les troubles des conduites alimentaires

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La prise en charge globale du patient diabétique
d www.diabeteetobesite.org
Thérapeutique
Incrétines : entre
insulinosécrétion
et insulinorésistance
p. 331
Mise au point
La ghréline :
un acteur primordial
de la régulation alimentaire
p. 357
éducation thérapeutique
L’entretien motivationnel :
un vrai état d’esprit
p. 347
L’essentiel sur…
La glycémie postprandiale :
un paramètre important aussi
dans le DT2 ?
p. 352
Dossier FMC
Les troubles des conduites
alimentaires
1 Comment les classer ?
2 Contrôle de la prise alimentaire :
l’importance des signaux métaboliques
3 Syndrome de Prader-Willi : quelle régulation de la prise alimentaire ?
4 Quelles sont les conséquences cognitives du diabète et de l’obésité ?
Novembre 2011 • Volume 6 • n° 53 • 8 E • Cahier 1
La pris e e n c h ar g e g l o ba l e d u pa t i e n t diab é t i q u e
• Directeur de la publication :
Dr Antoine Lolivier
• Chef du Service Rédaction :
Odile Mathieu
• Rédactrice :
Violaine Colmet Daâge
• Secrétaire de rédaction :
Annaïg Bévan
• Chef de Fabrication et de Production :
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sommaire
www.diabeteetobesite.org
Novembre 2011 • Vol. 6 • N° 53 • Cahier 1
n ActualitÉs . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 328, 330
n thérapeutique
Les incrétines, entre insulinosécrétion et insulinorésistance :
les implications, de la nutrition artificielle
à la chirurgie bariatrique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 331
Pr Didier Quilliot (Nancy)
n Dossier . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
p. 337
Troubles des conduites alimentaires
Dossier rédigé par le Pr Patrick Ritz (Toulouse)
Comité de lecture
Rédacteur en chef “Obésité” :
Pr Patrick Ritz (Toulouse)
Introduction����������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������������� p. 337
Rédacteur en chef “Diabète” :
Dr Saïd Bekka (Chartres)
1 n Classification des TCA : allons-nous vers le DSM-V ?. . . . . . . . . . . . . p. 338
2 n Contrôle de la prise alimentaire :
l’importance des signaux métaboliques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 340
3 n Régulation de la prise alimentaire au cours du syndrome
de Prader-Willi : les apports de l’imagerie cérébrale. . . . . . . . . . . . . p. 342
4 n Conséquences cognitives du diabète et de l’obésité :
chez l’enfant et l’adulte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 344
n En bref. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 345
Pr Yves Boirie (Clermont-Ferrand)
Pr Régis Coutant (Angers)
Pr Jean Doucet (Rouen)
Pr Pierre Gourdy (Toulouse)
Pr Véronique Kerlan (Brest)
Dr Sylvie Picard (Dijon)
Dr Helen Mosnier Pudar (Paris)
Dr Caroline Sanz (Toulouse)
Dr Anne Vambergue (Lille)
Comité Scientifique
Pr Bernard Bauduceau (Paris)
Pr Rémy Burcelin (Toulouse)
Pr Bertrand Cariou (Nantes)
Pr François Carré (Rennes)
Pr Bernard Charbonnel (Nantes)
Dr Xavier Debussche (Saint-Denis,
Réunion)
Pr Jean Girard (Paris)
Pr Alain Golay (Genève)
Pr Hélène Hanaire (Toulouse)
Dr Michel Krempf (Nantes)
Pr Michel Pinget (Strasbourg)
Pr Paul Valensi (Bondy)
Diabète & Obésité
est une publication
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Les articles de “Diabète & Obésité” sont publiés
sous la responsabilité de leurs auteurs.
Toute reproduction, même partielle, sans
le consentement de l’auteur et de la revue, est illicite
et constituerait une contrefaçon sanctionnée
par les articles 425 et suivants du code pénal.
n éducation thérapeutique
L’entretien motivationnel :
un véritable état d’esprit . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 347
Dr Monelle Bertrand (Toulouse)
n L’essentiel sur…
La glycémie postprandiale :
un paramètre à prendre en compte (aussi) dans le diabète de type 2. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . p. 352
Pr Bogdan Catargi (Bordeaux)
n Mise au point
La ghréline, physiologie et perspectives thérapeutiques :
un acteur primordial de la régulation alimentaire . . . . . . . . . . . . . p. 357
Dr Emmanuel Disse (Lyon)
n Bulletin d’abonnement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
n Rendez-vous de l’industrie . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Assemblés à cette publication : 2 bulletins d’abonnement (2 pages et 4 pages).
Cette publication se compose de 2 cahiers : cahier 1 (44 pages), cahier 2 (28 pages).
Photos de couverture : © Kamil Sarna - Istockphoto.com
p. 339
p. 351
actualités de la profession
Le chiffre
du mois
33 %
des Français
avouent lire peu voire pas
la notice des médicaments.
C’est le résultat d’un sondage
réalisé par le Groupe Pasteur
Mutualité/Viavoice. Le sondage
révèle également que les
femmes sont plus attentives
que les hommes aux notices
de médicaments : 50 %
d’entre elles déclarent les lire
systématiquement contre
seulement 36 % des hommes.
Des différences de pratiques
apparaissent également selon
les générations : seulement un
tiers des 18-24 ans se montrent
vigilants quant à la lecture des
notices alors que 51 % des plus
de 65 ans déclarent les lire systématiquement (ils ne sont que
10 % à ne jamais les regarder).
EN BREF
Un timbre commémoratif
A l’occasion de la
journée mondiale
du diabète et
afin d’honorer
la découverte
majeure qu’est
l’insuline voici 90 ans ainsi que
son rôle déterminant dans le
traitement du diabète, la Poste
et l’AFD émettent un timbre
d’usage courant le 18 novembre prochain. Ce timbre a
été dévoilé le 14 novembre
par Stéphane Diagana à
l’Assemblée Nationale. Il est
vendu depuis le 18 novembre
dans tous les bureaux de poste.
328
Economie
Vente de médicaments
en France en 2010
L
es résultats 2010 confirment la tendance observée depuis plusieurs années : la croissance
du marché pharmaceutique s’est ralentie (+1,2 %
par rapport à 2009, + 4,7 % en moyenne annuelle
par rapport à 2000). Cette stabilisation ne s’est
pourtant pas accompagnée d’une réduction de
l’offre : 3 000 substances actives différentes, correspondant à plus de 10 000 spécialités, étaient
disponibles sur le marché français en 2010.
En 2010, la consommation moyenne de la population française a été de 48 boîtes de médicaments
par habitant, soit presque une boîte par semaine.
Au sein du marché de ville, les ventes sont fortement concentrées sur certaines classes. En
valeur, ce sont les médicaments du système
cardiovasculaire qui occupent le premier rang
devant les médicaments du système nerveux.
Les médicaments les plus vendus (en valeur) en
ville sont présentés dans le tableau 1. Ce classement 2010 ne présente aucun changement significatif par rapport à 2009, si ce n’est le recul
de Plavix®, en raison de la création d’un groupe
générique pour le clopidogrel.
Tab 1 - Meilleures ventes en France en 2010.
Rang Produit
Classe
1
Tahor®
Hypolipémiant
2
Inexium®
Antiulcéreux
3
Seretide® Antiasthmatique
4
Crestor®
Hypolipémiant
5
Enbrel®
Immunosuppreseur
6
Humira®
Immunosuppreseur
7
Lucentis® Traitement de la DMLA
8
Glivec®
Antinéoplasique
9
Symbicort® Antiasthmatique
10
Doliprane Antalgique
…
11
Plavix®
Antiagrégant plaquettaire
14
Lantus®
Antidiabétique
15
Lovenox® Anticoagulant
16
Inegy®
Hypolipémiant
21
Coaprovel® Antihypertenseur
22
Aprovel®
Antihypertenseur
27
Coversyl® Antihypertenseur
32
Cotareg® Antihypertenseur
33
Ezetrol®
Hypolipémiant
44
Tareg®
Antihypertenseur
En 2010, près d’un médicament remboursable
sur quatre achetés dans une officine était un générique. Les génériques sont désormais présents
dans la plupart des classes thérapeutiques et
couvrent de nombreuses pathologies traitées en
ville. Ainsi trouve-t-on des génériques parmi les
antalgiques, les antibiotiques, les antidiabétiques,
les antiulcéreux, les antihypertenseurs, les hypolipidémiants, les anti-inflammatoires, les anxiolytiques, etc. Le tableau 2 présente les médicaments
génériques les plus vendus en France en 2010. ß
Tab 2 - Génériques les plus consommés en 2010.
Rang Groupe
Classe
1
Clopidogrel
Antiagrégant
plaquettaire
2
Oméprazole
Médicaments pour
les troubles de l’acidité
3
Pravastatine
Hypolipémiant
4
Simvastatine
Hypolipémiant
5
Amoxiciline/
Antibactérien à usage
acide clavulanique
systémique
6
Ramipril
Antihypertenseur
7
Metformine
Antidiabétique
8
Pantoprazole
Traitement RGO
9
Cefpodoxime
Antibactérien à
usage systémique
10 Paroxétine
Antidépresseur
11 Amoxicilline
Antibactérien à
usage systémique
12 Amlodipine
Antihypertenseur
13 Fénofibrate
Hypolipémiant
14 Lansoprazole
Antiulcéreux
15 Rispéridone
Antipsychotique
16 Bisoprolol
Traitement de
l’insuffisance
cardiaque
17 Dextropropoxyphène
paracétamol
Antalgique
18 Prednisolone
Glucocorticoïde
19 Périndopril
Médicament agissant
sur le système rénine
angiotensine
20 Alfuzosine
Médicaments utilisé
dans l’hypertrophie
bénigne de la prostate
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
actualités de la profession
Film
EN BREF Comment vivre avec le diabète ?
Pharmacovigilance :
mise à jour de la liste
des médicaments sous
surveillance renforcée
L’AFSAPPS a annoncé la mise à
jour de la liste des médicaments
sous surveillance renforcée. La
liste initiale, de janvier 2011,
contenait 89 médicaments ou
classes thérapeutiques. La liste
actuelle des médicaments sous
surveillance renforcée contient
30 médicaments ou classes
thérapeutiques :
12 font l’objet d’une réévaluation de leur rapport bénéfice/
risque et 18 font l’objet d’un
suivi de pharmacovigilance
renforcé. La liste est disponible
sur le site : www.afssaps.fr.
Le vaccin antigrippal moins
efficace chez les obèses
C’est ce qu’affirme l’équipe de
l’américaine Melinda Beck dans
un article publié fin octobre dans
le Journal of Obesity. L’étude
en question s’est intéressée
à 461 personnes vaccinées
contre la grippe et a permis
de remarquer que l’immunité
obtenue est nettement moins
bonne dans la population
obèse. En effet, les résultats ont
montré qu’après 11 mois, la
moitié des personnes obèses
présentait des taux d’anticorps
4 fois moins élevés. Ce “déficit”
en anticorps n’était pourtant
observé que chez le quart des
personnes de poids normal. Les
chercheurs ont conclu que la
durée d’efficacité du vaccin serait
moins longue chez les obèses.
Pour le Pr Beck, ces données doivent aujourd’hui
« nous inciter à trouver
des solutions » pour cette
population plus fragile.
330
A
l’occasion de la journée mondiale
du diabète, l’Association Française des Diabétiques a voulu retracer les 90 ans
d’histoire de l’insuline en mettant en images les
vécus singuliers et multiples avec le
diabète tels que les partagent les
3,5 millions de patients en France. Un
film est visible dans toute le France
grâce au réseau d’associations fédérées. Ce film pose la question : comment vivre au quotidien avec cette
maladie chronique ? Au fil des récits de
Christian, Angélique, Pauline, Patricia
et Jean-Pierre, se dessinent, éclairées
par le diabétologue et chercheur JeanPierre Riveline, les avancées thérapeutiques depuis la découverte de l’insuline,
en 1921…
Les cinq témoins diabétiques de ce film racontent
leur quotidien avec le diabète : l’âge, le milieu de
vie ou les conditions de travail y ont leur part mais
on retrouve aussi des traits communs à tous, la
lutte jour après jour, les petits arrangements avec
la maladie. Parfois, le sentiment de culpabilité,
toujours les doutes mais aussi les attentes vis-à-
vis du corps médical. Le Dr Jean-Pierre Riveline a
retracé quant à lui les aspects historiques et médicaux du film. Soutenu par des archives et le vécu
de chacun des témoins, on pourra découvrir à quel
point les progrès de la médecine induisent une
qualité de vie incomparablement meilleure. ß
Enquête
Les médecins généralistes
et le cœur de leurs patients
L
a Fédération Française de Cardiologie a interrogé les médecins généralistes sur le risque
cardiovasculaire et met en regard de leurs réponses, le ressenti de 769 malades interrogés par
l’Alliance du Cœur, association regroupant les patients atteints de maladies cardiovasculaires.
Il ressort qu’au cours de leurs consultations, les
médecins généralistes manifestent presque unanimement une surveillance des risques liés aux
maladies cardiovasculaires : 98 % d’entre eux
déclarent en effet être particulièrement attentifs
aux signes avant-coureurs des maladies cardiovasculaires. Cette surveillance passe essentiellement par l’information et la sensibilisation
puisqu’ils privilégient en grande majorité la discussion (72 %), avant la prescription d’examens
biologiques (27 %) et la distribution de brochures
(1 %). Cependant, sont relégués au second plan
le cholestérol (21 % des citations), le surpoids et
l’obésité (18 % de citations) et les mauvaises habitudes alimentaires (14 % de citations).
Parmi les solutions à privilégier pour enrayer la
recrudescence des maladies cardiovasculaires,
les médecins généralistes réclament à 54 % un
temps de consultation plus long pour un meilleur
échange entre le médecin et ses patients ; 38 %
des interrogés ressentent également le besoin
d’une meilleure communication autour de ces
maladies par le développement d’outils d’information, comme les brochures ou les sites Internet. Les médecins généralistes se déclarent également favorables à une large majorité à la mise
en place d’un Plan Cœur (72 % contre 27 % d’opinions défavorables) devant la situation préoccupante constatée au niveau des maladies cardiovasculaires.
ß
D’après un communiqué
de la Fédération Française de Cardiologie
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Thérapeutique
Les incrétines : entre insulino‑
sécrétion et insulinorésistance
Les implications : de la nutrition artificielle
à la chirurgie bariatrique
Pr Didier Quilliot*
Depuis quelques années, le tube digestif est devenu un second cerveau,
sécréteur d’hormones et de neurotransmetteurs, capable d’interférer
dans les métabolismes les plus intimes
des macronutriments, d’inter-agir dans
la neurotransmission des signaux de
faim, de satiété ou encore sur le métabolisme du tissu adipeux. Le rôle des
incrétines est sans doute à la fois surestimé, quand il s’agit de régulation
glycémique, car le métabolisme intestinal des glucides joue un rôle propre
dans la régulation glycémique et sousestimé quant aux effets pléiotropes
dont certains sont sans doute encore
inconnus. En dehors des effets potentialisateurs d’insulinosécrétion, les
incrétines semblent jouer bien d’autres
rôles, en partie révélés par le court-circuit intestinal, mais également par la
nutrition artificielle.
Qu’est-ce
qu’une incrétine ?
Une hormone
gastro-intestinale
Les deux principales incrétines
sont le GLP-1 (glucagon-like peptide), appelé également entéroglucagon, et le GIP (glucose depen* Service de Diabétologie-Nutrition, CHU de Nancy
© Juan Carlos Herrera Arango - 123rf.com / © photonewman - Fotolia
Introduction
Il est possible d’utiliser l’effet incrétine pour améliorer l’équilibre glycémique au cours
de la nutrition parentérale, en y associant un apport de nutriments par voie entérale.
dent insulinotropic polypeptide).
