UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE - CMGE

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UNIVERSITE PIERRE ET MARIE CURIE
(PARIS VI)
FACULTE DE MEDECINE PIERRE ET MARIE CURIE
ANNEE 2010
N° 2010PA06G019
THESE
POUR LE
DOCTORAT EN MEDECINE
DISCIPLINE : MEDECINE GENERALE
PRESENTEE ET SOUTENUE PUBLIQUEMENT LE 7 MAI 2010
PAR
Melle SCHOEPF Isabelle
Née le 26 août 1964 à Fontainebleau
CONTRACEPTION ORALE
ET
RISQUE DE CANCER DU SEIN
Revue systématique d’études
épidémiologiques observationnelles
DIRECTEUR DE THESE :
Madame le Docteur et Maître de conférences Liliane MARMIE
PRESIDENT DU JURY :
Monsieur le Professeur Aimery DE GRAMONT
MEMBRES DU JURY :
Madame le Professeur Sophie CHRISTIN-MAITRE
Madame le Professeur Frédérique KUTTENN
Madame le Docteur et Maître de conférences Nathalie CHABBERT-BUFFET
1
A Eric,
A mes parents,
2
REMERCIEMENTS
Au Docteur Liliane MARMIE, pour avoir accepté avec enthousiasme d'être mon
directeur de Thèse, m'avoir encouragé et guidé dans ce travail.
Au Professeur Aimery DE GRAMONT, pour avoir accepté de présider le Jury de ma
Thèse et pour l‟intérêt et l‟attention portés à ce travail.
Au Professeur Sophie CHRISTIN-MAITRE, pour sa présence en temps que membre
de mon Jury et ses conseils avisés.
Au Professeur Frédérique KUTTENN, pour avoir accepté sans hésitation de
participer à mon Jury.
Au Docteur Nathalie CHABBERT-BUFFET, pour ses encouragements, ses précieux
conseils, et sa participation à mon Jury.
Merci à tous ceux qui m'ont aidée de près ou de loin dans la réalisation de ce travail.
A Eric. Je te dois l'essentiel, le bonheur de vivre à tes côtés, ainsi que l'achèvement
de ce travail ; merci pour ton courage, ton infinie patience, les sacrifices que tu as
acceptés si généreusement.
A mes parents, pour leur affection, leur soutien et leur confiance.
A ma soeur Caroline, pour son aide et son affection inconditionnelles, sa présence
essentielle et protectrice.
A ma grande soeur Olga et à ma nièce Mathilde pour l'aide qu'elles m'ont apportée,
et le bonheur de leur indispensable présence.
A ma tante et marraine, Geneviève SOUDY, pour son soutien affectueux et
primordial, sa générosité, et pour la courageuse touche finale de la professionnelle
de l'orthographe.
A ma très chère famille nordiste et en particulier
à Elisabeth CREPIN et à Isabelle LEMAN, mes consciencieuses relectrices, pour
leur courage, leur générosité et leur affection ;
à Michel BOURDELANDE pour la pertinence de ses conseils, précis et
réconfortants;
ainsi qu‟à Marie-Christine CREPIN pour ses affectueux encouragements.
3
Liste des PU-PH de la Faculté de Médecine Pierre et marie Curie
Site Saint-Antoine
AMARENCO Gérard
Rééducation fonctionnelle et neurologique
Hôpital ROTHSCHILD
AMSELEM Serge
Génétique
Hôpital TROUSSEAU
ANDRE Thierry
Cancérologie
Hôpital La Salpétrière
ANTOINE Jean Marie
Gynécologie Obstétrique / Médecine de la Reproduction
Hôpital TENON
ARACTINGI Sélim
Unité de Dermatologie
Hôpital TENON
ARLET Guillaume
Bactériologie
Hôpital TENON
ARRIVE Lionel
Radiologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
AUCOUTURIER Pierre
INSERM U 712
Hôpital Saint-Antoine
AUDRY Georges
Chirurgie viscérale infantile
Hôpital TROUSSEAU
BALLADUR Pierre
Chirurgie générale et digestive
Hôpital SAINT-ANTOINE
BARDET Jean (surnombre)
Cardiologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
BAUD Laurent
Explorations fonctionnelles multidisciplinaires
Hôpital TENON
4
BAUDON Jean Jacques (surnombre)
Néonatologie
Hôpital TROUSSEAU
BEAUGERIE Laurent
Gastroentérologie et Nutrition
Hôpital SAINT-ANTOINE
BEAUSSIER Marc
Anesthésie – Réanimation
Hôpital SAINT-ANTOINE
BENIFLA Jean Louis
Gynécologie Obstétrique
Hôpital ROTHSCHILD
BENSMAN Albert
Néphrologie, Dialyses et transplantations pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
BERENBAUM Francis
Rhumatologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
BEREZIAT Gilbert (surnombre)
UMR 7079 Physiologie et physiopathologie
Campus Jussieu
BERNAUDIN Jean François
Histologie biologie tumorale
Hôpital TENON
BILLETTE DE VILLEMEUR Thierry
Neuropédiatrie
Hôpital TROUSSEAU
BOCCON GIBOD Liliane (surnombre)
Anatomie pathologique
Hôpital TROUSSEAU
BONNET Francis
Anesthésie réanimation
Hôpital TENON
BORDERIE Vincent
Ophtalmologie
CNHO des 15/20
BOUCHARD Philippe
Endocrinologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
5
BOUDGHENE STAMBOULI Franck
Radiologie
Hôpital TENON
BREART Gérard
Gynécologie obstétrique
Hôpital TENON
CABANE Jean
Médecine interne
Hôpital SAINT-ANTOINE
CADRANEL Jacques
Pneumologie
Hôpital TENON
CALLARD Patrice
Anatomie pathologique
Hôpital TENON
CAPEAU Jacqueline
Inserm U.680
Faculté de Médecine P. & M. Curie
CARBAJAL SANCHEZ Ricardo
Urgences pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
CARBONNE Bruno
Gynécologie obstétrique
Hôpital SAINT-ANTOINE
CARETTE Marie France
Radiologie
Hôpital TENON
CASADEVALL Nicole
Hématologie biologique
Hôpital SAINT-ANTOINE
CAYRE Yvon
Hématologie immunologie
Hôpital DEBRE
CHAZOUILLERES Olivier
Hépatologie gastrœntérologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
CHOSIDOW Olivier
Dermatologie – Allergologie
Hôpital TENON
6
CHOUAID Christos
Pneumologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
CHRISTIN-MAITRE Sophie
Endocrinologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
CLEMENT Annick
Pneumologie
Hôpital TROUSSEAU
CLERGUE François
Détaché au Ministère des Affaires Etrangères : Hôpital Cantonal / Anesthésiologie
24, rue Micheli-du-Crest
Genève 14 - Suisse
COHEN Aron
Cardiologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
CONSTANT Isabelle
Anesthésiologie réanimation
Hôpital TROUSSEAU
COSNES Jacques
Gastro-entérologie et nutrition
Hôpital SAINT-ANTOINE
COULOMB Aurore
Anatomie et cytologie pathologiques
Hôpital TROUSSEAU
DAMSIN Jean Paul
Orthopédie
Hôpital TROUSSEAU
DARAI Emile
Gynécologie obstétrique
Hôpital TENON
DE GRAMONT Aimery
Oncologie médicale
Hôpital SAINT-ANTOINE
DENOYELLE Françoise
ORL et chirurgie cervico-faciale
Hôpital TROUSSEAU
DEVAUX Jean Yves
Biophysique et médecine nucléaire
Hôpital SAINT-ANTOINE
7
DOUAY Luc
Hématologie biologique
Hôpital TROUSSEAU
DOURSOUNIAN Levon
Chirurgie orthopédique
Hôpital SAINT-ANTOINE
DUCOU LE POINTE Hubert
Radiologie
Hôpital TROUSSEAU
DURON Françoise
Endocrinologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
DUSSAULE Jean Claude
Physiologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
FAUROUX Brigitte
Gastro-entérologie et nutrition pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
FERON Jean Marc
Chirurgie orthopédique et traumatologique
Hôpital SAINT-ANTOINE
FLEJOU Jean François
Anatomie pathologique
Hôpital SAINT-ANTOINE
FLORENT Christian
Hépato gastro-entérologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
FRANCES Camille
Dermatologie – Allergologie
Hôpital TENON
FUNCK BRENTANO Christian
Pharmacologie clinique
Hôpital SAINT-ANTOINE
GARABEDIAN Eréa Noël
ORL et chirurgie cervico-faciale
Hôpital TROUSSEAU
GARBARG CHENON Antoine
Bactériologie virologie
Hôpital TROUSSEAU
8
GATTEGNO Bernard (surnombre)
Urologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
GENDRE Jean Pierre (surnombre)
Gastro-entérologie et nutrition
Hôpital SAINT-ANTOINE
GIRARD Pierre Marie
Maladies infectieuses et tropicales
Hôpital SAINT-ANTOINE
GIRARDET Jean Philippe
Gastro-entérologie et nutrition pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
GIROT Robert
Hématologie biologique
Hôpital TENON
GOLD Francis
Néonatologie
Hôpital TROUSSEAU
GORIN Norbert
Hématologie clinique
Hôpital SAINT-ANTOINE
GRATEAU Gilles
Médecine interne
Hôpital TENON
GRIMFELD Alain (surnombre)
Pédiatrie orientation pneumologie et allergologie
Hôpital TROUSSEAU
GRIMPREL Emmanuel
Pédiatrie générale
Hôpital TROUSSEAU
GRUNENWALD Dominique
Chirurgie thoracique
Hôpital TENON
GUIDET Bertrand
Réanimation médicale
Hôpital SAINT-ANTOINE
HAAB François
Urologie
Hôpital TENON
9
HELARDOT Pierre Georges
Chirurgie viscérale infantile
Hôpital TROUSSEAU
HOURY Sidney
Chirurgie digestive et viscérale
Hôpital TENON
HOUSSET Chantal
Biologie cellulaire – Inserm U. 680
Faculté de Médecine P. & M. Curie
JAILLON Patrice
Pharmacologie clinique
Faculté de Médecine P. & M. Curie
JOUANNIC Jean-Marie
Gynécologie obstétrique
Hôpital TROUSSEAU
JUST Jocelyne
Pneumologie et allergologie pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
LACAINE François
Chirurgie digestive et viscérale
Hôpital TENON
LACAU SAINT GUILY Jean
ORL
Hôpital TENON
LACAVE Roger
Histologie biologie tumorale
Hôpital TENON
LANDMAN-PARKER Judith
Hématologie et oncologie pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
LAROCHE Laurent
Ophtalmologie
CHNO des Quinze-Vingts
LE BOUC Yves
Explorations fonctionnelles
Hôpital TROUSSEAU
LEBEAU Bernard
Pneumologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
10
LEGRAND Ollivier
Hématologie oncologie médicale
Hôpital HOTEL DIEU
LEVERGER Guy
Hématologie et oncologie pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
LEVY Richard
Neurologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
LIENHART André
Anesthésie – Réanimation
Hôpital SAINT-ANTOINE
LOTZ Jean Pierre
Cancérologie
Hôpital TENON
LOUVET Christophe
Oncologie médicale
Hôpital SAINT-ANTOINE
MARIE Jean Pierre
Hématologie
Hôpital HOTEL-DIEU
MARSAULT Claude
Radiologie
Hôpital TENON
MASLIAH Joëlle
Inserm U.538
Faculté de Médecine P. & M. Curie
MAURY Eric
Réanimation médicale
Hôpital SAINT-ANTOINE
MAYAUD Marie Yves
Pneumologie
Hôpital TENON
MENU Yves
Radiologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
MEYER Bernard
ORL et chirurgie cervico-faciale
Hôpital TENON
11
MEYOHAS Marie Caroline
Maladies infectieuses et tropicales
Hôpital SAINT-ANTOINE
MICHEL Pierre Louis
Cardiologie
Hôpital TENON
MILLIEZ Jacques
Gynécologie obstétrique
Hôpital SAINT-ANTOINE
MIMOUN Maurice
Chirurgie plastique
Hôpital ROTHSCHILD
MITANCHEZ Delphine
Néonatologie
Hôpital TROUSSEAU
MONTRAVERS Françoise
Biophysique et médecine nucléaire
Hôpital TENON
MURAT Isabelle
Anesthésie réanimation
Hôpital TROUSSEAU
NICOLAS Jean Claude
Virologie
Hôpital TENON
OFFENSTADT Georges
Réanimation médicale
Hôpital SAINT-ANTOINE
PAQUES Michel
Ophtalmologie
CHNO des 15/20
PARC Yann
Chirurgie générale et digestive
Hôpital SAINT-ANTOINE
PATERON Dominique
Service d'Accueil des Urgences
Hôpital SAINT-ANTOINE
PAYE François
Chirurgie générale et digestive
Hôpital SAINT-ANTOINE
12
PERETTI Charles-Siegfried
Psychiatrie d’adultes
Hôpital SAINT-ANTOINE
PERIE Sophie
ORL
Hôpital TENON
PETIT Jean Claude
Bactériologie virologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
PIALOUX Gilles
Maladies infectieuses et tropicales
Hôpital TENON
POUPON Raoul
Hépatologie et gastro-entérologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
RENOLLEAU Sylvain
Réanimation néonatale
Hôpital TROUSSEAU
RODRIGUEZ Diana
Neuro-pédiatrie
Hôpital TROUSSEAU
RONCO Pierre Marie
Néphrologie et dialyses
Hôpital TENON
RONDEAU Eric
Urgences néphrologiques – Transplantation rénale
Hôpital TENON
ROSMORDUC Olivier
Hépato gastro-entérologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
ROUGER Philippe
I.N.T.S.
6, rue Alexandre Cabanel 75739 Paris cedex 15
ROUZIER Roman
Gynécologie obstétrique
Hôpital TENON
ROZENBAUM Willy
Maladies infectieuses et tropicales
Hôpital SAINT-LOUIS
13
SAHEL José Alain
Ophtalmologie
CHNO des 15/20
SAUTET Alain
Chirurgie orthopédique
Hôpital SAINT-ANTOINE
SEZEUR Alain
Chirurgie générale
Hôpital des DIACONESSES
SIFFROI Jean Pierre
Génétique et embryologie médicales
Hôpital TROUSSEAU
SOUBRIER Florent
Département de génétique
Groupe Hospitalier PITIE SALPETRIERE
TALBOT Jean Noël
Biophysique médecine nucléaire
Hôpital TENON
THIBAULT Philippe (surnombre)
Urologie
Hôpital TENON
THOMAS Guy
Psychiatrie d’adultes
Hôpital SAINT-ANTOINE
THOUMIE Philippe
Rééducation neuro-orthopédique
Hôpital ROTHSCHILD
TIRET Emmanuel
Chirurgie générale et digestive
Hôpital SAINT-ANTOINE
TOUBOUL Emmanuel
Radiothérapie
Hôpital TENON
TOUNIAN Patrick
Gastro-entérologie et nutrition pédiatriques
Hôpital TROUSSEAU
TRAXER Olivier
Urologie
Hôpital TENON
TRUGNAN Germain
14
Inserm U538
Faculté de Médecine P. & M. Curie
TUBIANA Jean Michel (surnombre)
Radiologie
Hôpital SAINT-ANTOINE
UZAN Serge
Gynécologie obstétrique et médecine de la reproduction
Hôpital TENON
VALLERON Alain Jacques
Unité de santé publique
Hôpital SAINT-ANTOINE
VAYSSAIRAT Michel
Cardiologie
Hôpital TENON
VAZQUEZ Marie Paule
Chirurgie maxillo-faciale et stomatologie
Hôpital TROUSSEAU
WENDUM Dominique
Anatomie pathologique
Hôpital SAINT-ANTOINE
WISLEZ Marie
Pneumologie
Hôpital TENON
15
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ABREVIATIONS ................................................................................... 20
INTRODUCTION ...................................................................................................... 21
GENERALITES ........................................................................................................ 26
1.
A PROPOS DU CANCER DU SEIN .............................................................................................. 27
1.1.
1.1.1.
Une incidence en évolution ............................................................................................. 27
1.1.2.
Une mortalité en décroissance depuis 2000 ................................................................... 28
1.1.3.
Un cancer de bon pronostic ............................................................................................ 29
1.1.4.
Des inégalités géographiques modérées ........................................................................ 29
1.1.5.
En Europe ........................................................................................................................ 29
1.2.
FACTEURS DE RISQUE DU CANCER DU SEIN ................................................................. 30
1.2.1.
L'âge au diagnostic .......................................................................................................... 30
1.2.2.
Le sexe ............................................................................................................................ 30
1.2.3.
Facteurs environnementaux ............................................................................................ 31
1.2.4.
Prédisposition génétique ................................................................................................. 31
1.2.5.
Facteurs de risque hormonaux ........................................................................................ 31
1.2.6.
Pathologies bénignes du sein ......................................................................................... 33
1.2.7.
Mode de vie ..................................................................................................................... 33
1.2.8.
Radiations ionisantes ...................................................................................................... 35
1.2.9.
Classification des facteurs de risque en fonction de leur importance ............................. 35
1.3.
2.
EPIDEMIOLOGIE DESCRIPTIVE .......................................................................................... 27
CANCEROGENESE ............................................................................................................... 36
1.3.1.
Carcinogènes, co-carcinogènes et facteurs de risque .................................................... 36
1.3.2.
Prédisposition héréditaire au cancer du sein .................................................................. 37
1.3.3.
Les gènes impliqués dans la cancérogenèse ................................................................. 39
1.3.4.
Les mécanismes moléculaires d'altération de ces gènes ............................................... 40
1.3.5.
Conséquences : initiation ou transformation cellulaire tumorale ..................................... 42
1.3.6.
Modèle génétique de la cancérogenèse ......................................................................... 43
1.3.7.
Quelle cellule devient cancéreuse ? ................................................................................ 44
1.3.8.
Le microenvironnement tumoral ...................................................................................... 46
CANCEROGENESE HORMONALE ............................................................................................. 48
2.1.
Les voies d'action des hormones stéroïdes............................................................................ 48
2.1.1.
Les récepteurs nucléaires ............................................................................................... 48
2.1.2.
Autres voies d'action pour les estrogènes ....................................................................... 51
2.1.3.
Autre voie d'action de la progestérone ............................................................................ 51
2.2.
Estrogènes et carcinogenèse ................................................................................................. 52
16
2.2.1.
Les estrogènes sont carcinogènes par 2 mécanismes ................................................... 52
2.2.2.
La notion de sensibilité mammaire aux hormones .......................................................... 53
2.2.3.
Hypersensibilité des cellules mammaires aux estrogènes en postménopause ............. 58
2.2.4.
Hypersensibilité aux estrogènes des cellules mammaires cancéreuses ........................ 58
2.2.5.
Les RE sont pourtant un facteur de bon pronostic .......................................................... 60
2.3.
2.3.1.
Progestérone et cycle cellulaire ...................................................................................... 61
2.3.2.
Effets physiologiques de P sur la prolifération cellulaire du sein normal ........................ 61
2.3.3.
P/RP, coordonnateur central dans la morphogénèse et tumorigenèse mammaire ........ 62
2.3.4.
RP et ses isoformes : variations dans leur expression, effets de chaque isoforme ........ 63
2.4.
Estrogènes et progestérone ................................................................................................... 64
2.4.1.
RP est estrogènorégulée : synergie d'action entre estrogènes et progestérone ............ 64
2.4.2.
Effets différents de P selon l'expression de RE-RP dans la cellule cancéreuse ............ 65
2.5.
3.
Progestérone (P), récepteur à la progestérone (RP) .............................................................. 60
Implication de BRCA1 dans la régulation des hormones stéroïdes et la cancérogenèse...... 66
2.5.1.
BRCA1 et régulation des récepteurs aux estrogènes ..................................................... 66
2.5.2.
BRCA1 et régulation des récepteurs de la progestérone ................................................ 67
2.5.3.
Un mécanisme impliqué .................................................................................................. 67
A PROPOS DE LA CONTRACEPTION ORALE .......................................................................... 69
3.1.
Les stéroïdes utilisés en contraception................................................................................... 69
3.1.1.
Les estrogènes utilisés en contraception ........................................................................ 69
3.1.2.
Progestatifs utilisés en contraception .............................................................................. 71
3.2.
Contraception estroprogestative orale .................................................................................... 79
3.2.1.
Risques liés à la contraception estroprogestative ........................................................... 79
3.2.2.
Contre-indications ............................................................................................................ 81
3.2.3.
Inconvénients mineurs, tolérance.................................................................................... 83
3.2.4.
Les pilules estroprogestatives ......................................................................................... 83
3.3.
Contraception progestative orale ............................................................................................ 87
3.3.1.
Risques liés à la contraception progestative ................................................................... 87
3.3.2.
Indications de la contraception progestative ................................................................... 88
3.3.3.
Contre-indications ............................................................................................................ 89
3.3.4.
Les interactions médicamenteuses ................................................................................. 90
3.3.5.
Les microprogestatifs ...................................................................................................... 91
3.3.6.
La contraception macroprogestative ............................................................................... 92
METHODOLOGIE .................................................................................................... 94
1.
Critères d'éligibilité des articles ................................................................................................. 95
2.
Sources d'information ................................................................................................................. 97
3.
Le processus de sélection .......................................................................................................... 98
17
4.
Analyse de la qualité de la littérature ....................................................................................... 100
4.1.
Qualité méthodologique des études ..................................................................................... 100
4.1.1.
Analyse de la qualité d'une étude cas-témoins traitant d'une question de causalité .... 100
4.1.2.
Analyse de la qualité d'une étude de cohorte traitant d'une question de causalité ...... 105
4.2.
Notion de niveau de preuve d'une étude .............................................................................. 108
5.
Extraction des données concernant les résultats .................................................................. 109
6.
Synthèse des données .............................................................................................................. 110
RESULTATS .......................................................................................................... 111
1.
Qualité des études : Validation de la méthodologie des études ........................................... 112
1.1.
Etudes de cohorte ................................................................................................................. 112
1.2.
Les études cas-témoins ........................................................................................................ 116
1.3.
Particularités des études cas-témoins emboîtées dans une cohorte ................................... 118
1.4.
Une étude de protocole indéterminé..................................................................................... 118
2.
Caractéristiques des études retenues pour l'analyse ............................................................ 124
3.
Résultats des études individuelles .......................................................................................... 131
3.1.
Utilisation globale de la CO .................................................................................................. 131
3.2.
Intervalle depuis la dernière utilisation.................................................................................. 131
3.2.1.
Utilisation en cours : < 2 ans depuis la dernière utilisation ........................................... 131
3.2.2.
Utilisation récente : < 3ans ou ≤ 5 ans depuis la dernière utilisation ............................ 132
3.2.3.
Intervalle de plus de 10 ou de plus de 15 ans depuis la dernière utilisation ................. 132
3.2.4.
Intervalle de 20 ans ou plus depuis la dernière utilisation............................................. 133
3.3.
Durée totale d'utilisation ........................................................................................................ 133
3.4.
Age au moment du diagnostic ............................................................................................. 134
3.4.1.
Age jeune au moment du diagnostic (moins de 35 ans) ............................................... 134
3.4.2.
Age de moins de 40 à 45 ans ........................................................................................ 134
3.4.3.
Age de plus ou moins 50 à 55 ans ................................................................................ 135
3.5.
Caractère récent de l'utilisation selon l'âge .......................................................................... 135
3.6.
Statut ménopausique au moment du diagnostic .................................................................. 136
3.7.
Age à la première utilisation ................................................................................................. 136
3.8.
Utilisation par rapport à la première grossesse à terme (PGAT) ......................................... 137
3.9.
Dose d'estrogène .................................................................................................................. 137
3.10.
Année de la première utilisation ......................................................................................... 138
3.11.
Type de pilule ...................................................................................................................... 138
3.12.
Type de progestatif ............................................................................................................. 139
DISCUSSION ......................................................................................................... 156
18
1.
Synthèse des résultats .............................................................................................................. 157
2.
Limitations, forces et faiblesses du travail ............................................................................. 160
3.
Mise en perspective ................................................................................................................... 164
3.1.
Risque global ........................................................................................................................ 164
3.2.
Intervalle depuis la dernière utilisation.................................................................................. 164
3.3.
Durée totale d'utilisation ........................................................................................................ 165
3.4.
Age au moment du diagnostic .............................................................................................. 165
3.5.
Statut ménopausique au moment du diagnostic .................................................................. 166
3.6.
L'âge lors de la première utilisation ...................................................................................... 166
3.7.
Prise d'une CO par rapport à la PGAT ................................................................................. 167
3.8.
Dose d'estrogène .................................................................................................................. 168
3.9.
Type de progestatif ............................................................................................................... 168
4.
Interprétation des résultats ....................................................................................................... 168
5.
Implications ................................................................................................................................ 173
CONCLUSION ....................................................................................................... 175
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................... 177
ANNEXES .............................................................................................................. 182
1.
Grille de lecture d'une étude de cohorte traitant d'une question de causalité .................... 183
2.
Grille de lecture d'une étude cas-témoins traitant d'une question de causalité ................. 184
19
Liste des ABREVIATIONS
AMM : autorisation de mise sur le marché
AVC : accident vasculaire cérébral
C : étude de cohorte
CIS : carcinome in situ
CO : contraception orale
COC : contraception orale combinée
COs : contraceptifs oraux
CST : cellules souches tumorales
CT : cholestérol total
DMPA : depo-médroxyprogestérone acétate
E. : estrogènes
EE : éthinyl-estradiol
EP : estroprogestatif
FCV : frottis cervicovaginal
FSH : hormone folliculostimulante
GnRH : gonadotrophin Releasing Hormone
H : études cas-témoins basées à l'hôpital
HDL : lipoprotéines de haute densité (high density lipoprotein)
IC 95 % : intervalle de confiance à 95 %
IDM : infarctus du myocarde
IMC : indice de masse corporel
LDL : lipoprotéine de basse densité (low density lipoprotein)
LH : hormone lutéinique
LNG : lévonorgestrel
OR : odds ratio
P (dans la partie « Généralités ») : progestérone
P (à partir de la partie « Méthodes ») : études cas-témoins basées dans la population
générale
PGAT : première grossesse à terme
PUP : pilule uniquement progestative
RA : risque absolu
RR : risque relatif
SERM : modulateurs sélectifs des récepteurs aux estrogènes
SIU : système intra-utérin
TG : triglycérides
THM : traitement hormonal de la ménopause
20
INTRODUCTION
21
Le cancer du sein occupe le premier rang des cancers féminins, avec 49 814
nouveaux cas par an en France en 2005.
Bien qu‟elle commence à diminuer, son incidence s'est accrue régulièrement
jusqu'en 2005 : le nombre de nouveaux cas a pratiquement doublé entre 1980 et
2000.
Dans la plupart des pays industrialisés, il constitue la première cause de mortalité
par cancer chez les femmes (sauf aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne où le
cancer bronchique induit une mortalité plus élevée).
En France, le taux de mortalité par cancer du sein décroît doucement depuis les
années 1998-2000, de 1,3 % en moyenne par an.
Le cancer du sein touche de façon préférentielle les femmes de moins de 60 ans,
avec un pic de fréquence observé vers l'âge de 50 ans.
L'élévation de l'incidence jusqu'en 2005 peut être liée à une amélioration du
dépistage, mais peut également traduire une augmentation réelle du risque de
développer un cancer du sein.
Ces statistiques en font un véritable problème de santé publique.
La particularité biologique du sein est la grande dépendance estroprogestative de
son développement et de sa différenciation terminale. Cette dépendance apparaît
encore très importante dans le cancer du sein dont près de 70 % des cas ont des
récepteurs aux estrogènes [1].
L'étiologie du cancer du sein est multifactorielle. Parmi les facteurs de risque
hormonaux, on retrouve le traitement hormonal substitutif de la ménopause, ainsi
que les situations d'hyperestrogènie endogène (relative ou absolue) : puberté
précoce, ménopause tardive, nulliparité ou primiparité (une seule grossesse),
première grossesse tardive, absence d'allaitement, obésité (par le biais d'une
aromatisation des androgènes en oestrogènes dans les adipocytes).
La possibilité que les contraceptifs oraux puissent augmenter le risque de cancer du
sein a fait l'objet d'intenses recherches.
Les premières études réalisées sur ce sujet n'ont pas, pour la plupart, trouvé
d'augmentation du risque de cancer du sein avec l'utilisation d'une contraception
22
orale (CO).
Cependant, des études publiées à partir des années 80 ont retrouvé une association,
en particulier chez les femmes jeunes qui ont pris la pilule sur une longue durée [211], ou qui ont débuté leur CO à un jeune âge [12-17]. Certaines études indiquaient
une relation entre le cancer du sein et le moment de la prise d‟une CO par rapport à
la puberté ou à la première grossesse à terme (PGAT) [12, 14, 16].
C'est en 1996 que sont parus les résultats d'une méta-analyse [18,19], menée par
une équipe d'Oxford (groupe de collaboration sur les facteurs hormonaux intervenant
dans le cancer du sein ou Collaborative Group on Hormonal Factors in Breast
Cancer), regroupant la plupart des études précédemment publiées. L‟un des
principaux objectifs de cette étude était d‟évaluer la relation entre la prise d‟une
contraception orale et le risque de cancer du sein par une ré-analyse des données
individuelles de 54 études portant sur plus de 153 536 femmes (dont 53 297 atteintes
d'un cancer du sein), correspondant à 90 % des données épidémiologiques
mondiales existant sur le sujet. Ce travail a mis en évidence une association entre
l'utilisation récente (contraception orale en cours ou arrêtée depuis moins de 5 ans)
et l'augmentation du risque de cancer du sein, cette augmentation étant d'autant plus
importante que l'âge à la première utilisation était précoce (moins de 20 ans). Cette
augmentation du risque ne concernait cependant que les cancers du sein peu
étendus, suggérant l‟existence possible d‟un biais de détection.
En 2005, le CIRC (centre international de recherche sur les cancers) ou IARC
(International Agency for Research on Cancer) a classé les contraceptifs oraux
combinés au rang des substances carcinogènes en raison de l'augmentation du
risque de cancer du sein et de l'endocol sous ces traitements, malgré des effets
protecteurs sur les cancers de l'ovaire, de l'endomètre et du colon [20].
Cependant, la méta-analyse de 1996 a utilisé des données d'études publiées de
1980 à 1995. Or, la composition et le dosage des pilules ont évolué au fil du temps.
Ces modifications concernent le dosage des estrogènes qui est passé de 150 à
15 μg d'éthinylestradiol (EE), la nature des estrogènes utilisés : estrogènes de
synthèse (mestranol puis EE) et tout récemment un estrogène naturel (le valérate
d'estradiol), l'évolution des progestatifs utilisés, le mode d'administration des pilules
estroprogestatives (mono-, bi-, ou triphasique).
23
Il est donc nécessaire de continuer à examiner l'influence des pilules les plus
récentes sur le risque de cancer du sein.
De plus, les schémas d'utilisation ont changé : dans les années 60, les femmes
prenaient le plus souvent la pilule après une première grossesse dans le but
d'espacer les naissances, alors que dans les années 70, la pilule a commencé à être
utilisée à un plus jeune âge dans le but de retarder la première naissance.
Au fil du temps, un nombre croissant de femmes ayant pris la pilule de façon précoce
ont atteint l'âge où le risque de cancer du sein est le plus haut.
C'est pourquoi les études récentes sont plus à même d'évaluer l'influence d'une
contraception précoce sur le risque de cancer du sein.
Rappelons que la contraception hormonale la plus couramment utilisée en France
est la contraception orale combinée estroprogestative [21].
Les médecins généralistes sont les premiers prescripteurs de ce type de
contraception (60 %), suivis par les gynécologues (40 %) [21].
Il est essentiel pour eux de pouvoir fournir à leurs patientes l‟information la plus
précise et la plus actualisée sur les risques potentiels associés à la CO.
L'objectif de ce travail a été d'évaluer si l'utilisation de la contraception orale est
associée à une élévation du risque de cancer du sein, globalement et sous certaines
conditions d'utilisation.
Pour cela, nous avons réalisé à travers une revue de la littérature, une analyse
critique et qualitative des études épidémiologiques publiées depuis la méta-analyse
de 1996 et ayant cherché à répondre à cette question.
Notre étude s'est limitée aux femmes sans antécédent familial de cancer du sein, et
n'a pas pris en considération le type histologique ou le statut en récepteurs
hormonaux du cancer du sein. En effet, ces 3 derniers critères pourraient faire l'objet
à eux seuls d'un travail de synthèse en raison du nombre important d'études qui leur
est consacré spécifiquement.
24
Dans une première partie, après quelques rappels d'épidémiologie sur le cancer du
sein, nous aborderons les mécanismes de la cancérogenèse hormonale, puis nous
présenterons les différents types de contraception orale. Les parties suivantes seront
consacrées à notre revue de la littérature.
25
GENERALITES
26
1. A PROPOS DU CANCER DU SEIN
1.1.
EPIDEMIOLOGIE DESCRIPTIVE
La plupart des données qui suivent proviennent du site de l‟Institut national du cancer
[22].
1.1.1.
Une incidence en évolution
En France, on estime qu‟il y a entre 40 000 et 50 000 nouveaux cas de cancers du
sein par an.
Le cancer du sein reste le cancer le plus fréquent chez la femme, représentant un
peu plus de 1/3 des cancers chez celle-ci.
Si l'on considère l'incidence du cancer du sein en fonction de l'âge, on remarque que
les taux augmentent régulièrement depuis l‟âge de 30 ans jusqu‟à environ 65 ans et
restent élevés jusqu‟à au moins 85 ans. Jusqu'à l'âge de 30 ans, l'incidence reste
faible, puis on observe une augmentation croissante jusqu'à 60-69 ans (plus de
320/100 000 femmes). Les taux diminuent ensuite légèrement après 85 ans (245/100
000) [23].
Le cancer du sein concerne les femmes jeunes : 50 % ont moins de 61 ans (âge
médian) au moment du diagnostic, 75 % des cancers du sein sont diagnostiqués
après l'âge de 50 ans, et 10 % avant l'âge de 40 ans.
L'évolution de l'incidence du cancer du sein montre, entre 1978 et 2000, une
augmentation régulière de l'ordre de 2,42 % par an portant sur toutes les classes
d'âge, mais étant plus marquée à partir de 45 ans [23]. Le nombre de nouveaux cas
par an a plus que doublé en 25 ans passant de 22 211 cas en 1980 à 41 845 en
2000 et à 49 814 en 2005.
Cependant, plusieurs travaux en France et ailleurs ont récemment rapporté une
baisse importante de l'incidence du cancer du sein. En France, où il n'existe pas de
registre national du cancer, on a estimé l'incidence des cancers du sein à partir de
données de l'assurance maladie (nouvelles attributions d'affections longue durée ou
ALD parmi les adhérentes du régime général d'assurance maladie). Il a été mis en
évidence une augmentation de l'incidence annuelle de 2,1 % entre 2000 et 2004
suivie par une diminution de 4,3 % entre 2004 et 2005 puis de 3,3 % entre 2005 et
27
2006 [24]. Cependant, la diminution a été plus forte chez les femmes de 50 ans et
plus : - 6 % entre 2004 et 2005, - 5,3 % entre le premier semestre 2005 et le premier
semestre 2006.
De très nombreux paramètres sont impliqués dans l'évolution de l'incidence des
cancers du sein diagnostiqués, comme notamment l‟utilisation croissante des SERM
(modulateurs sélectifs des récepteurs aux estrogènes) dont le raloxifène indiqué
dans l'ostéoporose postménopausique. Selon les auteurs, la diminution massive de
l'utilisation des traitements hormonaux de la ménopause (THM) survenue depuis
2002 après la publication de l‟étude WHI (Women' s Health Initiative), semble
l'explication la plus convaincante à l'heure actuelle [24].
L'Institut de veille sanitaire a, pour sa part, récemment publié sur son site Internet
[25] des projections de l'incidence et de la mortalité pour 2008. Faisant l'hypothèse
du maintien des taux, ces projections évaluent à environ 51 000 le nombre de
nouveaux cas de cancer du sein et à 11 700 le nombre de décès.
Le cancer du sein demeurerait le deuxième cancer le plus fréquent après le cancer
de la prostate et resterait le cancer le plus fréquent chez la femme.
1.1.2.
Une mortalité en décroissance depuis 2000
Le cancer du sein est responsable de 11 000 décès par an en France (38,5 pour
100 000 femmes en taux brut et 19,7 pour 100 000 en données standardisées sur la
population mondiale).
Ces chiffres en font la première cause de mortalité par cancer chez la femme : 20 %
des décès par cancer en 2000, 7,7 % en 2005.
Les taux de mortalité augmentent avec l'âge : 10/100 000 entre 35 et 40 ans,
80/100 000 vers 65 ans, 102/100 000 entre 70 et 74 ans et 245/100 000 après
85 ans.
En 2000, parmi les 11 637 femmes décédées d'un cancer du sein en France, 4000
avaient moins de 65 ans.
Ces chiffres soulignent l'importance du problème chez les femmes ménopausées, ce
d'autant que la mortalité continue à augmenter essentiellement chez les femmes
âgées.
28
La mortalité, qui était stable depuis 1980, a commencé à décroître doucement depuis
les années 1998-2000. Le taux d„évolution annuel de la mortalité était de – 0,4 % en
moyenne sur la période 1980-2005 et de -1,3 % en moyenne chaque année sur la
période 2000-2005.
Les évolutions inverses de la mortalité et de l'incidence du cancer du sein peuvent
s'expliquer en partie par l'amélioration des thérapeutiques et le diagnostic plus
précoce lié au développement du dépistage en France, sans que leurs parts
respectives puissent être précisées.
1.1.3.
Un cancer de bon pronostic
En France, le taux de survie des cancers du sein, tous stades confondus au moment
du diagnostic, est de 82 % à 5 ans. C'est le taux le plus élevé avec la Suède. La
différence de survie entre les différents pays est directement liée au stade lors du
diagnostic. L'amélioration de la survie au cours des 20 dernières années est très
certainement liée aux politiques de dépistage précoce de cette affection et aux
moyens thérapeutiques.
1.1.4.
Des inégalités géographiques modérées
L'hétérogénéité géographique de l'incidence des cancers du sein en France est
faible, le taux régional le plus élevé se situe dans le Nord-Pas-de-Calais, et le plus
bas en Auvergne et dans les régions de l'est. Les taux de mortalité les plus élevés
ont également été observés dans le Nord-Pas-de-Calais, en Picardie, en Normandie
et en Ile-de-France, alors que les plus bas sont relevés en Auvergne, dans le
Limousin et en Midi-Pyrénées.
1.1.5.
En Europe
Le cancer du sein est de loin le cancer le plus fréquent chez les femmes à la fois en
termes d'incidence et de mortalité.
En 2006, 429 900 nouveaux cas ont été estimés en Europe (soit 28,9 % de
l'ensemble des cancers féminins ou 13,5 % de tous les cancers) pour une mortalité
de 131 900 (soit 17,6 % de l'ensemble de la mortalité féminine par cancer ou 7,7 %
29
de l'ensemble des mortalités par cancer).
Le taux d'incidence est généralement élevé en Europe de l'Ouest et du Nord
(respectivement de 121,3 pour 100 000 personnes-années et 105,71) et relativement
faible dans la majorité des pays de l'Europe de l'Est.
Ceci serait dû en partie à la différence entre la prévalence nationale et régionale des
facteurs de risques associés incluant les facteurs socio-économiques et culturels
comme la nulliparité, l'âge d'apparition des règles et de la ménopause, l'obésité et la
consommation d'alcool. Certains taux d'incidence élevés pourraient être attribuables
à l'implantation rapide des programmes de dépistage dans certains pays à
ressources élevées au sein de l'Europe.
En 2006, le taux d'incidence standardisée à la population européenne était de 127,4
pour la France, largement supérieur à celui retrouvé sur la même période en Europe
de l'Est (70,9), du Nord (105,7) et du Sud (87,5). Cependant, peu de variations sont
observées dans la mortalité par cancer du sein.
1.2.
FACTEURS DE RISQUE DU CANCER DU SEIN
1.2.1.
L'âge au diagnostic
Le risque de cancer du sein augmente avec l'âge. Son incidence suit une courbe
ascendante à partir de 30 ans aboutissant à un plateau à partir de 50-60 ans. L'âge
médian au diagnostic est de 61 ans. Il est très rare avant 30 ans et près de 25 % des
cas incidents sont survenus en 2000 avant l'âge de 50 ans. Moins de 5 % sont
d'origine génétique : mutation BRCA1 et BRCA2 [26].
1.2.2.
Le sexe
Le cancer du sein est quasi exclusivement féminin ; il est 100 fois moins fréquent
chez l‟homme.
Dans les familles regroupant de nombreux cas de cancers du sein, lorsqu‟il y a une
atteinte masculine, c‟est une mutation du gène BRCA2 qui est la plus fréquemment
observée. Un homme apparenté à une femme atteinte d‟un cancer du sein voit son
risque multiplié par 2 [27].
30
1.2.3.
Facteurs environnementaux
Le cancer du sein est plus fréquent dans certains pays. Les femmes nordaméricaines ou nord-européennes ont le plus haut risque de survenue d'un cancer
du sein. Celles d'origine latine et d'Europe du Sud se situent à un niveau de risque
intermédiaire. Les plus faibles niveaux de risque se trouvent parmi les populations
africaines et asiatiques. Les femmes originaires d'un pays à faible risque migrant
dans un pays à risque élevé rejoignent l'incidence du pays d'accueil après une ou
deux générations. Ceci suggère le rôle de facteurs environnementaux (notamment
alimentaires) dans la genèse du cancer du sein.
Par ailleurs, les cancers du sein sont plus fréquents chez les femmes célibataires ou
à haut niveau socio-économique [28].
1.2.4.
Prédisposition génétique
Le risque de survenue d'un cancer du sein en cas de mutation BRCA1 et/ou BRCA2
est supérieur à celui de la population générale. Il est estimé à 65 % pour BRCA1 et
45 % pour BRCA2 à 70 ans.
Le risque de cancer du sein avant l'âge de 45 ans est de 25 % en cas de mutation
BRCA1 et de 7 % en cas de mutation BRCA2.
La fréquence des personnes porteuses d'une telle mutation est de 1 sur 420 soit
environ 35 000 femmes porteuses âgées de 30 à 69 ans [26].
1.2.5.
Facteurs de risque hormonaux
1.2.5.1.
Age des premières règles
Le risque augmente avec la précocité de la survenue des premières règles. Chaque
année de retard dans l'installation des premières règles s'associe à une réduction de
5 % du risque.
Une longue vie génitale accroît donc le risque de survenue d'un cancer du sein
[26].
L'explication biologique est encore discutée. On a proposé que l'élévation du risque
pouvait être liée à une longue exposition aux estrogènes de la glande mammaire au
cours d‟une période de son développement mammaire où elle est sensible aux
31
différents carcinogènes. Une autre explication donnée a été que les jeunes filles
réglées tôt présentent des cycles anovulatoires pendant de nombreuses années où
l'exposition aux estrogènes n'est pas contrebalancée par les progestatifs [27].
1.2.5.2.
Age à la ménopause
Le risque augmente avec l'âge de survenue de la ménopause. Chaque année de
retard dans l'installation de la ménopause s'associe à une augmentation de 3 à 4 %
du risque [27].
1.2.5.3.
Age de la première grossesse
Bien que le risque de cancer apparaisse transitoirement augmenté pendant une
période de 5 à 10 ans après la grossesse, il semble qu'il diminue lorsque la première
grossesse survient avant 30 ans et est accru si elle survient après 35 ans.
De nombreuses études ont montré que les femmes ayant eu leur première
grossesse après l'âge de 35 ans présentaient un risque relatif de 1,5 par rapport à
celles qui ont eu leur première grossesse avant 20 ans et de 1,2 par rapport aux
femmes nullipares [26].
La grossesse exercerait un effet protecteur à long terme en raison de la
différenciation qu'elle entraîne au niveau de la glande mammaire la rendant moins
sensible à l'action des carcinogènes. Une longue période d'immaturité de la glande
mammaire, c‟est-à-dire une longue période avant une première grossesse, faciliterait
donc l'action des carcinogènes.
L'augmentation de la fréquence des cancers observée juste après une grossesse
serait par contre liée à une stimulation hormonale de la croissance tumorale de
cancers déjà existants [27].
1.2.5.4.
Parité
La parité plutôt à un âge jeune, semble avoir un effet protecteur. Chaque naissance
réduit le risque de cancer du sein d'environ 7 % [27].
1.2.5.5.
Allaitement
Il est présenté depuis longtemps comme ayant un effet protecteur, mais les résultats
des études sont controversés et varient selon la durée de l‟allaitement [26].
Plusieurs hypothèses ont été émises sur l'effet de la lactation. La différenciation
complète de la glande mammaire induite par la lactation la mettrait à l'abri des
32
carcinogènes. Au niveau hormonal, il existe une élévation de la prolactine et une
diminution de la production en estrogènes, ce qui diminue la durée d'exposition
globale aux estrogènes et donc leur effet promoteur au niveau de la carcinogenèse
mammaire. L'allaitement diffère également la reprise de cycles ovulatoires [27].
1.2.5.6.
Contraception orale
Cette question reste controversée et fait l'objet de notre revue de la littérature dont
l'exposé va suivre.
1.2.5.7.
Traitement hormonal substitutif de la ménopause
La littérature reste très controversée.
Dans une étude publiée en 1997 portant sur 41 837 femmes, Sellers et coll. [29] ne
retrouve aucun effet du traitement hormonal de la ménopause (THM) sur le risque de
cancer du sein. L'étude WHI (Women Health Initiative) parue en 2002 [30], retrouve
une augmentation du risque de 26 % au-delà de 5,5 années d'utilisation d'un
traitement hormonal substitutif de la ménopause de type combiné [26].
1.2.6.
Pathologies bénignes du sein
Beaucoup d'auteurs ont montré que les mastopathies bénignes multiplient par deux
le risque de cancer du sein.
On a montré également que le risque de cancer du sein est différent selon la nature
des anomalies morphologiques, selon leur importance, selon le siège de la lésion,
selon le degré d'atypie des cellules et selon les caractéristiques du tissu conjonctif
mammaire.
Les diverses études réalisées estiment que le risque le plus élevé (RR≈5)
correspond aux maladies fibrokystiques associées à une hyperplasie proliférante et à
un degré élevé d'atypie cellulaire. Le fibroadénome isolé ne semble pas constituer un
facteur de risque [23].
1.2.7.
Mode de vie
1.2.7.1.
Alcool
Il existe une relation dose dépendante entre la consommation d'alcool et le risque de
cancer du sein.
33
Le risque de cancer du sein augmente d'environ 7 % par absorption de 10 g d‟alcool
par jour [26].
1.2.7.2.
Tabac
Le lien est très discuté. La méta-analyse du Collaborative Group on Hormonal
Factors in Breast Cancer (2002) montre très peu voire aucun effet sur le risque de
cancer du sein [26].
En revanche, Reynolds et coll. a montré une augmentation significative du risque de
cancer du sein chez les fumeuses qui avaient commencé à fumer 5 ans avant leur
première grossesse ou qui avaient fumé longtemps et beaucoup [26].
Le centre international de recherche sur les cancers (CIRC) a publié en 2004 un
rapport sur les risques liés au tabac et a conclu qu'il n'y avait pas d'évidence de liens
entre le tabagisme actif ou le tabagisme passif et le cancer du sein [23].
Une méta-analyse sur 19 études, publiée en 2005 apporte les résultats suivants : le
risque associé au tabagisme passif est de 1,27 (1,11 -1,45), ce risque pour les
cancers du sein survenant avant la ménopause est de 1,68 (1,33 -2,12). Pour les
fumeuses, le risque ajusté sur le tabagisme passif pour les cancers pré- et
postménopausiques est de 1,46 (1,15 -1,85) [23].
Ainsi, le lien entre tabagisme actif ou passif et cancer du sein apparaît de plus en
plus probable, tout en restant relativement de faible envergure ; mais la prévalence
du tabagisme féminin étant maintenant importante dans de nombreux pays, le
nombre de cas attribuable à ce facteur pourrait ne pas être négligeable [23].
1.2.7.3.
Obésité
L'obésité augmente le risque de cancer du sein chez la femme ménopausée.
D‟après certaines études, l‟adiposité abdominale élève ce risque [26].
Cette association n'est pas retrouvée pour les cancers survenant avant la
ménopause [23].
1.2.7.4.
Exercice physique
La plupart des études retrouvent une diminution du risque chez les femmes ayant eu
une activité physique même après la ménopause, sans tenir compte du type
d‟activité ou de son intensité [26].
1.2.7.5.
Consommation de viande, laitage et graisses saturées
34
Dans une méta-analyse regroupant 7 379 cas, aucune association n‟a été observée
entre la consommation de viande rouge, blanche ou de laitage, tandis que quelques
autres études ont relaté le contraire.
La consommation de graisses saturées semble augmenter le risque de cancer du
sein tandis que celle d‟origine végétale le diminuerait [26].
1.2.7.6.
Fibres et vitamines
Les études sont en général en faveur d‟un effet protecteur de la consommation de
fruits, légumes et vitamines (A et C). Certaines études ne retrouvent cependant pas
de lien [26].
1.2.8.
Radiations ionisantes
Leur rôle a été établi après l'explosion de bombes atomiques au Japon.
Il a été mis en évidence un risque augmenté de cancer du sein chez des patientes
suivies par radioscopie pour tuberculose pulmonaire ainsi que chez celles traitées
pour une maladie de Hodgkin.
Le rôle de ces radiations semble plus marqué si elles sont administrées dans
l'enfance ou l'adolescence [26].
Quelques auteurs ont cherché à savoir si les mammographies répétées pratiquées à
l'occasion d'un dépistage systématique pouvaient favoriser l'apparition d'un cancer
du sein malgré les faibles doses reçues. Ce problème n'est pas totalement élucidé
en particulier pour les femmes ayant des mammographies régulièrement dès la
trentaine en raison d'un risque familial [23].
1.2.9.
Classification des facteurs de risque en fonction de
leur importance
Les facteurs de risque de cancer du sein peuvent être regroupés selon leur
importance [28] :

