abruzzes, 43 av. J.-C.-Tomes, auj. Constanta, 17 ou
18 apr. J.-C.). Poète latin, favori de la haute société et protégé d’Auguste, Ovide exploite toutes les
tendances de la poésie élégiaque. Les Métamorphoses, son œuvre la plus ambitieuse, raconte l’histoire
du monde, du chaos primitif à l’apothéose de César. Ce long poème épique en quinze livres regroupe
toutes les légendes merveilleuses de la mythologie où dieux et mortels se transforment en animaux ou en
plantes.
L’influence d’Ovide sur la civilisation occidentale est considérable. Les récits et les descriptions des
Métamorphoses constituent une inépuisable source d’inspiration pour les artistes entre la Renaissance et
le XIXe siècle. Le décor du château et des jardins de Versailles reflète l’importance de ce texte
fondamental dans l’imaginaire des hommes du XVIIe siècle.
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