HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES LES BONNES PRATIQUES D’HYGIENE DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES 2.6 La toilette et les soins cutanés chez la personne âgée dépendante (1). Les objectifs poursuivis lors de la toilette sont multiples. La toilette et les soins cutanés qui l’entourent (prévention d’escarres, changes, mobilisation) sont autant d’occasions de transmission de micro-organismes et ce soin doit obéir à la plus grande rigueur en matière d’hygiène comme les soins les plus techniques. Le type de toilette sera choisi après avoir évalué le degré de dépendance, les capacités du patient, et après avoir déterminé ses besoins. Dans tous les cas, les objectifs doivent être remplis en respectant une hygiène rigoureuse entre chaque patient et en respectant l’environnement. ◆ Maintenir l’hygiène cutanée pour conserver une peau saine permettant de jouer son rôle de barrière envers les micro-organismes. ◆ Assurer la prévention des complications de décubitus : prévention d’escarre, mobilisation. ◆ Surveiller l’état nutritionnel et général : recherche d’une déshydratation (pli cutané), pesée. ◆ Assurer le bien être physique (détente apportée par la douche, utilisation de produits d’hygiène). ◆ Constituer un moment privilégié de la relation soignant soigné où la participation du patient est au maximum sollicitée L A TOILETTE EST UN SOIN FONDAMENTAL ayant stagné dans les canalisations, tuyaux et pommeaux en la laissant couler une à deux minutes avant la première toilette de la journée. ◆ Veiller à une hygiène rigoureuse et un changement quotidien du linge de toilette effectuer la toilette du plus propre au plus sale pratiquer le soin de bouche 2 fois par jour (3). ◆ Éviter tout contact entre le linge propre et le linge sale. Lors de l'évacuation du linge sale, le positionnement des sacs collecteurs à proximité immédiate de la chambre réduit le risque de dissémination des micro-organismes. ◆ Stocker l’appareil dentaire dans un boîtier nominatif facile à nettoyer et désinfecter. Hygiène lors de la toilette en chariot-douche ou baignoire à hauteur variable Ce type de toilette est indiqué pour les patients dépendants ou semi-dépendants qui ne sont pas verticalisables. Il est à privilégier par rapport à la toilette au lit car l’utilisation de la douche assure une meilleure élimination des salissures et un rinçage de bonne qualité permettant d’éliminer totalement le savon (2). Recommandations générales pour l’hygiène de la toilette ◆ Une toilette complète est nécessaire tous les jours, que la personne soit ou non autonome ; le cas échéant, elle doit précéder les soins aseptiques. ◆ Utiliser de préférence la douche si l'état du patient et l'existence de matériel le permettent (2). La présence d’une plaie (escarre, ulcère) ne contre indique pas la douche, de même que la présence d’une sonde urinaire. ◆ Protéger la tenue vestimentaire par un tablier plastique de protection à usage unique. ◆ Veiller à utiliser une eau de bonne qualité bactériologique en assurant l’entretien de la robinetterie : détartrage régulier des robinets et pommeaux de douche (cf. chapitre 2.9), évacuer l'eau 338 OPTIMISER L’hygiène de la toilette utiliser un savon non irritant et bien le rincer, ne pas oublier les soins d’hygiène associés : shampooing, ongles, ombilic, ■ en dehors de la toilette, penser plusieurs fois par jour au lavage des mains du patient, ■ l’usage unique permet une organisation plus simple et limite les erreurs : bâtonnet-mousse à usage unique pour le soin de bouche, gant de toilette à usage unique évitant tout échange entre patient et toute confusion entre gant « du haut » et gant « du bas », ■ le travail par équipe de deux soignants limite les manquements à l’hygiène. ■ ■ HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 LA TOILETTE ET LES SOINS CUTANÉS ◆ Le personnel doit porter des chaussures non glissantes ne craignant pas l’eau. ◆ Avant de reposer le patient sur le dos, bien rincer le fond du chariot pour éliminer les salissures. ◆ Nettoyer et désinfecter entre chaque patient, chariot-douche, baignoire à hauteur variable et élévateur (cf. chapitre 2.4). Hygiène lors d’une douche accompagnée Ce type de toilette est indiqué pour les patients dépendants ou semi-dépendants verticalisables. ◆ Le personnel doit porter des chaussures non glissantes ne craignant pas l’eau. ◆ Nettoyer et désinfecter entre chaque patient douche, chaise-douche, élévateur. Hygiène lors de la toilette au lavabo Cette toilette, moins satisfaisante sur le plan de l’hygiène présente un grand intérêt pour la rééducation accompagnée. Elle ne doit pas engendrer une hygiène moindre que les autres modalités de toilette. Le personnel doit inciter le patient à se laver complètement chaque jour et compléter la toilette des parties du corps que le patient n’a pas pu réaliser. Un cabinet de toilette individuel, équipé de façon ergonomique permet au patient autonome de garder une hygiène