risque relatif ≥ 4.0 :
o âge,
o pays de naissance,
o mère et soeur atteintes d'un cancer du sein avant la ménopause,
o mastopathies bénignes avec atypies cellulaires ;
35

risque relatif compris entre 2,1 et 4,0 :
- mère ou soeur atteintes d'un cancer du sein,
- mastopathie proliférante sans atypie cellulaire,
- irradiation thoracique ;

risque relatif compris entre 1,1 et 2,0 :
- statut socio-économique,
- nulliparité,
- âge à la première grossesse menée à terme,
- âge des premières règles,
- âge de la ménopause,
- obésité.
1.3.
CANCEROGENESE
La cancérogenèse est la transformation d'une cellule normale ou prédisposée en
cellule ayant acquis les caractéristiques génotypiques et phénotypiques d'une cellule
cancéreuse ou cellule « transformée » [31].
La relation causale entre la survenue d'un cancer et l‟existence d'altérations
génétiques est établie.
Pour les 90 % de cancers du sein dits sporadiques, ces altérations génétiques sont
somatiques, uniquement présentes dans les cellules tumorales.
Quatre à dix % des cancers du sein sont héréditaires, liés à une mutation germinale
qui prédispose à la survenue d‟un cancer mammaire. Cette mutation constitutionnelle
représente une première étape vers la transformation maligne semblant favoriser la
survenue d'altérations génétiques somatiques spécifiques [32].
1.3.1.
Carcinogènes, co-carcinogènes et facteurs de risque
Les carcinogènes sont des substances susceptibles d'induire à elles seules le
développement d'un cancer en interagissant avec l'ADN et en induisant la
transformation cellulaire. Il en existe trois classes : les agents chimiques, physiques
(à type de rayonnements énergétiques et ionisants), et les agents infectieux viraux
[31].
36
D'autres substances, les co-carcinogènes (alcool, inflammations chroniques, stress,
facteurs hormonaux, traumatismes tissulaires chroniques...) participent à l'induction
d'un cancer : ces agents promoteurs sont en permanence associés aux
carcinogènes et agissent en synergie ou en potentialisant l'action des agents
transformants.
Les facteurs de risque sont les caractéristiques individuelles ou d'exposition,
associées à un risque augmenté. Un facteur de risque n'est donc pas forcément
directement causal, ni nécessaire, ni suffisant.
Le temps de latence entre le contact avec un carcinogène et le développement d'une
tumeur peut être de plusieurs dizaines d'années.
Chez l'homme, le seuil de toxicité d'un carcinogène ne peut être déterminé avec
précision, car on peut estimer que les effets de chaque exposition isolée
s'accumulent sans aucune perte pendant toute l'existence.
L'exemple des cancers induits par les radiations lors des explosions d'Hiroshima et
de Nagasaki met en évidence les susceptibilités tissulaires différentes, leur
expression chronologique et la nécessité pour certains cancers de facteurs associés.
Ainsi, les cancers du sein ont été induits dans des populations très particulières
présentant lors de l'irradiation un terrain hormonal d'hyperestrogénie relative à
savoir : les adolescentes dans la période précédant les cycles ovariens ovulatoires
ainsi que les femmes en préménopause présentant une hyperestrogénie relative par
cycles anovulatoires [31].
1.3.2.
Prédisposition héréditaire au cancer du sein
Les cancers héréditaires représentent 5 à 10 % des cancers du sein.
Dans les cancers héréditaires, toutes les cellules de l'organisme, y compris les
cellules
germinales,
portent
une
mutation
constitutionnelle
génétiquement
transmissible.
Cette transmission se fait majoritairement selon un mode autosomique dominant. Il
existe donc 50 % de risque pour la descendance d'un sujet porteur d'hériter de la
mutation.
37
La présence de cette mutation héritée représente alors une initiation favorisant les
étapes ultérieures de la tumorigenèse [33].
Les sujets porteurs de l'anomalie génétique ont un risque élevé de développer un
cancer au cours de leur vie, car la pénétrance de ces gènes (la fréquence avec
laquelle la mutation va s'exprimer) est forte de l'ordre de 80 % des cas en moyenne.
Le sujet porteur a donc 80 % de risque de développer un cancer au cours de sa vie,
autrement dit un risque cumulé de développer un cancer à l'âge de 80 ans de 80 %
[33].
La majorité des gènes de prédisposition au cancer se sont révélés être des gènes
surpresseurs de tumeur caractérisés par un mode d'action dominant. Il faut en
général que les 2 allèles de ces gènes aient été inactivés pour annuler leur capacité
anti-oncogène [33].
On a identifié deux gènes majeurs de prédisposition au cancer : BRCA1 et BRCA2.
Le gène BRCA1 est localisé sur le bras long du chromosome 17 en q21 (17q21). Ce
gène est impliqué majoritairement dans les formes familiales du syndrome seinovaire.
Le gène BRCA2, localisé sur le bras long du chromosome 13 en p12 (13q12), est
plus particulièrement impliqué dans le syndrome sein seul ainsi que dans la majorité
des familles présentant des cas de cancer du sein chez l'homme.
BRCA1 et BRCA2 sont responsables d'environ 95 % des syndromes sein-ovaire
(80 % et 15 % respectivement) et 70 % des syndromes sein seul (50 % chacun).
D'autres syndromes héréditaires comportant un excès de risque de cancer du sein
sont exceptionnels [33] :

le syndrome de Li Fraumeni qui associe cancer du sein, corticosurrénalome,
sarcome, carcinome et tumeurs cérébrales. Le gène mis en cause est le gène
TP53 localisé en 17p13-1 ; une mutation de ce gène rendrait compte de 1 %
des cas de cancer du sein avant l'âge de 40ans ;

la maladie de Cowden ou syndrome des hamartomes multiples. Le gène mis
en cause est PTEN localisé en 10q23. Une mutation de ce gène serait
responsable de 0,1 % des cancers héréditaires.
38
Enfin, il existe des familles présentant des cas multiples de cancer du sein non liés à
BRCA1 ou BRCA2, ce qui suggère l'existence d'au moins un troisième gène majeur
de prédisposition au cancer du sein [33].
1.3.3.
Les gènes impliqués dans la cancérogenèse
Deux grandes familles de gènes sont impliquées dans les mécanismes de la
cancérogenèse.
1.3.3.1.
Les proto-oncogènes
Ce sont des gènes présents dans le génome de la cellule normale, dont l'expression
est habituellement contrôlée [1]. On a montré qu'il en existe au moins 350 dans une
cellule saine, qui à la suite d'une mutation, peuvent devenir des oncogènes [34].
Ce sont des gènes impliqués dans des fonctions liées au cycle cellulaire et à la
division cellulaire (facteurs de croissance, récepteurs des facteurs de croissance,
molécules permettant la transmission du signal des récepteurs membranaires au
noyau, signalisation entre les gènes dans le noyau).
L'activation des proto-oncogènes se fait selon un mécanisme dominant : l'altération
d'un seul allèle est oncogénique.
Alors que l'expression des proto-oncogènes est gouvernée par la signalisation qu'ils
reçoivent, les oncogènes sont devenus aptes à participer en permanence à
l'oncogenèse [34].
1.3.3.2.
Les gènes surpresseurs de tumeur
On peut en définir deux grandes catégories.
Les gènes de contrôle/régulation du cycle cellulaire
Encore appelés "Gate Keeper Genes" [31], ils sont impliqués dans la mort cellulaire
et l'arrêt du cycle cellulaire : ils contrôlent la prolifération cellulaire, la mort cellulaire
programmée ou le vieillissement [1]. Ils empêchent le développement de cellules
potentiellement cancéreuses, jouent le rôle de frein en arrêtant la prolifération.
Certains gènes sont prévalents dans un tissu donné : Rb dans l'épithélium rétinien,
APC/βcaténine dans l'épithélium colique, P53 plus ubiquitaire.
39
La mutation de ces gènes de contrôle, entraînant la perte de leur fonction spécifique,
joue un rôle direct et majeur dans la transformation cellulaire, car une seule mutation
somatique complémentaire est nécessaire pour initialiser le processus tumoral [31].
Les gènes de réparation des anomalies de l'ADN et stabilisation du
génome
Encore appelés les "Care Taker Genes" [31], ils codent pour des protéines
impliquées dans la correction des erreurs de réplication de l'ADN, dans le
remplacement de l'ADN endommagé, dans le maintien de la longueur des télomères.
Ils agissent en préservant l'intégrité de la cellule permettant sa survie [1].
La mutation de ces gènes (tels que BRCA1, BRCA2, MLH1 et MSH2), entraînant la
non-réparation des mutations touchant des gènes essentiels pour la cellule, ne joue
qu'un rôle indirect dans la transformation cellulaire, car elle doit être associée à plus
de 3 ou 4 autres mutations somatiques pour initialiser le processus tumoral [31].
On connaît aujourd'hui une trentaine de gènes surpresseurs qui interviennent
spécifiquement dans certains types de tumeurs.
Il faut en général que les 2 allèles de ces gènes aient été inactivés pour annuler leur
capacité anti-oncogène : ce sont donc des gènes dominants. C'est le cas pour le
gène Rb. Cependant, pour au moins une douzaine de ces gènes surpresseurs,
l'inactivation d'un seul allèle suffit pour augmenter le risque de développer un cancer,
par un effet de dosage du produit du gène impliqué [34].
1.3.4.
Les mécanismes moléculaires d'altération de ces
gènes
Bien que les mécanismes moléculaires ne soient pas à ce jour éclaircis dans leur
globalité, la très grande variété de causes et d'interactions peut être regroupée
globalement en deux grands mécanismes : génétiques ou épigénétiques (directs ou
indirects) [31].
1.3.4.1.
Mécanisme génétique
Il consiste en une altération de la séquence d'un gène ou d'une partie plus
importante d'un chromosome sous l'effet d'agents mutagènes génotoxiques (virus,
radiations, produits environnementaux...). Chez des individus ayant de façon
40
héréditaire ou acquise des capacités de réparation de l'ADN réduites, cette altération
ne sera pas réparée. Le cumul progressif des mutations somatiques joue un rôle
fondamental dans la transformation cellulaire et la perte d'homéostasie [35].
La conversion d'un proto-oncogène en oncogène aboutit à un gain de fonction et fait
appel à 3 mécanismes :

une mutation ponctuelle ou une délétion au niveau du proto-oncogène
aboutit à la production d'une protéine hyperactive ;

des
réarrangements
chromosomiques
peuvent
aboutir
à
la
surexpression d'un gène par juxtaposition de ce gène près d'une région
activatrice de la transcription ;

l'intégration d'un génome viral près d'un gène régulateur de la cellule
hôte peut aboutir à un gène ou à des protéines hybrides. Ce
mécanisme ne paraît pas majeur dans la cancérogenèse mammaire.
Les gènes surpresseurs de tumeurs sont inactivés par différents mécanismes :

mutations inactivatrices,

délétions (perte d‟hétérozygotie),

anomalies lors de la mitose telles que la non-disjonction des
chromosomes avec perte d'un chromosome (recombinaison mitotique),

conversion génique.
La transmission germinale de la mutation de gènes surpresseurs augmente
l'incidence des cancers.
L'expression d'un gène surpressé ne nécessite la présence que d'un seul allèle de
type sauvage pour donner une protéine normalement fonctionnelle. Pour ne plus
exprimer la protéine normale, il faut donc une mutation sur chaque allèle ou une
hyperméthylation sur celui qui n'est pas muté [35].
1.3.4.2.
Mécanisme épigénétique
41
De façon schématique, il englobe tout ce qui est héréditaire au niveau cellulaire et
qui ne correspond pas à la séquence de l'ADN ; il s'agit de la méthylation de l'ADN et
de la modification des histones (protéines nucléaires auxquelles s'associe l'ADN pour
former les nucléosomes) [35].
L'hyperméthylation des régions promotrices de gènes surpresseurs, aboutissant à
une baisse de leur expression, est un mécanisme épigénétique qui paraît essentiel
dans les stades précoces de la cancérogenèse.
Par exemple,le gène de prédisposition aux cancers du sein et de l'ovaire BRCA1 est
inactivé dans 15 à 30 % des tumeurs du sein sporadiques par un mécanisme
épigénétique d'hyperméthylation de sa région régulatrice [35].
À l‟inverse, l'hypométhylation sur des séquences particulières peut entraîner la
réexpression inappropriée d'une protéine perturbant l'homéostasie cellulaire.
Cette dysrégulation de la transcription de l'ADN peut elle-même provenir de
mutations ou dysfonctions dans les complexes enzymatiques régulant la méthylation
de l'ADN [31].
1.3.5.
Conséquences : initiation ou transformation cellulaire
tumorale
L'activation (ou dérépression) d'un oncogène ou l‟inactivation d'un gène supresseur
se traduisent à terme par l'initiation ou transformation cellulaire.
La transformation cellulaire comporte deux éléments majeurs : l'immortalisation et la
perte d'homéostasie [31].
1.3.5.1.
Immortalisation cellulaire
Elle peut être due à la perte de régulation de l'apoptose, par exemple par :

