L'EFFET REVOLUTIONNAIRE DU SYMPTÔME Par Léa Zanouy Ce samedi 28 Mars, dans les locaux de la « Machine à Lire », Marie-Jean Sauret, psychanalyste et professeur de psychopathologie à Toulouse, présentait son dernier ouvrage : « L’effet révolutionnaire du symptôme » (Erès, 2009). Agréable surprise que d’entendre un lacanien partager une réflexion captivante à la portée de tous ! L’homme s’exprime clairement, sans fioriture, et l’humour ne lui fait certainement pas défaut. Quel est le propos ? Pour résumer, l’auteur s’interroge sur la place que laisse la société postmoderne (scientiste et capitaliste) au Sujet et aux « théories du sujet » (dont la psychanalyse). Dès le 17e siècle en effet, l’avènement de la science moderne constitue une rupture dans la manière dont les hommes vont expliquer et donner un sens au monde : désormais, la science permettrait d’expliquer toute chose et de combler tous nos manques, tel est le discours (mensonger) qui fait encore autorité. La science constitue le savoir objectif, généralisable, universel auquel on se réfère; si elle a permis des avancées considérables, elle exclut aussi la subjectivité en tant qu’elle impose sa supériorité sur d’autres tentatives de réponses (mythiques, religieuses, philosophiques, psychanalytiques). Le lien social contemporain, lui même dominé par la science (et notamment la technoscience, qui fabrique ce dont chacun est supposé manquer) et le marché, transforme volontiers nos désirs en besoins, confondant le sujet parlant et l’individu biologique : « si quelqu’un croit qu’une voiture ou un ordinateur sont ce qui le compléterait, c’est qu’il est de même nature que ledit objet » ; d’ailleurs, l’humain a lui aussi une valeur marchande (en « pièces détachées » par exemple). Au passage, l'auteur signale la montée en puissance des pathologies de la consommation dans nos sociétés (toxicomanie, trouble des comportements alimentaires, achats compulsifs, addiction aux jeux,etc.) Pourtant, tous les hommes ne sont pas prêts à se laisser réduire à l’état d’objet de la science, de l’économie, de la biologie… Cet irréductible, c'est le Sujet: ce qui, en chacun de nous, est à la recherche de sens (la science fournit des explications mais nous laisse en panne de sens) et d'un lien social authentique, dans lequel puissent apparaître les singularités. Dans ce cadre, l'auteur nous signale que le symptôme peut être la solution trouvée par certains d'entre nous pour sauver leur singularité à la voracité de cet "Autre dévorant" qu'est la société capitaliste. Il nous sensibilise à la portée "révolutionnaire" du symptôme et nous encourage à l'écouter différemment, à "laisser sa chance" à ce qui est exprimé, au lieu de vouloir le supprimer d'emblée, ce qui reviendrait à "supprimer le sujet lui-même". L'écoute du psychanalyste (plus que tout autre psychothérapeute), qui « vise à mettre à plat la théorie que le sujet s’est donné pour régler son rapport au monde », permet cela, nous indique M-J Sauret. Sans développer davantage, voici un ouvrage dans lequel sont habilement mises en lien des notions d'économie, de politique, de philosophie ou de psychanalyse et qui ouvre notre regard sur des questions fondamentales.