conseil à l’officine Les brûlures PAR DAVID PAITRAUD Simples bobos ou accidents graves mettant en jeu le pronostic vital, les brûlures entrent, hélas, dans le palmarès des accidents domestiques CAS DE COMPTOIR Le contexte Une patiente, à la peau claire, se présente à l’officine et vous montre ses coups de soleil sur les deux pieds, qui la font souffrir. Elle n’a pas mis de crème à cet endroit. Les questions à poser PHOTO PHANIE Observez bien la brûlure avant de proposer un produit. Pensez à l’état général de la victime en lui demandant si elle a mal à la tête, envie de vomir, de la fièvre. Rappelez-lui de s’hydrater, de ne pas s’exposer aux heures les plus chaudes. Demandez-lui quelle crème solaire elle utilise. Les enfants, premières victimes des brûlures domestiques Quelques définitions Les brûlures sont des accidents courants de la vie quotidienne, en particulier chez les plus jeunes ; un brûlé sur trois est un enfant. Les brûlures sont des lésions des tissus engendrées par la chaleur (air chaud, eau bouillante, vapeur d’eau, flamme, soleil), par un frottement, par l’électricité, ou encore par un produit caustique. Le tissu le plus exposé est la peau. Selon la cause de la brûlure, sa localisation, l’étendue et la profondeur, on distingue plusieurs degrés de gravité. Les brûlures bénignes se caractérisent par des lésions peu étendues (moins de 2 % de la surface corporelle, soit la taille d’une main), du premier et du deuxième degré superficiel, ne touchant ni la face, ni le siège, ni les mains. Leur traitement peut relever du conseil officinal. Attention ! Si la cicatrisation n’est pas obtenue au bout de dix jours, une consultation est obligatoire. Les brûlures de gravité intermédiaire correspondent soit à des brûlures peu étendues, mais profondes, ou siégeant au niveau du visage, du siège ou des mains, soit à des brûlures dont l’étendue dépasse 2 % de la surface corporelle, mais reste inférieure à 10 % de celle-ci. Il n’existe pas de lésions respiratoires (pas d’inhalation de fumée), ni de risque particulier. Ce type de brûlures nécessite un avis médical, voire une hospitalisation, dans une structure spécialisée. On considère qu’une brûlure est grave si l’étendue (entre 15 et 50 % de la surface corporelle) et la profondeur (deuxième et troisième degré) entraînent un risque vital, risque qui peut aussi être le fait de lésions pulmonaires, par inhalation de fumée, d’un blast (explosion de gaz), de l’origine de la brûlure (brûlures électriques, brûlures chimiques), ou d’un traumatisme associé. Les brûlures très graves sont en majorité des lésions profondes, dont la surface dépasse 50 % de la surface corporelle. L’âge est un fac- fréquents. Savoir évaluer leur gravité et connaître les premiers gestes à réaliser permet d’éviter des complications désastreuses. teur de gravité. Une brûlure, même peu étendue, est toujours grave chez une personne âgée. Prévention : à dire et à redire – Ne pas laisser son enfant approcher d’une source de chaleur (cuisinière, four, cheminée, barbecue). – Placer les casseroles contenant les éléments chauds hors de portée des enfants, en tournant le manche vers le mur. – Vérifier la température de l’eau du bain. – Ne pas boire de liquide chaud avec un enfant sur les genoux. – Ne pas allumer ou rallumer un feu, en particulier le barbecue, avec de l’alcool à brûler ou de l’essence. – Ne pas fumer en présence de substances inflammables. – Respecter les consignes d’utilisation des réchauds, des radiateurs, des fers à repasser, des fers à souder... – Ne pas effectuer de branchements électriques sans avoir coupé l’arrivée d’électricité. – Tenir hors de portée des enfants les produits ménagers (acide ou soude). – Prévoir des compresses stériles, du tulle gras, un produit désinfectant, dans la pharmacie familiale. Un peu de physiopathologie Selon la profondeur de la lésion, on distingue trois degrés d’atteinte. Le premier degré se manifeste par un érythème douloureux sans phlyctènes. Le phlyctène correspond au soulèvement de l’épiderme constitué par une accumulation de sérosité. Seul l’épiderme est atteint. La cicatrisation spontanée se fait en deux ou trois jours sans aucune séquelle. Le deuxième degré s’identifie par l’apparition de phlyctènes. Parmi les brûlures du deuxième degré, on distingue la brûlure superficielle et la brûlure du deuxième degré profond. La brûlure superficielle du deuxième degré génère une douleur intense. Elle peut guérir sans laisser de cicatrice, en une ou deux semaines. La brûlure du deuxième degré profond se remarque au soussol blanc de la peau, piqueté de rouge. La brûlure s’épidermise au bout de plusieurs semaines et entraîne des cicatrices. Elle est modérément sensible. La brûlure du troisième degré provoque une nécrose qui détruit l’épiderme. La peau est blanche ou brune, sèche, sans phlyctènes. Les fibres nerveuses étant détruites, la zone blessée a perdu sa sensibilité. Le blessé ne ressent plus la douleur. Le réseau veineux sous-cutané apparaît. Aucune cicatrisation spontanée ne peut se faire et il faut recourir à l’acte chirurgical (une greffe de peau). La brûlure, lorsqu’elle est étendue, entraîne