n S i =1 x x x x x x La Revue de l'Ostéopathie x x (p=0,05) 2 Article original x a x x xx x Effet du traitement ostéopathique des dysfonctions de la malléole fibulaire sur l’instabilité de la cheville après entorses récidivantes Pierre Vitteaut 1, 2 Bruno Filippi 1, 3 Eric Marlien 1, 4* 1 Département recherche de l’Institut de Formation en Ostéopathie du Grand Avignon (IFOGA), Avignon, France 2 Ostéopathe, Lyon, France Influence of an osteopathic manipulative treatment of fibular malleolus dysfunctions on ankle instability resulting from recurrent sprains Abstract Objectives: Assess the efficiency of a protocol of osteopathic manipulative technics of the fibular malleolus on ankle lateral stability, in patients with a condition of chronic lateral ankle instability resulting from a history of internal ankle sprains. Methods: We performed osteopathic manipulative technics on the fibular malleoli of ten male subjects suffering from chronic lateral ankle instability. Two stabilometric recordings are performed in monopodal stance before and after the treatment protocol. Similar recordings are performed on twenty-one healthy subjects, before and after a fifteen minutes rest in supine position. 3 Ostéopathe, Bastia, France 4 Ostéopathe, Venelles, France * Correspondance [email protected] Results: X-mean and Y-mean decreases are very highly significant in the treated group. These same parameters increase significantly in the control group. Conclusion: Transversal and antero-lateral ankle stabilities improved in our population sample. Further studies are necessary to assess the impact of our treatment protocol on recurrences of ankle lateral sprains. Résumé Objectif : Évaluer l’efficacité d’un protocole de techniques ostéopathiques sur la mobilité de la malléole fibulaire sur l’instabilité chronique latérale de la cheville, consécutive à des antécédents d’entorses internes. Méthodes : Nous avons appliqué des techniques ostéopathiques sur la malléole fibulaire de 10 patients masculins présentant une instabilité chronique latérale de la cheville. Deux enregistrements stabilométriques ont été réalisés en appui unipodal avant et après ce protocole de traitement. Les mêmes enregistrements ont été réalisés sur 21 témoins sains, avant et après 15 minutes de repos en décubitus. Keywords: M Mots clés : malléolle fibulaire, X-moyen, Y-moyen, instabilité chronique latérale de la cheville, manipulation ostéopathique Résultats : La diminution des X-moyens et des Y-moyens est très hautement significative pour les patients traités. Ces paramètres sont significativement augmentés chez les témoins. Conclusion : Les stabilités transversale et antéro-latérale des chevilles instables des patients de notre population ont été améliorées. Des études sont nécessaires pour évaluer l’impact de notre protocole sur les récidives d’entorse latérales de la cheville. Numero 1-2: 2012 www.larevuedelosteopathie.com 29 Effet du traitement ostéopathique des dysfonctions de la malléole fibulaire Introduction L’entorse bénigne Le stade 1, entorse latérale bénigne de la cheville, se traduit anatomiquement par une distension du ligament collatéral latéral, sans qu’il ne se produise de rupture ligamentaire. Dans la majorité des cas, c’est le LTFA qui est atteint. Ce dernier étant tendu horizontalement entre le bord externe de la maléole fibulaire et le col du talus, il est donc mis en tension dans les mouvements forcés de flexion plantaire de cheville associés à un mouvement d’adduction de l’arrière-pied. Dans ce type d’entorse le LCL conserve son rôle de hauban articulaire. En France, 6000 cas d’entorses latérales de cheville sont traités chaque jour [1], constituant le premier motif de consultation en service de traumatologie [2]. Elles sont communes dans la vie courante et représentent 15 à 20 % des traumatismes chez les sportifs, prédominant notamment dans les sports collectifs comportant des changements d’appuis brusques tels que le basketball et le volleyball ; les tacles du football provoquent plus de 50 % des entorses initiales [3]. L’entorse moyenne Un système ligamentaire latéral fragile Une entorse est définie par la lésion traumatique d’un ou de plusieurs ligaments d’une articulation, entraînant leur élongation ou leur rupture, sans déplacement permanent des surfaces articulaires. Ce qui la distingue de la luxation dans laquelle les rapports articulaires ne sont plus conservés. Dans le cas de l’entorse externe de la cheville, c’est le ligament collatéral latéral (LCL) qui est majoritairement touché, ne pouvant plus jouer son rôle de stabilisateur passif de l’articulation. Le LCL est sollicité principalement dans les mouvements de varus du pied associant une adduction et une supination du pied. La plupart des entorses se produisent en inversion, le pied se couchant sur son bord latéral. Lorsque le pied est en position neutre ou en flexion dorsale, le ligament calcanéo-fibulaire (LCF) et le ligament talo-fibulaire postérieur (LTFP) sont tendus et assurent la coaptation talo-crurale. Un stress en varus forcé aura donc surtout un retentissement sur l’articulation sous-talienne, pouvant être à l’origine d’une entorse sous-talienne. Au contraire, quand le pied est en flexion plantaire, le ligament talo-fibulaire antérieur (LTFA) est le seul tendu, il est donc très fragile en varus. C’est la position où le bras de levier auquel le ligament est exposé est grand [4]. Selon l’intensité de la force rencontrée, le LTFA peut se distendre ou se déchirer totalement ou partiellement. Il peut en résulter un diastasis tibio-talaire qui sera responsable de la mise en tension puis de la déchirure du LCF puis du LTFP. Ainsi, les trois faisceaux ligamentaires composant le LCL agissent comme des freins articulaires passifs et jouent le rôle de haubans externes de l’articulation de la cheville. De plus, ce sont des organes sensoriels car ils contiennent des récepteurs proprioceptifs renseignant les centres moteurs médullaires sur la direction, la force et la vitesse du mouvement. Lors du mécanisme lésionnel de l’entorse latérale de cheville, la stabilité ligamentaire est altérée, pouvant entraîner un sentiment d’instabilité, voire d’insécurité chez le patient. Dans le stade 2, entorse moyenne, il y a une rupture partielle ou complète du LTFA, pouvant s’étendre au LCF mais sans atteindre le LTFP. L’entorse grave Dans le stade 3, lors d’un traumatisme important en inversion, la rupture complète du ligament talo-fibulaire antérieur définit l’entorse grave. La violence du traumatisme peut entraîner successivement la rupture du LCF du LCL, puis celle du LTFP. Les entorses graves du LCL provoquent une instabilité majeure de l’articulation talo-crurale responsable d’un bâillement externe de l’articulation lors des mouvements forcés. Traitement Les attitudes thérapeutiques face à cette pathologie sont multiples, allant de l’abstention de tout traitement à la chirurgie, selon la gravité de l’entorse, en passant par la kinésithérapie [3]. Malgré les progrès certains de la prise en charge de ce type d’entorses, les séquelles post-traumatiques demeurent courantes et posent le problème majeur qu’est l’instabilité chronique latérale de la cheville (ICC) dont la prévalence est estimée entre 10 % et 30 % [2]. L’ICC est caractérisée par la répétition de plus en plus fréquente et de plus en plus facile d’entorses du versant externe de cette articulation. L’instabilité fonctionnelle correspond à une sensation subjective d’instabilité et d’insécurité chez les patients atteints. Ce phénomène peut résulter d’un déficit de proprioception [6], d’une faiblesse musculaire ou d’une diminution de la coordination neuromusculaire, ces trois facteurs diminuant nettement l’efficacité du système de protection articulaire de la cheville. Une laxité chronique latérale existe dans 10 % des cas, recherchée par deux tests : le test de tiroir antérieur et le test en varus forcé [2]. Nous avons constaté la présence, chez les patients présentant une laxité chronique latérale, de la diminution de la mobilité antéro-postérieure de la fibula, ressentie par des tests ostéopathiques de mobilité. Après restauration de cette mobilité, plusieurs patients nous ont rapporté une amélioration de leurs symptômes. Classification des entorses latérales de la talo-crurale Trois stades de gravité sont décrits, selon l’importance des lésions ligamentaires et leur retentissement fonctionnel [5]. Hypothèse de cette recherche Nous nous sommes intéressés à l’instabilité chronique séquellaire aux entorses latérales bénignes et de gravité n 30 S i =1 x x x x x x La Revue de l'Ostéopathie x x2 (p=0,05) x xx x x x a Numero 1-2: 2012 Effet du traitement ostéopathique des dysfonctions de la malléole fibulaire moyenne. Nous avons émis l’hypothèse qu’une perturbation du jeu articulaire de la syndesmose tibio-fibulaire pouvait être en partie responsable de l’instabilité du talus dans l’articulation talo-crurale, pouvant entraîner des entorses récidivantes de cette articulation. Nous