refroidissement du réacteur à l'arrêt, et il n'y a bien sûr pas eu la moindre fuite de
radioactivité.» 882 Mais l'auteur poursuit ses propos par des considérations moins agréables
aux oreilles de l'exploitant : «Cet incident n'en a pas moins révélé une situation
potentiellement dangereuse, puisque l'arrêt intempestif du seul diesel en marche (par suite
d'erreur humaine ou pour tout autre cause) aurait créé une situation non sûre». Par situation
non sûre, l'auteur entend une situation qui aurait obligé les opérateurs à «improviser» selon
ses propres termes, c'est-à-dire à utiliser les quelques heures disponibles avant que le
refroidissement ne soit plus assuré, pour se brancher sur une autre alimentation électrique
comme par exemple l'un des six autres diesels disponibles sur le site. L'enseignement
principal de l'incident est que «les défaillances par dégradation lente, non prévues à la
conception, induisent des modes de fonctionnement aléatoires ainsi que des difficultés
d'interprétation des informations d'alarme de la salle de commande. Elles peuvent amener à
une situation complexe rendant la conduite de la tranche délicate.» 883
Parmi les conséquences réelles, outre les aspects techniques sur lesquels nous
revenons dans les lignes qui suivent, l'auteur précise que jusqu'à l'incident du 14 avril 84, «les
défaillances de sources étaient limitées à une seule et les procédures existantes ne tenaient pas
compte de cas, plus rares il est vrai, de perte de plusieurs sources. Le jour de l'incident,
aucune aide n'a pu être fournie aux opérateurs par les procédures existantes.» 884
En fait le principal problème qui est ressorti de l'incident est que le contrôle-commande de la
voie A a continué de fonctionner, mais avec une source de tension 48V qui allait en se
dégradant, ce qui a entraîné un mode commun de défaillances non décelé jusque-là : des
interdépendances complexes entre les différentes sources électriques ont été mises en
évidence à la suite de l'incident. Conséquence du mode commun et du fonctionnement en
mode dégradé, les moyens d'action normaux depuis la salle de commande ont été rendus
aléatoires, et les informations présentes en salle de commande n'ont plus reflété la réalité. En
effet, une baisse progressive de la tension affecte de façon variable et non simultanée le
comportement des actionneurs et relais : tandis que certains s'ouvrent par baisse de tension,
d'autres, pas tous, se ferment alors qu'ils devraient s'ouvrir.
Outre le mode commun, c'est la possibilité de défaillance non franche qui a fait l'objet des
mesures correctives les plus importantes : en effet, comme l'indique le Bulletin SN, «toutes
les analyses de sûreté, qu'elles soient déterministes ou probabilistes, ne prennent en compte
que les défaillances complètes des équipements, à l'exclusion des modes de fonctionnement
dégradés ou aléatoires. La prise en compte de tels fonctionnements n'est pas possible, en l'état
actuel de l'analyse. Tout doit donc être mis en œuvre pour éviter ce mode de défaillance.» 885