Réhabilitation cognitive Exemple de la négligence spatiale unilatérale DÉFINITION : Selon Heilman (1979, 1993), la négligence unilatérale correspond à « l’incapacité de rendre compte de, de répondre à ou de s’orienter vers des stimuli nouveaux ou signifiants présentés du côté opposé à la lésion cérébrale, sans que ce trouble puisse être attribué à un déficit sensoriel ou moteur. » - Cette incapacité concerne l’hémiespace et l’hémicorps contralésionnels. - Une Hémianopsie Latérale Homonyme (HLH) peut s’y associer mais elle n’est « ni constante ni nécessaire » (Hecaen, 1972). Le syndrome de négligence unilatérale est un trouble de l’utilisation et de la conscience de l’espace comprenant : - Un manque de prise en compte des informations sensorielles concernant la partie de l’espace contralésionnel (généralement hémiespace gauche suite à une lésion de l’hémisphère droit). (déficit perceptif & attentionnel) - Une diminution des actions réalisées dans l’espace contralésionnel (ralentissement, amplitude réduite). (déficit moteur & attentionnel) - Des manifestations comportementales associées à l’altération de la conscience des perturbations (déficit cognitif & représentationnel) LOCALISATIONS LÉSIONNELLES: La négligence unilatérale est plus généralement due à une lésion postérieure de l’hémisphère droit (HD). Parietal Lobe: Anatomy + right inferior parietal lobule: involved in conscious perception of ‘where’ (as suggested by U & M) + bilateral superior parietal lobule: involved in unconscious visual guidance of action (‘how’) (as suggested by G & M) IPL: inferior parietal lobule SPL: superior parietal lobule SMG: supramarginal gyrus AG: angular gurus Perception inconsciente : FORMES CLINIQUES: 1) La négligence extrapersonnelle 3) La négligence personnelle et l’asomatognosie 4) La négligence motrice 5) La négligence représentationnelle 5) Les troubles associés : Anosognosie : absence de conscience du trouble. Anosodiaphorie : indifférence à l’égard des troubles. Asomatognosie : hémicorps contralésionnel non reconnu comme sien. Extinction : si 2 stimuli sont présentés de manière bilatérale, le stimulus controlatéral ne sera pas détecté, il sera « éteint ». Allochirie / alloesthésie : les perceptions subissent un déplacement ispsilésionnel. Perturbations oculomotrices : déviation de la tête et des yeux vers le côté lésé. La négligence unilatérale constitue un facteur de mauvais pronostic qui retarde la récupération d’une autonomie comportementale. Held et al. (1975) : 342 patients hémiplégiques (218 droits pour 124 gauches) Reprise de la marche sans après six mois d'évolution dans 80% des cas d'hémiplégie droite et seulement 67% des cas d'hémiplégie gauche. Même sévérité du déficit sensori-moteur mais des perturbations visuo-spatiales et de l'image corporelle associés au déficit moteur. Denes et al. (1982) : 2 groupes de 24 patients hémiplégiques (droits et gauches), Différence de récupération dans les deux groupes corrélée au syndrome de négligence spatiale gauche. Ainsi, les troubles de la cognition spatiale, et en premier lieu la négligence unilatérale constituent un facteur prédictif de mauvais pronostic fonctionnel. MODÈLES THÉORIQUES : 1) Les hypothèses attentionnelles : Heilman (1993) La négligence unilatérale serait due à l'interruption d'une boucle cortico-cingulo-réticulaire qui assurerait au niveau de chaque hémisphère cérébral le contrôle de l'hémiespace controlatéral aussi bien pour les aspects attentionnels qu'intentionnels du comportement. Selon cette hypothèse, le rôle prédominant de l'hémisphère droit dans la perception de l'espace controlatéral mais également ipsilatéral rendrait compte de la fréquence, de la sévérité et de la persistance du syndrome de négligence spatiale unilatérale par atteinte hémisphérique droite, l'hémisphère gauche n'assurant l’intégration que de l'espace controlatéral. HG HD Lésion Kinsbourne (1987, 1993) Ce modèle ne repose pas sur une dichotomie droite/gauche mais se fonde sur l’existence d’un gradient attentionnel spatial. Chaque hémisphère générant un vecteur attentionnel horizontal dirigé vers l’espace controlatéral ainsi qu’une inhibition mutuelle réciproque. En cas de lésion droite l’équilibre de la balance interhémisphérique est rompu libérant ainsi un gradient attentionnel vers l’espace ipsilésionnel. (HG>HD). La négligence unilatérale pourrait s’expliquer par l’existence d'un déséquilibre entre deux vecteurs attentionnels. Balance interhémisphérique HG HD Lésion Posner (1980) La négligence spatiale pourrait s’expliquer par un défaut de désengagement de l'attention sélective spatiale du côté ipsilatéral à la lésion vers le côté opposé. 