une mutation sur le gène P53 (la protéine P53, activée par une
modification génotoxique de l'ADN, provoque un arrêt du cycle
cellulaire et l'induction de la transcription de protéines responsables de
la réparation de l'ADN ou de protéines proapoptotiques ; elle permet
donc par cette double fonction, d'empêcher la propagation d'une
42
mutation de l'ADN puisqu'en cas d'échec de réparation, la cellule
mutante est éliminée par apoptose) ;

la réinduction anormale d'une activité télomérase cellulaire (la
télomérase, permet le renouvellement des télomères, ce qui empêche
l'apoptose, car normalement la télomérase étant inactivée, la disparition
des télomères de chaque chromosome enclenche l'apoptose) [31].
1.3.5.2.
Perte de l'homéostasie
L'homéostasie est l'équilibre entre prolifération et apoptose, permettant de maintenir
constant le nombre de cellules tout en assurant le renouvellement cellulaire
permanent et harmonieux.
Ainsi, un déficit en apoptose provoque une accumulation de cellules endommagées
ou vieillies, menant à l'apparition éventuelle d'un cancer [31].
1.3.6.
Modèle génétique de la cancérogenèse
L'apparition d'un oncogène et l'inactivation d'un gène supresseur de tumeur ne
suffisent pas à transformer une cellule saine en une cellule maligne. D'autres
altérations génétiques ou épigénétiques sont nécessaires, aboutissant à l'altération
des systèmes apoptotiques, à la disparition de l'inhibition de contact et à l'acquisition
de propriétés d'angiogenèse et d'invasion des tissus voisins ainsi que de migration
[34].
En dépit des progrès réalisés au cours des dernières années dans l'identification de
nouveaux proto-oncogènes et gènes surpresseurs de tumeurs, il est probable que
tous les gènes dont les altérations peuvent contribuer à l'oncogenèse n'ont pas
encore été identifiés [34].
En 1954, Armitage et Doll avaient proposé une théorie multiétape de l'oncogenèse
selon laquelle, pour les tumeurs solides, six à dix altérations spécifiques
s'accumulent dans une même cellule. Cette théorie multiétape est en accord avec
l'identification des altérations génétiques dans les cancers coliques par Volgenstein
et ses collaborateurs [34]. Le groupe Volgenstein a montré que l'accumulation des
43
évènements génétiques est une notion plus importante que leur ordre d'apparition
dans le cancer colorectal [32].
Cependant dans une étude ultérieure, Armitage et Doll ont admis que nombre de
formes fréquentes de cancers impliqueraient 2 étapes d'initiation et de promotion
auxquelles correspondent des initiateurs et des promoteurs. Les initiateurs sont des
agents
mutagènes
et
génotoxiques
alors
que
les
promoteurs
favorisent
l'accumulation d'évènements géniques et épigéniques en stimulant la prolifération
cellulaire ou en altérant les communications intercellulaires [34].
Malgré son caractère artificiel, cette distinction garde son intérêt, et il faut noter que
la plupart des cancérogènes identifiés par l'épidémiologie ne sont pas des initiateurs
génotoxiques, mais sont des promoteurs (alcool, amiante, déséquilibres hormonaux).
Certains agents cancérogènes, tels le tabac et les rayons X et UV, sont des
cancérogènes complets, à la fois initiateurs et promoteurs [34].
Dans le cas du cancer du sein, à ce jour on ne peut envisager un quelconque
schéma des étapes successives de la tumorigenèse mammaire (altérations
génétiques somatiques). De plus, on peut se poser la question de l'existence d'un tel
schéma et de son unicité dans le cancer du sein, en fait peu probable vu
l'hétérogénéité de ces cancers aussi bien sur le plan biochimique, histologique,
clinique que géographique.
Des tentatives de modèles mathématiques ont été faites pour expliquer les
mécanismes de la progression du cancer telles que l'angiogenèse, la réponse
immune contre les tumeurs, l'instabilité génétique et la résistance aux drogues, mais
elles se sont révélées décevantes [1].
1.3.7.
Quelle cellule devient cancéreuse ?
On a démontré expérimentalement dans un certain nombre de leucémies et de
tumeurs solides (cancer du sein, médulloblastome, glioblastomes du système
nerveux central), l'existence d'une population minoritaire de cellules, que leurs
propriétés conduisent à désigner sous le nom de cellules souches tumorales (CST)
[36].
44
Ces cellules sont triées par rapport aux autres cellules grâce à l'expression de
marqueurs de surface spécifiques et constituent une population minoritaire des
néoplasies étudiées.
L'injection à des souris d'un petit nombre de CST conduit à l'apparition d'une tumeur,
alors que l'injection d'un nombre élevé de cellules tumorales non triées n'est pas
tumorigène.
Les CST possèdent, au même titre que les cellules souches tissulaires deux
propriétés essentielles :

capacité d'autorenouvellement indéfini lorsqu'elles sont cultivées sur un
milieu approprié in vitro ;

divisions asymétriques générant d'une part une nouvelle CST et d'autre
part, une cellule progénitrice, dont la multiplication contribuera à
l'expansion de la tumeur, mais qui n'est pas douée d'une capacité
d'autorenouvellement indéfini in vitro.
Concernant l'origine des CST, on retient actuellement deux hypothèses toutes deux
vraisemblables :

