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doi:10.1684/abc.2013.0930
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Pour citer cet article : Lamoril J, Bogard M. La médecine génomique, une réalité en pleine évolution Deuxième partie. Ann Biol Clin 2014 ; 72(1) : 25-48
doi:10.1684/abc.2013.0930
Synthèse
Ann Biol Clin 2014 ; 72 (1) : 25-48
La médecine génomique, une réalité
en pleine évolution
Deuxième partie*
Genomic medicine: the new way of thinking medicine
Present and future – Part two**
Jérôme Lamoril1
Marc Bogard2
1Département de génétique
moléculaire, Hôpital Bichat, Hôpitaux
Universitaires Paris Nord Val de Seine,
Paris, France
2Laboratoire de biologie, Centre
hospitalier d’Argenteuil, France
Résumé. Les nouvelles techniques de séquenc¸age constituent une révolution
médicale dont les applications en médecine sont considérables. Nous sommes
à une période technologique charnière majeure. En effet, le saut technologique
réalisé par ces nouvelles machines permet désormais d’analyser notre génome
de manière élargie, voire en totalité. Les applications sont considérables dans
tous les domaines de la médecine d’autant plus qu’en parallèle de cette révo-
lution, de nouvelles molécules ciblant les protéines codées par certains gènes
permettent d’espérer des survies prolongées, voire des guérisons dans certains
cancers ou de viser des traitements dans d’autres pathologies. La génétique
alors réservée aux généticiens arrive progressivement dans la médecine quoti-
dienne. Une nouvelle fac¸on de penser la médecine est en train de germer. Cet
article expose dans ses principales lignes les applications actuelles, mais aussi
les défis et les problèmes portés par ces nouvelles technologies dans le monde
médical tant pour les professionnels de la génétique que pour les médecins non
généticiens qui seront de plus en plus confrontés à ces nouvelles analyses.
Mots clés : génome humain, technique de Sanger, génomique, séquen¸cage
Abstract. New sequencing techniques are revolutionizing medical practice as
its applications are numerous and considerable. We are living a technological
turning point in molecular medicine. Indeed, thanks to these new machines, this
technological leap allowed us to analyse the human genome with an elarged or
even a total view. Genome analysis has applications in all medical fields from
now on. Gene analysis in parallel with personalized therapy help in prolonged
survival or even cures in some cancers or other diseases. Genetics is progressi-
vely arriving in every field of clinical practice. A new way of thinking clinics is
born. This publication describes in its main lines these new applications, their
problems and their challenges for geneticists as much as for other practitioners
in the medical fields.
Key words: human genome, Sanger, genomics, sequencing
*La première partie de ce travail a été publiée dans Immunoanal Biol Spec 2013 ; 28 (2-3) : 93-108.
** First part has been published in Immunoanal Biol Spec 2013; 28(2-3): 93-108.
L’année 2013 marque le dixième anniversaire de
l’achèvement officiel du séquenc¸age du premier génome
humain (Human genome project). Cette date historique
marque le début de la médecine génomique en permet-
tant d’établir les fondations d’une nouvelle médecine à
l’échelle moléculaire (même si la génétique moléculaire
existe depuis les années 1980) et en stimulant l’arrivée de
nouvelles technologies d’analyse moléculaire (les séquen-
ceurs de nouvelle génération, les nouveaux outils de
bio-informatique, le développement de la biologie des
Tirés à part : J. Lamoril
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26 Ann Biol Clin, vol. 72, n1, janvier-février 2014
Synthèse
systèmes, l’établissement de nouvelles bases de données,
etc.). La médecine génomique prend progressivement pied
dans les laboratoires et son apport dans le diagnostic, le trai-
tement et le suivi du patient devient indispensable. Dans
cette deuxième partie, nous allons présenter les aspects
actuels de cette médecine génomique. Nous évoquerons
aussi l’avenir dans ce domaine. Il est conseillé au lecteur
de relire la première partie de cet article pour comprendre
certaines notions reprises dans ce document [1].
