![](//s1.studylibfr.com/store/data-gzf/1e42c1b823941206ece98ca89d7432ef/1/007206242.htmlex.zip/bg2.jpg)
Par ailleurs, l’article 1er de votre proposition de loi instaure de fait une inégalité entre les
salariés devant les heures supplémentaires. Encore faut-il en effet être imposable pour que
votre dispositif présente un intérêt, puisque vous proposez, comme en 2007, une
défiscalisation et non un crédit d’impôt.
L’essentiel, pourtant, n’est pas là. Non, la défiscalisation des heures supplémentaires n’est pas
le moyen permettant d’augmenter le pouvoir d’achat de tous les salariés. Le Conseil d’analyse
économique avait d’ailleurs épinglé cette option retenue en 2007 dans la loi TEPA. Selon lui,
en effet, si un allégement des prélèvements obligatoires sur les heures supplémentaires accroît
le pouvoir d’achat de ceux qui travaillent au-delà de la durée légale, alors en contrepartie, le
financement de cet allégement, comme l’a dit M. le ministre, réduit le revenu des salariés qui
ne font pas d’heures supplémentaires – car, in fine, il faut bien financer la mesure ! Dès lors,
les salariés exclus du dispositif paient à la place des employeurs.
Ce dispositif, coûteux pour nos finances publiques et surtout pour notre régime de protection
sociale solidaire, a en effet conduit au gel des salaires pour tous, et d’abord pour les quinze
millions de salariés qui, eux, n’effectuent pas d’heures supplémentaires ou sont à temps
partiel.
Écueil supplémentaire : les mêmes causes induisant les mêmes effets, le régime fiscal et social
des heures supplémentaires que vous proposez de rétablir a eu un impact négatif sur l’emploi
– oui, j’insiste, un impact négatif – puisqu’il incitait les entreprises à substituer des heures de
travail à de nouveaux salariés. Cette mesure a simplement eu comme effet pervers de mettre
un frein à la création d’emplois ! La question de l’emploi et de la croissance ne peut se
concevoir sans cesse à l’aune des allégements et régimes dérogatoires divers. À notre sens, il
s’agit de remettre du carburant dans le moteur par la relance du pouvoir d’achat et de
l’investissement.
Faut-il rappeler par ailleurs qu’avec le dispositif d’exonération et de défiscalisation des heures
supplémentaires, il ne s’agissait pas d’encourager le travail mais de contourner les trente-
cinq heures ? Faut-il rappeler que cette mesure a d’abord constitué une formidable aubaine,
puisqu’un certain nombre d’heures supplémentaires effectuées mais non déclarées comme
telles avant la réforme ont profité de ce régime dérogatoire ? Faut-il rappeler que nombre
d’employeurs ont profité du dispositif que vous souhaitez rétablir pour frauder, en supprimant
des éléments de rémunération tout en gonflant le volume d’heures supplémentaires ?
Toute heure travaillée, qu’il s’agisse de la première, de la dixième ou de la trente-sixième,
doit faire l’objet de prélèvements sociaux et doit être intégrée dans le revenu fiscal de
référence. C’est cela l’équité !
En réalité, cette mesure est l’exemple emblématique de l’échec de la baisse du coût du travail
comme solution appliquée depuis trente ans au problème de la compétitivité. Si nos TPE et
nos PME, qui constituent l’un des plus importants viviers d’emplois, ont des difficultés à
conduire des politiques salariales ambitieuses, ce n’est pas en raison du coût du travail mais –
leurs dirigeants nous le disent – parce qu’elles sont étranglées par les donneurs d’ordre et par
les banques ! Aussi sommes-nous favorables à la mise en place d’un impôt sur les sociétés
progressif, afin que ces entreprises ne soient pas traitées comme les grands groupes ou pire
encore.
Cependant, il faut aussi développer le service public bancaire et responsabiliser les banques
pour mettre fin à la situation de restriction du crédit qui pénalise lourdement les PME
industrielles, en particulier dans l’industrie manufacturière. Rappelons, par exemple, que
l’encours des crédits a reculé de 5,1 % entre février 2012 et février 2013.