transformation d'une cellule souche saine du tissu en cellule souche
tumorale ou

transformation d'un progéniteur qui récupérerait par des évènements au
niveau
de
son
génome
les
propriétés
des
cellules
souches
(autorenouvellement indéfini et divisions asymétriques).
Les cellules souches tissulaires normales sont localisées dans des « niches »,
constituées de cellules de différents types selon la nature du tissu considéré. Le
dialogue entre cellules souches et cellules de la niche régule les divisions des
cellules souches en fonction des besoins de renouvellement naturel du tissu et
intervient en cas de lésion impliquant une réparation qui doit être strictement
contrôlée pour éviter la génération éventuelle d'un cancer [36].
L'étude du développement de glandes mammaires chez la souris a permis de
montrer l'existence de cellules souches conduisant à des précurseurs de la série
épithéliale, qui ont conservé la possibilité de former une glande mammaire constituée
de canaux et d'alvéoles après stimulation hormonale. Ces cellules, localisées dans
l'unité ductulo-lobulaire terminale (UTDL) considérée comme le lieu de départ de la
cancérogenèse, se divisent très lentement, mais du fait de leur immortalité, elles sont
45
exposées à l'accumulation de mutations au cours d'une vie entière. Certaines
cellules souches expriment également des récepteurs des estrogènes et de la
progestérone, suggérant que les hormones ovariennes, en amplifiant cette
population au cours des cycles menstruels, pourraient favoriser le développement de
cancers hormonodépendants. Une grossesse précoce pourrait cependant permettre
d'éliminer la majorité de ces cellules immortelles avant leur mutation.
Deux types de cellules précurseurs contenant ou non des RE seraient à l'origine des
2 voies principales de la cancérogenèse mammaire aboutissant aux cancers
hormonodépendants ou hormono-indépendants de grade histopronostique plus élevé
[37].
L'existence de CST, au moins dans certaines leucémies et dans certaines tumeurs
solides, a des implications thérapeutiques majeures. Si les thérapeutiques classiques
sont efficaces pour détruire les populations majoritaires de cellules tumorales, elles
risquent de ne pas atteindre les CST pour les raisons suivantes. Les CST, comme
les cellules souches normales, sont plus souvent en phase G0 que G1 ; or, les
thérapeutiques classiques ont pour cible des cellules tumorales en prolifération
active. De plus, les CST expriment diverses protéines qui expulsent les drogues et
certains colorants de la cellule et provoquent une multirésistance aux molécules
couramment utilisées en chimiothérapie. Enfin, on considère que les CST peuvent
avoir conservé des propriétés de préservation propres aux cellules souches
normales : mécanismes efficaces de réparation des lésions de l'ADN et résistance à
l'apoptose.
Il conviendrait donc de développer des thérapies ciblées visant spécifiquement les
CST [36].
1.3.8.
Le microenvironnement tumoral
La tumeur est composée de multiples cellules telles que les fibroblastes, les cellules
épithéliales, les cellules du système immunitaire, les cellules qui forment les parois
des vaisseaux et des lymphatiques. Le stroma du sein participe à la régulation de la
croissance et de la différenciation des cellules mammaires normales et cancéreuses.
De nombreux travaux montrent que les cellules stromales comprenant non
seulement les fibroblastes, mais aussi les myoblastes, les leucocytes et les cellules
myofibroblatiques, interviennent dans le potentiel d'invasion et de métastases des
46
cellules cancéreuses. Le profil d'expression génique de ces cellules dans
l'environnement d'un cancer du sein est différent de celui des mêmes cellules dans le
tissu normal.
Certaines publications ont aussi trouvé des altérations géniques dans les cellules
stromales entourant la tumeur, mais ces résultats demeurent controversés et leur
rôle dans la tumorigenèse mammaire est inconnu [1].
Le système immunitaire joue un rôle paradoxal au cours de la cancérogenèse. Alors
que l'activation des cellules immunitaires en réponse à une tumeur est censée
détruire les cellules malignes, la réaction inflammatoire chronique autour du tissu
précancéreux potentialise le développement du cancer au lieu de lutter contre.
Les infiltrats leucocytaires présents dans l'environnement néoplasique régulent
plusieurs processus physiologiques nécessaires au développement tumoral tels que
la survie cellulaire, le remodelage tissulaire, l'angiogenèse et la suppression de la
réponse immunitaire antitumorale. Des données expérimentales ont bien démontré
que la diminution de l'infiltration du tissu tumoral par des cellules immunitaires réduit
la néoangiogenèse et limite le développement tumoral [1].
L'angiogenèse est essentielle pour la progression tumorale. L'angiogenèse tumorale
est liée aux cellules endothéliales bordant les vaisseaux. En réponse à différents
signaux provenant des cellules tumorales et du stroma environnant, ces cellules
migrent
et
prolifèrent
pour
former
de
nouveaux
tubes
capillaires.
Cette
néovascularisation, si elle est indispensable au développement des tumeurs solides,
n'est cependant pas normale sur le plan structural.
Concernant le cancer du sein, de nombreux travaux ont montré que la présence
d'une vascularisation tumorale était un indicateur de mauvais pronostic indépendant,
pour la survie globale et la survie sans métastase. La présence de certains facteurs
angiogéniques a également été évaluée. Parmi ceux-ci, le VEGF (facteur de
croissance de l'endothélium vasculaire) a fait l'objet d'études qui indiquent que la
surexpression du VEGF est un marqueur de mauvais pronostic dans les tumeurs du
sein.
Des essais thérapeutiques utilisant des drogues antiangiogéniques sont en cours [1].
47
2. CANCEROGENESE HORMONALE
2.1.
Les voies d'action des hormones stéroïdes
2.1.1.
Les récepteurs nucléaires
L'action des stéroïdes sexuels passe principalement par des récepteurs nucléaires.
Les récepteurs des hormones stéroïdiennes sont des protéines intracellulaires liant
l'hormone avec une forte affinité et une grande spécificité.
Ils appartiennent à la superfamille des récepteurs nucléaires qui sont des cofacteurs
de transcription activés par la liaison de l‟hormone [35].
2.1.1.1.
Les gènes codant les récepteurs de l'estradiol et de la
progestérone
Deux récepteurs des estrogènes ont été identifiés, REα et REβ. Le gène codant pour
REα est localisé sur le bras long du chromosome 6 (en 6q25.1), et le gène codant
pour le REβ est localisé dans la région q22-24 du chromosome 14 [35].
Il existe trois récepteurs à la progestérone PR-A, PR-B, PR-C. Ces trois protéines
sont issues d‟un même gène par le fonctionnement de promoteurs alternatifs.
Ce gène est localisé sur le chromosome 11 en q22-23.
Le rôle physiologique potentiel de PR-C n'a été montré que récemment dans le
déclenchement du travail chez la femme ; son implication dans d'autres phénomènes
est actuellement à l'étude [35].
2.1.1.2.
Les domaines fonctionnels des récepteurs nucléaires
La protéine possède plusieurs domaines fonctionnels (A à F).
Les extrémités NH2 (domaine A/B) et COOH (domaine E/F) sont nécessaires à
l'activité de régulation transcriptionnelle du récepteur et sont respectivement
appelées AF1 et AF2 (Activation Function). AF1 serait fonctionnel dès que le
récepteur activé se fixe sur l'ADN alors que l'affinité d'AF2 serait fonction du ligand.
Le domaine C de la protéine assure la liaison à l'ADN au niveau de régions
spécifiques appelées éléments de réponse (ER), situées dans le promoteur des
gènes hormonorégulés [35].
Le domaine E/F a plusieurs fonctions :
48
 site de liaison du ligand spécifique,
 rôle dans la dimérisation des récepteurs,
 rôle dans la translocation nucléaire,
 interactions avec les cofacteurs nucléaires (co-activateurs et co-inhibiteurs).
Les deux isoformes du RE comportent des différences : si le domaine C est quasi
identique dans les 2 formes, le domaine de liaison à l'hormone (E/F) diffère de façon
significative (55 % d'homologie), le domaine de régulation transcriptionnelle est
différent (moins de 20 % d'homologie pour le domaine A/B). Il en résulte que leurs
effets biologiques peuvent être différents et que les affinités des ligands naturels ou
synthétiques ne sont pas identiques pour les 2 formes.
Les 2 formes sont présentes dans la plupart des tissus cibles, mais en proportions
différentes.
Le REα est un activateur transcriptionnel plus puissant et le REβ est actuellement
considéré comme un inhibiteur du REα [35].
PR-A possède une région NH2 terminale plus courte que PR-B (164 acides aminés
de moins). PR-B possède donc un troisième domaine d'activation transcriptionnelle
situé
dans
sa
partie
NH2
terminale.
PR-A
et
PR-B
ont
des
activités
transcriptionnelles différentes. Les deux formes sont présentes dans tous les tissus
cibles, mais leurs proportions relatives varient d'un tissu à l'autre [35].
2.1.1.3.
Localisation des récepteurs des hormones stéroïdiennes
En l'absence de ligand, les récepteurs de l'estradiol et de la progestérone sont des
protéines nucléaires. Cette localisation nucléaire n'est pas une situation statique,
mais le résultat d'un équilibre dynamique entre le noyau et le cytoplasme. Alors que
le récepteur sort en permanence du noyau, il est activement pompé vers celui-ci,
grâce à un signal de localisation nucléaire dans la séquence de la protéine. Ce
phénomène de navette nucléo-cytoplasmique implique que ces molécules puissent
avoir des effets biologiques dans le cytoplasme ou y interagir avec d'autres voies de
transduction [38].
2.1.1.4.
Mécanisme d'action des récepteurs nucléaires
Lorsque le ligand pénètre dans la cellule puis se lie au récepteur, celui-ci change de
conformation, se dimérise et acquiert une haute affinité pour des régions très
spécifiques de l'ADN appelées « éléments de réponse » (ER), situées dans la région
49
promotrice des gènes spécifiques, au niveau desquelles il se fixe. Une fois lié à
l'ADN, le complexe hormone-récepteur induit ou réprime la transcription des gènes
cibles [35].
Parfois, des protéines jouant le rôle d'intermédiaire entre le récepteur activé et la
machinerie transcriptionnelle sont nécessaires. Ces cofacteurs sont appelés coactivateurs en cas d'activation de la transcription et coinhibiteurs dans le cas
contraire. Ils se lient directement sur les récepteurs et agissent sous forme de
complexe multiprotéique comme médiateurs du signal d'activation ou de répression
de la transcription. Les coactivateurs possèdent une activité de remodelage de la
chromatine, de réinitiation de la transcription et d'histone acétyltransférase (les
histones se dissocient après acétylation et l'ADN se linéarise). Les coinhibiteurs ont
au contraire une activité désacétylase amenant la reconstruction du nucléosome par
réassociation des histones.
La proportion variable de ces cofacteurs dans les cellules des divers tissus cibles
permet d'expliquer en partie les effets tissus spécifiques que présentent certains
ligands des récepteurs (antiestrogènes ou SERMs) [35].
2.1.1.5.
Notion de modulateurs sélectifs des récepteurs (SRMs)
Les antistéroïdes sont des molécules liant spécifiquement les récepteurs, mais
n'entraînant pas d'activation de la transcription. Ils peuvent théoriquement agir à tous
les niveaux de l'action hormonale : activation des récepteurs, dimérisation, liaison à
l‟ADN ou activation de la transcription.
Mais deux types principaux d'antistéroïdes ont été décrits. Les composés du premier
type qui comportent les anti-estrogènes purs empêchent la liaison du récepteur
activé à l'ADN.
Les composés du second type empêchent la transcription du fait d'une conformation
acquise lors de la liaison à l'ADN qui empêche l'interaction avec les coactivateurs et
permet l'interaction avec les corépresseurs. Dans certaines conditions, ces
antagonistes peuvent avoir une activité agoniste. C'est le cas de la mifépristone et du
tamoxifène.
L'existence d'antagonistes pouvant avoir un effet agoniste a amené la notion de
modulateurs de l'action du récepteur. C'est ainsi qu'on parle de SERMs (Selective
Estrogen Receptor Modulators). Ces molécules ont l'avantage de pouvoir être
antagonistes sur les tissus où un effet antiestrogénique est souhaité (utérus, sein...)
50
et agonistes sur ceux où il serait délétère (os, système cardio-vasculaire, système
nerveux central...) [38].
2.1.2.
Autres voies d'action pour les estrogènes
2.1.2.1.
Voie génomique indépendante du ligand : activation du
récepteur
par
phosphorylation
des
récepteurs
membranaires des facteurs de croissance
Le récepteur nucléaire peut être activé en l'absence d'estradiol, par la voie des
facteurs de croissance.
Les kinases de la voie de transduction des facteurs de croissance (EGF, IGF-1)
entraînent une phosphorylation (activation) directe du récepteur nucléaire au niveau
de certains acides aminés de la région A/B (AF1). Dans le cas du RE, la voie des
MAP Kinases, contrôlée par la famille du récepteur de l'EGF, est capable d'activer
RE en l'absence d'estradiol. L'IGF-1 est aussi impliqué dans un tel mécanisme [35].
2.1.2.2.
Voie génomique indépendante de l'ER
Le complexe activé RE-E2 peut interagir directement au niveau de certains gènes :
en particulier le gène cycline D1 [35].
2.1.2.3.
Voie non génomique qui serait responsable des effets
rapides de l'estradiol
Ces effets seraient membranaires et plusieurs mécanismes ont été proposés. Une
petite partie des récepteurs nucléaires (moins de 5 %) serait cytoplasmique ou liée à
la membrane nucléaire. L'existence d'un récepteur membranaire différent du
récepteur nucléaire a aussi été évoquée [35].
2.1.3.
Autre voie d'action de la progestérone
A côté de la voie de la transcription nucléaire, la progestérone (P) peut agir par la
voie de la transduction membranaire, celle de la signalisation membranaire, en
stimulant l'EGF sur R-EGF qui déclenche une cascade de phosphorylations.
51
2.2.
Estrogènes et carcinogenèse
2.2.1.
Les estrogènes sont carcinogènes par 2 mécanismes
2.2.1.1.
Induction de la prolifération
Il existe des arguments biologiques pour penser que les estrogènes sont un agent
promoteur de la tumorigenèse mammaire.
De très nombreuses publications montrent que les estrogènes stimulent, in vitro, en
culture de cellule, la prolifération des cellules mammaires cancéreuses ayant des
récepteurs aux estrogènes α (REα+) [35].
Les estrogènes peuvent jouer soit un rôle de promoteur direct, seulement dans les
cellules épithéliales RE+, par liaison hormones/récepteurs, soit un rôle promoteur
indirect via les facteurs de croissance et cytokines sécrétés par l'épithélium et les
cellules stromales hormonosensibles qui vont promouvoir les cellules épithéliales
transformées ayant des récepteurs spécifiques à ces facteurs, quel que soit leur
statut en récepteur aux estrogènes (RE+ ou RE-) [31].
L'étude des lignées cellulaires humaines issues de cancers du sein métastatiques et
exprimant les récepteurs des hormones ovariennes ont permis d'élucider les
mécanismes par lesquels les estrogènes stimulent la croissance et la division des
cellules cancéreuses en étroite interaction avec les facteurs de croissance qui via
des récepteurs membranaires stimulent l'activité d'une cascade de protéines kinases
[37].
Les récepteurs nucléaires activés par les hormones stimulent la transcription de
gènes spécifiques en interagissant avec leur promoteur et un grand nombre de
partenaires protéiques (dont de nombreux coactivateurs, corépresseurs, des variants
d'épissage
des
récepteurs
et
divers
facteurs
transcriptionnels),
dont
les
combinaisons multiples peuvent rendre compte de la spécificité tissulaire de la
réponse aux hormones et des mécanismes de résistance aux antihormones [37].
L'étude des lignées a également permis de détecter plusieurs protéines induites, qui
si elles sont également surexprimées chez les malades, pourraient expliquer l'activité
mitogène des estrogènes et leur rôle comme promoteur de tumeurs. Outre des
facteurs de croissance et des protéases comme la cathepsine D qui sont sécrétés et
ont une action autocrine sur les mêmes cellules ou paracrine sur les cellules
52
voisines, les estrogènes induisent également des facteurs intracrines (tels que fos,
jun, c myc, cyclines D1 et E) qui accélèrent la transition G1-S du cycle cellulaire.
Certaines enzymes induites par les estrogènes telles que la cathepsine D ou par les
progestatifs telles que l'acide gras synthétase permettent aux cellules cancéreuses
après leur migration métastatique de survivre et de se multiplier de façon autonome
dans un environnement étranger. Ces enzymes sont également surexprimées dans
les cancers RE- et constituent de nouvelles cibles thérapeutiques potentielles [37].
Les estrogènes ont donc par leur effet promoteur, un effet mutagène indirect, car
l'induction de la prolifération sous-tend une augmentation du risque d'erreurs de
réplication, et donc de mutations [35].
2.2.1.2.
Lésions
directes
de
l'ADN
par
leurs
métabolites
génotoxiques
La plupart des métabolites des E et de la P (80 %) sont protecteurs [39].
Mais d'autres métabolites au contraire, moins nombreux (20 %), sont dangereux, par
exemple les cathécholestrogènes. Certains de ces métabolites peuvent provoquer
des lésions directes de l'ADN (appelées induits de l'ADN) dans les cellules
épithéliales mammaires, quel que soit leur statut (RE+/RE-) [31].
Il existe un polymorphisme au niveau des gènes codant pour les enzymes
d'inactivation de ces métabolites.
En cas de faible activité de ces enzymes, la
concentration anormalement élevée de ces métabolites peut entraîner un surcroît de
risque de cancer du sein [1].
Ainsi, le métabolisme intracellulaire des hormones détermine le risque individuel de
carcinogenèse.
Les estrogènes sont néanmoins considérés comme des carcinogènes faibles.
2.2.2.
La notion de sensibilité mammaire aux hormones
Elle repose à la fois sur la source de production des hormones, mais aussi sur leur
réceptivité tissulaire [39].
2.2.2.1.
Source de production des hormones
Avant la ménopause, 90 % des estrogènes (estrone et estradiol) proviennent des
ovaires et 10 % sont d‟origine périphérique.
53
Après la ménopause, la stéroïdogenèse ovarienne s‟arrête et seuls les androgènes
surrénaliens continuent à être sécrétés, dont la DHEA représente la principale
source en temps que précurseur androgénique.
Les androgènes deviennent les précurseurs des estrogènes par aromatisation grâce
à une aromatase située principalement dans les graisses périphériques (graisses
abdominales surtout, graisses sous-cutanées), la graisse intramammaire, ainsi que
les muscles.
L‟aromatisation des androgènes en estrogènes produit de l‟estrone (E1) qui circule
sous forme sulfoconjuguée (E1S) grâce à une sulfotransférase, voie enzymatique
protectrice qui convertit les estrogènes actifs dans leurs formes sulfatées inactives.
L'expression du gène contrôlant cette enzyme est très polymorphe, expliquant la
grande variabilité de protection.
Après la ménopause, E1S produite circule en quantité très importante (10 à 50 fois
plus que E2).
Elle est biologiquement inactive, mais constitue un très important réservoir de
conversion.
La sulfatase, enzyme d‟exposition ubiquitaire (graisse, muscle, sein …) désulfate
E1S en E1 actif.
Les niveaux d‟activité de l‟aromatase et de la sulfatase sont corrélés à l‟importance
de la prolifération cellulaire.
Une production excessive de E1 en postménopause est un facteur de risque
hormonal. Ainsi l‟obésité tardive qui s‟accompagne d‟une surexpression de
l‟aromatase entraînant des niveaux circulants en estrogènes constamment élevés,
est un facteur de risque de cancer du sein [39].
54
2.2.2.2.
Biosynthèse locale des estrogènes
La cellule mammaire est capable de produire localement des estrogènes et des
androgènes selon 2 voies (estrogénique et androgénique), chacune sous la
dépendance d‟enzymes spécifiques. (Figure 1)
Figure 1
BIOSYNTHESE LOCALE DES ESTROGENES DANS LA CELLULE MAMMAIRE :
VOIES ANDROGENIQUE ET ESTROGENIQUE [39].
VOIE ANDROGENIQUE
VOIE ESTROGENIQUE
DHEA-S
(circulant, d'origine surrénale)
E1-S circulant
- origine ovarienne avant la ménopause
- venant des adipocytes périphériques
en post ménopause
SULFATASE
DHEA actif
SULFATASE
3β HDS
Androstènedione
E1 actif
17β HSD1
17β HSD1
Testostérone
E2
AROMATASE
5α REDUCTASE
DHT
Récepteurs androgéniques
Récepteurs estrogéniques
freination
stimulation
Régulation de la prolifération des cellules mammaires
cancéreuses hormonodépendantes
55
Dans la voie des androgènes, après conversion de la testostérone, la 5α réductase
permet la biosynthèse locale de DHT qui freine la prolifération épithéliale.
Dans la voie des estrogènes, E1 provient d‟E1S désulfatée produite après
aromatisation des androgènes. La 17β-hydroxystéroïde déshydrogénase permet la
conversion de E1 en E2. E2 intracellulaire agit sur son récepteur RE et stimule la
voie nucléaire de la prolifération et la réceptivité hormonale.
Ainsi, la voie androgénique est un modulateur de la prolifération de la cellule
épithéliale induite par les estrogènes.
Cependant, la voie des androgènes peut être déviée vers celle des estrogènes par
l‟aromatase.
L‟aromatase et la sulfatase contribuent donc à la synthèse locale in situ de E2 à
partir des précurseurs androgéniques surrénaliens et des estrogènes sulfoconjugués
circulants. Ces deux voies enzymatiques contribuent à la stimulation de la
prolifération cellulaire induite par les estrogènes produits par la cellule et agissant
dans celle-ci [39].
L'expression et le niveau d'activité de ces enzymes déterminent la concentration
intramammaire d'androgènes et d'estrogènes selon le concept d'intracrinologie.
Ce concept est basé sur le fait qu‟une hormone agit dans le tissu même où elle est
produite.
Le polymorphisme des gènes, contrôlant ces différentes voies enzymatiques et leur
niveau d'expression, explique les importantes variations individuelles dans la
protection ou l'exposition au risque, selon les niveaux circulants des hormones et leur
concentration intramammaire impliquée dans la genèse et l'évolution tumorale.
2.2.2.3.
Concentration intramammaire d'estrogènes
Les estrogènes se concentrent dans le tissu mammaire normal après la ménopause
ainsi que dans le tissu cancéreux.
Deux mécanismes de concentration intramammaire d'estrogènes peuvent survenir
individuellement ou conjointement dans la cellule épithéliale [39] :
 celui de la captation où les estrogènes s'accumulent dans le tissu mammaire à
partir de taux circulants élevés ; ces estrogènes peuvent être d'origine
endogène (E1S provenant de l'aromatisation en excès des androgènes dans
le tissu adipeux des obèses) ou exogène (THS) ;
56
 celui de la biosynthèse in situ (intracrine) d'estradiol à partir des 2 voies
estrogénique et androgénique, chacune sous la dépendance d'enzymes
spécifiques.
Le pourcentage de contribution respective entre la captation et la synthèse in
situ varie d‟une femme à l‟autre.
2.2.2.4.
Réceptivité tissulaire aux hormones
Siège des récepteurs
Les RE et RP se situent surtout dans les cellules épithéliales de l'unité ductulolobulaire (UTDL), comportant les petits canaux, les canalicules et les ascini formant
le lobule [39].
C‟est précisément à ce niveau où se concentrent les récepteurs, que naissent les
cancers du sein hormonodépendants. Ils sont alors de types « canalaire » ou bien
« lobulaire ». Les cellules lorsqu'elles deviennent malignes surexpriment l'un, l'autre
ou bien les deux récepteurs, du fait d'altérations moléculaires des récepteurs
nucléaires [39].
Variations de la concentration en récepteurs
La concentration des récepteurs et leurs fonctionnalités sont variables selon les
tranches d‟âge [39].
En postpuberté et chez la femme jeune, la concentration en RE et RP est faible,
alors que les niveaux hormonaux circulants du cycle ovulatoire (E+P) sont les plus
élevés au cours de la vie génitale. L'effet des estrogènes sur RE est donc limité, ce
qui permet le contrôle de la prolifération cellulaire (homéostasie).
En postménopause à l'inverse, la concentration cellulaire des RE dans les cellules
épithéliales augmente progressivement alors que les niveaux circulants de E2
chutent de façon importante. La prolifération épithéliale reste faible (processus
d'involution ménopausique) si les récepteurs ne sont pas stimulés.
Dans la cancérogenèse mammaire, nous verrons que l'expression des RE est
croissante [39].
57
2.2.3.
Hypersensibilité
des
cellules
mammaires
aux
estrogènes en postménopause
Au cours de la postménopause se développe une hypersensibilité mammaire aux
hormones. Cette hypersensibilité mammaire aux hormones est liée à l'âge ainsi qu'à
la déprivation en estrogènes (arrêt de la stéroïdogenèse ovarienne) qui induisent
[39] :
 une augmentation d'expression de l'aromatase (gène CYP19) située
principalement dans les graisses périphériques, la graisse intramammaire
ainsi que les muscles ; cela détermine une capacité de concentration
intramammaire d'estrogènes acquise après la ménopause ;
 l'augmentation de la concentration en RE dans les cellules épithéliales, reflet
d'une hyperréceptivité du tissu mammaire.
De plus, les estrogènes augmentent aussi la synthèse de RP et sont donc
responsables de l'augmentation de la sensibilité mammaire à la progestérone.
Il existe donc des changements moléculaires progressifs et tardifs portant sur les
gènes de l‟aromatase et sur les gènes des RE, donc sur l'expression biologique et
clinique de la sensibilité mammaire aux estrogènes.
Les effets prolifératifs hormonodépendants augmentent donc avec l'âge.
2.2.4.
Hypersensibilité
aux
estrogènes
des
cellules
mammaires cancéreuses
2.2.4.1.
Augmentation de la production d'estrogènes dans le tissu
mammaire cancéreux
Les dosages des estrogènes dans le tissu cancéreux hormonodépendant révèlent
une concentration intratumorale en estrogènes particulièrement élevée [39].
La forte concentration en estrogènes à la fois dans le tissu cancéreux lui-même et
autour de celui-ci dans le même quadrant, rend compte, en pathologie, de la
capacité des estrogènes à se concentrer de façon anormale dans le tissu mammaire.
58
Cette concentration peut être un facteur favorisant la croissance tumorale, via les
RE.
L'étude in vivo de l'activité aromatase du tissu adipeux péritumoral (même quadrant
que celui où se développe la tumeur) confirme une élévation marquée de l'activité
aromatasique, plus élevée dans ce quadrant comparé aux autres [39].
Ainsi, la concentration intratumorale en estrogènes est élevée du fait d'une forte
activité aromatase, à la fois dans la cellule cancéreuse et dans les fibroblastes du
tissu adipeux entourant la tumeur dans le même quadrant.
L'élévation de l'activité aromatase dans les fibroblates est provoquée par des
facteurs sécrétés par les cellules tumorales et par les cellules de l'inflammation
(macrophages), tels que les prostaglandines E2, COX2, certains facteurs de
croissance.
L‟estradiol circulant ne semble pas contribuer significativement au taux global des
estrogènes tissulaires intratumoraux, car la majorité des estrogènes présents dans
les cancers du sein dérivent de la biosynthèse in situ. En fait, la concentration de E2
intratumoral ne diffère pas en pré- et en postménopause alors que les taux
plasmatiques décroissent de 90 % en postménopause [31].
2.2.4.2.
Surexpression des récepteurs (RE et/ou RP) et modification
du ratio REα/REβ
Dans la cancérogenèse mammaire, l'expression de RE est croissante et la
concentration de RE devient anormalement forte.
On observe une augmentation de la proportion relative de récepteurs REα par
rapport aux REβ [35].
La cellule épithéliale normale exprime surtout REβ alors que REα est peu exprimé.
REβ contrôle et inhibe l'expression de REα. La cellule prolifère peu [41]. Dans le
tissu mammaire humain normal, REα n'est présent que dans 5 à 10 % des cellules
épithéliales normales et surtout dans les cellules luminales, alors que le REβ est
présent dans la plupart des cellules épithéliales et même dans les cellules stromales
du tissu sain [1, 41].
59
A l'inverse dans la cellule cancéreuse, qui produit ses propres récepteurs, REβ
disparaît dans la plupart des cancers invasifs alors que REα est exagérément
exprimé (dans près de 70 % des cancers du sein) ; la cellule prolifère [41].
Lorsque les cellules mammaires deviennent cancéreuses, elles expriment leur
propre REα qui va induire leur multiplication cellulaire. Les cellules mammaires
cancéreuses ont donc une régulation autocrine de leur prolifération cellulaire [35].
Le ratio REα/REβ est modifié dans le cancer du sein [41].
Ainsi, la cellule cancéreuse, siège d'une dysrégulation hormonale, est capable de
produire ou concentrer exagérément des estrogènes qui, dans le même temps vont
agir sur ses propres récepteurs exagérément exprimés entraînant la surproduction
de nombreuses protéines, dont les cyclines impliquées dans la prolifération [39].
2.2.5.
Les RE sont pourtant un facteur de bon pronostic
La présence de RE dans la tumeur est le reflet d'une bonne différenciation tumorale
et constitue un facteur prédictif de la réponse à l'hormonothérapie. Les récepteurs de
la progestérone (RP-A et RP-B) sont sous le contrôle des RE et leur présence est un
bon test de fonctionnalité des RE.
Lorsque les récepteurs des estrogènes et de la progestérone sont en concentration
suffisante
dans
une
tumeur,
environ
70 %
des
patientes
répondent
à
l'hormonothérapie.
Les tumeurs RE+ sont souvent mieux différenciées sur le plan histologique, sont
diploïdes, et ont une fraction en phase S plus faible.
En analyse multivariée, le statut en RE est souvent un facteur pronostic indépendant.
[1].
2.3.
Progestérone (P), récepteur à la progestérone
(RP)
Malgré de très nombreux travaux de laboratoires, et en raison de la complexité des
mécanismes d'action de la progestérone sur la cellule mammaire, il n'est toujours
pas possible de définir clairement le rôle de la progestérone et des progestatifs sur le
sein et encore moins sur les tumeurs de cette glande [40].
60
Le développement du tissu mammaire normal et pathologique est sous la
dépendance de la progestérone et de son récepteur à qui l'on attribue désormais un
rôle central parmi ses effets opposés. P est capable à la fois de stimuler la
prolifération épithéliale et de l'inhiber [39].
Ces effets multiples de P découlent de la compréhension du rôle central que
possède le récepteur à la progestérone avec son ligand P. La connaissance des 2
isoformes PR-A et PR-B exprimés par la cellule permet de mieux comprendre les
effets opposés de P à la fois d'inhibition et de stimulation de la prolifération selon
l'expression dominante des isoformes [39].
2.3.1.
Progestérone et cycle cellulaire
Selon un effet biphasique, P seul stimule l'entrée de la cellule en début de phase G1
(prolifération), augmente l'accumulation des cellules en G1, mais inhibe leur
poursuite dans le cycle cellulaire en bloquant la cellule en fin de phase G1. P seul
permet à la cellule en phase G1 d'être au repos et ainsi de se différencier pour
développer une activité spécifique (lactogenèse) pour l'épithélium mammaire.
L'adjonction d'estrogènes à la progestérone permet à la cellule de franchir les
différentes étapes de la prolifération du cycle cellulaire S, G2, M. Le risque de
mutagenèse apparaît lié à une prolifération cellulaire anormalement augmentée [39].
2.3.2.
Effets
physiologiques
de
P
sur
la
prolifération
cellulaire du sein normal
Au niveau de l'endomètre, P a un effet antagoniste des estrogènes, arrêtant les
mitoses cellulaires induites par ceux-ci. Ainsi l'index mitotique est-il maximum en
phase folliculaire et décroît en phase lutéale.
Au niveau du tissu mammaire, le phénomène inverse se produit [40]. De très
nombreux travaux montrent en préménopause un effet prolifératif synergétique aux
estrogènes observé surtout en phase lutéale et sur la composante lobulaire [31].
L‟index mitotique est maximum entre le 21 et le 25e jour du cycle (bien que pour
certains auteurs l'index mitotique soit plus élevé en phase folliculaire).
61
Il convient de distinguer les effets sur les canaux et ceux sur l'unité terminale ductulolobulaire (UTDL).
Les effets sur les canaux peuvent se développer en l'absence de P comme l'ont
démontré les expériences sur les souris mutantes dépourvues de RP. En revanche,
le développement lobulo-alvéolaire ne peut s'effectuer qu'en présence de P.
P favorise la prolifération des cellules alvéolaires des lobules. On admet
actuellement que P favorise le développement de l‟UTDL et pas celui des canaux
[40].
P joue un rôle majeur dans les processus de différenciation cellulaire.
Lors de la grossesse, l'action conjointe des estrogènes, de P et de la prolactine induit
un degré de différenciation maximal [40].
2.3.3.
P/RP, coordonnateur central dans la morphogénèse et
tumorigenèse mammaire
P joue un rôle clé à la fois dans le développement de la glande mammaire au cours
de la grossesse (morphogenèse) mais aussi dans celui des cancers (tumorigenèse).
Grâce au modèle expérimental des souris transgéniques, la suppression de
l'expression de RP (RPKO) chez ces souris met en lumière le rôle de P selon
l'expression de RP : effet prolifératif dans la morphogenèse et la tumorigenèse ou
bien effet antiprolifératif (différenciation cellulaire) [39,41].
2.3.3.1.
RP et morphogenèse
Au cours de la grossesse, les effets de P sur le tissu épithélial mammaire sont
différents et opposés selon les moments de la grossesse.
Au premier trimestre de la grossesse, les cellules épithéliales de l'UTDL, en
présence d'une forte expression de RP, prolifèrent sous l'action de P (placentaire) ;
les lobules se développent.
Au troisième trimestre à l'inverse, la chute importante de concentration de RP est
responsable d'un arrêt de la prolifération, d'une mise au repos de ces cellules,
permettant la différenciation cellulaire et l'acquisition de la capacité à assurer la
lactation [39].
62
La concentration de récepteurs à la progestérone dans la cellule normale détermine
donc l'effet de P pouvant être proliférant ou différenciant.
Le contrôle par les RPs du développement et de la prolifération des lobules est
physiologiquement un mécanisme paracrine. La cellule normale exprimant RP+
sécrète, sous l'action de P, des protéines, qui agissent selon un mécanisme
paracrine stimulant la prolifération des cellules voisines qui n'expriment pas le
récepteur (RP-) [39].
2.3.3.2.
RP et tumorigenèse
La suppression de l‟expression de RP (RPKO) réduit significativement l'incidence de
la croissance tumorale en réponse aux carcinogènes : la cellule exposée aux
carcinogènes chimiques, ne développe pas de lésion prénéoplasique.
Un rôle spécifique de RP, distinct de celui ce RE apparaît comme régulateur
essentiel de la voie de la signalisation intracellulaire (prolifération) essentielle pour
une limitation tumorale induite par les carcinogènes.
A l'inverse, la surexpression de RP-A est corrélée à la présence d'états
précancéreux et du cancer au début (cancer in situ) [41].
Au cours de la tumorigenèse hormonodépendante, le mécanisme paracrine dérégulé
devient autocrine, car les hormones E et P stimulent directement les cellules
exprimant RE+ et RP+. P peut donc aussi intervenir dans la cancérogenèse [39].
2.3.4.
RP et ses isoformes : variations dans leur expression,
effets de chaque isoforme
Les effets de P sur RP sont médiés par deux isoformes structurellement et
fonctionnellement distincts RP-A et RP-B.
La connaissance de ces isoformes permet de préciser le rôle de P.
Le tissu mammaire normal exprime de façon équilibrée les 2 isoformes RP-A (50 %),
RP-B (50 %), cet équilibre étant fondamental pour l'harmonie cellulaire [39,41].
Dans les états proliférants sans atypie (hyperplasie canalaire sans atypie), la
coexpression des 2 isoformes reste inchangée.
63
Dans les états proliférants précancéreux (hyperplasie canalaire atypique, cancer in
situ), il apparaît une surexpression de RP-A [41]. La perte de contrôle de l'expression
équilibrée des 2 isoformes est donc un évènement précoce dans les cancers du sein.
L‟expression prédominante de RP-B (isoforme répresseur) permet l‟inhibition de la
prolifération cellulaire (en arrêtant la cellule en phase G0-G1 du cycle cellulaire et en
stimulant l'expression des inhibiteurs des cyclines D-kinases) et favorise la
différenciation de la cellule mammaire par arrêt du cycle cellulaire [41].
RP-B augmente et accumule les cellules au repos, alors que RP-A a un rôle
épithélial proliférateur [41].
Nous connaissons encore très mal les affinités des progestatifs utilisés en traitement
hormonal de la ménopause vis-à-vis des récepteurs PR-A et PR-B.
2.4.
Estrogènes et progestérone
2.4.1.
RP est estrogènorégulée : synergie d'action entre
estrogènes et progestérone
Les estrogènes stimulent la synthèse dans la cellule épithéliale des récepteurs aux
estrogènes (RE) mais aussi des récepteurs à la progestérone (RP). Les estrogènes
augmentent la réceptivité hormonale de la cellule (sensibilité hormonale) à ces deux
hormones. La sensibilité de la cellule à la progestérone dépend donc des
estrogènes.
P agit sur RP selon une relation dose-réponse : la progestérone n'a pas d'effet sur
son récepteur en présence de doses faibles d'estrogènes. L'action de P sur RP ne
devient possible que si une quantité suffisante de RP est synthétisée, donc en
présence d‟un niveau d‟estrogènes circulants suffisamment élevé. C'est la base de
l‟effet synergique de E+P [41].
64
2.4.2.
Effets différents de P selon l'expression de RE-RP
dans la cellule cancéreuse
P induit des réponses cellulaires variables dans les différentes lignées cellulaires de
cancer du sein, selon le statut des récepteurs hormonaux [41].
2.4.2.1.
Dans les cellules hormonodépendantes RE+ RP+
L'expression de RP y est régulée par les estrogènes.
L'effet de P est proliférant, mais la prolifération est minimale. L'importance des
réactions croisées entre RE et RP, et plus généralement l'interaction entre les
membres de la famille des récepteurs stéroïdiens, détermine la variabilité de l'action
de P sur la cellule.
2.4.2.2.
Dans les cellules RE+ RP- (absence d'expression de RP)
Les effets de P s'exercent sur la voie de signalisation membranaire, car RP peut être
régulé par les récepteurs de membrane.
L'absence d'expression de RP dans les tumeurs exprimant RE peut témoigner d'une
activation des voies de signalisation impliquant la grande famille des récepteurs de la
tyrosine kinase (500 gènes environ). Une surexpression d'IGF inhibe RP et réduit
son activité, de même qu'une surexpression de EGF/HER.
Parmi ces lignées cellulaires, les effets de P sont biphasiques avec une phase de
stimulation suivie d'une phase d'inhibition.
2.4.2.3.
Dans les cellules RE- RP- qui sont hormono-indépendantes
Parmi ces lignées cellulaires, P induit une forte inhibition de la prolifération et une
augmentation d'adhésion cellulaire.
Par cet effet antiprolifératif et antimétastatique, P possède des propriétés
anticancéreuses.
Dans ces lignées cellulaires n'exprimant pas les récepteurs, P a un effet favorable.
Toutefois, dans le cadre de la nouvelle classification génétique des cancers du sein,
les variétés triplement négatives (RE-, RP-, c-erbB2-) sont plus agressives, de plus
mauvais pronostic et ne répondent pas aux thérapeutiques habituelles.
En conclusion, l‟effet de la progestérone sur le génome du cancer du sein peut varier
considérablement en fonction des récepteurs hormonaux [41].
65
2.5.
Implication de BRCA1 dans la régulation des
hormones stéroïdes et la cancérogenèse
Très récemment, la découverte de la régulation du récepteur de la progestérone par
le gène antitumeur BRCA1, gène de susceptibilité du cancer, donne un nouvel
éclairage sur les relations hormone/récepteur, permettant de comprendre à la fois le
rôle antiprolifératif et prolifératif de la progestérone selon l'expression du gène
BRCA1.
Le gène BRCA1 régule l'expression des récepteurs RE et RP dans la cellule
épithéliale mammaire et joue un rôle dans la cancérogenèse.
2.5.1.
BRCA1 et régulation des récepteurs aux estrogènes
Rappelons que dans la cellule mammaire normale, REβ contrôle et inhibe
l'expression de REα alors que la cellule cancéreuse qui produit ses propres
récepteurs surexprime REα tandis que l'expression de REβ disparaît.
Dans les conditions normales, les estrogènes induisent la prolifération cellulaire et en
même temps stimulent l'expression de BRCA1 qui corrige les erreurs du génome
liées à la prolifération. BRCA1 bloque RE en inhibant la synthèse de l'isoforme REα
impliqué dans la prolifération épithéliale [41].
In vivo, l'expression de BRCA1 dans le tissu mammaire est augmentée durant la
puberté et la grossesse, au moment où les taux d'estrogènes sont élevés. Une des
fonctions essentielles de BRCA1 pourrait être de protéger le sein durant la puberté et
la grossesse contre l'instabilité génétique secondaire à la prolifération induite par les
estrogènes, de réparer les lésions de l'ADN et d'induire la différenciation BRCA1
bloque RE en inhibant la synthèse de l'isoforme REα impliqué dans la prolifération
épithéliale [35].
L'augmentation des estrogènes stimule donc l'expression de BRCA1.
66
2.5.2.
BRCA1
et
régulation
des
récepteurs
de
la
progestérone
En 2004, l'étude du tissu mammaire normal de femmes porteuses de mutation du
gène BRCA1 met en évidence une surexpression de RP-A associée à une perte
d'expression de RP-B, mais pas de modification dans l'expression de RE [41].
Ces modifications biologiques du récepteur chez les femmes porteuses de la
mutation constituent un facteur de risque augmenté de cancer dans ces tissus, et
confirment le fait qu'une surexpression de RP-A est présente précocement dans les
tissus prénéoplasiques et néoplasiques [41].
En 2006, les travaux de Ma sur les lignées cellulaires, précisent le rôle central de
BRCA1 dans la régulation de l'activité de P sur RP.
 BRCA1 non muté contrôle les récepteurs de la progestérone :
BRCA1 stimulé, en réprimant REα, contrôle l'expression de RP estrogénorégulé et par là même les états de prolifération physiologiques (phase lutéale
du cycle, grossesse), et le développement du processus tumoral ;
 BRCA1 muté perd le contrôle des récepteurs de la progestérone :
l'inhibition du gène BRCA1 stimule l'activité de RP dont la concentration
cellulaire augmente. P stimule la croissance tumorale en présence de RP
surexprimé. Dans le cancer du sein associé à BRCA1 muté, il n'y a plus
d'inhibition ni de contrôle de l'activité de RP.
Ces résultats suggèrent le rôle clé de RP dans la cancérogenèse médiée par BRCA1
[41].
2.5.3.
Un mécanisme impliqué
Un des mécanismes impliqués peut être la dégradation des récepteurs RP en excès.
La dégradation de RP en excès s'effectue normalement par la voie du protéasome,
mécanisme par lequel les protéines RP sont transportées et dégradées.
Le gène BRCA1 muté ne permet plus la dégradation de l'excès de RP, car la voie du
protéasome devient inefficace. En l'absence de dégradation, la concentration de RP
reste élevée et RP reste surexprimé dans la cellule mutée.
progestérone induite persiste.
67
La prolifération
En présence du gène normal, la dégradation de RP en excès s'effectue normalement
dans la voie du protéasome. L'excès des récepteurs est détruit, et P devient une
hormone antiproliférative et différenciante [41].
68
3. A PROPOS DE LA CONTRACEPTION ORALE
Nous considérerons uniquement certains aspects de la contraception orale (hors
contraception d‟urgence), en détaillant les dernières innovations.
3.1.
Les stéroïdes utilisés en contraception
3.1.1.
Les estrogènes utilisés en contraception
3.1.1.1.
L’éthinylestradiol
En France, l'éthinylestradiol (EE) était jusqu'à il y a peu, le seul estrogène utilisé en
contraception. Produit de synthèse dérivé du 17-β-estradiol, ses avantages sont une
meilleure biodisponibilité (le radical 17α ajouté à la molécule empêche sa
dégradation intestinale) et une puissance biologique près de 100 fois supérieure [41].
Mécanisme d'action
Il possède un effet antigonadotrope par rétrocontrôle négatif sur la FSH, empêchant
le recrutement folliculaire [43] et en supprimant le pic préovulatoire de LH [44].
Son intérêt en contraception tient essentiellement, comme nous le verrons au
maintien de la régulation des cycles [43].
Effets secondaires
La puissance biologique et la forte affinité de l'EE pour le foie sont responsables
d'effets secondaires métaboliques et vasculaires importants [42].
Son impact hépatique est dose-dépendant, ce qui influence directement les effets
métaboliques et vasculaires [43].
Mais il est important de souligner que l'effet hépatique de l'EE est indépendant de la
voie d'administration, orale ou parentérale, en raison d'un effet propre à la molécule
non liée au premier passage hépatique [43].
L'EE augmente la synthèse hépatique des facteurs de la coagulation, en particulier le
facteur VII (responsable d'accidents artériels), le fibrinogène, le fragment 1 et 2 de la
prothrombine. Il majore la résistance à la protéine C activée et diminue la production
des anticoagulants naturels (antithrombine III et protéine C), contribuant ainsi au
risque thrombotique artériel et veineux [43].
69
L'EE stimule également la synthèse hépatique d'angiotensinogène et possède des
effets vasodilatateurs avec augmentation de la perméabilité vasculaire [43].
Afin d'améliorer la tolérance métabolique et vasculaire de la pilule, plusieurs
stratégies ont été employées [42] :
 la diminution progressive des doses d'EE de 150 à 15 μg/jour ; cette
diminution a été permise grâce à l'usage de progestatifs de deuxième et
troisième générations plus antigonadotropes, permettant donc de maintenir
l'efficacité contraceptive ;
 la modulation du dosage de l'EE et du progestatif au cours de la plaquette,
permettant de réduire la dose cumulée d'EE et d'améliorer la tolérance
endométriale de la pilule. La tolérance clinique des pilules bi- et triphasiques
apparaît similaire à celles des pilules monophasiques hormis peut-être, une
moindre fréquence des troubles du cycle ;
 l'introduction de nouveaux progestatifs de seconde puis de troisième
génération qui sont également moins androgéniques ;
 l'introduction d'estrogènes naturels théoriquement moins délétères que l'EE.
La réduction du dosage d‟EE de 100 à 50 μg/jour dans les années 60-70 a permis
une
diminution
de
l‟incidence
des
complications
cardio-vasculaires
de
la
contraception orale, et le passage de 50 à 30-40 μg/jour d‟EE et aux progestatifs de
deuxième génération dans les années 70-80 a eu des effets similaires [42].
En revanche, les schémas multiphasiques, le dosage à 15-20 μg et les progestatifs
de troisième génération auraient une supériorité qui repose sur des arguments
uniquement théoriques [42].
La tolérance clinique des pilules bi- et triphasiques apparaît équivalente à celles des
pilules monophasiques, en dehors d‟une moindre fréquence des troubles du cycle.
La
démonstration
épidémiologique
d‟une
réduction
de
la
fréquence
des
complications avec les pilules les plus récentes est rendue presque impossible par la
rareté des complications de la contraception orale [42].
70
Plusieurs études, comportant cependant des biais, ont rapporté une majoration du
risque thrombo-embolique veineux avec les pilules de troisième génération par
rapport à celles de deuxième génération [42].
Au total, bien que les doses d'EE aient nettement diminué, le risque vasculaire, effet
secondaire majeur, persiste.
3.1.1.2.
Les estrogènes naturels
Le valérate d'estradiol, est le premier estrogène naturel à être utilisé depuis peu en
contraception en France.
C'est un ester du 17ß-estradiol humain naturel (1 mg de valérate d'estradiol
correspond à 0,76 mg de 17ß-estradiol). Cet estrogène diffère des estrogènes que
sont l'éthinylestradiol ou sa prodrogue, le mestranol, par l'absence d'un groupement
éthinyl en position 17 alpha [45].
Théoriquement, son usage devrait permettre d'améliorer la tolérance métabolique et
vasculaire des estrogènes de synthèse [46].
3.1.2.
Progestatifs utilisés en contraception
3.1.2.1.
Mécanismes d'action
Les progestatifs entraînent un effet contraceptif à différents niveaux (local et/ou
central), variables d‟une molécule à l‟autre [47] :
 un épaississement de la glaire cervicale : sa structure moléculaire s'altère, sa
viscosité et sa cellularité augmentent, empêchant ainsi le passage des
spermatozoïdes (réduction de leur pénétration et de leur mobilité);
 un effet antiprolifératif sur l'endomètre (action antinidatoire) :
o au niveau histologique (atrophie endométriale, diminution du nombre
et du diamètre des glandes),
o au niveau vasculaire (réduction de la vascularisation et augmentation
des microvaisseaux anormaux) ;
en présence d‟un système intra-utérin (SIU) progestatif, ces modifications
endométriales sont plus marquées, touchent toute la hauteur de l‟endomètre
avec de surcroît une augmentation des cellules inflammatoires au sein du
stroma ;
71
 une réduction de la motilité tubaire et de l'action ciliaire ;
 un blocage du pic pré-ovulatoire de l‟hormone lutéinique (LH) pour certaines
molécules et un effet antigonadotrope plus ou moins profond pour les
macroprogestatifs, un microprogestatif et l‟implant ;
- pour les macroprogestatifs, en plus du rétrocontrôle négatif sur la GnRH, un
blocage pituitaire semble être associé, à condition que la fenêtre d‟arrêt ne
dépasse pas 7 jours ;
- pour les microprogestatifs, le blocage de l‟ovulation semble assuré à plus de
95 % avec 75μg de lévonorgestrel alors qu‟il est inconstant avec les autres
microprogestatifs ; c‟est pourquoi avec ces microprogestatifs non antiovulatoires, la tolérance à l‟oubli n‟est que de 3 heures, alors qu‟elle est de
12h pour le désogestrel [47].
3.1.2.2.
Les molécules utilisées en contraception
Les progestatifs entrant dans la composition des contraceptifs estroprogestatifs et
progestatifs seuls correspondent tous à des molécules de synthèse ayant une
activité antigonadotrope très supérieure à celle de la progestérone naturelle. Leurs
différences concernent leur comportement vis-à-vis du récepteur des androgènes
[42].
On peut les classer en 3 groupes.
1er groupe : les dérivés de la nortestostérone
Ce sont les 19-norstéroïdes qui sont au nombre de 9. Ils se comportent comme des
androgènes faibles dotés d‟une activité androgénique qui participe aux effets
secondaires de la contraception.
Ils comprennent plusieurs générations :
 première
génération
comprenant
les
plus
anciens
(noréthistérone,
lynestrénol), qui ne sont plus utilisés ;
 deuxième génération (norgestrel et lévonorgestrel) et troisième génération
(désogestrel, étonogestrel, norgestimate et norelgestromine) : ils ont moins
d'effets androgéniques (en raison d'une faible affinité pour les récepteurs
androgéniques), ce qui limite leurs effets secondaires métaboliques ;en
revanche, ils ont un plus grand pouvoir antigonadotrope (grâce à une forte
72
affinité pour les récepteurs à la progestérone), ce qui a permis de réduire
encore le dosage d'EE sans perte d'efficacité contraceptive.
On retrouve les 19 norstéroïdes dans différentes spécialités selon la voie
d‟administration.
 Par voie orale, dans les pilules estroprogestatives, ils sont associés
à l‟EE, pour les progestatifs de deuxième et troisième générations.
 Par voie orale, dans les pilules microprogestatives, ils sont utilisés seuls, à
faibles doses et en continu (lévonorgestrel pour Microval®, désogestrel pour
Cérazette®).
 Par voie orale, ils sont utilisés seuls et à forte dose pour les dérivés de
première génération constituant les macroprogestatifs androgéniques : ce sont
les seuls macroprogestatifs ayant l'AMM en contraception, mais ils ne doivent
pas être utilisés en raison de leurs effets métaboliques délétères (PrimolutNor® et Orgamétril®).
 Par voie intra-utérine, le lévonorgestrel, progestatif de deuxième génération,
est utilisé seul dans le SIU Mirena® .
 Par voie transdermique, la norelgestromine,
progestatif de troisième
génération, est associée à l‟EE dans le patch Evra®.
 Par voie vaginale, l‟étonogestrel, progestatif de troisième génération est
associé à l‟EE dans l‟anneau vaginal Nuvaring®.
 Par voie sous-cutanée, à nouveau l‟étonogestrel est utilisé seul dans l‟implant
sous-cutané Implanon®.
2e groupe : dérivés de la progestérone
Ils comprennent les molécules suivantes :

Les dérivés prégnanes issus de la 17-hydroxyprogestérone représentés par
l'acétate de chlormadinone, l'acétate de cyprotérone, la médrogestérone et
73
l'acétate de médroxyprogestérone ; l‟acétate de chlormadinone possède des
propriétés anti-androgéniques ainsi que l'acétate de cyprotérone (Androcur®)
qui est le seul anti-androgène périphérique vrai puisqu‟il agit par
antagonisme compétitif au niveau des récepteurs aux androgènes, mais
aussi par inhibition de la 5α réductase et par un effet antigonadotrope [43].