Les succès de la médecine génomique
en 2013
Les technologies de séquenc¸age
Les nouvelles techniques de séquenc¸age appelées encore
séquenc¸age de nouvelle génération (NGS, next-generation
sequencing) ont été décrites à la fin des années 1990. Leur
utilisation dans les laboratoires de recherche a débuté dès
l’année 2005. Grâce aux nouveaux séquenceurs, le coût
du séquenc¸age a considérablement diminué passant de
100 millions de dollars au début des années 2000 à environ
3 000 dollars actuellement pour un génome entier (et envi-
ron 700 Dpour un exome, qui représente 1,5 % du génome
entier) [2] (figure 1).
À ce jour, un nombre croissant de laboratoires de génétique
constitutionnelle (laboratoires étudiant les maladies héré-
ditaires) analyse les pathologies par séquenc¸age d’exome
et/ou par séquenc¸age de plusieurs zones géniques (analyse
d’amplicons obtenues par PCR multiplex, appelée aussi
National Human Genome
Research In stitute
NIH
genome.gov/sequencingcosts
Moore’s Law
$1K
$10K
$100K
$1M
$10M
$100M
2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013
Figure 1. Évolution du coût du séquenc¸age du génome humain de 2001 à 2013.
séquenc¸age ciblé). Le but de ces analyses est de rechercher
des mutations sur un nombre potentiellement important de
gènes candidats ou sur des gènes de grande taille (contenant
de nombreux exons). Le séquenc¸age d’exome (analyse des
parties codantes des gènes, souvent associée à l’analyse de
parties non codantes des exons, des jonctions exons/introns,
et éventuellement des promoteurs) est une stratégie de plus
en plus utilisée pour les maladies mendéliennes, maladies
héréditaires rares. Les premières utilisations du séquenc¸age
d’exome réalisées avec succès pour des maladies men-
déliennes ont été rapportées en 2009 pour le syndrome
de Freeman-Sheldon, le syndrome de Miller, la diarrhée
congénitale au chlore [3-6]. En parallèle de cette tech-
nologie, les études d’association tout génome (GWAS,
Genome wide association studies) ont permis de trouver
de nouveaux variants associés à de nombreuses patho-
logies et de découvrir de nouvelles voies métaboliques
insoupc¸onnées et impliquées dans ces dernières (notam-
ment dans les maladies inflammatoires, les cancers et les
maladies infectieuses), ainsi que dans les maladies dites
communes (comme les diabètes, l’hypertension artérielle,
les maladies cardiovasculaires).
Le séquenc¸age ciblé de pathologies :
un tournant en médecine génomique
Jusqu’à aujourd’hui, le séquenc¸age selon la technique
de Sanger décrite ilya30ansestconsidérée comme
la technique de séquenc¸age de référence (gold standard
comme disent les Anglo-Saxons). Elle est encore utilisée
dans l’analyse de nombreuses maladies héréditaires comme
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La médecine génomique, une réalité en pleine évolution
par exemple la mucoviscidose (dont le gène muté est
CFTR). Cependant, de nombreuses maladies présentent une
grande hétérogénéité génétique. C’est le cas par exemple
de la rétinite pigmentaire (dégénérescence de la rétine
aboutissant à une perte progressive de la vue et la cécité)
dans laquelle au moins 60 gènes sont impliqués. Dans
ce dernier exemple, l’identification des mutations par la
technique de Sanger est non seulement longue, fastidieuse
et coûteuse mais aussi aléatoire, le phénotype clinique
n’orientant pas vers un gène en particulier (absence de
corrélation génotype/phénotype). A l’aide des nouveaux
séquenceurs, l’analyse d’une telle pathologie est désormais
possible avec un laps de temps d’analyse réduit, un coût
bien moindre et une probabilité de découvrir le gène causal
important.