corporelle satisfaisante, tout en limitant les risques de transmission de microorganismes. Hygiène lors de la toilette au lit Cette modalité est indiquée pour les patients dépendants ou semi-dépendants non verticalisables. ◆ Préférer le système chariot magasin et guéridon individuel au classique chariot de toilette allant de chambre en chambre. • le chariot magasin, ne pénètre jamais dans les chambres, • le guéridon, support pour tout ce qui va entrer dans la chambre est désinfecté entre chaque patient. ◆ Prévoir au plus juste le matériel à rentrer dans la chambre afin de limiter les allées et venues au cours de la toilette et de ne pas faire pénétrer dans la chambre trop de matériel inutile. ◆ Changer l’eau de la cuvette et rincer le gant de toilette aussi souvent que nécessaire. ◆ Éviter les confusions et échanges de matériel de toilette entre patients, en particulier lorsque les chambres sont à 2 lits et qu’il n’y a pas de cabinet de toilette individuel. ◆ En fin de toilette, désinfecter le matériel (cf. chapitres 2.4 et 2.5). Hygiène et prévention d’escarres La prévention des escarres est réalisée par des effleurages légers et circulaires des points de pression pendant une minute ; ce geste est exécuté HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 à mains nues avec une huile peroxydée ou une huile de texture fluide (amande douce par exemple) et renouvelée à chaque change. Par ailleurs, des supports anti-escarres sont fréquemment utilisés (matelas mousse gaufrier, matelas à eau, matelas basse pression...) (4). Les mesures d’hygiène recommandées sont les suivantes : ◆ Effectuer la prévention des escarres sur une peau propre. ◆ Veiller à utiliser l’huile d’amandes douce dans de petits conditionnements munis d’une fermeture étanche pour maintenir le liquide à l’abri de l’air en dehors de son utilisation. Chaque patient dispose d’un flacon individuel. La date d’ouverture du flacon doit systématiquement figurer sur celui-ci. ◆ Le lavage des mains en fin de soins est impératif. ◆ Lors de son utilisation, le support anti-escarres (matelas, coussin) doit être enveloppé dans une housse si possible intégrale et étanche. Cette housse doit subir un nettoyage-désinfectant* lors de chaque change de draps ; le produit désinfectant à utiliser est à choisir selon les indications du fabricant du matériel anti-escarres. Au départ du patient, en fonction des matériaux, la housse est soit jetée, soit nettoyée et désinfectée. Dans tous les cas, lors de l’achat des supports anti-escarres, le fabricant doit fournir aux utilisateurs des modalités validées d’entretien et de désinfection. Hygiène lors des changes Les changes sont réalisés 4 à 6 fois par jour en fonction du niveau de risque d’escarre. Les changes associés à la prévention des escarres et aux mobilisations systématiques sont des soins en séries à haut risque de transmission. Une organisation rigoureuse est donc nécessaire. ◆ Utiliser le système chariot magasin associé au guéridon individuel pour des soins individualisés. ◆ Utiliser la tenue de protection : tablier et gants à usage unique. ◆ Respecter l’ordre suivant : • effectuer la toilette pour éliminer les salissures puis retirer les gants de protection, • réaliser l’effleurage pour la prévention des escarres et les mobilisation qui s’imposent, • éliminer le matériel et les déchets puis réaliser un lavage des mains. Bibliographie 1 - GINESTE Y, MARESCOTTI R. La toilette du malade en institution : un acte de santé. L’Aide-Soignante 1996, 9: 3-9. 2 - GINESTE Y, MARESCOTTI R. Vers la fin de la toilette au lit ? L’Aide-Soignante 1996, 11: 4-10. 3 - RUER M, HELJACK. L’importance des soins de bouche en phase terminale. Objectifs Soins 1992, 1: 48-50. 4 - GUYOT M, JEDYNAK D. Escarre : guettez les risques, « soignez » la prévention ! L’Aide-Soignante 199, 27-33. 339 HYGIENE ET PRÉVENTION DES INFECTIONS DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE SOINS POUR PERSONNES AGÉES Lexique AFNOR biofilm Association Française de Normalisation. Association ayant pour mission de coordonner les programmes de normalisation en France et d’encourager la diffusion et l’application des normes. Ensemble de micro-organismes et de leurs sécrétions macromoléculaires qui sont présents sur la surface d’un matériau (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination). antisepsie bionettoyage Opération au résultat momentané permettant, au niveau des tissus vivants, dans la limite de leur tolérance, d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération (AFNOR NF T 72 101). Procédé de nettoyage, applicable dans une zone à risques, destiné à réduire momentanément la biocontamination d’une surface. Il est obtenu par la combinaison appropriée d’un nettoyage, d’une évacuation des produits utilisés et des salissures à éliminer, de l’application d’un désinfectant. cas acquis antiseptique Selon AFNOR NF T 72 101, un antiseptique est un produit ou un procédé utilisé pour l’antisepsie dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé sont sélectifs, cela doit être précisé. Ainsi, un antiseptique ayant une action limitée aux champignons est un antiseptique à action fongicide. Le caractère acquis d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée dans un service a été réalisé et si celui-ci est négatif. La découverte d’une telle bactérie au cours du séjour plus de 48 à 72 heures après l’admission chez un patient antérieurement négatif laisse présumer que la bactérie a été acquise par transmission au cours du séjour. bactéricide Produit ou procédé ayant la propriété de tuer les bactéries dans des conditions définies (AFNOR, Comité Européen de Normalisation). Produit ou procédé ayant la propriété d’inhiber momentanément les bactéries dans des conditions définies (AFNOR). Le caractère importé depuis un autre établissement d’une bactérie multirésistante peut être affirmé si un dépistage systématique à l’entrée du patient dans le service a été réalisé et si celui-ci est positif. La découverte d’une telle bactérie chez un patient moins de 48 à 72 heures après l’admission laisse présumer que la bactérie a été transmise antérieurement par rapport au séjour actuel. biocontamination colonisation (colonisé) Contamination d’une surface (biologique ou inerte) ou d’un fluide par des micro-organismes véhiculés par l’air (contamination aéroportée ou aérobiocontamination), par des êtres vivants (la contamination par contact avec les mains en est la modalité majeure) ou par les objets. (Association pour la Prévention et l’Étude de la Contamination) Présence d’une bactérie dans un site qui en est normalement exempt, mais cette bactérie n’est responsable d’aucun symptôme local ou général d’infection ; exemple : présence d’une bactériurie isolée à Staphylococcus aureus dans les urines sans aucun signe d’infection urinaire. bactériostatique 364 cas importé HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 désinfectant nettoyage Produit ou procédé utilisé pour la désinfection, dans des conditions définies. Si le produit ou le procédé est sélectif, ceci doit être précisé. Ainsi, un désinfectant ayant une action limitée aux champignons est désigné par : désinfectant à action fongicide (AFNOR NFT 72 101). Opération d’élimination des salissures (particulaires, biologiques, liquide,...) avec un procédé faisant appel dans des proportions variables les unes par rapport aux autres, aux facteurs suivants : action chimique, action mécanique, temps d’action de ces deux paramètres et température. désinfection nettoyage-désinfectant ◆ Opération au résultat momentané permettant d’éliminer ou de tuer les micro-organismes et/ou d’inactiver les virus indésirables portés par des milieux inertes contaminés, en fonction des objectifs fixés. Le résultat de cette opération est limité aux micro-organismes présents au moment de l’opération (AFNOR NFT 72 101). L’usage du terme « désinfection » en synonyme de « décontamination » est prohibé. Produit présentant la double propriété de détergence et de désinfection (Société Française d’Hygiène Hospitalière). ◆ Terme générique désignant toute action à visée antimicrobienne, quel que soit le niveau de résultat, et utilisant un produit pouvant justifier in vitro des propriétés autorisant à le qualifier de désinfectant ou d’antiseptique. Il devrait logiquement toujours être accompagné d’un qualificatif et l’on devrait ainsi parler de : • désinfection des dispositifs médicaux (= du matériel médical) • désinfection des sols, • désinfection des surfaces par voie aérienne, • et même désinfection des mains ou d’une plaie (Société Française d’Hygiène Hospitalière et Comité Européen de Normalisation). ◆ Élimination dirigée de germes destinée à empêcher la transmission de certains micro-organismes indésirables, en altérant leur structure ou leur métabolisme indépendamment de leur état physiologique (CEN) HYGIENES - 1997 - VOLUME V - N°6 porteur (portage) Présence d’une bactérie dans un site où sa présence est habituelle sans qu’elle soit responsable d’infection ; exemple : présence de Staphylococcus aureus dans les narines ou dans d’entérobactéries dans les selles. précautions standard Ensemble des précautions d’hygiène qui s’appliquent à tout patient sans tenir compte de l’existence d’une éventuelle infection. Ces précautions intègrent la protection du personnel vis à vis des liquides biologiques, la prévention des accidents d’exposition au sang et les bonnes pratiques d’hygiène visant à limiter la transmission des micro-organismes hospitaliers lors des soins. Les précautions standard concernent l’hygiène des mains, les techniques de soins, le nettoyage et la désinfection du matériel de soins, l’entretien des locaux , de la vaisselle et du linge, la prévention des accidents d’exposition aux liquides biologiques dont le sang. L’application des précautions standard est indispensable à l’efficacité d’une politique de contrôle des infections nosocomiales. 365