Revue de la Fédération Française de Rhumatologie
Le
humatologue
Etudes 2006-2007 : les points forts
14e Congrès de la Société
Européenne de Rhumatologie
Pédiatrique : les temps forts
JURIDIQUE
L’erreur de diagnostic
SOCIO-PRO
URML et EPP
à quand la fin
des O.G.M. ?
FMC
N° 64 / DECEMBRE 2007
IMAGERIE
Cas clinique
Lancer le traitement de la PR :
la fenêtre d’opportunité
FMC-EPP : CAHIER CENTRAL
DÉTACHABLE DE LA FFR
INDUSTRIE
Les nouvelles
Editorial : une histoire horrible...
Éditorial
our une belle fête, c’était une belle fête, la fête à Mamie. Dès l’après-midi,
le ballet des traiteurs, des euristes, des installateurs de mobilier avaient formé
une ronde incessante, disposant avec art partout dans la propriété la multitude
d’accessoires nécessaires à la cérémonie. Puis les musiciens s’étaient installés sur
l’estrade, et après quelques essais plutôt amusants, ils jouaient sans faiblir ni discontinuer des
airs entraînants, des valses, des tangos, tout ce qu’il faut en matière de vieille musique pour
vous faire tourner la tête et oublier jusqu’à l’objet même des réjouissances. Emerveillé par
tant de décorum, j’allais d’une salle à l’autre, me retenant de toucher ici une pièce montée
gigantesque, une pyramide de ûtes à champagne prêtes à être remplies en cascade, ou encore
de magniques corbeilles de eurs et de fruits disposées un peu partout. Peu à peu les invités
arrivaient, accueillis par mes parents en tenue de cérémonie, tout sourire et bien droits sous le
portrait grand format du Président Shark : ambassadeurs, députés, capitaines d’industrie, hauts
fonctionnaires s’entassaient et s’empiffraient désormais devant les gigantesques buffets, usant de
manœuvres presque reptatoires pour se procurer qui un verre, qui un petit four ou un fruit.
Observant ce manège du haut de mes six ans, j’étais dispensé du cérémonial d’accueil, ce qui me
laissait libre de déambuler partout et de proter de ce spectacle extraordinaire. Alors que la
fête battait son plein, je trouvais pourtant curieux que la principale intéressée en fût absente, et
je m’apprêtais à partir à sa recherche quand j’entendis deux hommes en smokings tirés à quatre
épingles parler justement d’elle : « Voilà un pot de départ comme chacun en souhaiterait, disait l’un.
– Oui, rétorquait l’autre, mais à soixante seize ans et demi, c’est quand même dommage de partir ainsi
en pleine forme. C’est le lot commun, mon cher, et vous ne l’ignorez pas plus que moi, depuis la loi
de juin 2052 l’âge de départ est révisé chaque année par les actuaires du ministère de l’évaporation,
en fonction du taux de la natalité nationale et du quotient individuel production/coût. Madame Ronny
atteint l’âge légal aujourd’hui même et, belle-mère du ministre ou pas, elle doit respecter la loi. D’ailleurs
il est normal que les gouvernants donnent l’exemple. Oh ! Faites attention, Tony nous écoute, j’espère
qu’il n’a pas entendu ? ».
Tony, c’est moi. D’ailleurs, pas de risque d’erreur : la plupart des garçons que je connais
s’appellent Tony… comme le Président Shark. J’avais entendu, naturellement, mais je suis
habitué aux propos un rien bizarres des adultes. Un peu plus loin, une femme au dentier
chevalin pérorait devant un fumeur de cigare en queue-de-pie : « Mais c’est normal, mon
cher, si nous avions laissé faire, c’est cent vingt millions d’habitants que nous serions maintenant !
Il n’y a plus de guerres, plus de famines, les épidémies sont loin et il a bien fallu trouver un
système de régulation. Celui-ci est le plus égalitaire qui soit, car au moins chacun connaît à
l’avance le moment il devra remplir son devoir envers la patrie. Mais il y a pourtant des exceptions : regardez
Tony Shark et ses nonante deux ans, bien conservé, d’accord. La médecine fait quand même de belles choses.
Ne me parlez pas de la médecine, malheureux ! C’est elle qui a failli provoquer la catastrophe.
Par bonheur, les ennarcs ont réussi à tout arrêter à temps : c’est ce qui leur vaut aujourd’hui leur régime
spécial sans date de péremption ».
Je tendais l’oreille, car j’ai toujours eu envie d’être médecin plutôt qu’ennarc comme papa, mais
les deux interlocuteurs méants se turent brusquement en se regardant d’un air entendu alors
que les caméras de la télévision locale faisaient leur apparition, balayant les salons en éventail.
Pourtant la médecine, qui est comme chacun sait le principal sujet de conversation dans toute
réception qui se respecte, ne tarda pas à attirer à nouveau mon attention à la faveur d’une baisse
de régime de l’orchestre.
64
Le Rhumatologue
Revue de la Fédération Française
de Rhumatologie
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P
Une histoire horrible
« Si vous connaissez l’Histoire, jeune homme, lançait un nabab de l’industrie agro-alimentaire à son
voisin, vous vous rappellerez qu’au début du vingt-et-unième siècle, l’industrie de la santé gagnait plus
que nous. Si nous avions laissé faire, tout le PIB de la nation y passait en vingt ans. Comment une chose
pareille est-elle possible ? C’est bien simple, reprit un haut fonctionnaire du ministère des cohortes
de survie : en 1960, un infarctus du myocarde ou un accident vasculaire cérébral survivait en moyenne
un an, un cancer du sein avait une espérance de vie moyenne de trois ans, etc. Quarante ans plus
tard, l’espérance de vie de tous ces patients était quasiment ramenée à la moyenne… moyennant des
traitements coûteux et permanents, à vie! Je n’ai pas besoin de sortir ma calculette pour vous démontrer