Ce sont des hormones gastro-intestinales qui stimulent la sécrétion d’insuline lorsque la glycémie
est élevée. Elles ont donc un rôle
important dans le contrôle de
la glycémie postprandiale.
Une hormone
potentialisatrice
de la sécrétion d’insuline
Ces hormones sont des potentialisateurs et non des initiateurs de la
sécrétion d’insuline, laquelle reste
glucose-dépendante.
L’importance de leurs effets dépend du
niveau de la glycémie.
Les incrétines sont sécrétées par des
cellules intestinales (cellules K pour
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
le GIP et L pour le GLP-1) et font
partie d’un ensemble d’hormones
digestives sécrétées par le système
“APUD” (Amine Precursor Uptake
and Decarboxylation). Celui-ci
regroupe une quinzaine de types
cellulaires différents qui sécrètent
une trentaine de polypeptides régulateurs. Ces polypeptides agissent
localement ou par voie sanguine
et peuvent être ainsi assimilés à
des hormones. Les cellules endocrines APUD sont disséminées dans
l’épithélium digestif, soit dans les
cryptes, soit à la base des villosités.
Elles sont particulièrement nombreuses dans la partie proximale de
l’intestin grêle, notamment dans le
duodénum et le jéjunum.
331
Thérapeutique
Des effets
sur la motricité intestinale
Ces hormones intestinales ont
aussi des effets sur la motricité
intestinale (par voie paracrine ou
endocrine) via les muscles lisses
de l’œsophage, de l’estomac, du
duodénum, des canaux biliaires et
pancréatiques, de l’intestin grêle
et du côlon, et des effets sur les sécrétions digestives.
Les principales
incrétines
Le GIP
❚❚Sécrétion
Le GIP est produit par les cellules K de l’intestin réparties du
duodénum jusqu’au côlon proximal. Le GIP est secrété en ré-
en synergie avec l’acétylcholine
en stimulant l’entrée de calcium
dans la cellule bêta (dernière
étape de l’insulinosécrétion) et
en augmentant la synthèse d’AMPc dans cette cellule. Contrairement au GLP-1, le GIP n’inhibe
pas la sécrétion de glucagon.
Les récepteurs au GIP sont présents dans de nombreux tissus
(pancréas, estomac, intestin
grêle, tissu adipeux, cœur, poumon…).
Le GLP-1
❚❚Sécrétion
Le GLP-1 est sécrété par les cellules L, localisées au niveau de
l’intestin grêle distal et du côlon.
La sécrétion est stimulée par la
perfusion de glucose dans l’intestin grêle, mais également par
La sécrétion du GIP dépend de l’absorption du
nutriment et non de sa présence dans l’intestin.
ponse à l’ingestion de glucose ou
de lipides (1, 2), ces derniers ayant
l’effet le plus important. La sécrétion dépend de l’absorption du
nutriment et non de sa présence
dans l’intestin. Par conséquent,
la sécrétion de GIP est réduite
en cas de malabsorption (3). La
sécrétion de GIP est très rapide
après ingestion de glucose (pic
entre 15 et 30 minutes) et revient
rapidement à la valeur basale
(3 heures) (4). En revanche, après
ingestion de graisses, la sécrétion
est plus lente mais elle est prolongée, en raison d’une vidange gastrique ralentie (2).
❚❚Dégradation et actions
De demi-vie courte (7 minutes),
le GIP est vite dégradé par une
enzyme appelée dipeptidyl-peptidase de type 4 (DPP-4). Il agit
332
les lipides, notamment au niveau
iléal (5), et par les protéines. La
sécrétion de GLP-1 dépend essentiellement de l’absorption
des nutriments. Pour le glucose,
il est couplé au sodium (transporteur glucose/Na+). Néanmoins, il y
aurait des taste receptors sensibles
au glucose, au saccharose et au sucralose qui déclencheraient également la sécrétion de GLP-1 (6).
Pour les lipides, l’absorption est
également nécessaire pour stimuler la sécrétion. L’orlistat, un inhibiteur de la lipase pancréatique
qui entraîne une malabsorption
des lipides alimentaires, diminue
la sécrétion de CCK, de PYY et de
GLP-1.
Au niveau du côlon, la perfusion
d’acides gras libres stimule également la sécrétion de GLP-1 (7).
Il existe sous 2 formes de GLP
dérivées du pré-proglucagon, le
GLP-1 et le GLP-2. L’isoforme
30 acides aminés représente
80 % de la forme circulante. La
sécrétion est généralement biphasique après un repas mixte.
La phase précoce (entre 10 et
15 minutes) est suivie d’une seconde phase plus longue (30 à
60 minutes). La phase précoce
de sécrétion est probablement
liée à une stimulation indirecte par une voie neuro-endocrine qui reste à explorer. En
effet, la sécrétion apparaît alors
que le bol alimentaire n’a pas atteint l’iléon ou le côlon (des cellules L ont récemment été mises
en évidence au niveau du grêle
proximal et pourraient donc être
responsables, en partie, de cette
sécrétion précoce). Le système
nerveux sympathique inhibe la
sécrétion alors que le système
parasympathique n’a pas d’effet.
❚❚Dégradation et actions
La demi-vie du GLP-1 est extrêmement courte (2 minutes) en
raison d’une dégradation rapide
par la DPP-4. L’interprétation de
sa concentration plasmatique est
difficile car seule 25 % de la quantité sécrétée atteint la veine porte
et la moitié de cette hormone est
dégradée par le foie. Le dosage
plasmatique ne reflète donc que
10 à 15 % de la sécrétion. Certains
métabolites pourraient cependant
être actifs, particulièrement sur le
système cardiovasculaire. Les récepteurs du GLP-1 (GLP-1R) sont
également présents à de nombreux niveaux : îlots du pancréas,
poumon, cœur, rein, estomac, intestin, cerveau…
Le GLP-1 inhibe la sécrétion
de glucagon en exerçant un effet tonique inhibiteur direct
et permanent, ce qui contribue à son effet “anti-hyperglycémiant”. La perfusion d’un
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Les incrétines : entre insulinosécrétion et insulinorésistance
antagoniste de GLP-1R chez des
volontaires sains augmente effectivement le niveau circulant de
glucagon et la glycémie à jeun.
La sécrétion de GLP-1 est diminuée chez les sujets diabétiques
de type 2, alors que celle du GIP
est augmentée. Par ailleurs, chez
l’animal, le GLP-1 stimule la prolifération des cellules bêta pancréatiques à partir de cellules précurseurs (effet non démontré chez
l’homme).
Effet sur la glycémie
L’effet incrétine ne fait pas
tout ! Et n’est peut-être pas l’essentiel… Des mécanismes qui
s’intriquent.
On estime que 60 % de la réponse
insulinique à un repas est lié à l’effet incrétine (8), mais cet effet ne
peut être attribué qu’au seul effet
sur la sécrétion d’insuline.
Effet sur l’insulinosécrétion
et la régulation glycémique
En postprandial, la concentration
de GIP augmente de façon plus
importante que le GLP-1 (jusqu’à
10 fois plus). Les effets potentialisateurs sur la sécrétion d’insuline
sont cependant identiques si l’on
compare le GLP-1 et le GIP pour
des glycémies modérées (9). En
revanche, l’effet du GIP s’estompe
au-delà de 1,4 g/l alors que celui du
GLP-1 reste glucose-dépendant.
L’effet incrétine est émoussé
chez le sujet diabétique ou
obèse, du fait d’une diminution de
la sécrétion (GLP-1) et non d’une
diminution de l’action sur la cellule bêta.
Utilisation splanchnique
du glucose
Lors d’un clamp hyperinsulinique
euglycémique, le débit de glucose
permettant de maintenir la gly-
cémie est plus important lorsqu’il
est perfusé par voie digestive que
par voie veineuse à insulinémie
identique (10). L’augmentation de
l’utilisation du glucose par l’intestin lui-même explique essentiellement cette différence, et non le
stockage en glycogène hépatique
qui est comparable quelle que
soit la voie d’administration. Cela
contredit des données anciennes
obtenues chez l’animal et remet
en cause la présence d’un capteur
de glucose (glucose sensor) portal
(11).
Effet
sur l’insulinosensibilité
Le GLP-1 a également un effet sur
la sensibilité à l’insuline, mis en
évidence notamment après shunt
biliopancréatique (12), lequel
pourrait dépendre de l’action de
GLP-1 sur l’hypothalamus.
Effets
sur la vidange gastrique
La vidange gastrique régulatrice des sécrétions des incrétines, elles-mêmes régulatrices
de la vidange gastrique.
La cinétique
de sécrétion
Dépendante de la vidange
gastrique et du transit
dans le grêle
Elle dépend essentiellement de la
vitesse de vidange gastrique (pour
le GIP) et de la vitesse de transit
dans le grêle (pour le GLP-1), qui
peut être accélérée en cas de nutrition entérale en site duodénal.
La nutrition en site jéjunal shunte
une partie du segment intestinal
le plus riche en cellules K (sécrétion de GIP). Mais on ne dispose
d’aucune donnée sur les incrétines
et la régulation glycémique dans
cette situation. En cas de nutri-
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
tion entérale en site gastrique, la
sécrétion de GIP dépend essentiellement de la vitesse de vidange
gastrique et celle du GLP-1 de la
vitesse de transit dans l’intestin
grêle (13, 14).
L’atténuation des glycémies
postprandiales passent aussi
par le ralentissement
de la vidange gastrique
Le GLP-1 participe au frein iléal.
Il diminue le tonus gastrique, la
motricité antrale et augmente
le tonus pylorique. Cet effet est
important lorsque les concentrations plasmatiques de GLP-1 sont
élevées, apparaissant au-delà de
25 pM/L et devenant significatif à
110 pmol/l (15). La stimulation du
nerf vague via une action centrale
semble nécessaire à cette action
puisque la dénervation la supprime. Après un repas, les concentrations atteignent 15 à 50 pmol/l
(16) chez le sujet sain, mais elles
sont plus basses chez le patient
diabétique (15 à 22 pmol/l) (17).
60 kcal d’une solution de glucose ou d’acides gras perfusée
dans l’iléon est suffisante pour
entraîner un ralentissement
de la vidange gastrique (5). Les
acides gras à longue chaîne semblent plus actifs. L’alimentation
en site jéjunal inhibe également la
sécrétion acide (18). En revanche,
l’orlistat (inhibiteur de la lipase
pancréatique) entraîne une accélération de la vidange gastrique et
une diminution de la sécrétion de
GIP (17).
Mécanismes
de sécrétion :
paradoxalement,
les lipides
au premier plan
Les lipides étant les plus forts
stimulateurs de la sécrétion de
GIP et de GLP-1, les produits
333
Thérapeutique
pour diabétiques, riches en lipides, entraînent une sécrétion
accrue d’incrétines. Le GLP-1
améliorant aussi l’utilisation du
glucose et l’insulinosensibilité,
ces formules pourraient avoir un
effet favorable sur l’équilibre du
diabète (20). Cela pourrait être
un argument pour privilégier
les formules de nutrition entérale riches en lipides en cas
de diabète. La démonstration
reste à faire, en choisissant des
produits ayant des index glycémiques comparables.
L’effet des lipides sur les sécrétions hormonales pourrait dépendre de la taille des particules
lipidiques. La sécrétion de différentes hormones digestives
(CCK, PYY) est plus importante
quand l’émulsion lipidique est
de très petite taille (0,26 µm) et
fortement atténuée lorsque les lipides sont sous forme de grosses
particules (170 µm) (4). Ces
constatations pourraient avoir un
intérêt pratique très intéressant
en nutrition entérale.
Autre boucle
métabolique : effets
sur la lipogenèse
L’alimentation grasse stimule
la sécrétion de GIP et provoque,
chez l’animal, une hyperplasie
des cellules K (20). Après instillation de lipides en site duodénal, cette hormone favorise
le stockage des acides gras en
augmentant la clairance des
chylomicrons, en stimulant la
lipoprotéine lipase, en favorisant l’utilisation du glucose et le
stockage des acides gras (21,22),
en inhibant la lipolyse et en augmentant le flux sanguin dans le
tissu (23). Le GIP a donc une
action sur l’adipocyte qui exprime son récepteur et a un
effet potentialisateur sur les
334
effets adipocytaires de l’insuline.
La nutrition à but trophique
Effets sur la satiété
L’administration de GLP-1 entraîne
une augmentation de la satiété (24)
et une réduction de la prise alimentaire. Cet effet est essentiellement lié à une action centrale sur
les noyaux hypothalamiques. Le
GLP-1 agit donc directement sur les
neurones impliqués dans les centres
de la faim et de la satiété. La perte de
poids constaté après court-circuit
gastrique passe essentiellement par
ce mécanisme.
Effets sur la
vascularisation
mésentérique
et la muqueuse
L’hyperhémie mésentérique mesurée au niveau de l’artère mésentérique supérieure après un repas
solide est constatée lors d’une nutrition entérale, en site gastrique
comme en site duodénal. L’augmentation du flux vasculaire est
plus importante avec les lipides et
les protéines et plus faible avec les
glucides.
Le GIP : impliqué
dans l’augmentation
du flux mésentérique
Effets sur la
trophicité digestive
Le GIP, comme le glucagon,
augmente la vascularisation
splanchnique, se traduisant par
une augmentation très importante du flux portal, alors que,
paradoxalement, le débit de l’artère hépatique diminue. Cet effet
est expliqué par l’action du GIP sur
la sécrétion d’endotheline-1 (ET-1),
vasoconstricteur efficace pour l’artère hépatique et non pour la veine
porte. Le GIP stimule par ailleurs
la production de NO qui a un effet
majeur sur la régulation du débit
sanguin (38).
Chez le prématuré, la mise en
place d’une nutrition entérale
permet d’accélérer la maturation
de l’intestin grêle, contrairement
à la nutrition parentérale qui induit une atrophie intestinale. La
nutrition à but trophique consiste
à délivrer de faible volume de lait
dans le but de favoriser le développement du tractus digestif de l’enfant prématuré. La couverture
d’au moins 50 % des apports
énergétiques paraît nécessaire
pour avoir cet effet. La sécrétion
maximale d’hormones digestives
est obtenue pour des niveaux d’apport inférieurs aux besoins énergétiques (25).
Un effet lié AU GLP-2
Le GLP-2 est un facteur de croissance pour l’entérocyte. L’intestin
grêle est particulièrement sensible
à cet effet alors que le côlon l’est un
peu moins. Cette hormone intestinale accélère la cicatrisation des
lésions digestives dans différents
modèles de maladies inflammatoires et renforce la barrière intestinale (26).
L’effet GLP-2 explique sans
doute en grande partie les effets bénéfiques de la nutrition
entérale sur les maladies inflammatoires intestinales.
Effet antiinflammatoire de la
nutrition entérale :
rôle des lipides
et du GLP-1
Rôle du GLP-1
Une alimentation entérale comportant des lipides réduit la libération de TNF chez l’animal ayant
ingéré une endotoxine. Cet effet
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Les incrétines : entre insulinosécrétion et insulinorésistance
pourrait être médié par la CCK,
par l’activation du système parasympathique (nerf vague) et les
récepteurs nicotiniques. Cependant, il disparaît lorsque l’on administre un antagoniste du GLP-1.
Ce dernier, connu pour activer
le vague, pourrait donc être un
médiateur majeur de l’effet anti-inflammatoire provoqué par
l’ingestion de lipides (27).