n’avons pas trouvé d’études évaluant l’effet de l’ostéopathie sur les séquelles d’entorses de cheville. Nous avons donc décidé de traiter les dysfonctions ostéopathiques propres à l’articulation tibio-fibulaire distale, et plus particulièrement celles de la malléole fibulaire. L’objectif de notre étude était de déterminer si le traitement de cette seule articulation pouvait se traduire par une meilleure stabilité chez les patients présentant une instabilité chronique latérale de la cheville. Nous avons utilisé une plateforme de stabilométrie pour mesurer l’effet de nos techniques. luer l’équilibre de manière objective de chaque patient avant et après le traitement ostéopathique. Le logiciel d’évaluation Posturewin permet d’analyser les données enregistées. Chaque patient a été placé debout sur les sabots stabilométriques, les pieds nus, en appui unipodal sur la cheville présentant l’instabilité. Nous avons effectué, pour chaque patient, deux enregistrements de 51,2 secondes avant et après le traitement. Les consignes suivantes ont été données avant chaque enregistrement : le patient se tenait debout sur une jambe, immobile, décontracté, les bras le long du corps, en regardant à l’infini et comptait jusqu’à ce que nous lui disions que l’enregistrement était terminé. Les paramètres de stabilométrie retenus dans notre étude étaient les suivants : -- le X-moyen étudie « le roulis », c’est-à-dire le déplacement latéral du centre de pression. Il s’exprime en millimètres et est négatif pour une déviation à gauche, et positif pour une déviation à droite. Le X-moyen reflète la stabilité médio-latérale, si sa valeur est diminuée, après intervention ostéopathique, cela traduit un déplacement moins important du centre de pression suivant l’axe médio-latéral, ce qui signifie que la stabilité latérale du patient a augmenté, le patient est alors considéré comme plus stable transversalement ; -- le Y-moyen étudie la projection moyenne du centre de pression du patient sur l’axe antéropostérieur. Il s’exprime aussi en millimètres. Comme pour le X-moyen, si sa valeur est diminuée après le traitement ostéopathique dispensé, cela signifie que le déplacement du centre de pression suivant l’axe antéro-postérieur est moins important, donc que la stabilité antéro-postérieur du patient a été améliorée. Matériel et Méthodes Population étudiée et critères d’inclusion Notre étude s’est déroulée sur un échantillon de 10 patients masculins, âgés de 18 à 35 ans, présentant tous une instabilité chronique de cheville suite à des entorses récidivantes latérales (au minimum trois) de la cheville bénignes (stade 1) ou moyenne (stade 2). Cette instabilité était objectivée par deux tests : tiroir antérieur du talus positif associé a un test d’inversion forcée positif. Tous les patients ont attesté ne pas avoir été victimes d’entorse au cours des deux derniers mois précédent le traitement ostéopathique dispensé. Aucun n’a été soumis à une rééducation musculaire à visée proprioceptive en parallèle de notre expérience. Parmi l’échantillon étudié, quatre patients étaient des joueurs de volleyball professionnels de l’équipe d’Avignon (AVB), et six étaient étudiants de notre établissement d’enseignement. Méthodes Interrogatoire et diagnostic clinique Critères de non-inclusion -- antécédents d’entorse interne ; -- antécédents chirurgicaux pour une entorse latérale de la cheville ; -- phlébite, fracture, arthropathie de la cheville ; -- polyarthrite rhumatoïde de la cheville. Les enregistrements sur la plate-forme stabilométrique se sont déroulés respectivement avant et après le traitement de la malléole fibulaire. Tests ligamentaires Nous avons effectué deux principaux tests ligamentaires concernant respectivement le LTFA et le LCF afin d’évaluer l’instabilité de la cheville des patients admis dans notre protocole. Test du tiroir antérieur du talus Le patient est en décubitus dorsal, les pieds sortant de la table. Le praticien est aux pieds du patient, de côté et en fente avant. Il saisit d’une main le talon à sa partie postérieure et de l’autre il saisit la face antérieure de la jambe. Il réalise un point fixe avec la main tibiale et tracte l’arrière-pied vers l’avant à la recherche d’une mobilité anormale du talus glissant vers l’avant sous le tibia, signant le tiroir antérieur. Le test a été réalisé sur la cheville saine et sur la cheville instable, afin d’établir un comparatif bilatéral. Population témoin Nous avons recruté des sujets témoins parmi les étudiants