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Daghestan ou l’Ingouchie proche de l’Ossétie, aujourd’hui zones
d’insécurité secouées par des enlèvements et des attentats, ris-
quent de devenir demain des zones de conflits plus sérieux et plus
étendus.
UNE DÉMOGRAPHIE
QUI POSE PROBLÈME...
Avec ses onze fuseaux horaires couvrant 9 000 kilomètres d’Ouest
en Est, et 2 500 du Nord au Sud, et d’une superficie d’environ
17 millions de kilomètres carrés, dont 13 à l’est de l’Oural et 4 en
Europe, la Russie est le pays le plus étendu du monde entre
l’Europe et l’Asie. Elle a, fait exceptionnel, quatorze voisins : Nor-
vège et Finlande au Nord-Ouest, Pologne, Estonie, Lettonie,
Lituanie, Ukraine et Biélorussie à l’Ouest, Géorgie, Azerbaïdjan et
Kazakhstan au Sud, Chine, Corée du Nord et Mongolie au Sud-Est.
Sa population, composée de 134 nationalités, qui en 2006 comp-
tait 143 millions d’habitants, dont 10,4 dans sa capitale en plein
développement, est très inégalement répartie. La partie euro-
péenne, soit le quart du territoire, abrite, avec une densité de
30 habitants au kilomètre carré (contre 8,5 pour l’ensemble du
pays), 80 % d’une population, dont environ le quart vit dans les
dix villes les plus importantes, avec un taux d’urbanisation de 73 %.
Une telle disparité pose un premier problème, car la Sibérie lar-
gement sous-peuplée fait face à une Chine surpeuplée.
Un second problème, plus grave pour l’avenir, tient à ce que la
Russie, qui depuis 1992 a perdu 6 millions d’habitants, voit, comme
d’autres Etats européens, sa population décroître. L’on y enregis-
trait en 2006, 16,1 décès pour 10,4 naissances sur 1 000 habitants,
avec un taux de natalité de 1,34 enfant par femme, insuffisant à
assurer l’équilibre démographique. Ce qui a poussé le Gouverne-
ment à mettre en œuvre, comme en France, une politique nata-
liste, qui ne pourra cependant avoir d’effet qu’à terme.
UNE ÉCONOMIE
EN CROISSANCE RÉGULIÈRE...
JUSQU’A LA CRISE MONDIALE
Sur cet immense territoire, la Russie dispose en abondance de
ressources minérales et agricoles, notamment sur les fertiles terres
noires du tchernoziom, qui font d’elle le quatrième producteur
mondial de blé, le cinquième de bois, le septième de millet et le
onzième de bovins. En plus de ressources minérales nécessaires
au développement des industries de pointe (fer, bauxite, cobalt,
cuivre, manganèse, nickel, plomb, zinc, lithium, magnésium...),
elle recèle une énorme part des réserves mondiales de charbon
(58 %), de lignite (68 %), et surtout de gaz et de pétrole. Elle est,
depuis 2003, respectivement le premier et le second producteur
et le second exportateur mondial d’or noir, leur ensemble repré-
sentant 20 % du PIB russe et procurant le tiers des ressources bud-
gétaires. Leur exportation constitue, comme le labourage et le
pâturage de la France de Sully, les deux facteurs d’une crois-
sance régulière, de 7,1 % en 2004, 6,4 % l’année suivante et 6,7 %
en 2007, grâce à laquelle son PIB, en augmentation régulière,
atteignait 979 Mds$ en 2006.
La Russie est ainsi en mesure d’avoir des excédents budgétaires,
de, respectivement, 7,7 % du PIB en 2005, 7,3 % l’année suivante
et 7,4 % sur les sept premiers mois de 2007. Une performance qui,
après un remboursement par anticipation en août 2006 de
23,7 Mds$ au Fonds monétaire international (le FMI), lui a permis
de réduire son endettement public de 11 % fin 2005 à 9 % en 2006
– un taux parmi les plus faibles au monde, fort éloigné du plafond
des 60 % du traité de Maastricht... A cette amélioration du risque
de l’Etat correspond toutefois, du fait de la croissance, un fort
accroissement depuis 2003 de la dette extérieure des banques
et des entreprises, qui, fin 2006, était de 260 Mds$, soit près du
quart du PIB. Les fortes entrées de devises résultant aussi bien des
investissements étrangers que des exportations d’hydrocarbures
aux prix en hausse sont à l’origine d’une sensible appréciation de
la monnaie nationale, le rouble. Constante depuis 1999, elle a été
sur les marchés des changes de 7,4 % en 2006 et de 3,9 % au
cours des sept premiers mois de 2007.