Rôle des lipides
Les lipides sont les seuls nutriments efficaces et une relation
dose-effet a été mise en évidence. Cette alimentation riche en
graisses renforce la barrière intestinale et a aussi un effet protecteur
sur les lésions entérocytaires et
l’inflammation (28). Un effet protecteur de l’alimentation entérale
comportant des lipides a également
été observé après choc hémorragique, chez l’animal. La diminution
des paramètres de l’inflammation
sous exénatide va dans ce sens.
Rôle des incrétines
sur l’apoptose
Le GLP-1 et le GLP-2, deux hormones co-sécrétées par les mêmes
cellules, ont des effets anti-apoptotiques qui touchent des cellules
différentes, conduisant à une préservation des cellules bêta pour le
GLP-1 et de l’épithélium intestinal
pour GLP-2.
Implications
pratiques
Les effets incrétines
en nutrition artificielle
❚❚Quelle nutrition entérale
minimale pour améliorer
la tolérance au glucose
d’une nutrition parentérale ?
Il est possible d’utiliser l’effet
incrétine pour améliorer l’équilibre glycémique au cours de la
nutrition parentérale en y associant un apport de nutriments
par voie entérale.
En stimulant la sécrétion d’incrétines, l’adjonction de nutrition
entérale à une nutrition parentérale serait donc susceptible
d’améliorer l’équilibre glycémique
par rapport à la nutrition parentérale seule. Une étude cas témoin
a montré que si on fournit 30 %
des apports caloriques par voie
entérale, l’équilibre glycémique
est meilleur. Cet effet est attribué,
dans ce travail, à l’augmentation
de la sécrétion de GIP (29). En
outre, la nutrition entérale permet de maintenir la perméabilité
intestinale et de limiter les translocations bactériennes.
❚❚Peut-on substituer la NE par
une perfusion de GLP-1 ou par
l’utilisation d’analogues ?
Une étude a analysé l’efficacité
d’un traitement par GLP-1 sur
l’hyperglycémie secondaire à une
nutrition entérale postpylorique.
Par rapport à l’insulinothérapie,
l’intérêt de cette approche est de
diminuer le risque d’hypoglycémie, problème majeur chez les
patients agressés en réanimation
(30). Dans cette étude préliminaire, aux doses administrées
(1,2 pmol/kg/min), ce traitement
a un effet significatif mais insuffisant pour atteindre les objectifs
glycémiques. Un inconvénient
majeur de ces analogues en réanimation est de diminuer la vitesse de vidange gastrique. Dans
cette étude, la nutrition entérale
était instillée en site duodénal.
Un analogue du GLP-1 (exénatide) a été testé chez des enfants
brûlés hyperglycémiques, sans
bénéfice réel sur l’équilibre glycémique et sur le risque d’hypoglycémies (31).
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Les effets incrétines
en chirurgie bariatrique :
un rôle essentiel dans
le court-circuit gastrique
Une méta-analyse récente suggère que le gastric by-pass (GBP)
entraîne une rémission du DT2
dans plus de 83 % des cas (33),
bien supérieur à l’anneau gastrique (43 %). Chez les patients
atteints de DT2, le GBP restaure
la sécrétion postprandiale d’insuline indépendamment de la perte
de poids (33). L’effet de cette intervention sur la satiété est également bien décrit.
Conclusion
Les hormones incrétines, GIP et
GLP-1, jouent un rôle essentiel
dans la régulation de l’homéostasie glucidique en stimulant la sécrétion d’insuline et en inhibant
la sécrétion de glucagon. Mais
l’effet du GLP-1 sur la glycémie
postprandiale va au-delà de l’effet
incrétine. Le glucose ingéré est
d’abord utilisé par l’aire splanchnique, ce qui explique le moindre
effet de cette voie d’administration
par rapport à la voie parentérale.
D’autre part, le GLP-1 régule la vidange gastrique et la prise alimentaire, ce qui contribue à atténuer
l’hyperglycémie
postprandiale.
Ces hormones agissent également
sur le tube digestif lui-même et
participent sans doute aux effets
bénéfiques de la nutrition entérale
sur l’inflammation, la vascularisation, la cicatrisation intestinale,
que l’on peut observer dans notre
pratique clinique. Notre tube din
gestif communique…
Mots-clés :
Hormone gastro-intestinale,
Homéostasie glucidique, Glycémie
postprandiale, Nutrition entérale,
Chirurgie bariatrique
335
Thérapeutique
Bibliographie
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Diabete&obesité
336
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
DOSSIER
Troubles des conduites
alimentaires
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Dossier rédigé par le Pr Patrick Ritz (Toulouse)
L’
université d’été sur les TCA qui a eu lieu à
Hendaye, était organisée par l’université
Paul Sabatier de Toulouse, et le service
de psychiatrie de l’hôpital hélio-marin. C’était
l’occasion de s’interroger sur ce que pouvaient
nous apprendre les TCA de situations très caractérisées (syndrome de Prader-Willi, boulimie
nerveuse…) dans les situations quotidiennes de
gestion des variations de poids. Voici quelques
extraits des conférences les plus marquantes.
1 Classification des TCA : allons-nous vers le DSM-V ?�������������������
2 Contrôle de la prise alimentaire :
l’importance des signaux métaboliques ���������������������������������������
3 Régulation de la prise alimentaire au cours du syndrome
de Prader-Willi : les apports de l’imagerie cérébrale �����������������
4 Conséquences cognitives du diabète et de l’obésité :
chez l’enfant et l’adulte �����������������������������������������������������������������������
En bref �����������������������������������������������������������������������������������������������������������
p. 338
p. 340
p. 342
p. 344
p. 345
Les troubles des conduites alimentaires
DOSSIER
1 Classification des TCA
Allons-nous vers le DSM-V ?
n Les troubles des conduites alimentaires n’ont pas les mêmes définitions pour les somaticiens
et les psychiatres. Quelles méthodes privilégier ? Faut-il repenser la classification ?
P
our définir les troubles des
conduites
alimentaires
(TCA), les psychiatres élaborent des critères diagnostiques
sur des arguments statistiques.
C’est-à-dire qu’un panel d’experts
analysant la sémiologie clinique
de patients dont le diagnostic est
fait (par exemple anorexie mentale) classent les signes et symptômes en fonction de la fréquence
avec lesquels ils sont observés. Ce
n’est pas la même approche que la
nôtre qui est plutôt physiopathologique : à partir de ce que nous
comprenons de la maladie, nous
associons des signes comme évocateurs voire pathognomoniques
de la maladie. Parfois la définition
de la maladie se fait à partir d’une
définition biologique. Ainsi le diabète est défini à partir d’une glycémie, et d’un seuil à partir duquel
les complications deviennent très
probables.
La classification
DSM-IVR
Pour les TCA, le collège des psychiatres américains a proposé en
1993 la classification DSM-IVR.
Celle-ci reconnaît deux formes
principales de TCA.
• Le tableau 1 rapporte la définition
de l’anorexie mentale (notons qu’il
y a peu de référence à une valeur
* Unité de nutrition, CHU de Toulouse
338
Pr Patrick Ritz*
Tableau 1 – ANOREXIA NERVOSA : définition du DSM-IV, 1993
(Diagnostic and Statistical Manual).
A. Refus de maintenir un poids égal ou supérieur au poids minimum compte
tenu de l’âge et de la taille.
B. Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros, même avec un poids
anormalement bas.
C. La forme et le poids du corps sont perçus de façon anormale, le jugement
porté sur soi-même est indûment influencé par la forme et le poids du corps,
ou il existe un déni des conséquences du bas poids corporel.
D. Chez les femmes pubères, aménorrhée, c’est-à-dire absence de règles durant
au moins 3 cycles consécutifs.
• Type restrictif : pendant l’épisode actuel d’anorexie mentale, le sujet n’a pas,
de manière régulière, présenté de crises de boulimie ni recouru aux vomissements provoqués ou à la prise de purgatifs (c’est-à-dire laxatifs, diurétiques,
lavements).
• Type avec vomissements ou prise de purgatifs : pendant l’épisode actuel
d’anorexie mentale, le sujet a présenté des crises de boulimie et/ou recouru
aux vomissements provoqués ou à la prise de purgatifs (c’est-à-dire laxatifs,
diurétiques, lavements).
chiffrée du poids, et à la façon de
s’alimenter).
• Le tableau 2 rapporte la définition
de la boulimie nerveuse.
• Les autres troubles font partie de
EDNOS (Eating Disorders Not Overwise Specified, ou TCA atypiques).
C’est le cas des compulsions ou
crises boulimiques. La définition
est plus complexe, mais surtout se
caractérise par le fait que le patient
n’a pas recours à des comportements de purge (vomissements,
diurétiques, exercice physique,
jeûne). Dans les autres TCA atypiques, par exemple anorexie mentale ou boulimie nerveuse pour lesquelles il manquerait un signe à la
définition, que se passe-t-il ?
C’est un des enjeux du DSM-V
dont nous devrions voir la sortie en 2012.
Une classification
plus fine
A cet égard, une méta-analyse
très intéressante a été réalisée.
Elle a consisté à recueillir toutes
les études sur les TCA qui analysaient si le retrait d’un des signes
cliniques modifiaient le profil des
patientes dans trois dimensions :
• la présentation du TCA lui-même,
• la psychopathologie associée,
• les conséquences somatiques
(par exemple sur les carences, la
densité osseuse…).
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Anorexie mentale
Le plus démonstratif est pour l’anorexie mentale où l’analyse porte
sur 84 études. Le retrait du signe
aménorrhée ne change pas ces 3
dimensions. Il en est de même si on
retire deux signes sur 4, sauf si cela
concerne la peur de grossir, auquel
cas la présentation clinique du TCA
diffère (1). Finalement, cela suggère
qu’il y a une continuité entre les
anorexies atypiques et les formes
typiques et que l’aménorrhée ne
peut être retenue comme un signe
diagnostique (que ferait-on d’une
jeune femme à qui on donnerait un
œstro-progestatif à visée de protection osseuse ?) mais comme un
signe d’alerte.
Boulimie
Ce n’est pas la même chose pour la
boulimie, où le retrait des signes cliniques conduit à des présentations
différentes dans les trois dimensions (conduites alimentaires, psycho-pathologies et conséquences
somatiques). Tout se passe alors
comme s’il n’y avait pas de continuité entre les TCA atypiques et la boulimie, et que la boulimie nerveuse
était vraiment une pathologie à part.
Tableau 2 - BULIMIA NERVOSA : définition du DSM-IV, 1993 (Diagnostic and Stastical Manual).
A. Episodes récurrents d’hyperphagie incontrôlée.
1. Prises alimentaires, dans un temps court inférieur à 2 heures, d’une quantité de nourriture largement supérieure à celle que la plupart des personnes
mangeraient dans le même temps et dans les mêmes circonstances.
2. Une impression de ne pas avoir le contrôle des quantités ingérées ou la
possibilité de s’arrêter.
B. L e sujet met en œuvre des comportements compensatoires visant à éviter la
prise de poids (vomissements provoqués, prises de laxatifs ou de diurétiques,
jeûnes, exercice excessif ).
C. L es épisodes d’hyperphagie incontrôlée et les comportements compensatoires pour prévenir une prise de poids ont eu lieu en moyenne 2 fois par
semaine durant au moins 3 mois.
D. L e jugement porté sur soi-même est indûment influencé par la forme et le
poids du corps.
E. Le trouble ne survient pas au cours d’une anorexie mentale.
Conclusion
Il est donc probable que nous allons voir des définitions évoluées
dans DSM-V (pour l’anorexie et
pas pour la boulimie), avec sans
doute les crises compulsives
comme des TCA typiques (tant ils
sont fréquents). Cela va nous demander un effort pour bien caractériser la sémiologie des patients
mais cela paraît fondamental tant
ces TCA interfèrent (et de façon
souvent cachée) dans l’équilibre
DOSSIER
Les troubles des conduites alimentaires
glycémique et dans la régulation
du poids.
n
Bibliographie
1. Thomas JJ, Vartanian LR, Brownell KD. The
Relationship between eating disorder not
otherwise specified (EDNOS) and officially
recognized eating disorders: méta-analysis
and implications for DSM. Psychol Bull 2009 ;
135 : 407-33.
Mots-clés : Troubles des conduites
alimentaires, Classification, DSM, Boulimie, Anorexie
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339
Les troubles des conduites alimentaires
L’importance des signaux métaboliques
n Depuis 1994 et la découverte de la leptine, nous pensons la régulation de la prise alimentaire
comme des boucles d’influences positives et négatives sur les centres hypothalamiques de la
faim, ou sur les centres de la satiété. La leptine (issue du tissu adipeux) et l’insuline sont vues
comme des signaux anorexigènes, alors que la ghréline est vue comme un signal orexigène.
Revue détaillée, d’après la conférence de Christophe Magnan (Paris).
D
Qu’est-ce que
le malonyl CoA ?
Le malonyl CoA est le résultat de la
condensation de deux acétyl-CoA
sous l’influence de l’ACC (acétyl CoA
carboxylase). C’est la première étape
sur la voie de la lipogenèse (l’hélice
de Linen accroissant de deux par
deux carbones jusqu’à obtenir un
acide gras de la longueur voulue,
C14, C16, C18…). Le malonyl CoA est
aussi un inhibiteur de l’entrée des
acides gras dans la mitochondrie
par la CPT-1, étape limitante de leur
oxydation. Dès que l’acide gras est
entré, rien ne l’empêche plus d’être
oxydé.
On voit donc un carrefour métabo-
Pr Patrick Ritz*
Tissu adipeux
Adiponectine
NPY/
AgRP
Résistine
Leptine
Ghréline
POMC/c
ART
GLP-1
Tractus gastro-intestinal
Pancréas
Facteurs anorexigènes
e plus en plus de peptides
sont décrits, avec une balance entre les couples
orexigène (NPY-AgRP) et anorexigène (POMC, CART) dans de nombreux neurones. La figure 1 explique
ces grandes influences dans le
noyau arqué. Pourtant, il apparaît
que des neurones sont spécialisés
dans la détection de signaux métaboliques intracellulaires (acides
gras, glucose). Le malonyl CoA apparaît comme un senseur métabolique très important.
Facteurs orexigènes
DOSSIER
2 Contrôle de la prise alimentaire
NPY/
AgRP
Anandamide
Insuline
2-AG
POMC/c
ART
Aires centrales et périphériques
Figure 1 - Mise en place des régulations de la prise alimentaire par les hormones au
niveau du noyau arqué de l’hypothalamus (1). Ces neurones intègrent des signaux issus
du tissu adipeux (en noir), du pancréas (en bleu) et du tube digestif (en blanc). Les voies
orexigènes sont à gauche et les voies anorexigènes sont à droite. Les flèches vertes stimu-
*Unité de nutrition, CHU de Toulouse
340
lent, les rouges inhibent.
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
lique très important :
• quand le malonyl CoA augmente,
le signal est anabolique (la synthèse
des acides gras et l’inhibition de leur
oxydation en les empêchant de rentrer dans la mitochondrie) ;
• quand le malonyl CoA diminue, le
signal est catabolique. Ceci est très
net au niveau du foie. La production du malonyl CoA est régulée par
l’AMP kinase (qui inhibe sa synthèse
et favorise sa dégradation).
(+)
Glucagon
Glucose
Insuline
En bref, sans remettre en cause les
Ghréline
Leptine
α-MSH
(-)
NPY
IR
GLUT3
Y5
(+) (-)
Adipo R1
augmenté
???
MCR
CamKK2
PPARα
???
(-)
AMPK
(+)
Acétyl CoA
(-)
mTOR
ACC
(?)
