
3
« Ces documents ont été rédigés par un Comité Pédagogique Indépendant et validés par le Comité Scientifique de La Revue du Praticien,
publication éditée par Global Média Santé ».
Un homme de 45 ans est adressé aux urgences par son médecin traitant pour une altération de l’état général associée à des
douleurs lombaires intermittentes latéralisées du côté gauche évoluant depuis plusieurs mois. En effet, le patient a constaté
que son appétit s’amenuisait progressivement, ce qui a entraîné une perte progressive de 5 kg au cours des deux derniers
mois. Depuis bientôt quinze jours, il a de surcroît une fièvre oscillante mais capable de monter jusqu’à 39 °C. Il a pour
principaux antécédents un tabagisme actif à 30 PA et un diabète de type 2 traité par metformine 500 mg 2 cp/j, son indice
de masse corporelle est à 31. À l’examen clinique, le patient est pléthorique et présente un contact lombaire gauche ainsi
qu’une douleur à l’ébranlement de la fosse lombaire gauche accompagnée d’une fièvre à 38,5 °C. Le bilan biologique réalisé
en urgence est le suivant : GB = 12 000, Hb = 8,3 g/dL, plaquettes = 450 000, CRP = 200, créatininémie = 98 µµmol/L, débit
de filtration glomérulaire = 85 mL/min. La bandelette urinaire met en évidence trois croix de sang, leucocytes et nitrites
négatifs, et l’examen direct de l’ECBU est négatif.
QUESTION 1 Quelle urgence thérapeutique devez-vous éliminer en première intention chez ce patient ? Justifiez votre
réponse.
Devant une douleur lombaire fébrile associée à un syndrome inflammatoire biologique marqué, il est indispensable d’éliminer
en urgence une pyélonéphrite obstructive, surtout chez un patient diabétique. Il faudra donc réaliser une échographie rénale
de première intention à la recherche d’une dilatation des cavités pyélocalicielles et d’un éventuel obstacle sur la voie
excrétrice urinaire supérieure. La BU ou l’ECBU négatif n’élimine pas le diagnostic de pyélonéphrite obstructive, puisque les
germes peuvent se retrouver bloqués en amont de l’obstacle lorsque la pyélonéphrite est à proprement parler réellement
obstructive.
L’échographie rénale réalisée en urgence met en évidence une volumineuse masse tissulaire du rein gauche sans autre
anomalie associée.
QUESTION 2 Quelle est votre principale hypothèse diagnostique ? Quelle est la forme histologique la plus fréquente ?
La principale hypothèse diagnostique devant une masse tissulaire du rein est un cancer du rein (carcinome à cellules rénales).
Le principal type anatomopathologique est le carcinome à cellules claires (80 %). Pour information, les autres types sont le
carcinome papillaire de type 1 et 2 (15 %) et le carcinome chromophobe (4 %). Il existe un quatrième type histologique beaucoup
plus rare : le carcinome de Bellini (1 %). Les principaux diagnostics différentiels sont les tumeurs bénignes du rein : l’oncytome ou
l’angiomyolipome.
QUESTION 3 Quels sont les arguments cliniques présents dans l’énoncé et à rechercher en faveur de ce diagnostic,
et comment complétez-vous votre bilan paraclinique ?
Un examen clinique comprend systématiquement un interrogatoire et un examen physique.
À l’interrogatoire, il faut rechercher les facteurs de risque de cancer du rein comme le tabac, l’obésité, l’HTA, l’hémodialyse et
surtout chez ce jeune patient les maladies génétiques (la maladie de von Hippel-Lindau et la sclérose tubéreuse de Bourneville).
En effet, le terrain du cancer du rein reste l’homme de plus de 50 ans, et il n’est donc exceptionnel de développer cette pathologie
à 45 ans.
Le cancer du rein est souvent découvert de manière fortuite mais peut parfois être symptomatique, surtout au stade
métastatique. Les principaux symptômes sont alors l’AEG et la triade hématurie-douleur lombaire-contact lombaire.
L’examen physique des fosses lombaires doit être bilatéral et comparatif. Au cours de l’évolution naturelle d’un cancer du rein
gauche, une varicocèle gauche peut apparaître rapidement. Elle est liée au développement d’un thrombus de la veine rénale
gauche venant bloquer le retour veineux de la veine génitale gauche. En effet, la veine génitale gauche s’abouche directement
dans la veine rénale gauche alors que du côté droit elle s’abouche dans la veine cave.
Il existe de nombreux syndromes paranéoplasiques au cours du cancer du rein : fièvre, polyglobulie, syndrome de Stauffer
(cholestase anictérique sur hépatomégalie non métastatique), HTA, hypercalcémie.
Drs Marc-Antoine Rousseau et Morgan Rouprêt
Rédaction - novembre 2013
Dossier n° 4
GRILLE DE CORRECTION DU DOSSIER N° 4
04_ROUSSEAU/ROUPRET:Mise en page 1 15/11/13 11:24 Page 3