Journal Identification = IPE Article Identification = 1057 Date: May 3, 2013 Time: 11:55 am
Classifications : sœurs et rivales. Enjeux pour la pédopsychiatrie
Les tableaux de correspondance précédents répondaient
au souci de préserver la communication internationale et
pouvait se concevoir car la CIM-10 et la CFTMEA ont en
commun des critères épistémologiques [29] : la sémiolo-
gie du comportement, la fréquence des regroupements de
symptômes et la notion de développement psychologique.
Pour la CFTMEA R-2012, il a été décidé de parvenir
à une correspondance terme à terme entre ses codes et
ceux de la CIM-10 dont l’utilisation est obligatoire pour
le recueil de données d’activités des établissements. Les
versions précédentes proposaient parfois plusieurs codes
CIM-10 à associer entre eux [22] pour correspondre à
un seul code CFTMEA [3]. Outre que l’usage était mal-
commode, cette disposition empêchait toute intégration
de la correspondance dans les programmes informatiques,
puisque ici le langage est binaire. En proposant la version
R-2012, l’objectif est que les praticiens qui le souhaitent
conservent leurs références théoriques sur la psychopatho-
logie et que la traduction en code CIM soit automatiquement
fournie par le programme informatique.
Peut-on penser que deux classifications aussi différentes
que la CIM-10 et la CFTMEA puissent être mises en cor-
respondance avec quelque validité ? Bien évidemment, une
classification des troubles et une classification des organisa-
tions psychiques ne seront jamais totalement superposables
et si tel était le cas, elles n’auraient aucune raison de sub-
sister toutes les deux. On peut donc s’attendre à recevoir
des avis d’utilisateurs sur leur difficulté à accepter telle ou
telle correspondance proposée. Ces réactions sont attendues
afin que la pertinence des remarques ayant été retenue, elles
donnent lieu aux prochains aménagements qui devraient
prolonger le travail que Roger Misès animait encore il y
peu.
Le groupe3qui a travaillé sur cette version a collaboré
avec l’Agence technique d’information hospitalière (ATIH)
qui l’a d’ores et déjà intégrée dans les documents qu’elle
propose sur son site. Il ne reste plus à franchir qu’une étape,
celle de l’intégration dans les programmes informatiques
qui sont utilisés pour les dossiers patients.
Avec la correspondance réalisée pour l’axe II, c’en est
fini de chercher dans la CIM entière les facteurs que l’on
estiment devoir retenir, et il n’y a pas d’exclusion entre eux,
un même patient peut cumuler des antécédents de patholo-
gie somatique néonatale, un placement en famille d’accueil
et un parent malade, tous indicateurs qui ne sont pas des
comorbidités.
Axe I et axe II conjugués accompagnent une démarche
diagnostique intégrant les interactions circulaires entre
facteurs individuels, familiaux, somatiques et environne-
mentaux.
3Dr M. Botbol, Pr C. Bursztejn, Drs Y. Coinc¸on, B. Durand, J. Garrabé,
N. Garret-Gloanec, Prs B. Golse, P. Jeammet, R. Misès, Dr C. Portelli, Pr
J.P. Raynaut et G. Schmitt, Dr J.-P. Thévenot.
Il n’a été question jusqu’ici que de la pratique auprès des
patients, du choix diagnostique et du repérage des facteurs
associés et/ou d’environnement.
Mais l’incidence de cette nouvelle version pour les
études épidémiologiques et pour les recherches n’est pas
à négliger car le cumul de tous les items de l’axe II pour
tous les cas inclus garde toute sa validité et prend toute sa
valeur pour affiner les connaissances sur ces pathologies,
leur contexte de développement et l’épidémiologie.
L’élaboration de cette dernière version a eu un autre
objectif : celui de poursuivre les articulations avec l’OMS en
cette période sensible de révision de la CIM-10 pour, d’une
part, contribuer à l’élaboration du consensus et, d’autre part,
tenter de faire prendre en considération les caractéristiques
particulières de la psychiatrie infantojuvénile.
Avec le DSM et la CIM
Ils reposent sur un principe descriptif. Ils proposent au
praticien de procéder à une recension de signes compor-
tementaux, considérés comme assez objectifs pour être
observés par des professionnels de la santé, des parents,
des enseignants, voire le patient lui-même, pour obtenir leur
inclusion dans un « trouble ». Ce procédé de case à cocher
pour parvenir à identifier un « trouble » réalise un déni de
la complexité des personnes et de leur psychisme. Celui-ci
n’est rapporté ni à l’âge du patient, ni aux circonstances
d’apparition des signes. Par cet abord des faits cliniques, il
fait fi de l’épigenèse, regroupe les manifestations cliniques
en catégories ignorant toutes dimensions tempéramen-
tales, hormonales, environnementales, sociologiques...
dont l’influence sur le développement individuel est, pour
beaucoup de pédopsychiatres franc¸ais, indispensable à
considérer. Le risque majeur d’une pratique basée sur ce
point de vue est que le malade disparaisse derrière sa
maladie. Peu importent les circonstances d’apparition du
« trouble », et celles de la vie du patient. Cet aspect était
très prégnant dans le rapport de l’Inserm sur le « Trouble
des conduites ». Dès trois ans, un enfant qui peut sans
remord s’approprier les jouets des autres ou pire lever la
main sur eux, et qui plus est mentir court le risque de se
voir qualifier « à risque » d’être porteur de ce trouble et à
terme délinquant, et doit être l’objet d’une attention par-
ticulière, voire d’un traitement. Quel enfant de trois ans
ne répond pas, peu ou prou, à ces critères ? Est-on pré-
venu contre les enfants potentiellement dangereux ou nous
demande-t-on de faire une prévention prévenante envers les
personnes ?
Sorties de leur contexte d’apparition, les manifestations
cliniques peuvent non pas s’articuler entre elles témoignant
de l’intrication de tous les éléments du développement, mais
devenir des pathologies associées. Un enfant gêné dès les
premiers apprentissages par sa dyslexie d’apparition pré-
coce, assez perspicace pour observer comment ses petits
L’INFORMATION PSYCHIATRIQUE VOL. 89, N◦4 - AVRIL 2013 315
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