de notre établissement d’enseignement : 21 sujets masculins sans antécédents d’entorse de la cheville et ne présentant pas de motif de consultation. Critères de jugement Nous avons utilisé une table de pratique, une plateforme de stabilométrie, et un ordinateur équipé du logiciel Posturewin. La plate-forme, munie de deux sabots stabilométriques, est équipée de capteurs de forces permettant de quantifier la posture et l’équilibre des patients par l’enregistrement des oscillations du centre de pression. Cela nous a permis d’évan Numero 1-2: 2012 S i =1 x x x x x x La Revue de l'Ostéopathie x x2 (p=0,05) x xx x x x a 31 Effet du traitement ostéopathique des dysfonctions de la malléole fibulaire Tests de mobilité de la malléole fibulaire Crédit photo La Revue de l’Ostéopathie Le patient est en décubitus dorsal, le pied situé à l’extrémité de la table. Pour tester la cheville droite, le praticien place la face antérieure de sa cuisse gauche contre la face plantaire du pied du patient. La main droite prend le calcanéus et le tracte légèrement pour amener le pied en flexion dorsale. La main gauche saisit la malléole fibulaire entre le pouce et l’index. Le test se déroule en deux temps : -- le praticien amène la malléole fibulaire en postériorité en même temps qu’il accentue la flexion dorsale du pied du patient avec sa cuisse. Il apprécie la qualité du déplacement postérieur de la malléole fibulaire et son retour ; -- le praticien amène ensuite la malléole en antériorité en même temps qu’il diminue la flexion dorsale du pied. Il apprécie la qualité du déplacement antérieur de la malléole fibulaire et son retour. Figure 1.— Test du tiroir antérieur. Techniques ostéopathiques Test de la manœuvre en inversion forcée Le patient est en décubitus dorsal, les pieds sortant de la table. Le praticien est aux pieds du patient. Il empaume d’une main le talon à sa face externe et de l’autre saisit le tiers inférieur de la jambe à sa face interne. Dans le plan frontal, la main externe porte le talon en varus, tentant de faire bailler l’articulation talo-crurale. Le praticien tente de ressentir ainsi le choc du talus en retour contre la malléole externe à l’arrêt de la contrainte exercée. Ce test est spécifique de l’atteinte du ligament talo-calcanéen. Il a été pratiqué sur les deux chevilles. Crédit photo La Revue de l’Ostéopathie Les descriptions des techniques ostéopathiques correspondent à une application sur la cheville droite. Technique dite de « défibrosage » de l’articulation talocrurale Le patient est en décubitus dorsal, le pied sortant légèrement de la table. Dans un premier temps, le praticien place l’éminence thénar de sa main gauche sur la face antérieure de la malléole fibulaire et l’éminence thénar de sa main droite sur la face postérieure de la malléole tibiale pour réaliser un contre-appui, puis demande au patient de réaliser une flexion plantaire. Dans un second temps, le praticien inverse ses paramètres en plaçant l’éminence thénar de sa main gauche sur la face postérieure de la malléole fibulaire et l’éminence thénar de sa main droite sur la face antérieure de la malléole tibiale, puis il demande au patient de réaliser une flexion dorsale. Les deux temps de cette technique sont réalisés trois fois de suite. Cette technique a été réalisée sur l’ensemble des sujets avant la technique de correction spécifique à la malléole fibulaire. Technique sur la malléole fibulaire en antériorité Le patient est en décubitus dorsal, son genou droit est fléchi. Le praticien est debout, en bout de table. La plante du pied du patient repose sur le genou droit du praticien qui place l’éminence hypothénar de sa main gauche sur la partie antérieure de la malléole fibulaire. La main droite est placée au niveau de la tête fibulaire, réalisant une prise entre le pouce et l’index. La main gauche pousse la malléole fibulaire d’avant en arrière tandis que la main droite, à l’aide d’une prise pouce-index guide le mouvement vers l’avant et vers le haut de la tête fibulaire. Le praticien apprécie le degré d’amplitude optimal dans l’articulation talo-crurale de chaque patient traité, en augmentant ou diminuant la flexion dorsale et effectue un mouvement de haute vélocité basse amplitude avec la main gauche. Figure 2.