[CCCB non-official translation]
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Le fait de tuer quelqu’un ne sera plus perçu comme un crime, mais traité plutôt comme une forme
de soin de santé. Selon la Cour suprême, les adultes de tout âge, et pas seulement ceux qui seraient
à l’article de la mort, peuvent demander l’aide au suicide. Suivant l’exemple de certains pays
européens, dont nous ignorons à nos risques l’expérience en matière d’aide au suicide et
d’euthanasie, le Groupe consultatif provincial-territorial d’experts sur l’aide médicale à mourir ne
restreint plus l’accès à l’aide au suicide seulement aux adultes, mais propose de l’étendre aussi aux
enfants. En pratique, le droit de se faire tuer deviendra, dans certains cas, le devoir de se faire tuer,
à mesure qu’augmenteront les pressions subtiles exercées sur les personnes vulnérables. Celles et
ceux qui ont la noble vocation de guérir collaboreront plutôt à donner la mort, ce qui aura de
lourdes conséquences non seulement sur l’intégrité de la profession médicale, qui s’est engagée à
ne causer aucun mal, mais aussi sur la confiance des patients envers celles et ceux de qui ils
attendent la guérison.
Même les médecins qui appuient en principe cette légalisation seront sans doute mal à l’aise quand
ils auront à faire l’expérience de toutes ses conséquences.
La force du message de la Cour suprême n’échappe à personne : certaines vies ne valent pas la
peine d’être vécues. Nous ne sommes absolument pas d’accord.
Dans ce contexte, il est clair que des personnes raisonnables, avec ou sans convictions religieuses,
peuvent avoir en conscience une objection d’ordre moral à participer de quelque façon à l’offre
d’un suicide assisté ou d’une euthanasie. Ces personnes méritent d’être respectées.
Il est essentiel que le gouvernement veille à ce qu’on protège la liberté de conscience des
fournisseurs de soins, qu’il s’agisse d’établissements ou d’individus. Ils ne doivent pas être
contraints de poser des gestes qui vont contre leur conscience, ou de réorienter des patients vers
d’autres praticiens, puisque cela revient, sur le plan moral, à prendre part à l’acte lui-même. Il est
tout simplement faux et contraire à la justice de dire : vous n’avez rien à faire qui aille contre votre
conscience, mais vous devez vous assurer que ça se fasse.
Notre valeur comme société se mesure par le soutien que nous donnons aux plus vulnérables. Les
personnes frappées par la maladie peuvent choisir de mettre fin à leur vie pour des motifs
d’isolement, de découragement, de solitude ou de pauvreté, même si elles ont peut-être encore
plusieurs années à vivre. Qu’est-ce donc qu’une société où les personnes malades et vulnérables
sentent qu’elles sont un poids? Une demande de suicide est souvent un appel à l’aide.
La société doit offrir la sollicitude et la compassion à ces personnes vulnérables, pas la mort.
La plupart des Canadiennes et des Canadiens n’ont pas accès à des soins palliatifs de qualité. Il est
moralement impératif que tous les paliers gouvernementaux de notre pays portent leur attention et
leurs ressources vers des soins qui permettent un contrôle médical de la douleur et, surtout, qui
accompagnent avec amour celles et ceux qui approchent la fin inévitable de la vie.