L’évolution des laboratoires cliniques
de génétique moléculaire vers l’utilisation
des séquenceurs de nouvelle génération
Depuis environ1à2ans, on assiste à une transition des
laboratoires vers ces nouvelles machines. Cette transition
s’applique progressivement non seulement vers les labora-
toires cliniques de génétique constitutionnelle, mais aussi
vers ceux de génétique somatique et de microbiologie.
On passe donc progressivement et schématiquement de
l’analyse d’un gène (technique de Sanger) vers l’analyse
multi-gènes (nouveaux séquenceurs) (tableau 1). Même
les analyses par CGH (Comparative genomic hybridi-
zation ou puces génomiques d’hybridation comparative)
dont l’objectif est la mise en évidence de réarrangements
géniques (duplication ou délétion de régions génomiques
par exemple) sont progressivement remplacées par ces tech-
nologies [7]. Néanmoins, à ce jour, la technique de Sanger
reste d’actualité lorsque l’analyse concerne un petit gène
ou quelques exons (par exemple, séquenc¸age d’un exon
dans le cadre d’une enquête familiale pour laquelle la muta-
tion est connue) ou encore pour confirmer une mutation
découverte par les nouveaux séquenceurs. À ce jour, le coût
de ces séquenceurs (en 2013 entre 75 et 100 kDselon la
machine) et des réactifs justifie leur utilisation dans le cadre
de l’analyse de nombreux patients et de plusieurs cibles
simultanément. Actuellement, ces séquenceurs sont utili-
sés tant en génétique constitutionnelle pour les maladies
présentant une grande hétérogénéité génétique (comme la
rétinite pigmentaire évoquée ci-dessus) que pour les gènes
de grande taille (par exemple, analyse du gène de la fibril-
line, FBN1 dans la maladie de Marfan qui contient 65
exons) qu’en génétique somatique (cancers, cf. infra). Avec
la baisse des coûts, l’apprentissage et la familiarisation des
nouveaux modes opératoires et d’analyse bio-informatique
de ces séquenceurs, il est fort probable que dans les années
à venir, la technique de Sanger disparaîtra complètement.
Non seulement l’identification des mutations peut-elle être
faite, mais une intervention thérapeutique ciblée plus rapide
peut être réalisée si le gène muté est rapidement identifié.
Par exemple, le gène de l’alpha-galactosidase (GLA) dont
les mutations sont responsables de la maladie de Fabry,
peut dans certains cas être la cause d’une cardiomyopa-
thie hypertrophique (CMH) isolée (elle représente 2 %
des causes de CMH). Or, si ce gène est muté, une théra-
pie enzymatique spécifique permet de la traiter. Intégrée
dans le panel d’analyse des nouveaux séquenceurs dans
le cadre des recherches de mutations, l’identification de
mutations dans ce gène est rapide et permet une interven-
tion thérapeutique (qui n’existe pas si d’autres gènes dans
cette maladie sont mutés). Cette technologie permet aussi
d’aider le clinicien à établir un diagnostic. Si on reprend
l’exemple des cardiomyopathies, bien qu’un cardiologue
expert à l’aide de nombreux tests peut souvent établir le dia-
gnostic précis, il existe parfois des difficultés à distinguer
les différents phénotypes possibles (cardiomyopathie dila-
tée, hypertrophique et ventriculaire droite arythmogène par
exemple). L’analyse simultanée de plusieurs gènes impli-
qués dans les cardiomyopathies permet alors d’identifier
le gène causal et de le relier à la pathologie suspectée.
On peut aussi citer l’analyse de la surdité chez un enfant.
De nombreuses causes peuvent provoquer une hypoacou-
sie/surdité et de nombreux tests sont entrepris pour trouver
la cause (tests infectieux, imagerie de l’oreille interne,
électrocardiogramme, échographie rénale, dosage des hor-
mones thyroïdiennes par exemple). Actuellement, devant
une perte d’audition d’un enfant sans explication évidente,
une analyse génétique est d’emblée entreprise. Elle per-
met de retrouver 50 % des causes d’hypoacousie/surdité.