Mais ces bons résultats ont eu pour effet un relâchement bud-
gétaire, porteur, selon le FMI, de deux formes de risques pour
l’avenir. D’une part, l’excédent budgétaire provenant des
recettes pétrolières et gazières cachait un déficit latent, de
l’ordre de 5 % du PIB en 2007, qui aurait encore augmenté si
des mesures n’avaient été prises pour corriger le projet de
budget triennal 2008-2010. Par ailleurs, la dégradation de la
conjoncture due à la crise financière n’a manqué d’induire,
comme dans bien d’autres pays, un fort accroissement des
dépenses qui ont atteint 20,3 % du PIB avec, pour résultat, une
réduction à 2,8 % du PIB de l’excédent budgétaire. L’inflation,
de son côté, après sa réduction de 9,6 à 8,7 % entre 2006 et
2007, augmente depuis son point bas de mars 2007. Cette
hausse, pilotée par la Banque centrale pour limiter l’apprécia-
tion du rouble sur des marchés qui enregistraient alors de fortes
entrées de devises, a été suivie de l’augmentation mondiale
des prix qui a conduit à relever à 10 % le taux prévisionnel
d’inflation.
L’approvisionnement de l’étranger en hydrocarbures est la
caractéristique principale de son commerce extérieur. Ils y tien-
nent une place prépondérante, ce qui est un sérieux avantage
dont la Russie tire partie dans sa politique étrangère, par son
contrôle sur les approvisionnements et les prix. Mais elle est aussi
en situation de dépendance vis-à-vis de l’extérieur. Le retourne-
ment de conjoncture qui a entraîné une réduction de ses expor-
tations et un double reflux de capitaux, provoqué successivement
par le conflit géorgien, puis par la crise internationale, a même
conduit certains économistes à estimer que l’économie russe,
pour brillante qu’elle soit aujourd’hui, pourrait n’être demain
qu’ « un colosse aux pieds d’argile ».
Son commerce extérieur, en développement constant depuis
1992, hormis la chute brutale provoquée par la crise de 1998,
révèle un fort déséquilibre qui a joué pour l’instant en sa faveur.
En 2006, sur 137 Mds$ d’importations – supérieures de 40 % à
celles de l’année précédente –, seulement 15 %, composés de
produits finis et de biens d’équipement, provenaient de la CEI
(la Communauté d’Etats indépendants regroupant douze des
quinze anciennes Républiques soviétiques), et 85 %, composés
de machines et de biens d’équipement, émanaient des pays
hors CEI. Les exportations, deux fois plus importantes en valeur,
soit 300 Mds$, et elles aussi en croissance, mais de 25 % seule-
ment sur 2005, et intégrant pour près des trois quarts des produits
minéraux, du pétrole et surtout du gaz, étaient pour 86 % dirigées
sur les pays autres que ceux de la CEI. L’UE, destinataire à elle
seule des deux tiers de ces exportations, a toute chance de
rester, pour des années, le principal client de la Russie en raison
de ses besoins croissants et de la difficulté d’y apporter à brève
échéance des solutions alternatives. Peut-être même aura-t-elle
à compter un jour avec une OPEP du gaz, que la Russie, l’Iran,
le Qatar, l’Algérie et le Venezuela qui contrôlent 73 % des
réserves mondiales, ont le projet de créer. Ce qui devrait
conduire Bruxelles à définir et mettre en œuvre sans retard la
politique énergétique de l’Europe, que nécessitent aussi bien la
conclusion d’accords pour ses approvisionnements en pétrole
et en gaz, que la définition du tracé de nouveaux gazoducs et
oléoducs contournant la Russie, comme vise à le faire le projet
Nabucco. La pérennité de la prédominance de l’Europe
comme principal fournisseur pose également problème, en
raison de la compétitivité croissante des pays asiatiques.
Les revenus de cette manne gazière et pétrolière sont confiés,
comme en Norvège, mais sous une forme différente, à divers
organismes créés à cette fin. Le Fonds de stabilisation, instauré
en 2004 pour combattre les conséquences des variations des
varia
No5-Mai2009 -
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