Les dérivés norprégnanes issus de la 19-norprogestérone composés de la
promégestone, de l'acétate de nomégestrol et de la trimégestone. La
trimégestone est un nouveau progestatif norprégnane ayant une forte affinité
de liaison pour les récepteurs de la progestérone, une très faible affinité pour
les récepteurs des androgènes et une affinité non détectable pour les
récepteurs des estrogènes.
Les dérivés de la 19-norprogestérone et certains dérivés de la 17-OH progestérone
sont dénués d‟inconvénients métaboliques. Ces molécules sont utilisées pour leur
pouvoir antigonadotrope.
Ces progestatifs sont utilisés seuls ou en association à l‟EE, dans les spécialités
suivantes :
 par voie orale, dans une pilule estroprogestative associant l‟EE à
o un dérivé prégnane : c'est le cas pour l'acétate de chlormadinone
(Belara®) et pour l'acétate de cyprotérone (Diane 35® qui n'a pas
l'AMM en contraception) qui ont une activité anti-androgénique ;
o un dérivé norprégnane : la trimégestone ; une nouvelle pilule EP
composée de trimégestone et d‟EE était en cours d‟études de phase
II en 2001 [45] ;
 par voie orale, seuls et à forte dose, en administration discontinue, constituant
les macroprogestatifs non androgéniques, qui sont antigonadotropes à
condition d'être utilisés au moins 20 jours par mois (et peuvent être associés à
un estrogène, de préférence naturel, pour pallier les effets délétères en
particulier osseux de la carence estrogénique). Ils n'ont cependant pas l'AMM
en contraception ;
74
il s'agit pour les dérivés prégnanes de l'acétate de chlormadinone (Lutéran®),
de l'acétate de cyprotérone (Androcur®), et de la médrogestérone
(Colprone®) ;
les dérivés norpréganes sont la promégestone (Surgestone®) et l'acétate de
nomégestrol (Lutenyl®) ;
 par voie injectable intramusculaire trimestrielle, utilisés seuls : c‟est le cas de
l‟acétate de médroxyprogestérone, dérivé prégnane, constituant de DepoProvéra®.
3e groupe : dérivé de la spironolactone (progestatif non stéroïdien)
La drospirénone a été introduite sur le marché en 2002.
C‟est un progestatif dérivé de la spironolactone, ayant un profil pharmacologique
particulier, similaire à celui de la progestérone naturelle, lui conférant différentes
propriétés [48] :

effet progestatif puissant avec inhibition de l'ovulation ; à la dose de 3 mg, la
drospirénone inhibe efficacement l'ovulation et de façon constante ;

activité anti-minéralocorticoïde ; la drospirénone s'oppose à l‟activité
minéralocorticoïde induite par les estrogènes qui favorisent la synthèse
hépatique d'angiotensinogène ; elle bloque l'action de l'aldostérone par
inhibition compétitive au niveau de ses récepteurs rénaux ; ceci se traduit par
une augmentation modérée de l'excrétion hydrosodée ; la dose de 3 mg de
drospirénone (correspondant à la marge de sécurité contraceptive) est
équivalente à 25 mg de spironolactone ;

