Ecocongo • 3
Agriculture • Société
Le canard se prépare au naturel, braisé, fumé,
boucané ou encore faisandé. Cette dernière
manière le rend, selon les amateurs, très
proche de la viande de gibier.
Le magret (= filet de viande « maigre »,
composé de deux parties, correspondant au
« blanc » du poulet) est le morceau le plus
populaire et le plus noble du canard, au vu
des recettes qui lui sont consacrées dans la
cuisine du monde entier.
Sa cuisson doit être de préférence « sèche »
afin d’en préserver le caractère particulière-
ment tendre et toutes les qualités organolep-
tiques : saisir à feu vif dans l’huile puis conti-
nuer la cuisson à feu doux pendant 15 minutes
afin de l’obtenir « bien cuit », comme on aime
ici manger la viande.
Mais en cuisine familiale, la manière la plus
courante d’accommoder le canard est la
préparation en sauce, typique de la tradition
culinaire congolaise.
Ainsi, le canard fumé à la sauce moambe
(mosaka) est un plat très raffiné, alliant à la
saveur de la chair imprégnée de pulpe de noix
de palme, un subtil arrière-goût de feu de
bois.
Les étapes sont en général
les suivantes :
• Découper la viande en morceaux (de 15
à 20) ;
• Certaines cuisinières enlèvent en partie
la fine membrane transparente située
entre la peau et la chair, accusée de
donner un goût amer au plat ;
• Faire mariner (si ce n’a déjà été fait
avant la réfrigération) dans un mélange
d’ingrédients pilés, mixés ou finement
découpés (sel, poivre, ail, oignon,
muscade, laurier, ciboulette, céleri,
piment…) ;
• Faire bouillir à feu doux dans un peu
d’eau ou autre liquide selon la recette
(bière, vin de palme…) ;
• Préparer la sauce à part. Il y en a de
nombreuses variantes : sauce tomate,
moambe, à l’aubergine, au basilic, au
gingembre, au céleri, à la pâte d’ara-
chide pimentée, aux légumes, à l’oseille,
à la graine de courge… ;
• Retirer les morceaux du bouillon, les
sécher et griller rapidement dans l’huile
ou les braiser (cette opération a parfois
lieu avant de faire bouillir la viande) ;
• Ajouter la viande à la sauce et finir la
cuisson.
Tout l’art de la cuisinière est d’apprécier
la durée de ces différentes étapes en fonc-
tion notamment de l’âge de l’animal (jeune,
adulte, réformé), du sexe, afin d’obtenir une
viande à point, ni trop dure ni trop désagré-
gée.
On rencontre dans les familles encore d’autres
façons d’accommoder le canard : farci, en
liboké, en brochette…
Les ailes grillées et coupées en 3, les cou,
gésiers peuvent servir à confectionner des
amuses-gueule sortant de l’ordinaire pour
l’apéritif.
Il est à noter que en RDC, contrairement
à d’autres régions du monde, on apprécie
moins le canard dans des plats de type sucré-
salé.
Les éleveurs doivent apprendre à découper et
transformer correctement leurs produits pour
mieux les valoriser étant donné les faibles
prix des canards vendus sur pied (5 à 7 $ en
moyenne).
Ainsi, des canards ou canettes entiers, au
naturel ou fumés, nettoyés, vidés, emballés
ou en morceaux bien présentés (magrets,
cuisses, ailes, abats…) pour la vente au niveau
de restaurants, de grandes surfaces ou direc-
tement du producteur au consommateur, per-
mettraient d’apporter une importante plus
– value à la production.
La préparation de plats préparés en portions
à vendre sur les marchés (braisé, grillés, en
sauce…), dans les restaurants de rue, sont
autant de voies de diversification à explorer
pour l’avenir.
Le canard permet aussi de confectionner des
charcuteries particulièrement appréciées par
tous ceux qui les ont goûtées : pain de viande,
hamburgers, boulettes, saucisses fraîches,
sèches, piquantes, saucisson de Paris et « bou-
din », pâté, confits…et bien entendu foie gras.
Ainsi différents ateliers à Kinshasa et dans
le Bas – Congo (d’une capacité de 1000 têtes
de canard par jour) pourraient produire des
charcuteries mixtes (porcs/volaille) pour
autant qu’une production locale continue et
de bonne qualité les approvisionne en matière
première.
Le travail des éleveurs doit obligatoirement
se professionnaliser et s’organiser en filière(6)
avec l’amont et l’aval afin de satisfaire, à prix
compétitif, une clientèle soucieuse de qualité
et de concurrencer les importations de pro-
duits congelés bas de gamme.
Il ne fait aucun doute que dans un avenir
proche cette spéculation prendra peu à peu
son essor car des débouchés réels existent
à Kinshasa, un marché potentiel de plus de
7 millions d’habitants. Pour que ceux qui ont
choisi le canard comme moyen d’existence
puissent en vivre dignement…
(6) Troupeaux et Cultures des Tropiques, numéro 2
spécial volailles, décembre 2003.