Diminution de l’appétit
???
LR
GR
(+)
(+)
Influence
alimentaire
Le malonyl CoA :
une pièce maîtresse ?
Jeûne
Adiponectine
(-)
Au niveau hypothalamique, le
jeûne (déplétion d’énergie) active
l’AMP kinase et diminue le malonyl CoA. La ghréline augmente la
forme phosphorylée de l’AMP kinase (active), diminue le malonyl
CoA et active la prise alimentaire.
A l’inverse, la leptine augmente
le malonyl CoA et diminue la
prise alimentaire. La ghréline et
la leptine sont donc les Dupond
et Dupont de la prise alimentaire.
Cependant, le malonyl CoA par
lui-même apparaît comme le senseur métabolique de la régulation
de la prise alimentaire. En effet,
les animaux dont le gène de l’AMP
kinase est invalidé prennent du
poids, alors que ceux dont le gène
est surexprimé sont minces. Il en
est de même pour ceux dont la
lipogenèse est bloquée (invalidation de la Fatty acid synthase), qui
ont de ce fait un malonyl CoA élevé
en permanence et qui sont minces
et résistants à la prise de poids. Ou
encore, les animaux dont l’oxydation des acides gras est bloquée,
(malonyl CoA élevé), chez qui les
injections de ghréline sont sans effet orexigène.
DOSSIER
Les troubles des conduites alimentaires
Augmentation
de l’appétit
MCD
Malonyl CoA
(-)
???
Menbrane mitochondriale externe
Menbrane mitochondriale interne
CTP1
Neurone
Membrane plasmatique
Figure 2 – La régulation de la prise alimentaire au cours du jeûne. Intrications entre les
facteurs métaboliques. Au cours du jeûne prolongé, les concentrations plasmatiques de
glucose, insuline, leptine et les concentrations de a-MSH sont réduites, en même temps que
celles de ghréline et AgRP sont augmentées. Tout cela conduit à activer l’AMP kinase, qui
agit par deux mécanismes (inhibition de l’ACC et de la voie mTOR). La réduction du malonyl
CoA dans les neurones hypothalamiques stimule l’appétit. Des inconnues persistent quant à
l’effet de l’activation PPAR et de NPY.
actions régulatrices sur la prise alimentaire des hormones périphériques (leptine, ghréline, insuline),
il apparaît que des populations
très spécialisées de neurones hypothalamiques sont des senseurs
métaboliques et que le malonyl
CoA est une pièce importante de
cette régulation. D’autres neurones
sont des senseurs du glucose ou de
certains acides gras et influencent
aussi la prise alimentaire. La cartographie des capacités de régulation
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
de l’appétit progresse. Un exemple
est donné au cours du jeûne dans la
figure 2.
n
Bibliographie
1. Lopaschuk GD, Ussher JR, Jaswal JS. Targeting intermediary metabolism in the hypothalamus as a mechanism to regulate appetite. Pharmacol Rev, 2010 ; 62 : 237-64.
Mots-clés :
Contrôle alimentaire,
Signaux métaboliques, Leptine,
Ghréline, Molonyl CoA
341
Les troubles des conduites alimentaires
DOSSIER
3 Régulation de la prise
alimentaire au cours
du syndrome de Prader-Willi
Les apports de l’imagerie cérébrale
n Pierre Payoux a proposé une histoire très simplifiée de la régulation de la prise alimentaire au
cours du syndrome de Prader-Willi. En particulier, il est revenu au cours de la conférence sur
l’apport de l’imagerie cérébrale. Quelques prérequis
• Le syndrome de Prader-Willi
(SPW) est une obésité précoce,
d’origine génétique, associant
des troubles du comportement
(dont du comportement alimentaire), avec un retard mental et de
nombreuses anomalies endocriniennes, dont une élévation notable en ghréline.
• L’imagerie cérébrale est capable
d’analyser les débits sanguins cérébraux, critères indirects d’activation de certaines zones cérébrales. Ce sont maintenant des
examens de routine, peu invasifs
et précieux compte tenu de la capacité à identifier des activités
métaboliques dans des zones bien
définies.
Pr Patrick Ritz*
Les causes
des troubles
alimentaires
dans le sPW
d’aliments donne donc envie de
manger aux patients SPW.
Les réseaux neuronaux
liés à la récompense
sont impliqués
L’hyperphagie serait due
à un retard d’acquisition
de la satiété
En effet, après consommation de
75 g de glucose, les témoins mettent 10 minutes à être rassasiés,
les obèses 15 minutes et les patients atteints du syndrome de
Prader-Willi (SPW) 23 minutes.
Ce sont les résultats de mesure de
débit sanguin au niveau du cortex
frontal mésial, zone influant sur la
satiété et sur les stratégies alimentaires.
Cette anomalie de satiété estelle suffisante pour autant ?
* Unité de nutrition, CHU de Toulouse
342
L’expérience est maintenant faite
à jeun, en montrant des images
neutres (animaux, outils) ou d’aliments. Chez les témoins, la vision
des images active des zones occipitales (correspondant à la vision)
alors que, chez les SPW, les images
d’aliments activent des zones du
cortex frontal qui correspondent
à la motivation à manger. L’image
L’expérience compare des patients
SPW à des témoins appariés pour
l’IMC et le déficit intellectuel,
en montrant des images neutres
(meubles) vs des aliments (chips,
tomates), puis dans un second
temps des gâteaux vs des fruits.
Les témoins activent le cortex
frontal mésial (satiété, stratégies
alimentaires) et l’aire singulaire
(éléments affectifs) alors que les
SPW activent l’hypothalamus
et l’amygdale. Dans la deuxième
épreuve, il n’y a pas de différence
entre les deux aliments chez les
contrôles, mais une hyper-activation du cortex frontal antérieur
(OFC) et du cervelet chez les SPW
à la présentation des gâteaux.
Les patients atteints de SPW
ont donc tout ce qu’il faut pour
manger (en grande quantité) :
• une hyperactivité de l’hypothalamus (qui stimule la recherche de
nourriture),
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
• un renforcement de la notion de
récompense (OFC),
• une hyperactivité de l’amygdale
(motivation).
Au-delà
du comportement
alimentaire
En utilisant la TEP sans activation
(sans montrer d’image), une hypoperfusion majeure est mise en évidence dans le singulum antérieur
(réseau motivationnel) et dans les
zones pariétales, en relation avec
les scores neuropsychologiques. II
en est de même dans le cortex or-
bito-frontal (OFC). De plus, avec
des IRM à très haute résolution,
avec mesure de l’épaisseur du cortex, des anomalies anatomiques
cérébrales pourraient interpréter
les différences de débit.
Conclusion
L’hypothèse synthétique (qui
reste à valider) pourrait être que
les patients SPW ont d’une part
tout ce qu’il faut pour manger
(une hyperactivité de l’hypothalamus - qui stimule la recherche de
nourriture -, un renforcement de
la notion de récompense - OFC -,
une hyperactivité de l’amygdale
- motivation -), en réponse à un
défaut anatomique et de perfusion
qui les conduiraient à sur-stimuler
les zones déficitaires (satiété) avec
pour conséquences l’hyperphagie et les troubles des conduites
alimentaires. Quel est l’œuf de la
poule ? La suite le dira...
n
Mots-clés :
Troubles des conduites alimentaires,
Régulation, Prise alimentaire, Syndrome de Prader-Willi,
Imagerie cérébrale
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343
Neurologies
Cardinale
Rhumatos
DOSSIER
Les troubles des conduites alimentaires
Les troubles des conduites alimentaires
DOSSIER
4 Conséquences cognitives
du diabète et de l’obésité
Chez l’enfant et l’adulte
n Une altération des capacités cognitives, en dehors du contexte de la démence (vasculaire ou
Alzheimer) influence la qualité du traitement. Même si les grandes altérations de mémoire et de
compréhension des objectifs de traitement sont rares, des anomalies plus discrètes, que nous
n’avons pas l’habitude de rechercher, pourraient altérer les capacités d’adaptation fines au traitement, aux prises de décision… Caroline Sanz fait la synthèse de la littérature. Pr Patrick Ritz*
Qui est concerné ?
Des anomalies fines peuvent perturber la qualité du suivi du traitement. Cela toucherait environ
20 % des patients avec deux types
d’altération :
• les modifications de la mémoire,
de la perception, du langage ou du
raisonnement d’une part,
• les perturbations des fonctions
exécutives (c’est-à-dire d’adaptation à l’environnement).
Chez l’enfant
A partir d’un registre suédois, où
plus de 5 000 diabétiques de type 1
sont suivis (sur plus d’un million
d’enfants), les risques d’interruption de scolarité sont 2 fois plus
grandes si le diabète arrive avant
l’âge de deux ans. La probabilité de
ne pas réussir aux examens et de
ne pas changer de classe est plus
grande si le diabète apparaît avant
l’âge de 5 ans. Ceci est valable après
ajustement sur les niveaux sociaux
des parents. Il en est de même des
hypoglycémies sévères dont le
nombre affecte la mémoire quand
on considère celles qui apparaissent avant 5 ans, ce qui n’est pas
* Unité de nutrition, CHU de Toulouse
344
le cas des hypoglycémies sévères
après l’âge de 5 ans. Les effets portent surtout sur les fonctions exécutives. Il semble donc que cela
soit plutôt l’effet de l’hyperglycémie chronique. L’obésité quant à
elle (l’IMC) ne semble pas affecter
les capacités de calcul, de lecture
ou de mémoire, mais affecte les
tests cognitifs plus subtils testant
les fonctions exécutives.
Chez les adultes
Tant les études de suivi du DCCT
que les analyses de revue suggèrent que les hypoglycémies sévères
n’affectent pas la mémoire ou les
tests cognitifs. L’exposition chronique à l’hyperglycémie semble
expliquer les anomalies des fonctions exécutives. L’IMC est là aussi
associé de façon continue à un effet négatif sur la mémoire et l’efficacité psychomotrice.
Chez les plus âgés, en dehors de la
démence, une revue de 17 études
montre un impact du diabète sur
le déclin cognitif, touchant la mémoire, les fonctions exécutives et
la vitesse d’exécution. La durée du
diabète a un effet plus significatif
que le niveau d’HbA1c au moment
de l’étude, mais le diabète a un effet
“dose-réponse” puisque plus net que
chez les patients simplement hyperglycémiques à jeun. Ces constats résistent à l’ajustement pour les principaux facteurs de risque.
Au total
Les hypoglycémies sévères ont
un effet délétère quand elles apparaissent tôt. Les altérations cognitives observées touchent des
fonctions élaborées (exécutives
d’adaptation). Elles sont à la fois la
conséquence de l’IMC et de l’hyperglycémie chronique. On peut
évoquer une atteinte microvasculaire de la substance blanche diffuse pour atteindre des fonctions
élaborées, avec des questions sur
la toxicité cellulaire du glucose
(AGE, stress oxydant), voire en relation avec une insulinorésistance
ou des anomalies du métabolisme
de l’insuline dans les zones cérébrales où elle passe la barrière hén
mato-encéphalique.
Mots-clés : Troubles des conduites
alimentaires, Classification, DSM, Boulimie, Anorexie
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Les troubles des conduites alimentaires
DOSSIER
En BREF
Le handicap mental de l’enfant
Fréquemment associé à l’obésité
Introduction
• Les obésités chez ces enfants
sont très souvent sévères (> 80 %
des cas) avec un retard diagnostique et une méconnaissance quasi constante du rebond précoce
d’adiposité.
• L’impact fonctionnel est très
important avec asthénie, algies
diverses, dyspnée, majoration de
la stigmatisation et perte de qualité de vie, tous facteurs largement
sous-estimés. Le risque d’insulinorésistance est élevé et le risque cardiovasculaire est multiplié par 6.
• Certains facteurs spécifiques
sont à rechercher car ils concourent à l’excès de poids.
1. Une situation de quiétude et de
refuge. Les troubles du comportement ou psychologiques majorent le déséquilibre alimentaire,
avec des prises compulsives ; des
choix ultra-sélectifs, une déstructuration des repas avec un aspect
© philidor - Fotolia
Le Pr C. Ricour (Hôpital Necker,
Paris) a synthétisé son expérience
de cette association. Elle concerne
environ 25 à 30 % des enfants avec
troubles de l’apprentissage, ou en
éducation spécialisée, 42 % des autistes et 55 % des enfants porteurs
d’une trisomie 21.
addictif. Le sommeil nocturne est
écourté, l’activité physique est
très réduite.
2. La réactivité de l’environnement familial ou éducatif n’est
pas adaptée. Il y a une culpabilité
parentale, une mise en échec des
professionnels, éléments ni re-
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
connus ni partagés, générant un
climat de conflits. Le jeune évolue entre le centre et la maison,
avec des champs et des repères
étanches. Il s’adapte dans une logique de récompense et de refuge.
3. Les neuroleptiques ont un rôle
n
incontestable.
Comment faire face ? Quelques pistes simples
1. Créer un accompagnement partagé et global de l’enfant et de la famille
dans le double environnement (maison, centre), avec des objectifs
simples, lisibles et réalistes : augmenter la qualité de vie.
2. Créer un nouvel environnement au centre et à la maison, avec information, formation, et compétences partagées (alimentation, activité
physique).
3. S’attacher à des micro-objectifs alimentaires (arrêt du grignotage sur
une période) et passer de la sédentarisation passive à la sédentarité
active. Rechercher le plaisir de l’enfant et la valorisation de tous.
345
Les troubles des conduites alimentaires
En BREF
DOSSIER
Régulation de l’appétit
chez l’anorexique mental
Les aspects biologiques
Introduction
Le Pr W. Kaye (La Jolla, Californie) a rappelé que les
études avec imageries cérébrales vont bouleverser nos
a priori sur le caractère purement psychiatrique de cette
maladie. Quels sont les éléments de la régulation de la
prise alimentaire ?
Au-dessus de l’hypothalamus et des circuits classiques
de régulation, des zones sont très importantes. La
faim motive à manger chez les sujets normaux, alors
que les aliments deviennent ou sont aversifs chez les
anorexiques, avec une satiété induite par la monotonie
alimentaire. Le caractère plaisant de certains aliments
(sucrés) disparaît, et cette réduction est probablement
préexistante au TCA. Cela est observé avec des tests au
goût sucré et l’interférence de la restriction alimentaire
sur les activations des circuits reliant l’amygdale, le cortex frontal antérieur et le striatum. Les aires insulaires
inhibent le striatum et le plaisir à manger au cours de la
restriction alimentaire.
346
© Aldo Murillo - iStockphoto
On comprend mal la restriction alimentaire, combinaison d’alimentations inhabituelles, en particulier parce
que les sujets normaux ont des systèmes qui empêchent la chronicité de la restriction.
Il y a encore beaucoup de chemin à parcourir pour
comprendre quelle est la part acquise de la part préexistante de ces anomalies et comment les moduler. n
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
éducation Thérapeutique
L’entretien motivationnel
Un véritable état d’esprit
Dr Monelle Bertrand*
Introduction
Historique
Les origines
L’entretien motivationnel s’est développé au cours des années 1980
aux Etats-Unis et au RoyaumeUni, initialement dans le champ
de l’alcoologie, sous l’impulsion
de William Miller et Stephen Rollnick, tous deux psychologues.
addictions. Ainsi, leur dernier
ouvrage, traduit en français, Pratique de l’entretien motivationnel :
communiquer avec le patient en
consultation (2), s’adresse à tous
les intervenants de santé « qui
consacrent du temps à encourager
* Unité de nutrition, Service d’endocrinologie, CHU de Toulouse
Définition
de Miller et Rollnick
Les auteurs définissent l’entretien motivationnel comme « une
méthode de communication directive centrée sur le patient visant à
augmenter la motivation intrin-
La lutte avec l’ambivalence est une
caractéristique normale du fonctionnement
psychique humain devant toute perspective
de changement.
