Défi diagnostic - STA HealthCare Communications

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le clinicien octobre 2010
Un inconfort à la miction
François Melançon, M.D.
Défi diagnostic
Le cas de Jérémie
Jérémie, un jeune homme de 25 ans, vous consulte pour un inconfort à la
miction. Ce malaise est apparu de façon assez soudaine, il y a deux jours. Les
symptômes sont pires le matin et diminuent progressivement le soir, sans
totalement disparaître. Jérémie se plaint d’une lourdeur dans le bas-ventre et
d’un malaise aux testicules; il vous dit que sa conjointe n’a aucun symptôme.
L’examen physique est négatif – il n’y a aucune lésion sur le gland, les testicules
sont normaux et la prostate est indolore.
De quoi souffre Jérémie et de quelle façon allez-vous le traiter?
Encadré 1
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Lurétrite
Une urétrite est une inflammation de l’urètre post-traumatique ou
secondaire à une infection (voir Encadré 1); elle est généralement trans-
mise sexuellement. Il existe deux formes dominantes d’urétrites infectieuses :
l’urétrite à gonocoque (Neisseria gonorrhoeae) et l’urétrite non gonococcique
(Chlamydia trachomatis,Ureaplasma urealyticum,Mycoplasma hominis,
Mycoplasma genitalium ou Trichomonas vaginalis). Cette inflammation peut
aussi, bien que plus rarement, être causée par un lymphogranulome vénérien,
de l’herpès génital, la syphilis, une infection à mycobactéries, des bactéries
Gram négatives ou encore des infections post-virales à streptocoque secon-
daires aux anaérobies ou aux méningocoques. Lurétrite est par ailleurs
fréquemment associée à d’autres syndromes inflammatoires ou infectieux de la
région génitale (épididymite, orchite, prostatite, etc.) et de la région rectale (proc-
tite). La maladie peut même être le à des pathologies d’ordre sysmique, telles
que l’inflammation de l’iris, l’arthrite réactive (surtout chez les porteurs du gène
HLA-B27), la pneumonie et l’otite, bien que le lien entre ces dernres conditions
et lurétrite ne soit toujours pas expliqué.
Qui en souffre?
L’utrite touche les hommes autant que les femmes, mais ces dernières sont sou-
vent asymptomatiques. Elles se présentent donc plutôt à la clinique avec une vagi-
nite, une cervicite ou une cystite. L’homosexualité masculine hausse le risque de
développer une urétrite, mais les femmes homosexuelles ne voient pas leur risque
augmenter. L’incidence de la maladie est plus élee dans la population des 20 à
25 ans.
Types d’urétrite
Utrite gonococcique
Les patients souffrant d’une urétrite
gonococcique ont une période
d’incubation plus courte que ceux
souffrant d’une urétrite non
gonococcique et ils se plaignent en
général d’un début abrupt des
symptômes de dysurie et
d’écoulement.
Utrite non gonococcique
Les patients souffrant d’une urétrite
non gonococcique ont une période
d’incubation plus longue et
l’apparition de dysurie ou
d’écoulement, lorsqu’il y en a, est
subaiguë. Plusieurs autres
organismes peuvent causer une
urétrite et la culture n’apporte pas
de données supplémentaires.
Utrite post-traumatique
Lutrite post-traumatique se
produit chez 2 à 20 % des patients
utilisant un cathéter de fon
intermittente ou ayant subi une
intervention impliquant une
instrumentation génitale. Le risque
d’utrite est 10 fois plus élevé avec
les cathéters en latex qu’avec les
cathéters en silicone.
Lexamen clinique
Beaucoup de patients – 25 % de ceux
avec une utrite non gonococcique et
75 % des femmes infectées par C.
Trachomatis – sont asymptomatiques
et ne sont diagnostiqués qu’après une
revue détaillée des contacts qu’ils ont
eus avec des personnes potentielle-
ment infectées. Lorsqu’il y a présence
de symptômes, ceux-ci apparaissent
entre quatre jours et deux semaines à la
suite du contact.