activités anti-androgéniques, similaires à celles de la progestérone naturelle ;
l‟affinité de la drospirénone pour les récepteurs aux androgènes est très
faible ; en revanche, la drospirénone, comme la progestérone, a un effet antiandrogénique très marqué ; cela souligne l‟intérêt de cette molécule chez les
femmes ayant de l‟acné ou de la séborrhée ; aucune activité estrogénique ou
glucocorticoïde n'est retrouvée avec la drospirénone.
75
Un contraceptif oral contenant de la drospirénone devrait donc en théorie s‟opposer
à la rétention des fluides et, en conséquence, éviter ou réduire les problèmes
associés à cette rétention liquidienne pouvant entraîner une prise de poids.
La drospirénone est associée à l'EE dans les pilules Jasmine® (30μg d'EE),
Jasminelle® (20μg d'EE), Jasminelle continu® et Yaz®.
4e groupe : un progestatif hybride : le dienogest
C‟est un dérivé de la 19 nortestostérone mais sa structure chimique est très originale
en raison de la substitution d'un groupement cyanométhyl en C17 au groupement
éthinyl. Cette particularité structurelle lui confère des spécificités des dérivés de la 19
nortestostérone et aussi des dérivés de la 19 norprogestérone. Le diénogest peut
ainsi être qualifié de progestatif hybride [45].
Malgré sa faible affinité pour les récepteurs de la progestérone, l‟ovulation est
inhibée de façon sûre, le pic de LH est supprimé et les taux de FSH sont diminués.
La dose de diénogest qui inhibe l‟ovulation est de 1 mg/jour, c‟est-à-dire qu‟elle est
du même ordre que celle des dérivés progestatifs comme la cyprotérone ou la
chlormadinone.
Dans
le
cas
du
diénogest,
l‟inhibition
de
l‟ovulation
est
essentiellement en rapport avec ses effets périphériques particulièrement puissants.
Le dienogest exerce un effet progestatif puissant sur l‟endomètre.
Le dienogest n'a aucune activité androgénique, estrogénique, minéralocorticoïde ou
glucocorticoïde (son affinité est à peu près nulle pour ces récepteurs) [45].
Il n‟a pas d‟affinité pour la SHBG (Sexe Hormone Binding Globulin). En
conséquence, il ne déplace pas la testostérone liée à cette protéine et n‟exerce pas,
contrairement aux progestatifs de troisième génération, d‟effet androgénisant.
En revanche, il exerce une activité anti-androgénique qui est de l‟ordre de 40 % de
celle de l'acétate de cyprotérone [44].
Enfin, il respecte parfaitement le métabolisme lipidique.
On retrouve le dienogest associé au valérate d‟estradiol dans une formulation
quadriphasique récemment mise sur le marché, Qlaira ®.
76
Il est également présent à la dose de 2 mg, associé à 30 μg d‟EE, dans la pilule
Valette (qui n‟est pas encore commercialisée en France).
77
78
3.2.
Contraception estroprogestative orale
L'efficacité contraceptive des associations estroprogestatives est principalement
fondée sur l‟action du progestatif alors que l‟estrogène permet le maintien de la
régulation des cycles.
Les pilules estroprogestatives, figurant dans le Vidal 2009 sont au nombre de 44.
On les retrouve dans le tableau I présentant une vue d‟ensemble des produits
utilisables en contraception hormonale.
3.2.1.
Risques liés à la contraception estroprogestative
3.2.1.1.
Effets métaboliques
Sur le plan lipidique, l'EE augmente les triglycérides et le cholestérol HDL.
L'impact des progestatifs sur les lipides s'oppose point par point aux estrogènes :
diminution des triglycérides et du cholestérol HDL et augmentation du cholestérol
LDL.
L'impact lipidique est donc relativement neutre en ce qui concerne les
estroprogestatifs [43].
3.2.1.2.
Risque veineux
Le risque de thrombose veineuse est lié en partie à certaines modifications des
paramètres de l'hémostase. La contraception estroprogestative modifie donc
l‟équilibre de l‟hémostase dans le sens d‟une hypercoagubilité [49].
Ce risque est plus important la première année d'utilisation de la COC puis il décroît
les années suivantes bien que restant significatif par rapport aux femmes non
utilisatrices. Les femmes ayant arrêté leur COC depuis plus de 3 mois sont à risque
identique à celui de femmes non utilisatrices [49].
Il est admis que le risque thrombotique veineux augmente avec la dose d'EE [43].
Ce risque thromboembolique veineux semble plus important avec les progestatifs de
troisième génération en association à l'EE qu‟avec les progestatifs de deuxième
génération [49], non par un effet qui leur serait propre ni en raison de leur action
79
réputée moins androgénique que les progestatifs de seconde génération, mais parce
qu'ils potentialiseraient l'effet de l'EE [43].
Par analogie, les dérivés prégnanes pourraient également être responsables d'une
augmentation de l'incidence des thromboses veineuses en s'opposant moins aux
effets de l'EE que les molécules plus androgéniques [43]. L'acétate de cyprotérone
en association avec l'EE serait plus thrombogène que le lévonorgestrel [50].
Les progestatifs que l'on pourrait qualifier de quatrième génération (drospirénone,
acétate de chlormadinone) semblent également associés à un risque de thrombose
veineuse, en fait lié à l'EE [51].
En ce qui concerne les nouvelles voies d'administration, le risque de thrombose
veineuse est au moins équivalent en cas d‟utilisation d‟un patch estroprogestatif et
l'activation de la coagulation est de même ampleur en cas d'utilisation de l'anneau
vaginal.
Les mêmes contre-indications vasculaires que la voie orale doivent donc s'appliquer
à l'anneau vaginal et au patch [49].
3.2.1.3.
Risque artériel (AVC ischémique, IDM)
Les femmes en cours d'utilisation d'une COC ont un risque augmenté d'accident
coronarien ou d'accident vasculaire cérébral ischémique [49].
Cependant, cette augmentation dépend surtout, en ce qui concerne les
estroprogestatifs utilisés en France, des facteurs de risque cardio-vasculaires
associés (tabac, dyslipidémie, HTA, migraine) [43].
En réalité, le mécanisme thrombotique relèverait plus d'un phénomène inflammatoire
que d'un processus athéromateux, comme en témoignent les autopsies de femmes
ayant présenté un AVC, qui révèlent une prolifération endothéliale ubiquitaire,
artérielle et veineuse, touchant les petits et les gros vaisseaux sans athérome majeur
[43].
Les risques semblent identiques quelque soit le type de progestatif combiné à l'EE.
Mais il existe encore peu d'études analysant les CO de troisième génération. Cette
augmentation de risque diminue rapidement après l'arrêt de la CO [49].
80
3.2.1.4.
Risque cellulaire
Il est maintenant bien établi que la COC diminue le risque de cancer de l‟ovaire et de
l‟endomètre de façon durée-dépendante. L‟utilisation de pilules plus récentes, plus
faiblement dosées, semble conférer une protection identique. Il existe une très
discrète augmentation du risque de cancer du col (épithélial et adénocarcinome), les
principaux facteurs de risque étant la présence d‟une infection à papillomavirus, le
nombre de partenaires et l‟âge précoce des premiers rapports [49].
Le risque de cancer du sein sera bien sûr analysé dans les parties suivant cet
exposé.
3.2.2.
Contre-indications
Elles sont identiques quelle que soit la voie d'administration (orale, transdermique, ou
vaginale), la dose d'EE et la présence de valérate d'estradiol.
Elles
sont
présentées
dans
le
81
tableau
II
[43,
44,
52]
Tableau II : Contre-indications de la contraception estroprogestative
Contre-indications absolues
Contre-indications relatives
- T abac si • 15 cigarettes par jour et âge • 35 ans
- T A • 140/90 mm Hg
- Diabète com pliqué de micro- et/ou m acro-angiopathie
- Dyslipidém ie sévère : T G > 4 g/L, LDL-cho> 2,2 g/L
-Fum euses de plus de 35 ans (< 15 cigarettes par jour)
- HT A maitrisée
- Dyslipidém ie ( une forte élévation de T G sous CO doit faire interomptre cette contraception car elle
tém oigne d'une perturbation m étabolique hépatique pouvant im pliquer l'hém ostase)
- Obésité (indice de m asse coporelle > 30 kg/m 2)
- Affections cardiovasculaires : coronaropathies, valvulopathies, troubles du rythme thrombogènes
- Antécédents personnels d'accidents throm bo-em boliques artériels
- Antécédents personnels de tachycardie ventriculaire superficielle
- Antécédents personnels d'accidents throm bo-em boliques veineux profond
- Chirurgie majeure avec imm obilisation prolongée
- Antécédents familiaux de throm bose veineuse profonde
- T hrombophilie constitutionelle ou acquise (m utation gène prothrombine (facteur II), mutation du
facteur V Leyden) entrainant une résistance à la protéine C activée, déficit congénital en protéine
-Cholestase
C et récurrente ou prurit gravidique lors d'une grossesse antérieure
S, déficit en antithrom bine III, hyperhom ocystéinémie, présence d'anticorps anti-phospholides SAPL
ou anom alie de la fibrinolyse).
- Insuffisance rénale
- Lupus érythémateux dissém iné ( risque throm bo-em bolique et également estrogénodépendant)
- Connectivites
- Hyperprolactinémie
- Porphyries
- Herpès gestationis
- Pathologies oculaires d'origine vasculaire
- Associations déconseillées : anti-convulsivants, inducteurs enzyam tiques
- Affections hépatiques sévères ou récentes
- Associations à prendre en compte : ciclosporine
-Grossesse ou allaitement
- 5 à 6 sem aines à la suite d'un accouchement en l'absence d'allaitem ent
- Cancer du sein ou de l'utérus
- Hém orragies génitales non diagnostiquées
- T um eurs hypophysaires
- Migraine avec aura avant traitem ent ou sous traitement
- Otosclérose
82
3.2.3.
Inconvénients mineurs, tolérance
Les plus fréquemment rapportés par les patientes sont les suivants :
 métrorragies : de faible abondance (spotting) elles sont banales pendant les
premiers cycles surtout avec les pilules très faiblement dosées. Dans tous les
autres cas, elles imposent la recherche d'une infection génitale ou d'une
pathologie organique avant de penser à une atrophie de l'endomètre ;
 aménorrhées sous pilule : elles sont exceptionnelles avec les EP normodosés.
Il faut d'abord éliminer une grossesse accidentelle avant de penser à une
atrophie importante de l'endomètre ;
 prise de poids : elle est due à l'estrogène (rétention hydrosodée) et au
progestatif (effet anabolisant) ; elle semble moins fréquente avec les pilules
minidosées et avec les pilules contenant les nouveaux progestatifs à faible
activité androgénique ou anti-androgénique ou anti-minéralocorticoïde ;
 douleurs pelviennes : rares elles font d'abord rechercher une pathologie
intercurrente notamment infectieuse. Elles peuvent être dues à une dystrophie
ovarienne en rapport avec un effet antigonadotrope insuffisant possible avec
les EP minidosés ;
 mastodynies : en l'absence de mastopathie sous-jacente, elles peuvent être le
témoin d'un état d'hyperestrogénie relative ;
 céphalées ;
 troubles veineux, jambes lourdes ;
 modifications psychologiques : variations de l'humeur, altération de la libido.
3.2.4.
Les pilules estroprogestatives
Les différentes pilules estroprogestatives disponibles en France, ou en passe de le
devenir, sont répertoriées dans le tableau I.
On peut en distinguer différentes catégories [42] :
83
3.2.4.1.
Les pilules contenant un estrogène de synthèse : l'EE
Les pilules EP à 50 μg d'EE, dites normodosées
C‟est le standard des années 70.
Le progestatif est norstéroïdien de seconde génération.
Il n'existe plus qu'une seule de ces pilules en France (Stédiril®).
Les pilules EP à 30 ou 40 μg d'EE, dites minidosées
Ces pilules représentent le standard des années 80.
Le progestatif est norstéroïdien de seconde ou troisième génération.
On en distingue 3 types selon le dosage en stéroïdes au cours de la plaquette : les
EP monophasiques (dosage constant), biphasiques (dosage variant en 2 paliers de
dosage), triphasiques (3 paliers de dosage) ; elles s'administrent 21j sur 28j et la
tolérance à l'oubli est de 12 h.
Les pilules EP à 15 ou 20 μg d'EE
Ces pilules sont prescrites depuis les années 90.
Le progestatif est de troisième génération. Elles sont toutes monophasiques.
Il s'agit de Mélodia® et Minesse®.
L'effet contraceptif est assuré par le progestatif puissant (le gestodène) et son effet
antigonadotrope. Cependant, il est faiblement dosé (60 μg de gestodène) et le
freinage limite de l'ovaire est compensé en augmentant le nombre de pilules actives
par cycle thérapeutique (24 comprimés actifs sur 28 au lieu de 21 sur 28).
L'administration est continue (24 comprimés actifs et 4 placebos) permettant ainsi
d‟améliorer l'observance. Il y a 12 heures de sécurité en cas d'oubli.
Le raccourcissement de l'intervalle libre à 4 jours limite les effets secondaires. On
observe moins de mastodynies et de nausées qu'avec les pilules à 20 μg d'EE. Le
taux d'aménorrhée n'est pas négligeable et les règles significativement plus courtes,
l'EE permettant d'éviter les métrorragies [44].
Les pilules EP minidosées en EE comportant un progestatif récent
Ces progestatifs sont dotés d‟actions spécifiques.
 Progestatif norstéroïdien : le Diénogest.
Il possède une action anti-androgénique. A la dose de 2 mg, il est associé à
30 μg d'EE dans la pilule Valette® en attente de commercialisation en France.
84
Valette a une bonne tolérance globale et peut avoir un intérêt dans l'acné, la
séborrhée et l'hirsutisme. Son indice de Pearl est de 0,14 [44].
 Progestatif dérivé de la spironolactone : la drospirénone.
Elle
présente
une
action
anti-minéralocorticoïde
modérée
et
anti-
androgénique.
Quatre formulations sont disponibles : Jasmine® (30 μg d'EE + 3 mg de
drospirénone), Jasminelle® (20μg d'EE + 3 mg de drospirénone) Jasminelle
continu® et Yaz® (20 μg d'EE + 3 mg de drospirénone) commercialisée en
janvier 2009. Elles diffèrent par leur dose en EE et leurs schémas
d'administration.
Les pilules Jasmine et Jasminelle doivent être prises 21j/28j.
Jasmine exerce un bon contrôle du cycle avec une faible fréquence des
spottings et des métrorragies après le premier cycle de traitement. La
fréquence de l'aménorrhée est faible. Son effet favorable sur la variation
pondérale s'estompe au-delà du 12e cycle d'utilisation.
Pour Jasminelle continu® chaque plaquette contient 28 comprimés : 21
comprimés actifs et 7 comprimés placébo. Cette présentation permet de
conserver l‟habitude quotidienne de la prise d‟un comprimé.
Pour Yaz® la prise est continue sur 28 jours avec 24 comprimés actifs et 4
placebos. La prise continue favorise l'observance (moins de risque d'oubli),
permet de réduire les fluctuations hormonales au cours du cycle de traitement,
d'éviter la reprise de l'activité ovarienne (meilleure inhibition de l'axe
gonadotrope), de prolonger les effets de la drospirénone, de minorer les effets
secondaires observés dans l'intervalle libre sans hormone.
Le risque d'hyperkaliémie lié à la drospirénone, en particulier en cas
d'insuffisance rénale ou hépatique légère à modérée, d'association avec des
médicaments hyperkaliémiants ne doit pas être négligé : il est fortement
conseillé de doser la kaliémie pendant le premier cycle de traitement chez ces
patients. La pilule contenant de la drospirénone ne doit pas être utilisée en cas
d'insuffisance rénale sévère, de dysfonction hépatique sévère, d'insuffisance
surrénalienne.
Aux Etats-Unis, Yaz a en plus de l'indication contraceptive celle de traitement
du syndrome menstruel et prémenstruel sévère et de l'acné modérée [48].
85
Cette pilule a donc un intérêt chez la jeune fille acnéique qui ne veut pas
prendre de poids.
 Progestatifs du groupe prégnane :
o l'acétate
de
chlormadinone :
Il
possède
une
action
anti-
androgénique. Il est associé à 30μg d'EE dans la pilule Belara® ;
o l'acétate de cyprotérone : Il présente également une action antiandrogénique. Il est associé à 35 μg d'EE dans Diane 35® qui n'a
pas d'AMM en contraception et est utilisée dans le traitement de
l‟acné.
 Progestatifs du groupe norprégnane : la trimégestone :
une nouvelle pilule EP composée de trimégestone et d‟EE était en cours
d‟études de phase II en 2001 (pilule à l'étude) [46].
3.2.4.2.
La pilule contenant un estrogène naturel : le Valérate
d'estradiol
La seule actuellement commercialisée en France est Qlaira® qui a reçu l‟AMM en
décembre 2008. Elle contient un progestatif le diénogest (dérivé norstéroïdien)
associé au valérate d'estradiol selon une formulation séquentielle et quadriphasique.
Chaque plaquette (de 28 comprimés pelliculés) contient, dans l‟ordre suivant [45] :
 2 comprimés contenant chacun 3 mg de valérate d‟estradiol ;
 5 comprimés contenant chacun 2 mg de valérate d‟estradiol et 2 mg de
diénogest ;
 17 comprimés contenant chacun 2 mg de valérate d‟estradiol et 3 mg de
diénogest ;
 2 comprimés contenant chacun 1 mg de valérate d‟estradiol ;
 2 comprimés placebo.
Cette pilule serait particulièrement indiquée chez les femmes de 35 à 50 ans, leur
assurant contraception et traitement de la préménopause [46].
86
3.3.
Contraception progestative orale
3.3.1.
Risques liés à la contraception progestative
Les progestatifs les plus couramment utilisés en contraception sont donc les dérivés
norstéroïdiens qui ont une action androgénique partielle et qui sont donc
potentiellement délétères sur le plan vasculaire et métabolique [43].
3.3.1.1.
Effets métaboliques
Les effets des progestatifs sur le profil lipidique dépendent de leur action
androgénique [47].
Les dérivés norprégnanes n'ont pas d'action androgénique et n'entraînent pas
d'altération du bilan lipidique [44].
L'utilisation de DMPA ne s'accompagne pas de modification du cholestérol total ni
des triglycérides, mais il a été observé une diminution du cholestérol HDL, qui
cependant reste dans les zones normales et est sans conséquence clinique [47].
Les 19 norstéroïdes ont une action androgénique partielle qui explique certains effets
défavorables sur les facteurs de risque cardiovasculaires et/ou leurs marqueurs
biologiques : inversion partielle de l'effet sur le cholestérol HDL estrogéno-induit,
hyperinsulinisme, effet tensionnel dose dépendant des dérivés de la nortestostérone,
action procoagulante du gestodène [44].
La contraception microprogestative qui utilise les norstéroïdes à faibles doses ne
s'accompagne pas d'effet métabolique significatif [47].
De même, l'implant à l'étonogestrel ne modifie pas le rapport cholestérol total sur
cholestérol HDL [47].
Ainsi, les dyslipidémies ne semblent pas constituer une contre-indication aux
contraceptions micro- et macroprogestatives prégnanes et norprégnanes bien que
ces dernières n'aient pas été évaluées directement dans ce domaine [47].
3.3.1.2.
Risque veineux
87
Les contraceptions progestatives seules, microprogestatives ou plus fortement
dosées (acétate de chlormadinone), ne modifient pas les paramètres de la
coagulation [49].
Les progestatifs seuls ne sont pas considérés comme facteur de risque de
thrombose veineuse [47].
Le SIU au LNG et l'implant à l'étonogestrel ne sont pas considérés comme pouvant
augmenter le risque de thrombose veineuse [49].
3.3.1.3.
Risque artériel
L'impact artériel des progestatifs est difficile à évaluer dans la contraception
estroprogestative puisque les pilules contenant un progestatif de troisième
génération, réputées moins androgéniques, contiennent également moins d'EE, ce
qui constitue un biais dans l'interprétation des études.
En ce qui concerne les progestatifs seuls, les quelques études disponibles ne
semblent
pas
retrouver
de
rôle
délétère
des
microprogestatifs,
ni
des
macroprogestatifs (dérivés prégnanes et norprégnanes) sur le risque artériel [43].
3.3.2.
Indications de la contraception progestative
La contraception progestative est recommandée [47] :
- lors d‟une mauvaise tolérance aux estrogènes exogènes ;
- pour contrebalancer une hyperestrogénie endogène (absolue ou relative, en
particulier au moment de la ménopause) et les symptômes qui lui sont associés ; on
recherche ici l‟effet antigonadotrope des progestatifs ; c‟est le cas des mastodynies
spontanées, de l‟hyperplasie simple de l‟endomètre par exemple ;
Insuffisances lutéales particulièrement en préménopause :
o syndrome prémenstruel
o mastodynies
o irrégularités menstruelles
o dysménorrhées
- en cas de contre-indication métabolique ou cardiovasculaire aux estroprogestatifs ;
on évite ainsi l‟effet du passage hépatique de l‟EE ; c‟est le cas du risque de
thrombose veineuse (antécédents personnels ou facteurs de risque personnels, en
postchirurgical gynécologique après une chirurgie pour endométriose), de la femme
88
tabagique après 35 ans (à condition que le progestatif soit non androgénique et sans
effet glucocorticoïde) ;
- en cas de fluctuation hormonale à l‟origine de dysphories prémenstruelles ou de
migraines cataméniales ; cependant en cas de migraine avec aura la prescription
d‟une contraception progestative doit rester prudente.
Elle constitue une contraception de choix dans certaines situations particulières :
-
allaitement (sauf les macroprogestatifs qui sont contre-indiqués) ;
-
période préménopausique (hyperestrogénie relative) ;
-
adénomyose : le bénéfice du SIU au LNG dans cette indication est le plus
étudié des contraceptifs progestatifs. Il permettrait une diminution des
dysménorrhées et métrorragies ;
-
endométriose : la contraception par SIU au LNG est dans ce cas bénéfique
probablement en raison de l‟aménorrhée induite, mais aucune étude ne
permet à ce jour de l‟affirmer. En revanche, l‟utilisation de pilules
microprogestatives ne paraît pas indiquée en raison d‟une sécrétion
d‟estrogènes résiduels liée à un blocage gonadotrope incomplet [47] ;
-
mastopathies bénignes.
En ce qui concerne les fibromes, le bénéfice des progestatifs contraceptifs n‟est pas
clairement établi. Leur indication dans ce cas n‟est justifiée que s‟il existe des
symptômes comme des ménorragies invalidantes.
L‟efficacité des progestatifs est alors liée à leur action sur l‟endomètre ou sur
l‟adénomyose associée dans plus de 60 % des cas.
En revanche, en cas de découverte fortuite d‟un fibrome asymptomatique chez une
femme sous estroprogestatifs, il n‟y a pas d‟argument dans la littérature pour
remplacer sa contraception par une contraception progestative [47].
Enfin, la contraception macroprogestative ne devrait pas être prescrite dans les cas
suivants : absence de contre-indication ou d‟intolérance à la contraception EP, refus
de la contraception EP ou encore absence d‟indications spécifiques [47].
3.3.3.
Contre-indications
Elles sont identiques quelle que soit la voie d"administration (orale, sous-cutanée,
intra-utérine, intraveineuse) sauf précision autre.
3.3.3.1.
Contre-indications absolues
89
Les contre-indications absolues sont les suivantes :
 accidents thrombo-emboliques veineux évolutifs
 antécédents
d‟accidents
thrombo-emboliques
veineux :
sauf
pour
les
micropogestatifs, l‟implant à l‟étonogestrel et le SIU au LNG ; un délai
minimum de 3 mois par rapport à l‟épisode de thrombose veineuse doit être
respecté avant de débuter ce type de contraception ;
 antécédents d‟accidents
thrombo-emboliques artériels :
sauf
pour les
micropogestatifs, l‟implant à l‟étonogestrel et le SIU au LNG ;
 post-partum avec allaitement de moins de 6 semaines ;
 pathologie hépatique sévère ou passée jusqu'à normalisation du bilan
hépatique ;
 tumeurs sensibles à la progestérone (cancer du sein, cancer de l'endomètre),
 Le méningiome : il existe un doute sur leur hormonodépendance ; 70 % de
ces tumeurs expriment à leur surface des RP [47] ;
 hémorragies génitales non expliquées ;
 grossesse connue ou suspectée ;
 galactosémie congénitale, syndrome de malabsorption du glucose, du
galactose ou déficit en lactase ?
3.3.3.2.
Contre-indications relatives
Les contre-indications relatives sont les suivantes :
 la dystrophie ovarienne est une contre-indication pour les microprogestatifs, le
SIU au LNG et l‟implant sous-cutané ; c‟est l‟utilisation des macroprogestatifs,
plus fortement antigonadotropes, qui paraît la plus appropriée [47].
 antécédent de grossesse extra-utérine : il faut éviter les microprogestatifs non
anti-ovulatoires qui sont connus pour augmenter le risque de GEU et aussi
pour en majorer le risque de récidive. Le SIU au LNG n‟est pas contre-indiqué
en cas d‟antécédent de GEU. Il apporterait une diminution par 10 du risque de
GEU par rapport au stérilet au cuivre [47].
3.3.4.
Les interactions médicamenteuses
Les progestatifs seuls n‟inhibent pas le cytochrome P450.
Certains
médicaments
créent
une
induction
enzymatique
qui
biodisponibilité du progestatif contenu dans les contraceptifs oraux [47].
90
diminue
la
Les taux sériques de progestatifs libres seraient diminués de façon importante en
raison d‟une augmentation du taux de la sex hormone-binding globulin (protéine
porteuse des stéroïdes sexuels), et de l‟accélération du métabolisme du progestatif
contenu dans les contraceptifs, diminuant ainsi leur efficacité.
Les médicaments concernés par cette interaction sont [47] :
-
les anticonvulsivants,
-
la rifampicine,
-
les antifongiques : griséofulvine,
-
les antibiotiques,
-
les antirétroviraux,
-
le millleperthuis.
3.3.5.
Les microprogestatifs
Les progestatifs seuls, microdosés, administrés en continu per os, ayant
actuellement une AMM en contraception en France et figurant dans le dictionnaire
Vidal 2009 sont au nombre de 2 : le lévonorgestrel (LNG) avec seulement 30μg par
jour (Microval®) et le désogestrel à la dose de 75μg/j (Cérazette). Seule Microval est
remboursée par la sécurité sociale [53].
En utilisation optimale, la micropilule doit être prise de façon continue 28 j/28 j en une
prise quotidienne, à la même heure, y compris pendant les règles.
La tolérance à l'oubli est de 3 h, sauf pour le DSG à 75ug/j qui tolère un oubli de 12 h
en raison de son mécanisme d'action anti-ovulatoire.
Les microprogestatifs (MP) agissent essentiellement par leurs effets périphériques :
modification de la glaire cervicale et de l'endomètre (variable selon le MP).
L'inhibition de l'ovulation est très inconstante pour le LNG (50 % d'anovulation à 12
mois pour 30ug/j) contrairement au DSG (97 % d'anovulation à 12 mois). Cérazette
peut donc être considérée comme anti-ovulatoire [53].
L'inhibition gonadotrope est partielle dans certains cas : le pic ovulatoire est
supprimé, mais les sécrétions basales des gonadotrophines LH et FSH persistent,
permettant une maturation folliculaire partielle. En raison de ces modifications
hormonales, on observe fréquemment des irrégularités menstruelles [53].
En cas d'inhibition gonadotrope plus complète une atrophie endométriale survient et
se manifeste par une aménorrhée totale ou parfois des spottings.
91
Leur principal inconvénient réside dans les troubles du cycle présents chez 40 % des
femmes (aménorrhée, spotting) [52].
Certaines patientes sous micropilules présentent des mastodynies.
3.3.6.
La contraception macroprogestative
Elle consiste en l‟administration discontinue de progestatifs à fortes doses.
Cette contraception est largement utilisée en Europe, chez les femmes qui ont des
facteurs de risque, hors AMM pour la plupart des produits si la seule indication est la
contraception, car il n‟existe pas d‟étude clinique à grande échelle permettant
d‟établir un indice de Pearl de cette méthode.
Les macroprogestatifs permettent une contraception efficace en raison d‟un effet
antigonadotrope complet.
3.3.6.1.
Les dérivés de la 19-nortestostérone
Ces progestatifs sont les seuls à avoir une AMM en contraception.
Les produits sont : Orgamétril® (lynestérol) et Primolut-Nor® (noréthistérone).
Pour obtenir un effet contraceptif, ils doivent être pris pendant au moins 20 jours, du
5e au 25e jour du cycle.
Ils ont un effet estrogénique propre et entraînent donc des pseudohémorragies de
privation.
Ils induisent des signes de virilisation clinique et biologique et ont des effets
métaboliques délétères qui ont aujourd'hui entraîné leur quasi-abandon.
La seule indication qui pourrait persister est l'existence de mastopathies rebelles.
Leur activité androgénique partielle responsable d‟une baisse du cholestérol HDL fait
que ces molécules sont réservées aux femmes sans facteur de risque
cardiovasculaire [53].
3.3.6.2.
Les dérivés de la progestérone (prégnanes et norprégnanes)
Rappelons que ces progestatifs n‟ont pas d‟AMM en contraception.
Trois produits sont utilisés : la Surgestone 0.5mg, le Lutényl 5mg, le Lutéran 10 mg.
Pour obtenir une action contraceptive, ils doivent être administrés pendant 20 ou 21
jours sur 28, du 5e au 25e jour du cycle.
Les dérivés de la 19-norprogestérone et certains dérivés de la 17-OH-progestérone
sont dépourvus d‟effet androgénique, et dénués d‟inconvénients métaboliques [53].
92
3.3.6.3.
Inconvénients des macroprogestatifs
Leurs inconvénients sont [52] :
 La prise de poids, les sensations de gonflement ;
 des saignements et une aménorrhée : l'atrophie endométriale engendrée est
source de métrorragies ou d'aménorrhée.
93
METHODOLOGIE
94
Nous avons donc effectué une revue méthodique de la littérature, utilisant une
méthodologie validée publiée sous le nom de PRISMA [54,55] : prefered reporting
items for systematic reviews and meta-analyses . Elle comporte une liste de 27 items
considérés comme essentiels et un diagramme de flux en 4 phases, destinés
à aider les auteurs pour établir une revue systématique d‟études évaluant les risques
et les bénéfices d‟interventions en santé. La plupart des items de la liste sont
appropriés pour des revues systématiques d‟études non randomisées évaluant les
risques et bénéfices d‟interventions. Cependant, pour l‟évaluation de questions
étiologiques, diagnostiques ou pronostiques par exemple, et pour une revue d‟études
épidémiologiques ou de précision diagnostique, il est possible de modifier la liste ou
d‟y incorporer de nouveaux items [54].
Nous avons donc adapté cette liste à notre analyse qui évalue une question de
causalité à travers une revue d‟études épidémiologiques.
1. Critères d'éligibilité des articles
Nous avons cherché à identifier les études épidémiologiques qui ont évalué
l'existence d'une association éventuelle entre la prise d'une contraception orale et la
survenue d'un cancer du sein.
Il s'agit donc d'une question de causalité concernant un phénomène rare et non
contrôlable : le cancer du sein.
Les protocoles d'étude adéquats pour répondre à ce type de question sont les études
d'observation comparatives : études de cohorte et études cas-témoins [56].
Bien que ces types d'études soient plus susceptibles de comporter des risques de
biais, ce sont les seules à explorer ce type de question.
En effet, un essai randomisé sur ce sujet est impossible sur le plan éthique et
pratique : nécessité d'un nombre considérable de sujets, difficulté à imposer à une
femme un type particulier de contraception, moindre fiabilité contraceptive des
méthodes alternatives, longues périodes de suivi compte tenu du délai de la
carcinogenèse mammaire [57].
Pour les raisons expliquées dans l‟introduction, notre recherche se limite aux études
incluant des femmes qui n'ont pas fait l'objet d'une sélection sur l'existence
d'antécédents familiaux de cancer du sein ou de mutation BRCA1 ou BRCA2, et aux
95
études prenant en compte les cancers du sein indépendamment de leur type
histologique et de leur statut en récepteurs hormonaux.
Afin d'inclure les études les plus récentes et d'éviter celles ayant déjà été analysées
dans la méta-analyse de 1996, notre recherche bibliographique couvre une période
allant de 1995 à janvier 2010 inclus.
Lorsque plusieurs publications sont disponibles pour la même étude, nous n'avons
inclus que la publication la plus récente ou la plus complète.
Seuls les articles en langue anglaise et française ont été recherchés.
96
2. Sources d'information
La recherche bibliographique a été effectuée dans la base de données Pubmed par
l'interface Medline.
Les termes de recherche utilisés sont ceux du thésaurus Mesh.
Les équations de recherche étaient les suivantes :
 (“1995” [PDAT] : "2010"[PDAT]) AND ("Contraceptives, Oral"[Majr] AND
"Breast Neoplasms"[Majr]) AND (English[lang] OR French[lang])
 ("1995"[PDAT] : "2010"[PDAT]) AND ("Contraceptives, Oral"[Majr] AND
"Neoplasms"[Majr:noexp]) AND (English[lang] OR French[lang])
Elles ont permis d‟identifier respectivement 173 et 23 références.
Trois autres études ont ensuite été identifiées à l'examen des bibliographies des
articles obtenus : McCredie 1998, Beji 2007, Tavani 1999.
Au total, 199 références ont été identifiées.
Le logiciel Zotero, interfacé avec Medline, a permis de gérer ces références
bibliographiques.
97
3. Le processus de sélection
Il est résumé dans le diagramme de flux présenté dans la fig. 1
Après lecture du titre et du résumé de chaque référence, ont été exclues :
 les types de publication autres que des études épidémiologiques (revues,
éditoriaux, commentaires, réponses entre auteurs) : 65 ;
 les autres types d'étude (méta-analyses) : 4 ;
 les articles hors sujet : 51 ;
 les articles concernant les femmes ayant des antécédents familiaux de cancer
du sein et/ou une mutation BRCA1 ou BRCA2 : 22 ;
 les articles concernant des types particuliers de cancer du sein selon
l'histologie (2) ou les récepteurs hormonaux (5) ;
 les études prenant en compte uniquement les CIS : 2 ;
 les études évaluant la moralité et non l‟incidence du cancer du sein : 3.
Un total de 154 références ont donc été exclues.
Cette première sélection a permis d'identifier 45 études épidémiologiques.
Après lecture de l'article, ont été exclues les études déjà incluses dans la métaanalyse de 1996 (5), les publications redondantes pour une même étude : c'est le
cas pour Brinton 1998 et Brinton 1997 (mêmes études que Brinton 1995 déjà incluse
dans la méta-analyse de 1996), pour Marcus 1999 (même étude que Moorman
2001) et pour Athuis mars 2003 (même étude que Althuis janvier 2003).
Au final, 36 études épidémiologiques ont été incluses dans notre analyse de la
qualité de la littérature.
Le processus de sélection est résumé dans le diagramme de flux de la figure 2.
98
Figure 2
DIAGRAMME DE FLUX DE LA SELECTION DES ETUDES
Recherche bibliographique
Base de données : PubMed
Limites : de 1995 à 2010, et articles en anglais en français seulement
Références bibliographiques d'autres articles
Résultats de la recherche : 199 articles identifiés
Lecture du titre et du résumé de chaque article
Exclusions (154)
- autres types de publications qu'une étude épidémiologique (65)
- autres types d'étude épidémiologique (4)
- articles hors sujet (51)
- sélection de femmes ayant des antécédents familiaux de cancer du sein
et/ou une mutation BRCA 1 ou BRCA2 (22)
- type particulier de cancer selon l'histologie ou les récepteurs hormonaux (7)
- prise en compte uniquement des CIS (2)
- évaluation de la mortalité et non de l'incidence du cancer du sein (3)
Etudes incluses (45)
Lecture du texte et application des critères d'inclusion
Exclusions (9)
- études déjà incluses dans la méta-analyse de 1996 (5)
- autres publications d'une étude déjà incluse (4)
Etudes incluses (36)
Analyse de la qualité méthodologique des études
Exclusions (2)
- critères d'inclusion des témoins inadéquats (1)
- critères d'inclusion imprécis , pas de calcul du risque relatif (1)
Etudes incluses pour la revue de la littérature (34)
99
4. Analyse de la qualité de la littérature
4.1.
Qualité méthodologique des études
Chaque étude sélectionnée a été analysée selon les principes de la lecture critique
de la littérature.
A partir des grilles de lecture proposées dans le document de l'ANAES [56] (grilles
de lecture d'un article de causalité, analyse d'un article épidémiologique et analyse
de cohorte), et dans le livre de L.R. Salmi [58], nous avons composé en les
fusionnant une grille de lecture critique pour les études cas-témoins et une grille pour
les études de cohorte, qui sont présentées en annexes.
Pour chaque question posée, il existait un choix de 3 réponses : oui, non, incomplet.
Les items de ces grilles sont présentés et si besoin commentés dans les
paragraphes suivants.
4.1.1.
Analyse de la qualité d'une étude cas-témoins traitant
d'une question de causalité
4.1.1.1.
Les objectifs de l'étude sont-ils clairement définis ?
Leur formulation est-elle claire, le schéma d'étude est-il adapté à la question posée,
la définition précise de la maladie étudiée est-elle précisée ?
4.1.1.2.
Les caractéristiques des populations cas et témoins et des
centres sont-elles décrites ?
4.1.1.3.
Les critères d'exclusion et d'inclusion sont-ils décrits et
adéquats ?
Ces critères sont-ils indépendants par rapport à la maladie ou à l'exposition ?
Les critères de sélection qui sont liés à la maladie ou à l'exposition doivent être pris
en compte dans l'analyse comme facteur de confusion possible.
A ce stade, différents biais de sélection sont possibles [59] :
 biais liés au recrutement de témoins dans la population générale : biais lié aux
abonnés du téléphone (liste rouge, non-abonnés, téléphone mobile sans poste
fixe...) ; biais lié au recrutement de témoins sur les listes électorales (exclusion
des moins de 18 ans et des étrangers, retard de mise à jour) ;
100
 biais liés au recrutement de témoins hospitaliers pour les cas : le biais de
Berkson est le plus connu ; son principe est que certains facteurs
responsables de l‟hospitalisation des cas donnent une image déformée de
ceux-ci comparativement à celle qu‟on aurait eue dans la population
générale ; cette déformation peut être différente pour le groupe des témoins
qui ne peut plus être considéré comme venant de la même population
d‟origine que les cas ; la conclusion tirée de la comparaison des cas et des
témoins est alors erronée ;
 biais lié à l'affection pour laquelle les témoins sont hospitalisés : évitable en
sélectionnant des affections sans relation avec l'exposition ou la maladie
étudiées ;
 biais de détection dû à un lien entre l'exposition et l'inclusion des cas : les
femmes sous CO sont mieux suivies médicalement que celles qui ne les
utilisent pas d‟où une meilleure détection du cancer du sein ; ce biais peut être
pris en compte par l‟inclusion uniquement de cancers du sein invasifs et non
des carcinomes in situ (CIS) et par ajustement sur le nombre de
mammographies ou de frottis cervicovaginaux (FCV) ;
 biais de survie sélective : c‟est un biais de sélection par le pronostic lié aux
patients n‟ayant pu être interrogés du fait de leur décès ; il est minimisé par le
recrutement de cas incidents plutôt que prévalents qui sont interrogés au
cours de l‟année du diagnostic ;
 biais lié aux refus et aux exclusions : les taux de participation et les raisons
des exclusions doivent être indiqués ; la réponse a été « incomplet » dans le
cas contraire ; les individus non inclus ou retirés de l'étude sont-ils différents
vis-à-vis d'une variable importante des sujets qui restent dans l'étude ?
Le nombre des refus, exclusions et retraits est-il important et très différent pour les
cas et les témoins (au point que les conclusions pourraient être changées) ?
4.1.1.4.
L’exposition est-elle bien définie et mesurée ?
Il existe principalement 2 biais de mesure de l‟exposition [58,59].
101
Le premier est le biais lié à l'enquêteur : celui-ci recherche plus attentivement une
exposition s'il sait que le sujet interrogé est malade. Ce biais est limité par un
interrogatoire en aveugle où l'enquêteur ne sait pas s'il interroge un cas ou un
témoin.
Le deuxième est le biais d‟anamnèse : la mesure de l'exposition étant fondée sur des
questionnaires, il existe des erreurs de mémorisation de la part des participants ; ceci
peut introduire un biais, car le défaut de mémorisation est différent entre cas et
témoins : les cas recherchent souvent de façon plus attentive une exposition dans le
passé, car la maladie les conduit à rechercher une cause possible.
Ce biais est limité par un interrogatoire en aveugle (où les participants ne sont pas
informés du sujet de l'étude), par une standardisation des méthodes de mesure
utilisées (questionnaires standardisés, aides-mémoires, formation des enquêteurs),
par la vérification des données.
Le biais d‟anamnèse existe aussi plus particulièrement pour la mémorisation d‟une
utilisation de courte durée de la CO : les cas se souviennent mieux d‟une utilisation
de courte durée que les témoins. Afin de limiter ce biais, il est possible d‟intégrer
dans le groupe de référence des non-utilisatrices, les femmes n‟ayant jamais pris de
CO ainsi que les femmes ayant pris une CO pendant moins de 1 an par exemple.
4.1.1.5.
La comparabilité des groupes est-elle évaluée à l'entrée
dans l'étude ?
Le rapport de l‟étude doit mettre en évidence la distribution des principales variables
décrivant les cas et les témoins et des facteurs de confusion (variables importantes
susceptibles d'influencer le risque de maladie ou d'exposition), pour pouvoir les