Les ouvrages de référence
Cette méthode a été formalisée dans un premier ouvrage de
Miller et Rollnick, Motivational
Interviewing, en 1991 (1). Il leur
est ensuite rapidement apparu
que cette méthode pouvait être
utile en dehors du champ des
© JPC-PROD - Fotolia
L’entretien motivationnel est une approche relationnelle répondant à des critères
de définition et de mise en œuvre précis, dont la formalisation évolue en fonction
des réflexions et des recherches effectuées par ses “inventeurs”, William Miller
et Stephen Rollnick. Il ne s’agit ni d’une forme de psychothérapie, ni de l’assortiment de techniques qui auraient comme objectif d’entraîner le patient à faire ce
qu’il ne souhaite pas faire, mais d’un véritable état d’esprit visant à augmenter la
motivation au changement d’un patient.
Ainsi, l’article qui va suivre est basé sur le concept de Miller et Rollnick, où l’entretien motivationnel est conçu comme une “manière d’être”. Volontairement, il
sera centré sur l’esprit et les principes, en y intégrant les outils.
Ce type d’approche semble aujourd’hui indispensable dans la prise en
charge de maladies chroniques comme le diabète et l’obésité, où il est
question de changement de comportement.
les patients à envisager un changement de comportement ». En
effet, ils considèrent que la lutte
avec l’ambivalence (Lexique) est une
caractéristique normale du fonctionnement psychique humain
devant toute perspective de changement.
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
sèque au changement par l’exploration et la résolution de l’ambivalence » (1).
Dans leur dernier ouvrage, Miller
et Rollnick donnent plus de place
à ce qu’ils nomment le “discourschangement” (Lexique) chez le patient, maintenant reconnu comme
347
éducation Thérapeutique
facteur prédictif de changement.
Ce type de discours est donc à
susciter et à apprendre à repérer
dans les paroles des patients. En
clarifiant par sous-types (le désir,
la capacité, les raisons, le besoin et
l’engagement), cela permet de l’observer plus facilement.
Ainsi, ils redéfinissent l’entretien
motivationnel comme un style
de communication collaboratif,
orienté vers un but et qui porte
une attention particulière au
langage de changement. L’intention derrière ce type d’entretien
est de renforcer la motivation et
l’engagement pour un objectif de
changement par l’exploration et
l’évocation des arguments en faveur du changement (2).
Lexique
un style d’entretien
• Empathie
PATHIE = ce qu’on éprouve. Avec l’exemple de la détresse :
• A-PATHIE = Ignore la détresse ;
• ANTI-PATHIE = Rejette, refuse la détresse ;
• SYM-PATHIE = Partage la détresse ;
• EM-PATHIE = Perçoit et comprend la détresse d’autrui sans la partager.
Il s’agit d’activer les propres motivations du patient, avec comme
préalable que l’intervenant influence la motivation du patient,
dans le bon ou le mauvais sens,
en fonction de la manière dont
il parle avec le patient. Miller et
Rollnick envisagent donc la motivation comme un processus interpersonnel et non comme un
état d’esprit. La responsabilité du
patient dans son cheminement est
mise en avant (2).
Quand
et pour quel public ?
Public cible :
les patients ambivalents
Cet état est rapidement repérable
dans les paroles du patient qui
utilisera souvent le « oui, mais… »
« Je sais qu’il faudrait que j’arrête,
mais… » Le patient est en lutte,
dans une immobilité conflictuelle.
Quelle utilisation ?
Ainsi, l’entretien motivationnel est
utile dans les situations suivantes :
348
• Ambivalence
La définition de l’ambivalence dans le dictionnaire Petit Robert est « le
caractère de ce qui comporte deux composantes de sens contraire ».
Exemple : ambivalence affective : état de conscience comportant des
dispositions affectives contraires.
• Congruence
En psychothérapie, congruence est le terme employé par Carl Rogers
pour indiquer une correspondance exacte entre l’expérience et la prise de
conscience.
En géographie, la congruence est “l’adaptation réciproque”.
En anatomie, on parle de congruence des surfaces articulaires. Deux
surfaces sont congruentes lorsqu’il y a un emboîtement parfait.
• Discours-changement
Il peut être entendu sous six thèmes différents : le Désir, la Capacité (aptitude), les Raisons, les Besoins (nécessité), l’Engagement et les Premiers
pas. Cette distinction n’est pas là pour permettre une classification (sans
intérêt), mais pour faciliter la reconnaissance de ce type de discours et les
questions à poser pour le faire émerger.
• Questions ouvertes
Elles s’opposent aux traditionnelles questions fermées utilisées dans le
recueil d’informations ou l’interrogatoire médical « Avez-vous mal aux
genoux ? » Les questions fermées permettent à l’intervenant d’obtenir
des informations sur ce qui lui semble important, alors que les questions
ouvertes invitent le patient à dire ce qui lui paraît important à ses yeux et
donc ce qu’il ressent ou perçoit : « Qu’est-ce qui vous gêne le plus ? »
• Reflet, refléter, écoute réflective
Il s’agit d’un exercice difficile qui consiste à renvoyer à la personne un court
résumé de son discours (sous forme d’affirmations et non de questions),
pour prouver une écoute active, s’assurer d’une bonne compréhension de
ce qu’a voulu dire le patient et servir de guide en sélectionnant une partie
de son discours, et donc en l’orientant vers l’explicitation de son ambivalence, sa motivation, son discours-changement. D. Lécallier écrit :
« L’écoute réflective se pratique avec un jeu de nuances qualitatives (répétition, reformulation, paraphrase, reflets des sentiments) et quantitatives
(reflet simple, amplifié, sous-évalué, double reflet). » (10) Miller et Rollnick
proposent de faire au moins deux reflets par question posée (2).
• lorsque l’on considère qu’un
changement de comportement est
nécessaire pour améliorer ou préserver l’état de santé d’un patient ;
• lorsque l’on est face à une personne ambivalente à l’égard du
changement ;
• lorsque l’on veut aider à la prépa-
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
L’entretien motivationnel
ration au changement ;
• lorsque l’on veut faire baisser les
résistances.
Principes
structurants “4E” :
4 stratégies
générales
d’intervention
Éviter le réflexe correcteur
Il s’agit pour les soignants de lutter
continuellement contre un désir
puissant, un réflexe : celui d’apporter des solutions, de suggérer, d’essayer de persuader, de prescrire
du changement. Argumenter en
faveur du changement a un risque
fort d’effet paradoxal : le patient
argumente l’autre versant de l’ambivalence, or « on tend à croire ce
qu’on s’entend dire » (2). Le patient
s’enracine donc dans la défense du
statu quo. Il va se placer dans la résistance à la persuasion.
« Il y a quelque chose dans l’hu-
dénommé “déclarations d’automotivation”) qui décrit la large
catégorie des éléments de discours
favorisant le changement.
Il y a plus d’intérêt à demander au
patient pour quelles raisons il voudrait opérer ce changement et de
quelle manière, plutôt que de lui
dire qu’il devrait changer. Le questionnement doit être réalisé sous
la forme de questions ouvertes
(Lexique) :
• « Qu’est-ce que vous souhaitez…? » désir ;
• « Comment vous y prendriezvous ? » capacité ;
• « Quelles sont pour vous les trois
meilleures raisons ? » raisons ;
• « A quel point est-ce important
pour vous ? » besoin (Encadré).
Écouter avec empathie (Lexique)
❚❚Définition de l’empathie
Guy Azoulay retrace l’historique
de l’empathie dans le soin (4) : Carl
Rogers a été le premier psychothé-
« Il y a quelque chose dans l’humaine nature
qui résiste à l’idée de faire les choses
qu’on veut nous imposer. »
maine nature qui résiste à l’idée
de faire les choses qu’on veut nous
imposer. » (2)
Explorer et comprendre
les motivations du patient
Le patient verbalise lui-même les
arguments au changement.
L’entretien motivationnel doit aider le patient à exprimer en quoi
le changement de comportement
est cohérent avec ce qui compte
pour lui. L’intervenant lui sert de
guide. Le soignant est expert du
problème/maladie, le patient de
son vécu.
Il s’agit de favoriser le discourschangement
(antérieurement
rapeute à mettre en lumière le rôle
essentiel de la relation dans l’efficacité thérapeutique. Dans des publications parues entre 1940 et 1950,
il décrit ce qu’étaient, selon lui, les
trois conditions critiques permettant aux thérapeutes de promouvoir l’autoactualisation de leurs
patients : avoir une attitude de
compréhension empathique, faire
preuve d’une estime positive et
sans condition, être en congruence
(Lexique).
Carl Rogers définit ainsi l’empathie : « Etre empathique consiste à
percevoir avec justesse le cadre de
référence interne de son interlocuteur ainsi que les raisonnements et
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
émotions qui en résultent… C’est-àdire capter la souffrance ou le plaisir tels qu’ils sont vécus par l’interlocuteur, en percevoir les causes de
la même façon que lui… »
❚❚Rôle de l’écoute active
L’objectif de cette écoute active
est d’accéder à des informations
importantes et de comprendre au
mieux le point de vue et le ressenti
de l’autre, mais aussi de favoriser
le changement par elle-même.
❚❚Comment exprimer l’empathie ?
Soit en exprimant directement sa
compréhension, soit en reflétant
pensées et émotions sans porter
de jugement (renvoyer au patient
un résumé de ce qu’on a compris
de son discours).
Dans le cadre de l’entretien motivationnel, il peut être particulièrement intéressant de refléter la
résistance et le discours-changement.
Encourager l’espoir
et l’optimisme,
renforcer le patient
Un des objectifs de l’entretien
motivationnel est de renforcer le
sentiment d’efficacité personnelle,
d’augmenter la confiance du patient dans ses capacités à surmonter les obstacles.
Cela peut se faire par exemple en
valorisant les objectifs atteints ou
par le rappel des succès antérieurs.
Il s’agit aussi de valoriser l’autonomie du patient. L’entretien motivationnel met en avant
la responsabilité personnelle du
patient dans son cheminement et
ses prises de décision. De son côté,
le soignant doit accepter « que les
gens peuvent faire des choix en ce
qui concerne leur propre vie » (2).
On retrouve là l’une des trois
conditions nécessaires à la collaboration soignant-soigné pour
permettre un changement selon
349
éducation Thérapeutique
Carl Rogers : « faire preuve d’une
estime positive et sans condition ».
Encadré
Autoévaluation de sa pratique
de l’entretien motivationnel
Les outils
de l’entretien
motivationnel
L’identification par le soignant d’éléments du discours-changement ou
à l’inverse d’une résistance permet d’avoir une évaluation immédiate de
son action et de poursuivre ou modifier son approche.
Ces outils sont communs à d’autres
approches en communication.
Suivant l’acronyme OUVER :
• poser des questions Ouvertes
(Lexique) : permettre au patient de
s’exprimer en termes de discourschangement dans les champs vus
précédemment : son désir, son
sentiment de capacité, ses raisons,
son besoin ;
• Valoriser le patient ;
• Ecoute réflective (Lexique) ;
• Résumer tout au long de l’entretien, reformuler.
Efficacité
L’efficacité de ce type d’approche
a été démontrée principalement
dans le champ de l’addictologie,
mais aussi dans de nombreuses
autres pathologies chroniques,
dont le diabète (5, 6) et les troubles
du comportement alimentaire (5,
7, 8).
L’entretien motivationnel pourrait avoir une place dans les thérapies cognitivo-comportementales
des patients obèses, en prélude de
la thérapie, dans le but de renforcer l’adhésion et améliorer la réponse, ou en intégration continue,
en passant d’une stratégie à l’autre
en fonction du niveau de résistance et d’ambivalence au changement (9).
Conclusion
L’entretien motivationnel est un
véritable état d’esprit, une approche relationnelle souvent très
éloignée de la relation thérapeutique classique, en particulier médicale.
350
Identification d’un discours de résistance chez le patient
Miller définit la résistance comme :
• un comportement,
• interpersonnel (on doit être deux pour résister),
• un signal de dissonance,
• un prédicteur de non-changement.
Comment la résistance au changement se manifeste-t-elle ? Le patient
peut adopter différentes attitudes :
• douter de sa capacité personnelle,
• se justifier,
• argumenter,
• interrompre,
• nier,
• ignorer.
Comment cette dissonance s’exprime-t-elle chez l’intervenant ?
• adoption d’une position persuasive,
• argumentation,
• opposition, lutte.
4 L’attitude adaptée est d’éviter la confrontation, de refléter cette
résistance sans exprimer de désaccord, voire de changer de stratégie.
Identification d’éléments du discours-changement
Miller et Rollnick identifient 4 formes de préengagement : le patient s’exprime en termes de Désir, Capacité, Raisons, Besoin.
« J’aimerais… » « Je souhaite… » Désir
« Je serais capable de… » « Je pourrais… » Capacité
« Je me sentirais mieux si… » « Je pourrais plus profiter de
mes enfants si… » Raison
« Il faut que…» « Je devrais… » Besoin
« Je vais… » « J’ai l’intention de… » Engagement
L’importance de favoriser ce discours a été objectivée par Amrhein. Il a
mis en évidence un processus séquentiel dans lequel désir, capacité,
raisons et besoins (DCRB) ne sont pas eux-mêmes prédictifs du changement de comportement, mais prédictifs de la solidité de l’engagement au
changement du client. A son tour, l’intensité du langage d’engagement
est prédictive du changement de comportement. Ces données renforcent
l’importance de différencier le langage d’engagement des autres types de
discours-changement (3).
4 L’expression d’éléments du discours-changement est positive, en
faveur d’un renforcement de l’engagement, et prouve que l’entretien
est mené dans la bonne direction.
Il est intéressant de collecter ces éléments et de les refléter (Lexique)
au patient.
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
L’entretien motivationnel
Cela implique pour le soignant
une formation prolongée (plus de
2 jours) avec mises en situations
pour intégrer cette approche.
Ainsi, Miller et Rollnick écrivaient
en 2009 (11) : l’entretien motivationnel n’est pas :
• un moyen de duper les gens pour
qu’ils fassent ce que vous voulez
qu’ils fassent ;
• facile à apprendre ;
• une pratique usuelle ;
• la panacée.
Se former à l’entretien motivationnel c’est augmenter la
chance d’un plus grand engagement du patient dans le traitement et donc l’efficacité de la
prise en charge, mais c’est aussi
un enrichissement de sa pra-
tique clinique avec l’acquisition
de nouvelles compétences. n
Mots-clés :
Approche relationnelle, Changement
de comportement, Addictions,
Processus interpersonnel
Bibliographie
1. Miller WR et Rollnick S. Motivational interviewing : preparing people for
change. 2nd edition. New York : Guilford Press, 2002.
2. Rollnick S, Miller WR, Butler CC. Pratique de l’entretien motivationnel :
Communiquer avec le patient en consultation. Paris : InterEditions, 2009.
3. Amrhein PC, Miller WR, Yahne CE et al. Client commitment language during motivational interviewing predicts drug use outcomes. J Consult Clin
Psych, 2003 ; 71: 862-78.
4. http://www.entretienmotivationnel.org/.
5. West DS, DiLillo V, Bursac Z et al. Motivational interviewing improves
weight loss in women with type 2 diabetes. Diabetes Care 2007 ; 30 : 1081-7.
6. Channon SJ, Huws-Thomas MV, Rollnick S et al. A multicenter randomized controlled trial of motivational interviewing in teenagers with diabetes. Diabetes Care, 2007 ; 30 : 1390-5.