Dans tous les cas, le délai moyen de rendu du résultat est
d’environ 2 mois, bien plus rapide que les autres tests sans
compter l’errance diagnostique de plusieurs années souvent
observées avant d’arriver au diagnostic.
Que détectent les séquenceurs nouvelles
génération ?
Les mutations ponctuelles
Dans le cadre de l’oncogénétique somatique (génétique
des cancers non héréditaires), ces mutations peuvent être
activatrices (d’un oncogène) ou inactivatrices (d’un gène
suppresseur de tumeur). Ainsi, les mutations du gène KIT
observées dans les GIST (gastrointestinal stromal tumors,
tumeurs stromales gastro-intestinales) sont activatrices et
répondent au traitement par des inhibiteurs de tyrosine
kinase tels que l’imatinib ou le nilotinib. Les patients ayant
un mélanome et la mutation activatrice p.Val600Glu dans
le gène BRAF répondent au traitement par le vémurafénib
(anti-Braf). La détection de certaines mutations dans des
gènes ciblés permet donc une action thérapeutique.
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Synthèse
Tableau 1. Exemples d’applications dans lesquelles de nombreux gènes sont impliqués et pour lesquelles l’utilisation de séquenceurs
nouvelles génération est réalisée [16].
Type de pathologies Exemples de pathologies Nombre de gènes
analysables
Cancers Cancers héréditaires (cancer du sein, syndrome de Lynch
[HNPCC, hereditary non polyposis colorectal cancer]2-50
Maladies cardiaques
Cardiomyopathies 50-70
Arrythmies (par exemple, syndrome du long QT) 10-30
Aortopathies (par exemple, syndrome de Marfan) 2-10
Les dysfonctionnements
immunitaires Déficits immunitaires combinés sévères 18
Les fièvres périodiques 7
Les maladies
neurologiques,
neuromusculaires
et métaboliques
Ataxies 40
Troubles du métabolisme énergétique cellulaire 656
Anomalies congénitales de la glycosylation 23-28
Démences et maladies dégénératives 32
(exemple : maladie d’Alzheimer)
Autisme, retards intellectuels et du développement 30-150
Epilepsies 53-130
Neuropathies héréditaires 14
Microcéphalies 11
Maladies mitochondriales 37-450
Dystrophies musculaires 12-45
Troubles sensoriels Maladies oculaires (par exemple, rétinite pigmentaire) 66-140
Surdités et syndromes associés 23-72
Divers
RASopathies (par exemple, syndrome de Noonan) 10
Maladies avec atteinte pulmonaire (par exemple, mucoviscidose) 12-40
Troubles de la croissance osseuse 12
Cependant, dans la majorité des cancers, de multiples muta-
tions sur de nombreux gènes sont présentes. Il existe une
grande hétérogénéité génétique des mutations. Une étude
récente a ainsi identifié 750 mutations ponctuelles chez un
patient atteint de leucémie aiguë myéloblastique (dont 64
dans les régions codantes ou régulatrices). Seulement 4 des
64 mutations identifiées étaient retrouvées chez d’autres
patients atteints de la même pathologie [8]. Cependant,
l’analyse des mutations permet d’observer que les voies
métaboliques pour lesquelles des gènes sont mutés sont
similaires dans un grand nombre de cas. Ainsi, une étude
portant sur l’analyse de mutations dans des cancers de la
tête et du cou a montré que 30 % des mutations se trouvaient
dans des gènes impliqués dans la régulation de la différen-
ciation épidermoïde (par exemple Notch1, IRF6 et TP63)
[9]. Ces études permettent de rechercher des traitements
visant non seulement des cibles spécifiques mais aussi des
voies métaboliques impliquées directement ou non.