de pro- fonds déséquilibres de l’homéostasie qui peuvent mettre la vie du patient en danger. En pratique, ce n’est que pour les brûlures du deuxième ou du troisième degré, dont la surface dépasse 10 % de la surface corporelle, que les problèmes se posent. Ces problèmes sont tout d’abord d’ordre hydroélectrolytique, avec une plasmorragie (fuite du plasma) importante. Il en résulte la formation d’un œdème et une hypovolémie, dont la compensation doit être prise en charge prioritairement. La dénaturation des protéines entraîne une réaction en cascade provoquant la libération de médiateurs de l’inflammation (histamine, cytokines…) et de produits oxydants (oxyde nitrique). Les brûlures étendues entraînent des perturbations métaboliques de type hypermétabolisme. Les besoins caloriques peuvent être multipliés par plus de deux. Cet hypermétabolisme est lié aux pertes de chaleur (perte de l’isolant cutané) et à la sécrétion massive d’hormones calorigènes (glucagon, cortisol), en réponse au stress. Enfin, la barrière cutanée étant dé- QUELQUES PRODUITS POUR TRAITER LES BRÛLURES* PRODUIT PRÉSENTATION COMPOSITION PPHT FABRICANT Velpeau Activ pansement hydrocolloïde Tricostéril pansement extensible Tulle hydrocolloïde Urgo Tulle gras Boîte de 5 (5 cm x 5 cm) En bande ou pansement Carboxyméthylcellulose (CMC) 3,85 euros Chlorure de benzalkonium De 1,82 à 3,04 euros Lohmann Rauscher Medical Polive Boîtes de 4 ou 6 tulles (5 cm x 5 cm ou 8 cm x 8 cm) Boîtes 10 (10 cm x 10 cm ou 10 cm x 20 cm) Boîte de 6 CMC 4,82 ou 5,78 euros Urgo soins et santé Polyvidone iodée 3,51 euros Meda Pharma Trolamine 4,51 ou 6,02 euros Brulex Emulsion en flacon pompe (50 ou 150 ml) Pommade en tube de 30 g 2,93 euros Calagel Cicaderma Cicatryl Dalibour Gel en tube de 50 ml Pommade en tube de 30 g Pommade en sachets-doses (14) Pommade en tube de 25 g 3,58 euros 3,85 euros 3,78 euros 2,96 euros Bailleul Boiron-Dolisos UCB Pharma Merck Médication familiale Dexeryl Mercurescéine Gifrer Nisacalm Septiapaisyl Septivon Spray Fletagex Flammazine Crème en tube de 50 g Flacon de 45 ml Crème en tube de 50 ml Flacon de 75 ml Flacon pressurisé de 75 ml Pommade en tube de 30 g Crème en tube de 50 g Oxyde de zinc, phénazone, baume du Pérou, phénol, sodium salicylate Calamine, oxyde de zinc Calendula, millepertuis, millefeuille… Chlorocrésol, vitamine E… Sulfate de cuivre, de zinc, oxyde de zinc, camphre Glycérol, vaseline, paraffine liquide Mercurescéine Thymol, salol, lévomenthol Chlorhexidine digluconate Chlorhexidine digluconate Huile de foie de morue Sulfadiazine argentique Johnson & Johnson Consumer France Bailly creat 1,78 euro 2,71 euros 3,14 euros 3,94 euros 3,85 euros 3,91 euros 3,86 euros Pierre Fabre santé Gifrer Barbezat Mayoli Spindler Merck Médication familiale Omega Pharma Santé Dermophil indien Solvay Pharma Bétadine compresses imprégnées Biafine Vaseline Solvay Pharma * Liste non exhaustive réalisée avec le concours du centre de documentation Sopharmex du groupe Alliance Healthcare. 4 - LE QUOTIDIEN DU PHARMACIEN - N° 2506 - JEUDI 12 JUILLET 2007 - www.quotipharm.com truite, le risque d’infection est augmenté. Les infections constituent très souvent une complication des brûlures. Les mots du conseil Confronté à une brûlure, il est avant tout nécessaire d’en définir la gravité avant d’entreprendre les premiers gestes. Urgence oblige, le diagnostic devra être rapide. Devant une brûlure sans douleur, une brûlure étendue ou une brûlure touchant les mains, le visage ou le siège, la prise en charge sera médicale. Si la brûlure est grave, un premier geste à entreprendre consiste à rafraîchir les lésions avec de l’eau pendant 10 à 15 minutes. L’eau du robinet convient. L’eau permet d’atténuer la douleur, de protéger la brûlure, en évitant de percer la cloque. De plus, dans le cas d’une brûlure par un produit chimique, l’eau froide permet de limiter l’extension en taille et en profondeur de la plaie. Il ne faut surtout pas retirer les vêtements qui adhèrent à une zone brûlée. En revanche, les bijoux ou les chaussures du membre brûlé sont à retirer, si possible, ces objets pouvant gêner la circulation du sang. La brûlure sera ensuite recouverte d’un tissu propre et humide, non pelucheux, pour éviter qu’elle ne se salisse. Il ne faut surtout pas utiliser de coton hydrophile. Les brûlures causées par l’électricité ou par un produit caustique nécessitent, elles aussi, une prise en charge médicale. Les brûlures bénignes ou de gravité moindre sont beaucoup plus fréquentes à l’officine. Devant ce type de brûlure, il faut laisser la zone brûlée sous l’eau quelques minutes. Si des cloques apparaissent, celles-ci ne doivent pas être percées. Ces cloques sont en effet stériles et protègent la lésion. Il est ensuite important de désinfecter la brûlure avant d’y appliquer une crème hydratante. Un pansement gras ou un pansement hydrocolloïde permettront ensuite de protéger la plaie. Si la douleur est importante, conseiller un antalgique de type paracétamol. Après avoir prodigué les soins, il est important de demander au patient l’état de ses vaccinations. En effet, la brûlure est une plaie. S’il