7. DiLillo V, Siegfried NJ, West DS. Incorporating Motivational interviewing
into behavioural obesity treatment. Cogn Behav Pract, 2003 ; 10 : 120-30.
8. Dunn C, Deroo L, Rivara FP. The use of brief interventions adapted from
motivational interviewing across behavioral domains : a systematic review. Addiction, 2001 ; 96 : 1725-42.
9. Reiner M, Carrard I, Golay A. L’entretien motivationnel dans la thérapie
cognitivo-comportementale des patients obèses. Rev Med, Suisse, 2010 ;
6 : 677-81.
10. Lécallier D, Michaud P. L’entretien motivationnel. Une évolution radicale de la relation thérapeutique. Alcoologie et addictologie. 2004 ; 26 :
129-34.
11. Miller WR, Rollnick S. Ten things that motivational interviewing is not.
Behav Cogn Psychother, 2009 ; 37 : 129-40.
rendez-vous de l’industrie
Spécial EASD
Télémédecine
Roche : pour une prise en charge
intégrée du diabète
Accord de Sanofi pour
le développement de DIABEO
L
e laboratoire Roche a rappelé, à l’occasion du 47e congrès
de l’EASD qui s’est tenu début septembre à Lisbonne,
qu’avec plus de 285 millions de personnes atteintes dans le
monde, le diabète touche plus de 6 % de la population adulte
mondiale. Selon les experts, ces chiffres sont susceptibles de
s’aggraver au cours des prochaines années. Cette maladie
chronique, ses traitements et la prise en charge de la maladie
représentent donc un enjeu majeur pour les personnes diabétiques bien sûr mais également pour leurs soignants ou les
systèmes de santé. De plus, la situation actuelle de restrictions
budgétaires et souvent le peu de temps accordé au dialogue
médecin-patient est susceptible de rendre le maintien du
niveau de soins encore plus difficile. Dans ces circonstances,
une approche structurée et intégrée de la thérapie est clairement nécessaire, en aidant notamment à responsabiliser
les patients et soignants. C’est dans cette optique que des
experts scientifiques internationaux, des politiques, les industries pharmaceutiques et les associations de patients ont
discuté des concepts nécessaires pour évaluer la manière
d’« optimiser encore le traitement du diabète - les exigences
et les solutions pour une gestion efficace des cas » lors d’un
symposium proposé par le laboratoire Roche et intitulé : Focus Media Symposium: Patients. Perspectives. Progress. n
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
L
a filiale de Sanofi a annoncé la signature d’un accord de
collaboration avec le Centre d’Etude et de Recherches
pour l’Intensification du Diabète (CERITD) et la société Voluntis, pour le développement de DIABEO, une solution de
télémédecine innovante dont la mise à disposition est envisagée en France en 2014. Cet accord fait suite au lancement du
lecteur de glycémie iBGStar® qui se connectera à la version
iPhone du dispositif DIABEO et permet au laboratoire d’accroître son engagement envers les patients diabétiques et les
professionnels de santé.
DIABEO propose un modèle de soins personnalisé. Il sera
constitué de 3 systèmes intelligents. L’application Smartphone permettra au patient d’avoir une plus grande autonomie grâce à un ajustement simple des doses d’insuline
en fonction de sa glycémie, de son alimentation, et de son
activité physique. Les données quotidiennes de glycémie et
doses d’insuline seront enregistrées et affichées dans un carnet électronique et pourront être transmises régulièrement à
l’équipe soignante par Internet. Le système d’alertes paramétrables permettra au médecin d’intervenir de manière ciblée.
Le système de télésuivi permettra aussi à une infirmière de
télédiabétologie de suivre le patient entre les consultations
médicales selon les consignes transmises par le médecin. n
351
L’essentiel sur…
La glycémie postprandiale
Un paramètre à prendre en compte (aussi)
dans le diabète de type 2
n Si la prise en compte de l’hyperglycémie postprandiale (HPP) est admise de longue date dans le
diabète de type 1, son diagnostic et sa prise en compte sont plus récents dans le diabète de type 2
(DT2). Mieux diagnostiquée, elle est mieux ciblée par les molécules récentes car elle est probablement directement impliquée dans les complications macrovasculaires.
Clinique
D’abord par la clinique, car si l’HPP
est influencée par plusieurs facteurs (la glycémie préprandiale, le
taux d’incrétines, la sécrétion d’insuline), la sensibilité à l’insuline
des tissus périphériques est au
premier plan. Par conséquent,
le patient insulinorésistant est à
risque d’HPP et le surpoids avec
un tour de taille augmenté sont
des indicateurs de cette anomalie
métabolique (1).
Biologie
❚❚La tolérance normale ❚
au glucose
Chez les sujets ayant une tolérance normale au glucose, la glycémie plasmatique ne dépasse généralement pas 7,8 mmol/l (1,40 g/l)
à la suite de la prise d’aliments et
revient physiologiquement à son
niveau préprandial au bout de
2 heures (2).
*CHU de Bordeaux
352
L’Organisation mondiale de la
santé définit par ailleurs la tolérance normale au glucose par une
valeur glycémique inférieure à
7,8 mmol/l (140 mg/dl) 2 heures
après l’ingestion d’une charge de
75 g de glucose (hyperglycémie
provoquée par voie orale [HGPO]).
❚❚L’état postprandial
L’état postprandial correspond à
la période de 4 à 6 heures suivant un repas pendant laquelle
les glucides sont progressivement hydrolysés et absorbés
au niveau intestinal. Les phénomènes postprandiaux peuvent se
recouvrir les uns les autres durant
la journée, du fait de la succession des prises alimentaires (3).
Au cours d’une journée, le temps
passé en état postprandial se révèle beaucoup plus long que les
périodes de jeûne : chez un sujet
normal, le cumul des périodes
postprandiales atteint environ
12 heures par jour, contre seulement 2 heures en fin de nuit pour
l’état strictement à jeun (4).
Des analyses de profil glycémique sur le nycthémère ont
permis d’estimer que la durée cumulée de l’élévation des
chiffres glycémiques au-delà
© Chris Fertnig - iStockphoto
Comment l’identifier,
comment la définir ?
Pr Bogdan Catargi*
des valeurs préprandiales était
de l’ordre de 6 heures chez le
sujet non diabétique et pouvait
atteindre 12 à 15 heures chez le
patient diabétique (Fig. 1).
C’est l’utilisation des méthodes de
mesure en continu de la glycémie
qui a permis de mieux cerner la dégradation progressive de la glycémie et de confirmer que la perte du
contrôle de la glycémie postprandiale (GPP) est un phénomène
précoce (5).
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
La glycémie postprandiale
HbA1c : ■ < 6,5 % (n = 30) ■ 6,5 % à 7 % (n = 17) ■ 7 % à < 8 % (n = 32) ■ 8 % à 9 % (n = 24) ■ 9 % (n = 26)
Petit-déjeuner
quelles valeurs
cibles ?
Concentration en glucose (mmol/l)
Les valeurs cibles de la glycémie
recommandées par les sociétés
savantes sont présentées dans le
tableau 1.
Cette relation a été mise en évidence
par plusieurs études épidémiologiques dont DECODE (6) menées
sur une large cohorte de population
non diabétique. Tous ont bénéficié
d’une HGPO lors de l’inclusion. Les
valeurs prédictives de la glycémie
à jeun et de la glycémie à 2 heures
étaient étudiées et comparées à la
mortalité totale.
Le principal résultat était que plus
la GPP est élevée, plus le risque de
mortalité augmentait et, ce, quel que
soit le niveau de la glycémie à jeun.
La valeur prédictive de la glycémie à 2 heures s’est avérée indépendante de la glycémie à jeun.
Ceci souligne le fait que la relation
entre hyperglycémie (ou HbA1c) et
le risque cardiovasculaire dans la
population générale n’implique pas
uniquement la glycémie à jeun mais
aussi la glycémie postcharge.
Les études
d’intervention
L’étude STOP-NIDD
Il y a très peu d’études d’intervention, et encore moins qui soient
concluantes car le risque vasculaire
est plurifactoriel. La plus ancienne
est l’étude STOP-NIDD qui a suivi 1
429 patients intolérants au glucose
pendant au moins 3 ans, traités par
acarbose et qui a montré une réduction significative du risque
cardiovasculaire (Fig. 2) (7).
Postprandial
(période journée)
13
12
11,5
11
10
9
10,0
8
7
6
5
8,4
4,4
Matin
0
2
4
6
8
0,7
10
12
14
Temps (heures)
16
18
20
22
24
Figure 1 - Mesure de la glycémie par un système de surveillance continue, sur
24 heures, de 130 patients diabétiques de type 2. Cinq groupes selon les niveaux
d’HbA1c : 6,5 % (n = 30), 6,5 - 6,9 % (n = 17), 7 - 7,9 % (n = 32), 8 - 8,9 %, (n = 25), 9 %
(n = 26). Objectif : déterminer si la dégradation de la GAJ et celle de la GPP dépendent
de l’évolution du diabète de type 2.
Tableau 1 - Valeurs cibles de la glycémie recommandées par les
sociétés savantes.
Organisation
ADA-EASD
IDF-Europe
AACE
Probability of Any Cardiovascular Event
Relation
entre glycémie
postprandiale
et risque
cardiovasculaire
A jeun
(période nocturne)
14
Durée du diabète (année)
15
0,06
0,05
0,04
Placebo
0,03
0,02
Acarbose
0,01
P = 0,04 (Log-Rank Test)
P = 0,03 (Cox Proportional Model)
0
0
No. at Risk
Placebo
Acarbose
HbA1c (%)GAJGPP
< 7
…
…
< 6,5
5,5 mmol/l (< 1,00 g/l) 7,8 mmol/l (< 1,40 g/l)
≤ 6,5
6,1 mmol/l (< 1,10 g/l) 7,8 mmol/l (< 1,40 g/l)
100
200
300
400
500
600
700
800
900 1 000 1 100 1 200 1 300 1 400
Days After Rondomization
686
682
675
659
667
635
658
622
643
608
638
601
633
596
627
590
615
577
611
567
604
558
519
473
424
376
332
286
232
203
Figure 2 - Effet d’un traitement par acarbose sur les risques cardiovasculaires chez des
sujets intolérants au glucose (7).
Les études sur
l’athérosclérose
Plus nombreuses sont les études
qui se sont intéressées aux critères
indirects de l’athérosclérose, et en
particulier l’épaisseur intima/media
(EIM). K. Esposito a étudié l’impact
spécifique sur la GPP de 175 patients
diabétiques de type 2 du repaglinide
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
versus le glyburide. La glinide s’est
avérée plus efficace sur la glycémie postprandiale, la GPP, (- 0,7
g/l vs - 0,5 g/l) et a permis une réduction plus importante de l’EIM
(Fig. 3) (8).
L’étude NAVIGATOR
On attendait beaucoup de l’étude
353
L’essentiel sur…
L’étude HEART2D (hyperglycemia
and its effect after acute myocardial infarction on cardiovascular
outcomes in patients with type 2
diabetes mellitus), bien que discutable sur le plan méthodologique,
est intéressante car elle a comparé
les effets du contrôle des glycémies à jeun versus les glycémies
postprandiales sur le risque d’événement cardiovasculaire chez les
diabétiques de type 2, après un infarctus du myocarde. Cette étude
prospective randomisée a inclus
1 115 diabétiques de type 2 de 30 à
75 ans, 21 jours après un infarctus du myocarde, sur une durée
moyenne de 963 jours (1-1687).
Le groupe PRANDIAL (n = 557) a
été traité par un analogue rapide
de l’insuline lispro avant chaque
repas, avec un objectif glycémique
< 7,5 mmol/l à 2 heures. Le groupe
354
Glyburide
Pic postprandial
P < 0,001
P < 0,01
220
Glucose (mg/dl)
180
140
100
Avant
Après
Avant
Après
260
220
180
140
P < 0,001
100
0
60
P < 0,01
120
0
60
Minutes
120
Minutes
Figure 3 - Effets de la réduction de l’hyperglycémie postprandiale sur l’athérosclérose
dans le diabète de type 2 (8).
Événements
cardio-vasculaires (%)
L’étude HEART2D
260
20
Hazard ratio, 0,94 (95 % CI, 0,82-1,09)
P = 0,43
15
10
Placebo
5
Nateglinide
0
0
1
2
3
4
5
6
Années de suivi
Figure 4 - Effet du nateglinide sur l’incidence du diabète et les événements cardio-­
vasculaires chez des sujets intolérants au glucose (9).
1,0
Proportion de patients n’ayant pas
eu d’événement du critère primaire
NAVIGATOR (Nateglinide and
Valsartan in Impaired Glucose Tolerance Outcomes Research) initiée dans les années 2000. Cette
étude prospective multicentrique,
randomisée avait pour objectif de déterminer si le risque de
diabète et d’événements cardiovasculaires peut être diminué.
9 306 sujets intolérants au glucose
(HbA1c = 5,8 %, GAJ = 6,1 mmol/l,
GPP = 9,2 mmol/l) et ayant des antécédents cardiovasculaires ou à
haut risque cardiovasculaire ont
été inclus et traités, soit par placebo versus nateglinide (60 mg x
3/j), soit par valsartan versus placebo (plan factoriel 2 x 2). Le suivi
a duré 3,3 ans. Il n’a pas été observé de baisse de l’incidence
du diabète (critère principal),
ni du critère composite étendu (décès cardiovasculaire,
infarctus non fatal, AVC non
fatal, hospitalisation pour insuffisance cardiaque ou angor
instable, revascularisation artérielle) (Fig. 4) (9).
Repaglinide
Pic postprandial
BASAL (n = 558)
PRANDIAL (n = 557)
0,9
0,8
0,7
0,6
0,5
0
Prandial
Basal
200
400
600
800
1 000
1 200
1 400
1 600 jours
n = 557 n = 453 n = 420 n = 407 n = 393 n = 392 n = 388 n = 384
n = 558 n = 464 n = 430 n = 410 n = 399 n = 386 n = 382 n = 377
Figure 5 - Effet du contrôle de la glycémie prandiale versus à jeun sur les événements
cardiovasculaires chez des sujets DT2 après un infarctus du myocarde (10).
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Contrôle
5
Saxagliptine
4
3
2
1
0
5
Patients à risque
Contrôle
Saxagliptine
1 251
3 356
24
37
50
935
2 615
860
2 419
774
2 209
63
76
Semaines
545
1 638
288
994
89
102
115
128
144
498
123
436
102
373
57
197
Figure 6 - Délai d’apparition du premier événement cardiovasculaire indésirable
majeur (MACE) (12).
Les incrétines pour
le nouveau
traitement de la GPP
Il s’agit de la classe des incrétines
(inhibiteurs de la DPP-4 et analogues du GLP-1). Ces molécules étant
récentes, les études d’intervention
sur la GPP et le risque cardiovasculaire sont encore en cours.
Exenatide plasmatique
postprandial 2 h après les
repas (pM)
GLP-1 plasmatique postprandial
2 h après les repas (pM)
BASAL (n = 558) a reçu de l’insuline NPH 2 fois par jour ou de
l’insuline glargine 1 fois par jour
avec un objectif glycémique à jeun
< 6,7 mmol/l.
Le critère principal était un critère
combiné et fait d’événements cardiovasculaires : mort cardiovasculaire, infarctus du myocarde non
fatal, AVC non fatal, revascularisation coronaire, hospitalisation
pour un syndrome coronarien aigu.
Cette étude a été négative,
puisque le nombre de patients
ayant eu un événement n’était
pas différent dans les deux groupes
(PRANDIAL n = 174 (31,2 %) versus
BASAL n = 181 (32,4 %)) (Fig. 5) (10).