Les anomalies chromosomiques
En continuant notre exemple avec l’oncogénétique soma-
tique, de nombreuses régions du génome sont soit
amplifiées soit délétées. C’est le cas par exemple, de la
région du chromosome 17q12 contenant le gène HER2
amplifié dans certains cancers du sein. Cette amplification
traduit un cancer du sein plus agressif. Ce dernier peut alors
être traité par un anti-HER2, le trastuzumab (Herceptin®).
À l’aide des nouveaux séquenceurs, l’analyse de telles
régions est possible et permet une approche plus facile
et nécessitant moins de matériel que l’utilisation de CGH
(Comparative genomic hybridization ou puces génomiques
d’hybridation comparative) ou de technique alternative
équivalente, techniques actuellement utilisées.
Les translocations chromosomiques peuvent également
être étudiées telles que le transcrit ABL-BCR ou
t(9 ;22)(q34 ;q11) dans la leucémie myéloïde chronique, le
transcrit EML-ALK dans les cancers du poumon ou encore
le transcrit TMPRSS2-ERG dans le cancer de la prostate.
Le transcriptome
L’analyse du transcriptome (appelé aussi RNA-seq) per-
met d’analyser l’expression des ARN et leurs anomalies
(par exemple transcrits anormaux comme ceux décrits
dans le paragraphe ci-dessus). Certains tests comme
MammaPrint® et Oncotype DX® ont été développés dans
ces indications (voir infra).
L’analyse bio-informatique
L’analyse des séquences obtenues par ces appareils est
évaluée à l’aide d’outils informatiques puissants. Afin de
s’assurer de la qualité des échantillons, quelques contrô-
les de base sont indispensables. Nous n’en citerons que
quelques-uns.
Le score de qualité de la séquence appelée Phred
l’origine, ce score a été développé pour les séquenceurs
capillaires (méthode de Sanger) et estimait la probabilité
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La médecine génomique, une réalité en pleine évolution
que la base lue par la machine soit la bonne [10, 11]. Ce
score Phred est donné pour toutes les bases de la séquence
lues par la machine. Par exemple, si le séquenceur lit la
séquence 5’-ACGTGGA.... et que le A souligné a un score
Phred de 20, cela signifie que la base allouée à la séquence
présente 1/100 d’être fausse (99 % de chance d’être cor-
recte). S’il est de 30, la probabilité d’être fausse est de
1/1 000 (99,9 % de chances d’être correcte). Le score mini-
mum d’un Phred doit être de 20. Certains estiment qu’il est
souhaitable d’obtenir un score de 30 au minimum. À noter
que pour les séquenceurs capillaires (méthode de Sanger)
les utilisateurs jugent qu’une séquence est bonne si le Phred
est de 20 au minimum.
Le taux de couverture : il représente le nombre de fois
qu’une séquence est lue (par exemple, un taux de couverture
de 10 fois se dit 10X). Ainsi, lorsqu’il s’agit d’un échan-
tillon de sang, pour qu’une base d’une séquence ait une
exactitude de 1/1 million, le taux de couverture doit être de
50X au minimum. Certains fixent ce taux à 100X [12]. Bien
qu’aucun consensus officiel n’existe, il semble que dans le
cas de la génétique constitutionnelle (génome diploïde), un
taux moyen de couverture de 50X permette de génotyper
correctement le génome avec 95 % d’exactitude. Dans le cas
de la génétique somatique où le tissu cancéreux se trouve
au sein de tissu normal, ce taux de couverture est large-
ment insuffisant. La détection de mutations somatiques est
ainsi plus ardue. Par ailleurs, pour complexifier un peu plus,
on sait qu’il existe une hétérogénéité génétique des diffé-
rents clones tumoraux dans un grand nombre de cancers.
Il n’existe pas de consensus pour le taux de couverture.
On estime qu’au minimum il faut 500X (et pour certains,
1 000X) pour éviter un taux d’erreurs important dans le
séquenc¸age des tumeurs.