La présence de sympmes
sysmiques (Encadré 2)
Sil y a présence de symptômes sys-
témiques (température, diaphorèse,
naues, etc.) il faut suspecter une
gonococcémie sysmique, une plo-
néphrite ou une arthrite réactive. Dans
ce dernier cas, on peut aussi parfois
noter une inflammation de l’iris.
À moins qu’il n’y ait présence de
symptômes systémiques, auquel cas il
faut examiner attentivement les articu-
lations et les iris, l’examen de l’ensem-
ble du corps entraîne très peu de résul-
tats positifs. On concentre donc
lexamen sur la région génitale, tout en
évitant dexaminer un patient im-
diatement aps une miction puisque le
fait d’uriner peut litralement laver
lutre, faisant dispartre l’écoule-
ment et les bactéries à cultiver.
Idéalement, l’examen devrait se faire
deux heures aps une miction.
Examen des organes génitaux
On doit dabord vérifier la psence de
sions cutaes sugrant d’autres
infections transmises sexuellement :
condylomes acumis, herpès simplex
et syphilis (voir Encadré 3 pour la liste
des diagnostics différentiels). Chez
lhomme, le prépuce doit être repoussé
pour permettre un examen aquat du
gland et du méat. Pour ce faire, on
écrase délicatement lutre, de la base
du pénis au méat, en vérifiant la
présence d’écoulement. Les testicules
sont ensuite examis pour détecter la
présence de gonflement, de douleur ou
de chaleur, symptômes sugrant une
orchite ou une épididymite. Fina-
lement, la prostate est palpée pour
sassurer de l’absence de gonflement
douloureux et de changement de
texture.
Chez la femme, on insère un doigt
ganté dans le vagin, tout en appuyant
le long de l’urètre, jusqu’au méat. Tout
écoulement est cultivé. On s’assure
ensuite de l’absence d’abcès, dont la
présence cause chaleur et douleur. On
prode aussi à un examen pelvien qui
inclue des cultures cervicales et on
sassure de labsence d’adénopathies
inguinales. Chez l’homme et la fem-
me, l’anus est examiné de manière à
noter la présence de lésions de condy-
lomes et de déchirures. Une temra-
ture anormale, un rash palmaire, une
sensibilité articulaire ou la psence
dune conjonctivite ou d’une inflam-
mation de liris sugrent fortement
une maladie systémique.
Le diagnostic
On peut diagnostiquer une utrite s’il
y a écoulement utral purulent ou
mucopurulent, devant un écouvillon-
nage urétral qui contient au moins cinq
leucocytes par champ d’immersion ou
si la première miction du matin
présente de lesrase leucocytaire au
bâtonnet ou au moins 10 leucocytes
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Défi diagnostic
le clinicien octobre 2010
Symptômes les
plus communs
Un écoulement urétral jaunâtre,
vertre ou brunâtre, parfois
sanguinolent;
De la dysurie localie au méat
(pire à la premre miction du
matin et souvent empirée par la
consommation dalcool);
Il ne devrait pas y avoir d’urgence
mictionnelle ou de fquence
augmentée. La psence de tels
symptômes suggère plutôt une
cystite ou une prostatite;
Des démangeaisons dans l’utre
persistantes entre les mictions;
Une lourdeur dans le bas-ventre
ou dans les testicules. Sil y a
douleur testiculaire, on doit penser
à une épididymite, à une orchite ou
aux deux diagnostics;
Chez la femme, les sympmes
sont parfois pires avec les
menstruations.
Dr Melaon est
omnipraticien et compte
25 années d’expérience
dont 18 en salle
d’urgence. Il a pratiqué
en cabinet privé et en
CLSC. Il est cemment
revenu à ses premières amours, soit la
decine d’urgence, la traumatologie et la
psychiatrie.