Premier événement indésirable (%)
La glycémie postprandiale
Les inhibiteurs de la DPP-4
Ils agissent sur la GPP en prévenant la dégradation du GLP-1 endogène sans agir sur sa sécrétion,
en augmentant la sécrétion d’insuline et en diminuant la sécrétion
de glucagon. Ils n’ont pas d’effet
sur la vidange gastrique. L’effet sur
la GPP a été montré avec ces molécules. Par exemple, la sitagliptine
diminue la GPP de - 2,7 mmol/l
par rapport au placebo (11).
Les résultats poolés des études de
phase IIb/III avec cette molecule
montrent un délai d’apparition
plus tardif du premier événement cardiovasculaire indésirable majeur (MACE) (Fig. 6) (12).
Les analogues du GLP-1
Ils réduisent la GPP par la conjonction de 3 mécanismes :
• l’inhibition de la production hé-
sitaglipline
Figure 7 - Différences entre IDPP-4 et analogues du GLP-1 (d’après 13).
patique de glucose (par stimulation de la sécrétion d’insuline et
inhibition de la sécrétion du glucagon) ;
• la diminution de l’absorption
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
intestinale de glucose (par le ralentissement de la vidange gastrique) ;
• l’augmentation de la captation hépatique de glucose (par stimulation
355
L’essentiel sur…
L’exénatide (Byetta®) semble avoir
une efficacité postprandiale supérieure au liraglutide (Victoza®)
dans une étude de non-infériorité
menée sur 24 semaines (Fig. 8) (14).
Comment expliquer
le hiatus entre
l’épidémiologie et
l’intervention ?
Plusieurs explications peuvent
être apportées :
• durée insuffisante des études
d’intervention ;
• amélioration de la prise en
charge des autres facteurs de
risque cardiovasculaire ;
• dilution de l’effet potentiel d’une
intervention sur la GPP ;
• contrôle de la GPP insuffisant
dans les études d’intervention ;
• intervention glycémique trop
tardive/risque cardiovasculaire et
maladie cardiovasculaire.
Le plus probable étant que la
GPP n’est pas seulement un facteur mais aussi un marqueur
14
Glycémie (mmol/L)
de la sécrétion d’insuline et inhibition de la sécrétion du glucagon).
Les analogues du GLP-1 ont un
effet plus marqué sur la GPP
comparativement aux inhibiteurs de la DPP-4 (Fig. 7) (13).
** p < 0,0001
** p = 0,0005
13
12
11
*
10
BYETTA® 10 µg 2x/j (n = 231)
ligne de base
semaine 26
* p < 0,0001
** p = 0,0005
**
9
*
8
Liraglutide 1,8 mg 1x/j (n = 233)
ligne de base
semaine 26
* p < 0,0001
7
6
0
tp
n
a
Av
r
ne
jeu
dé
teti
prè
’a
90
sp
r
ne
jeu
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Av
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rès
p
’a
90
er
dîn
Au
r
he
uc
co
Déjeuner : p = NS
Figure 8 - Différence sur le profil glycémique entre les 2 analogues du GLP-1 (14).
de risque cardiovasculaire et il
y a donc nécessité d’une prise
en charge globale et précoce de
tous les paramètres métaboliques associés à l’hyperglycémie postprandiale.
Conclusion
Les objectifs à atteindre avec l’ensemble de ces molécules est possible, mais il faut tenir compte du
rôle probablement favorisant des
hypoglycémies sur le risque cardiovasculaire et des effets secondaires de ces molécules à manier
parfois avec précaution après un
événement cardiovasculaire aigu
(syndrome coronarien aigu, pon-
tage coronarien).
C’est la raison pour laquelle le
Groupe Coronaire et Diabète, dans
ses nouvelles recommandations
à paraître, suggère la sollicitation
d’un diabétologue par l’équipe de
cardiologie dans les jours qui suivent un événement cardiovascun
laire aigu. Mots clés : Diabète de type 2,
Glycémie postprandiale
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Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
mise au point
La ghréline : physiologie
et perspectives thérapeutiques
Un acteur primordial de la régulation alimentaire
Dr Emmanuel Disse*
Introduction
La structure
de la ghréline
La ghréline, découverte il y a une
dizaine d’années, est un acteur primordial de la régulation de la prise
alimentaire. Cette hormone régule
la balance énergétique en favorisant
la prise alimentaire, en augmentant la masse grasse et en limitant
la dépense d’énergie. Comme la
ghréline est la seule hormone décrite possédant un effet orexigène,
elle a focalisé l’attention du monde
scientifique, notamment dans le domaine de la recherche sur l’obésité.
La ghréline a ainsi trouvé sa place,
à côté de la leptine ou de l’insuline, parmi les signaux renseignant
notre système nerveux central sur
l’état et la disponibilité des réserves
énergétiques de l’organisme. Les
données scientifiques des dernières
années attribuent à la ghréline de
multiples fonctions physiologiques
telles que la régulation de l’homéostasie du glucose ou de la récompense alimentaire. La découverte
et la compréhension de celles-ci
sont à même de permettre le développement de nouvelles approches
thérapeutiques dans les domaines
de l’obésité, des troubles du comportement alimentaire ou encore du
diabète de type 2.
Une hormone
hautement conservée
entre les espèces
* Service d’Endocrinologie, Diabétologie et Nutrition, Centre
Hospitalier Lyon Sud ; Centre de Recherche en Nutrition
Humaine Rhône-Alpes
La ghréline est synthétisée initialement sous la forme d’une prépro-hormone de 117 acides aminés. Son clivage par la convertase
PC1/3 donne deux formes matures
de l’hormone, un peptide de 28 AA
et un autre de 27 AA. La ghréline
est hautement conservée entre
les espèces et exprimée au sein de
nombreux tissus témoignant de
son importance physiologique.
La ghréline de souris et la ghréline
de rat sont identiques et ne diffèrent de la ghréline humaine que
par 2 AA.
Une particularité
structurale unique
Une des particularités structurales
de cette hormone est l’existence
d’un processus post-transcriptionnel additionnel entraînant
l’acylation du peptide, avec un
acide n-octanoïque ou n-décanoïque, sur la sérine en position 3. La
ghréline est la première hormone
peptidique, et la seule décrite,
présentant une telle modification
avec l’ajout d’un acide gras. L’enzyme permettant cette acylation
est la ghréline O-Acyltransférase
(GOAT), découverte en 2008 et
dont l’expression se retrouve ma-
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
joritairement dans les tissus sécrétant l’hormone, comme l’estomac, le pancréas et l’intestin (Fig. 1).
Une cible thérapeutique
supplémentaire
La découverte de cette acyltransférase offre une cible thérapeutique supplémentaire sur le
système ghréline. En effet, il est
largement admis que c’est la forme
acylée du peptide qui est la forme
biologiquement active de l’hormone.
Seul le peptide acylé a la capacité
de se lier et d’activer l’unique récepteur identifié de la ghréline
(GHS-R1a). De plus, l’administration pharmacologique des formes
acylées du peptide ou de ses agonistes est la seule à déclencher
des effets biologiques bien identifiables (sécrétion de GH et prise
alimentaire). Plus spécifiquement,
il a été démontré que les effets de
la ghréline sur la balance énergétique et la libération de GH sont
sous la dépendance d’une octanoylation en sérine-3.
Toutefois, des données récentes
suggèrent également un rôle
propre de la forme non octanoylée (des-acyl ghréline) notamment sur les cardiomyocytes et
les cellules endothéliales où elle
présenterait un effet cardioprotecteur. Un effet antiprolifératif de
la des-acyl ghréline est également
rapporté.
357
mise au point
Les sites sécrétoires
de la ghréline
La cinétique de la
ghréline plasmatique
Les études avec administration
exogène de ghréline montrent une
demi-vie plasmatique du peptide de 10 à 30 minutes (dosage
de la ghréline plasmatique totale).
Compte tenu des difficultés de
dosage, peu de données sont disponibles concernant la pharmacocinétique de la forme acylée de
l’hormone. A côté de sa dégradation enzymatique, il est également
rapporté une liaison de la ghréline
active plasmatique avec certaines
lipoprotéines (HDL) pouvant entraver l’interaction de l’hormone
avec son récepteur.
Il est estimé qu’environ 20 % de
la ghréline plasmatique sont sous
forme acylée (3). Alors qu’une
358
Figure 1 - Acylation de la ghréline. D’après Van der Lely (14).
large partie C-terminale de l’hormone n’est pas nécessaire à sa
bioactivité, le groupement n-octanoyl en sérine-3 est par contre
indispensable pour la liaison de
l’hormone à son récepteur et son
activation (4).
La régulation de la
sécrétion de ghréline
prise alimentaire
et statut nutritionnel
Le facteur le plus important pour
la régulation de la sécrétion de
ghréline est la prise alimentaire
et le statut nutritionnel. Les taux
plasmatiques de ghréline sont
élevés au cours du jeûne (notamment le jeûne physiologique
relatif nocturne) et abaissés
après les prises alimentaires (5,
6) (Fig. 2). Ce constat suggère un lien
entre le profil sécrétoire ultradien
de la ghréline et le comportement
ingestif individuel. Par ailleurs, il a
été démontré que l’apprentissage
d’un profil fixe de repas pouvait influencer le profil sécrétoire ultradien de la ghréline indépendamment du statut nutritionnel (7).
composition
macro-nutritionnelle
La composition macronutritionnelle des repas est un facteur régulateur des niveaux plasmatiques
de ghréline puisque les hydrates
de carbone, les protéines et les
lipides diminuent les niveaux
de ghréline avec une efficacité
respectivement
décroissante
(8, 9). L’inhibition postprandiale
des niveaux de ghréline est proportionnelle à la charge énergétique du
repas (10). Chez les rongeurs et les
humains de poids normal, la chute
postprandiale de ghréline est plus
Niveau plasmatique (pg/ml)
La majorité de la ghréline circulante est synthétisée et sécrétée
par les cellules X/A-like localisées
dans les glandes oxyntiques de la
muqueuse du fundus gastrique (1).
Ceci est confirmé par la chute drastique de 76 % de son taux circulant
chez les patients ayant bénéficié
d’une chirurgie bariatrique comprenant une gastrectomie par rapport aux sujets sains (2). Toutefois,
après gastrectomie, on observe une
réascension progressive des taux
circulants de l’hormone, suggérant
une origine sécrétoire compensatrice. L’intestin grêle, deuxième
site principal de synthèse de ghréline, paraît être un bon candidat.
Notons également que, dans des
quantités moindres, la ghréline est
également produite par l’antéhypophyse, le pancréas, le poumon, le
rein, les lymphocytes, le placenta,
les testicules, les ovaires et le cerveau (hypothalamus et cortex).
Le rôle propre de ses différentes
sources sécrétoires reste imprécis.
700
600
500
400
300
Petit-déjeuner
Déjeuner
200
Dîner
100
Temps (24 heures)
Figure 2 - Niveaux plasmatiques moyens
de ghréline sur 24 heures, chez 10 sujets
consommant un petit-déjeuner, un
déjeuner et un souper à respectivement
8h, 12h et 17h30. Adapté de Cummings
et al. (5).
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
La ghréline : physiologie et perspectives thérapeutiques
prononcée après un repas riche en
hydrates de carbone qu’après un repas riche en graisses. Chez le sujet
obèse, il semble exister un défaut
de la suppression postprandiale de
la distension gastrique n’influence
pas la sécrétion de ghréline, et la diminution de son taux plasmatique
n’est observée qu’après la vidange
gastrique (effet postgastrique).
Les facteurs les plus importants pour la
régulation de la sécrétion de ghréline sont la
prise alimentaire et le statut nutritionnel.
ghréline plasmatique (11, 12). Les
études de clamps hyperinsulinémiques et d’administration de glucose chez les sujets sains et obèses
suggèrent que la réponse postprandiale de la ghréline est corrélée à la
réponse insulinique et au niveau de
sensibilité à l’insuline. Alors que les
mécanismes précis expliquant l’effet inhibiteur des nutriments sur le
niveau de ghréline sont encore incertains, il semble, en tout cas, que la
suppression du taux de ghréline par
l’alimentation fasse intervenir des
signaux plasmatiques plutôt qu’un
signal mécanique digestif : en effet,
Autres facteurs
Par ailleurs, il est rapporté que le
jeûne prolongé inhibe l’acylation
de la ghréline alors que le taux de
ghréline totale reste inchangé.
Les niveaux de ghréline sont diminués par la somatostatine et
augmentés par les agonistes cholinergiques.
Le rôle physiologique de la leptine,
de la GH et des hormones thyroïdiennes dans la régulation endogène de la sécrétion de ghréline est
encore discuté de manière controversée.
La principale hormone impliquée
dans l’inhibition des niveaux plasmatiques de ghréline semble donc
être l’insuline.
Le récepteur
de la ghréline :
Growth Hormone
Secretagogue
Receptor-1a
La ghréline exerce la majorité de
ses effets biologiques via le récepteur GHSR-1a (13), un récepteur
couplé aux protéines G classique,
présent à haute densité à la fois
dans l’hypothalamus et dans l’antéhypophyse. Chez les souris
Knock out pour GHSR-1a, l’administration aiguë de ghréline ne déclenche plus de prise alimentaire
ni de libération de GH, et ces souris ne développent pas d’obésité
en réponse à une diète riche en
lipides. GHSR-1a est exprimé dans
le noyau arqué hypothalamique
principalement au niveau des neurones coexprimant NPY et AGRP.
Les plus fortes densités de
Tableau 1 - Effets physiologiques et physiopathologiques de la ghréline.
Cible
Sécrétion de GH
Prise alimentaire et homéostasie du glucose
Système digestif
Système cardiovasculaire
Reproduction
Système immunitaire
Os
Prolifération cellulaire
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Fonction
Stimule la sécrétion de GH
Stimule l’appétit et la prise alimentaire
Participe à la récompense alimentaire
Augmente le poids corporel
Augmente la glycémie
Altère la sensibilité à l’insuline
Stimule la sécrétion et la motricité gastrique
Protège contre les atteintes de la muqueuse
Diminue la pression artérielle
Améliore la fonction endothéliale
Supprime l’activité sympathique
Améliore la cachexie d’origine cardiaque
Diminue l’apoptose des cardiomyocytes
Protège contre l’ischémie/reperfusion
Inhibe LH et la sécrétion de testostérone
Inhibe la spermatogenèse
Inhibe le développement des cellules de Leydig
Stimule la prolifération des cellules immunitaires
Diminue les cytokines pro-inflammatoires
Stimule la prolifération des ostéoblastes
Stimule la prolifération de lignées cellulaires
359
mise au point
GHSR-1a sont retrouvées dans
l’hypothalamus et l’hypophyse,
mais ce récepteur est également
exprimé au niveau central dans
l’hippocampe, le mésencéphale et
le rhombencéphale. GHSR-1a est
exprimé également dans les afférences vagales, la thyroïde, le pancréas, la rate, les cellules immunitaires, le myocarde, les ovaires et
les glandes surrénales.
Il a été identifié un autre récepteur
de la même classe, GHS-R1b, dont
le ligand et la fonction restent à
définir. Par ailleurs, le récepteur
activé par la forme non acylée de la
ghréline est encore inconnu.
Les fonctions
physiologiques
de la ghréline
Les principaux effets physiologiques et physiopathologiques de
la ghréline sont présentés dans le
tableau 1.
La ghréline présente un large
spectre d’effets biologiques.