Je tendais à nouveau l’oreille du mieux possible, mais le bruit de l’orchestre mélangé au brouhaha
de la foule ne facilitait pas ma compréhension. « Il a fallu limiter les traitements en fonction du
QI, lança l’épouse peinturlurée d’un ennarc vénérable ? De nos jours, cela n’aurait pas posé de

fallu sérieusement bloquer les progrès de la recherche pour les maintenir à un niveau acceptable.
Rappelez-vous qu’à l’époque, toute l’industrie du médicament était sous la coupe d’entreprises
                 
progrès galopaient, au grand dam des caisses d’assurances sociales. - Comment se dépêtrer d’une

ont disparu, les entreprises qui faisaient de la recherche ont fait faillite. Imparable ! De nos jours,
pas un seul médicament n’a moins de quarante ans d’exploitation. Mais c’était déjà bien tard.
– Bah ! – Rien qu’avec les traitements disponibles, l’espérance de vie moyenne était arrivée à un niveau
insupportable. Il a fallu trouver des idées pour empêcher les gens de les prendre. Déjà, on a généralisé
la vente d’ersatz, sous le nom de « gehennériques », je crois, en prenant bien garde de leur donner,
surtout au début, la même composition que les anciens traitements. Mais en changeant régulièrement
la forme, la taille, la couleur, le goût, si bien que les gens se trompaient et s’empoisonnaient avec.
On leur avait fait croire que c’était moins cher, et que de toute façon, il n’y avait plus que ça.

les boîtes et les blisters, pour que les gros doigts noueux des vieux n’arrivent à attraper que des
             
                 
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
période : pas un seul ordi-diagnostiqueur pour ajuster le coût maximal de l’ordonnance au rapport
espérance de vie autorisée / productivité-carrière ! ». Dans le petit salon, quelques participants avinés
essayaient de couvrir le bruit de l’orchestre en chantant l’hymne à la gloire de Tony Shark, quand le

plus gérable maintenant, mais il faut être vigilants ».
Alors s’avança Mamie dans une tenue d’apparat formidable que je ne lui avais jamais vue, coiffée,
maquillée comme une star, sous les applaudissements de toute l’assistance. Pour une belle fête,
c’était une belle fête, mais je trouvai franchement qu’elle n’avait pas un visage aussi joyeux que
l’on aurait pu l’attendre de la reine du jour. Quand elle se pencha pour me serrer dans ses
bras, les applaudissements redoublèrent d’intensité, on se serait presque attendu à un « bis ».
Un fonctionnaire de l’état-civil l’attendait près d’un pupitre pour lui faire signer le formulaire de
résiliation de son numéroséku. Un des deux hommes en smoking du début sortit alors un papier
et se mit à lire un discours interrompu à tout instant par les bravos.
Mamie bredouilla quelques mots de remerciement, et partit au milieu d’une haie d’honneur et
sous les crépitements des ashs, au bras du fonctionnaire d’état-civil en jaquette et casquette
plate, qui la maintenait fermement. La musique et les danses reprirent immédiatement.
Je n’ai pas tout compris, mais j’espère que papa me laissera devenir médecin plutôt qu’ennarc,
même si ça vit moins longtemps. En tout cas, pour une belle fête, c’était une bien belle fête.
Toute ressemblance etc., etc.
Tony RONNY-MAGASS
éditorial
éditorial
FORMATION MÉDICALE CONTINUE
LE COIN DE L'IMAGERIE
INFORMATIONS SOCIO-PROFESSIONNELLES
RUBRIQUE JURIDIQUE
INDUSTRIE
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LE RHUMATOLOGUE 64 / DECEMBRE 2007
sommaire
Études 2006 – 2007 : les points forts (2)
Dr Michel 
Lancer le traitement de la PR : la fenêtre d’opportunité

Les temps forts du 14e congrès de
la Société Européenne de Rhumatologie Pédiatrique
Dr Michel 
Cas clinique
Dr David 
L’URML Ile-de-France lance une campagne d’information
pour expliquer la démarche de l’EPP

À quand la fin des O.G.M. ?