Encadré 2
Défi diagnostic
4le clinicien octobre 2010
par champ. Tous les patients souon-
nés d’utrite doivent être traités pour
N. gonorrhoeae et C. trachomatis.
Par ailleurs, l’examen de Gram
n’est plus nécessaire puisqu’il est
actuellement recommandé de traiter le
patient à la fois pour une utrite non
gonococcique et une urétrite gonococ-
cique. Lécouvillonnage urétral se fait
en inrant un coton tige d’un ou deux
centitres dans l’utre, puis il est
recommandé de procéder à des cul-
tures endocervicales chez les femmes.
En cas de dysurie
Lorsqu’il y a dysurie, une culture
d’urine peut aider à démontrer la
présence d’une cystite ou d’une
pyélonéphrite. On peut suggérer aux
patients un test de dépistage de la
syphilis et du virus de l’immunodéfi-
cience humain (VIH). En présence
duite ou d’arthrite, une investiga-
tion rhumatologique plus poussée
devrait être envisagée. À moins de
traumatisme secondaire à l’insertion
de corps étrangers, une investigation
radiologique n’est pas nécessaire.
Lorsqu’il y a eu trauma, une cystos-
copie peut être utile et une cathétérisa-
tion sus-pubienne peut être nécessaire
en présence d’un œme important
empêchant la miction.
Le traitement
Il est important d’insister sur l’impor-
tance d’éviter les relations sexuelles
tant que tous les partenaires potentiels
nauront pas été traités, de même que
sur l’usage des contraceptifs du type
barrière et sur la transmission possible
du gonocoque par les voies oroni-
tales et génito-anales. Il est aussi
recommandé de prescrire des antibio-
tiques pour diminuer la morbidité et la
transmission de la condition aux
autres. Pour ce faire, on choisit des
antibiotiques qui couvrent le gono-
coque et les autres pathones respon-
sables des urétrites. Autrement, le
risque d’une utrite post-traitement
est de 50 %. Plusieurs régimes
thérapeutiques sont possibles, mais on
privilégie les traitements unidose.
Le choix des antibiotiques
Les choix possibles d’antibiotiques
sont nombreux : azithromycine orale,
ofloxacine orale, ciprofloxacine orale,
doxycycline orale, etc. L’azythromy-
cine et la doxycycline orale traitent très
bien tous les types d’urétrite, notam-
ment celles à C. trachomatis. Étant
donné l’efficacité d’un traitement
unidose à 4 g pour chaque partenaire,
lazithromycine orale constitue un trai-
tement efficace et bien toléré. En rai-
son d’une incidence élevée de gonor-
rhée résistante aux quinolones en Asie
du Sud-Est, on doit toujours vérifier si
notre patient y a récemment séjourné.
Le suivi
Seuls les patients qui demeurent symp-
tomatiques nécessitent une culture
post-traitement. Dans la plupart des
cas, la persistance des symptômes est
secondaire à l’un des pathogènes cau-
sant l’urétrite non gonococcique. Les
patients souffrant d’urétrite non gono-
coccique peuvent être trais par un
traitement prolongé d’érythromycine
(de 14 à 28 jours). Face à un patient
souffrant d’urétrite gonococcique
résistante, on adapte le traitement en
fonction de l’antibiogramme.
Retour sur le cas
de Jérémie
Quoiqu’auparavant très actif
sexuellement, rémie est demeu
file à sa conjointe depuis qu’ils se
sont rencontrés il y a plus de six
mois. L’examen physique n’a rien
démontré de significatif et la culture
pour gonorrhée était négative.
mie et sa partenaire ont donc
été traités pour une utrite non
gonococcique avec une seule dose
d’azythromycine. Ils sont maintenant
asymptomatiques.
C
Diagnostic différentiel
Les possibilités sont nombreuses :
prostatite, infection à mycoplasme,
cystite, vaginite, infection à
chlamydia, condylomes, syphilis,
salpingite, etc. Certains problèmes
psychologiques doivent aussi
parfois être pris en compte,
notamment le sentiment de
culpabilité ressenti pour un
comportement sexuel que le
patient trouve déviant ou la
culpabilité causée par l’infidélité.
Encadré 3
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