Stimulation
de la sécrétion de GH
La ghréline stimule la sécrétion de
GH (14). Il s’agit du premier effet décrit de l’hormone qui lui a
également donné son nom. Cet
effet est dépendant des récepteurs
GHSR-1a et implique avant tout
une action de la GHRH, bien qu’il
existe, à un moindre degré, un effet
direct de la ghréline sur la sécrétion hypophysaire de GH. Ghréline et GHRH agissent de manière
synergique pour réguler le niveau
de GH, la ghréline amplifiant le
profil sécrétoire de base.
Autres effets
La ghréline stimule également
la sécrétion d’acide gastrique et
la motilité gastrique par l’intermédiaire du nerf vague.
Elle présente des propriétés anti360
inflammatoires et protège contre
le choc endotoxémique en inhibant l’expression de cytokines
pro-inflammatoires par les monocytes et les cellules endothéliales.
La ghréline décroît la pression artérielle et protège contre la dysfonction cardiaque.
Enfin, notons qu’il existe des données conflictuelles actuellement
sur la potentielle oncogénicité de
la ghréline : elle est mitogène sur
les cellules d’hépatocarcinome
alors qu’elle présente un effet antiprolifératif in vitro sur les cellules
cancéreuses pulmonaires.
(17). Chez l’homme sain qui initie
volontairement ses repas, en l’absence de toute information temporelle ou alimentaire, on observe
une élévation des taux de ghréline
juste avant les prises alimentaires
et un profil sécrétoire d’évolution
similaire à celui de la sensation
subjective de faim (18). Comme
l’apparition des pics de ghréline au
cours de la journée est en relation
avec le profil alimentaire habituel
du sujet, plusieurs études ont suggéré que la ghréline permettait
l’anticipation de la prise alimentaire, plutôt que le déclenchement du repas.
La ghréline
et la prise
alimentaire
Mécanismes mis en jeu
Quel Rôle
dans la stimulation
de la prise alimentaire ?
Chez l’animal et chez l’homme,
l’administration de ghréline
augmente l’appétit et stimule
la prise alimentaire. En 2000,
Tschöp a décrit pour la première
fois l’effet de la ghréline sur la stimulation de la prise alimentaire
et la prise de poids (15). Depuis, de
nombreuses études ont confirmé
ces données, que la ghréline soit
administrée en périphérie ou centralement (ICV) chez les rongeurs
ou chez l’homme (16, 17). Ainsi,
l’injection intraveineuse de ghréline chez l’homme sain augmente
de 28 % environ les apports énergétiques au cours d’un buffet ad libitum et augmente les scores d’appétit (EVA) (17).
Quel Rôle
dans l’initiation des repas ?
Les niveaux de ghréline sont élevés pendant le jeûne et décroissent
en réponse à la prise alimentaire,
suggérant un rôle de cette hormone dans l’initiation des repas
❚❚Au niveau du système nerveux
central
La régulation de la prise alimentaire est intégrée au niveau du système nerveux central. Le noyau
arqué hypothalamique (ARC) est
considéré comme le chef d’orchestre de la régulation de la prise
alimentaire. Deux populations
neuronales impliquées dans le
relais des signaux d’adiposité et
des signaux nutritionnels ont été
identifiées à ce niveau : les neurones à NPY/AgRP et les neurones
à POMC/CART. Il est maintenant
bien établi que l’activation des
neurones du noyau arqué co-exprimant le neuropeptide Y (NPY)
et l’agouti related protein (AgRP)
augmente la prise alimentaire,
diminue la dépense énergétique
et augmente l’adiposité corporelle. A l’inverse, l’activation des
neurones exprimant la pro-opiomélanocortine (POMC) diminue
la prise alimentaire ainsi que le
poids corporel et augmente la dépense énergétique. Bien qu’ayant
une large distribution dans le SNC,
le récepteur de la ghréline est très
majoritairement exprimé dans les
neurones du noyau arqué hypo-
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
La ghréline : physiologie et perspectives thérapeutiques
thalamique. Plusieurs études électrophysiologiques ont démontré
que les neurones du noyau arqué
étaient les principales cibles de la
ghréline pour moduler la balance
énergétique. La prise alimentaire induite par la ghréline
est sous la dépendance de l’activation des neurones NPY/
AgRP. En effet, les antagonistes
du récepteur au NPY, la mutagenèse dirigée contre les neurones
NPY/AgRP ou encore l’ablation de
ces neurones inhibent en grande
partie l’effet orexigène de la ghréline ou des agonistes de GHSR-1a.
L’influence respective de NPY et
d’AgRP dans l’effet orexigène de la
ghréline reste discutée. Toutefois,
la délétion ciblée du gène de NPY
ne semble pas critique pour la réponse orexigène à l’injection de
ghréline et la ghréline induit plus
fortement l’expression de l’ARNm
d’AgRP que de NPY, suggérant que
l’effet orexigène de la ghréline peut
impliquer avant tout AgRP et le
système mélanocortine. La ghréline agit également sur les neurones à POMC, qu’elle inhibe, prévenant ainsi le relargage d’α-MSH.
Il est également démontré qu’elle
peut activer directement les neurones de l’hypothalamus latéral
exprimant les orexines.
❚❚Rôle du nerf vague
A côté des voies orexigènes et
anoréxigène hypothalamiques, la
ghréline pourrait également stimuler l’appétit via le nerf vague,
faisant le lien entre le tube digestif et le cerveau. Ainsi, certains
auteurs ont démontré que l’effet
orexigène de la ghréline est altéré
après vagotomie chirurgicale ou
chimique. De plus, il a été démontré que la ghréline administrée en
périphérie transmettait son signal
orexigène en partie via le nerf vague et le noyau du tractus solitaire
(NTS).
Ghréline
+
Circulation sanguine
+
ARC
-
NTS
-
NPY / AgRP
+
POMC/CART
+
PVN
Tronc cérébral
Nerf vague
+
CRF
LH
Oréxines
Hypothalamus
Appétit et prise alimentaire
Figure 3 - Mécanismes d’action de la ghréline, au niveau central, pour réguler l’appétit
et la prise alimentaire. ARC : noyau arqué, PVN : noyau paraventriculaire, LH : hypothalamus
latéral, NTS : noyau du tractus solitaire.
Les mécanismes d’action de la
ghréline pour contrôler la prise
alimentaire sont synthétisés sur la
figure 3.
La ghréline et le
plaisir alimentaire
Activation du système
de la récompense
A côté de son rôle régulateur sur
l’homéostasie de la prise alimentaire et de la balance énergétique,
il existe maintenant des données
convergentes démontrant que
la ghréline active le système
de la récompense et pourrait
promouvoir la recherche de
récompense. Alors que la circuiterie neuronale qui participe au
maintien d’un apport calorique
suffisant en stimulant la prise alimentaire est principalement hypothalamique, celle encodant la
palatabilité et la motivation pour
l’alimentation se situe dans les
structures mésolimbiques dopaminergiques.
Diabète & Obésité • Novembre 2011 • vol. 6 • numéro 53
Action au niveau des
structures hypothalamiques
et mésolimbiques
Dans ce contexte, il est intéressant de constater que la ghréline
est capable d’induire une prise
alimentaire lorsqu’elle est injectée dans les structures hypothalamiques régulant la balance énergétique, mais également dans les
structures mésolimbiques de la
récompense, ce qui laisse supposer un rôle de la ghréline dans
ces deux aspects distincts de
la consommation alimentaire.
L’expression du récepteur de la
ghréline dans l’aire tegmentale
ventrale (VTA), structure clé du
système mésolimbique de la récompense, et dans l’hippocampe,
indique là encore que la ghréline
pourrait agir sur la circuiterie de la
récompense pour moduler le comportement alimentaire dans le
but de satisfaire les besoins énergétiques. Ainsi, il a été démontré,
dans une étude d’imagerie cérébrale fonctionnelle, que chez le
volontaire sain, l’administration
361
mise au point
de ghréline par voie intraveineuse
entraînait, en réponse à la présentation d’images alimentaires, une
réponse neuronale dans diverses
zones cérébrales impliquées, dans
la valeur hédonique de l’alimentation, incluant l’amygdale, le cortex
préfrontal, l’insula et le striatum.
La sur-activation du système central de la récompense a été récemment incriminée dans la physiopathologie de l’anorexie mentale
et du syndrome de Prader-Willi,
deux états pathologiques caractérisés par des niveaux élevés de
ghréline systémique (19, 20).
pensatoire du niveau de ghréline.
La perte de poids induite par la
restriction calorique et l’activité
physique prolongée augmente le
niveau de ghréline (21, 22). Toutefois la perte de poids induite par le
by pass gastrique a donné des résultats contradictoires sur les niveaux de ghréline : une augmentation, une diminution, ou l’absence
d’effet. Inversement, la prise de
balance énergétique
poids induite par une suralimentation, la grossesse, un traitement
psychotrope par olanzapine ou
une alimentation riche en graisses
va diminuer les niveaux plasmatiques de ghréline. Toutefois, les
patients obèses porteurs d’un
syndrome de Prader-Willi (PWS)
présentent des taux plus élevés de
ghréline que la population générale. Ces niveaux élevés de ghréline ne chutent pas en réponse à la
prise alimentaire, suggérant leur
participation dans l’obésité et l’appétit insatiable de ces sujets.
La ghréline induit une prise de
poids et l’augmentation de la masse
grasse en stimulant la prise alimentaire (en particulier avec l’ingestion de lipides), en facilitant le
stockage lipidique et en réduisant
la dépense énergétique et l’utilisation des lipides. L’action adipogénique de la ghréline est médiée
au niveau hypothalamique et fait
intervenir à la fois le système mélanocortine et le système nerveux
sympathique efférent indépendamment de la prise alimentaire.
Perspectives
thérapeutiques
cible thérapeutique
pour l’obésité ?
❚❚Des résultats contradictoires
Les niveaux plasmatiques de
ghréline sont inversement corrélés à l’indice de masse corporelle.
En effet, les patients obèses et
anorexiques présentent, respectivement, des taux plus bas
et plus élevés de ghréline plasmatique que les sujets sains.
Les variations pondérales s’accompagnent d’une réponse com362
hibition des taux plasmatiques de
ghréline qui pourraient stimuler
la prise alimentaire et augmenter
la masse adipeuse ne sont pas des
caractéristiques de l’obésité commune. Il est possible toutefois
que l’élévation de la ghréline
en réponse à la restriction calorique et à la perte pondérale
puisse être un des facteurs explicatifs de la reprise pondé-
La ghréline induit une prise de poids
et l’augmentation de la masse grasse
en stimulant la prise alimentaire
❚❚Des résultats encourageants
Ainsi, en dehors de rares exceptions, les niveaux de ghréline sont
abaissés chez les sujets obèses, ce
qui est concordant avec le rôle de
cette hormone dans le maintien
d’une balance énergétique stable.
Il n’est pas indiqué, à ce jour, de
doser la ghréline plasmatique
chez le sujet obèse, en dehors de la
suspicion d’un PWS. Chez le sujet
maigre, le dosage de ghréline plasmatique peut aider à différencier
une maigreur constitutionnelle
d’une anorexie mentale, puisque
la ghrélinémie sera plus élevée en
cas de restriction alimentaire. Une
augmentation ou un défaut d’in-
rale. Ainsi, le positionnement thérapeutique du blocage du système
ghréline pourrait se situer après
la perte de poids, pour limiter la
reprise pondérale généralement
observée et responsable de l’habituel “yoyo” pondéral. La diminution des niveaux de ghréline induite par certaines techniques de
chirurgie bariatrique comme le by
pass gastrique et la gastrectomie
longitudinale en manchon, bien
qu’inconstante dans la littérature,
pourrait participer à la diminution
de l’appétit, à la diminution de la
prise alimentaire et au maintien
du poids perdu à distance de la
chirurgie.
nouvelle cible thérapeutique
pour le diabète de type 2 ?
❚❚Rôle dans la régulation de
l’homéostasie glucidique
Les nombreuses études qui ont été
réalisées jusqu’à présent sur le rôle
de la ghréline dans la régulation
de l’homéostasie glucidique ont
permis d’établir les fonctions suivantes : la ghréline est une hormone hyperglycémiante et cet
effet est indépendant de l’hormone de croissance. En effet, la
ghréline administrée de manière
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La ghréline : physiologie et perspectives thérapeutiques
aiguë induit une hyperglycémie et
une réduction des niveaux d’insulinémie chez l’homme sain, durant
quelques heures (23). L’administration aiguë de ghréline en périphérie
inhibe l’insulinosécrétion glucoinduite par une action directe sur
le pancréas endocrine. En effet,
l’administration in situ de ghréline
sur des pancréas isolés et perfusés
antagoniste des récepteurs de la
ghréline, le GHRP-6, pendant plusieurs jours, la glycémie s’abaisse
et le niveau d’insuline décroît modérément, suggérant que l’antagonisme de GHS-R1a améliore la
sensibilité à l’insuline sur le long
terme (24). Chez ces mêmes souris, la délétion du gène de la ghréline s’accompagne d’une améliora-
La ghréline est une hormone hyperglycémiante
agissant sur l’insulinosécrétion gluco-induite et
sur le niveau de sensibilité à l’insuline.
ne modifie pas l’insulinosécrétion
basale, mais inhibe l’insulinosécrétion induite par le glucose.
Par ailleurs, le blocage du récepteur
de la ghréline, GHS-R1a, associé
à l’immuno-neutralisation de la
ghréline endogène augmente fortement l’insulinosécrétion gluco-induite d’un pancreas perfusé.
tion marquée de l’homéostasie du
glucose à la fois par une élévation
de l’insulinémie et une amélioration de la sensibilité à l’insuline.
Ainsi, pour résumer, la ghréline est
une hormone hyperglycémiante
agissant sur l’insulinosécrétion
gluco-induite et sur le niveau de
sensibilité à l’insuline.
❚❚Action sur le niveau
de sensibilité à l’insuline
A côté de cet effet direct de la ghréline sur le pancréas endocrine,
plusieurs études ont également
rapporté chez l’homme comme
chez le rongeur une altération
de la sensibilité à l’insuline en
réponse à l’administration de
ghréline, indépendamment des
niveaux de GH. Ainsi, quand les
souris ob/ob, modèle génétique
d’obésité et de diabète avec insulinorésistance, sont traitées par un
❚❚Une action prometteuse
La diminution de la production
de ghréline active (par exemple
en bloquant l’enzyme GOAT qui
permet son acylation) ou encore
l’antagonisme du récepteur de la
ghréline sont des voies thérapeutiques prometteuses pour la pharmacologie du diabète de type 2.
l’attention du monde scientifique
sur la dernière décade compte
tenu de son rôle de premier plan
dans la régulation de la prise alimentaire. Elle reste la seule substance plasmatique à posséder une
action orexigène. La découverte
de l’absence d’anomalie significative de régulation de la ghréline
chez les sujets obèses, comme ce
fut le cas pour la leptine, a déçu
les premiers espoirs portés par
la découverte de cette hormone
pour le traitement de l’obésité. La
place des modulations pharmacologiques du système ghréline dans
la prise en charge des problèmes
pondéraux (obésité, anorexie,
cachexie) reste toutefois un sujet d’actualité. Par ailleurs, le rôle
émergeant de la ghréline dans la
régulation physiologique de l’homéostasie du glucose ouvre, pour
les années à venir, de nouvelles
perspectives thérapeutiques pour
le diabète de type 2. n
Mots clés :
Régulation, Prise alimentaire, Effet
Conclusion
La ghréline est une hormone de
découverte récente qui a focalisé
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orexigène, Récompense alimentaire,
Growth Hormone Secretagogue Receptor-1a, Hormone hyperglycémiante
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mise au point
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