comment vivre? Il est des zones d'ombre en soi-m6me dans lesquelles on ne s,aventure qu,en
tremblant...
Et le^parcours de la maladie r6vdle et provoque des failles i tous niveaux, source et signe de
souffrance, souffrance du corps, entami par-la maladie qui altdre les traits, affaiblit les Torces.
ks traitemenJs m,tilent, bombardent, empoisonnent, marquent des cicatrices. [-a douleur
apparait, insidieuse, brutale.
Mais comment dissocier cette peine du corps de celui qui I'habite? c'est I'dpreuve du suiet:
..-.6preuve de la permanence de ce moi qui me fait "moi" depuis l'origine de la vii et me
garanllt la rencontre,
. - 6preuve de l'identi(6 aux racines de I'Etre, quand ''je" ne me reconnais plus dans le
miroir et que je cherche dans le regard de I'autre 'l'assurince d'ctre reconnu.'ii ".i a..
supplications ignor6es, des regards ddtourn6s, des silences qui trahissent.
.. ... -.fpreu.ve d'une image d6chue, de r6les qu'on ne plus tenir, d'une parole qui ne sait plus
"qui"_ dire: pire: que ''je" ne suis plus moi. ei d qui le dire? comme ii cette chute dans la
gravit6 de Ia vie chassait les images secretes et enfantines d'une bonne f6e pr6sidant i notre
naissance, pour faire surgir celle d'un mauvais sort acharn6 contre nous. Iri forces aveugles
qui hantent notre inconscient se rdveillent, avec la faute prete d nous accabler!
. -.6preuve de la rencontre de ce qui pourra survivre d la tourmente. Vient alors le risque et
la tentation de se coller au mot "canc6reux", de se confondre i un destin mortifdre eln un
d6sespoir ignor6, cach6 derridre un acharnement i gu6rir...
9uand J'ac.cident_ fait_ irruption dans une vig comment ne pas chercher i donner un sens d
I'absurde, l'impr6visible, le non-sens? ne serait-ce que_ p6ur survivre? comment ne pas
questionner et chercher_ i partager "ce qui m'arrive" et qui dbranle tous les repdres familiers,^les
valeurs, ce qui fait trier les amis et dpro ver la solitude? '
Comment supporter en soi les traces de la maladie, cicatrices de I'ime et du corps, sisnes de la
gravit6 du ma1, sans me rassembler moi-mome dans mon seul vrai centre de griuite, iou. rnon
nom, inscrit dans mon histoire? Et crier, exiger que ce nom me d6signe uux" v"r* de I'autre
plus essentiellement que le lieu de ma tumeur o-u Ie num6ro de ma cham"bre.
Ir cancer r6veille, .provoque, me semble{-il. une urgrcnce de parole et de parole vraie, pleine,
comme une n6cessit6_ vitale_ qyg ce-tte parole soit recueillie, entendue, pour que puisse se idutenii
le d6sir du suje! celui qui dit "Je"- en son nom... Ii ne suffii pas aL parter poui gu6rir,
?.Ufgt?tt!*n: Et le temps presse. Mais la q-uesrion n'est-elle paj aussi di retier'ce quT a pu
etre delle par, a cause de. e travers cette 6preuve?
La parole: un travail de m6moire.
En rupture d'6vidence, une premidre question surgit: "pourquoi moi?" la premidre r6action
est d'accuser l'injustice du sort. Une dutre est de s-'accuser soi-m6me retourndnt la question du
coupable el de se rdsigner.,. .Qui qeut.dire le poids des n6cessit6s psy"hotogiqu"s
lnconsclentes dans une vie et quel peut Ctre I'impact de leur alliance avec la'n6cessitiou la
fatalit6 phyiiologiquel _Il est dei gl,6risons 6tonnantes, comme des morts surprenantes-.. C,est
que la maladie.vient.r6v6ler, par.la.force des choses, la tension qui existe en c^hacun de nous, le
partage entre d6sir de vie et d6sir de mort inconscient, c'est d diie non pas n6cessairement celui
de mouril mais de licher prise, se mettre en repos de d6sir.
La maladie ramdne au fondement de la question: qu'est-ce qui me pousse ir reconduire au iour le
jour le contrat pass6 avec mon corps au jbur de mi naissanci?
Dans. ce flottement dl d6sir, -cette d6liaison possible de moi-m0me avec ce moi ,.autre,,, la
question peut effe d'abord de formuler le chaos, de se raccrocher au fil de son histoiri iui" ..,
lignes de force et de tension, ses fractures et sa continuit6.
Parler, ce serait alors tenter de donner forme, de mettre en mots ce qui n,a iamais vu le iour en
moi, s'aventurer dans f inconnu de soi-mdme, 6prouv6. c'est aussi 6herchei un sas de s'6iurit6,