VIE PROFESSIONNELLE
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La Lettre du Pneumologue - Volume III - no2 - avril 2000
RÉSULTATS EN TERMES DE COÛT DE SÉJOUR
Parmi les différents segments existant en pneumologie, nous
avons retenu deux exemples à partir de notre expérience : d’une
part, le segment “Tumeur”, d’autre part, celui des “Maladies obs-
tructives”, totalisant respectivement 862 et 531 séjours en 1997.
Ces deux segments ont été choisis en raison de leur importance
en nombre de séjours et parce qu’ils illustrent de façon caracté-
ristique la perversité du système.
Le tableau I reprend le nombre des séjours et la dotation totale
en points ISA pour chaque segment. La dernière colonne cor-
respond à la durée moyenne de séjour (DMS) : elle est abaissée
pour le segment “Tumeur” en raison des durées d’hospitalisation
pour chimiothérapie inférieures à 24 heures. On peut voir que le
nombre de points ISA par séjour ou par RUM est d’emblée très
différent, deux fois plus élevé pour les maladies obstructives que
pour les tumeurs. Il n’existe pas de correspondance avec le rap-
port de 2 que l’on retrouve dans la dernière colonne (DMS) entre
ces deux segments puisque la durée de l’hospitalisation n’inter-
vient que partiellement dans l’attribution des points ISA dès
qu’elle dépasse 24 heures. En effet, tous les postes de la comp-
tabilité analytique ne sont pas ventilés en fonction de l’unité
d’œuvre qu’est la journée. Par conséquent, dès qu’une patholo-
gie est traitée en moins de 24 heures dans le cas, par exemple,
d’une chimiothérapie, la dotation en points ISA est réduite.
D’autre part, la chimiothérapie n’est pas prise en compte à un
tarif ISA différent de celui d’autres soins, alors qu’une chimio-
thérapie engendre un coût beaucoup plus élevé, par exemple,
qu’un bilan d’évolutivité, que ce soit en termes de dépenses de
pharmacie, de consommation de médicaments coûteux, de per-
sonnel infirmier qualifié mobilisé. Le segment “Tumeur” repré-
sente donc un amalgame au sein duquel le PMSI ne prend pas en
compte la diversité des soins, et en particulier ceux durant moins
de 24 heures.
Les séjours pour “Maladies obstructives” représentent un groupe
relativement plus homogène, constitué essentiellement d’hospi-
talisations conventionnelles. Les prises en charge pour cette
pathologie sont sans comparaison avec une prise en charge pour
chimiothérapie. Il est donc étonnant que la valorisation en points
ISA dans ce segment soit le double de celle du segment
“Tumeur”.
En tant que médecins, il nous est particulièrement difficile de rai-
sonner en termes de rentabilité financière et de points ISA, mais
jusqu’à quand pourrons-nous continuer à garantir une qualité des
soins et, par exemple, à privilégier la brièveté des séjours, notam-
ment lorsque ceux-ci sont coûteux ?
Pour reprendre l’exemple de la chimiothérapie, elle est le plus
souvent réalisée dans les secteurs d’hospitalisation programmée,
“géographiquement distincts” du secteur d’hospitalisation
conventionnelle, et dotés d’infirmières qualifiées dans ce
domaine. Or, une chimiothérapie en hôpital de jour se voit attri-
buer 239 points ISA dans le GHM 817, et 930 points ISA en hos-
pitalisation conventionnelle de plus de 24 heures sans complica-
tion majeure associée dans le GHM 587 (version V4 en 1997).
Devrions-nous alors opter pour ce mode de prise en charge, et
donc non seulement hospitaliser un peu plus longuement des
patients déjà très éprouvés, mais aussi les exposer sur un plan
infectieux à des complications potentielles ?
Pour équilibrer un budget de service, nous pourrions par ailleurs
être incités à refuser certaines prises en charge coûteuses et déva-
lorisées, soit en refusant certains patients, soit en les privant des
traitements les plus récents ; il nous serait également possible de
garder une activité diversifiée et de modifier nos pratiques dans
les secteurs les moins rentables, au détriment d’une certaine qua-
lité de soin.
Il est bien évident que ces deux éventualités sont peu satisfai-
santes, et même peu éthiques. Par ailleurs, on voit mal comment
réaliser des économies toujours plus importantes, et sur quel poste
budgétaire, alors que les médicaments sont de jour en jour plus
coûteux, et que les dérivés sanguins sont soumis à toujours plus
de contraintes majorant leur coût. Il semble également hors de
propos d’économiser sur le coût des personnels, au risque de
mettre en jeu la sécurité des patients et de ne pas pouvoir satis-
faire à la qualité de soins que l’on nous demande.
Puisque la comptabilité analytique nous permet d’évaluer un coût
moyen par patient dans un segment, on peut imaginer que l’attri-
bution d’un “forfait patient” soit une réponse possible au pro-
blème. Plus largement, l’élaboration d’un coût par pathologie
pourrait permettre une valorisation plus juste.
CONCLUSION
Les médecins ont donc à se mobiliser et à argumenter pour une
valorisation exacte, s’ils veulent continuer à préserver leur façon
d’exercer la médecine. Le risque de nous voir imposer une modi-
fication de notre pratique nécessite d’être des acteurs attentifs,
capables de proposer des solutions alternatives pour que notre
pratique, tout en restant rentable sur le plan financier, le soit éga-
lement pour notre éthique médicale et la qualité des soins. ■
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES
1. Vergnenègre A. et le Groupe d’évaluation de la SPLF. Codage PMSI. Thé-
saurus de codage de l’activité en pneumologie. Info Respiration, octobre
1998 ; 27 : 15-22.
2. Leclercq M., Gueuze F. ATHAC : une nouvelle approche du management
hospitalier. Gestions hospitalières, octobre 1998 ; 629-34.
Segment Séjour Total ISA /séjour Patients /patient Journées /jour DMS
Tumeur 862 641 769 745 221 2 903,9 3 161 203 3,67
Mal. obstr. 531 802 677 1 512 398 2 016,7 3 991 201 7,52
Tableau I. Répartition du nombre de points ISA totalisés dans les seg-
ments “Tumeur” et “Maladies obstructives”.