prendre en compte dans les analyses ultérieures.
La réponse a été « incomplet » s‟il n‟y avait pas de tableau de comparabilité des
groupes cas et témoins.
4.1.1.6.
L'analyse statistique est-elle adaptée ?
Le risque doit être estimé par le calcul de l'odds ratio (OR).
Le risque relatif (RR) est sans signification dans ce type d'étude.
4.1.1.7.
Les résultats sont-ils vérifiables à partir des données
brutes ?
102
4.1.1.8.
L'existence d'une association est prouvée et la force de
l'association est testée
L‟association est-elle mise en évidence (RR et son IC) ?
Quelles sont sa direction, sa force, sa précision ?
4.1.1.9.
La causalité de l'association est-elle étudiée ?
Cette notion s'apprécie par les critères suivants [58] :
 antériorité de la cause par rapport à l'effet : elle est respectée dans les études
cas-témoins avec cas incidents ; elle n'est pas garantie dans les études castémoins avec cas existants, car la mesure de l'exposition passée repose sur la
mémoire ;
 stabilité de l'association : l'observation de l'association dans tous les sousgroupes est en faveur d'une causalité vraie ; mais l'estimation de l'association
peut varier d'un sous-groupe à l'autre même si la relation est causale ;
 logique externe de l'étude :
o persistance des observations d'une étude à l'autre (seul critère
important) ;
o concordance avec les connaissances épidémiologiques : critère peu
utile en pratiques car approches elles-mêmes sujettes à des biais
importants ;
o concordance avec les connaissances biologiques.
L'absence des 2 derniers critères n'est pas suffisante pour contredire
une relation causale.
4.1.1.10. Les facteurs de confusion sont décrits et pris en compte
La prise en compte des facteurs de confusion peut se faire à deux moments : soit
lors de la préparation de l'étude, par des techniques d'assortiment comme
l'appariement, soit lors de l'analyse des données par des techniques d'ajustement
sur les facteurs de confusion [58].
L'appariement
C'est un procédé de constitution des échantillons destiné à répartir les facteurs de
confusion de façon équilibrée entre les groupes afin de neutraliser leur influence
103
potentielle.
Deux méthodes d'appariement peuvent être utilisées :
 l'appariement individuel de chaque cas avec un ou plusieurs témoins ayant
exactement la même caractéristique (facteur de confusion) ;
 l'appariement de fréquence : on effectue une stratification des cas pour cette
même caractéristique (découpage du groupe de cas selon la présence ou non
du facteur de confusion) et une recherche pour chaque strate d'un nombre
équivalent de témoins qui présente dans son ensemble une fréquence
similaire de cette caractéristique.
Cette méthode nécessite l'utilisation d'une analyse statistique stratifiée sur le
facteur de confusion utilisé.
L’ajustement sur les facteurs de confusion
On analyse la relation entre l'exposition et la maladie au sein de chaque sous-groupe
homogène (strate) en ce qui concerne le facteur de confusion : on parle d'analyse
stratifiée.
Pour tester l'association entre l'exposition et la maladie en tenant compte du facteur
de confusion, la méthode la plus courante est le test du Chi-carré de MantelHaenszel.
En cas de multiples facteurs de confusion, on a recours à une analyse multivariée ;
les modèles statistiques les plus utilisés sont la régression logistique ou modèle de
Cox.
L'utilisation de méthodes inadaptées pour maîtriser l'effet des facteurs de confusion
ne devrait pas être une raison de rejet de l'étude, à condition que les facteurs de
confusion aient été mesurés à l'entrée dans l'étude et que le rapport fournisse les
données brutes pour pouvoir vérifier que ces variables sont distribuées de la même
manière dans tous les groupes comparés [58].
4.1.1.11. Les biais sont décrits et pris en compte
Il s‟agit des biais de sélection et de mesure de l‟exposition déjà évoqués ci-dessus.
104
4.1.2.
Analyse de la qualité d'une étude de cohorte traitant
d'une question de causalité
4.1.2.1.
Les objectifs de l'étude sont-ils clairement définis ?
4.1.2.2.
Les caractéristiques des populations exposées et non
exposées sont-elles bien définies ?
4.1.2.3.
Les modalités de constitution de la cohorte, sont-elles
précisées ?
 cohorte prospective ou rétrospective, fixe ou dynamique ?
 choix de la cohorte :
o selon la présence d'une exposition ;
o issue de la population générale : le choix se porte souvent sur une
zone géographique définie (région ou pays) ;
o selon la facilité du recueil des données et la motivation des
personnes : médecins britanniques, infirmières américaines ;
o adhérents d'une mutuelle (MGEN) volontaires.
4.1.2.4.
Les expositions comparées sont-elles décrites ?
On doit retrouver la définition :
 de l'exposition évaluée (prise d'une contraception orale) et
 de l'exposition de référence (c'est habituellement l'absence de prise d'une
contraception orale).
4.1.2.5.
Le choix du groupe de référence (= groupe non exposé) estil acceptable ?
Il existe 2 critères de choix essentiels :
 forte similitude avec le groupe exposé : sur des caractéristiques ayant un lien
avec le problème étudié (âge, sexe, catégorie socioprofessionnelle...) ;
 absence d'exposition au facteur étudié.
Le groupe de référence peut être formé selon 2 possibilités [58] :
 un groupe de référence interne à la cohorte (choix le plus fréquent pour les
études de cohorte prospectives)
105
 un groupe de référence externe à la cohorte : dans le cas où la référence
interne n'est pas disponible ; le groupe de référence peut être choisi en dehors
de l'étude qui ne comporte que des sujets exposés, dans une population telle
que celle de la région ou du pays.
4.1.2.6.
Les critères d'inclusion et d'exclusion sont-ils décrits et
adéquats ?
La date d'entrée dans la cohorte doit être précisée : elle sera prise en compte pour
calculer le temps de participation de chaque personne à la cohorte, en terme de
personnes-années le cas échéant.
Les raisons et le nombre des refus et des exclusions avant le début de l'étude et des
retraits en cours de l'étude sont indiqués et expliqués.
Il existe à ce niveau une possibilité de biais de sélection lié aux refus et aux
exclusions : les taux de participation et les raisons des exclusions doivent être
indiqués ; la réponse a été « incomplet » dans le cas contraire ; les individus non
inclus ou retirés de l'étude sont-ils différents vis-à-vis d'une variable importante des
sujets qui restent dans l'étude ?
Le nombre des refus, exclusions et retraits est-il important et très différent pour les
cas et les témoins (au point que les conclusions pourraient être changées) [58].
4.1.2.7.
L’exposition est-elle bien définie et mesurée ?
Dans les cohortes prospectives, la mesure initiale de l'exposition est réalisée sans
savoir si le sujet sera malade ou non : une éventuelle erreur dans la mesure de
l'exposition ne sera pas plus importante dans l'un ou l'autre groupe.
Les erreurs d‟anamnèse sont donc non différentielles : leur fréquence est la même
dans les groupes exposés et non exposés. Elles conduisent à un affaiblissement de
la mesure de l'association entre l'exposition et la maladie (perte de puissance), mais
pas à une erreur dans la mesure de l'association [59].
Il n‟y a donc pas de biais d‟anamnèse puisqu‟un biais est une erreur différentielle
entre 2 groupes.
4.1.2.8.
Le suivi de la cohorte est-il complet et correctement
réalisé ?
La durée du suivi doit être précisée.
Les changements d'exposition au cours du temps ont-ils été recueillis ?
106
Le taux de suivi doit être indiqué : on estime qu‟il existe un biais de sélection lié aux
perdus de vue si leur taux est de 5 à 10 %. Un taux au-delà de 10 à 15 % de perdus
de vue devient préjudiciable à l‟interprétation des résultats d‟une étude [58].
4.1.2.9.
L'effet attendu (survenue d’un cancer du sein) est-il défini,
mesuré de façon fiable et valide ?
A ce niveau, il existe principalement 2 biais de mesure de la maladie [59].
Le premier est lié à l'enquêteur : la motivation de celui-ci peut être plus ou moins
forte pour rechercher des cas, selon que le sujet est exposé ou non. Ce biais peut
être minimisé s‟il existe une procédure d‟insu de l'enquêteur qui ne connaît pas le
statut exposé ou non exposé des participants.
Le deuxième est le biais de détection dans l'identification de nouveaux cas : les
femmes sous CO sont mieux suivies que les femmes non exposées et sont donc
mieux dépistées. On peut noter que le biais de détection est un biais de mesure dans
les études de cohorte alors qu‟il est un biais de sélection dans les études castémoins. Ce biais peut être minimisé par ajustement sur le nombre de
mammographies ou de FCV.
4.1.2.10. La comparabilité des groupes est-elle évaluée à l'entrée
dans l'étude ?
La réponse a été « incomplet » s‟il n‟y avait pas de tableau de comparabilité des
groupes.
4.1.2.11. L'analyse statistique est-elle adaptée ?
L'analyse principale de l'étude de cohorte consiste à comparer la survenue de la
maladie dans les groupes exposés et non exposés. Cette comparaison est fondée
sur l'estimation du risque relatif (RR) et son intervalle de confiance.
4.1.2.12. Les résultats sont-ils vérifiables à partir des données
brutes ?
4.1.2.13. L'existence d'une association est-elle prouvée et la force de
l'association est-elle testée ?
Idem études cas-témoins.
4.1.2.14. La causalité de l'association est-elle discutée ?
107
Idem études cas-témoins.
4.1.2.15. Les facteurs de confusion sont-ils décrits et pris en
compte ?
Idem études cas-témoins.
4.1.2.16. Les biais sont-ils décrits et pris en compte ?
Il s‟agit des biais de sélection (biais liés aux refus et aux exclusions, biais liés aux
perdus de vue) et des biais de mesure (biais de détection dans la mesure de la
maladie) déjà décrits ci-dessus.
4.2.
Notion de niveau de preuve d'une étude
Le niveau de preuve d'une étude caractérise sa capacité à répondre à la question
posée [56].
Elle dépend de l'adaptation du protocole à la question posée, de l'existence ou non
de biais importants, de la puissance de l'étude (en particulier taille de l'échantillon).
Le système de gradation proposé par l'ANAES classe les études de cohorte en
niveau de preuve 2 et les études cas-témoins en niveau de preuve 3 sur une échelle
qui en comporte 4.
Finalement, l'analyse de la qualité de la littérature devra permettre une dernière
sélection selon la qualité méthodologique des études.
108
5. Extraction des données concernant les résultats
Ces données doivent permettre d'estimer le risque de cancer du sein associé à
différentes conditions d'utilisation de la CO :
 l‟utilisation globale de la CO ;
 l‟intervalle depuis la dernière utilisation :
o
utilisation en cours,
o
récente,
o
arrêtée depuis 10 à 15 ans,
o
arrêtée depuis plus de 20 ans,
 la durée totale d'utilisation ;
 l'âge au moment du diagnostic ;
 le caractère récent de l‟utilisation selon l‟âge au diagnostic ;
 le statut ménopausique ;
 l'âge à la première utilisation ;
 l'année de la première utilisation ;
 le moment de l'utilisation par rapport à la PGAT ;
 le type de pilule ;
 la dose d'estrogène ;
 le type de progestatif.
Dans chaque étude, les estimations du risque de cancer du sein des utilisatrices de
CO par rapport aux non-utilisatrices s'effectuent par la mesure du risque relatif (RR)
dans les études de cohorte, et de l'odds ratio (OR) dans les études cas-témoins,
ainsi que de leurs intervalles de confiance respectifs.
Pour chacune de ces conditions d'utilisation de la CO, les études sont regroupées
selon la valeur de leur RR ou de leur OR (et de leurs intervalles de confiance) :
supérieur à 1 (retrouvant une association entre le risque de cancer du sein et
l'utilisation de la CO) ou ≤ 1.
En raison de leur présence majoritaire, et afin de recueillir assez de données pour
notre étude, nous avons choisi de prendre en compte les résultats non
statistiquement significatifs qu'ils soient en faveur ou non d'une association entre le
risque de cancer du sein et l'usage de la CO.
109
6. Synthèse des données
Elle sera fondée sur une approche qualitative pour les raisons exposées plus loin
(p.114).
110
RESULTATS
111
1. Qualité
des
études :
Validation
de
la
méthodologie des études
1.1.
Etudes de cohorte
Les résultats de l‟analyse de la qualité méthodologique des études de cohortes [6067] sont présentés dans le tableau III.
Les études de cohorte étaient toutes prospectives avec groupe de référence interne.
Pour chacune d'entre elles, les objectifs, les caractéristiques des populations
exposées et non exposées, les modalités de constitution de la cohorte, les
expositions comparées et enfin le choix du groupe de référence étaient clairement
définis.
Les nombres et raisons des non-inclusions étaient précisés, mais aucune étude n'a
réalisé de comparaison des groupes inclus et non inclus, d'où une possibilité de biais
de sélection.
Les erreurs de mesure de l'exposition comme les erreurs de mémorisation n'étaient
pas différentielles entre exposés et non exposés du fait de la nature prospective de
la cohorte (le recrutement s'est fait avant la survenue des cas) ; ces erreurs
pouvaient éventuellement conduire à une perte de puissance, mais pas à un biais de
mémorisation.
Toutes les études ont rapporté des taux de suivi corrects sauf celle d„Hannaford [62]
avec 33 % de perdus de vue. Un biais de sélection lié aux perdus de vue était donc
vraisemblable dans cette étude.
Le taux de suivi de la cohorte de Vessey [63] n'était pas donné, mais il était précisé
que le suivi avait été complet sauf pour les émigrantes.
4 études (Dorigochoo [60], Rosenblatt [61], Dumeaux 2003 [65] et Kumle 2002 [66])
ont réalisé un suivi uniquement sur consultation de registres, sans enregistrer les
changements d'exposition.
112
Une seule des 8 cohortes (Hankinson [67]) a rapporté une procédure d'insu de
l'enquêteur dans le diagnostic de cancer du sein, permettant de limiter le biais de
mesure de la maladie lié à l'enquêteur.
Le biais de détection (ou de surveillance) dans l'identification de nouveaux cas, lié à
un meilleur suivi des femmes sous CO qui sont donc mieux dépistées, a été pris en
compte de différentes façons dans 4 études : par ajustement sur le dépistage du
cancer du sein (dans l'étude de Dumeaux 2003 [65]), sur la fréquence des FCV
(dans l'étude de Dumeaux 2005 [64]), et par la prise en compte uniquement des
cancers du sein invasifs (Dumeaux 2003 [65], Dumeaux 2005 [64], Kumle [66],
Hankinson [67]).
Toutes les études ont utilisé des méthodes statistiques adaptées, permettant de
mettre en évidence l'existence ou non d'une association qu'elle soit en faveur d'un
risque ou d'un effet protecteur de la CO.
La causalité de l'association a été discutée dans chaque étude.
Les facteurs de confusion pris en compte ont été variables selon les études comme
le montre le tableau IV.
Globalement, dans ce type d'enquête ainsi que dans les enquêtes cas-témoins
« emboîtées » dans une cohorte (Van Hoften [74]), Tryggvadottir [79], Tomasson
[82]) les biais de sélection étaient plus rares, car le recrutement se faisait avant la
survenue des cas. Les biais de sélection étaient surtout liés aux refus et aux
exclusions ainsi qu'aux perdus de vue.
La qualité des études de cohorte étant globalement bonne, aucune n'a été rejetée.
113
114
115
1.2.
Les études cas-témoins
Les études cas-témoins étaient majoritaires avec 15 basées dans la population
générale [68-82] et 12 basées à l‟hôpital [83-95].
Les tableaux Va et Vb regroupent les résultats de l‟évaluation de la qualité
méthodologique pour chacune de ces études.
Leurs objectifs et les caractéristiques de la population étudiée étaient clairement
définis pour chaque étude.
Toutes les études cas-témoins comportaient des biais de sélection, constituant la
difficulté principale de ce type d'étude, en particulier le biais lié au recrutement des
participants dans les populations hospitalières par rapport à la population générale,
le biais de Berkson, le biais lié à l'affection des témoins hospitalisés.
Ce dernier biais a été limité dans 34 des 35 études grâce à la constitution de
groupes de témoins hospitalisés dont les affections étaient très diversifiées et sans
lien avec le cancer du sein ou la contraception orale. Seule une étude brésilienne,
Gomes [95], a recruté 300 témoins consultant dans l'unité ambulatoire de
gynécologie, créant ainsi un biais de sélection. C'est la raison pour laquelle cette
étude a été rejetée de notre sélection.
Dans la totalité des études cas-témoins, les cas qui ont été recrutés étaient incidents
et non prévalents, ce qui a permis d'éviter un biais de survie sélective.
Il existait aussi une possibilité de biais lié aux refus et aux exclusions, surtout s'ils
avaient été nombreux.
Ceux-ci ont été difficiles à évaluer, car seules 2 études cas-témoins basées dans la
population (Sweeney [69] et Althuis [71]) ont réalisé une comparaison des nonparticipantes avec les participantes.
Les informations sur les non-participantes (nombres et raisons des nonparticipations : refus, exclusions...) étaient complètes dans 12 des 15 études basées
dans la population (Marchbanks [72] Moorman [73] Rossing [81]), et seulement dans
2 études (Rosenberg 2008 [83] et Shapiro [86]) basées à l'hôpital.
Les études cas-témoins présentaient aussi des biais de détection ou de surveillance
(les femmes sous CO étaient mieux suivies donc bénéficiaient d'une meilleure
116
détection du cancer du sein) ; une façon de limiter ce biais était de n'inclure que des
cancers du sein invasifs et non des CIS ; c'est ce qui a été effectué dans 8 études
basées dans la population, et dans 3 études basées à l'hôpital. Aucune étude castémoin n'a recueilli d'information sur le dépistage du cancer du sein (nombre
d'examens ou de mammographie) et le nombre de FCV, afin d'évaluer l'influence
d'un biais de détection.
Les procédures d'insu permettant de limiter les biais de mesure de l'exposition ont
été très rarement utilisées : dans l'étude de Newcomb [80], l'enquêteur ignorait s'il
interrogeait un cas ou un témoin ; dans seulement 2 études (Mc Credie [77] et
Newcomb [80]), le biais d‟anamnèse a été limité par un interrogatoire en aveugle où
les participants ne connaissaient pas le sujet de l'étude jusqu'à la fin de
l'interrogatoire.
Toutes les études cas-témoins ont été basées sur un interrogatoire des
participantes ; elles étaient donc toutes sujettes à un biais de mémorisation.
Afin de limiter le biais de mémorisation lié à une utilisation à court terme (les cas se
souviennent mieux d'une telle utilisation que les témoins), 4 études ont regroupé
dans la catégorie de référence des non-utilisatrices les femmes n'ayant jamais pris
de CO avec celles ayant pris une CO pendant moins de 6 mois (Beji [84]), pendant 1
à 11 mois (Ursin 1998 [78]) ou pendant moins de 1 an pour les études de Althuis
[71], Rosenberg 2008 [83], Rosenberg 1996 [90], Palmer [94].
La plupart des études ont utilisé d'autres précautions méthodologiques pour lutter
contre ces biais de mesure : utilisation de questionnaires standardisés, intervention
d'enquêteurs spécialement formés, lieu de recueil des données identique pour les
cas et les témoins...
Pour l'ensemble des études cas-témoins, les groupes cas et témoins ont fait l'objet
d'une comparaison, l'analyse statistique a été adaptée, l'existence d'une association
a été prouvée et la force de l'association testée : toutes ces études ont rapporté leurs
résultats sous forme d'OR avec leurs intervalles de confiance. Malheureusement, de
nombreux résultats étaient non significatifs statistiquement.
Les biais ont été discutés dans la plupart des études sauf celles de Ursin 1998 [78],
Rossing [81] et Levi [89] où ils l‟ont été seulement en partie et celles de Moorman
117
[73], Ursin 1999 [76], et Traina [91] où ils n‟ont pas été évoqués.
La causalité de l'association a été examinée dans la plupart des études. Cependant
dans l'étude de Nordsa'adah [85], l'antériorité de l'utilisation de la CO par rapport au
diagnostic de cancer du sein n 'était pas précisée : les cas ont été recrutés de 1991 à
2000, mais la date de recueil des données sur les cas n'a pas été précisée.
Dans presque toutes les études, les risques ont été estimés après contrôle des
facteurs de confusion comme les variables de la reproduction et les facteurs socioéconomiques (voir les tableaux VI et VII). Cependant dans l'étude de Tomasson [82]
ces facteurs n‟ont pas été décrits bien que les auteurs assurent les avoir pris en
compte. Dans l'étude de Traina [91], les résultats présentés ont été ajustés
uniquement pour l'âge ; des analyses multivariées ont été réalisées, mais ne sont
pas montrées.
1.3.
Particularités des études cas-témoins emboîtées
dans une cohorte
Dans les 3 études de ce type [74,79, 82], les biais de sélection étaient plus rares, car
le recrutement se faisait avant la survenue des cas. Ils étaient surtout liés aux refus
et aux exclusions, comme dans les études de cohorte.
De même que dans une étude de cohorte, les erreurs de mémorisation n‟étaient pas
différentielles.
Il persistait une possibilité de biais de détection en temps que biais de mesure.
1.4.
Une étude de protocole indéterminé
L‟étude grecque de Tzingounis [96] publiée en 1996 ne précise par le type de
protocole utilisé. C‟est une étude prospective se rapprochant d‟une cohorte,
comportant 2 groupes de patients : exposés et non exposés.
Le lieu de recrutement des exposés n‟a pas été précisé.
La constitution de ce groupe a relevé d‟une intervention : 243 individus se sont vus
prescrire une CO à base de Trinordiol®.
Les patientes ayant interrompu la prise de trinordiol avant la fin du suivi qui a duré 7
ans, étaient nombreuses : 41,56 %.
Les groupes n‟ont pas été comparés à l‟entrée dans l‟étude.
118
Aucune procédure d‟insu n‟a été utilisée.
L‟association entre la CO et le cancer du sein a été testée (par un test X2) sans être
quantifiée par un calcul du RR.
Les facteurs de confusion n‟ont pas été pris en compte et les biais n‟ont pas été
discutés. Pour toutes ces raisons, l‟étude a été rejetée.
A l'issu de cette analyse, il restait donc 34 études pour notre synthèse.
119
i : incomplet
120
121
122
123
2. Caractéristiques
des
études
retenues
pour
l'analyse
Les tableaux VIII, IXa et IXb présentent les caractéristiques des 34 études incluses,
dont 8 sont des études de cohortes, 15 des études cas-témoins dont les sujets sont
issus de la population générale (dont 3 études cas-témoins emboîtées dans une
cohorte), et 11 des études cas-témoins avec recrutement des participants à l'hôpital.
Les études sont présentées dans l'ordre de l'année de publication des résultats.
Les pays dans lesquels les études ont été conduites sont variés : l'Afrique du Sud
(1), l'Australie (1), la Chine (2), les Etats-Unis (13), la France (1), la Grèce (1), l'Italie
(2), la Malaisie (1), la Norvège (1), la Suède (1cohorte en partie norvégienne, et 2
études cas-témoins), l'Islande (2), les Pays-Bas (1), le Royaume-Uni (2), la Suisse
(1), Taïwan (1), la Turquie (1).
Ces études ont inclus des femmes de groupes d'âge et de statuts ménopausiques
différents ainsi que de groupes ethniques variés.
Certains auteurs ont rapporté leurs données non pas de façon globale pour toute la
population de l'étude, mais par catégories d'âge ou de statut ménopausique au
moment du diagnostic. C'est le cas pour Shantakumar [68] (femmes en
préménopause, en postménopause de moins de 65 ans et en postménopause de 65
ans et plus), Moorman [73] (moins de 50 ans, 50 et plus), Rosenberg 1996 [90] (25 à
34 ans, 35 à 44 ans et 45 à 59 ans) et Lipworth [92] (45 ans et moins, plus de 45
ans).
Nous avons donc considéré ces groupes comme autant d'études indépendantes.
Ainsi, nous avons abouti à un total de 40 études potentiellement indépendantes pour
notre analyse.
Le type de contraception étudiée était variable d‟une étude à l‟autre.
La plupart des études n'ont pas étudié séparément les contraceptifs oraux combinés
(COC) et les pilules uniquement progestatives (PUP).
Le terme de contraceptifs oraux était le terme le plus couramment utilisé pour
désigner à la fois les COC et les PUP, lorsqu'on ne précisait pas lequel des 2 était
étudié.
124
Beaucoup d'études ont ignoré les progestatifs contenus dans les COC et les pilules
combinées ont été classées selon leur contenu en estrogène et leur formulation
(combinée ou séquentielle).
Très peu d'études ont donc examiné le risque de cancer en fonction du contenu
hormonal de la pilule, soit que l'information sur les différents types de pilules utilisées
n'ait pas été recueillie (Dorigochoo [60], Hankinson [67], Shantakumar [68], Sweeney
[69], Moorman [73], Van Hoften [74], Magnusson [75], Ursin 1999 [76], Mc Credie
[77], Newcomb [80], Tomasson [82], Beji [84] Norsa'adah [85], Tavani [87], Chie
[88]), soit que les participantes ne se souvenaient plus des marques de pilule
(Rossing [81).
De plus, dans de nombreuses études, la plupart des femmes ont utilisé
successivement plusieurs pilules contenant des dosages de moins en moins élevés
en estrogène (plus de 50, 50 puis moins de 50), ou contenant uniquement un
progestatif. C'est pourquoi il était impossible de déterminer si une association entre
le cancer du sein et le dosage en estrogène était due aux effets de la pilule utilisée la
plus récemment avant le diagnostic de cancer du sein ou aux effets des pilules plus
fortement dosées utilisées antérieurement (Hannaford [62]).
Dans certaines études, les données n'ont pas été analysées selon le type de pilule,
car l'exposition était dominée par un groupe de CO, et qu'il y avait un faible nombre
de cancer du sein dans certaines catégories (Rosenblatt [61], Vessey [63],
Tryggvadottir [79], Rossing [81]).
Seules quelques études ont rapporté des résultats en fonction du type de pilule
(Dumeaux 2003 [65], Kumle [66]) et/ou du dosage hormonal (Dumeaux 2003 [65],
Althuis [71], Ursin 1998 [78], Rosenberg 1996 [90], Marchbanks [72]).
Globalement, parmi les pilules utilisées dans les 12 études précisant ce type
d'information, on retrouvait :
 des COC fortement dosés (qui ne sont plus prescrits actuellement) et
moyennement dosés dans l‟étude de Hankinson [67] ;
125
 des COC fortement, moyennement et faiblement dosés dans 6 études : dans
les cohortes de Hannaford [62] et Vessey [63], les COC moyennement dosés
sont majoritaires ; dans les études de Jerström [70], Atlthuis [71], Marchbanks
[72] et Rosenberg 1996 [90], les proportions d‟utilisation ne sont pas
précisées ;
 des COC moyennement dosés à 50 uniquement dans l„étude de Van Hoften
[74] ;
 des COC faiblement et moyennement dosés dans les études de Dorigochoo
[60], Dumeaux 2003 [65] et Tryggvadottir [79] ;
 des COC faiblement dosés uniquement dans l„étude de Rosenblatt [61] ;
 des PUP en faible proportion par rapport aux COC dans les études de
Hannaford [62], Vessey [63], Dumeaux 2003 [65] et Marchbanks [72].
Au total, l'hétérogénéité entre les études incluses est évidente sur le plan clinique.
Les études sont très différentes en ce qui concerne de nombreux facteurs : but de
l'étude, caractéristiques des populations (âge, origines ethniques, races, pays,
niveau socio-économique, statut ménopausique...), type de contraception utilisée...
De plus, les résultats entre les différentes études ne sont pas concordants.
C'est pourquoi nous nous sommes limités à une synthèse méthodique qualitative
plutôt que de réaliser une méta-analyse [102, 103].
126
127
128
129
130
3. Résultats des études individuelles
3.1.
Utilisation globale de la CO
Comme le montre le tableau X, 36 études (7 C, 16 P, 13 H) ont rapporté ce type de
résultat.
Les estimations du risque relatif étaient augmentées de façon significative dans 9
études (2 C, 1P et 6H) avec des valeurs du RR (ou de l‟OR) s'étendant de 1,25 (IC à
95 % : 1,07 -1,46) dans l'étude de Dumeaux 2003 [65] à 2,5 (IC à 95 % : 1,3 -4,8)
dans l‟étude de Norsa'adah [85].
14 études (1 C, 7 P, 6 H) ont retrouvé une élévation du risque, mais non significative.
Les 13 autres études (4 C, 8 P, 1 H) n'ont pas rapporté d'élévation du risque de
cancer du sein associé à l‟utilisation de la CO. Seules 2 de ces études rapportent
des résultats statistiquement significatifs.
Il existe donc une élévation du risque de cancer du sein dans la plupart des études si
l'on prend en compte les résultats non statistiquement significatifs.
3.2.
Intervalle depuis la dernière utilisation
Il s'agit du temps écoulé entre la dernière utilisation et la date de référence qui est en
général la date du diagnostic pour les cas (ou 1 an avant le diagnostic), ou la date du
recueil des données pour les témoins et les participants d'une cohorte.
3.2.1.
Utilisation en cours : < 2 ans depuis la dernière
utilisation
Sur 8 études (2 C, 4 P, 2 H) montrées dans le tableau XI, 7 (2 C, 3 P, 2 H) ont
retrouvé une élévation du risque de cancer du sein associé à une utilisation en cours,
2 d'entre elles (1C, 1H) donnant des résultats statistiquement significatifs.
Seule une étude n‟a pas retrouvé d'association avec le risque de cancer du sein ; ses
résultats n‟étaient pas statistiquement significatifs.
131
3.2.2.
Utilisation récente : < 3ans ou ≤ 5 ans depuis la
dernière utilisation
22 études (5 C, 8 P, 9H) regroupées dans le tableau XII, ont étudié l'association
entre l'utilisation récente d'une CO et le risque de cancer du sein.
14 d'entre elles (4 C, 5 P, 5 H) ont retrouvé une association : association significative
pour 4 études (2 P, 2 H), et non significative statistiquement pour 10 études (4 C,
3 P, 3 H).
8 études (1 C, 3 P, 4 H) n'ont pas retrouvé d'élévation du risque de cancer du sein,
une seule fournissant un résultat statistiquement significatif.
Il semble donc exister une tendance en faveur d'une élévation du risque en cas
d'utilisation en cours ou récente, si l'on prend en compte les résultats non significatifs
statistiquement.
3.2.3.
Intervalle de plus de 10 ou de plus de 15 ans depuis la
dernière utilisation
Comme le montre le tableau XIII, sur 15 études (4 C, 3 P, 8 H) ayant étudié ce
risque, 5 études (1 P, 4 H) ont retrouvé une absence d'élévation du risque de cancer
du sein en cas d'arrêt de la CO depuis plus de 10 ou 15 ans ; aucune n‟a présenté
de résultat statistiquement significatif.
Pour 6 autres études (2 C, 2 P, 2 H), il existait une persistance du risque après 10 à
15 ans d'arrêt, malgré une diminution ; 2 résultats étaient statistiquement significatifs.
Enfin, dans 4 études (2 C, 2 H), une élévation du risque persistant après au moins 10
ou 15 ans d'arrêt de la CO a été observée ; 2 résultats étaient statistiquement
significatifs.
132
3.2.4.
Intervalle de 20 ans ou plus depuis la dernière
utilisation
Sur 10 études (5 C, 5 P), présentées dans le tableau XIV, qui ont étudié l'association
entre un intervalle de plus de 20 ans depuis la dernière utilisation de CO et le risque
de cancer du sein, 7 (4 C, 3 P) ont retrouvé une absence d'élévation du risque 20
ans après l'arrêt de la CO ; seuls 2 résultats étaient statistiquement significatifs, dont
un retrouvant un effet protecteur (Hannaford [62]).
3 études ont retrouvé une élévation très modérée du risque, non significative
statistiquement.
Ces résultats sont donc plutôt en faveur d'une persistance du risque de cancer du
sein après 10 ou 15 ans d'arrêt et d‟une absence d'élévation du risque 20 ans après
l'arrêt de la CO.
3.3.
Durée totale d'utilisation
34 études (7 C, 16 P, 11 H), présentées dans le tableau XV, ont évalué le risque de
cancer du sein en rapport avec la durée d'utilisation de la CO.
Nous avons analysé leurs résultats pour la plus longue durée d'utilisation qui s'étend
selon les études « de 3 ans ou plus » à « 20 ans ou plus ».
7 études (2 C, 2 P, 3 H) ont retrouvé une élévation du risque statistiquement
significative avec la durée d'utilisation qui augmentait.
11 études (2C, 6P, 3H) ont retrouvé une élévation du risque, mais non
statistiquement significative.
16 études (3 C, 8 P, 5 H) n‟ont pas trouvé d'élévation du risque ; le risque était même
diminué pour 4 d'entre elles ; la plupart de ces résultats n‟étaient pas statistiquement
significatifs.
Les résultats sont donc contradictoires.
La durée d'utilisation étant corrélée à son caractère récent (les femmes qui ont de
longues durées d'utilisation ont tendance à être les utilisatrices les plus récentes
Hankinson [67]), 4 études ont pris en compte la durée d'utilisation en fonction du
caractère récent de l'utilisation. Leurs résultats étaient contradictoires :
133
 Rosenberg 1996 [90] a retrouvé une augmentation du risque pour les femmes
de 25 à 34 qui ont pris la pilule récemment (moins de 3 ans auparavant ou 3 à
4 ans auparavant), ce risque augmentant avec la durée d'utilisation ;
 Dumeaux 2003 [65] a également retrouvé une élévation, mais non
significative ;
 Palmer [94] a montré une élévation significative du risque avec la durée
d'utilisation en cas d'utilisation moins de 2 ans auparavant, mais n‟a pas
retrouvé d'élévation du risque avec la durée d'utilisation en cas d'utilisation 2 à
4 ans auparavant ;
 enfin, Ursin 1998 [78] n‟a pas retrouvé d'élévation du risque avec la durée
d'utilisation, une fois le caractère récent de l'utilisation pris en compte.
Il n'y a donc pas de tendance claire à l‟élévation du risque de cancer du sein en
fonction de la durée d'utilisation, même une fois le caractère récent pris en compte.
3.4.
3.4.1.
Age au moment du diagnostic
Age jeune au moment du diagnostic (moins de 35 ans)
Sur les 4 études (2 P,2 H) ayant évalué l'association entre le risque de cancer du
sein et la prise d'une CO chez les femmes qui avaient moins de 35 ans au
diagnostic, toutes ont retrouvé une élévation du risque de cancer du sein, plus
importante que pour les femmes plus âgées (voir tableau XVI). Une seule de ces
études (1 P) a retrouvé une association non significative.
3.4.2.
Age de moins de 40 à 45 ans
6 études (2 C, 1 P, 3 H) ont évalué le risque de cancer du sein associé à l'usage de
la CO avec un âge au diagnostic de moins de 40 à 45 ans (voir tableau XVI).
2 d‟entre elles (1 C, 1 H) ont retrouvé une élévation significative du risque de cancer
du sein, plus importante que celle des femmes plus âgées.
2 autres (1P, 1 H) ont retrouvé la présence d‟un risque de cancer du sein chez des
femmes de moins de 40 ans mais leurs résultats sont statistiquement non
significatifs.
134
En revanche, 1 étude (H) a montré un risque moins élevé par rapport aux femmes
plus âgées et 1 études (C) n'a pas retrouvé d'élévation du risque de cancer du sein
(ces résultats étant statistiquement non significatifs).
3.4.3.
Age de plus ou moins 50 à 55 ans
Sur 3 études présentant des résultats concernant les femmes âgées de moins ou de
plus de 50 à 55 ans ( voir tableau XVII), 2 (1 P, 1 H) ont retrouvé une élévation du
risque de cancer du sein chez les femmes de moins de 50 ans au diagnostic par
rapport aux femmes plus âgées (un seul de ces 2 résultats était statistiquement
significatif).
Globalement, chez les femmes de plus de 50 à 55 ans, sur les 6 études (5 P , 1 H)
présentées dans le tableau XVII, 3 (2 P, 1 H) rapportent une élévation du risque de
cancer du sein (dont 1 résultat statistiquement significatif) et 3 autres (3 P) ne
retrouvent pas de risque (résultats statistiquement non significatifs).
Il semble donc exister une augmentation du risque de cancer du sein avant l'âge de
35 ans parmi les utilisatrices de CO.
Chez les femmes à partir de 40 ans et plus, les résultats sont plus contradictoires, et
ne permettent pas de conclure.
3.5.
Caractère récent de l'utilisation selon l'âge
Dans le tableau XVIII sont présentées les 4 études qui ont évalué le risque de cancer
du sein chez les femmes de moins de 35 ans au diagnostic, après prise en compte
du caractère récent de l‟utilisation. .
Elles ont toutes rapporté une élévation du risque en cas d'utilisation récente par
rapport aux femmes plus âgées, statistiquement significative pour 3 d‟entre elles.
L'étude de Newcomb [80] a retrouvé un risque plus élevé chez les femmes de 35 à
44 ans en cas d'usage en cours, mais plus élevé chez les femmes de moins de 35
ans en cas d'utilisation récente (il y a 2 à 4 ans).
Après 10 ans d'arrêt, le risque était diminué, mais ne disparaissait pas sauf dans
l'étude de Shapiro [86] où il augmentait après 10 à 14 ans d'arrêt.
L'augmentation du risque chez les femmes de moins de 35 ans semble donc
persister une fois le caractère récent de l'utilisation pris en compte.
135
3.6.
Statut ménopausique au moment du diagnostic
Ces résultats sont montrés dans le tableau XIX. Les 2 études (2 P) qui ont évalué le
risque de cancer de cancer du sein associé à l'utilisation d'une CO chez des femmes
en préménopause au moment du diagnostic ont retrouvé une interaction, significative
pour l'une et à la limite de la signification statistique pour l'autre.
Aucune des 4 études (3 P, 1 C) ayant évalué le risque du cancer du sein lié à l'usage
de la CO chez les femmes en postménopause au moment du diagnostic n'a retrouvé
d'élévation du risque (1 résultat statistiquement significatif).
Il y a donc peu de données sur le risque de cancer du sein associé à la CO en
fonction du statut ménopausique au moment du diagnostic. Ces données sont plutôt
en faveur d'une association entre l'usage de la CO chez les femmes en
préménopause au moment du diagnostic et l'élévation du risque de cancer du sein.
3.7.
Age à la première utilisation
Sur 19 études (1 C, 10 P, 8 H) présentées dans le tableau XX, 5 (2 P, 3 H) ont
retrouvé une augmentation plus importante du risque de cancer du sein en cas de
début de la CO à moins de 18, 20 ans ou de 25 ans. 3 résultats étaient
statistiquement significatifs.
Dans l'étude de Palmer [94], le RR le plus élevé concernait les utilisatrices avant
l'âge de 18 ans.
Dans l'étude de Jerström [70], un âge de début de contraception orale de moins de
20 ans était associé à un risque de cancer du sein statistiquement plus élevé chez
les femmes ayant un cancer du sein avant l'âge de 35 ans. Ces résultats étaient
intéressants et concordants avec la plus grande susceptibilité mammaire à cette
période.
Cependant, pour 9 études (1 C, 5 P, 3 H), l'augmentation du risque était plus
importante en cas de début d'un CO après l'âge de 20 ans ou de 25 ans. Seuls 2 de
ces résultats étaient significatifs statistiquement.
5 études (3 P, 2 H) n'ont pas retrouvé d'élévation du risque de cancer du sein en
fonction de l'âge de début de la CO, 1 seul résultat était statistiquement significatif.
Les résultats sont donc contradictoires. Aucune tendance claire n'émerge.
136
3.8.
Utilisation par rapport à la première grossesse à
terme (PGAT)
Le tableau XXI montre les 19 études (2 C, 7 P, 10 H) ayant évalué cette association.
Parmis elles, 7 (1 C, 5 P, 1 H) ont retrouvé une élévation du risque de cancer du sein
en cas de prise de CO avant une PGAT ou un risque plus élevé en cas d‟utilisation
avant une PGAT plutôt qu‟après. 1 seul résultat était statistiquement significatif.
Cependant, 6 études (6 H) ont retrouvé une association plus forte entre le risque de
cancer du sein et l'usage de la CO après une première grossesse à terme plutôt
qu‟avant. 2 études ont rapporté un résultat statistiquement significatif.
Enfin, 5 études (1 C, 2 P , 2 H) n'ont pas retrouvé d'association entre le risque de
cancer et le moment de la prise d'une CO par rapport à la PGAT. 1 seul résultat était
statistiquement significatif.
Seule l'étude de Palmer [94] a retrouvé, chez les femmes de moins de 45 ans, des
estimations du RR élevées avant une PGAT qui diminuaient avec une durée
d'utilisation qui augmentait. Par contre, le RR après une PGAT augmentait avec la
durée d'utilisation. Ces résultats sont à considérer avec prudence car les effectifs
dans cette classe d‟âge étaient limités.
3.9.
Dose d'estrogène
Seules 5 études (1 C, 3 P, 1 H) ont évalué s'il existait une association entre le risque
de cancer du sein et la dose d'estrogène contenu dans les COs. Elles sont
regroupées dans le tableau XXII.
L'étude de Dumeaux 2003 [65] indiquait une association significative entre la dose
cumulative d'estrogène et le risque de cancer du sein : elle retrouvait un risque plus
élevé pour les femmes qui avaient reçu une dose cumulative > 100 mg d'estrogène.
Après stratification sur la dose cumulative de progestatifs, on retrouvait la même
tendance associée avec la dose totale d'estrogène pour les femmes qui avaient
utilisé des COs contenant de faibles doses de lévonorgestrel ou de mégestrol.
Ces résultats étaient statistiquement significatifs.
Dans l'étude d'Althuis [71], une dose d'EE > 35 μg était significativement associée à
un plus haut risque de cancer du sein et ce, dans les 2 classes d'âge (< 35 ans et