Brèves

L’erreur de diagnostic en rhumatologie
Benjamin ATTALI
Dernières nouvelles
Dr Michel BODIN
Cahier central FFR : Comment satisfaire simplement à l’obligation de FMC-EPP ?
8LE RHUMATOLOGUE 64 / DECEMBRE 2007
ÉTUDES 2006-2007 : LES POINTS FORTS (2)
Dr Michel de BANDT, Service de Rhumatologie, Hôpital Ballanger, Aulnay-sous-bois
RATION DE CELLULES SOUCHES
TOTIPOTENTES POUR LA THÉRAPIE
QUE : LA RÉVOLUTION
Un travail très important vient d’être
présenté dans la revue Nature, qui propose
une méthode révolutionnaire de
reprogrammation cellulaire destinée au
« clonage thérapeutique » contournant la
technique classique de clonage d’embryons. Ce
travail s’inscrit dans la suite de ceux présentés
par cette équipe depuis plus d’un an.
La technique classique de clonage est basée sur un transfert
nucléaire et consiste à implanter dans un « ovocyte » énucléé
un noyau de cellule masculine adulte. La multiplication de
cette chimère permet d’obtenir une population cellulaire
dite « totipotente » ou cellules souches embryonnaires sur
lesquelles se fondent de nombreux espoirs thérapeutique pour
demain. Cette technique fait l’objet de controverses multiples
en raison des implications éthiques et philosophiques qui en
découlent.
La technique présentée par le Japonais Yamanaka est complète-
ment différente car basée sur la reprogrammation de cellules
issues de la peau (modèle murin) uniquement. Ces cellules de
peau sont cultivées in vitro et transfectées par un retrovirus qui
exprime les gènes de 4 facteurs de transcription nommés Oct3/4
(ou Pou5f1), Sox2, c-Myc et Klf4. Les voies de signalisations
activées ainsi permettent une activation de la machinerie
intracellulaire conduisant à un véritable « rajeunissement » des
cellules qui deviennent alors multipotentes comme des cellules
souches embryonnaires.
Ces cellules, nommées « Fbxo15 », sont capables de se multiplier
et de fabriquer des amas cellulaires (tératomes) une fois
injectées à l’animal. Cependant, par rapport aux cellules souches
totipotentes, ces cellules diffèrent en termes d’expression des
gènes, de méthylation d’ADN (le niveau de méthylation de
l’ADN régule le niveau d’expression des gènes qui y sont incrits)
et de capacité à former des chimères adultes.
Ces différences tiennent au fait qu’il est difcile de sélectionner
électivement les cellules qui intègrent les transgènes (moins de
0,1 %) et donc d’avoir une population cellulaire homogène.
Cette difculté vient d’être contournée.
Les chercheurs ont inséré dans les cellules de la peau un
gène qui les rend résistantes à un antibiotique, uniquement
si la transfection des 4 facteurs de transcription est réussie
et tue les autres cellules. La population cellulaire obtenue
présente alors un fort niveau de pureté et d’homogénéïté et
toutes les caractéristiques des cellules totipotentes (en termes
d’expression génique et de méthylation). Les auteurs montrent
ensuite que des clones cellulaires fabriqués avec cette technique
sont capables de donner des chimères et qu’un des clones a
pu s’intégrer dans la lignée germinale et se transmettre aux
descendants.
La seule limite du travail tient à la technique de transfection
utilisée ; en effet, environ 20 % des embryons de souris ont
développé des tumeurs en raison de la réactivation de c-myc,
un puissant proto oncogène. Cette méthode demande donc à
être modiée mais les règles générales de cette production de
cellules souches thérapeutiques restent valables.
Ces résultats sont très impressionnants et depuis les fraudes
du Coréen Hwang en décembre 2004, qui avait prétendu -
faussement - avoir obtenu des clones humains, aucun résultat
de clonage thérapeutique humain n’a jamais été obtenu dans le
monde. De plus, les recherches sur le clonage ont été interdites
au USA et divisent les communautés scientiques du monde
entier. Cette nouvelle approche, qui n’utilise que des cellules de
la peau, devrait réconcilier tout le monde…

pluripotent stem cells. Nature 2007;448(7151):313-7.
FABRICATION DE CELLULES
CARTILAGINEUSES THÉRAPEUTIQUES À
PARTIR DE PROGÉNITEURS DE LA PEAU OU
DU CARTILAGE MALADE
Il n’y a pas de traitement radical des lésions cartilagineuses (ni
de la maladie arthrosique). En cas de lésion focale , il est possible
de proposer, dans certains cas précis, des techniques lourdes,
délicates et coûteuses, basées sur des prélèvements de cartilage
dont on isole les chondrocytes que l’on multiplie in vitro avant
de les « greffer » dans la lésion. Cette technique est onéreuse,
compliquée et ne génère que peu de cellules ; elle ne peut donc
pas être une solution à terme.
Il faut donc saluer les deux travaux démontrant qu’il est possible
de produire des cultures de chondrocytes en grande quantité à
partir de cartilage arthrosique ou a partir de la peau.
Le groupe de Deng met au point une méthode d’isolement de
cellules nommées DIAS (Dermis-Isolated Aggrecan-Sensitive) à
partir de la peau saine. Il s’agit de broblastes qui, dans des
PATHOLOGIE DÉGÉNÉRATIVE
FORMATION DICALE CONTINUE
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