— Test de l’inversion forcée. L’association de ces deux tests nous a permis de confirmer l’instabilité de la cheville des patients. En effet, l’existence d’un tiroir talien antérieur associé à la sensation de ressaut du talus signe l’atteinte des faisceaux antérieur et moyen du LCL, se traduisant par une mobilité anormale du talus dans la pince tibio-fibulaire. n 32 S i =1 x x x x x x La Revue de l'Ostéopathie x x2 (p=0,05) x xx x x x a Numero 1-2: 2012 Effet du traitement ostéopathique des dysfonctions de la malléole fibulaire Résultats Technique sur la malléole fibulaire en postériorité Le patient est en procubitus, les pieds hors de la table. Le praticien est debout, en bout de table. Sa main droite prend un large appui sur la partie postérieure de la malléole latérale par l’intermédiaire du pouce, l’index contrôlant le talus et les autres doigts enserrant la région du coude-pied. Le pouce gauche est placé perpendiculairement à l’autre pouce et au dessus de ce dernier, les autres doigts enserrant le tibia. Le praticien exerce une impulsion brève et sèche en poussant la malléole fibulaire d’arrière en avant. Dans le même temps il réalise un contre-appui tibial avec la main droite. Dans notre population traitée, l’âge était compris entre 18 et 35 ans. Pour les paramètres X-moyen et Y-moyen avant traitement, les moyennes différaient significativement entre les patients et les sujets témoins. Après traitement ostéopathique, les moyennes des paramètres X-moyen et Y-moyen ont été nettement diminués pour les patients. Ils étaient significativement augmentés pour les sujets témoins après application de techniques simulées (tableau I, figures 3 et 4). Les coefficients de variation étaient compris entre 2,5 % et 12 %. Discussion Groupe témoin Pour les sujets du groupe témoin, un premier enregistrement stabilométrique a été réalisé, puis ils se sont allongés 15 minutes sur la table de soins, en décubitus. Le deuxième enregistrement stabilométrique a ensuite été effectué. Les conditions d’enregistrement étaient strictement les mêmes que pour les patients. Notre hypothèse était que le traitement des dysfonctions de mobilité de l’articulation tibio-fibulaire distale pouvait améliorer la stabilité chez les patients présentant une instabilité chronique latérale de la cheville consécutive à une série d’entorses en inversion. Les résultats vont dans le sens de notre hypothèse. Les valeurs des X-moyens et Y-moyens ont diminué de manière très hautement significative pour les patients du groupe traité, alors qu’elles ont augmenté significativement pour les sujets du groupe témoin. Nous avons inclus des patients qui présentaient une instabilité chronique latérale de la cheville, vérifiée par des tests ligamentaires et articulaires de la talo-crurale. Ces tests ont permis de mettre en évidence la présence d’une hyper laxité ligamentaire de l’articulation talo-crurale potentiellement responsable du syndrome d’instabilité chronique de la cheville. En effet, l’instabilité chronique est une plainte fonctionnelle subjective alors que la laxité ligamentaire est un Analyse des données Les effectifs étant faibles, nous avons utilisé des tests non paramétriques pour réaliser l’analyse statistique des données : tests de Mann-Withney pour les comparaisons entre échantillons indépendants (traités vs témoins) et tests de Wilcoxon appariés pour les comparaisons entre échantillons dépendants (avant vs après pour chaque groupe). Les différences étaient significatives lorsque p était inférieur à 5 %. Nous avons également calculé les coefficients de variation. Tableau I.— X-moyens et Y-moyens avant et après traitement pour les deux groupes. Traités (n=10) Témoins (n=21) p Avant Cv* 26,1 ± 1,2 23,7 ± 0,6 <0,015 4,6 2,5 X moyen Après 18,7 ± 1,2 24,4 ± 0,6 <0,0001 Cv p Avant Cv 6,4 2,5 0,03 0,04 49,4 ± 3,9 38,9 ± 1,9 0,01 7,9 4,9 Ymoyen Après 36,7 ± 4,4 42,1 ± 2,1 <0,07 Cv p 12,0 5,0 <0,0001 <0,0002 *Cv : Coefficient de variation (en %) 0 Les barres verticales représentent les intervalles de confiance à 0,95 2 60 4 55 6 50 45 12 40 Y moyen X moyen 8 10 14 16 18 20 35 30 25 20 22 15 24 10 26 28 30 Les barres verticales représentent les intervalles de confiance à 0,95 65 Avant 5 Groupe Témoin Groupe Traité Après 0 Figure 3.— Evolution des X-moyens des deux groupes. Avant Figure 4.