Le taux de détection : classiquement, la technique de Sanger
permet de détecter des variants présents à un taux faible (par
exemple, mélange d’un tissu muté et d’un tissu sain) avec
un seuil de détection supérieur à 15-20 % alors que les
séquenceurs nouvelles génération descendent à un seuil de
1-2 % [13].
Différencier un polymorphisme d’une mutation somatique
(en oncogénétique) : chacun d’entre nous possédant 3-
4 millions de SNP, il est nécessaire de les différencier
des mutations somatiques. Ainsi, dans une analyse génome
entier, il est nécessaire d’avoir du tissu normal (par exemple
salive ou sang) pour comparer l’ADN normal de l’ADN
tumoral. La complexité de l’analyse est encore accrue par
la présence de variation du nombre de copies de gènes dont
certaines sont normales.
L’analyse des résultats : il n’existe pas un mais plu-
sieurs logiciels d’analyse des résultats du séquenc¸age. Ces
nombreux logiciels ont été développés pour la recherche
essentiellement. Cependant, un certain nombre d’entre eux
ont été adaptés pour l’analyse clinique bien qu’aucun
à notre connaissance n’ait fait l’objet d’une évaluation.
Il n’existe d’ailleurs pas à ce jour de consensus sur la
méthodologie d’analyse dans le cadre du domaine clinique.
La standardisation tant de l’analyse bio-informatique que
dans l’interprétation est un manque majeur. Par ailleurs,
il n’existe pas une base de données unique permettant
l’interprétation des résultats (mutations, polymorphismes,
variant du nombre de copies) (exemples : 1 000 génomes,
Exome Variant Server, HGMD). Plusieurs bases de données
doivent être interrogées afin de connaître la pathogénicité
ou la bénignité d’un variant (exemples : Alamut, SIFT,
PolyPhen2).
Le problème du stockage des données : selon le type de
séquenc¸age (tout génome, exome, séquenc¸age ciblé), la
quantité de données par patient varie de quelques gigaoc-
tets à plusieurs téraoctets de données informatiques. Les
ressources informatiques non seulement d’analyse des don-
nées mais aussi de stockage vont rapidement devenir un réel
problème. Le stockage « dans les nuages » (Cloud) est une
solution. Mais, elle constitue un risque en cas de fermeture,
de piratage ou de panne du site « dans les nuages ». Par
ailleurs, les problèmes de l’archivage, de l’accession aux
données, de la sécurité des données, de leur sauvegarde, de
leur destruction éventuelle ne sont pas résolus (pas de loi
tant nationale qu’internationale claires sur ce sujet). Enfin,
l’analyse des données d’un patient tant pour le diagnostic
que le pronostic, la surveillance thérapeutique (entre autres)
doit pouvoir être interopérable d’un système informatique
à l’autre et accessible pour le médecin. Le génome indivi-
duel doit donc être accessible (et compréhensible) pour le
médecin soignant et le patient.
De nombreux logiciels d’analyse et d’aide à l’interprétation
sont disponibles. Dans la jungle des logiciels, comme il a
été écrit ci-dessus, il est parfois difficile de s’y retrouver
d’autant plus que les formations en bio-informatique pour
les médecins sont quasi inexistantes. Une revue récente
résume les principaux logiciels utilisables [14].
Considérations analytiques des séquenceurs
de nouvelle génération [15]
Outre les problèmes informatiques exposés ci-dessus, les
problèmes d’ordre analytique ne doivent pas être oubliés.
On peut en citer quelques exemples :
il n’existe pas de protocole consensuel de validation tech-
nique des appareils. Celui-ci doit porter entre autres sur
l’exactitude, la précision, la sensibilité, la spécificité, les
limites de détection, les régions analysées, la technique de
référence actuelle étant toujours la méthode de Sanger ;
des contrôles de qualité sont actuellement mis en place
tant sur le plan national qu’international. L’établissement
d’un matériel ADN de référence est indispensable ;
la nécessité de guides de bonne pratique de ces machines,
en cours de rédaction.
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