2. L’hypothèse pré motrice Rizzolatti (1987) La négligence unilatérale pourrait être consécutive à l'interruption d'un réseau de neurones impliqué dans le traitement d'informations issues d'une partie de l'espace et utilisées pour l'action. Cette hypothèse est appelée aussi théorie pré motrice de l’attention. Selon cette hypothèse, la négligence spatiale pourrait ainsi résulter d’une atteinte de ces systèmes prémoteurs, nécessaires à l’action, à un haut niveau cognitif impliquant l’attention et l’intention. Cette théories ne permet pas d’expliquer l'existence de dissociations dans les symptômes de négligence spatiale. 3. Les hypothèses représentationnelles Bisiach (1979) L’espace réel ou imaginé est représenté de façon symétrique dans chacun des 2 hémisphères Une lésion unilatérale détruit alors la représentation de l’espace controlatéral. Ici, il ne s’agit plus de trouble attentionnel mais de représentation perceptive controlatérale dégradée (l’expérience du Dôme de Milan, trouble de la représentation interne de l’espace controlatéral à la lésion). Toutes ces constructions reposent sur l’utilisation d’informations sensorielles externes ou mnésiques. Selon ces auteurs, cette théorie permettrait de proposer une conception unitaire de syndrome de négligence unilatérale et des troubles classiquement associés, comme l’anosognosie et certaines manifestations productives, telles que l’allochirie et les propos confabulatoires concernant l’hémicorps gauche (délire somatoparaphrénique). Les hypothèses référentielles Jeannerod (1984) Déficit de la référence égocentrée. Les sujets héminégligents gauches présentent souvent une déviation du droit devant du côté de la lésion cérébrale. Cette déviation pourrait entraîner des biais attentionnel, représentatifs et perceptifs. ÉVALUATION Les épreuves visuo-graphiques : Les tests de barrage : barrages de Mesulam (A, cercles étoilés), barrage de cloches, test d’Albert. Test de bissection de lignes : Schenkenberg (1980) Tests de dessins : figure de Rey, copie de la frise d’Ogden, dessins symétriques. Ou dessins spontanés. Examen de l’écriture : écriture dictée. Lecture Husain et al. (2001). Eye movements of a patient with profound hemi-spatial neglect in a search task for T targets. The patient also indicated every new target found with a mouse-click, and made many erroneous clicks during the scan sequence. ÉVALUATION : Exemple de dysgraphie de négligence : « Monsieur Martin est parti à Paris dimanche matin. Il a pris le train pour se rendre dans la capitale. Sa femme l’a accompagné en voiture à la gare. Il se rendait au salon de l’automobile. Il est en effet directeur d’une agence commerciale. Mais il s’est aperçu dans la voiture qu’il avait oublié ses documents. Il a donc été obligé de revenir à la maison chercher ses papiers. Heureusement il possède une voiture rapide et sa femme conduit bien. Il est arrivé à Paris à temps pour se rendre au salon. La foule était nombreuse à l’arrivée des taxis… » Bisiach and Luzzatti, 1978 Rééducation de la NSU 1. Techniques traditionnelles: le réentraînement de l’exploration visuelle - Indices à gauche (point d ’ancrage visuel) - Diminution progressive de l ’intensité des indices - Feed-back pour favoriser la prise de conscience Limites de la rééducation de l’exploration visuelle - Tâche assez contraignante pour attirer le regard vers la gauche - Peu de généralisation: effet souvent limité à des situations proches des - tâches utilisées en rééducation - Pas de base théorique explicite - Ne prend pas en compte la diversité du déficit - Ne s ’adresse qu’à l’orientation volontaire de l ’attention 2. Manipulations sensorielles (galvanique) 3. Stimulations caloriques vestibulaires 4. Vibrations des muscles du cou à gauche 5. Rotation du tronc vers la gauche (tête droite) 6. Stimulation optokinétique Conclusion: amélioration des symptômes, mais pas d’effet à long terme