— Evolution des Y-moyens des deux groupes. n Numero 1-2: 2012 Après Groupe Témoin Groupe Traité S i =1 x x x x x x La Revue de l'Ostéopathie x x2 (p=0,05) x xx x x x a 33 Effet du traitement ostéopathique des dysfonctions de la malléole fibulaire est supérieur à cette limite : nous estimons que notre critère de jugement, bien qu’original, a permis un recueil suffisamment rigoureux des données pour être retenu dans notre étude. Globalement, la stabilité antéro-postérieure et médio-latérale a été améliorée chez les patients ayant participé à cette expérience, cela ne peut pas garantir l’entière efficacité des techniques dispensées, pour plusieurs raisons : -- nous avons effectué notre étude sur un échantillon de 10 patients masculins, âgés de 18 à 35 ans, ce qui ne reflète pas la population générale susceptible d’être atteinte d’instabilité chronique de la cheville ; -- nous n’avons réalisé que deux enregistrements sur la plate-forme de stabilométrie pour chaque patient, respectivement avant et après le traitement ostéopathique, ce qui nous limite quant à la validité de notre projet. Il aurait été souhaitable de pouvoir réaliser de nouveaux enregistrements, par exemple un mois après le traitement afin de constater si l’effet de nos techniques aurait permis à ces patients de retrouver une stabilité pérenne ; -- nous nous sommes intéressés uniquement au rôle de la fibula dans les entorses chroniques de cheville, et plus particulièrement à la position de la malléole fibulaire. Or, les facteurs de prédisposition de ce type d’entorses sont multiples et ne peuvent pas se résumer à une mauvaise position de la malléole fibulaire au sein de la pince tibio-fibulaire. Par exemple, la cicatrisation des tissus mous entourant la cheville peut endommagée la fonction proprioceptive du ligament collatéral latéral et des muscles courts et longs fibulaires, et pourrait être aussi un facteur déterminant de l’instabilité chronique de cheville. En conclusion, nous avons amélioré la stabilité transversale et antéro-latérale de la cheville instable des patients de notre population. Notre protocole pourrait-il prévenir les récidives d’entorse latérales de la cheville ? Notre étude ne permet pas de répondre, car nous avons simplement mesuré un effet immédiat. Il est nécessaire de réaliser d’autres études pour évaluer l’éventuel effet préventif de notre protocole, et d’évaluer l’impact d’un traitement global. signe clinique objectif. Nous avons sélectionné uniquement des patients souffrant d’instabilité avec laxité chronique, qui représentent environ 10 % des cas d’instabilité chronique latérale de la cheville [2]. L’effectif du groupe traité était faible, conséquence de la difficulté à réunir des patients correspondant aux critères d’éligibilité. Nous avons utilisé la technique dite « de défibrosage » dans l’intention de solliciter les tissus mous entourant l’articulation talo-crurale et notamment le ligament collatéral latéral afin d’envoyer des informations au système proprioceptif. L’objectif de la seconde technique avait pour objectif d’augmenter la mobilité de la malléole fibulaire, ou plutôt de d’obtenir une modification du ressenti du praticien lors des tests de mobilité de la fibula, car ces mouvements sont de faible amplitude. En effet plusieurs auteurs ont mesuré les mouvements de la fibula par rapport au tibia lors des mouvements de flexion dorsale et plantaire de l’articulation tibio-talienne, et ont calculé les valeurs moyennes suivantes : -- translation antéro-postérieure : 0,6 mm à 1,5 mm [7, 8] ; -- translation latérale 1 mm à 1,5 mm [7, 8, 9] ; -- rotation autour de l’axe longitudinal : 0,1° à 0,2°, de direction indéterminée [7, 8, 9]. D’autre part, à notre connaissance, aucune étude n’a évalué la fiabilité des tests de mobilité de la malléole fibulaire, ni l’impact de techniques ostéopathiques sur cette mobilité. Il serait nécessaire de réaliser de telles études. Notre critère de jugement était la mesure des stabilités latérales et antéropostérieures en appui unipodal en utilisant une plateforme de stabilométrie. Ce matériel n’a pas été conçu dans ce but, et à notre connaissance un tel protocole de mesure n’a jamais été utilisé. Nous avons vérifié auprès de nos patients traités et d’une population de sujets sains la variabilité de ce système de mesures : les coefficients de variation pour les sujets témoins sont compris entre 2,5 % et 5,0 % et pour les patients traités entre 4,6 % et 12,0 %. Plus la valeur du coefficient de variation est faible, plus l’estimation est précise. Une mesure est considérée homogène lorsque le coefficient de variation est inférieur à 10 % [10]. Sur les huit coefficient de variation, un seul Conflits d’intérêts : les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêt en lien avec cet article. Références 6. Konradsen L. Sensori-motor controlof the unijured and injured human ankle. 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