35-44 ans).
Pour Ursin 1998 [78], l'utilisation de CO ≥ 50 μg d'estrogène pendant 12 ans ou plus,
137
était associé avec une élévation non significative du risque de cancer du sein.
De même, dans l'étude de Rosenberg 1996 [90], concernant les femmes de 25 à 34
ans, l'utilisation de CO ≥ 50 μg d'estrogène pendant au moins 5 ans était associée de
façon significative à une élévation du risque de cancer du sein. Les résultats ne sont
pas modifiés par la durée d'utilisation, ou l'utilisation récente (dans les 6 mois
précédant la date de référence) de façon significative.
Seul, Marchbanks [72] n‟a pas retrouvé d'association entre le risque de cancer du
sein et la dose d'estrogène contenue dans les COC, les résultats de cette étude
étant significatifs statistiquement sauf pour les femmes de 35 à 44 ans.
3.10.
Année de la première utilisation
2 études ont évalué l'association entre le risque de cancer du sein et l'année de la
première prise d'une CO. Elles sont présentées dans le tableau XXIII.
Dans l'étude de Swenney [69], les utilisatrices récentes (≤ 5ans) ayant pris la pilule
avant 1980, avaient un risque légèrement plus élevé que celles qui l‟avaient pris
entre 1980 et 1990 et après 1990.
Chie [88] a retrouvé un risque plus élevé chez les utilisatrices avant 1980 et encore
plus élevé avant 1971.
Puisque l'année de la première utilisation n'était pas associée avec l'âge à la
première utilisation ni avec la durée d'utilisation, leurs effets sur le cancer du sein ne
pouvaient pas être expliqués les uns par les autres.
Ces résultats étaient statistiquement significatifs.
Ces résultats suggèrent que les marques les plus anciennes et fortement dosées en
estrogène et en progestatif puissent augmenter le risque de cancer du sein.
3.11.
Type de pilule
2 études (2 C) ont présenté leur résultats en fonction du type de pilule (voir tableau
XXIV).
Kumle [66] a retrouvé dans son étude prospective réalisée en 2002, un RR
d'apparition de cancers infiltrants sous pilule similaire que la pilule soit
138
estroprogestative (RR=1,5 ; IC à 95% : 1,0-2,0) ou progestative pure (RR=1,6 ; IC à
95 % : 1,0-2,4). L'action des progestatifs sur l'épithélium mammaire reste donc un
sujet controversé.
De même, l'étude de Dumeaux 2003 [65] ne retrouve pas de différence significative
du risque de cancer du sein que la pilule soit microprogestative ou estroprogestative.
Cependant, le risque était augmenté de façon significative avec la durée d'utilisation
pour les pilules de seconde génération.
3.12.
Type de progestatif
L'étude de Dumeaux 2003 [65] présentée dans le tableau XXV, retrouve un risque
plus élevé pour une dose cumulative basse de lévonorgestrel.par rapport à une dose
cumulative plus haute.
De même, le risque est plus élevé pour une dose cumulative basse
de
noréthistérone et d‟acétate de chlormadinone, mais ces 2 résultats ne sont pas
statistiquement significatifs.
Excepté pour le lévonorgestrel, il n'a pas été retrouvé de tendance significative pour
une augmentation du risque de cancer du sein selon la dose cumulée des autres
progestatifs.
139
140
141
142
143
144
145
146
147
148
149
150
151
152
153
Tableau XXIV : Estimations du risque de cancer du sein selon le type de pilule
Population de l'étude
Premier auteur
Année de publication
DUM EAUX
2003 [65]
Schéma
d'étude‡
C
Age au
début
du suivi
NR*
Type de
pilule
Durée
d'utilisation
(ans)
Uiltisatrices
Non
utilisatrices
Utilisatrices
Non utilisatrices
RR
(IC à 95%)
0
1ère génération
Š3
68109 PA†
212 487 PA
113
305
1,25
(1,01-1,55)
>3
58 179 PA
212 487 PA
102
305
1,21
(0,96-1,51)
Š3
45 252 PA
212 487 PA
52
305
1,09
(0,81-1,48)
>3
36 322 PA
212 487 PA
55
305
1,45
(1,08-1,96)
Š3
9111 PA
212 487 PA
7
305
0,77
(0,36-1,64)
>3
4086 PA
212 487 PA
5
305
1,11
(0,45-2,69)
Š3
38611 PA
212 487 PA
42
305
0,85
(0,62-1,17)
>3
16 651 PA
212 487 PA
26
305
1,14
(0,77-1,70)
2 189
28 171
25
261
1,6
(1,0-2,4)
6 691
28 171
60
261
1,5
(1,0-2,0)
"
"
2èm e génération
"
"
3èm e génération
"
"
m icroprogestative
"
KUM LE
"
[66]
C
30-49
Cas de cancers du sein
Groupe de
référence (non
utilisatrices) :
nombre de mois
d'utilisation
0
PUP
COC
Usage en cours
ou récent
Usage en cours
ou récent
* NR : Non rapporté
† PA : Personnes-années de suivi
‡ Schém a de l'étude
C : étude de cohorte
154
Tableau XXV : Estimations du risque de cancer du sein selon le type progestatif
Population de l'étude
Premier auteur
Date de publication
DUM EAUX 2003 [65]
Schéma
d'étude‡
Groupe de
référence (non
utilisatrices) :
nombre de mois
d'utilisation
Progestatif
C
0
Groupe de la
Noréthistérone
Dose
cumulative de
Non
Uiltisatrices
progestatif
utilisatrices
(g)
Groupe du
Lévonorgestrel
"
"
Désogestrel
"
"
Acétate de
chlorm adinone
Utilisatrices
Non utilisatrices
RR
(IC à 95%)
(0,91-1,60)
<1
35 171 PA† 212487 PA
56
305
1,2
• 1
27 092 PA 212487 PA
47
305
1,12 (0,82-1,51)
< 0,3
58 205 PA 212487 PA
84
305
1,31 (1,01-1,68)
• 0,3
42 738 PA 212487 PA
72
305
1,28 (0,98-1,66)
< 0,1
6 084 PA
212487 PA
4
305
0,63
• 0,1
4426 PA
212487 PA
7
305
1,48 (0,69-3,16)
< 0,3
824 PA
212487 PA
3
305
1,85 (0,59-5,77)
• 0,3
664 PA
212487 PA
1
305
0,77 (0,11 -5,51)
"
"
Cas de cancers du sein
"
† PA : Personnes-années de suivi
‡ Schém a de l'étude
C : étude de cohorte
155
(0,23-1,7)
DISCUSSION
156
1. Synthèse des résultats
Les principaux résultats émergeant de cette revue de la littérature sont les suivants :
Concernant le risque de cancer du sein en relation avec la prise globale d'une CO ,
la plupart des études ont rapporté une élévation du risque de cancer du sein
(presque la moitié d'entre elles ayant des résultats statistiquement non significatifs).
En cas d'usage en cours (dans les 2 dernières années précédant la date de
référence) ou récent (dans les 5 dernières années précédant la date de référence), la
plupart des études ont retrouvé une association avec le risque de cancer du sein.
Concernant un intervalle long depuis la dernière utilisation, on retrouvait une
persistance du risque après 10 ou après 15 ans d'arrêt de la CO, et une absence
d'élévation du risque 20 ans après l'arrêt de la CO.
Il n'a pas été retrouvé de tendance claire pour une élévation du risque en fonction de
la durée d'utilisation, même après prise en compte de son caractère récent.
Une augmentation du risque de cancer du sein parmi les utilisatrices de COs âgées
de moins de 35 ans au moment du diagnostic a été constatée.
Chez ces femmes, il persiste une élévation significative du risque par rapport aux
femmes plus âgées, une fois le caractère récent de l‟utilisation pris en compte.
Malgré le peu de données sur le risque de cancer du sein lié à la prise d'une CO en
fonction du statut ménopausique au moment du diagnostic, les résultats étaient en
faveur d'une discrète élévation de ce risque chez les femmes en préménopause.
Aucune tendance claire n'a émergé en fonction de l'âge à la première utilisation et de
l'utilisation avant ou après une PGAT.
Nos résultats étaient en faveur de l'existence d'une association entre le risque de
cancer du sein et l'utilisation de pilules plus fortement dosées en estrogènes.
157
De même, il existait une élévation du risque de cancer du sein en cas de début d'une
CO avant 1971 ou avant 1980, suggérant que les pilules plus anciennes et fortement
dosées en estrogènes et en progestatifs pouvaient augmenter le risque de cancer du
sein.
Dans notre sélection d'études, il existait trop peu de données concernant le risque lié
au type du progestatif contenu dans les contraceptifs oraux combinés et concernant
les pilules progestatives pures.
158
2. Limitations, forces et faiblesses du travail
Cette revue qualitative de la littérature regroupe les données de 40 études
épidémiologiques afin d'estimer s'il existe une association entre le risque de cancer
du sein et la prise d'une contraception orale, et de préciser si certaines conditions
d'utilisation d'une CO sont associées ou non au risque de cancer du sein.
Les qualités de cette revue comprennent son caractère méthodique, le nombre
important d'études incluses, une évaluation détaillée de la qualité de chaque étude,
le caractère relativement récent des études incluses permettant de mieux approcher
l'effet des pilules faiblement dosées prescrites à partir des années 80.
Cette revue de la littérature a été construite de façon méthodique en se conformant
au modèle PRISMA [54,55] et en s‟efforçant de répondre à la plupart de ses
exigences.
Nous n'avons pas limité notre revue aux études menées dans une aire géographique
particulière : c'est pourquoi notre sélection comporte un nombre important d'études.
Nous avons réalisé une analyse détaillée de la qualité de chaque étude en créant un
outil d'évaluation de la qualité spécialement adapté pour cette revue. Cet outil permet
de se faire une opinion plus juste sur la fiabilité des résultats, ce qui ne serait pas le
cas dans une méta-analyse regroupant les résultats de chaque étude.
Enfin, les études récentes sont plus à même d'évaluer l'influence d'une contraception
précoce sur le risque de cancer du sein.
Cependant, notre revue comporte des limitations liées au type de protocole des
études incluses : leur niveau de preuve est faible, de 2 pour les études de cohorte et
de 3 pour les études cas-témoins selon l‟échelle publiée par l‟ANAES qui comporte 4
niveaux.
Les études les plus fiables sont donc les études de cohortes, suivies par les études
cas-témoins emboîtées dans une cohorte puis par les études cas-témoins basées
dans la population et enfin par celles basées à l'hôpital.
Dans chaque catégorie, la qualité des études était assez variable : toutes
comportaient des biais, plus nombreux pour les études cas-témoins en particulier
celles basées à l'hôpital.
Les procédures mises en place pour limiter ces biais étaient variables d'une étude à
l'autre.
160
Toutes les études ont été exposées à des biais liés aux refus et aux exclusions :
ceux-ci ont été difficiles à évaluer en raison d'un manque d'information sur les nonparticipants.
Dans les études cas-témoins :
 le biais de détection était un biais de sélection qui n'a été pris en compte que
dans 11 études ;
 le biais d'anamnèse a été limité par l'insu des participants seulement dans 2
études ;
 le biais de mesure de l'exposition lié à l'enquêteur n'a été limité par l'insu de
l'enquêteur sur le statut cas ou témoin des participants que dans 1 étude.
Cependant, l'augmentation du risque de cancer du sein a été observée dans des
études basées à la fois à l'hôpital et dans la population, ce qui suggère que les biais
de sélection des cas et des témoins n'étaient pas l'explication des résultats
observés.
Parmi les cohortes, 4 études ont rapporté un taux de perdus de vue de 5 à 10 % et
comportaient donc un probable biais de sélection lié aux perdus de vue.
Le biais de détection qui était un biais de mesure de la maladie pour ce type
d'enquête, a été pris en compte dans 4 études par ajustement sur le nombre de
mammographie et de FCV.
Le biais dans la mesure de la maladie lié à l'enquêteur n'a été pris en compte que
dans une seule étude par l'usage d'une procédure d'insu de l'enquêteur.
Les facteurs de confusion pris en compte étaient assez variables d'une étude à
l'autre ; certains facteurs de confusion importants comme l'utilisation d'un traitement
hormonal de la ménopause n'ont pas toujours été pris en compte, ce qui a pu
conduire à une surestimation du risque.
C'est pourquoi, comme cela a été mis en évidence dans l'analyse de la qualité
méthodologique des études, les résultats de ces études peuvent être dus à des biais
ou à des facteurs de confusion. Ils doivent donc être interprétés avec prudence.
De plus, notre revue peut comporter en elle-même certains biais : biais d'indexation,
biais de publication et biais d'information.
161
En effet, il n'y a pas de modèle unique qui puisse être utilisé pour rechercher les
études observationnelles publiées dans Medline. Bien que les termes utilisés dans
notre équation de recherche appartiennent au thésaurus Mesh, certaines études ont
pu être indexées avec d'autres termes et échapper ainsi à notre recherche [97].
Par ailleurs, nous avons utilisé seulement 2 sources pour notre recherche
bibliographique : la base de données Pubmed et l'analyse des références
bibliographiques des articles identifiés.
Dans ces circonstances, un biais de publication peut apparaître. En effet, dans les
revues d'essais cliniques randomisés, le biais de publication est dû au fait que les
études présentant des résultats positifs et statistiquement significatifs ont beaucoup
plus de chances d'être publiées [98, 104]. Cela conduit à surestimer l'importance de
l'association. Ce biais peut être limité par une recherche bibliographique exhaustive
explorant plusieurs bases de données, la littérature grise....
Cependant, les bénéfices d'une recherche exhaustive d'études non randomisées ne
sont pas certains [98] ; il est possible que les études qui sont les plus difficiles à
trouver soient les plus biaisées, si la difficulté d'identification est liée à un protocole
de faible niveau de preuve et à un échantillon de petite taille. De plus, il n'est pas
certain que des études manquantes avec des résultats non significatifs puissent être
identifiées : il n'y a pas de registre des études non randomisées contrairement aux
essais cliniques randomisés [98].
Il existe également un biais de sélection des études lié à la langue puisque nous
avons limité notre revue aux études publiées en anglais et en français.
Les informations utilisées sont celles contenues dans les articles publiés. Dans
quelques cas, ces informations n'étaient pas claires en ce qui concerne la qualité de
l'étude, et les résultats parfois rapportés sans intervalle de confiance. Nous avons
donc rapporté les résultats tels quels sans émettre d'hypothèse sur ceux-ci.
Nous avons été amenés à prendre en compte des résultats statistiquement non
significatifs.
Cependant, nous avons réalisé la même analyse en ne prenant en compte que les
résultats statistiquement significatifs qu'ils soient en faveur ou non d'une association
entre le risque de cancer du sein et l'usage de la CO.
162
Les résultats sont demeurés inchangés sauf pour la durée totale d'utilisation et le
statut ménopausique : sur ces deux sujets, il a été impossible de conclure.
Les COs étudiés sont principalement des COC.
Un manque de données sur la composition des COC ainsi que la non-distinction
entre COC et PUP dans certaines études, ont empêché une analyse du risque de
cancer du sein en fonction de la composition de la pilule.
Dans la plupart des études, des COC contenant au moins 50 μg d'estrogène ont été
évalués sans différenciation avec des COC plus faiblement dosés.
La majorité des études n'a pas évalué le type ni la dose du progestatif associé.
163
3. Mise en perspective
Les meilleures données disponibles sur la contraception orale et le risque de cancer
du sein demeurent à ce jour celles de la méta-analyse d'Oxford de 1996
(Collaborative Group on Hormonal Factors in Breast Cancer) [18,19].
Ce type d'étude a un niveau de preuve de 1 sur l'échelle de l'ANAES.
Cette méta-analyse a réanalysé l'ensemble des données individuelles de 54 études,
regroupant 153 536 femmes (dont 53 297 femmes atteintes de cancer du sein).
Ces données correspondent à 90 % des données épidémiologiques mondiales
existant sur le sujet, à cette époque.
3.1.
Risque global
Dans la méta-analyse de 1996 [18,19], le risque de cancer du sein des utilisatrices
de CO était globalement de 1,07 +/- 0,017, par rapport aux non-utilisatrices.
Cette augmentation du risque était très faible, mais significative en raison du nombre
très élevé de femmes concernées.
Le caractère qualitatif de notre revue ne nous a pas permis pas de chiffrer le risque
global, mais la majorité des études ont présenté un RR de plus de 1,2.
3.2.
Intervalle depuis la dernière utilisation
Dans la méta-analyse d'Oxford [18,19], la caractéristique la plus importante associée
à une augmentation du risque de cancer du sein semblait être l'utilisation
« récente » : CO en cours ou arrêt depuis moins de 5 ans.
Le risque semblait majoré pour les utilisatrices en cours de contraception : RR=1,24
(IC à 95 % : 1,15-1,33).
Chez les femmes qui avaient arrêté la CO, le risque diminuait progressivement dans
les 10 ans qui suivaient l'arrêt : RR=1,16 (IC à 95 % : 1,08-1,23) 1 à 4 ans après
l'arrêt, RR=1,07 (IC à 95 % : 1,02-1,13) 5 à 9 ans après l'arrêt.
Il n'y avait plus d'élévation du risque après 10 ans d'arrêt : RR=1,01 (IC à 95 % :
0.96-1.05) ; les anciennes utilisatrices retrouvaient un risque de cancer du sein
identique à celui des non-utilisatrices.
Dans notre revue, cette tendance à l'élévation du risque de cancer du sein en cas
d'utilisation en cours ou récente a été retrouvée.
164
Contrairement à la méta-analyse où il n'y avait pas d'excès de risque 10 ans après
l'arrêt de la pilule, une persistance du risque de cancer du sein après 10 à 15 ans
d'arrêt de la CO a été observée dans la plupart des études de notre revue.
Cependant, on ne retrouvait plus d'élévation du risque de cancer du sein 20 ans
après l'arrêt de la CO.
La raison pour laquelle nous n'avons pu confirmer ces résultats n'est pas évidente.
3.3.
Durée totale d'utilisation
La méta-analyse d'Oxford [18,19] a retrouvé une association faible entre une durée
d'utilisation croissante et l'augmentation du risque de cancer du sein (p=0,05).
Toutefois, après prise en compte de l'intervalle de temps depuis la dernière
utilisation, cette association disparaissait lorsque la CO avait été arrêtée depuis 10
ans ou plus.
Nos résultats concernant une association entre le risque de cancer du sein et la
durée totale d'utilisation de la CO étaient contradictoires et ne permettaient pas de
conclure formellement à une élévation du risque en fonction de la durée d'utilisation,
même après prise en compte de son caractère récent.
3.4.
Age au moment du diagnostic
Nous avons constaté une augmentation du risque de cancer du sein parmi les
utilisatrices de CO de moins de 35 ans au moment du diagnostic, ainsi que parmi les
utilisatrices en cours et récentes de moins de 35 ans.
Nos résultats sont contradictoires en ce qui concerne les femmes de moins de 40 à
45 ans et ne permettent pas de conclure.
Cependant, 2 études ont retrouvé une élévation du risque de cancer du sein chez les
femmes de moins de 50 ans par rapport aux femmes plus âgées.
Nos résultats ne concordent pas avec ceux de la méta-analyse d'Oxford [18,19] qui
n'a pas mis en évidence d'association entre l'usage de la CO et le risque de cancer
du sein selon l'âge au diagnostic, une fois que le temps depuis la dernière utilisation
165
avait été pris en compte.
Cependant, une autre méta-analyse plus récente publiée en 2006 par Kahlenborn
[99], portant sur 34 études cas-témoins menées depuis 1980, et s'intéressant
exclusivement aux femmes en préménopause ou âgées de moins de 50 ans au
moment du diagnostic, a retrouvé un OR global de 1,19 (IC à 95 % : 1,09-1,29).
De plus, la monographie du CIRC de 2007 [20], qui a analysé de façon qualitative
plus de 10 études de cohorte et 60 études cas-témoins évaluant les relations entre la
COC et le cancer du sein, rapporte une augmentation du RR de cancer du sein chez
les femmes âgées de moins de 35 ans au moment du diagnostic pour les utilisatrices
en cours ou récentes.
Dans cette monographie, en ce qui concerne les femmes plus âgées, la plupart des
études n'ont montré aucune augmentation globale du risque bien que les estimations
du RR étaient augmentées chez les femmes plus âgées dans quelques études.
Nos résultats, en ce qui concerne les femmes de plus de 50 ans, sont
contradictoires, ne permettant pas de conclure.
3.5.
Statut ménopausique au moment du diagnostic
Contrairement à la méta-analyse de 1996 [18,19] qui ne retrouvait pas de différence
de risque entre les femmes en pré- et en postménopause après prise en compte du
caractère récent de la CO, nos résultats étaient en faveur d'une discrète élévation de
ce risque chez les femmes en préménopause.
3.6.
L'âge lors de la première utilisation
Aucune tendance claire n'émerge de notre synthèse en fonction de l'âge à la
première utilisation.
Dans la méta-analyse d'Oxford [18,19], l'âge lors de la première utilisation semblait
être un facteur déterminant : le risque était plus important en cas de début d'une CO
avant l'âge de 20 ans (RR=1,22 +/- 0,04).
Pour les utilisatrices en cours ou récentes, le risque était d'autant plus élevé que
166
l'âge à la première utilisation avait été précoce : pour une première utilisation avant
l'âge de 20 ans, le RR de cancer du sein chez les utilisatrices en cours était de 1,59
(+/-0,093), chez les utilisatrices récentes de 1,49 (+/-0,093), alors qu'il était de 1,24
(+/-0,038) pour l'ensemble des femmes utilisatrices en cours.
Ces résultats évoquaient la possibilité d'un rôle particulier des hormones exogènes
pendant l'adolescence, période où le sein est le plus sensible à l'action des
carcinogènes.
3.7.
Prise d'une CO par rapport à la PGAT
Bien que plusieurs études individuelles ont mis en évidence une élévation du risque
de cancer du sein en cas de prise d'une CO avant une PGAT, les résultats de notre
synthèse ont été contradictoires, empêchant toute conclusion.
La méta-analyse d'Oxford [18,19] a conclu que le schéma du risque selon l'intervalle
depuis la dernière utilisation était similaire parmi les femmes pares, qu'elles aient pris
une CO avant ou après une PGAT.
Cependant, Kahlenborn [99] a retrouvé dans sa méta-analyse de 2006 que le risque
chez les femmes pares de moins de 50 ans ou en préménopause, qui ont pris une
CO avant leur PGAT (OR=1,44 ; IC à 95 % : 1,28-1,62) était plus élevé que si la CO
avait été utilisée après la PGAT (OR=1,15 ; IC à 95 % : 1,06-1,26).
L'association entre le risque de cancer du sein et la prise d'une CO avant la PGAT
était plus élevée pour les femmes pares qui avaient pris une CO pendant au moins 4
ans avant une PGAT (OR=1,52 ; IC à 95 % : 1,26-1,82).
Cette méta-analyse va donc dans le sens d'un effet promoteur de la contraception
orale sur des cancers préexistants. Le risque augmente chez les femmes qui ont pris
la pilule avant la naissance de leur premier enfant, une période où le tissu mammaire
est considéré comme plus vulnérable aux carcinogènes.
167
3.8.
Dose d'estrogène
Dans la méta-analyse d'Oxford [18,19], seules 27 études ont permis de regrouper les
informations concernant le contenu des différentes pilules.
La majorité des femmes avaient débuté leur CO avant 1970 et l'avaient arrêtée avant
1980. La plupart des pilules utilisées alors ne sont plus prescrites actuellement.
Aucune variation significative du risque n'a été observée en fonction du type
d'estrogène ou de progestatif, ni en fonction de la dose d'estrogène, que ce soit chez
les utilisatrices en cours ou ne prenant plus la pilule.
Cependant, chez les femmes ayant arrêté la pilule depuis plus de 10 ans, il a été
observé une diminution du risque de cancer du sein en fonction de l'élévation de la
dose d'estrogène. Il faut noter toutefois que pour ce type de pilule ancienne, plus la
dose d'estrogènes est élevée, plus la dose de progestatif est puissante.
Par contre, notre synthèse a retrouvé l'existence d'une association entre le risque de
cancer du sein et l'utilisation de pilules plus fortement dosées en estrogène, ainsi
qu'une élévation du risque de cancer du sein en cas de début d'une CO avant 1971
ou avant 1980, suggérant que les pilules plus anciennes et fortement dosées en
estrogènes et en progestatifs pouvaient augmenter le risque de cancer du sein.
3.9.
Type de progestatif
Dans notre sélection d'études, il existait trop peu de données concernant le risque lié
au type du progestatif contenu dans les contraceptifs oraux combinés. Dans la métaanalyse d‟Oxford, la contraception progestative seule n'a été utilisée que par 0,8 %
des femmes. Aucune modification globale du risque n'était observée RR=1,12 +/0,064) quel que soit le mode d'administration orale ou injectable.
4. Interprétation des résultats
Les résultats des études de notre revue sont contradictoires. Comment expliquer les
discordances entre ces études ?
Les études de cohortes sont beaucoup moins nombreuses que les études castémoins, qui sont plus sujettes à des biais de sélection, de détection et d'anamnèse
qui peuvent conduire à des résultats faux.
168
Cependant, l'augmentation du risque de cancer du sein a été observée aussi bien
dans des études basées à l'hôpital que dans la population, ce qui suggère que les
biais de sélection des cas et des témoins ne sont pas l'explication des résultats
observés.
Les hormones sont considérées comme jouant un rôle central dans l'étiologie du
cancer du sein, comme cela a été montré par des associations consistantes entre les
facteurs de risque reproductifs et le risque de cancer du sein.
L'effet hormonal des contraceptifs oraux sur le sein est complexe.
S'ils provoquent souvent une anovulation protectrice, le mélange d'estrogène et de
progestérone peut stimuler l'activité mitotique du tissu mammaire.
Les estrogènes ont un rôle de promotion dans le développement du cancer
mammaire chez le rongeur et exercent à la fois des effets prolifératifs directs et
indirects sur les cultures de cellules cancéreuses humaines.
Ces données sont donc en faveur de l'hypothèse que les estrogènes et leurs
métabolites sont liés à l'initiation et à la promotion des cancers du sein, mais que ces
liaisons sont complexes.
L'hypothèse d'un « effet des estrogènes augmentés par les progestatifs » a été
avancée, supposant que les estrogènes et les progestatifs combinés produisent un
plus haut taux de mitoses dans l'épithélium du sein que les estrogènes seuls.
Pour être active, la progestérone a besoin de l'action des estrogènes sur les tissus
cibles : seuls les estrogènes sont capables de déterminer la synthèse et
l'augmentation des récepteurs à la progestérone.
La progestérone a un effet sur un tissu mammaire préalablement exposé aux
estrogènes et en synergie produit une prolifération alvéolo-ascinaire.
De plus, l'activité mitotique maximale dans le sein apparaît pendant la phase lutéale
du cycle menstruel. Ceci suggère que les COC puissent exercer une plus grande
influence sur le risque de cancer du sein que les progestatifs seuls.
Les effets des différents progestatifs sur le tissu mammaire humain ne sont pas clairs
et aucune classification appropriée n'est disponible. Ils sont variables selon les
molécules utilisées et peuvent être médiés par des effets collatéraux de ces produits,
169
notamment sur les enzymes mammaires en déviant le métabolisme vers la
production in situ d'estrogènes. Il n'est pas possible de généraliser les effets
observés à l'ensemble des molécules progestatives, car elles possèdent chacune, en
dehors de leur action progestative, des effets propres par le biais d'autres récepteurs
stéroïdiens.
Dans notre revue, le risque de cancer du sein est augmenté en cas d'utilisation en
cours ou récente de la CO, mais persiste après 10 à 15 ans d'arrêt et ne disparaît
qu'après au moins 20 ans d'arrêt.
L'élévation du risque de cancer du sein chez les utilisatrices en cours ou récentes a
été attribuée en partie par certains auteurs à un biais de détection (surveillance
médicale accrue des utilisatrices de CO créant une avance du diagnostic).
Cependant, elle pourrait être compatible avec un effet de promotion par les CO, de
tumeurs déjà initiées.
Certains auteurs ont évoqué un effet promoteur de la pilule sur la carcinogenèse à
court terme et un effet protecteur à long terme par analogie avec la grossesse [100].
Dans notre revue, nous n'avons retrouvé qu'une seule étude montrant un effet
protecteur au moins 20 ans après l'arrêt.
La COC semble être plus risquée, en ce qui concerne le cancer du sein, chez les
femmes de moins de 35 ans que chez les femmes plus âgées.
Cependant, les femmes plus jeunes sont plus susceptibles d'être des utilisatrices
récentes.
Or, l'augmentation du risque persiste chez ces femmes, même après prise en
compte du caractère récent de l'utilisation.
Il a été suggéré que l'augmentation du risque de cancer du sein était associée avec
des expositions à des pilules anciennes fortement dosées, mais que les pilules
modernes faiblement dosées ne seraient pas associées au cancer du sein (Althuis
2003 [71] Marchbanks 2002 [72]).
Nos résultats montrent l'existence d'une association entre le risque de cancer du sein
et l'utilisation de pilules plus fortement dosées en estrogène.
De même, il existe une élévation du risque de cancer du sein en cas de début d'une
CO avant 1971 ou avant 1980, suggérant que les pilules plus anciennes et fortement
dosées en estrogènes et en progestatifs puissent augmenter le risque de cancer du
170
sein.
Il est difficile de déterminer si l'association mise en évidence entre le risque de
cancer du sein et l'utilisation de la CO est due à une relation causale ou à l'existence
de biais (notamment de détection) et de facteurs de confusion non pris en compte.
L'analyse de la mortalité liée à la CO peut aider à se faire une idée plus claire.
Elle a notamment été étudiée au sein de l‟importante cohorte de la RCGP (Royal
College of General Practionners) regroupant 46 112 femmes suivies pendant 39 ans.
Les derniers résultats de cette étude [105] ont été publiés très récemment.
Ils montrent un taux de mortalité toutes causes confondues significativement plus
bas chez les utilisatrices de CO (RR = 0,88 ; IC à 95% : 0,82-0,93). Le taux de
mortalité par cancer du sein est également plus bas (RR = 0,90 ; IC à 95% : 0,741,08), de même que celui lié aux autres cancers, sauf le cancer du col et le cancer
du poumon. Cependant les femmes de moins de 30 ans ont un taux de mortalité
toutes causes confondues plus élevé (RR = 2,85 ; IC à 95% : 1,17-6,94). A partir de
50 ans, le taux de mortalité des utilisatrices est significativement plus bas que celui
des non utilisatrices.
Il a été observé une augmentation du RR de décès toutes causes confondues chez
les utilisatrices âgées de moins de 45 ans qui ont cessé leur CO 5 à 9 ans
auparavant . Mais il n‟existe pas d'augmentation chez celle qui ont arrêté depuis plus
longtemps.
Les résultats concernant le risque de survenue d‟un cancer du sein en liaison avec la
CO doivent être interprétés dans le contexte du risque absolu (RA).
Il est important de souligner la différence entre le RR (une mesure de l'association
qui est importante pour évaluer la causalité), et le RA (une mesure de l'effet réel
d'une exposition dans une population).
Le RA est le surplus de cas de cancer du sein dû à l'exposition aux CO.
La méta-analyse d'Oxford [18,19] a estimé que le nombre de cas en excès de cancer
du sein qu'on s'attendait à diagnostiquer jusqu'à 10 ans après l'arrêt de la pilule
parmi 10 000 femmes européennes ou nord-américaines est de 0.5 cas pour la prise
171
de pilule entre 16 et 19 ans, 1.5 cas pour la prise de la pilule de 20 à 24 ans, et 4.7
cas pour la prise de la pilule entre 25 et 29 ans. Ainsi, en éliminant l'usage de la
pilule, on s'attendrait à prévenir seulement une petite fraction de cas de cancer du
sein à la préménopause.
L'effet de la CO semble donc apparaître à un âge où le risque global de cancer du
sein demeure bas. Le risque de la contraception hormonale décline après l'arrêt de
l'utilisation et ainsi n'apparaît pas affecter substantiellement le risque de cancer du
sein sur la vie.
172
5. Implications
En dépit d'un nombre important d'études sur ce sujet, les résultats des études
épidémiologiques prises individuellement demeurent contradictoires.
Il
est
donc
nécessaire
de
poursuivre
les
recherches
par
des
études
observationnelles, mais aussi des revues de synthèse.
En effet, des données supplémentaires sont nécessaires, notamment en ce qui
concerne les femmes jeunes.
De plus, les risques de cancer du sein associés avec les formulations les plus
récentes de pilule sont encore inconnus.
Ces études devraient recueillir les informations nécessaires à l'évaluation de
l'existence ou non d'un biais de détection et utiliser des procédures d'insu afin de
limiter les biais dans la mesure de l'exposition.
Enfin, notre travail pourrait servir de base pour la réalisation d'une méta-analyse sur
données individuelles, qui est un autre moyen de prendre en compte l'hétérogénéité
des études [103].
Une recherche bibliographique spécifique devrait permettre d‟étudier le risque lié à la
contraception progestative seule sur le cancer du sein ; le terme de contraception
orale que nous avons utilisé, a mis en évidence des études s‟intéressant
principalement aux contraceptifs oraux combinés.
En pratique, que répondre à une femme inquiète sur le risque carcinologique
mammaire de la pilule estroprogestative ?
Il est du devoir du médecin (généraliste ou gynécologue) de fournir à ses patientes
l'information la plus précise et la plus à jour sur les risques potentiels associés avec
les CO afin qu'elles puissent prendre leurs propres décisions en connaissance de
cause.
Cependant, il est nécessaire de mettre en parallèle les risques relatifs et absolus,
ces derniers représentant une mesure de l'effet réel de la CO dans une population.
De plus, les résultats doivent être replacés dans le cadre de la balance bénéfices
173
risques de la CO, en rappelant le risque d'une grossesse non désirée.
Outre ses bénéfices contraceptifs, la contraception orale estroprogestative permet
[101] :
 une prévention des troubles du cycle (amélioration de la régularité des cycles,
diminution du volume des règles diminution de la fréquence et de la sévérité
de la dysménorrhée primaire) ;
 une protection contre certains cancers (ovaire, endomètre et colo-rectal) ;
 une prévention de l'ostéopénie postménopausique lorsqu'elle est utilisée en
péri-ménopause ;
 une diminution de l'incidence des kystes fonctionnels ovariens, des fibromes
utérins, des infections utéro-anexielles ;
 une diminution d'incidence de la mastose fibrokystique, des fibro-adénomes ;
 un effet favorable sur l'acné.
Les autres options contraceptives disponibles et appropriées doivent être présentées
avec précision.
Le médecin doit prendre en considération le système de valeur du patient, et ses
craintes afin de l'aider à faire le meilleur choix en connaissance de cause.
Il doit réévaluer périodiquement le choix du patient quand la situation de celui-ci
change, au niveau médical ou dans sa vie.
174
CONCLUSION
175
Dans notre revue de la littérature, il existait globalement une association entre le
risque de cancer du sein et l'utilisation d'une contraception orale.
Cette élévation concernait les utilisatrices en cours ou récentes, et plus
particulièrement les femmes âgées de moins de 35 ans au moment du diagnostic.
Il fallait attendre au moins 20 ans après l'arrêt de l'utilisation de la CO pour ne pas
observer de risque lié à la CO.
Il semblait exister un risque de cancer du sein plus élevé en cas d'utilisation de
pilules contenant une forte dose d'estrogène par rapport à des pilules plus faiblement
dosées.
L'association entre le risque de cancer du sein et une utilisation en cours ou récente
de la CO, pourrait être le reflet d'un effet de promotion de la CO sur des tumeurs déjà
initiées.
Il est impossible d'affirmer que l'association qui se dégage de cette étude, entre le
risque de cancer du sein et la CO, est causale en raison des nombreux biais et
facteurs de confusion inhérents aux études observationnelles.
Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour clarifier le lien entre CO et
cancer du sein, concernant en particulier les femmes jeunes.
La réalisation d'une revue méthodique qualitative a été préférée à la réalisation d'une
méta-analyse sur données agrégées en raison de l'hétérogénéité des études.
Ce travail peut cependant servir de base à la réalisation d'une méta-analyse sur
données individuelles qui est un deuxième moyen de gérer l'hétérogénéité des
études.
Vis-à-vis de nos patientes, il est essentiel de replacer le risque de cancer du sein lié
à la CO dans le cadre du RA (mesurant l'effet réel de la CO) et dans la perspective
de la balance bénéfices risques.
176
BIBLIOGRAPHIE
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181
ANNEXES
182
1.
Grille de lecture d'une étude de cohorte traitant d'une question de causalité
Annexe 1
Titre et auteur de l'article :
Rev/Année/Vol/Pages :
Thème de l'article :
OUI
1. Les objectifs de l'étude sont clairement définis
2. Méthodologie
- Les caractéristiques des populations sont décrites
- Les modalités de constitution de la cohorte sont
précisées
- Les expositions comparées sont décrites
- Le choix du groupe de référence (= groupe non exposé)
est acceptable
- Les critères d'exclusion et d'inclusion sont décrits et
adéquats
- L'exposition est bien définie et mesurée
- Le suivi de la cohorte est complet et correctement réalisé
- L'effet attendu (survenue d‟un cancer du sein) est défini,
mesuré de façon fiable et valide
- La comparabilité des groupes est évaluée à l'entrée dans
l'étude
3. Analyse des résultats
- L'analyse statistique est adaptée
- Les résultats sont vérifiables à partir des données brutes
- L'existence d'une association est prouvée et la force de
l'association est testée
- La causalité de l'association est étudiée
- Les facteurs de confusion sont décrits et pris en compte
- Les biais sont décrits et pris en compte
Commentaires :
Conclusion :
Qualité - très bonne
- Plutôt bonne
- Faible mais acceptable
- Inacceptable
183
NON
INCOMPLET
2.
Grille de lecture d'une étude cas-témoins traitant d'une question de causalité
Annexe 2
Titre et auteur de l'article :
Rev/Année/Vol/Pages :
Thème de l'article :
OUI
1. Les objectifs de l'étude sont clairement définis
2. Méthodologie
- Les caractéristiques des populations sont décrites
- Les critères d'exclusion et d'inclusion sont décrits et
adéquats
- L'exposition est bien définie et mesurée
- La comparabilité des groupes est évaluée à l'entrée dans
l'étude
3. Analyse des résultats
- L'analyse statistique est adaptée
- Les résultats sont vérifiables à partir des données brutes
- L'existence d'une association est prouvée et la force de
l'association est testée
- La causalité de l'association est étudiée
- Les facteurs de confusion sont décrits et pris en compte
- Les biais sont décrits et pris en compte
Commentaires :
Conclusion :
Qualité - très bonne
- Plutôt bonne
- Faible mais acceptable
- Inacceptable
184
NON
INCOMPLET
TITRE EN FRANÇAIS : Contraception orale et risque de cancer du sein : revue systématique
d‟études épidémiologiques observationnelles.
TITRE EN ANGLAIS : Oral contraception and breast cancer risk : systematic review of
epidemiological and observational studies.
RESUME :
Dans la plupart des pays industrialisés, le cancer du sein occupe le premier rang des cancers féminins en
terme d'incidence et de mortalité par cancer. L‟évolution des pilules dans leurs compositions, dosages et
usages impose d‟évaluer à nouveau leur éventuelle influence sur le risque de cancer du sein.
Nous avons recherché s‟il existait une association entre l‟utilisation de la contraception orale et le risque de
cancer du sein en effectuant une revue systématique de la littérature. La qualité méthodologique des études
de cohortes et cas-témoins sélectionnées a été évaluée. Leur hétérogénéité nous a conduit à opter pour une
analyse qualitative de leurs résultats.
La plupart des études ont retrouvé une association entre l'élévation du risque de cancer du sein et l'usage de
la contraception orale, en particulier pour un usage en cours ou récent. Le risque semblait disparaître après
vingt ans d'arrêt de la pilule. Il était augmenté chez les utilisatrices de moins de 35 ans et persistait une fois le
caractère récent de l'utilisation pris en compte. Il semblait être associé à la prise de pilules fortement dosées
en estrogène. La causalité de l‟association entre le risque de cancer du sein et la contraception orale dans
notre étude ne peut être affirmée en raison des biais et facteurs de confusion inhérents aux études
observationnelles. Ce travail peut cependant servir de base à la réalisation d'une méta-analyse sur données
individuelles, autre moyen de gérer l'hétérogénéité des études.
Vis-à-vis de nos patientes, il est essentiel de replacer le risque de cancer du sein lié à la contraception orale
dans la perspective du risque absolu et de la balance bénéfices risques.
MOTS CLES : contraception orale, contraceptifs oraux, cancer du sein, revue systématique,
PRISMA, médecins généralistes, médecine générale.
185
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